Question de Mme MEUNIER Michelle (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 27/06/2013

Mme Michelle Meunier demande à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, une précision à propos de l'accès à l'adoption plénière des enfants adoptés ayant obtenu la nationalité française.
Dans une réponse du 14 mars 2013 à sa question écrite à propos de l'accès à l'adoption plénière des enfants adoptés nés en Haïti, il est indiqué qu'« il convient de ne pas omettre que l'adoption, et ici la conversion de l'adoption simple en adoption plénière, n'est pas de droit et qu'en matière internationale, elle ne peut être prononcée au mépris des règles posées par l'État d'origine des enfants ». Il est ensuite précisé que « l'accès à la nationalité française rend l'enfant adoptable, y compris en adoption plénière si les conditions prévues par le droit français sont remplies ».
Du rapprochement de ces deux parties de la réponse, on peut comprendre que, une fois qu'un enfant ayant bénéficié d'une adoption simple est devenu français, la question de son adoption n'est plus internationale. C'est d'ailleurs la solution déjà retenue à propos des enfants dont la loi personnelle prohibe l'adoption (concrètement les enfants recueillis en kafala). Ces enfants peuvent être adoptés, en adoption plénière ou simple, une fois qu'ils ont acquis la nationalité française, sans égard aux règles posées par leur État d'origine et sans qu'aucun consentement à l'adoption émanant de leur représentant légal n'ait été recueilli dans cet État.
Cela laisse ainsi entendre que l'acquisition de la nationalité française, par les enfants haïtiens ou autres, modifie les conditions dans lesquelles leur adoption simple peut être convertie en plénière. Il semble alors aller de soi que si les enfants dont la loi personnelle prohibe l'adoption peuvent être adoptés, une fois devenu français, sans le consentement de leur État d'origine, les enfants dont la loi personnelle ne prohibe pas l'adoption plénière doivent pouvoir bénéficier de celle-ci dans les mêmes conditions. Elle souhaiterait en avoir la confirmation.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 12/12/2013

Le deuxième alinéa de l'article 370-3 du code civil interdit le prononcé d'une adoption qu'elle soit simple ou plénière au profit d'un enfant dont la loi personnelle prohibe cette institution. Lorsque l'enfant acquiert la nationalité française, il est donc soumis aux exigences de la loi française, sa loi personnelle. Ainsi, son éventuelle adoption, institution connue du droit français, devient donc envisageable sous réserve que les conditions de la loi française en matière d'adoption soient remplies. Cette analyse a d'ailleurs été confirmée par la Cour européenne des droits de l'Homme dans son arrêt Harroudj contre France du 4 octobre 2012 concernant un enfant accueilli par kafala. Parmi les conditions requises pour l'adoption, l'enfant doit être adoptable au sens de l'article 347 du code civil, ce qui suppose le consentement des parents ou de la personne habilitée à consentir à son adoption. Hormis le cas d'un refus de consentement jugé abusif, le recueil de consentement est une exigence du droit international reconnue tant par l'article 21, a) de la convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant ainsi que par l'article 4, c) et d) de la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Il n'est donc pas possible d'y déroger. Aussi, un enfant originaire d'Haïti, comme tout autre enfant ayant acquis la nationalité française, peut être adopté en la forme plénière en application du droit français sous réserve de la production d'un consentement donné en vue d'une telle adoption par les parents d'origine ou l'autorité habilitée par la loi. Pour produire effet en France, l'acte de consentement haïtien doit être, comme tous les autres documents établis dans cet Etat, légalisé, Haïti n'étant pas lié avec la France par une convention prévoyant la dispense de cette formalité. Or, depuis la fin de l'année 2009, le commissaire du gouvernement haïtien a enjoint aux autorités de ne plus recevoir de consentements à l'adoption plénière et le cas échéant, de refuser de légaliser de tels consentements, au motif que cette forme d'adoption est contraire au droit haïtien. En conséquence, il n'est pas certain que les autorités haïtiennes lèvent leur refus de légaliser les actes de consentement à l'adoption plénière reçus sur leur territoire quand bien même l'enfant aurait acquis la nationalité française.

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