Question de M. POINTEREAU Rémy (Cher - UMP) publiée le 23/04/2015

M. Rémy Pointereau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur certaines dispositions du projet d'ordonnance relative aux marchés publics qui suscite les vives inquiétudes des organisations professionnelles représentant les architectes et l'ensemble de la maîtrise d'œuvre.

La commande publique française, illustrée par le concours d'architecte, procédure de principe de passation des marchés de maîtrise d'œuvre au-dessus d'un certain seuil, permet une saine concurrence entre les équipes de concepteurs et se traduit pas une production architecturale innovante et de qualité.

Le concours favorise également l'émulation d'une maitrise d'œuvre autonome et compétitive, condition essentielle au maintien de la qualité architecturale du cadre bâti.

Or le projet d'ordonnance ne contiendrait aucune disposition spécifique pour la passation des marchés de maîtrise d'œuvre, pas plus qu'il ne mentionnerait le concours en tant que système spécial de passation des marchés.

Ces dispositions sont pourtant essentielles, car, outre les conséquences néfastes que la remise en cause d'un modèle qui a fait ses preuves pourrait avoir sur les structures de l'ensemble des professionnels de la maîtrise d'œuvre en les contraignant à réduire leurs effectifs et leurs capacités d'innovation, son abandon nous ramènerait plusieurs années en arrière et pourrait avoir un impact direct sur notre cadre de vie et l'efficacité de nos services publics.

Aussi, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet et demande notamment si le concours obligatoire, comme procédure formalisée de principe de passation des marchés de maîtrise d'œuvre, va être conservé afin de continuer à inscrire la création du cadre bâti dans une démarche qualité.

Par ailleurs dans ce même projet d'ordonnance, il serait envisagé de généraliser les contrats globaux associant dans un même marché la conception et la réalisation, modifiant les conditions de recours à ce type de contrats dérogatoires prévu par la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée (loi MOP), remettant ainsi en cause l'indépendance de la maîtrise d'œuvre.

Cette généralisation des contrats globaux projetée dans le projet d'ordonnance pourrait avoir pour conséquences de limiter la concurrence entre entreprises du BTP et concurrence entre architectes réduisant ainsi l'accès à la commande publique. Elle pourrait rendre les professionnels de la maîtrise d'œuvre dépendants de l'entreprise de BTP mandataire sans pouvoir être l'interface entre l'entreprise et le maître d'ouvrage public.

Sur ce deuxième point, il souhaite avoir des éclaircissements sur la position du Gouvernement à cet égard et savoir si les contrats globaux seront généralisés ou s'ils seront toujours dérogatoires.

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique publiée le 02/07/2015

Les travaux de transposition des nouvelles directives européennes n° 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et n° 2014/25/UE du 26 février 2014 relatives à la passation des marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux ont été engagés par le Gouvernement avec l'objectif de simplifier, d'unifier et de rationaliser le droit national de la commande publique. Un projet d'ordonnance transposant le volet législatif des nouvelles directives « marchés publics » a été rédigé conformément à l'habilitation adoptée par le Parlement à l'article 42 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et a fait l'objet d'une concertation publique en janvier 2015. Il sera complété par des décrets d'application qui parachèveront les travaux de transposition. Les directives européennes ne comportent pas de dispositions spécifiques sur les marchés de maîtrise d'œuvre, au contraire des textes nationaux actuels. L'article 74 du code des marchés publics et les articles 41-2 des décrets d'application de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics sont des spécificités du droit français de la commande publique qui reconnaît ainsi le rôle fondamental joué par les architectes et les professionnels de la maîtrise d'œuvre dans la conception d'un cadre de vie innovant et de qualité. Conscient de cette importance, le Gouvernement entend maintenir des dispositions spécifiques aux marchés de maîtrise d'œuvre dans les textes réglementaires de transposition des directives. Les directives européennes comportent des dispositions spécifiques régissant la procédure du concours (articles 78 à 82 de la directive dite n° 2014/24/UE et articles 95 à 98 de la directive n° 2014/25/UE). Le concours permet à l'acheteur public d'acquérir un ou plusieurs projets puis de négocier avec le ou les lauréats afin de conclure un marché public. Les conditions de recours à cette procédure ainsi que la description de son déroulement seront précisées dans les décrets d'application du projet d'ordonnance transposant les directives. Conformément aux objectifs de simplification, la rédaction des textes de transposition se fera au plus près de la lettre des directives et lorsque des marges d'appréciation sont laissées au législateur national, les solutions les plus susceptibles d'alléger les charges pesant sur les entreprises seront privilégiées. Ces travaux de transposition constituent également l'occasion de moderniser le régime des marchés globaux, afin de permettre aux personnes publiques de disposer d'un outil contractuel mieux adapté à leurs projets. Les marchés globaux sont des contrats par lesquels une personne publique peut confier à un titulaire unique une mission globale pouvant inclure la conception, la construction, l'entretien et la maintenance des ouvrages, dont l'utilité et l'efficacité sont reconnues dans un certain nombre de cas. Ces marchés restent soumis, à la différence des partenariats public-privé, à l'interdiction du paiement différé et aux règles relatives à la maîtrise d'ouvrage publique. Une révision des conditions de recours à ces contrats, qui sont à l'heure actuelle restrictives, est envisagée, dans le but de créer pour les personnes publiques une véritable alternative aux montages de type partenariats public-privé, réalisée sous maîtrise d'ouvrage publique et avec un financement public pour un coût moindre. Toutefois, soucieux de préserver l'indépendance de la maîtrise d'œuvre dans le cadre de ces marchés et conscient de son rôle dans la qualité des constructions, le Gouvernement réexamine actuellement le projet d'ordonnance pour tenir compte des observations formulées lors de la concertation.

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