Question de M. DUFAUT Alain (Vaucluse - UMP) publiée le 03/06/2004

M. Alain Dufaut appelle l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les préoccupations exprimées par les responsables d'associations syndicales de rivières du département de Vaucluse, au regard des difficultés liées à l'entretien des cours d'eau non domaniaux et la protection de leurs berges. Deux séries de problèmes inquiètent particulièrement les intéressés. En premier lieu, les travaux sont, d'après la loi, à la charge des propriétaires riverains mais l'article 151-36 du code rural prévoit que les collectivités peuvent prescrire ou exécuter des travaux dans ces cours d'eau. Reste la question de la responsabilité de chacun en cas de sinistre chez un propriétaire privé. Les récentes inondations ayant frappé le département de Vaucluse ont donné lieu à des conflits et certaines décisions de justice ont débouché sur des condamnations des syndicats hydrauliques, les propriétaires privés n'hésitant plus à saisir les tribunaux. Il semble paradoxal que les syndicats, intervenant du fait de la défaillance des propriétaires riverains en matière d'entretien, voient ensuite leur responsabilité engagée par ces mêmes riverains au motif d'un défaut d'entretien. Par ailleurs, l'enlèvement des bancs de gravier, qui obstruent ou diminuent la capacité d'écoulement des rivières, est également au coeur des difficultés actuelles des responsables syndicaux. Ces opérations d'enlèvement de gravier, qui sont indispensables pour limiter le risque d'inondations, coûtent extrêmement cher alors qu'elles pourraient être rentabilisées si les collectivités étaient autorisées à commercialiser ces matériaux. C'est pourquoi, il souhaiterait connaître son avis sur l'opportunité, d'une part, de modifier l'article 151-36 du code rural et permettre ainsi une clarification des responsabilités de chacun en matière d'entretien des cours d'eau domaniaux et de protection de leurs berges et, d'autre part, d'assouplir les démarches administratives préalables à l'obtention des autorisations de dégagement du lit des rivières par l'enlèvement des bancs de gravier et d'autoriser les gestionnaires des cours d'eau à pouvoir commercialiser les matériaux issus de ces travaux.

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Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 24/03/2005

Le ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant l'entretien des cours d'eau non domaniaux. Les propriétaires riverains ont une obligation d'entretien régulier des cours d'eau en application de l'article L. 215-14 du code de l'environnement. Cette obligation est complétée par les dispositions de l'article L. 211-7 du code de l'environnement (ex-art. 31 de la loi sur l'eau), qui permet aux collectivités territoriales concernées ou à leur groupement d'assurer, à la place des propriétaires riverains défaillants, l'entretien durable des cours d'eau. Pour que ces interventions soient possibles sur les cours d'eau non domaniaux, une procédure de déclaration d'intérêt général est nécessaire. Ce ne sont donc pas les dispositions de l'article L. 151-36 du code rural qui permettent aux collectivités d'intervenir pour des travaux d'intérêt général ou d'urgence liés à des questions de dégradation de l'état des cours d'eau, de sécurité ou de risque d'inondation. Les notions d'intérêt général et d'urgence visées à l'article L. 151-36 du code rural se réfèrent aux aspects agricoles et forestiers. S'agissant de la question de l'enlèvement de matériaux excédentaires accumulés dans le lit mineur des cours d'eau, il faut rappeler que des extractions commerciales excessives ont parfois été menées sans précaution dans le passé. Elles ont conduit à d'importants dysfonctionnements sur les cours d'eau en provoquant, par exemple, un approfondissement du lit des cours d'eau (jusqu'à 10 mètres dans certains cas), qui lui-même a souvent entraîné la déstabilisation de ponts, de digues latérales et d'ouvrages en rivière, ainsi qu'une accélération des crues qui peuvent encore avoir aujourd'hui des graves conséquences à l'aval. Pour éviter ces risques, la réglementation sur l'exploitation des carrières dans le lit mineur des cours d'eau a effectivement été durcie en 1994. Aussi, en application de la législation sur les installations classées, les extractions commerciales dans le lit mineur des cours d'eau ne sont désormais autorisées, conformément à l'arrêté du 22 septembre 1994, que si elles ont pour objectif l'entretien du lit mineur ou son aménagement. Les curages ou dragages d'entretien peuvent donc être autorisés en étant soumis à la loi sur l'eau ou à la législation des installations classées en fonction de la quantité de matériaux extraits et de leur utilisation. Mais, dans tous les cas, les opérations de dragage qui présentent un caractère d'urgence et qui sont destinées à assurer le libre écoulement des eaux sont exclues de la législation des installations classées et peuvent être entreprises par les responsables de l'entretien des cours d'eau sans procédure préalable (et notamment sans enquête publique), sous réserve d'en rendre compte ultérieurement à l'autorité administrative. Cela dit, concernant l'entretien et la restauration des cours d'eau, la complexité du dispositif réglementaire actuel est soulignée à la fois par les gestionnaires des cours d'eau et par les services chargés de la police de l'eau : elle nuit d'ailleurs à sa bonne application. Aussi, dans le cadre du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques actuellement au Conseil d'Etat, le ministère de l'écologie et du développement durable propose des simplifications de procédure (art. 5 de ce projet de loi). L'un des objectifs est de regrouper l'ensemble des éléments nécessaires à l'instruction des dossiers dans des rubriques de la nomenclature « eau ». Pour les opérations assurées par les collectivités territoriales ou leur groupement en application de l'article L. 211-7 du code de l'environnement, seraient donc seulement concernées la loi sur l'eau et la procédure déclarant d'intérêt général leur intervention. Un deuxième objectif serait de pouvoir délivrer une autorisation pluriannuelle (sur un bassin versant, par exemple) sur la base d'un document (état initial, actions prévues...) qui permettrait à l'ensemble des partenaires de connaître et, le cas échéant, de se prononcer sur le programme d'intervention. Ensuite, annuellement, un simple rapprochement du gestionnaire avec le service chargé de la police de l'eau serait suffisant pour caler les interventions annuelles. Un décret précisera les modalités d'application de cet article du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, et la nomenclature « eau » sera adaptée et complétée.

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