Question de M. DOUBLET Michel (Charente-Maritime - RPR) publiée le 22/03/2001

M. Michel Doublet attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le déficit de moyens accordés à la justice qui ne lui permettent pas de faire face à la diversité et la complexité de ses missions. Les difficultés de la mise en oeuvre de la loi nº 2000-516 du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence, le manque de magistrats et de greffiers qui ne permet pas aux juridictions de fonctionner dans des conditions normales, les délais de jugement anormalement élevés exigent des mesures urgentes et rapides. Aussi, il lui demande si elle envisage de développer les modes alternatifs de règlement des litiges en assurant leur effectivité.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 08/11/2001

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les difficultés réelles de mise en Suvre de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, qui ne doivent pas faire passer au second plan le progrès considérable que ce texte constitue pour les libertés, ont été identifiées et traitées.
Ainsi, l'impact des différents volets du texte - mise en oeuvre du juge des libertés et de la détention, juridictionnalisation de l'application des peines et appel en matière criminelle - a été finement mesuré. Les décisions ont été prises pour assurer l'application de ce texte important dans les meilleures conditions possibles. S'agissant en premier lieu de l'intervention du juge des libertés et de la détention, les études d'impact de la chancellerie avaient évalué les besoins à environ 110 emplois de magistrat et 90 emplois de greffiers. Les lois de finances initiales de 1999 et 2000 ont permis, par anticipation, la création à cet effet de 110 emplois de magistrats dont 108 ont été localisés dans les juridictions dans l'année de leur création. Les emplois de vice-présidents ainsi localisés ont été pourvus en priorité. Les nominations intervenues en septembre 2001 ont permis de pourvoir la plupart des postes qui demeuraient encore vacants. En outre, l'inscription de provisions budgétaires, dans les lois de finances initiales 1999 et 2000, d'un montant de 38 millions de francs a permis de procéder, par anticipation, au repyramidage de 383 emplois au profit des tribunaux de grande instance. Ce repyramidage a permis de doter les juridictions qui n'en comptaient pas d'un emploi de vice-président pour faire face à la mise en oeuvre de ce volet de la réforme. Pour ce qui concerne les greffiers, 96 des emplois créés dans les mêmes lois de finances ont été attribués spécifiquement aux tribunaux de grande instance. S'agissant en deuxième lieu des effets de la juridictionnalisation de l'application des peines, la chancellerie a évalué à 77 le nombre d'emplois de magistrat nécessaires et à 44 celui de greffiers. Pour permettre la pleine application de ce volet de la réforme, en tenant compte des délais nécessaires à la prise de fonction de greffiers, il a été proposé au Parlement des mesures transitoires jusqu'au 16 juin 2001. Cette décision a été prise après, notamment, un dialogue avec les organisations professionnelles et syndicales de magistrats et fonctionnaires rencontrées à plusieurs reprises. Cette adaptation n'a évidemment pas remis en cause l'essentiel de la réforme de l'application des peines résultant de la loi du 15 juin 2000. Ce délai a assuré aux juridictions la présence effective en leur sein de 143 nouveaux greffiers à compter du 2 mai 2001, ce qui a permis l'application de la réforme avec les moyens qu'elle nécessitait. S'agissant enfin de la mise en oeuvre de l'appel en matière criminelle, les études d'impact de la chancellerie avaient évalué les besoins entre 60 et 84 emplois de magistrat et entre 28 et 39 emplois de greffier. La loi de finances pour 2001 crée 75 emplois de magistrats à cet effet ainsi que 36 emplois de greffier. Enfin, 85 emplois de magistat et 55 emplois de greffiers ont été créés au titre de la loi de finances pour 2001 pour assurer le traitement des affaires dans des délais raisonnables, au sens que donne à cette expression la Cour européenne des droits de l'homme. Certes, un délai incompressible est constaté entre postes créés et postes occupés. Cependant, les juridictions ont reçu début juillet et début septembre 2001, outre les 143 greffiers précédemment évoqués, respectivement 112 et 140 greffiers, et cela compte tenu des éléments issus des accords conclus avec les organisations professionnelles. S'y est ajoutée la promotion de 201 auditeurs de justice nommés magistrats et installés le 31 août 2001 et dont les effectifs sont venus conforter les moyens actuellement disponibles. Les modes alternatifs de règlement des litiges n'ont pour autant pas été négligés. La loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et la résolution amiable des conflits a ainsi créé des conseils départementaux de l'accès au droit chargés de recenser les besoins, de définir une politique locale, de dresser et diffuser l'inventaire de l'ensemble des actions menées. Elle a aussi inséré dans le livre VII du code de l'organisation judiciaire, un titre XII relatif aux maisons de justice et du droit qui ont pour mission d'assurer une présence judiciaire de proximité, de concourir à la prévention de la délinquance, à l'aide aux victimes et à l'accès au droit. Les mesures alternatives de traitement pénal et les actions tendant à la résolution amiable des conflits peuvent y prendre place. Un projet de décret relatif aux maisons de justice et du droit et fixant les modalités de création et de fonctionnement de celles-ci est actuellement soumis au Conseil d'Etat. Il existe néanmoins et d'ores et déjà 74 maisons de justice et du droit et une quarantaine de projets de créations sont en cours d'élaboration. Au plan pénal, la loi n° 99-515 du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale a développé les mesures alternatives aux poursuites en insérant dans le code de procédure pénale les articles 41-1 et 41-2. Le premier instaure la procédure du classement sans suite sous condition et celle du rappel à la loi. Le second crée la composition pénale. Ces mesures sont mises en oeuvre par le procureur de la République lui-même ou par délégation. Le décret n° 2001-71 du 29 janvier 2001 modifiant le code de procédure pénale (deuxième partie : décrets en Conseil d'Etat) et relatif aux délégués du procureur et aux médiateurs du procureur de la République et à la composition pénale définit le statut des délégués et des médiateurs du procureur de la République et organise la procédure de la composition pénale. Ces mesures alternatives aux poursuites permettent d'apporter une réponse judiciaire rapide à des faits de faible gravité, tout en assurant, le cas échéant, la réparation du dommage causé à la victime. Elles contribuent en outre à limiter l'engorgement des tribunaux de police et des tribunaux correctionnels.

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Erratum : JO du 29/11/2001 p.0

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