Question de M. BOTREL Yannick (Côtes-d'Armor - Socialiste et républicain) publiée le 14/09/2017

M. Yannick Botrel appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés générées par le modèle de financement des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) et sur les conséquences pratiques qui en découlent.

En effet, la préservation des terres agricoles est un enjeu majeur dans la plupart, voire dans la totalité, des territoires de notre pays et le modèle de financement des SAFER apparait aujourd'hui sous-optimal. Les SAFER sont ainsi limitées financièrement pour accomplir leurs missions de service public conférées par la loi, et notamment assurer la transparence des marchés fonciers ruraux.

L'action des SAFER a pour effet un renforcement de l'activité économique et de la dynamique des territoires ruraux et périurbains sur lesquels elles interviennent.

Leur financement est pourtant presque exclusivement (95 % en 2016) issu des seuls attributaires SAFER. À titre de comparaison, le modèle de financement des établissements publics fonciers (EPF) est assis sur la contribution de l'ensemble du territoire de compétence de l'EPF.

A fortiori, le désengagement financier de l'État depuis 2006, qui devrait une nouvelle fois s'accroître en 2018, renforce cette dynamique négative et limite les capacités d'action des SAFER au détriment d'un aménagement rural pertinent et efficace.

Ainsi, il l'interroge sur la position du Gouvernement en matière de place des SAFER dans l'aménagement rural de nos territoires.

Il lui demande également de mettre en œuvre un système de financement pérenne au profit des SAFER, afin que celles-ci puissent pleinement jouer leur rôle fondamental au cœur de la ruralité. Si plusieurs pistes de financement ont à ce jour été évoquées, aucune n'a fait l'objet d'une analyse détaillée suffisante pour mettre en œuvre de solutions concrètes de financement. Sa question porte donc sur la position du Gouvernement en la matière.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 22/11/2017

Réponse apportée en séance publique le 21/11/2017

M. Yannick Botrel. Ma question concerne les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, les SAFER, qui jouent un rôle très important dans l'économie agricole, a fortiori dans un contexte de hausse très marquée du prix du foncier que nous sommes déjà un certain nombre ici à avoir souligné.

Il s'agit là d'un enjeu fort de la gestion du foncier : la préservation de nos terres agricoles est un objectif majeur, qui mérite de faire l'objet d'un traitement approfondi.

Mesurant l'importance du rôle des SAFER, j'ai souhaité vous interpeller, monsieur le ministre, sur ce qui est, à mes yeux, un problème central. Il faut bien appréhender les difficultés qu'entraînent le mode de financement actuel des SAFER et les conséquences qui en découlent.

Il apparaît que le modèle de financement des SAFER est aujourd'hui inadapté. Ces dernières sont, de fait, limitées financièrement, ce qui nuit à l'accomplissement des missions de service public qui leur sont conférées par la loi, notamment assurer la transparence des marchés fonciers ruraux.

Leur financement est actuellement presque exclusivement issu – à hauteur de 95 % en 2016 – des seuls attributaires SAFER. À titre de comparaison, le modèle de financement des établissements publics fonciers est assis sur la contribution de l'ensemble du territoire de compétence de l'EPF.

Par ailleurs, le désengagement financier de l'État depuis 2006, qui va une nouvelle fois s'accroître en 2018, limite encore plus les capacités d'action des SAFER, au détriment de la qualité de l'accomplissement de leurs missions.

Monsieur le ministre, que comptez-vous proposer pour assurer l'avenir et le bon fonctionnement des SAFER ? Envisagez-vous de faire évoluer leur système de financement afin qu'elles puissent pleinement jouer leur rôle ?

Il s'agit non de proposer un palliatif au problème posé, mais bien d'apporter une réponse de fond, c'est-à-dire d'assurer des moyens de financement suffisants et surtout pérennes.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur, vous venez de le rappeler, les SAFER jouent un rôle absolument essentiel pour le développement de l'agriculture en France, le renouvellement des générations, la régulation et la maîtrise du marché foncier rural, le développement local et la préservation de l'environnement.

Le rôle des SAFER en qualité d'opérateurs fonciers a d'ailleurs été réaffirmé par la loi du 13 aout 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, qui a notamment renforcé leurs modalités d'intervention – extension du droit de préemption des SAFER à l'usufruit et à la nue-propriété de biens ruraux et à l'intégralité des parts ou actions d'une société ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole, à certaines donations faites au profit d'une personne extérieure à la famille du donataire.

Outre les rémunérations perçues sur les opérations qu'elles réalisent, les SAFER bénéficiaient d'une subvention publique.

Ce financement, dont la suppression a été décidée par le Gouvernement en 2016, a fait l'objet de diverses mesures compensatoires d'ordre financier et fiscal.

Par ailleurs, un financement est maintenu depuis 2017 pour les SAFER qui présentent des difficultés d'accès au marché foncier agricole, en l'occurrence les SAFER de Corse, de Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion.

À ce jour, il n'est pas envisagé de rétablir une logique de financement public des SAFER. En revanche, une réflexion globale sur l'ensemble des outils de régulation devrait intervenir en 2018. Comme vous le savez, une mission parlementaire sur le foncier est prévue et sera conduite par le député Potier. Ce sera également l'occasion de réfléchir au positionnement des SAFER, à leur statut actuel – je rappelle que ce sont des sociétés anonymes à but non lucratif – et à leur rôle primordial dans la nécessaire évolution de la gouvernance du foncier.

À toutes fins utiles, je rappelle que, en 2016, les SAFER ont acquis 10 500 biens représentant une surface totale de 93 800 hectares, soit une hausse de 12 % par rapport à 2015, pour une valeur globale de 1,27 milliard d'euros. Par ailleurs, 36 % des surfaces rétrocédées, soit 34 400 hectares, ont été consacrées à l'installation.

Nous sommes d'accord sur le fait que l'action des SAFER est essentielle pour l'aménagement de notre territoire et la compétitivité de notre agriculture.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.

Nos analyses convergent largement, si ce n'est totalement. J'ai bien entendu vos explications et je prends acte de la création annoncée d'une mission parlementaire sur cette question. Nous espérons tous qu'elle débouchera sur des propositions et que le Gouvernement s'emparera du sujet après que le Parlement l'aura examiné de près. Il faudra bien évidemment avancer pour permettre aux SAFER de continuer à jouer leur rôle, essentiel pour l'agriculture.

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