Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - Socialiste et républicain) publiée le 24/12/2015

Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conditions d'installation de l'assemblée territoriale de Corse.
Le nouveau président de l'assemblée territoriale s'est permis de prononcer son discours d'installation en langue corse.
Cette pratique ne paraît pas conforme aux lois de la République qui fixent le français comme langue officielle dans les instances publiques. Par ailleurs, au-delà du non-respect de la loi, qui ne semble pas préoccuper particulièrement le nouveau président, cette attitude est préjudiciable au principe d'égalité : en effet, il est évident que l'ensemble des habitants de la Corse ne maîtrisent pas cette langue régionale et n'ont ainsi pas la faculté de comprendre les propos de leur élu.
Elle lui demande quelle mesures le Gouvernement compte prendre pour faire respecter la loi de la République et pour répondre à cet incident qui n'est pas anodin à un moment où la défense des principes et valeurs de la République s'impose à tous.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 15/09/2016

Le Conseil d'État a rappelé en 2006 que les élus, dans le cadre institutionnel, n'ont le droit de s'exprimer qu'en français, en annulant le règlement intérieur de l'assemblée de Polynésie qui conférait aux élus le droit de s'exprimer en séance plénière de cette assemblée dans une autre langue que la langue française (CE, 29 mars 2006, n°  282335). S'agissant de la séance d'installation de l'Assemblée de Corse, l'article L. 4422-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que, lors de sa première réunion, l'Assemblée, présidée par son doyen d'âge, les deux plus jeunes membres faisant fonction de secrétaires, élit en son sein au scrutin secret son président. Si ce vote se déroule après des débats ayant eu lieu en français, la légalité de l'acte ne serait pas remise en cause, quand bien même le discours de remerciement du président élu de l'assemblée de Corse, postérieur à l'acte juridique et donc non susceptible d'avoir influencé le vote, se tiendrait dans une autre langue que le français. De même, l'article L. 4422-9 du même code dispose qu'aussitôt après l'élection du président et sous sa présidence, l'Assemblée procède à l'élection des membres de la commission permanente sous la même condition de quorum que celle prévue à l'article L. 4422-8 du CGCT. Si cette élection est réalisée en langue française, elle ne devrait pas pouvoir être rattachée au discours de remerciement et de prise de fonctions du président, qui n'est, en tout état de cause, pas prévu par les textes, et ne constitue pas en tant que tel un acte susceptible d'être déféré au juge administratif. Dans de telles conditions, le discours de remerciement n'intervient pas dans le processus d'élaboration et d'adoption des délibérations, processus qui doit avoir lieu en français. À l'inverse, si une part significative des débats préalables au vote, permettant d'éclairer le scrutin, avait lieu en langue corse, alors, en cas de déféré devant la juridiction administrative, le juge pourrait annuler ces décisions sur le fondement d'un raisonnement analogue à celui du Conseil d'État dans la décision précitée.

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