Question de M. de BROISSIA Louis (Côte-d'Or - UMP) publiée le 01/05/2008

M. Louis de Broissia attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie sur le coût de l'assainissement de l'eau pour les communes et leurs groupements. Sans remettre en cause la loi sur l'eau et les milieux aquatiques n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 qui constitue une avancée marquante pour la gestion des services publics de l'eau, il faut néanmoins relever l'inquiétude des communes rurales les plus petites quant au financement des travaux de construction ou de mise aux normes des infrastructures d'assainissement d'eau. C'est la raison pour laquelle il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui dresser un état des lieux, au point de vu national, du financement de ces travaux d'envergure.

- page 850


Réponse du Secrétariat d'État aux transports publiée le 21/05/2008

Réponse apportée en séance publique le 20/05/2008

M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, auteur de la question n° 235, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie.

M. Louis de Broissia. J'avoue, monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, que je m'attendais à m'adresser à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie plutôt qu'à vous… Mais je connais à la fois le principe de l'unité gouvernementale et votre propre compétence !

Nous nous en souvenons tous, après son adoption à l'issue de longs et fertiles débats qui ont duré plus d'un an, la loi sur l'eau et les milieux aquatiques – loi importante à laquelle notre collègue Bruno Sido, avec d'autres, a donné un éclat particulier – a été promulguée le 30 décembre 2006. Elle est donc appliquée depuis un peu plus d'un an.

Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes à la tête d'une importante collectivité départementale, et je salue en vous un collègue. Vous vous rappelez donc certainement que le Sénat avait placé les dispositions financières concernant les collectivités territoriales au cœur de ses préoccupations et s'était montré particulièrement vigilant sur ce point.

L'objectif majeur de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques était d'assurer d'ici à 2015 le bon état écologique de l'eau, travail important qui reste à réaliser un peu partout en France.

Je rappelle que la période 2008-2014 correspond au mandat des 36 568 conseils municipaux qui viennent d'être élus et des milliers de syndicats des eaux qui en sont issus.

Conformément aux prescriptions européennes et s'inscrivant dans le Grenelle de l'environnement – en tête des préoccupations du Grenelle de l'environnement, j'espère –, la loi sur l'eau prévoit que les communes françaises doivent réaliser les travaux de construction ou de mise aux normes d'ici à 2015.

Dans sa sagesse, le Sénat avait prévu la création d'un fonds départemental de l'eau, dont j'avais à l'époque discuté avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Flajolet. L'Assemblée nationale a refusé ce fonds, et c'est elle qui, au sein de la commission mixte paritaire, a eu le dernier mot.

Or, monsieur le secrétaire d'État, nous nous heurtons à un problème de financement. Je rappelle que les experts, les grandes banques finançant les collectivités locales, le ministère, avaient estimé les besoins de financement à 14 ou 15 milliards d'euros en six ans, soit quelque 2,5 milliards d'euros par an.

Le conseil général que je présidais encore à la fin de l'année dernière avait prévu des emprunts bonifiés pour permettre aux communes de satisfaire à leurs obligations.

Cependant, les communes les plus petites sont souvent exclues de ces financements, en particulier de ceux que consentent les agences de l'eau. Dans le rapport de février 2008 dressant un bilan de l'application de la loi sur l'eau, M. Flajolet annonce que, à l'heure actuelle, le montant total de l'effort financier que les agences projettent de fournir s'établit aux alentours de 11 milliards d'euros. C'est bien inférieur aux 14 ou 15 milliards évoqués, et il manque donc de 3 à 4 milliards d'euros ! Cela représente par année, pour les collectivités, en particulier départementales, qui s'engagent, quelque 500 millions d'euros supplémentaires de travaux à financer.

Monsieur le secrétaire d'État, ma question est très simple : comment pensez-vous pouvoir appliquer les conclusions du Grenelle de l'environnement dans les 36 568 communes de France, dans ces domaines prioritaires que sont l'eau et l'assainissement ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Mme Kosciusko-Morizet : elle accompagne ce matin à Orléans M. le Président de la République, qui prononce en ce moment-même un discours sur le Grenelle de l'environnement.

En tant que président d'un conseil général, j'entends les maires et les élus parler comme vous de cette question du financement de l'assainissement de l'eau.

La directive européenne de 1991 portant sur les eaux résiduaires urbaines, transposée en droit français dans le code de l'environnement, notamment par les décrets du 3 juin 1994, du 6 mai 2006 et par la fameuse loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006, fixe en effet des objectifs ambitieux de dépollution pour toutes les collectivités. Les investissements nécessaires étant parfois lourds, les collectivités ont besoin d'aides sous forme d'avances ou de subventions. L'État, via ses établissements publics que sont les agences de l'eau, fournit des aides substantielles, en complément de celles qui sont apportées souvent par les conseils généraux et, parfois, par les conseils régionaux.

Les agences de l'eau, dont chacun reconnaît le remarquable travail sur le terrain, doivent faire face depuis quelques années à une très forte demande dans le domaine de l'assainissement des collectivités, qui s'ajoute à d'autres besoins de financements importants, en particulier l'accompagnement des travaux de restauration des cours d'eau prévue par la directive-cadre sur l'eau de décembre 2000.

L'engagement des agences de l'eau aux côtés des communes rurales n'est pas pour autant remis en question, mais leurs financements sont maintenant partagés.

Les neuvièmes programmes d'interventions, sur la période 2007-2012, prévoient globalement une augmentation des aides qui leur sont dédiées. Ainsi, en 2007, les six agences de l'eau ont consacré 409,5 millions d'euros d'aides aux communes rurales, dont 119,5 millions d'euros au titre du programme spécifique de solidarité.

Cet accroissement des aides est le résultat de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, qui inscrit la solidarité rurale au sein des priorités des neuvièmes programmes d'interventions. Les communes rurales peuvent donc bénéficier d'aides spécifiques au titre de cette solidarité, en substitution de l'ancien fonds national pour le développement des adductions d'eau. Les agences de l'eau apportent dans ce cadre 1 milliard d'euros sur la durée du neuvième programme. Ce montant a été réparti par bassin en fonction de leur population rurale. Les petites communes peuvent donc bénéficier de cette solidarité urbain-rural depuis 2008 sur le bassin Seine-Normandie, et depuis 2007 sur le reste de la métropole. Sa programmation fait l'objet d'une concertation annuelle entre l'agence de l'eau et le conseil général, et prend la forme d'une contractualisation lorsque le conseil général participe au financement de l'eau et de l'assainissement.

Cela étant, je comprends parfaitement votre interrogation, ayant moi-même entendu des chefs d'entreprise déclarer qu'ils n'auraient bientôt plus de travaux.

Je demanderai à Mme Kosciusko-Morizet de vous recevoir pour traiter de ce sujet et voir si ces financements, dont on mesure bien l'importance pour nos communes rurales et notre politique de l'eau, peuvent être améliorés.

M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia.

M. Louis de Broissia. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, car il y a une très forte attente dans ce domaine. Mais il y a la durée d'un mandat, des obligations européennes à respecter et des financements réellement problématiques.

La formule d'un emprunt bonifié auquel l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France pourraient apporter leur concours permettrait de dire aux maires aujourd'hui en place, aux conseils municipaux et aux syndicats des eaux, que les obligations seront respectées dans un délai convenable de six ans.

À défaut, pour beaucoup de Français installés dans des zones éloignées, le Grenelle de l'environnement se traduirait par beaucoup de tuyaux pour peu d'habitants alors que, dans les villes, il y a très peu de tuyaux pour beaucoup d'habitants. Il serait donc ressenti comme très inéquitable. Or l'eau est le bien public le plus précieux : on ne peut s'en passer, et c'est un élu d'une zone viticole qui vous le dit !

- page 2214

Page mise à jour le