Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - UMP) publiée le 06/11/2008

Mme Catherine Dumas attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'expérimentation du stationnement autorisé sur les places de livraison à Paris.

Sous l'impulsion conjointe de la ville de Paris et de la préfecture de police, un système expérimental est actuellement à l'étude pour autoriser le stationnement résidentiel sur les places de livraison aux heures creuses, où les professionnels en ont le moins besoin, la nuit entre 20 heures et 8 heures, les week-ends et les jours fériés. L'expérimentation du dispositif doit être menée à partir de janvier 2009 et pour une durée de six mois dans deux « arrondissements tests », à savoir l'intégralité du 3ème arrondissement et le secteur dit « des Batignolles » (de l'avenue de Clichy à la rue de Rome) dans le 17ème arrondissement.

Si l'amélioration des conditions de stationnement des parisiens doit évidemment être recherchée et facilitée, elle ne saurait être atteinte de manière partielle ou même inégalitaire entre les usagers des différents quartiers de la capitale. L'application de régimes de stationnement variables d'une rue à l'autre, parfois au sein d'un même arrondissement, pose un problème pour l'usager, car elle porte atteinte au principe d'égalité devant le service public consacré par la jurisprudence commune au Conseil d'État et au Conseil constitutionnel, principe qui s'impose à l'ensemble des actes administratifs.

Ce principe interdit à l'administration de traiter de manière différente des individus placés dans des situations identiques. La mise en place de discriminations, même temporaires et portant sur un objet limité tel que le stationnement sur des emplacements réservés, basées sur le seul caractère de la résidence dans une rue, un quartier ou un arrondissement déterminé d'une même ville, pourrait dès lors être contestée devant la juridiction administrative où même engager la responsabilité de l'État et du maire de Paris.

Enfin, et pour ne pas dénaturer la fonction première de ces emplacements réservés et entraver le travail des professionnels, le dispositif prévoit de maintenir des facilités de stationnement dédié aux livraisons, en particulier pour les gros camions ne pouvant décharger leurs cargaisons que de nuit. Là encore, la détermination des zones qu'il convient ou non de maintenir pour un usage professionnel peut sembler de nature à créer une rupture d'égalité devant les charges publiques entre les commerçants des différents secteurs.

Elle souhaiterait qu'elle lui précise les modalités techniques et juridiques envisagées par la préfecture de police pour mener cette expérimentation et favoriser sa réussite, en liaison avec les mairies d'arrondissement concernées.

- page 2206


Réponse du Secrétariat d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales publiée le 17/12/2008

Réponse apportée en séance publique le 16/12/2008

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, auteur de la question n° 338, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Mme Catherine Dumas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, on recense aujourd'hui dans la capitale plus de 9 000 places de stationnement réservées pour les livraisons, soit près de 5 % des emplacements disponibles. Le stationnement sur ces zones délimitées est actuellement passible d'une amende de 35 euros et d'un enlèvement du véhicule.

Sous l'impulsion conjointe de la Ville de Paris et de la préfecture de police, un système expérimental est actuellement à l'étude pour autoriser le stationnement résidentiel sur les places de livraison aux heures creuses, lorsque les professionnels en ont le moins besoin, la nuit entre vingt heures et huit heures, les week-ends et les jours fériés.

L'expérimentation du dispositif doit être menée à partir de janvier 2009, pour une durée de six mois, dans deux arrondissements tests : l'intégralité du IIIe arrondissement et le secteur dit « des Batignolles », qui correspond à environ 25 % du XVIIe arrondissement.

Si l'amélioration des conditions de stationnement des Parisiens doit évidemment être recherchée et facilitée, elle ne saurait être atteinte de manière partielle ou même inégalitaire entre les usagers des différents quartiers de la capitale.

L'application de régimes de stationnement variables d'une rue à l'autre, parfois au sein d'un même arrondissement, soulève un problème pour l'usager car elle porte atteinte au principe d'égalité devant le service public consacré par la jurisprudence commune au Conseil d'État et au Conseil constitutionnel, principe qui s'impose à l'ensemble des actes administratifs.

Ce principe interdit à l'administration de traiter de manière différente des individus placés dans des situations identiques. La mise en place de discriminations, même temporaires, et portant sur un objet limité tel que le stationnement sur des emplacements réservés, fondée sur le seul caractère de la résidence dans une rue, un quartier ou un arrondissement déterminé d'une même ville, pourrait dès lors être contestée devant la juridiction administrative ou même engager la responsabilité de l'État et du maire de Paris.

Enfin, pour ne pas dénaturer la fonction première de ces emplacements réservés et, surtout, afin de ne pas entraver le travail des professionnels, le dispositif prévoit de maintenir des facilités de stationnement dédié aux livraisons, en particulier pour les gros camions ne pouvant décharger leurs cargaisons que de nuit.

Là encore, la détermination des zones qu'il convient ou non de maintenir pour un usage professionnel peut sembler de nature à créer une rupture d'égalité devant les charges publiques entre les commerçants des différents secteurs.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous m'indiquer les modalités techniques et juridiques envisagées par la préfecture de police pour mener cette expérimentation globale et favoriser sa réussite, en liaison avec les mairies d'arrondissement concernées ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Madame le sénateur, vous interrogez le ministère de l'intérieur sur l'éventualité d'une expérimentation du stationnement autorisé à Paris.

Comme vous le savez, les aires de livraison sont destinées à faciliter l'arrêt de tout véhicule effectuant la prise en charge ou l'enlèvement de marchandises.

Elles sont utilisables tant par les professionnels que par les particuliers dans des conditions définies par le code de la route.

La réglementation nationale à laquelle elles sont soumises s'applique y compris la nuit et le week-end, ce qui, je le conçois, peut surprendre.

La réservation d'emplacements de livraison doit permettre de préserver la fluidité de la circulation et de disposer d'un réseau de commerces de proximité tout en assurant aux habitants la possibilité d'effectuer leurs opérations de manutention privative.

Devant les difficultés rencontrées, une démarche a été engagée par la mairie de Paris en concertation étroite avec la préfecture de police en vue de recenser les zones de livraison pour les adapter aux secteurs concentrant une activité importante.

L'objectif est de ramener progressivement le nombre de places de livraison de 10 000 à 8 000, les emplacements supprimés pouvant être transformés en places de stationnement payant.

Par ailleurs, les besoins de stationnement sur des emplacements réservés ne présentent pas la même intensité la nuit ou le dimanche.

Le Conseil de Paris a ainsi proposé au préfet de police, qui l'a accepté, que soit conduite dans deux arrondissements, un secteur du XVIIe et la totalité du IIIe, une expérimentation sur six mois visant à autoriser le stationnement nocturne sur les emplacements de livraison, à l'instar de ce qui se fait dans de grandes métropoles étrangères, Barcelone par exemple.

Dans le cadre de cette expérimentation, nous serons particulièrement attentifs au strict respect du principe d'égalité de tous les usagers de la voie publique : le stationnement sera donc autorisé à tout usager et non aux seuls résidents.

J'ajoute, pour apaiser vos craintes, que la limitation de cette démarche temporaire à un périmètre défini ne saurait constituer par essence une discrimination contraire au principe d'égalité entre les usagers, sauf à contester la possibilité même de toute expérimentation dans le domaine du stationnement sur les emplacements de livraison.

Je vous précise, enfin, que le préfet de police a clairement indiqué à l'autorité municipale que si cette opération se révélait concluante, seul un aménagement de la réglementation nationale permettrait de généraliser ce dispositif à l'ensemble de la capitale.

Tels sont les éléments de réponse que je pouvais vous apporter.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d'État.

En tant qu'élue du XVIIe arrondissement de Paris, je suis très attachée au bon déroulement de l'expérimentation qui va être menée et à la réussite de ce projet. Je regrette toutefois que l'ensemble de cet arrondissement n'ait pas été retenu pour conduire cette expérimentation.

Je reste attentive à la mise en œuvre du dispositif tel qu'il a été défini par la Ville de Paris et j'ai pris note de vos observations quant au respect du principe d'égalité des citoyens.

Je soutiendrai cette expérimentation. Je resterai vigilante à ses résultats, en espérant qu'ils permettront une réelle avancée pour les Parisiens qui, comme les Marseillais – qui ont connu une telle expérimentation –, sont très attentifs aux difficultés de stationnement.

- page 3972

Page mise à jour le