Question de M. GILLOT Jacques (Guadeloupe - Socialiste et républicain) publiée le 08/10/2015

M. Jacques Gillot attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur l'impact du changement climatique outremer.
Du 30 novembre au 11 décembre 2015, la France accueillera la 21e conférence des parties de la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21).
L'objectif de la COP 21 est de parvenir à un accord applicable à 195 pays à compter de 2020, juridiquement contraignant et permettant de respecter l'objectif de contenir le réchauffement climatique à 2° centigrades.
La réussite de cette conférence de Paris nécessite que tous les pays s'engagent par le biais de contributions nationales à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Mais cette réussite est également conditionnée par la montée en puissance des transferts financiers des pays développés vers les pays en voie de développement, afin de les aider à réduire leurs émissions de GES et à s'adapter aux effets du réchauffement climatique. À cet effet, un fonds « vert » est, d'ores et déjà, alimenté, dont la moitié devrait être consacrée à l'adaptation au changement climatique dans les pays les plus vulnérables et l'autre moitié à des investissements dans les énergies renouvelables ou tous autres projets favorisant la « décarbonisation » de l'économie.
Or, l'outre-mer a toute sa place dans cette lutte contre le réchauffement climatique mais les territoires ultramarins, en tant que membres de la communauté française et, plus largement, de la communauté européenne, n'ont pas d'existence dans les négociations onusiennes qui ne reconnaissent que l'échelon européen pour la COP 21.
Pourtant, les territoires ultramarins jouent un rôle considérable dans la place que la France entend donner aux négociations diplomatiques en cours, notamment grâce à l'emprise maritime que lui confèrent les territoires et à l'excellence de ses recherches en milieu glaciaire, équatorial, tropical et océanique.
Déjà en 2012, l'observatoire national sur les effets du réchauffement climatique avait rendu un rapport au Premier ministre et au Parlement traitant de la question des outre-mers face au défi du changement climatique, énumérant l'ensemble des impacts de ce changement pour ces territoires vulnérables : biodiversité, tourisme, pêche, agriculture, secteur forestier, santé, secteur de l'énergie. Et d'identifier les leviers des politiques publiques d'adaptation à ce changement climatique : intégration des perspectives de long terme au niveau des institutions et des modes de gouvernance ; développement des outils de régulation ; amélioration des normes techniques ; soutien de la recherche scientifique ; reconsidération des politiques d'aménagement du territoire.
Au regard des contraintes et opportunités que représentent les territoires ultramarins pour la France et pour l'Europe, il lui demande donc quelle place occupe l'outremer français et européen au sein des négociations internationales actuelles sur le climat, tant d'un point de vue stratégique que d'un point de vue financier.
En effet, la place des outremers demande à être précisée, puisque leur statut géographique et économique d'acteurs vulnérables au regard du changement climatique en cours est éloigné de leur statut politique de membre de l'Union européenne, cette dernière étant l'un des plus gros émetteurs de dioxyde de carbone (CO2) parmi les pays développés avec le Chine et les États-Unis.
Il lui demande donc comment cette différenciation de statut peut être légitimement et justement prise en considération par la France et par l'Europe, à cause de sa vulnérabilité en même temps que grâce à son potentiel, biologiques et économiques.

- page 2343

Transmise au Ministère des outre-mer


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger publiée le 02/12/2015

Réponse apportée en séance publique le 01/12/2015

M. Félix Desplan, en remplacement de M. Jacques Gillot. Monsieur le secrétaire d'État, la 21e conférence des parties à la convention-cadre de l'ONU sur les changements climatiques, dite « COP 21 », a été ouverte officiellement hier, à Paris, et durera jusqu'au 11 décembre prochain.

L'enjeu de cette conférence, réunissant pour la première fois plus de 150 chefs d'État et de Gouvernement, est de conclure le premier accord universel et contraignant sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre en vue de limiter la hausse des températures à 2 degrés Celsius d'ici à 2100.

Toutefois, de nombreux points de divergence persistent entre les 195 pays souhaitant aboutir à un texte pour contenir le réchauffement terrestre sous le seuil des 2 degrés Celsius, alors que les experts scientifiques anticipent une augmentation de 5 degrés si l'on n'inverse pas la tendance rapidement. Or les conséquences d'un tel réchauffement seraient catastrophiques pour les écosystèmes et les sociétés humaines.

Les autres points-clefs de l'accord sont le financement de l'adaptation aux changements climatiques et la juste répartition des efforts entre pays pauvres, pays émergents et pays industrialisés, ces derniers étant tenus pour historiquement responsables du réchauffement.

Les territoires français d'outre-mer occupent une place très particulière dans ces négociations. Ils relèvent à la fois des pays les plus pollueurs et de la communauté des territoires les plus vulnérables. En effet, nos outre-mer ont la particularité d'appartenir administrativement à la France, qui accueille cette conférence, et politiquement à l'Union européenne, seul échelon reconnu, dans les négociations, par l'Organisation des Nations unies. Nos intérêts nous semblent très éloignés des centres de décision onusiens.

Par ailleurs, les outre-mer appartiennent géographiquement aux territoires insulaires, particulièrement exposés au changement climatique. Parallèlement, ils offrent de belles opportunités en termes d'alternatives aux énergies fossiles et recèlent des solutions concrètes aux problèmes de la crise climatique.

Nos politiques publiques tiennent d'ores et déjà compte des évolutions du climat et des risques que représentent celles-ci pour les secteurs de l'urbanisme et des infrastructures, de la production et de la distribution d'énergie, de la protection de la biodiversité.

Monsieur le secrétaire d'État, de quelle manière pouvons-nous faire connaître et valoriser toutes ces initiatives locales au cours de la COP 21 ? Plus largement, quelle place les territoires d'outre-mer, à la fois forts de leur potentiel énergétique et particulièrement vulnérables face au dérèglement climatique à l'œuvre, occupent-ils dans les négociations climatiques en cours ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, depuis hier et jusqu'au 11 décembre prochain, 196 délégations sont réunies pour définir ensemble les conditions d'une transition vers des sociétés plus sobres en ressources et moins émettrices de gaz à effet de serre, bref vers des sociétés durables.

Nous sommes tous concernés par les bouleversements liés aux changements climatiques. Vous l'avez rappelé de manière extrêmement juste et avec beaucoup de précision : ce constat s'applique également aux outre-mer, où se concentrent 80 % de la biodiversité française et 10 % des récifs coralliens du monde.

Les effets du changement climatique mettent en péril l'environnement des outre-mer, mais aussi et surtout nos concitoyens qui y vivent : les crues y deviennent plus fortes, les sécheresses plus longues, et l'on y assiste à une intensification des cyclones. Les outre-mer sont donc particulièrement concernés par la COP 21.

C'est pourquoi Mme la ministre des outre-mer a souhaité que nos territoires ultramarins soient représentés au sein de la délégation française et dans les différents lieux de cette conférence.

Ainsi, dix-sept représentants des outre-mer font partie de la délégation française. Dans le pavillon France de la COP 21, le ministère des outre-mer mobilise une trentaine de personnes pour assurer une présence quotidienne active et faire connaître au plus grand nombre la contribution ultramarine face aux défis du changement climatique, dans le cadre d'un stand exclusivement dédié aux outre-mer.

La ministre des outre-mer a également valorisé les projets exemplaires et innovants - ils sont nombreux ! - réalisés outre-mer pour faire face aux changements climatiques. C'est tout le sens de l'agenda des solutions outre-mer.

Enfin, plus d'une vingtaine d'événements autour de nos outre-mer se tiendront dans le cadre de la COP 21, tant au pavillon France, qui est réservé aux délégations internationales, que dans les espaces générations climat, qui eux sont ouverts au grand public.

Toutes les occasions de mettre en avant les outre-mer dans le cadre de la COP 21 ont été saisies, pour le constat et les diagnostics comme pour les solutions qui sont dès à présent mises en œuvre dans nos territoires ultramarins, de manière exemplaire et innovante.

Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir permis au Gouvernement de rappeler ces initiatives. Je salue votre implication et celle de l'ensemble des parlementaires ultramarins sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Félix Desplan.

M. Félix Desplan. Monsieur le secrétaire d'État, le réchauffement climatique a non seulement de nombreuses conséquences écologiques, économiques et sociales, mais il a également des effets culturels et sanitaires, que nous n'avons malheureusement pas le temps d'aborder aujourd'hui. Malgré tout, il faut se demander comment tenter de s'en prémunir au travers de nos politiques publiques. Je pense notamment aux conséquences sanitaires du dérèglement climatique, en particulier à l'augmentation considérable des maladies vectorielles, notamment celles qui sont transmises par les moustiques. On le sait, les sécheresses actuelles induisent des mécanismes de stockage des eaux propices au développement de parasites.

Nous comptons sur le Gouvernement pour défendre les territoires ultramarins au cours des négociations, pour faire valoir à la fois notre vulnérabilité et notre inventivité face à cette crise climatique, dans les domaines de la prévention des risques, de la protection du littoral et de la préservation de la biodiversité.

L'adaptation aux changements climatiques est un défi majeur. Les outre-mer entendent y prendre toute leur part lors de cette conférence de Paris, dont nous espérons tous vivement le succès.

Je vous remercie de nous avoir rassurés quant à la prise en compte des initiatives prises par les outre-mer.

- page 11991

Page mise à jour le