Question de M. CHEVROLLIER Guillaume (Mayenne - Les Républicains) publiée le 21/12/2017

M. Guillaume Chevrollier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la concurrence déloyale que permettra l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et certains pays du Mercosur (l'Argentine, le Brésil, le Paraguay et l'Uruguay). L'importation massive de 100.000 à 130.000 milliers de tonnes de viandes envisagée par l'accord va créer un déséquilibre sur les marchés européens, et risque d'affaiblir très fortement la filière viande bovine française. Il rappelle que l'Amérique du Sud est la zone géographique la plus compétitive dans ce secteur, et notamment le Brésil, ou près de 13 milliards de dollars d'exportation ont été générés en 2016. Les éleveurs français sont inquiets. Ils pointent du doigt les conditions de production de la viande sud-américaine, qui ne sont pas conformes aux réglementations fixées par l'Union européenne (recours aux hormones, farines animales, organismes génétiquement modifiés), et dénoncent le manque de fiabilité du système de traçabilité des animaux. Ils s'inquiètent du nombre élevé de destructions potentielles d'emplois d'éleveurs (estimés entre 25 000 et 30 000), conséquence directe de la signature du traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada et du marché commun du Sud, couramment abrégé Mercosur. Il souhaite connaître les mesures qui seront mises en place pour préserver le modèle d'élevage français et se demande si la création d'une commission d'enquête de contrôle sanitaire de la viande bovine sud-américaine pourrait être envisageable.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 12/04/2018

L'Union européenne (UE) négocie actuellement un accord de libre échange avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) avec un objectif affiché de conclusion au printemps 2018. Les enjeux sont importants pour certaines filières agricoles françaises, notamment la filière bovine, compte tenu de la compétitivité des filières du Mercosur. Pleinement conscient de ces sensibilités, le Gouvernement est mobilisé pour assurer la défense des intérêts français et européens et ainsi garantir la préservation du dynamisme économique des territoires. La France, soutenue par d'autres États membres, considère ainsi que la conclusion de l'accord UE-Mercosur est tributaire de l'équilibre entre l'ouverture du marché et la protection des filières sensibles agricoles dans la négociation, en particulier, le bœuf, l'éthanol, le sucre et les volailles. Concernant la viande bovine, l'UE a proposé à l'automne 2017 un contingent de 70 000 tonnes équivalent carcasses (tec). Face à la pression du Mercosur pour élever ce quota au-delà de 100 000 tec, la France demande que ce contingent soit le plus limité possible et ne s'écarte pas significativement de 70 000 tec. En cohérence avec les actions décidées dans le cadre du plan d'action sur la mise en œuvre de l'accord économique et commercial global (CETA), le Gouvernement fait en outre valoir que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir (Australie, Nouvelle-Zélande, Mexique…). Il s'est également mobilisé pour l'ajout de mesures permettant de rétablir des conditions de concurrence équitables entre les producteurs français et ceux des pays du Mercosur (mécanisme de sauvegarde et conditions non tarifaires liées aux modes de production). Concernant le volet sanitaire et phytosanitaire, des audits ont été réalisés au Brésil par les services de la Commission européenne en 2017 et 2018 pour évaluer la fiabilité de la certification des exportations vers l'UE. Le Gouvernement sera particulièrement vigilant pour que soit garantie la fiabilité du système sanitaire du Mercosur avant la conclusion de l'accord. En tout état de cause, l'ensemble des importations de viande en provenance du Mercosur devront respecter, comme c'est le cas aujourd'hui, les préférences collectives européennes pour entrer sur le marché européen : les viandes issues d'animaux traités avec des hormones ou promoteurs de croissance resteront par exemple strictement interdites. La Commission européenne doit poursuivre le travail pour atteindre le résultat escompté. Au stade final de cette négociation, le Mercosur devra démontrer qu'il peut proposer à l'UE un accord protecteur de ses sensibilités et synonyme d'avancées pour les secteurs agricoles offensifs (vins et spiritueux, produits laitiers). Le Gouvernement sera attentif jusqu'à la conclusion de l'accord pour préserver les intérêts des filières agricoles françaises.

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