Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 27/11/2014

Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur les conséquences du surcoût lié aux opérations de désamiantage dans le parc de logements d'habitations à loyer modérés (HLM). Depuis le 1er juillet 1997, la législation interdit toute construction de logement contenant de l'amiante. Mais 80 % des permis de construire de logements sociaux ont été délivrés avant cette date. Quelque 3,1 millions de logements collectifs sont donc susceptibles de contenir des traces d'amiante, dans plus de 3 000 composants, comme les mastics pour les joints de fenêtre, les colles ou le ciment. Les avancées législatives des codes de la santé et du travail permettent de protéger les habitants et les professionnels du bâtiment mais, en contrepartie, les organismes HLM doivent faire face à une forte hausse du prix des travaux de rénovation. Selon le rapport d'information (n° 668 (2013-2014)) déposé par la mission sénatoriale sur l'amiante le 1er juillet 2014, l'Union sociale pour l'habitat (USH) chiffre un surcoût de 2,3 milliards d'euros hors taxe par an pour la rénovation de logement. Cette somme représente l'équivalent de 120 000 constructions ou 400 000 rénovations. Depuis 2001 jusqu'à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « Alur », la législation a été renforcée. Le seuil d'exposition passif aux poussières d'amiante a été abaissé de 25 fibres par litre d'air à cinq et les règles d'information des habitants et des intervenants ont été élargies avec, par exemple, la création du dossier technique amiante (DTA) ou encore la notification de présence d'amiante au sein du logement en annexe du contrat de bail. Un décret n° 2012-639 du 4 mai 2012 relatif aux risques d'exposition à l'amiante a aussi changé la méthode de mesure de l'empoussièrement. Il a été établi un nouveau seuil d'exposition actif aux poussières d'amiante qui passera de cent fibres par litre d'air à dix fibres au 1er juillet 2015. Lors du congrès des HLM de septembre 2014, la ministre a annoncé la mise en place d'une enveloppe de 10 000 euros par logement, via un prêt de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), à hauteur de 40 000 logements par an. Elle lui demande comment elle compte mettre en pratique ces prêts de la CDC et s'il existera des critères d'éligibilité ou des conditions d'attribution pour les organismes HLM. Elle souhaite aussi savoir si le Gouvernement entend créer une structure interministérielle pour harmoniser les actions de désamiantage des logements.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 04/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 03/02/2015

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question porte sur les conséquences du surcoût lié aux opérations de désamiantage dans le parc de logements HLM.

Depuis le 1er juillet 1997, la législation interdit toute construction de logement contenant de l'amiante, mais 80 % des permis de construire de logements sociaux ont été délivrés avant cette date.

Ainsi, 3,1 millions de logements collectifs sont susceptibles de contenir des traces d'amiante, dans plus de 3 000 composants, comme les mastics pour les joints de fenêtre, les colles ou le ciment.

Les avancées législatives inscrites dans les codes de la santé et du travail permettent de protéger les habitants et les professionnels du bâtiment.

Cependant, en contrepartie, les organismes d'HLM doivent faire face à une forte hausse du prix des travaux de rénovation.

Selon le rapport d'information de la mission sénatoriale sur l'amiante de juillet 2014, l'Union sociale pour l'habitat évalue le surcoût à 2,3 milliards d'euros hors taxe par an, pour la rénovation de logement. Cette somme représente l'équivalent de 120 000 constructions ou 400 000 rénovations.

La législation a été renforcée depuis 2001, notamment avec la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, ou loi ALUR. Le seuil d'exposition« passive » aux poussières d'amiante a été abaissé de vingt-cinq fibres par litre d'air à cinq et les règles d'information des habitants et des intervenants ont été élargies, avec, par exemple, la création du dossier technique « amiante » ou encore la notification de présence d'amiante au sein du logement en annexe du contrat de bail.

Par ailleurs, le décret du 4 mai 2012 relatif aux risques d'exposition à l'amiante a changé la méthode de mesure de l'empoussièrement : le seuil d'exposition« active » aux poussières d'amiante passera, le 1er juillet 2015, de cent fibres par litre d'air à dix fibres.

Lors du congrès des HLM de septembre dernier, Mme la ministre du logement a annoncé l'ouverture, via un prêt de la Caisse des dépôts et consignations, d'une enveloppe de 10 000 euros par logement au bénéfice de 40 000 logements par an. Comment le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre ces prêts ? Des critères d'éligibilité ou des conditions d'attribution seront-ils fixés pour les organismes d'HLM ?

Plus généralement, le Gouvernement envisage-t-il de créer une structure interministérielle pour harmoniser les actions de désamiantage des logements ? D'un territoire à un autre, en effet, les inspecteurs du travail font une interprétation variable des procédures administratives à suivre en matière d'amiante, ce qui aggrave encore les surcoûts de production supportés par les bailleurs sociaux.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Madame Estrosi Sassone, vous avez interrogé Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur le surcoût lié aux actions de désamiantage des logements sociaux ; retenue ce matin par la présentation du rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre, Mme Pinel m'a chargé de vous transmettre sa réponse.

La volonté du Gouvernement est d'engager la rénovation énergétique massive de notre parc de logements. Or ce projet ambitieux de réhabilitation de l'existant impose une prise en compte renforcée de l'amiante présente dans certains bâtiments, dont la libération et la manipulation doivent être entourées de précautions.

L'utilisation de l'amiante est interdite depuis 1997, mais, comme vous l'avez rappelé, madame la sénatrice, cette substance est encore présente dans de nombreux logements. Les surcoûts liés aux travaux de désamiantage dans les seuls logements sociaux sont estimés par l'Union sociale pour l'habitat, l'USH, à 2,3 milliards d'euros. Le même problème se pose pour les logements privés et pour les bureaux, sans que les coûts réels aient encore pu être évalués.

Le Gouvernement a pris une série de mesures pour répondre à ces enjeux et soutenir les acteurs.

Ainsi, alors qu'aucun financement particulier ne permettait jusqu'à présent de prendre en charge les travaux liés spécifiquement à l'amiante, Mme la ministre du logement a annoncé en septembre dernier, lors du congrès de l'USH, la création d'un prêt dédié aux travaux de traitement de l'amiante. Cette mesure a été intégrée à la loi de finances pour 2015.

Ce nouveau prêt, consenti par la Caisse des dépôts et consignations, est très avantageux, puisqu'il est bonifié au même niveau que l'éco-prêt logement social : son taux est donc inférieur à celui du livret A. Une enveloppe totale de 1,5 milliard d'euros est prévue et les prêts sont plafonnés à 10 000 euros par logement afin que 50 000 logements puissent en bénéficier chaque année.

Les prestations éligibles correspondent aux différentes étapes du désamiantage, depuis la phase de repérage des matériaux contenant de l'amiante avant travaux jusqu'à la phase de traitement et d'élimination des déchets. Sur ce point, la convention entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations est en cours de finalisation.

Le Gouvernement veut également soutenir l'exploration de nouvelles méthodes d'extraction de l'amiante. C'est la raison pour laquelle il mobilise 20 millions d'euros du Fonds de compensation des risques de l'assurance de la construction à partir de cette année au service de la recherche et du développement en matière de détection et d'extraction robotisée de l'amiante.

Un plan a été défini sur trois ans et des actions opérationnelles seront menées dès cette année. Un programme de recherche et développement pour l'extraction de l'amiante dans le bâtiment a été confié à des organismes de recherche, dont le Centre scientifique et technique du bâtiment, le CSTB. Par ailleurs, un appel à manifestation d'intérêt sera bientôt lancé au sujet des différentes modalités d'extraction de l'amiante.

Il s'agit de développer des technologies fiables pour réduire les coûts.

Vous le voyez, les mesures prises par le Gouvernement sont immédiates et produiront des effets à court terme, mais nous devons nous doter d'un programme d'actions pérenne pour mener à bien la tâche que nous nous sommes fixée.

Ces travaux sont interministériels, comme vous avez eu raison de le souligner, madame la sénatrice. C'est pourquoi, en juillet dernier, une feuille de route interministérielle a été élaborée conjointement par le ministère du logement et les ministères du travail, de la santé et de l'écologie ; elle regroupe toutes les actions d'information, de formation, de recensement et d'animation interprofessionnelle que l'État aura à mettre en œuvre.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, des précisions que vous venez d'apporter.

J'espère que les fonds nécessaires, qui sont importants, seront bien mobilisés, car les bailleurs sociaux en ont véritablement besoin pour continuer à mener des opérations lourdes dans le domaine de la réhabilitation, qui est l'une de leurs priorités.

J'attire l'attention du Gouvernement sur les difficultés croissantes qui s'attacheront à la conduite d'opérations de réhabilitation en site occupé, compte tenu des contraintes qui doivent être respectées à l'égard des locataires. Imaginez la réaction des occupants quand ils voient arriver chez eux des personnes équipées comme des scaphandriers, et ce uniquement pour désamianter les mastics des joints de fenêtres, alors qu'eux-mêmes habitent parfois sur place depuis de très nombreuses années sans avoir jamais été protégés !

En vérité, il est important d'améliorer les procédures pour permettre aux bailleurs sociaux, qui font face à des difficultés grandissantes, de poursuivre leurs travaux de réhabilitation, y compris en site occupé, ce qui devient de plus en plus compliqué.

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