Question de M. MAHÉAS Jacques (Seine-Saint-Denis - SOC) publiée le 27/08/2009

M. Jacques Mahéas attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés sur les suicides en prison, dont le dernier en date vient de se dérouler à Villepinte en Seine-Saint-Denis.
Les annonces gouvernementales réitérées en matière de lutte contre les suicides en prison ne se sont pour l'heure traduites par aucune amélioration concrète. Il est regrettable que l'administration pénitentiaire ne rende plus publiques les statistiques relatives aux suicides en milieu pénitentiaire. Ainsi, selon les derniers chiffres communiqués par l'administration pénitentiaire (AP), 81 détenus se sont suicidés depuis le début de l'année, contre 115 pour toute l'année 2008. Or, selon l'association Ban public et l'Observatoire international des prisons (OIP), en réalité, plus de 90 détenus se seraient donné la mort depuis début 2009.
D'autre part, le Gouvernement n'a donné aucune suite au rapport rendu par le docteur Louis Albrand en avril 2009, rapport par ailleurs « réécrit » par l'administration pénitentiaire.
Pour réellement prévenir les suicides, il faut d'abord restaurer la dignité de la personne détenue. Aujourd'hui, cette dignité n'est pas respectée, notamment du fait de la surpopulation carcérale et de la violation beaucoup trop fréquente du principe de l'encellulement individuel.
En conséquence, il lui demande de lui faire connaître les statistiques dont elle dispose sur le nombre de suicides en milieu fermé et de lui indiquer les mesures qu'elle entend prendre d'urgence pour parvenir enfin à prévenir efficacement ces suicides. Il lui demande également quelles suites elle entend donner au rapport Albrand et quelle sera la politique de son département ministériel en matière d'encellulement individuel.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 24/12/2009

Le nombre de suicides dans les prisons françaises constitue une des préoccupations principales du garde des sceaux. Le 18 août 2009, le ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, a clairement affirmé sa volonté de transparence sur le sujet en rendant publique, avec une mise en oeuvre immédiate et intégrale, les 20 recommandations contenues dans le rapport de la commission d'experts sur la prévention des suicides. Elle a souhaité initier son action sans délais et engager un véritable plan de prévention et d'intervention avec l'ensemble des personnels pénitentiaires et médicaux, ainsi qu'avec les acteurs de la vie carcérale, comme les bénévoles, intervenants divers, familles et codétenus. Ce plan d'actions doit être renforcé autour de cinq grands axes : la formation du personnel pénitentiaire face au risque de suicide (en ciblant en priorité l'ensemble des personnels affectés dans les quartiers de détention spécifiques) ; l'application de mesures particulières pour les détenus les plus fragiles, avec la mise en oeuvre généralisée de matériel adapté (cellules de protection d'urgence ou sécurisées, dotations de protection d'urgence composées de couvertures indéchirables et de vêtements jetables, interphones) ; l'humanisation de l'univers carcéral avec la mise en place de mesures particulières pour les quartiers disciplinaires (développement de l'accès au téléphone notamment) ; le développement des expérimentations (« codétenus de soutien » et la vidéo surveillance) ; le développement des activités en détention. Les dispositifs expérimentés sont inspirés par certains systèmes européens voisins qui ont démontré leur efficacité en termes de baisse du nombre de suicides en détention. Ils sont issus du constat de la nécessité d'une prise en charge de la personne détenue à risque suicidaire par l'ensemble de la « communauté carcérale ». Par ailleurs et dans un souci de transparence, les chiffres relatifs aux suicides en milieu pénitentiaire seront communiqués et rendus publics deux fois par an. Enfin, sur le principe de l'encellulement individuel, le programme immobilier d'envergure mis en place depuis 2002 visant à augmenter la capacité du parc pénitentiaire, ainsi que la mise en place d'une politique plus volontariste d'alternative à l'incarcération mise en oeuvre par les services pénitentiaires et qui produit d'ores et déjà des effets positifs, contribueront à offrir de meilleures conditions de détention et à atteindre l'objectif fixé par la loi pénitentiaire en la matière.

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