Question de Mme GRUNY Pascale (Aisne - Les Républicains) publiée le 17/09/2015

Mme Pascale Gruny attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la nécessité d'alléger le poids normatif que supportent actuellement les exploitants agricoles.

Depuis de trop nombreuses années, les agriculteurs français doivent faire face à une pression asphyxiante des normes qui régissent leurs productions. Les exploitants agricoles sont ainsi pénalisés par un arsenal de contraintes franco-françaises extrêmement dense, lesquelles sont sociales, phytosanitaires, salariales et plus généralement environnementales. Qui plus est, l'ensemble de ces normes vient s'ajouter aux normes européennes déjà existantes en la matière, complexifiant toujours davantage les problématiques concrètes que rencontrent les agriculteurs français.

Face à ce constat d'un modèle agricole en souffrance, il est plus qu'urgent d'activer de façon pragmatique la simplification des normes qui pèsent sur la filière agricole. Cependant, force est de constater que le plan d'aide proposé par le Gouvernement le 21 juillet 2015 ne se fixe pas pour objectif la simplification des normes. En effet, aucune suppression ni le moindre aménagement n'y sont évoqués. Et ce ne sont pas les déclarations du président de la République et du Premier ministre en septembre 2015, floues et incertaines, qui pourraient laisser espérer le contraire.

L'embellie de la filière agricole française ne sera envisageable que lorsque les conditions d'exercice du métier d'agriculteur en France seront facilitées. Les charges sociales doivent baisser et les normes être harmonisées avec celles de nos voisins européens. En cela, elle souhaite savoir si le Gouvernement compte faire de la simplification des normes une priorité absolue comme l'exige la situation actuelle de l'agriculture française.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 16/03/2016

Réponse apportée en séance publique le 15/03/2016

Mme Pascale Gruny. Monsieur le ministre, les agriculteurs français sont confrontés depuis de trop nombreuses années à une pression asphyxiante des normes qui régissent leurs activités. L'ensemble de la filière est ainsi pénalisé par un arsenal extrêmement dense de contraintes franco-françaises, qu'elles soient sociales, phytosanitaires, salariales et, surtout, environnementales. La plupart du temps, elles viennent s'ajouter aux normes européennes qui existent déjà.

Face au constat d'un modèle agricole en souffrance, la simplification des normes qui pèsent sur la filière agricole devient une nécessité absolue.

Si des mesures d'urgence ont été prises, nous ne pouvons que déplorer l'absence totale de propositions en faveur d'un allégement des normes. Pas un mot sur la suppression ou l'aménagement de normes ! Pas un mot sur les répercussions des normes sur le quotidien des agriculteurs ! Ces problématiques sont pourtant essentielles dans la compréhension des difficultés et des souffrances de notre modèle agricole.

Monsieur le ministre, l'embellie de la filière agricole française coïncidera nécessairement avec une amélioration des conditions de son exercice. Elle exige une meilleure traçabilité des produits et de leur provenance, ainsi qu'un véritable allégement des normes qui pèsent sur notre agriculture. Sur ce point précis, quelle est la position du Gouvernement ? Quand vous déciderez-vous enfin à faire de la simplification des normes une priorité absolue, comme l'exige la situation ?

Plus que des mots, l'urgence requiert une action concrète et efficace. Vous ne pouvez plus décevoir nos agriculteurs !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, je vais être extrêmement clair : votre discours sur la nécessité de simplifier les normes, je le connais. Mais, quand on le tient, encore faut-il préciser de quelles normes on parle !

Vous avez évoqué les normes sociales. Je vous le rappelle, la baisse des cotisations sociales, décidée et annoncée par le Premier ministre, nous ramène à la moyenne européenne. Durant les quatre premières années d'exercice de mes fonctions de ministre de l'agriculture, le total des baisses de cotisations aura dépassé les 3 milliards d'euros.

Vous avez aussi fait référence aux normes environnementales. Je reviens du conseil des ministres européens de l'agriculture, à Bruxelles, où j'ai beaucoup discuté pour décrocher un certain nombre de décisions, en particulier sur l'étiquetage.

Qui en aura fait autant sur le sujet ? Nous avons développé un projet « Viandes de France » d'étiquetage volontaire avec l'association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes, INTERBEV, et obtenu que la France puisse, de manière dérogatoire, expérimenter dans ce domaine.

Savez-vous que les Pays-Bas, qui assurent actuellement la présidence néerlandaise du Conseil de l'Union européenne, viennent de mettre en place des quotas pour la potasse ? On pourrait parler de « surtransposition »... En France, ce n'est pas le cas.

Savez-vous aussi que toutes les normes environnementales que vous citez s'appliquent à l'échelle européenne ? C'est le cas des zones vulnérables. L'Allemagne est entièrement classée en zone vulnérable et doit se conformer sur l'ensemble de son territoire aux règles en matière d'azote applicables en France.

Ce n'est pas moi qui ai négocié la directive-cadre européenne sur l'eau ou les règles en matière de protection de l'eau ! Pourtant, lors de ma prise de fonctions, j'ai été confronté à un contentieux européen dans lequel la France risquait d'être sanctionnée financièrement. J'ai dû trouver des solutions.

Dans ce cadre, j'ai permis un certain nombre d'avancées.

Ainsi, dans le cadre de la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, en faisant adopter des dispositions sur l'approche dite de l'azote total, j'ai permis de sortir cinq des neuf bassins versants de Bretagne concernés des zones d'excédent structurel. J'ai aussi mis en place des allégements et des simplifications dans les établissements classés. Dans la filière porcine, cela s'est fait sans délai. Le dispositif fonctionne très bien à l'échelle de la Bretagne et de l'ensemble du territoire français. Les mêmes règles d'enregistrement seront appliquées pour les volailles, les bovins et les exploitations laitières. Tout cela a été réalisé sous ma responsabilité.

Madame la sénatrice, puisque vous m'interrogez sur la suppression de toutes les normes, faites-moi connaître précisément vos propositions ! Nous aurons ainsi un débat dans lequel je pourrai défendre mes réalisations, et vous pourrez défendre vos idées pour abolir des normes afin de permettre une remontée des prix sur les marchés agricoles, laitiers, bovins, porcins ou même céréaliers.

Je le dis très solennellement : il ne suffit pas d'appeler à la suppression de normes ; il faut dire lesquelles !

J'ai assisté à de nombreux débats, avec des citoyens qui s'interrogent sur les pesticides ou sur les herbicides. J'ai aussi entendu cela ici, sur toutes les travées. Mais de quoi parle-t-on ? Et pour qui ?

Vous dites qu'il ne faut pas se contenter de mots ? Alors, ne vous contentez pas des mots : « suppression des normes » ! Dites-nous quelles normes vous voulez supprimer, et nous pourrons discuter sur ces bases !

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. Monsieur le ministre, tout ça, c'est très joli, mais, sur le terrain, les agriculteurs ne cessent de nous répéter que cela ne va pas !

Je n'ai pas dit qu'il fallait supprimer toutes les normes. Je demande simplement que l'on n'en ajoute pas en France ! J'ai participé aux débats sur la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ou sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Tous ces textes se traduisent ou se traduiront par des contraintes supplémentaires pour nos agriculteurs, qui n'en peuvent plus !

Je pourrais évoquer aussi les normes administratives et les discussions actuelles sur le dossier de la PAC.

Monsieur le ministre, ce ne sont pas que des mots ; ce sont les remontées du terrain ! Nos agriculteurs sont à cran ! D'ailleurs, si tout allait aussi bien, je ne serais pas ici ce matin !

J'ai déposé cette question voilà plus de quatre mois. Quel dommage qu'elle soit encore d'actualité !

Monsieur le ministre, nous avons siégé ensemble au Parlement européen. Vous teniez alors un discours similaire. Je n'incrimine pas ce seul gouvernement. Mais il est clair que, si vous ajoutez de nouvelles normes, la situation de nos agriculteurs ne sera pas tenable !

La baisse des charges sociales est une bonne chose. Mais, outre que la pérennité de la mesure n'est pas inscrite dans le marbre, tout cela se traduit encore par beaucoup de paperasse. (M. le ministre le conteste.)

Ces différents sujets posent problème à nos agriculteurs, qui, en ce moment, ont besoin d'oxygène, et pas de normes tous azimuts pour les asphyxier !

J'ai bien entendu que l'on pouvait vous présenter des propositions très concrètes. Je ne manquerai de vous interpeller pour évoquer un certain nombre de sujets qui préoccupent au quotidien nos agriculteurs.

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