Question de M. MALHURET Claude (Allier - Les Indépendants) publiée le 01/02/2019

Question posée en séance publique le 31/01/2019

M. Claude Malhuret. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le Venezuela possède les plus grandes réserves mondiales de pétrole, et son peuple crève de faim. Le dictateur de Caracas emprisonne et assassine : 100 morts ces jours derniers, 600 prisonniers politiques régulièrement torturés, 3 millions de réfugiés, plus de médicaments. En revanche, pour la drogue, pas de problème : le plus grand cartel de narcotrafic du monde est supervisé par les militaires vénézuéliens eux-mêmes !

Deux hommes se prétendent aujourd'hui président de la République : le castro-chaviste Maduro, arrivé au pouvoir à l'issue d'une élection truquée dénoncée dans le monde entier, et Juan Guaido, élu, lui, démocratiquement président de l'Assemblée nationale.

Maduro – cela n'étonnera personne – est soutenu par les pays ultra-démocratiques que sont la Russie, la Chine, la Turquie, Cuba, l'Iran et la Corée du Nord. (Rires sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.) Il est aussi soutenu à fond, chez nous, par le lider minimo de la France soumise à Cuba (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.), qui repère les dictateurs avec un flair infaillible : le tyranophile Mélenchon, qui dénonce les violences policières à Paris, mais supporte sans trop de douleur les centaines de morts à Caracas ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)

Guaido est reconnu par la quasi-totalité des pays d'Amérique latine et, au total, par une vingtaine de pays du monde.

L'Union européenne, qui penche pour Guaido, s'est contentée d'appeler, par ce qu'elle nomme un « ultimatum », à de nouvelles élections. Hélas, Maduro a rejeté immédiatement cet « ultimatum », ce qui n'a pour le moment entraîné aucune réaction de l'Europe. Monsieur le Premier ministre, vous me l'accorderez, un ultimatum sans conséquence, c'est évidemment un peu fâcheux…

Trois journalistes espagnols et deux journalistes français ont été arrêtés hier à Caracas. On est sans nouvelles d'eux. L'Espagne a exigé publiquement la libération immédiate de ses journalistes.

Monsieur le Premier ministre, la France et l'Union européenne vont-elles reconnaître le président Guaido avant qu'il ne soit trop tard et que la guerre civile n'éclate au Venezuela ? Le Gouvernement compte-t-il exiger publiquement la libération immédiate des journalistes français ? Avez-vous de leurs nouvelles ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 01/02/2019

Réponse apportée en séance publique le 31/01/2019

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, de quoi parlons-nous ?

Nous parlons d'un pays plongé depuis plus de trois ans dans une crise terrible, sans précédent. Ce pays potentiellement riche connaît aujourd'hui des situations de préfamine. Son économie est totalement exsangue, sa population est privée de médicaments et de l'ensemble des biens de première nécessité.

Nous parlons d'un pays qui a mis en place une répression sanglante de ses oppositions.

Nous parlons d'un pays qui, vous l'avez rappelé, emprisonne des journalistes étrangers : deux journalistes français et trois journalistes espagnols ont été arrêtés. Le Gouvernement, par la voix du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a exigé la libération immédiate des journalistes français et de leurs confrères espagnols.

Nous parlons d'un président qui revendique un second mandat sur la base d'élections, tenues au mois de mai 2018, qui ne répondaient de toute évidence à aucune des conditions essentielles de la démocratie.

Nous parlons d'un pays à la croisée des chemins depuis les manifestations massives du 23 janvier, jour qui a vu le président de l'Assemblée nationale, Juan Guaido, prêter serment en tant que président par intérim du Venezuela, en vue, a-t-il affirmé, d'organiser des élections véritablement démocratiques.

Notre responsabilité, celle de la France et celle de l'Union européenne, est de veiller au respect de la volonté du peuple vénézuélien. C'est dans cette perspective que, le 26 janvier dernier, le Président de la République a appelé à l'annonce, dans un délai de huit jours, de la convocation de nouvelles élections. À défaut, nous reconnaîtrons, en pleine coordination avec nos partenaires européens, l'Allemagne, l'Espagne, le Royaume-Uni, Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

C'est également le sens de la proposition formulée par l'Union européenne de créer un groupe de contact international. Nous sommes convaincus que la seule solution viable à cette crise est politique, négociée et pacifique. Il y faudra la coopération des organisations régionales et des pays voisins du Venezuela. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, est aujourd'hui même à Bucarest avec ses homologues européens pour consolider et affirmer cette position commune face à la crise.

La situation humanitaire est préoccupante. Plus de 3 millions de Vénézuéliens ont quitté leur pays. L'ONU estime que ce chiffre pourrait monter jusqu'à 5,5 millions d'ici à la fin de l'année. C'est pourquoi l'Union européenne a débloqué une enveloppe de 55 millions d'euros d'aide humanitaire depuis 2018.

Enfin, et je sais que les membres du Sénat y seront particulièrement sensibles, le Gouvernement se mobilise pour garantir la protection des quelque 4 000 ressortissants français demeurés sur place. Nous veillons à leur sécurité. Toutes les options, y compris celle de rapatrier ceux qui demanderaient à l'être si la situation devait empirer, sont étudiées. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

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