Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - RPR) publiée le 28/11/2002

M. Emmanuel Hamel signale à l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, l'information parue dans le quotidien Le Figaro du 2 novembre 2002 qu'un détenu de trente-trois ans placé en détention provisoire en septembre dernier a été retrouvé pendu dans sa cellule le jeudi 31 octobre. Ce suicide par pendaison avec drap serait le quatrième suicide à la maison d'arrêt de Tarbes depuis de mois d'avril. Il lui demande quelles sont les suites données à l'enquête administrative ouverte à la suite du troisième cas de suicide le 16 octobre dans cette maison d'arrêt et les suites de l'information judiciaire ouverte après le suicide du 31 octobre, le quatrième en sept mois dans la même maison d'arrêt alors que cent seize suicides de détenus auront été constatés en métropole et dans les départements d'outre-mer depuis le début de cette année. Quelle est l'action du ministère de la justice pour prévenir beaucoup plus efficacement les risques de suicide dans les prisons françaises ? L'Etat ne doit-il pas protéger la vie, même en prison ?

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 03/04/2003

Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, a l'honneur de porter à la connaissance de l'honorable parlementaire qu'il est particulièrement attentif à la question des suicides dans les établissements pénitentiaires. Quatre suicides ont été dénombrés pour l'ensemble de l'année 2002 à la maison d'arrêt de Tarbes. Le dernier est intervenu le 31 octobre 2002. Chacun de ces suicides a donné lieu à une enquête administrative ainsi qu'à l'ouverture d'une information judiciaire. Les procédures d'instruction étant toujours en cours à ce jour, il n'est possible, ni de les commenter, ni d'en connaître les conclusions. Les enquêtes administratives n'ont mis en évidence aucun dysfonctionnement manifeste dans le processus de prise en charge des détenus. Il résulte ainsi de ces investigations que deux de ces détenus n'avaient présenté aucun signe particulier laissant supposer un risque de passage à l'acte suicidaire. Un troisième avait fait l'objet d'une surveillance renforcée pendant plusieurs mois, surveillance qui n'avait pas été maintenue compte tenu du rétablissement apparent du détenu. Le quatrième s'est pendu cinq minutes après le dernier passage du surveillant qui, particulièrement sensibilisé aux risques suicidaires de ce détenu, avait pris soin de procéder à une dizaine de contrôles de la cellule de l'intéressé dans les deux heures qui avaient précédé. Ces éléments témoignent de l'humilité avec laquelle le phénomène suicidaire doit être appréhendé. Le suicide s'inscrit avant tout dans une histoire individuelle complexe dont les motifs ne sont pas uniques et sont parfois difficilement identifiables. On ne saurait cependant se contenter d'une telle approche. En effet, le phénomène suicidaire est également un fait social qui répond à une régularité statistique. A ce titre, et depuis plusieurs années, l'administration pénitentiaire s'emploie à développer un dispositif de prévention des suicides. La circulaire du 26 avril 2002 est venue renforcer les dispositions en vigueur et se traduit notamment par : un développement des formations du personnel pénitentiaire sur la connaissance du phénomène suicidaire ; un renforcement du repérage du risque suicidaire à travers une meilleure rationalisation de la procédure d'accueil du détenu, un signalement systématique des personnes à risques, une observation des détenus tout au long de leur détention et, plus particulièrement, au cours des périodes sensibles que constituent par exemple la période de la comparution devant la juridiction de jugement ou le placement en quartier disciplinaire ; un plus grand soutien aux personnes détenues présentant un risque suicidaire en favorisant les contacts avec l'extérieur ou encore en proposant des choix d'activités plus étendus. La mise en oeuvre efficace d'un tel dispositif prend nécessairement du temps car elle passe par une méthode de travail fondée sur l'échange et la pluridisciplinarité, par une forte mobilisation de toutes les catégories de personnel, tant les personnels de surveillance, les équipes socio-éducatives que les équipes soignantes et les partenaires associatifs. Elle induit donc un changement profond des cultures professionnelles des uns et des autres qui ne peut être apprécié sur une durée de quelques mois. S'inscrivant dans cette démarche offensive, chaque direction régionale des services pénitentiaires a rendu compte par un rapport détaillé de l'ensemble des actions engagées en terme de prévention du suicide. Enfin, le 23 janvier 2003, une mission a été confiée, conjointement par le ministère de la justice et le ministère de la santé, à M. le professeur Jean-Louis Terra, chef de service au centre hospitalier spécialisé Le Vinatier à Bron, avec pour objectif, d'ici au 15 septembre prochain, d'évaluer les actions mises en place jusqu'à présent et de proposer des éléments permettant de conduire le développement d'un programme complet de prévention du suicide.

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