Question de Mme DINI Muguette (Rhône - UC-UDF) publiée le 03/04/2008

Mme Muguette Dini interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les constructions et installations admises en zone agricole.
L'article R. 123-7 du code de l'urbanisme précise que « seules les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont autorisées dans les zones agricoles délimitées par le plan local d'urbanisme ».
Toutefois, cet article ne donne aucune définition précise « des constructions nécessaires à l'exploitation agricole » et laisse à l'autorité compétente en matière d'instruction et de délivrance du permis de construire toute latitude pour apprécier, au cas par cas, sous le contrôle du juge administratif, la destination et la nature des constructions envisagées.
Concernant les bâtiments d'habitation, c'est la présence nécessaire de l'agriculteur sur l'exploitation qui permet leur construction en zone agricole.
Conformément à ce principe de base, dans le département du Rhône, principalement au niveau des espaces agricoles et naturels périurbains, les exploitants maraîchers et fruitiers se voient refuser la possibilité de construire leur logement sur leur exploitation.
Pour ces derniers, cette situation menace l'avenir de leurs exploitations et ne permet pas la transmission ou la cession d'un ensemble agricole cohérent.
Elle souhaite donc qu'il lui fasse part de sa position sur le sujet et lui demande s'il pourrait préciser le contenu de cette notion de « constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ».

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la pêche publiée le 30/04/2008

Réponse apportée en séance publique le 29/04/2008

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, auteur de la question n° 195, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Muguette Dini. Monsieur le ministre, au titre de l'article R. 123-7 nouveau du code de l'urbanisme, les plans locaux d'urbanisme, les PLU, peuvent désormais délimiter des zones agricoles, visant des secteurs équipés ou non, qu'il est nécessaire de protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

Dans son dernier alinéa, cet article indique que ce zonage exclut toutes les constructions autres qu'agricoles. Il dispose précisément que « les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées » dans les zones agricoles délimitées par le plan local d'urbanisme.

Or le code de l'urbanisme ne donne aucune définition de l'expression « constructions nécessaires à l'exploitation agricole » et laisse à l'autorité compétente, en matière d'instruction et de délivrance du permis de construire, toute latitude pour apprécier, au cas par cas, sous le contrôle du juge administratif, la destination et la nature des constructions envisagées.

Ainsi, par exemple, les bâtiments destinés à abriter le matériel, la production ou les animaux – hangars, granges, étables, porcheries, etc. – sont des constructions admises en zone agricole. En revanche, les bâtiments liés à la commercialisation des produits agricoles ne sont pas autorisés.

Pour les bâtiments d'habitation, c'est la présence nécessaire de l'agriculteur sur l'exploitation qui permet leur construction en zone agricole.

Sur la base de ce principe, dans le département du Rhône, principalement pour les espaces agricoles et naturels périurbains, les exploitants maraîchers et fruitiers se voient refuser la possibilité de construire leur logement sur leur exploitation.

Pour la direction départementale de l'équipement du Rhône, seule la présence de l'éleveur s'avère nécessaire sur son exploitation.

Les élus locaux jugent une telle position incohérente. Pour de nombreux exploitants agricoles, cette situation menace l'avenir de leurs exploitations et ne permet pas la transmission ou la cession d'un ensemble agricole cohérent.

Monsieur le ministre, je vous poserai plusieurs questions. Quels sont les critères pris en compte ? Pourquoi n'y a-t-il pas un examen au cas par cas ? Pourquoi la DDE, la direction départementale de l'équipement, ne travaille-t-elle pas davantage de concert avec la DDA, la direction départementale de l'agriculture ? Pourquoi les chambres d'agriculture, associées à l'élaboration des PLU, ne sont-elles jamais consultées pour avis ?

Je sais que vous avez engagé un travail de réflexion en la matière. Pourriez-vous m'indiquer votre position sur tous ces points ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, vous me permettrez tout d'abord, au nom du Gouvernement, de m'associer à votre joie d'accueillir M. Elie Brun au sein de la Haute Assemblée. Je veux l'assurer de toute la disponibilité du Gouvernement pour l'aider à réussir son mandat dans le prolongement de l'action de notre collègue et ami Hubert Falco.

Mme Dini m'interroge sur un problème important, alors que, subissant une pression sur le foncier, les agriculteurs ont besoin de cet outil de travail au moment où il faut produire plus et mieux non seulement pour satisfaire les besoins de notre pays, mais également pour relever, avec nos partenaires européens, les grands défis mondiaux.

Comme vous l'avez dit à la fin de votre question, madame la sénatrice, j'ai envoyé une circulaire aux préfets pour que soit signée avec les maires et les partenaires des organisations agricoles une charte sur « l'usage économe des terres agricoles ».

Dans notre pays, on constate une pression liée à l'urbanisation, aux activités économiques et même à la reforestation. Voilà quelques semaines, le Président de la République a rappelé devant la profession agricole la nécessité de protéger les terres agricoles.

Cette protection doit particulièrement s'exprimer dans les plans locaux d'urbanisme, les PLU, lors de leur élaboration. L'article R. 123-7 du code de l'urbanisme ouvre la possibilité de classer en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, qu'il faut protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Ce classement permet, sur le fondement du PLU et de son règlement, d'interdire l'urbanisation des secteurs qui en font l'objet.

L'article R. 123-7 autorise toutefois dans ces zones les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole. Cette notion de nécessité, que le demandeur d'un permis de construire doit justifier, correspond pour l'essentiel au caractère indispensable de certaines installations ou constructions du point de vue du fonctionnement et des activités de l'exploitation agricole. À cet égard, la construction d'un logement pour l'exploitant peut se justifier dès lors que la présence de l'exploitant à proximité des terres qu'il exploite s'avère nécessaire au fonctionnement de l'exploitation, au regard du contexte local et compte tenu de la nature des activités agricoles concernées.

Plus généralement, madame la sénatrice, l'activité agricole présente une très grande diversité dans l'ensemble de nos territoires, sur le plan des productions, des structures, des données naturelles de sol et de climat ; vous avez vous-même, dans votre question, évoqué la commercialisation des produits de la ferme. Cette diversité entraîne une grande variété dans la destination et la nature des installations ou des constructions nécessaires à l'exploitation agricole, ce qui rend assez difficile la formulation d'une règle uniforme.

De mon point de vue, cela justifie qu'un examen au cas par cas des projets de demandes d'autorisation de construire soit réalisé, afin d'apprécier au mieux la notion de nécessité au vu des éléments justificatifs produits par le demandeur du permis de construire et des règles établies localement par le PLU.

Cet examen attentif doit garantir au demandeur la sécurité juridique de son projet et donc une bonne visibilité des perspectives, notamment foncières, dans lesquelles il inscrit l'activité de son exploitation.

Telles sont les précisions juridiques que je suis en mesure de vous apporter en réponse à votre question sur la façon de lire le code de l'urbanisme.

À la suite de la demande que vous m'avez faite d'un examen pragmatique au cas par cas, et en m'appuyant sur les exemples que vous avez cités, je rappellerai l'ensemble de ces indications aux directeurs départementaux de l'agriculture et de la forêt.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le ministre, je vous remercie de toutes ces précisions, qui apportent des réponses à mes questions.

J'insiste pour que les directions départementales de l'équipement – en tout cas celle du Rhône ! –, reçoivent bien pour consigne d'être à l'écoute en particulier des élus et des professionnels.

Les élus savent si la demande relève d'une véritable nécessité ou si elle n'est qu'un souhait déguisé de construire à l'intérieur des zones agricoles. Nous devons faire confiance aux uns et aux autres.

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