Question de Mme BONNEFOY Nicole (Charente - SOC) publiée le 18/03/2010

Mme Nicole Bonnefoy attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les inquiétudes exprimées par les professeurs de sciences économiques et sociales (SES).

Elle l'avait déjà interpellé au sujet de la réduction du temps horaire dévolu à cet enseignement, et qui semblait nettement insuffisant (1 heure 30 par semaine) au point de laisser entrevoir une « relégation » de cette discipline.

Confirmant cette inquiétude, il semblerait aujourd'hui que le ministère de l'éducation nationale ait prévu de changer profondément les finalités de cet enseignement puisqu'il est intervenu auprès du groupe d'experts chargé de proposer un nouveau programme de seconde, et bientôt de première, contrairement à la pratique habituelle.

Le projet de programme pour la seconde présenté conduit, en effet, à évacuer nombre des questions de société qui faisaient l'intérêt des élèves pour cet enseignement : les transformations de la famille, les inégalités de revenus, le chômage, l'investissement et les relations professionnelles dans l'entreprise, les rapports homme-femme... À la place, le projet privilégie des notions théoriques et désincarnées de la microéconomie : élasticités, coûts marginaux, prix d'équilibre, etc. Ces notions fondamentales dans la formation des étudiants en licence d'économie-gestion apparaissent inadaptées aux élèves de seconde générale et technologique qui débutent en sciences économiques et sociales.

De plus, le projet de programme du ministère marginalise les autres sciences sociales que l'économie, alors que l'approche pluridisciplinaire est le cœur même de cet enseignement, et rend l'enseignement des SES déconnecté de la réalité économique et sociale. Pourtant, pour répondre aux attentes et aux besoins des élèves, pour les aider à s'intéresser et mieux comprendre les enjeux économiques et sociaux du monde dans lequel ils vivent, l'enseignement des SES doit partir de questions qui fassent sens pour un jeune de 15 ans, et qui soient reliées aux débats qui structurent notre société. Il est donc à craindre que le programme du ministère ne détourne les lycéens des enjeux économiques et sociaux au lieu de les y intéresser.

Elle souhaiterait connaître, par conséquent, les dispositions qu'il entend prendre pour que tous les lycéens puissent suivre un enseignement annuel de sciences sociales digne de ce nom, permettant le croisement fécond des regards des différentes sciences sociales, avec un programme élaboré de concert par les enseignants, les inspecteurs et les universitaires, sans intrusion du ministère de l'éducation nationale.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 21/10/2010

La réforme du lycée a rendu obligatoire une formation économique en classe de seconde (selon les dispositions de l'arrêté du 27 janvier 2010, paru au Journal officiel de la République française du 28 janvier 2010), tout en permettant à chaque élève de choisir entre deux enseignements « sciences économiques et sociales » (SES) et « principes fondamentaux de l'économie et de la gestion » (PFEG). Ces enseignements, nouveaux en classe de seconde, visent à donner à chaque élève une première approche des mécanismes fondamentaux de l'économie, à raison d'une heure et demie par semaine. Les élèves particulièrement motivés ou déjà conscients de leur orientation pourront, de surcroît, suivre à la fois les deux enseignements, soit trois heures de formation à l'économie par semaine. Le préambule du programme d'enseignement des SES précise bien qu'il « s'agit de donner à tous les élèves, qu'ils poursuivent ou non leurs études dans les séries ES ou STG, les éléments de base d'une culture économique et sociologique indispensables à la formation de tout citoyen qui veut comprendre le fonctionnement de l'économie et de la société dans laquelle il vit ». Il précise aussi qu'il s'agit de faire acquérir aux élèves quelques notions et raisonnements essentiels en économie et en sociologie dans la perspective d'une poursuite d'études en classes de première et terminale ES et STG et, au-delà, dans l'enseignement supérieur, principalement dans les études d'économie et gestion, droit, sciences humaines et sociales. Un double objectif qui a été pris en compte par le groupe d'experts chargés d'y travailler. Ce programme a suivi la procédure institutionnelle habituelle avant d'être publié au Bulletin officiel de l'éducation nationale (BOEN) du 29 avril 2010 ; il a été mis à la consultation de janvier à mars 2010 sous forme de projet, puis réajusté pour tenir compte des observations et des propositions des enseignants et présenté au Conseil supérieur de l'éducation le 31 mars 2010. Les contenus initialement proposés ont été allégés. Il a été introduit davantage de choix dans les sujets à traiter par les enseignants. La place de la sociologie a été développée ; des questions d'actualité ont été introduites (par exemple, l'emploi et la relation emploi et chômage). Des notions jugées trop abstraites ont été supprimées (thème des organisations, coût marginal) et remplacées par d'autres comme pouvoir d'achat, valeur ajoutée, progrès technique. Si le thème de la famille n'est pas proposé à l'étude en seconde, c'est qu'il fait appel à l'anthropologie, science qui, pédagogiquement, prend tout son sens dans le cadre pluridisciplinaire des classes terminales ES. Le programme de la classe de première ES sera publié cet été. Il a suivi le même cheminement de concertation que celui de seconde et a reçu un avis favorable du Conseil supérieur de l'éducation le 1er juillet 2010. Les SES demeurent la discipline dominante des classes de première et terminale ES. Avec l'enseignement d'exploration en seconde, un élève de la série ES, durant sa scolarité au lycée, bénéficie d'un enseignement de SES de plus de 400 heures, et de plus de 450 heures pour celui qui choisira l'enseignement de spécialité. Encore ce calcul ne tient-il pas compte du temps consacré à cette discipline dans le cadre de l'accompagnement personnalisé. Ainsi, la place des sciences économiques et sociales n'est en aucun cas remise en cause par la réforme du lycée, ni, à plus forte raison, la filière ES.

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