Question de M. REPENTIN Thierry (Savoie - SOC) publiée le 01/02/2007

M. Thierry Repentin appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) en Combe de Savoie. Depuis plus de trois ans, les services de l'Etat ont mandaté un cabinet d'études aux fins d'expertise, notamment pour conduire l'analyse des risques liés à la rivière Isère et à ses affluents : débit, solidité des digues, problématique liée aux affluents. Au regard de ces éléments, des solutions techniques sont aujourd'hui repérées pour résoudre les problèmes soulevés. Ces aménagements sont jugés possibles et réalistes par le même cabinet d'études mandaté par l'Etat. Pourtant, on s'achemine vers la prescription par anticipation du PPRI lequel ignore complètement les aménagements éventuels et aboutirait à interdire toute construction sur le territoire constituant le périmètre de l'étude avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Ce projet de zonage s'appuie sur la mise en oeuvre d'une doctrine nationale : la non constructibilité derrière les digues alors que le cabinet d'études a confirmé leur solidité et l'absence de surverse en cas de crues centennales. La totalité des terres de plaine est située en contrebas des digues, lesquelles permettent de faire face à une crue centennale. Cette perspective est d'autant plus mal vécue que l'Etat a une part de responsabilité dans la situation actuelle du fait de sa carence dans l'entretien du domaine public fluvial, ce qui l'a conduit dans le cadre d'un plan d'action et de prévention des inondations (PAPI) à dégager une première tranche de 350 000 euros pour l'entretien du lit de l'Isère. Aussi, s'il appartient à l'Etat de faire prévaloir le principe de précaution à travers l'élaboration d'un PPRI dont les élus ne contestent pas le principe, il appartient aussi à l'Etat d'accompagner les territoires dans la recherche de solutions d'autant que ces dernières apparaissent possibles si l'on s'en réfère aux conclusions du bureau d'études. L'exaspération des élus est extrêmement vive face à une absence de concertation des autorités préfectorales et à une volonté de passer en force d'autant que les propositions techniques élaborées par les communes concernées ne sont pas réellement intégrées. En conséquence, il lui demande de bien vouloir s'assurer que les services de l'Etat dans ce département prennent en compte les propositions techniques des élus et de différer dans l'immédiat la mise en oeuvre du PPRI dans l'attente de l'aboutissement du processus de concertation qui doit s'engager prochainement.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la pêche publiée le 21/02/2007

Réponse apportée en séance publique le 20/02/2007

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, auteur de la question n° 1238, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Thierry Repentin. Monsieur le ministre, je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation, PPRI, en Combe de Savoie, depuis les territoires couverts par la communauté de communes de Montmélian, en aval, jusqu'à celui de la CORAL à Albertville, en amont, en incluant le Val Gelon et la Haute Combe de Savoie.

Depuis plus de trois ans, les services de l'État ont mandaté un cabinet d'études aux fins d'expertise, notamment pour conduire l'analyse des risques liés à la rivière Isère et à ses affluents : débit, solidité des digues, problématique liée aux affluents.

Au regard de ces éléments, des solutions techniques sont aujourd'hui repérées pour résoudre les problèmes soulevés. Ces aménagements sont jugés possibles et réalistes par le même cabinet d'études mandaté par l'État.

Pourtant, on s'achemine vers la prescription par anticipation du PPRI, lequel ignore complètement les aménagements éventuels et aboutirait à interdire toute construction sur le territoire constituant le périmètre de l'étude avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Cela condamnerait notamment de manière irréversible le développement, voire l'actuelle urbanisation, d'une large partie du territoire savoyard, en particulier dans le domaine économique.

Ce projet de zonage s'appuie sur la mise en oeuvre d'une doctrine nationale : la non-constructibilité derrière les digues, alors que le cabinet d'études admet leur solidité et l'absence de surverse en cas de crues centennales.

La totalité des terres de plaine est située en contrebas des digues, lesquelles permettent de faire face à une crue centennale. Cette perspective est d'autant plus mal vécue que l'État admet une part de responsabilité dans la situation actuelle du fait de sa carence dans l'entretien du domaine public fluvial, ce qui l'a conduit, dans le cadre d'un plan d'aménagement et de prévention des inondations, à dégager une première tranche de 350 000 euros pour l'entretien du lit de l'Isère.

Aussi, s'il appartient à l'État de faire prévaloir le principe de précaution à travers l'élaboration d'un PPRI que les élus ne contestent pas, il lui revient aussi d'accompagner les territoires dans la recherche de solutions, d'autant que ces dernières apparaissent possibles si l'on s'en réfère aux conclusions du bureau d'études : dire le droit, oui, se protéger derrière, non !

L'exaspération des élus est très vive devant le sentiment d'une absence de concertation des autorités préfectorales et une volonté de passer en force, d'autant que les propositions techniques élaborées par les communes concernées ne sont pas réellement intégrées.

Ces dernières, il faut le rappeler, se sont engagées dans un processus de constitution d'un nouveau syndicat mixte chargé de l'entretien des digues et de la prévention des risques d'inondations. Cette structure serait à même d'apporter des réponses d'une manière globale.

Récemment, une mission d'expertise a été diligentée par Mme la ministre de l'écologie et du développement durable. Cette mission, composée d'un inspecteur général de l'environnement et de deux ingénieurs de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, DDAF, doit apprécier la validité des solutions proposées par les élus locaux.

En conséquence, je vous demande de bien vouloir différer dans l'immédiat la mise en oeuvre du PPRI dans l'attente de l'aboutissement du processus de concertation qui semble enfin engagé entre l'État et les collectivités locales et de tout mettre en oeuvre pour qu'une large partie du territoire savoyard ne soit gelée.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Olin, qui représente notre pays à Bruxelles où se tient aujourd'hui le Conseil des ministres de l'environnement de l'Union européenne. Je vais donc vous donner la réponse qu'elle m'a chargé de vous transmettre.

Comme beaucoup de zones de montagne, le territoire de la Combe de Savoie est exposé à des risques d'inondations importantes, pouvant être destructrices, notamment en cas de rupture de digue.

Une politique de prévention des risques est donc essentielle. Elle passe, comme partout - nous parlions à l'instant avec M. Doublet des îles charentaises et des plans de préventions des risques d'incendie de forêt -, par l'élaboration d'un plan de prévention des risques d'inondation et par la mise en oeuvre d'un plan d'action de prévention des inondations.

Au-delà de la Combe de Savoie, il convient d'assurer une bonne gestion de l'aval et de l'amont et d'éviter d'aggraver les risques dans d'autres secteurs de la vallée de l'Isère. C'est la raison pour laquelle Mme la ministre de l'écologie souhaite que soit engagée une réflexion globale à l'échelle des quatre plans d'action de prévention des inondations de la Combe de Savoie, de la Maurienne, de la Tarentaise et du Grésivaudan.

Le préfet de Savoie a présenté le projet de plan de prévention des risques d'inondation aux communes concernées, et les maires ont émis des critiques et des propositions.

Je puis vous indiquer, monsieur Repentin, que Mme Olin souhaite que la concertation soit la plus approfondie possible et que la prise en compte des projets d'aménagement des collectivités ou de leurs syndicats soit facilitée, sans, bien sûr, que la vigilance sur les objectifs des plans, à savoir la prévention des risques de pertes en vies humaines et de dommages aux biens, ne diminue.

Les mécanismes d'indemnisation reposent sur la solidarité nationale et il serait donc injuste que, face à des risques connus, les aménagements adaptés pour les prévenir et éviter les dommages ne soient pas mis en place.

Mme la ministre de l'écologie rappelle les principes qu'elle demande au préfet d'appliquer scrupuleusement : ne pas aggraver la vulnérabilité des personnes et des biens ; autoriser les aménagements dans les zones d'aléas faibles, les interdire dans les zones d'aléas forts ; considérer que, si les digues constituent un bon moyen d'éviter les crues de moyenne importance, elles ne sont pas une réponse suffisante à ce qu'il est convenu d'appeler les aléas exceptionnels.

En Combe de Savoie, la principale difficulté repose, semble-t-il, sur la prise en compte du dispositif d'endiguement. Il est essentiel que les digues soient rendues fiables préalablement à tout aménagement. Cela concerne autant la robustesse des ouvrages que leur gestion par une maîtrise d'ouvrage clairement identifiée et solide tant sur le plan technique que sur le plan financier.

Dans cet objectif, il paraît essentiel à Mme Olin que les actions engagées par les collectivités territoriales en vue de constituer un syndicat mixte à l'échelle de la Combe de Savoie aboutissent et qu'un programme de restauration des digues de l'Isère puisse être mis en oeuvre par le biais de cette structure.

Mme Olin conclut sa réponse en indiquant que, dès que ces conditions seront remplies, le préfet pourra déterminer les mesures à appliquer dans le cadre du plan de prévention des risques d'inondation.

Monsieur Repentin, je transmettrai dès cet après-midi à Mme Olin les remarques que vous pourriez présenter.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Je suis sensible à la volonté de Mme la ministre de tenir compte des avis des élus et d'engager une large concertation avec eux. Je souhaite simplement rappeler que la topographie du territoire alpin est telle que, si nous adoptions la règle nationale de non-constructibilité derrière les digues comme dogme, plus aucune urbanisation ne serait possible dans toutes les vallées, de la Haute-Savoie aux territoires du sud de la région PACA, à la frontière italienne. J'espère donc que, dans sa sagesse, l'État prendra le temps de la discussion et n'arrêtera pas de plans de prévention des risques d'inondation par anticipation, car il est toujours très difficile de revenir sur une décision nationale. Mieux vaut donc dialoguer au préalable, et je remercie Mme la ministre de l'esprit d'ouverture dont elle fait preuve en la matière.

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