Question de M. OUDIN Jacques (Vendée - UMP) publiée le 20/06/2003

M. Jacques Oudin attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la nécessité d'améliorer significativement la qualité des eaux littorales destinées à la baignade. La Commission européenne a publié le 5 juin dernier le bilan annuel pour 2002 de la qualité des eaux de baignade dans les différents Etats membres de l'Union vis-à-vis des exigences de la directive 76/160/CEE. Concernant la France, le communiqué de la Commission souligne qu'en dépit d'une amélioration par rapport à 2001, " les taux de conformité restent faibles. Ces chiffres situent la France dans la fourchette inférieure des pays de l'Union européenne. Par ailleurs, le pourcentage de zones de baignade insuffisamment échantillonnées reste très élevé ". De fait, notre pays présente de loin le taux de conformité le plus faible pour les eaux littorales : 87,5 %, contre 95,6 % en moyenne pour l'ensemble des Etats membres. Les taux de conformité observés dans les autres Etats varient de 93 % à 100 %, les pays connaissant les plus fortes fréquentations touristiques estivales (Grèce, Espagne, Portugal) affichant des taux particulièrement élevés, compris entre 98 % et 100 %. Cette situation est d'autant plus préoccupante que les instances communautaires préparent actuellement une révision de la directive relative à la qualité des eaux de baignade. Ce texte, au stade actuel de son élaboration, renforcerait encore la sévérité des critères de qualité s'appliquant aux eaux de baignade. A la veille de la saison estivale, il importe de rassurer à la fois nos concitoyens et les visiteurs étrangers. Compte tenu des enjeux sanitaires et économiques liés à la fréquentation des sites de baignade côtiers, il souhaiterait connaître les mesures qui seront prises pour améliorer la qualité des eaux de baignade et, en particulier, s'il est envisagé de faire de l'assainissement en zone littorale l'une des premières priorités de la politique de l'eau pour les prochaines années.

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Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 08/10/2003

Réponse apportée en séance publique le 07/10/2003

M. Jacques Oudin. Madame la ministre, la commission européenne a publié le 5 juin dernier le bilan annuel pour 2002 de la qualité des eaux de baignade dans les différents Etats membres de l'Union vis-à-vis des exigences de la directive 76/160/CEE.

Concernant la France, la Commission souligne que, en dépit d'une amélioration par rapport à 2001, « les taux de conformité restent faibles. Ces chiffres situent la France dans la fourchette inférieure des pays de l'Union européenne. Par ailleurs, le pourcentage de zones de baignade insuffisamment échantillonnées reste très élevé. »

De fait, notre pays présente, de loin, le taux de conformité le plus faible pour les eaux littorales : 87,5 % contre 95,6 % en moyenne pour l'ensemble des Etats membres. Les taux de conformité observés dans les autres Etats varient de 93 % à 100 %, les pays connaissant les plus fortes fréquentations touristiques estivales - la Grèce, l'Espagne, le Portugal - affichant des taux particulièrement élevés, compris entre 98 % et 100 %.

Cette situation est d'autant plus préoccupante que les instances communautaires préparent actuellement une révision de la directive relative à la qualité des eaux de baignade. Ce texte, qui en est au stade de l'élaboration, renforcerait encore la sévérité des critères de qualité s'appliquant aux eaux de baignade.

En outre, la France a déjà fait l'objet d'une première condamnation par la Cour de justice des Communautés européennes le 15 mars 2001 pour défaut d'échantillonnage des eaux de baignade. Et, récemment - le 24 juillet 2003 -, un dernier avertissement a été adressé à notre pays pour qu'il se mette en conformité avec la décision du 15 mars 2001.

Les difficultés que nous rencontrons dans ce secteur s'ajoutent malheureusement aux nombreux retards que nous accusons déjà par rapport aux échéances communautaires dans le domaine de l'eau : dépassement des normes de potabilité pour les nitrates ou les pesticides et insuffisance du traitement des eaux résiduaires urbaines.

Compte tenu des enjeux sanitaires et économiques liés aux usages de l'eau, pourriez-vous, madame la ministre, nous indiquer les mesures qui seront prises pour améliorer la qualité des eaux de baignade et résorber les retards observés dans le domaine de l'eau ? Nous savons, en effet, que vous avez la ferme intention de redresser cette situation.

Est-il notamment envisagé de faire de l'assainissement en zone littorale l'une des premières priorités de la politique de l'eau pour les prochaines années ?

Vous comprendrez que, en tant que président de l'association vendéenne des élus du littoral et auteur, il y a quelques années, d'un rapport sur la qualité des eaux littorales pour le comité de bassin Loire-Bretagne, je me préoccupe de cette question importante non seulement du point de vue sanitaire, mais également pour la réputation de notre pays, qui est une des premières destinations touristiques du monde.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Cher Jacques Oudin, vous êtes en effet un spécialiste reconnu de l'eau - et pas seulement des eaux littorales - et le représentant d'un superbe département touristique : la Vendée. Il n'est donc pas étonnant que vous posiez une question sur la qualité des eaux de baignade.

La réponse que je vais vous donner a, bien entendu, été préparée en concertation avec le ministre chargé de la santé, qui assure le suivi de la qualité des eaux de baignade dans notre pays.

La directive européenne du 8 décembre 1975 que vous avez évoquée, qui a été transposée en droit français au mois d'avril 1981, fixe non seulement les règles d'hygiène et de sécurité applicables aux piscines et aux baignades aménagées, mais également le cadre réglementaire du contrôle sanitaire des eaux de baignade ainsi que les modalités d'interprétation des résultats obtenus.

La conformité des eaux de baignade est déterminée en fonction du pourcentage de conformité aux limites de qualité fixées par la directive pour les six paramètres pris en compte par le classement.

Par ailleurs, la directive fixe un nombre minimal de prélèvements à réaliser, étant précisé en annexe que les fréquences d'échantillonnage peuvent être réduites d'un facteur 2 par les Etats membres quand « un échantillonnage effectué au cours des années précédentes a donné des résultats sensiblement plus favorables que ceux prévus par la directive et quand aucune condition susceptible d'avoir diminué la qualité des eaux n'est intervenue ».

La Commission européenne a considéré dans son rapport annuel 2002 sur la qualité des eaux de baignade des Etats membres que certains sites français ne pouvaient bénéficier de cette réduction des fréquences d'échantillonnage en 2003. Toutefois, ces sites ont été déclarés non conformes indépendamment de la qualité réelle mesurée lors des prélèvements effectués.

Sur la base des règles précitées, les résultats de la France sont de l'ordre de 90 % de conformité des sites de baignade.

Les services du ministère de la santé ont pris des dispositions afin d'augmenter en 2003 le nombre de contrôles. En 2002, 33 000 prélèvements ont été réalisés sur 3 326 sites de baignade. Si l'on s'en tient au résultat des analyses microbiologiques effectuées sans prendre en compte la fréquence d'échantillonnage, ce sont alors 95,7 % des sites de baignade français qui sont de bonne qualité et 4,3 % de qualité insuffisante.

Le pourcentage des eaux de baignade de bonne qualité passerait ainsi de moins de 70 % en 1976 à près de 96 % en 2002, ce qui situe la France dans la moyenne européenne.

Remercions d'abord les collectivités et l'Etat de cette amélioration en termes d'assainissement, mais les efforts, vous le signalez, doivent être poursuivis afin de maintenir les acquis et d'atteindre si possible un excellent niveau de qualité pour l'ensemble des zones de baignade.

Les principales causes de pollution recensées en 2002 et ayant entraîné le déclassement tiennent - vous l'avez souligné à juste titre - à des insuffisances du dispositif d'assainissement des collectivités associées à des conditions météorologiques défavorables.

De façon générale, l'assainissement est une priorité des programmes d'intervention des agences de l'eau, au titre de l'application de la directive européenne relative aux eaux résiduaires urbaines. Ces agences ont ainsi apporté, dans le cadre de leur viie programme d'intervention 1997-2002, 11 milliards d'euros d'aides aux collectivités, ces dernières ayant engagé sur la même période 19,2 milliards d'euros de travaux.

Le viiie programme d'intervention 2003-2006 prend en compte de façon prioritaire l'accentuation de la mise en oeuvre de cette directive relative aux eaux résiduaires urbaines, en particulier pour le littoral.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que, dans le cadre de mes échanges continus avec ces importants établissements publics placés sous ma responsabilité, je veille à ce que le calendrier de marche soit respecté. C'est le premier élément de réponse à votre question.

Second élément, sans qu'il soit question d'intenter un quelconque procès, vous avez raison de souligner que du retard a été pris tant sur le fond du dossier que s'agissant de la transposition des directives européennes. Je procède en ce moment à une mise à jour des transpositions, ce qui apparaît d'ailleurs au travers de divers débats, en particulier du débat, auquel vous participez, sur la future loi sur l'eau puisque nous avons commencé, pour ne prendre aucun retard, par la transposition de la directive-cadre.

M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin.

M. Jacques Oudin. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse extrêmement complète, qui témoigne de votre décision de prendre le dossier à bras-le-corps.

Je rappelle que vous héritez d'une situation lourde. J'en veux pour preuve le nombre de condamnations dont la France a fait l'objet depuis le mois de mars 2001. Le 8 mars 2001 : condamnation de la France par la Cour de justice des Communautés européennes pour le dépassement de la teneur maximale autorisée en nitrates en Bretagne ; le 15 mars 2001 : condamnation pour les eaux de baignade ; le 24 juillet 2001 : saisine de la Cour de justice des Communautés européennes contre la France et deux avis motivés de la Commission européenne ; le 21 janvier 2003 : seconde lettre d'avertissement de la Commission européenne et avis motivé de la Commission européenne ; le 4 avril 2003 : nouvel avertissement concernant les taux de nitrates en Bretagne et, enfin, le 24 juillet 2003 : dernier avertissement pour les eaux de baignade, citation à comparaître concernant le dépassement de la teneur maximale en nitrates de l'eau distribuée en Bretagne et dernier avertissement de la Commission européenne.

Bien entendu, les eaux de baignade sont un exemple parmi d'autres. Je veux simplement souligner que la France n'a peut-être pas fait ce qu'elle aurait dû faire au cours des années 1998-2001. L'héritage que nous avons à gérer est lourd et nous sommes souvent en défaut.

Nous comptons donc sur vous, madame la ministre, pour redresser la situation et faire en sorte que la France devienne, au regard des normes européennes, un partenaire exemplaire.

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