Question de M. GODEFROY Jean-Pierre (Manche - SOC) publiée le 06/03/2009

Question posée en séance publique le 05/03/2009

M. Jean-Pierre Godefroy. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Jour après jour, la France bat de tristes records : les déficits deviennent abyssaux et le chômage explose ; 300 000 emplois ont été détruits ces six derniers mois, dont 90 200 pour le seul mois de janvier, soit déjà le tiers de vos prévisions pour 2009 !

M. Éric Doligé. Et dans les autres pays ?...

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous déclarez que la France résiste mieux que d'autres pays européens.

M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas vrai !

M. Jean-Pierre Godefroy. Ce n'est pas une consolation pour les centaines de milliers de nouveaux chômeurs.

Notre « résistance » n'est due qu'à notre spécificité : un service public fort et des dispositifs de protection sociale efficaces, auxquels le Gouvernement n'a cessé de s'attaquer ces dernières années.

M. Didier Boulaud. C'est exact !

M. Jean-Pierre Godefroy. Face à cette crise d'une gravité extrême, il faut des mesures fortes. Or non seulement vous avez tardé à réagir, mais les réponses que vous apportez sont totalement décalées par rapport à ce que vivent nos concitoyens.

Vous multipliez les annonces, mais la situation ne s'arrangera pas tant que vous ne remettrez pas en cause les dogmes qui fondent votre politique.

Il est évident qu'il faut supprimer la loi TEPA, qui est un boulet pour nos finances publiques. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Concernant le bouclier fiscal, il coûte cher au budget de l'État, comme l'a montré la Cour des comptes, et encourage l'évasion fiscale, sans avoir le moindre effet positif sur l'activité économique.

M. René-Pierre Signé. À la casse !

M. Jean-Pierre Godefroy. Quant à la détaxation des heures supplémentaires, elle ne sert à rien, le nombre d'heures supplémentaires ayant été similaire en 2007, avant la loi, et en 2008. Elle n'est donc bien qu'un effet d'aubaine, puisque l'on a maintenant intérêt à déclarer ses heures supplémentaires pour bénéficier des avantages financiers.

Une telle mesure est catastrophique en période de récession. Il faut non pas gaspiller ainsi inutilement 3 milliards d'euros, mais mobiliser toutes les ressources de la collectivité nationale !

La question n'est plus de travailler plus pour gagner plus, mais bien d'être plus nombreux à travailler. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.) Qui plus est, lorsque la reprise sera là, ce système d'heures supplémentaires constituera un frein à l'embauche.

M. René-Pierre Signé. Eh oui ! En fait, il l'est déjà !

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous avez récemment annoncé, sur l'insistance des syndicats, la création d'un Fonds d'investissement social doté de 2,5 milliards d'euros, afin de soutenir les chômeurs et de leur permettre de suivre une formation dans l'espoir de retrouver un emploi. (Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.)

Toutefois, à examiner les choses de près, on s'aperçoit que le Gouvernement ne consacrera, en fait, que 800 millions d'euros de crédits nouveaux. Pour le reste, …

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Godefroy. … vous vous contentez de réaffecter des sommes déjà programmées ou de dire aux partenaires sociaux d'aller piocher dans les caisses des ASSEDIC ou de la formation professionnelle. En un mot, les salariés licenciés, les chômeurs, n'ont qu'à s'aider eux-mêmes ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Quant au plan de relance uniquement centré sur l'investissement, il ne produit aucun effet au moment même où la crise frappe le plus fort. Il est en décalage total avec l'urgence de la situation ; il risque de porter ses fruits une fois la bataille perdue.

M. le président. Votre question, j'y insiste, mon cher collègue ! Je pense à M. Peyronnet, dernier orateur inscrit.

M. Jean-Pierre Godefroy. Ma question est la suivante, monsieur le président. (Ah ! sur les travées de l'UMP.) Je vous remercie de l'attendre avec autant d'impatience, mes chers collègues !

M. Éric Doligé. On ne l'attend pas !

M. Jean-Pierre Godefroy. Avez-vous enfin l'intention d'orienter les efforts de nation en priorité vers la relance de la consommation ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)


Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 06/03/2009

Réponse apportée en séance publique le 05/03/2009

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Monsieur le sénateur, revenons précisément sur quelques chiffres et rectifions-les chaque fois qu'ils ne sont pas justes.

L'économie française n'a pas détruit 600 000 emplois ! Il s'agit du nombre des demandeurs d'emploi, et non pas de celui des destructions d'emplois.

M. René-Pierre Signé. 350 000 !

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous prévoyons pour l'année 2009, l'année la plus difficile en cette période de crise, 350 000 destructions d'emplois. Ne confondons pas les choses et n'induisons personne en erreur !

J'aborderai maintenant la question de la consommation. Monsieur le sénateur, dans quel domaine l'économie française a-t-elle réalisé son meilleur score en janvier ? Dans celui de l'exportation ? Non ! Dans celui des investissements ? Non ! Précisément dans celui de la consommation, …

M. Jacques Mahéas. Et alors ?

Mme Christine Lagarde, ministre. … avec un taux de croissance de 1,8 %.

M. René-Pierre Signé. C'est l'effet des fêtes !

Mme Christine Lagarde, ministre. Il faut donc centrer prioritairement notre effort non pas dans ce secteur, mais sur l'investissement et le soutien aux populations qui sont les plus victimes de la crise.

Tels sont les deux axes principaux de notre action, et nous avons pris de multiples mesures à cet effet.

Examinons maintenant les chiffres du chômage, puisque vous y avez fait allusion, monsieur le sénateur.

Les chiffres du quatrième trimestre de l'année 2008 dénotent une progression sensible du chômage, …

M. René-Pierre Signé. Catastrophique !

Mme Christine Lagarde, ministre. … mais nous sommes partis du taux le plus bas depuis vingt-cinq ans : de 7,2 %, …

M. René-Pierre Signé. Avec les emplois aidés !

Mme Christine Lagarde, ministre. … nous passons à 7,8 %. Cette augmentation s'explique par le freinage brutal de l'économie française, puisque cette dernière a connu une croissance négative de 1,2 % au quatrième trimestre 2008. Dans ces conditions, il était inéluctable de connaître un accroissement du chômage au cours du quatrième trimestre.

Toutefois, nous ne sommes pas restés les deux pieds dans le même sabot !

M. Bernard Frimat. Vous n'avez même plus de sabots !

Mme Christine Lagarde, ministre. Nous avons pris une série de dispositions.

Premièrement, nous avons augmenté de manière progressive l'indemnisation du chômage partiel, en la faisant passer de 50 % à 60 %, puis à 75 %, et nous avons accru le quota d'heures supplémentaires autorisées pour les sociétés qui doivent recourir à des mesures d'activités partielles en le portant à 1 000 heures.

M. Jean-Pierre Godefroy. Faites le calcul !

Mme Christine Lagarde, ministre. Par ailleurs, nous avons encouragé les très petites entreprises de moins de dix salariés à embaucher en franchise totale de contributions sociales.

Aujourd'hui, les petites entreprises de moins de dix salariés embauchent à un rythme de 2 000 nouveaux salariés par jour, et ce depuis maintenant quinze jours. (M. Didier Boulaud montre le titre d'un article de journal intitulé : « Chômage record ».)

Renforcer l'indemnisation partielle du chômage et encourager les TPE à embaucher, car nous savons que ce sont elles qui embauchent : telles sont les deux mesures que nous avons prises pour inciter les entreprises à maintenir les salariés dans l'emploi.

M. le président. Je vous demande de bien vouloir conclure, madame la ministre !

Mme Christine Lagarde, ministre. Sous l'autorité de François Fillon, le Gouvernement a engagé les partenaires sociaux à améliorer le système d'indemnisation du chômage. Sur les deux fronts que j'ai cités, nous luttons donc contre un taux de chômage dégradé en raison du freinage de l'économie française. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. René-Pierre Signé. La loi TEPA, le péché originel !

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