Question de Mme SOLLOGOUB Nadia (Nièvre - UC) publiée le 22/03/2018

Mme Nadia Sollogoub attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur la situation médicale de la Nièvre, département particulièrement et dramatiquement concerné par la baisse de démographie médicale, où les patients rencontrent désormais les plus grandes difficultés pour se faire soigner. Pour mémoire, la densité de médecins généralistes y est de 82 pour 100 000 habitants alors qu'elle est de 96 en Bourgogne-Franche-Comté et de 104 en France. La perte de chance des patients en situation d'urgence vitale y est la plus élevée de la région Bourgogne-Franche-Comté, alors que parallèlement, l'avenir de certains services est menacé faute, semble-t-il de personnel soignant. L'absence d'urgentiste est la raison invoquée pour l'éventualité de la fermeture des urgences de nuit à l'hôpital de Clamecy et l'absence de pédiatre pour la fermeture de la maternité de Cosne-Cours-sur-Loire. Face à cette situation, il est bien évident que les habitants et les élus de la Nièvre ne pourront pas se contenter de prendre leur mal en patience et serrer les dents en croisant les doigts, en attendant l'arrivée promise en 2025 de médecins, espérons-le, en nombre suffisant, encore que l'accroissement du nombre n'offre aucune garantie sur la répartition territoriale. Outre le besoin pressant de permettre à des étudiants de la Nièvre de se former à la médecine par le biais d'une antenne de première année commune aux études de santé (PACES) de proximité à Nevers, plusieurs mesures immédiates pourraient être mises en œuvre. Tout d'abord, il apparaît indispensable d'ouvrir des stages de médecine générale dans la Nièvre à des étudiants des facultés de médecine de Clermont-Ferrand et de Paris, qui ne sont qu'à 200 kilomètres chacune et qui sont très fréquentées par les étudiants nivernais pour d'évidentes raisons d'accès, en train notamment ; de permettre également à des étudiants de la faculté de Dijon de faire une partie de leur cursus à l'hôpital de Nevers, selon l'ancien modèle des hôpitaux périphériques, qui a permis à de nombreux jeunes étudiants de « s'ancrer » dans un territoire rural où ils sont restés ; de faciliter, enfin, la labellisation de deux à trois sites pluridisciplinaires comme « Maison de santé universitaire » dans le département, au sens où le prévoit l'arrêté du 18 octobre 2017, ce qui faciliterait grandement la réalisation de stages en médecine ambulatoire en milieu rural profond. Elle lui demande, en conséquence, de bien vouloir lui indiquer si elle entend faire explorer ces pistes d'évolution concrètes ou, à défaut, de lui préciser les orientations qu'elle entend privilégier.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées publiée le 20/06/2018

Réponse apportée en séance publique le 19/06/2018

Mme Nadia Sollogoub. Madame la secrétaire d'État, je suis élue dans la Nièvre, département particulièrement et dramatiquement concerné par la baisse de démographie médicale et où les patients rencontrent désormais les plus grandes difficultés pour se faire soigner.

Pour mémoire, la densité de médecins généralistes y est de 82 pour 100 000 habitants, alors qu'elle est de 96 en Bourgogne-Franche-Comté et de 104 en France. La perte de chance des patients en situation d'urgence vitale y est la plus élevée de la région Bourgogne-Franche-Comté, alors que, parallèlement, l'avenir de certains services est menacé faute, semble-t-il, de personnel soignant. Ainsi, l'absence d'urgentiste est la raison invoquée pour la fermeture éventuelle des urgences de nuit à l'hôpital de Clamecy, et l'absence de pédiatre pour la fermeture de la maternité de Cosne-sur-Loire.

Face à cette situation, il est bien évident que les habitants et les élus de la Nièvre ne pourront pas se contenter de prendre leur mal en patience et de serrer les dents, les doigts croisés, en attendant l'arrivée promise en 2025 de médecins, espérons-le, en nombre suffisant, encore que l'accroissement du nombre n'offre aucune garantie de répartition territoriale. Outre l'ouverture d'une antenne de PACES de proximité à Nevers pour permettre à des étudiants de la Nièvre de se former à la médecine, ce qui est un besoin pressant, plusieurs mesures immédiates pourraient être mises en œuvre.

Tout d'abord, il paraît indispensable d'ouvrir des stages de médecine générale dans la Nièvre à des étudiants des facultés de médecine de Clermont-Ferrand, de Tours et surtout de Paris, qui ne sont qu'à 200 kilomètres chacune et qui sont très fréquentées par les étudiants nivernais pour d'évidentes raisons d'accès, en transport ferroviaire notamment.

Il faut ensuite permettre à des étudiants de la faculté de médecine de Dijon de suivre une partie de leur cursus à l'hôpital de Nevers, selon l'ancien modèle des hôpitaux périphériques, qui a permis à de nombreux jeunes étudiants de s'ancrer dans un territoire rural, où ils sont restés par la suite.

Il importe enfin de faciliter la labellisation de deux à trois sites pluridisciplinaires comme « maisons de santé universitaires » dans le département, au sens où le prévoit l'arrêté du 18 octobre 2017, ce qui faciliterait grandement la réalisation de stages en médecine ambulatoire en milieu rural profond.

Je vous demande, en conséquence, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir m'indiquer si le Gouvernement entend faire explorer ces pistes d'évolution concrètes ou, à défaut, de me préciser les orientations qu'il entend privilégier.

(M. David Assouline remplace Mme Catherine Troendlé au fauteuil de la présidence.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Nadia Sollogoub, votre question pose le sujet du lien entre la carte des formations en santé et la lutte contre les déserts médicaux.

Vous l'avez rappelé, il n'existe pas de dispositif indiscutable permettant de fixer les professionnels de la santé dans la région dans laquelle ils ont été formés. Cette problématique appelle bien évidemment une démarche globale, qui doit être menée conjointement par l'État et les collectivités territoriales concernées. À cette fin, et s'agissant du volet « formation », plusieurs dispositifs sont mis en œuvre.

Dans l'état actuel de l'organisation de la PACES - première année commune aux études de santé - une antenne délocalisée de la PACES de Dijon à Nevers apparaît difficile, notamment du fait de la difficulté d'y assurer un tutorat, élément essentiel d'égalité des chances de réussite.

La réflexion en cours dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé inclut une réflexion sur l'admission dans les études de santé, et nous aurons la préoccupation qu'une offre de proximité soit proposée à tous les lycéens pour leur permettre d'accéder à ces études quel que soit leur territoire d'origine.

S'agissant des stages de médecine générale, il apparaît qu'ils sont actuellement rattachés à une faculté de médecine, en fonction du découpage territorial. Cela permet l'inclusion des maîtres de stage de médecine générale dans la dynamique pédagogique de l'université, ainsi que la gestion de la répartition des étudiants par les ARS, les agences régionales de santé.

Néanmoins, les élus de plusieurs territoires, situés plus loin de leur ville universitaire de rattachement que d'une autre ville ayant une faculté de médecine, ont fait part des difficultés que cela engendre pour développer des stages de médecine générale. Un travail est donc en cours avec le ministère des solidarités et de la santé pour voir comment la règle pourrait être assouplie sans pour autant complexifier l'ensemble du dispositif.

S'agissant du modèle des hôpitaux périphériques, cette disposition existe toujours pour les stages d'interne. L'évolution de la formation de second cycle permet d'accroître les temps de stage hors des CHU, qu'ils soient effectués en hôpital périphérique ou en médecine générale. L'accent est également mis sur la nécessité que le service sanitaire qui se met en place atteigne prioritairement les territoires en difficulté d'accès à la prévention.

En lien avec les collectivités territoriales, nous souhaitons orienter l'ensemble de la formation des professionnels de santé, notamment des médecins, vers une plus grande part d'activité hors CHU, et construire les conditions permettant de découvrir et d'adopter des modes d'exercice répondant aux besoins de la population.

Des initiatives comme le dispositif Ambition PACES en région Centre, comme les antennes délocalisées de Pau ou du Havre, comme les internats ruraux développés en Aveyron, comme le recrutement de maîtres de stage en Mayenne, montrent que c'est possible. Nous avons l'ambition que les réformes à venir, tant de l'entrée dans les études de santé que du second cycle, facilitent ces dispositifs.

Les services du ministère de l'enseignement supérieur, ainsi que ceux du ministère des solidarités et de la santé, sont à la disposition des élus, à votre disposition, donc, pour examiner les projets existants ou en gestation dans votre territoire.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour répondre à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nadia Sollogoub. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de nous avoir présenté tous ces dispositifs. Bien évidemment, nous espérons pouvoir en bénéficier dans la Nièvre, car ils nous semblent tout à fait adaptés à notre particularisme. En effet, la Nièvre est séparée de la faculté de Dijon par la barrière du Morvan, qui représente une difficulté géographique d'accès. C'est donc compliqué pour les étudiants de la Nièvre d'aller faire médecine à la faculté de Dijon. C'est pourquoi nous insistons pour avoir une PACES dans notre département.

Quant à l'argument du tutorat dans le cursus des études, il est pour nous difficilement recevable, comparé à la nécessité pour les jeunes d'avoir de bonnes conditions d'accès à une faculté. C'est incomparablement plus important que la possibilité de bénéficier d'un tutorat dans leur cursus…

Je le répète, les jeunes originaires de la Nièvre vont faire leurs études de médecine à Paris, à Clermont-Ferrand ou à Tours, mais il faut qu'on leur donne la possibilité de faire leur stage de médecine dans la Nièvre, sinon ils s'ancrent dans d'autres départements et ne reviennent jamais. Vous le voyez, il s'agit bien d'une problématique particulière.

Je voudrais insister sur le fait que, dans des territoires comme le nôtre, avec une faible ressource de professionnels de santé, nous sommes source de proposition. Je vous rappelle que c'est dans la Nièvre qu'a ouvert la première maison de santé pluridisciplinaire. Nos propositions doivent donc être entendues comme constructives ; nous tentons simplement de nous organiser face à une difficulté matérielle concrète.

Je me permets donc d'insister sur la PACES. S'agissant des stages, la possibilité juridique de conventionner existe déjà, comme me l'ont confirmé hier des professionnels de santé.

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