Question de M. WEBER Henri (Seine-Maritime - SOC) publiée le 13/06/2003

Question posée en séance publique le 12/06/2003

M. le président. La parole est à M. Henri Weber.

M. Henri Weber. Ma question s'adresse également à M. le Premier ministre.

MM. René-Pierre Signé et Raymond Courrière. Ce n'est pas lui qui répondra !

M. Henri Weber. Les conflits sociaux de grande ampleur qui affectent notre pays depuis plusieurs semaines sont directement liés à l'incapacité de négocier qui caractérise votre gouvernement (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Vous êtes des partisans du dialogue social, vous !

M. Henri Weber. Elle apparaît très clairement dans le cas du mouvement des enseignants. En effet, ce mouvement a été déclenché par l'annonce d'une décentralisation que votre ministre de l'éducation nationale n'avait ni voulue ni prévue, qu'il n'a donc négociée avec personne, et que vous avez vous-même imposée d'en haut, monsieur le Premier ministre, malgré les assurances données aux syndicats enseignants.

Je voudrais rendre hommage à l'esprit de responsabilité des enseignants, qui ont assuré le bon déroulement des épreuves du baccalauréat en cette journée de mobilisation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Arrêtez, vous nous faites honte !

Mme Nicole Borvo. C'est pourtant ce qu'a dit le ministre lui-même. Ne vous mettez pas en contradiction avec lui !

M. Henri Weber. On peut dire la même chose de la réforme des retraites, qui a été négociée si peu sérieusement avec les syndicats que vous prévoyez seulement maintenant d'ouvrir les négociations sur la modulation de la durée des cotisations selon la pénibilité du travail, l'espérance de vie et le temps de formation !

Si ces négociations - et quelques autres ! - avaient eu lieu avant le dépôt de votre projet de loi, comme le demandaient la majorité des grandes confédérations syndicales et comme cela s'est fait, sans exception, dans tous les pays européens où un consensus a été trouvé, sans doute n'en serions-nous pas là.

A ces négociations bâclées s'ajoute aujourd'hui votre rejet des amendements déposés par l'opposition à l'Assemblée nationale. Ni négociation véritable ni amendements : où est la démocratie sociale et parlementaire dans notre pays ? (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Raymond Courrière. Très bien !

M. Henri Weber. Monsieur le Premier ministre, je ne vous demanderai pas si vous préférez votre parti à votre patrie (Exclamations sur les travées de l'UMP),...

M. Dominique Braye. Cette vérité vous gêne !

M. Robert Del Picchia. Il manque d'arguments !

M. Henri Weber. ... car je n'ai pas la nostalgie des années trente et je me fais une autre opinion de ce que doit être le débat politique et démocratique dans notre pays.

Ma question est la suivante : comptez-vous poursuivre votre politique de passage en force,...

Plusieurs sénateurs du groupe de l'UMP. Oui !

M. Henri Weber. ... au risque de dégrader encore le climat social, comme semblent l'indiquer vos récentes attaques contre le parti socialiste, aussi déplacées que blessantes ?

M. Jean-Pierre Schosteck. Elles sont pourtant vraies !

M. Henri Weber. Ou bien, instruits par l'expérience, vous déciderez-vous enfin à ouvrir de véritables négociations aves les partenaires sociaux...

M. Dominique Braye. Ecoutez Michel Rocard !

M. Charles Revet. Ce sont des trotskistes !

M. Henri Weber. ... sur les retraites, sur la décentralisation, mais aussi sur la réforme de la sécurité sociale, dossier explosif entre tous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)


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Réponse du Ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire publiée le 13/06/2003

Réponse apportée en séance publique le 12/06/2003

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser le ministre des affaires sociales, M. François Fillon, qui est en ce moment même au Parlement pour débattre de ce sujet.

M. Didier Boulaud. A l'Assemblée nationale ! Ici, c'est le Sénat, et c'est aussi le Parlement !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Oui, à l'Assemblée nationale !

Monsieur Weber, je connais trop la puissance de votre pensée et votre volonté de vous référer aux partis socialistes européens. J'ai donc été très heureux de lire ce matin une dépêche citant M. Tony Blair. (Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC s'esclaffent.) Mme Nicole Borvo. Allons chercher nos modèles ailleurs !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. « Nous essayons tous de rendre nos services publics et nos prestations sociales compatibles avec les exigences du monde moderne. Ceci requiert des décisions très difficiles, et je voudrais rendre hommage au courage personnel du Premier ministre français, qui relève ces défis. » (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Didier Boulaud. Blair n'a rien de gauche !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Il ajoutait : « C'est toujours un moment difficile, mais une fois la réforme faite, on s'aperçoit de sa nécessité. » (M. Raymond Courrière s'exclame.)

Je peux comprendre votre frustration, monsieur Weber, vous qui avez une nature plutôt expansive. Pendant cinq ans, vous avez proposé à celles et à ceux qui, au nom de vos amis, gouvernaient ce pays...

M. Claude Estier. Aux électeurs, pas aux amis !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. ... d'engager une réforme des retraites. Cela n'a jamais été fait. C'est le premier élément.

Deuxième élément : vous aviez le souci d'ouvrir le débat sur la pénibilité. Votre souhait a été méprisé par vos amis du gouvernement ; nous avons introduit cette notion dans notre réforme, ce qui représente une grande avancée.

Troisième élément : nous avons pris en compte les primes des fonctionnaires.

Ainsi, nombre de mesures revendiquées par vos amis sont aujourd'hui prises par ce gouvernement. Cela montre bien que nous n'avons pas l'esprit partisan : l'intelligence n'est pas d'un côté ou de l'autre de l'hémicycle, l'intelligence est partagée par tous.

MM. Jean Bizet et Eric Doligé. Ce n'est pas sûr !

Mme Nicole Borvo. C'est le peuple qui juge, ce n'est pas le parti socialiste !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. Nous avons pris des mesures de bon sens, des mesures pragmatiques.

Je lis souvent vos discours, mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition. Dans le monde d'incertitude et d'inquiétude dans lequel nous vivons, rien n'est pis que de nourrir l'opinion d'illusions dangereuses.

Un grand quotidien vient de titrer un de ses articles : « L'illusoire taxation du capital, c'est mettre en péril le contrat intergénérationnel du Français », le système par répartition, qui est au coeur de notre pacte républicain et que nous avons la volonté de sauver.

Alors - et je terminerai sur ce point -, ne laissez pas croire aux uns et aux autres que, aujourd'hui, vous pouvez nous donner des leçons tout simplement parce que vous ne les avez pas appliquées hier.

Nous entendons vos arguments, nous écoutons vos propositions et, lorsqu'elles sont pertinentes et pleines de bon sens,...

Un sénateur de l'UMP. C'est rare !

M. Jean-Paul Delevoye, ministre. ... nous les intégrons. Car ce qui nous importe, ce n'est pas d'élaborer une stratégie de complaisance qui convainque quelques électeurs. Ce que nous voulons, c'est faire gagner le pays en assurant l'avenir de son système de retraites. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Didier Boulaud. Vous n'êtes que de passage, comme tout le monde !

M. Raymond Courrière. Et cela va se terminer plus vite que vous ne le croyez !

M. Didier Boulaud. Apprenez l'histoire de France !

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