Question de Mme HERMANGE Marie-Thérèse (Paris - UMP) publiée le 28/09/2006

Mme Marie-Thérèse Hermange attire l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur la véritable situation de la greffe et du don de moelle osseuse.
C'est chaque année, en France, moins de 10 000 nouveaux donneurs recrutés, près de 311 malades greffés avec donneur de fichier. De surcroît, inscrire 10 000 donneurs par an, pendant dix ans, n'augmentera pas le fichier de 100 000 donneurs (objectif prévu plan greffe gouvernemental de 2005), puisque d'une part, la classe d'âge qui a fondé le fichier dans les années 86/92 arrive massivement à l'âge de la radiation, d'autre part, qu'un certain nombre de donneurs, perdus de vus ou malades sont sortis du fichier. De plus, cet objectif ne se distingue pas de la logique du plan greffe 2001/2003 qui avait décidé de financer 10 000 donneurs par an durant trois ans, et de conditionner la pérennisation ou l'augmentation des moyens au regard des résultats obtenus en terme de greffes et de proportion de malades greffés avec un greffon français.
Or, en Allemagne le nombre de donneurs recrutés, en quatre mois, s'élève à 100 000. Quant au nombre de malades allemands greffés avec un donneur de fichier, il est de 797 par an, soit plus de 156% qu'en France. A tout ceci s'ajoutent des donneurs refoulés et des volontaires refusés. En effet, les centres donneurs connaissent une telle désorganisation qu'ils ne sont pas à même de faire face à un flux important de donneurs. Quant aux centres chargés de l'accueil et de l'inscription des volontaires, ils n'ont pas toujours les budgets adaptés, le coût des typages en France demeurant encore très élevé. Enfin, il ne semble pas exister de communication officielle auprès du grand public sur le don de moelle osseuse, hormis celle pratiquée par les associations ainsi que par les familles qui ont du mal à garder l'espoir de retrouver, un jour, un donneur compatible.
En conséquence, elle lui demande s'il envisage de parfaire la mission de santé publique des pouvoirs publics que représentent la greffe et le don de moelle osseuse, en concertation avec les associations concernées. Celles-ci proposent d'ailleurs plusieurs pistes (l'augmentation de la capacité des centres donneurs ; l'instauration des campagnes d'information grand public ; l'organisation des campagnes autour des familles concernées ou bien encore la création d'un numéro d'appel gratuit exclusivement destiné à répondre à la question de greffe et don de moelle osseuse) afin d'une part, de baisser le coût des typages, d'autre part, de recruter 100 000 donneurs en trois ans au lieu des dix ans prévus dans le plan greffe gouvernemental 2005. L'objectif numéro un est bien d'amener le nombre de greffés à un seuil décent en France, car en 2005, 1 200 malades supplémentaires ne disposant pas de donneur familial ont été inscrits sur la liste des patients en recherche d'un donneur compatible de moelle osseuse.

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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 22/11/2006

Réponse apportée en séance publique le 21/11/2006

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 1124, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le problème de la greffe et du don de moelle osseuse.

Il y a, chaque année, en France, moins de 10 000 nouveaux donneurs recrutés et 311 malades greffés avec donneur de fichier. De surcroît, inscrire 10 000 donneurs par an pendant dix ans n'augmentera pas le fichier de 100 000 donneurs, d'une part, parce que la classe d'âge qui a servi de base au fichier de 1986 à 1992 arrive maintenant massivement à l'âge de la radiation et, d'autre part, parce qu'un certain nombre de donneurs, perdus de vue ou malades, sont sortis du fichier.

Or, en Allemagne, le nombre de donneurs recrutés, en quatre mois, s'élève à 100 000. Quant au nombre de malades allemands greffés avec un donneur de fichier, il est de 797 par an, soit plus de 156 % qu'en France.

Dans notre pays, des donneurs sont refoulés et des volontaires refusés. Les centres donneurs connaissent une telle désorganisation qu'ils ne sont pas à même de faire face à un flux important de donneurs. Quant aux centres chargés de l'accueil et de l'inscription des volontaires, ils n'ont pas toujours les budgets adaptés, le coût des typages en France demeurant encore très élevé. Enfin, il ne semble pas exister de communication officielle auprès du grand public sur le don de moelle osseuse.

En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande si vous envisagez de parfaire la mission de santé publique des pouvoirs publics que représentent la greffe et le don de moelle osseuse, en concertation avec les associations concernées.

D'ailleurs, je m'étonne qu'il n'y ait pas de communication dans ce domaine, compte tenu du débat que nous connaissons aujourd'hui sur l'éventuelle commercialisation des cellules souches embryonnaires, alors que nous ne savons pas aujourd'hui si elles peuvent entrer dans le traitement de certaines maladies. Même si de nombreux travaux sont menés à l'échelon mondial, leurs résultats sont encore attendus. Or là, nous travaillons sur des cellules souches humaines - des cellules souches sanguines ou des cellules souches adultes - dont l'efficacité a été démontrée dans le traitement de maladies comme le cancer.

Par conséquent, monsieur le ministre il serait important de mettre en place une véritable communication sur ce sujet pour faire en sorte que la politique du don de moelle osseuse se développe dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame le sénateur, vous soulevez une question très importante. Aujourd'hui, de nombreux malades en instance de greffe de moelle osseuse n'ont pas trouvé un donneur compatible avec leurs propres génotypes. Par conséquent, le développement du don de moelle osseuse et du fichier des donneurs ainsi qu'une communication efficace pour que davantage de Françaises et de Français, en dehors de la famille du bénéficiaire du don de moelle osseuse, s'inscrivent longtemps à l'avance sur le fichier, constituent pour nous un enjeu majeur.

Pour répondre aux besoins des patients, l'État a engagé un plan d'action sur dix années visant à rendre accessible l'allogreffe de moelle osseuse à davantage de malades. Le recrutement de 100 00 nouveaux donneurs pour le fichier français a été programmé pour une durée de dix ans, c'est-à-dire un recrutement de 10 000 donneurs par an, soit un recrutement d'environ 12 500 donneurs pour en avoir 10 000 qui soient parfaitement compatibles. Il faut savoir que de nombreux donneurs sortent chaque année du fichier parce que, lorsque l'on atteint l'âge de soixante ans, on ne peut plus donner sa moelle osseuse.

Actuellement, le fichier compte 134 578 donneurs, mais il est insuffisant. Le plan d'action tient compte à la fois des recommandations d'un groupe d'experts de très haut niveau et du souhait des associations de voir s'étendre le fichier français.

Il faut également que la France puisse participer à l'effort mondial de recrutement de nouveaux donneurs pour être en mesure de proposer aux patients étrangers les ressources du fichier français, de même que nous faisons appel, pour les patients français, aux ressources du fichier mondial.

Ce recrutement devrait conduire à augmenter de 25 % à 50 % le taux d'allogreffes non apparentées réalisées à partir du fichier français. Tel est l'objectif de ce plan.

En 2005, 71 % des allogreffes de cellules souches hématopoïétiques non apparentées ont été réalisées à partir de donneurs issus du fichier mondial, contre 75 % en 2003. Les centres donneurs s'organisent de mieux en mieux pour assurer la prise en charge des personnes qui se portent volontaires pour un don de cellules souches hématopoïétiques, que ce soit par un don de moelle osseuse ou de sang périphérique.

Le fait de planifier, pendant dix ans, un recrutement contrôlé permet aussi une réévaluation régulière du recrutement, qui est utile pour le fichier, c'est-à-dire pour les patients. Aujourd'hui, l'innovation thérapeutique peut conduire à prendre en charge différemment certains patients pour qui la greffe de moelle osseuse faisait d'emblée partie, jusqu'à maintenant, du projet de traitement. Il est possible d'améliorer l'actuel fichier de donneurs volontaires, dans l'espoir que les patients trouvent, avec une fréquence accrue, un donneur.

Un certain déséquilibre a été constaté au sein du fichier français : il contient plus de femmes que d'hommes, 60 % contre 40 %. Par ailleurs, 60 % des hommes avaient plus de quarante ans.

En outre, la France a la chance de disposer d'une population qui s'est enrichie au fil des siècles des apports des populations migrantes. Les antigènes HLA constituent une véritable richesse, et c'est cette diversité qui doit être représentée au sein du fichier français. Aussi, le recrutement cherche à intégrer plus volontiers dans le fichier français des hommes âgés de moins de quarante ans d'origine géographique diverse, sans pour autant décourager les autres donneurs qui se portent spontanément volontaires.

En matière de constitution de fichiers, vous avez cité, madame le sénateur, les stratégies mises en place par d'autres pays.

En Italie, par exemple, la stratégie de recrutement va uniquement chercher à remplacer les donneurs sortant du fichier du fait de leur âge par de jeunes hommes âgés de moins de quarante ans. Le fichier italien comporte actuellement 300 000 donneurs.

En Allemagne, pays que vous avez cité, le recrutement mené est massif et non ciblé. La stratégie thérapeutique allemande offre volontiers la greffe en première intention, contrairement à la France. S'élevant à plus de 2 millions de donneurs, ce fichier comprend de nombreux phénotypes identiques dont la fréquence n'apporte que peu de gain thérapeutique. La richesse et l'efficacité d'un fichier se mesurent au nombre de donneurs inscrits, mais aussi à la diversité des donneurs.

En matière de greffe, on constate que la méthode de sélection du donneur est différente en Allemagne et en France. En Allemagne, la greffe est pratiquée avec une exigence de compatibilité moins importante que dans notre pays. À ce jour, il n'existe pas d'étude comparative sur les résultats des greffes dans les deux pays.

Enfin, des efforts sont actuellement engagés pour faire connaître le don de moelle et inciter nos concitoyens à se porter volontaire. Vous avez tout à fait raison, madame le sénateur, d'insister sur ce point, car il est essentiel. Ainsi, le ministre de la santé, M. Xavier Bertrand a décidé de lancer, ce mois-ci, une action de sensibilisation dans laquelle le don de moelle a toute sa place.

Dans le même esprit, l'Agence de la biomédecine, dont l'une des missions est d'assurer la promotion du don, a commencé, le 16 novembre dernier, sa campagne nationale sur le don de moelle osseuse, qui sera la première de cette envergure. Ces actions de communication grand public ont été bien sûr organisées avec la coopération des associations de promotion du don et des associations de malades.

Notre volonté est d'accélérer le recrutement des volontaires inscrits sur le fichier français des donneurs de greffe de moelle osseuse, tout en respectant une même exigence qualitative et un impératif de diversité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'impulsion que vous pourrez donner à la politique des greffes de moelle osseuse. Nous connaissons tous des malades, enfants ou adultes, qui attendent des dons, et des professeurs de médecine de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, de Paris ou d'ailleurs qui recherchent de tels dons.

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