Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 14/04/2016

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les conditions d'hébergement collectif des travailleurs saisonniers et la nécessité de modifier les dispositions des articles R. 716-7 et R. 716-11 du code rural qui imposent des conditions extrêmement contraignantes concernant ces conditions d'hébergement, notamment pour les vendangeurs agricoles. Chaque année, ce sont près de 300 000 personnes qui sont embauchées au moment des vendanges dans le cadre d'un contrat de saisonnier. Le quart de ces employés est hébergé par les employeurs eux-mêmes. Or, lors des dernières vendanges, l'inspection du travail a remis en cause des décisions prises par les directions du travail des départements concernés qui permettaient de déroger aux dispositions extrêmement contraignantes (et inadaptées à des missions de courte durée) en matière d'hébergement des saisonniers agricoles. Ainsi, certaines propriétés agricoles ont dû, cette année, renoncer à faire venir des équipes entières de vendangeurs. Pour les régions productrices de Champagne, ce sont entre 110 000 et 120 000 saisonniers recrutés chaque année qui sont potentiellement concernés. La mise aux normes des locaux impliquerait pour ces propriétés de tels investissements qu'elles ne sont pas en mesure de les réaliser, pour une utilisation effective de quinze jours par an. Cette instabilité juridique est extrêmement dommageable pour, à la fois, les vignerons, les saisonniers, mais aussi l'État en perdant sur les cotisations sociales du fait du recours à des saisonniers étrangers (soit 3 à 5 millions d'euros). Les vignerons ont besoin de la stabilité juridique nécessaire à une bonne gestion en amont, et attendent des conclusions du groupe de travail, dit « saisonniers », qu'elles soient rapidement annoncées et en adéquation avec la spécificité de la vendange.

- page 1534


Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 23/06/2016

L'hébergement collectif des salariés saisonniers en agriculture est régi par les dispositions des articles R. 716-6 à R. 716-25 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) qui prévoient un hébergement en résidence fixe ou en résidence mobile ou démontable assorti d'une superficie minimale par occupant et d'une interdiction des lits superposés. Ces mesures ont été adoptées de concert avec les partenaires sociaux agricoles, suite à l'accord national sur le travail saisonnier du 18 juillet 2002, étendu par arrêté ministériel du 28 octobre 2002. Au cas par cas, des possibilités de dérogations par l'inspection du travail ont été ouvertes pour toute durée d'embauche inférieure à trente jours sur une période de douze mois consécutifs, durée d'embauche déjà modifiée en 2009 et portée de 12 jours à 30 jours afin d'ouvrir ces possibilités de dérogation aux vendangeurs notamment (cf. article R. 716-16 du CRPM). Ainsi, il est d'ores et déjà possible pour tout employeur qui en ferait la demande à l'inspecteur du travail de déroger à tout ou partie de certaines de ces dispositions. Pour l'hébergement collectif en résidence fixe par exemple, l'inspecteur du travail peut accorder une dérogation à la superficie des pièces destinées au couchage et au nombre d'occupants (dérogation à l'article R. 716-7) et aux équipements sanitaires définis à l'article R. 716-11. Un alignement sur les normes en vigueur dans le secteur du bâtiment et des travaux publics est souvent recherché par l'inspecteur du travail : la contrainte de surface peut donc passer de 9 m2 à 6 m2 pour le 1er occupant et les suivants. Les demandes concernant les sanitaires sont souvent acceptées. En revanche, les modifications des surfaces de réfectoire, qui ne font pas partie du champ des dérogations possibles, sont refusées. Il est à noter que des dispositions relatives à l'hébergement collectif en résidence mobile ou démontable ont été prévues, également assorties de la possibilité d'y déroger sur autorisation de l'inspecteur du travail compétent (article R. 716-25). À ce stade, un abaissement significatif des normes actuellement applicables, pourrait se heurter au principe constitutionnel du droit à un logement décent qui découle des 10ème et 11ème alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel il n'est ni souhaitable ni possible de déroger. En revanche et par mesure de simplification administrative, les demandes de dérogation aux règles d'hébergement collectif des salariés saisonniers que peut accorder, sous certaines conditions, l'inspecteur du travail, sont désormais soumises au principe du « silence vaut accord », en application de la loi n°  2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.

- page 2785

Page mise à jour le