Question de M. KAROUTCHI Roger (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 31/01/2019

M. Roger Karoutchi interroge M. le Premier ministre concernant les suites qu'il compte donner à l'étude adoptée le 26 avril 2018, par l'assemblée générale plénière du Conseil d'État, concernant « la prise en compte du risque dans la décision publique ».

Dans leur rapport, les conseillers d'État ont évoqué diverses solutions pour que la mission de protection des populations, qui incombe à l'État, soit efficacement réalisée.

Leurs trois premières propositions sont : d'« énoncer une stratégie pour une action publique audacieuse » ; de « renforcer la prospective publique » ; et de « développer la capacité d'anticipation dans les ministères et dans les principales collectivités territoriales ».

Président de la délégation à la prospective au Sénat, il lui demande quels outils dans ce sens vont être développés par ses services.

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Réponse du Premier ministre publiée le 21/03/2019

Plusieurs éléments mis en lumière par l'étude du Conseil d'État relative à « la prise en compte du risque dans la décision publique » relèvent d'un constat partagé. L'action publique est soumise à de fortes évolutions : changement d'échelle du risque (globalisation), modification des attentes du public (forte demande de sécurité mais volonté accrue d'autonomie), insuffisante valorisation de la prise de risque dans l'action publique, capacité d'analyse des agents publics de terrain insuffisamment valorisée. L'analyse des enjeux propres à chaque champ de l'action publique a été pleinement intégrée lors de l'élaboration des plans de transformation ministériels qui ont été présentés lors du deuxième comité interministériel de la transformation publique (CITP) du 29 octobre 2018. S'agissant de la prospective publique, la création du Commissariat général à la stratégie et à la prospective, devenu « France stratégie », a permis de réunir et de coordonner plusieurs instances d'étude et de réflexion. France Stratégie a notamment pour mission de dessiner des trajectoires de moyen terme et des scénarios de long terme pour mesurer les effets des politiques publiques, identifier les défis auxquels la France doit se préparer et proposer des pistes pour renouveler le débat et l'action publics. Ses derniers travaux ont notamment porté sur les blocages de l'économie française, la transformation des métiers ou encore la transition écologique et les nouvelles technologies comme la voiture électrique. Au-delà des trois premières propositions mentionnées par la question, plusieurs recommandations du Conseil d'État sont intégrées dans les chantiers de transformation publique en cours. Les propositions n° 15 (déterminer le bon niveau de décision en fonction des risques encourus) et n° 16 (sensibiliser les décideurs publics sur les marges de manœuvre dont ils disposent pour prendre leur décision) sont en totale cohérence avec le chantier conduit par le Gouvernement sur la responsabilisation des managers publics. Cette responsabilisation passe par une analyse des risques et une déconcentration de la décision au plus près du terrain. C'est l'objet des décrets du 29 décembre 2017 relatifs à l'expérimentation territoriale d'un droit de dérogation reconnu au préfet et aux directeurs généraux des Agences régionales de santé qui les autorisent dans certaines matières à prendre des décisions dérogeant à la réglementation en s'appuyant sur une analyse des risques qui tienne compte des circonstances locales. C'est également l'objet de la circulaire du Premier ministre du 24 juillet 2018 sur la déconcentration et l'organisation des administrations centrales qui vise à renforcer la capacité d'expertise et de décision des services déconcentrés. Privilégier des normes fondées sur des objectifs et contrôler leur mise en œuvre selon le principe de proportionnalité (proposition n° 14) est l'objet de l'habilitation à prendre une ordonnance pour faciliter la réalisation de projets de construction (article 49 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance).  La proposition n° 19 (renforcer l'évaluation ex-post des décisions) s'inscrit dans le mouvement de généralisation des évaluations et de transparence des résultats des politiques publiques sur laquelle travaille actuellement la direction interministérielle de la transformation publique. D'autres propositions qui ont trait au recrutement et à la valorisation de la prise de risque en matière RH - notamment les propositions n° 20 (prendre en compte l'aptitude à l'audace et la créativité dans le recrutement des agents publics) ; n° 23 (valoriser dans la carrière les fonctions exposées aux risques) et n° 25 (prendre en compte l'exposition au risque dans l'évaluation individuelle des agents) - trouveront une traduction concrète dans le projet de loi de transformation de la fonction publique qui sera discuté à l'Assemblée nationale au printemps. Enfin, la proposition n° 29 (engager une réflexion sur la responsabilité des ordonnateurs) est en cohérence avec le chantier de modernisation de la gestion budgétaire et comptable actuellement conduit par la direction du budget et la direction générale des finances publiques. Ainsi, le Gouvernement est attentif à promouvoir une analyse stratégique du risque et à améliorer sa prise en compte, sous ses différentes formes, dans la conception des différentes politiques publiques.

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