Question de M. LAGAUCHE Serge (Val-de-Marne - SOC) publiée le 23/12/2004

M. Serge Lagauche souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnes détenues dans les prisons françaises et qui sont atteintes de pathologies graves. Il se permet ainsi de lui rappeler que la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades a prévu dans son article 10 un dispositif relatif à la suspension de peine pour raisons médicales et qu'aux termes de cette loi " la suspension de peine peut être ordonnée, quelle que soit la nature de la peine ou la durée de la peine restant à subir (...) pour les condamnés dont il est établi qu'ils sont atteints d'une pathologie engageant le pronostic vital ou que leur état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention ". En dépit des conditions très précises énoncées par cette loi pour ouvrir aux détenus malades un droit à la suspension de l'exécution de leur peine, il lui rappelle la trop faible proportion des prisonniers atteints de pathologies lourdes qui ont pu bénéficier de l'application de cette loi. Il dénonce ainsi un déni de droit au détriment des personnes malades incarcérées dont la pathologie ne fait souvent qu'empirer du fait du caractère anxiogène aggravant induit par l'environnement carcéral. En conséquence, il lui demande quelles mesures urgentes il compte prendre pour éviter que des dizaines de détenus continuent de mourir dans les prisons françaises sans avoir pu bénéficier d'un droit pourtant consubstantiel de tout respect de la dignité humaine.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 21/04/2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable parlementaire qu'il porte une attention toute particulière à l'application de l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, introduit par l'article 10 de la loi du 4 mars 2002 relatif aux personnes détenues malades. Une politique volontariste a été engagée et toutes instructions utiles ont été données aux services de l'administration pénitentiaire pour que la situation des personnes susceptibles de faire l'objet d'un tel aménagement de peine soit largement portée à la connaissance des services sanitaires et des autorités judiciaires, ces dernières étant seules compétentes pour prononcer ce type de mesures. En outre, une circulaire conjointe santé-justice du 24 juillet 2003 a pour but de sensibiliser les personnels sanitaires et d'améliorer la coordination entre les services hospitaliers et les services pénitentiaires. Depuis 2002, un bilan trimestriel des demandes de suspension de peine pour raison médicale est réalisé par les services pénitentiaires. Au 31 décembre 2004, 165 personnes détenues avaient bénéficié de cette mesure depuis la promulgation de la loi du 4 mars 2002, dont 9 au cours du quatrième trimestre 2004. Il y a lieu de préciser que l'octroi d'une suspension de peine au regard de l'article 720-1-1 ci-dessus mentionné requiert les conclusions concordantes de deux expertises médicales distinctes. De plus, un travail partenarial entre les services pénitentiaires et les services médico-sociaux est indispensable à la recherche éventuelle d'un lieu de vie adéquat pour les personnes bénéficiaires de cette mesure. La réalisation de ces expertises et l'obtention d'un hébergement adapté nécessitent donc certains délais. Le ministère de la justice et le ministère de la santé étudient conjointement les possibilités d'améliorer la mise en oeuvre de ces dispositions pour les personnes détenues susceptibles d'en bénéficier. Ainsi une réunion interministérielle avec les représentants de différentes associations oeuvrant en faveur des personnes détenues au sein d'un pôle « suspension de peine pour raison médicale » a été organisée le 25 janvier 2005. De surcroît, la direction de l'administration pénitentiaire travaille actuellement à la mise en place de deux projets d'hébergement pour les personnes détenues âgées sortant de prison. L'un s'inscrit dans la convention pluriannuelle d'objectifs 2004-2006, signée le 15 décembre 2004 par le président de la Croix-Rouge française et le garde des sceaux et vise à l'accueil, dans le cadre d'un placement à l'extérieur, de personnes âgées ayant effectué de longues peines. L'autre projet consiste à créer, en partenariat avec l'association d'aide aux personnes en voie de réinsertion (APERI), une unité expérimentale destinée à accueillir à titre transitoire des personnes condamnées à de longues peines sortant de prison, dans le cadre plus large d'un placement à l'extérieur, d'une libération conditionnelle ou d'une suspension de peine.

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