Question de M. MIZZON Jean-Marie (Moselle - UC) publiée le 25/01/2018

M. Jean-Marie Mizzon interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés du monde agricole en Moselle. Deux suicides concomitants de deux agriculteurs, en décembre 2017, ont créé un vaste mouvement d'émotion dans tout le département mosellan en grande partie, aujourd'hui encore, largement rural. En proie à une très grande détresse financière, ces deux hommes, dans la force de l'âge, n'ont pu supporter des demandes répétées de remboursement de prêts qu'ils ne pouvaient, en dépit de tous leurs efforts, honorer et, surtout, de ne pouvoir vivre décemment de leur métier. À l'aube du vingt-et-unième siècle, et alors que la traçabilité des produits est recherchée par le consommateur principalement parce qu'elle permet de déterminer une production locale et de qualité pour laquelle il est prêt à payer le prix, il lui demande quelles mesures il envisage enfin de prendre afin d'éviter de tels drames.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 15/03/2018

L'identification et l'accompagnement des exploitants en difficulté constituent un sujet essentiel pour lequel une réflexion a été initiée par les services du ministère chargé de l'agriculture à l'automne 2016, avec la mise en place d'un groupe de travail. Les réunions ont permis, en concertation avec l'ensemble des parties prenantes, d'aboutir au constat de la nécessité de renouveler la procédure d'identification et d'accompagnement des agriculteurs en difficulté avec notamment la mise en place de « cellules d'accompagnement » dédiées et des dispositifs d'aide rénovés. Une instruction technique relative à la procédure a été adressée aux préfets de département fin décembre 2017. Elle permet de mettre dès à présent en œuvre la nouvelle organisation requise. Les autres évolutions réglementaires sont en cours et permettront, dans les prochains mois, de disposer d'un meilleur accompagnement des exploitants en difficulté. Sur le plan social, une enveloppe exceptionnelle de 4 millions d'euros a été allouée pour l'année 2017 à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (MSA) pour financer, en complément des crédits d'action sanitaire et sociale traditionnels, le coût du remplacement des exploitants agricoles victimes d'épuisement professionnel. La mobilisation de l'ensemble des acteurs au sein des territoires a favorisé le succès de ce dispositif qui constitue une action de prévention avant une dégradation de l'état de santé, notamment au plan psychologique. Compte tenu de la réussite de cette opération et de son utilité sociale pour les publics fragilisés, les caisses de MSA peuvent, à compter de 2018, faire figurer cette aide dans leur programme d'actions, en y affectant une part des crédits d'action sanitaire et sociale alloués par la convention d'objectifs et de gestion qui s'élèvent à plus de 150 millions d'euros par an. Enfin, dès 2011, la prévention du suicide a été déclarée grande cause nationale et la caisse centrale de la MSA a mis en œuvre un programme national d'actions. Après un premier plan couvrant la période 2011-2014, un second plan d'action a été mis en place pour la période 2016-2020. Celui-ci a repris et amélioré les mesures du plan initial en tenant compte de l'évaluation qui en avait été faite. La première mesure, consistant pour les caisses de MSA à recueillir des données chiffrées sur la réalité du suicide chez les exploitants agricoles, a été actualisée et complétée en étudiant également la population des salariés agricoles. La seconde mesure, mettant à disposition des assurés un service Agri'écoute fonctionnant sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre, afin de répondre aux alertes de détresse et de procurer aux personnes concernées un accompagnement, une orientation voire un suivi, a été renforcée grâce à une meilleure formation des écoutants, à l'amélioration du dispositif technique et à une communication régulière. Enfin, la troisième mesure prévoyant la création par chaque caisse de MSA de cellules pluridisciplinaires de prévention afin de repérer, d'accompagner et d'orienter les agriculteurs en difficulté a bénéficié d'un approfondissement des partenariats, en particulier avec les agences régionales de santé. L'ensemble du plan fait l'objet d'un suivi et d'une évaluation par la cellule suicide de la caisse centrale de la MSA. De manière plus générale, la faiblesse des prix de vente auxquels sont soumis les agriculteurs est une préoccupation constante du Gouvernement ainsi que, plus globalement, les relations entre la production agricole, les industriels et les distributeurs. Le Gouvernement a placé ce sujet au cœur des états généraux de l'alimentation (EGA) lancés le 20 juillet 2017 par le Premier ministre en présence du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, du ministre de la transition écologique et solidaire et du secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et qui se sont tenus tout au long du deuxième semestre. Les EGA avaient notamment pour objectif de travailler sur la création et la répartition de la valeur au sein de la chaîne alimentaire, avec toutes les parties prenantes : agriculteurs, industries agro-alimentaires, commerce et grande distribution, élus, experts, opérateurs de l'État, partenaires sociaux, associations de consommateurs et représentants de la société civile. Le Président de la République, au cours de son discours d'étape sur les EGA le 11 octobre 2017 au marché de Rungis, a présenté un certain nombre de mesures sur lesquelles le Gouvernement souhaite s'engager pour que les exploitants agricoles puissent vivre du prix payé et pour la transformation des systèmes agricoles en vue d'une meilleure performance environnementale, sociale, économique et sanitaire. Ces éléments sont désormais inscrits au sein de la feuille de route EGA, exposée par le Premier ministre lors de la journée de clôture du 21 décembre 2017. Le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, présenté au Conseil des ministres le 31 janvier 2018 est le premier outil de mise en œuvre de cette feuille de route.

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