Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 21/01/2000

Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur la dégradation importante des conditions de travail des personnels et du service rendu aux assurés sociaux des différentes caisses d'assurance maladie aggravée par le manque de personnels affectés pour répondre à l'afflux de demandes couverture maladie universelle. Alors que les caisses d'assurances maladie sont chargées depuis le 1er janvier 2000 d'accueillir les bénéficiaires de la CMU qui doit permettre à quelque six millions de personnes résidant en France et percevant de faibles revenus d'être soignés gratuitement, les 1400 emplois n'apparaissent pas suffisants pour faire face à la demande. Les différents acteurs avaient déjà prévu l'année dernière qu'il fallait créer un minimum de 3000 emplois pour faire face à cette affluence. Outre l'insuffisance du nombre d'emplois, il est à remarquer qu'aucun poste n'a été affecté à Paris, un des départements pourtant les plus concernés par l'afflux de demandes CMU. Les conséquences en sont des heures d'attente aux guichets et la forte augmentation du nombre de dossiers en instance. Selon les centres, le retard à la liquidation est de 3 à 37 jours. Le manque de personnel fait que l'on gère au plus pressé et que les dossiers complexes, comme les indemnités journalières, les accidents de travail ou les nouvelles demandes d'affiliation restent en solde. Pour toutes ces raisons elle lui demande ce que l'Etat compte faire pour créer le nombre de postes nécessaires pour assurer un service de qualité aux assurés et de meilleures conditions de travail des personnels alors que les négociations sur la réduction du temps de travail ne sont toujours pas engagées pour ceux-ci.

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Réponse du ministère : Droits des femmes publiée le 09/02/2000

Réponse apportée en séance publique le 08/02/2000

Mme Nicole Borvo. Mme la secrétaire d'Etat, je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la
solidarité sur la dégradation des conditions de travail des personnels et du service rendu aux assurés sociaux des
caisses d'assurance maladie, dégradation aggravée par l'afflux des demandes de CMU.
Comme vous le savez, les caisses d'assurance maladie sont chargées, depuis le 1er janvier 2000, d'accueillir les
bénéficiaires de la CMU, qui doit permettre à 6 millions de personnes percevant de faibles revenus d'être soignées
gratuitement.
Autant j'ai soutenu, comme les autres parlementaires communistes, la mise en place de la CMU, même si nous
pensons qu'elle pourrait être améliorée, autant il me semble que les 1 400 emplois prévus par la loi de financement de
la sécurité sociale ne sont pas suffisants pour faire face à la demande. Les différents acteurs avaient d'ailleurs prévu,
dès l'année dernière, qu'il faudrait créer un minimum de 3 000 emplois, et j'avais personnellement attiré l'attention du
Gouvernement sur ce sujet.
La caisse primaire d'assurance maladie de Paris est le seul organisme en France à n'avoir demandé aucun effectif
supplémentaire, alors que la capitale est un des départements les plus concernés, du fait de la dégradation de la
situation, par l'afflux de demandes de CMU. Or, vous le savez, les organisations syndicales demandent que 140
personnes au minimum soient embauchées pour faire face à l'instauration de la CMU, mais aussi afin de résorber les
750 000 dossiers en souffrance à Paris. Cette revendication ne paraît pas abusive.
Jeudi dernier, les salariés des caisses d'Ile-de-France - où il y aurait 3,8 millions de feuilles de soins en souffrance - ont
manifesté en vue d'obtenir de nouveaux moyens, et Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a elle-même reconnu
qu'il fallait débloquer des moyens supplémentaires.
Ne vous paraît-il pas, dans ces conditions, nécessaire et urgent d'embaucher au niveau national et en contrat à durée
indéterminée les 3 000 personnes que la direction de l'assurance maladie avait jugées indispensables pour mettre en
place la CMU ?
Au-delà, que compte faire le Gouvernement pour engager les moyens nécessaires afin d'assurer un service de qualité
aux assurés et de meilleures conditions de travail aux personnels ? A cette fin, ne serait-il pas nécessaire de remplacer
les départs en retraite et d'embaucher du personnel supplémentaire pour compenser la mise en place de la réduction du
temps de travail, ce contre quoi le patronat se bat farouchement, comme vous le savez ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Comme vous le
soulignez, madame la sénatrice, il existe actuellement des retards importants dans le traitement des dossiers par les
caisses primaires d'assurance maladie. Le Gouvernement a tout à fait conscience des perturbations subies par les
assurés sociaux du fait de ces retards. D'un traitement moyen de trois à quatre jours pour les feuilles de soins, nous en
sommes aujourd'hui à sept jours.
Ces difficultés ont plusieurs origines.
La couverture maladie universelle n'explique pas, à elle seule, l'ensemble des difficultés des caisses primaires
d'assurance maladie. Le fonctionnement des caisses a aussi été perturbé par les épidémies de grippe et de
gastro-entérite, ainsi que par la mise en place d'un nouveau système informatique.
Bien entendu, nous ne voulons pas que la mise en place de la CMU se traduise par une surcharge de travail pour les
agents qui travaillent dans les caisses primaires. Comme nous le savons, ces agents sont heureux de remplir une
mission qu'ils considèrent comme une mission de service public et qui va permettre à 6 millions de Français de
disposer d'une couverture gratuite des soins.
Comme vous l'avez rappelé, madame la sénatrice, les caisses primaires ont bénéficié dans un premier temps, au mois
de novembre, de 1 400 nouveaux emplois.
Après avoir fait, avec la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, un point précis des difficultés
rencontrées, le Gouvernement a dégagé de nouveaux moyens, et, le 1er février dernier, la commission de gestion
administrative de la Caisse nationale d'assurance maladie a donné un avis favorable à l'attribution de moyens
supplémentaires aux caisses.
Nous avons ainsi décidé d'employer 500 personnes en contrat de quatre mois pour résorber les retards, et 500
emplois-jeunes vont venir aider à un meilleur accueil et aux aides administratives. Nous avons également créé 150
nouveaux emplois à durée indéterminée. Je précise qu'une partie de ces nouveaux emplois seront affectés à la caisse
primaire de Paris.
Le Gouvernement, tout comme vous, madame la sénatrice, est attentif à la négociation sur la réduction du temps de
travail à la sécurité sociale. Il souhaite que le dialogue au sein de l'Union des caisses nationales de sécurité sociale -
organisme qui est en charge de la vie conventionnelle dans les organismes de sécurité sociale - soit fructueux et
aboutisse rapidement. La récente définition d'un calendrier de négociation est, à ce titre, un élément positif.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie des indications que vous m'avez données sur les
postes qui vont être créés. Mais il me semble que les besoins ne seront pas satisfaits, ce qui pose, à mon avis, le
problème du financement de la CMU et, plus largement, de la sécurité sociale.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour dire que l'Etat doit immédiatement répartir équitablement les
fruits de la croissance, qui sont plus importants que prévus. Je pense, par exemple, à l'utilisation des 2 milliards de
francs de bénéfices supplémentaires prévus cette année à la CNAM.
Au-delà, vous savez que nous sommes les fervents partisans d'une contribution accrue des entreprises au financement
de la sécurité sociale. Nous avons d'ailleurs fait des propositions sur la modulation des contributions patronales.
Concernant la CMU, j'ai également formulé la proposition d'instaurer une cotisation sociale sur les revenus financiers
des entreprises. Cela permettrait de dégager des moyens pour ces salariés précaires qui sont à peine mieux lotis que
les personnes vivant avec moins de 3 500 francs. Là aussi, il est de la responsabilité de l'Etat de mieux répartir les
fruits de la croissance.
Toutes ces mesures vont dans le sens d'un nécessaire rééquilibrage entre les revenus du travail et ceux du capital pour
financer notre système de protection sociale. Cela va à l'encontre de l'action du patronat, qui, vous l'avez évoqué, fait feu
de tout bois aussi bien contre les 35 heures que pour réduire les prestations de l'assurance maladie à une peau de
chagrin, ouvrant par là même la porte aux AGF et autres AXA.

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