Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC-UDF) publiée le 04/05/2006

M. Yves Détraigne attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la nécessité d'interdire l'importation et la commercialisation des produits issus de la chasse aux phoques (peaux, graisse, huile…).

La législation en vigueur en Europe datant de 1983 – qui interdit l'importation, dans les États membres, des peaux de blanchons et de bébés phoques « à dos bleu » - mérite en effet d'être revue dans le sens du plan d'action "bien-être" animal mis en place en janvier dernier par l'Union européenne.

Alors même que l'abattage des phoques sur la banquise canadienne a repris depuis plus d'un mois et que 325 000 phoques seront abattus cette année, plusieurs études prouvent que le réchauffement climatique notamment au large des côtes de Terre Neuve fait obstruction à la formation d'une glace stable permettant aux femelles de mettre bas. Ce phénomène entraînerait ainsi la mort des trois quarts des bébés phoques.

Aussi apparaît-il nécessaire que notre pays – à l'instar de plusieurs de ses partenaires européens (Italie, Belgique, Autriche….) – se mobilise contre la chasse aux phoques non seulement pour des questions d'éthique mais aussi pour une question de préservation de l'environnement et de la faune.

En conséquence, il lui demande de lui indiquer, d'une part, quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet et de lui préciser, d'autre part, si elle entend peser auprès de ses partenaires afin de mettre en place une interdiction de l'importation et du commerce de produits issus de la chasse aux phoques au sein de l'Union européenne.

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Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 03/08/2006

La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à la chasse commerciale des phoques. Un recensement effectué en 2004 a montré que la population de phoques du Groenland de l'Atlantique nord-ouest est stabilisée à environ 5,8 millions d'animaux, soit le triple de ce qu'elle était en 1970. Le Canada pratique une chasse aux phoques durable reposant sur de solides plans de gestion fondés sur des données actualisées en permanence et examinées par des scientifiques du Canada, des Etats-Unis et d'Europe. Les quotas de prélèvements de chasse, qui paraissent élevés, représentent en fait moins de 0,06 % des effectifs des populations d'animaux concernées. Ils sont établis selon des principes de conservation rigoureux en vue de maintenir des populations de phoques saines et abondantes. Si les effectifs de phoques atteignent certains seuils de référence, des mesures correctives sont prévues, telles que la diminution du nombre de captures autorisées, la réduction de la période de chasse ou la fermeture de zones de chasse. S'il est confirmé que le réchauffement climatique induit une mortalité notable des bébés phoques, cette donnée sera donc prise en compte. L'absence de surexploitation est confirmée dans les faits, puisque la poursuite de la chasse n'a pas empêché la population de phoques du Groenland de s'accroître de plusieurs millions d'individus au cours des dernières décennies. Les phoques chassés, essentiellement les phoques du Groenland, ne sont pas menacés. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), qui réglemente, voire interdit les importations et exportations pour éviter la surexploitation des espèces sauvages à des fins commerciales, ne contient aucune des espèces concernées dans ses annexes, car ces phoques ne remplissent pas les critères d'inscription. La chasse au phoque est strictement réglementée. Depuis 1987, il est interdit de chasser les jeunes animaux (« blanchons » et « dos bleu ») à des fins commerciales. Les phoques adultes ne peuvent pas être dérangés dans les aires de reproduction ou de mise-bas. Les mammifères marins ne peuvent être abattus que d'une façon qui entraîne la mort rapidement et sans cruauté. A cet effet, la réglementation impose aux chasseurs d'utiliser certaines armes et d'effectuer de longues périodes d'apprentissage. De plus, les méthodes de chasse ont été modifiées depuis 2003 à la lumière des recommandations de l'Association canadienne des vétérinaires afin d'établir clairement la mort de l'animal avant de le saigner et de le dépecer (test du réflexe de clignement). Le respect de la réglementation est étroitement surveillé par les agents des pêches au moyen de patrouilles aériennes, de patrouilles de surface (à bord de bateaux), de vérification à quai des bateaux aux lieux de débarquement, ainsi que d'inspections aux points d'achat et dans les usines de transformation. Les infractions sont prises au sérieux et les chasseurs de phoques qui ne se conforment pas au Règlement sur les mammifères marins sont pénalisés. Les conséquences de ces actes illégaux peuvent être des amendes imposées par le tribunal et la saisie des prises, des engins de pêches, des bateaux et des permis. Il n'est donc pas fondé d'invoquer la disparition des phoques, ni des raisons de bien-être animal, pour légitimer un boycott des importations et de la commercialisation des produits issus de la chasse aux phoques. Deux des quatre espèces de phoques chassées au Canada, le phoque gris et le phoque annelé, sont intégralement protégées en France par l'arrêté du 27 juillet 1995 fixant la liste des mammifères marins protégés sur le territoire national, qui en interdit notamment le transport, la vente et l'achat. Les deux autres espèces, le phoque du Groenland et le phoque à crête, font l'objet en France d'une interdiction de transport, de vente et d'achat des spécimens issus de phoques de moins de quatre semaines. Compte tenu de ces éléments, il ne serait ni administrativement opportun ni scientifiquement fondé d'imposer des restrictions commerciales supplémentaires.

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