Question de Mme MEUNIER Michelle (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 02/07/2015

Mme Michelle Meunier attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur l'adoption, par une femme mariée, de l'enfant de sa conjointe.

La loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe a autorisé, dans notre pays, le mariage des couples de même sexe et, de ce fait, leur a ouvert des droits relatifs à l'adoption et à la succession.

Elle prévoit notamment – en son article 11 – la possibilité pour le - ou la - conjoint-e d'adopter l'enfant de son - ou de sa - conjoint-e.
Sont ainsi directement concernées par ce dispositif, les femmes mariées ayant eu un enfant par procréation médicalement assistée (PMA) à l'étranger.

Dans les faits, ces couples se heurtent, quotidiennement, à de nombreuses difficultés administratives et juridiques : la procédure est longue, coûteuse en temps et en frais de justice, sans compter les inégalités – géographiques - de traitement de ces demandes par les tribunaux.

Force est de constater que les résistances et les inerties sont encore nombreuses.

Ainsi, malgré l'avis favorable du parquet, le tribunal de grande instance de Cahors a-t-il refusé, le 12 juin 2015, une demande d'adoption au motif qu'elle représentait une fraude à la loi interdisant, en France, l'accès à la PMA pour les couples de femmes.

Pourtant, le 22 septembre 2014, la Cour de cassation avait considéré que le recours à l'assistance médicale à la procréation, sous la forme d'une insémination artificielle avec donneur anonyme à l'étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l'adoption, par l'épouse de la mère, de l'enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l'adoption sont réunies et qu'elle est conforme à l'intérêt de l'enfant.

Dès lors, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures, réglementaires ou législatives, le Gouvernement entend prendre pour permettre l'application rapide et effective - sur l'ensemble du territoire français - des droits ouverts par la loi du 18 mai 2013.

Il s'agit de permettre l'égalité de traitement des couples – qu'ils soient de même sexe ou de sexes différents – et d'offrir aux enfants une stabilité affective et juridique, dans le respect de leurs droits et de leur intérêt.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 07/04/2016

Très sensible au besoin de sécurité juridique manifesté par les familles concernées, la Chancellerie a fait procéder, dès le printemps 2014, à une évaluation statistique auprès des juridictions afin de recenser l'ensemble des décisions rendues depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 mai 2013. Le bilan de cette étude permet de constater une ligne jurisprudentielle très largement majoritaire : au 1er juillet 2014, seules neuf décisions de rejet avaient été prononcées, pour 295 décisions ayant répondu favorablement aux demandes d'adoption par la conjointe de l'enfant de son épouse. Les quelques divergences jurisprudentielles observées ont d'ailleurs vocation à s'estomper dès lors que la Cour de cassation a rendu deux avis juridiques favorables à de telles adoptions le 22 septembre 2014. La haute juridiction a ainsi exclu que le fait de recourir à une assistance médicale à la procréation à l'étranger puisse constituer une fraude à la loi française relative à la procréation médicalement assistée ou à l'adoption, et ainsi puisse conduire à s'opposer, pour ce seul motif, à l'adoption de l'enfant au bénéfice de la conjointe de la femme ayant accouché.La Cour de cassation tire ainsi les conséquences de la loi du 17 mai 2013, qui a eu pour effet de permettre, par l'adoption, l'établissement d'un lien de filiation entre un enfant et deux personnes de même sexe. Afin de faciliter le processus d'unification de la jurisprudence, le ministère de la justice a diffusé une dépêche le 30 juin 2015,  s'agissant des situations visées par l'avis de la Cour de cassation,  invitant le ministère public à émettre un avis favorable au prononcé de l'adoption simple ou plénière, dès lors que celle-ci apparait conforme à l'intérêt de l'enfant et que les conditions en sont remplies, conformément aux dispositions de l'article 353 du code civil.

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