Question de Mme GHALI Samia (Bouches-du-Rhône - SOC) publiée le 14/07/2011

Mme Samia Ghali attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire sur les risques professionnels liés à la profession d'agriculteur. Plusieurs rapports, qui émanent de la Mutualité sociale agricole (MSA) et d'études scientifiques, attestent des impacts de l'utilisation des pesticides sur la santé. L'étude Agrican, lancée fin 2005 par la MSA, a cherché à identifier le lien entre certains cancers et certaines activités agricoles. La situation était suffisamment alarmante pour que, dès février 2004, la MSA mette en place un numéro vert baptisé Phyt'attitude pour permettre aux utilisateurs professionnels de pesticides de signaler leurs symptômes. En 2008, les premiers résultats de l'étude Agrican ont montré que le risque pour les agriculteurs de développer un cancer lymphatique était beaucoup plus élevé que pour les autres. Les chercheurs ont notamment montré que les analyses des exploitants qui ont participé à l'étude, révélaient des dizaines de biomarqueurs prédictifs, précurseurs de cellules tumorales. Selon la MSA, ce serait 20 % des agriculteurs et des ouvriers agricoles qui se plaignent de troubles. L'étude Cerephy réalisée en Gironde a montré qu'un risque de tumeur cérébrale serait multiplié par 2,6 chez les personnes les plus exposées aux pesticides. De telles données restent encore à confirmer mais cela met l'accent sur la nocivité potentielle des produits sanitaires. En 2006, le tribunal de Bourges a également reconnu la maladie de Parkinson d'un salarié agricole comme maladie professionnelle. Ces quelques exemples, qui sont loin d'être exhaustifs, montrent que les pouvoirs publics ont pour devoir de se saisir de cette question grave de santé publique. Le rapport d'information n° 1702 de l'Assemblée nationale sur les pesticides a fait état de la nécessité d'étudier avec rigueur les risques liés à l'utilisation des pesticides notamment pour les professionnels exposés. Ce souci a été relayé par la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement. Ces engagements auprès de la profession agricole sont pour l'instant restés lettre morte. Il lui demande par conséquent ce qu'il compte faire pour prendre en compte ce risque professionnel et protéger le cas échéant le monde agricole.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire publiée le 01/09/2011

De nombreuses études montrent que des pathologies à effet différé sont en lien avec l'utilisation des pesticides. Ces pathologies ne sont pas encore prises en compte dans les tableaux de maladies professionnelles, mais peuvent être reconnues comme telles par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. La prise en charge, par le régime de sécurité sociale agricole, des maladies professionnelles consécutives à l'exposition à des produits phytosanitaires fait l'objet d'une attention toute particulière. La Commission supérieure des maladies professionnelles en agriculture a initié, en 2009, un travail d'analyse des études déjà publiées sur les liens entre les affections à effet différé et, lors de sa réunion du 1er juin 2011, elle a reconnu l'existence de liens probables entre la maladie de Parkinson et l'utilisation des pesticides. Elle a désigné un expert pour l'élaboration d'un tableau de maladies professionnelles. Ses travaux se poursuivent sur les cancers, dont les tumeurs cérébrales. Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, le Gouvernement s'est fixé l'objectif de réduire de 50 %, si possible, les quantités utilisées de pesticides dans un délai de dix ans. Cet objectif est repris dans le plan Écophyto 2018, qui comporte désormais, depuis fin 2010, un axe 9 relatif à la protection de la santé au travail des utilisateurs de produits phytopharmaceutiques. Son objectif est de renforcer la prévention de ce risque chimique pour, sinon le supprimer, au moins le réduire. Trois priorités ont ainsi été déterminées : renforcer la protection collective, améliorer la protection individuelle et assurer la veille sanitaire pour une meilleure traçabilité de ces expositions. Ces actions seront soumises à la validation du Comité national d'orientation et de suivi du plan Écophyto 2018, à l'automne prochain. Ces questions très sensibles sont évoquées régulièrement avec les partenaires sociaux agricoles, au sein du Conseil d'orientation sur les conditions de travail. La substitution des substances cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) de catégories 1A et 1B (avérées pour l'homme) a été engagée, mais n'est pas encore à ce jour achevée. Celles de catégorie 2 (préoccupantes pour l'homme en raison d'effets CMR possibles) sont encore très nombreuses, et leur substitution doit aussi être poursuivie. Enfin, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole poursuit sa politique de prévention des risques professionnels et s'est fixé plusieurs objectifs en cette matière, dans le cadre de son plan santé-sécurité au travail 2011-2015, qui concerne tous les actifs agricoles, salariés et non-salariés. Il s'agit notamment de mener des études d'ergotoxicologie pour améliorer la connaissance de l'exposition en situation de travail, de développer l'offre de formation en santé et sécurité au travail liée à l'utilisation professionnelle des produits phytosanitaires (notamment Certiphyto) et de renforcer la connaissance de l'efficacité des matériels utilisés lors des opérations de pulvérisation.

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