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N° 2

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 4 octobre 1995.

PROJET DE LOI

instituant une prestation d'autonomie

pour les personnes âgées dépendantes ,

PRÉSENTÉ

Au nom de M. Alain JUPPÉ,

Premier ministre.

Par Mme Colette CODACCIONI,

ministre de la solidarité entre les générations.

(Renvoyé à la commission des Affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle

d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Action sociale et solidarité nationale .- Aide à domicile - Handicapés - Personnes âgées -Prestation d'autonomie - Vieillesse.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

En un siècle, l'espérance de vie des Français a doublé. Mais le vieillissement de notre population accroît le nombre de ceux qui, le grand âge venu, souffrent de troubles du comportement ou de handicaps physiques qui ne leur permettent plus d'être autonomes dans leur vie quotidienne. Près de 700 000 personnes âgées connaissent ainsi aujourd'hui des situations de dépendance. Dans les années à venir, leur nombre augmentera très sensiblement en raison de l'allongement de la durée de la vie.

La montée de la dépendance constitue, pour notre société, un défi majeur de solidarité auquel notre dispositif actuel de prise en charge ne peut répondre de manière satisfaisante. Il souffre en effet de trois insuffisances majeures.

La dépendance n'est pas reconnue dans sa spécificité, ce qui interdit la mise en place de réponses appropriées.

Les moyens collectifs affectés à la compensation des coûts induits par la perte d'autonomie restent insuffisants.

La prise en charge de ces personnes, bien qu'elle mobilise de nombreux intervenants, ne donne pas lieu à une coordination satisfaisante.

Le présent projet de loi a pour objectif de remédier à ces insuffisances. Il pose le principe du droit de toute personne âgée ayant perdu son autonomie de vie à bénéficier d'une prestation de solidarité nationale, la prestation d'autonomie.

Le titre premier définit les caractéristiques générales de la prestation et ses modalités d'attribution.

Soumise à des conditions d'âge et de ressources, la prestation sera attribuée aux personnes nécessitant une surveillance régulière ou une aide pour l'accomplissement des actes essentiels de la vie.

La prestation d'autonomie sera une prestation en nature ; cela contribue à assurer l'effectivité de l'aide apportée et favorise la création d'emploi.

Elle sera servie et gérée par le département.

Le montant de la prestation sera fixé, dans la limite d'un plafond, en fonction de l'importance de la perte d'autonomie et des caractéristiques de l'environnement du bénéficiaire par le président du conseil général du département de résidence.

Une équipe médico-sociale sera chargée d'évaluer la situation globale de la personne et de communiquer au président du conseil général son appréciation sur la nature et l'importance de l'aide qui lui est nécessaire. Elle aura également une mission d'information, d'aide et de suivi auprès de la personne âgée et de sa famille.

Le département pourra confier par convention l'exercice de ces missions à des organismes de sécurité sociale, à des organismes sociaux ou médico-sociaux ou à des associations.

La prestation se cumulera dans la limite d'un plafond fixé par voie réglementaire avec les ressources personnelles du bénéficiaire. Elle ne sera pas soumise à obligation alimentaire, mais pourra donner lieu à recours sur succession.

Le contentieux de la prestation relèvera des juridictions spécialisées de l'aide sociale. Le ministre chargé des personnes âgées pourra saisir directement la commission centrale de l'aide sociale.

Le titre II fixe les modalités de l'attribution de la prestation aux personnes vivant à leur domicile ou en foyer logement lorsqu'elles ont recours à une aide extérieure.

La prestation d'autonomie devra être consacrée à la rémunération d'aides à domicile. Elle sera versée sous forme de chèques-services dits « chèques-autonomie », ou en tiers-payant en cas de recours à un organisme agréé.

Une fraction de la prestation pourra être exceptionnellement versée en espèces pour permettre au bénéficiaire de réaliser l'achat de fournitures que nécessite son état de dépendance.

Les organismes et les personnes physiques intervenant à domicile devront être respectivement agréés par le président du conseil général et déclarés auprès de lui. Le bénéficiaire de la prestation pourra rémunérer l'un des membres de sa famille, à l'exception de son conjoint.

Un suivi médico-social, comportant notamment le contrôle de l'effectivité de l'aide, garantira la bonne utilisation de la prestation et la qualité du service rendu à la personne âgée.

Le titre III dispose que la prestation sera ouverte aux personnes hébergées dans un établissement social ou médico-social visé au 5° et au dernier alinéa de l'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales ou dans un service de soins de longue durée visé au 2° de l'article L. 711-2 du code de la santé publique.

De plus, il est prévu qu'une somme minimale fixée par décret sera laissée disponible pour le conjoint demeurant à domicile lorsque le conjoint en établissement, titulaire de la prestation d'autonomie, devra demander l'aide sociale pour couvrir les frais liés à la prise en charge de sa dépendance.

Le titre IV traite des dispositions financières.

Le financement de la prestation d'autonomie sera assuré par le département de résidence et par un abondement du Fonds de solidarité vieillesse (F.S.V.), qui viendra compléter l'effort des départements. Le partage des charges obéira à des règles fixées par la loi.

Durant une période de montée en charge de trois ans, la part des départements sera déterminée à partir des dépenses qu'ils consacraient avant l'entrée en vigueur de la loi à l'allocation compensatrice pour tierce personne (A.C.T.P.) versée à domicile. À ces sommes s'ajouteront, après l'ouverture de la prestation aux personnes âgées hébergées en établissement, les dépenses supportées par les départements au titre de l'A.C.T.P. servie en établissement et de l'aide sociale à l'hébergement (éventuellement corrigée pour tenir compte des récupérations sur succession) servie en établissement.

Ces dépenses de référence seront également corrigées, le cas échéant, en fonction des efforts relatifs des départements avant l'entrée en vigueur de la loi en matière d'A.C.T.P. versée en établissement compte tenu de leur structure démographique et de leur capacité d'hébergement en établissement.

Ainsi déterminée, la part du financement à la charge des départements évoluera comme la dotation globale de fonctionnement. Le F.S.V. versera le solde nécessaire au financement de la prestation.

La répartition du coût de la prestation d'autonomie ainsi établie à l'issue de la période de montée en charge servira de référence pour les années ultérieures. Les dépenses du département et la contribution du F.S.V. seront, pour les années suivantes, revalorisées comme la dotation globale de fonctionnement. Le cas échéant, le surcoût résultant d'une croissance de la nouvelle prestation à un rythme plus rapide que celui de la dotation globale de fonctionnement sera financé à parité par les départements et par le F.S.V.

Le titre V regroupe les dispositions diverses et transitoires.

Un bilan annuel des modalités de mise en oeuvre de la prestation sera établi par le président du conseil général. Ce bilan sera soumis à l'examen du conseil général et transmis au préfet.

Dans un délai de deux ans, chaque département établira un plan départemental d'action en faveur des personnes âgées pour évaluer les besoins de celles-ci et préciser les modalités de collaboration entre les différents intervenants dans l'aide à ces personnes.

La situation des bénéficiaires de l'allocation compensatrice avant la date d'entrée en vigueur de la loi sera examinée dans les conditions suivantes : ceux qui auront bénéficié pour la première fois de cette allocation avant l'âge d'attribution de la prestation d'autonomie pourront opter pour son maintien au-delà de cet âge ; en revanche, ceux qui en auront bénéficié après cet âge verront leur situation réexaminée dans le délai d'un an.

Un décret fixera la date d'application de la loi aux personnes hébergées en établissement. Il devra intervenir au plus tard le 1 er juillet 1997. Toutefois, les bénéficiaires de la prestation d'autonomie à domicile qui entreront avant cette date dans un établissement d'hébergement en raison de l'évolution de leur état de dépendance pourront conserver leur prestation, sous réserve d'une nouvelle instruction de leur demande.

Le Gouvernement présentera au Parlement un rapport d'évaluation sur la mise en oeuvre de la loi dans un délai de trois ans après son entrée en vigueur.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de la solidarité entre les générations,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre de la solidarité entre les générations qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Article premier.

Toute personne résidant en France, ayant atteint un âge fixé par décret, qui a besoin d'une aide pour l'accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l'état nécessite une surveillance régulière a droit, dans les conditions prévues par la présente loi, à une prestation de solidarité nationale, dite prestation d'autonomie.

Art. 2.

La prestation d'autonomie, qui a le caractère d'une prestation en nature, est accordée, sur leur demande, aux personnes remplissant les conditions fixées à l'article premier, qu'elles vivent à leur domicile ou à celui d'un tiers, qu'elles soient accueillies chez un particulier dans les conditions fixées par la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989 ou qu'elles soient hébergées dans les établissements mentionnés au titre III.

Le bénéfice de la prestation est subordonné aux conditions de ressources mentionnées à l'article 5.

Art. 3.

Les étrangers titulaires de la carte de résident ou du titre de séjour prévu au troisième alinéa de l'article 12 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, ou encore d'un titre de même durée que ce dernier et conférant des droits équivalents, sous réserve d'avoir satisfait sous ce régime aux conditions prévues au premier alinéa de l'article 14 de ladite ordonnance, ainsi que les étrangers titulaires d'un titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident peuvent bénéficier de la prestation d'autonomie.

Art. 4.

Le montant de la prestation d'autonomie est déterminé en fonction du besoin de surveillance et d'aide résultant de la perte d'autonomie de l'intéressé, ainsi que des caractéristiques de son environnement, notamment de ses conditions de logement, et, le cas échéant, des aides ayant un caractère régulier qui lui sont apportées.

Le montant maximum de la prestation est fixé par décret par référence à la majoration pour aide constante d'une tierce personne mentionnée à l'article L. 355-1 du code de la sécurité sociale.

Les critères d'évaluation de la perte d'autonomie sont fixés par voie réglementaire.

Art. 5.

La prestation d'autonomie se cumule, selon des modalités fixées par voie réglementaire, avec les ressources de l'intéressé et, s'il y a lieu, de son conjoint, dans la limite d'un plafond déterminé par décret.

Art. 6.

La prestation d'autonomie est servie et gérée par le département de résidence.

Art. 7.

La prestation d'autonomie est accordée, pour une durée minimale fixée par décret, par décision du président du conseil général du département de résidence ; elle fait l'objet d'une révision périodique.

La décision est motivée. Elle est prise après instruction de la demande de prestation par une équipe médico-sociale comprenant au moins un médecin et un travailleur social, qui se rend auprès de l'intéressé afin d'apprécier, en fonction des éléments mentionnés à l'article 4, la nature et l'importance de l'aide qui lui est nécessaire.

À l'occasion de cette visite, la personne dépendante ou ses proches doivent recevoir tous conseils et informations utiles et un plan d'aide doit leur être proposé.

Art. 8.

Pour l'accomplissement des tâches d'instruction et de conseils définis aux articles 7 et 20, le département peut conclure avec des organismes de sécurité sociale des conventions qui doivent être conformes à un cahier des charges arrêté par le ministre chargé des personnes âgées après avis de l'assemblée des présidents de conseil général, de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés et de la Mutualité sociale agricole.

Il peut également conclure avec des institutions et organismes publics sociaux ou médico-sociaux ou des associations des conventions qui doivent être conformes à une convention type fixée par arrêté conjoint du ministre chargé des personnes âgées et du ministre chargé des collectivités locales, pris après avis de l'assemblée des présidents de conseil général.

Art. 9.

La prestation d'autonomie n'est pas cumulable avec l'aide ménagère mentionnée à l'article 158 du code de la famille et de l'aide sociale ni avec l'allocation compensatrice instituée par l'article 39 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975.

Les conditions dans lesquelles la prestation peut être réduite ou suspendue lorsque le bénéficiaire est hébergé dans un établissement de santé pour recevoir des soins de courte durée, de suite ou de réadaptation, mentionnés au a) et au b) du 1° de l'article L. 711-2 du code de la santé publique, sont déterminées par voie réglementaire.

Art. 10.

L'attribution de la prestation d'autonomie n'est pas subordonnée à la mise en oeuvre de l'obligation alimentaire définie par les articles 205 à 211 du code civil.

Art. 11.

L'action de l'allocataire pour le paiement de la prestation d'autonomie se prescrit par deux ans.

Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l'action intentée par le président du conseil général, pour la mise en recouvrement des sommes indûment payées.

Un décret précise le montant minimum en deçà duquel la prestation n'est pas versée.

Art. 12.

I. - Les dispositions du chapitre 7 du titre VI du livre premier du code de la sécurité sociale relatives à la tutelle aux prestations sociales sont applicables à la prestation d'autonomie.

II. - Les dispositions des articles 133 et 135 du code de la famille et de l'aide sociale sont applicables.

III. - Les agents mentionnés à l'article 198 du même code ont compétence pour contrôler l'application des dispositions de la présente loi.

Art. 13.

Les recours contre les décisions du président du conseil général mentionnées à l'article 7 sont formés devant les commissions départementales instituées par l'article 128 du code de la famille et de l'aide sociale dans les conditions et selon les modalités prévues par cet article.

Ils peuvent être exercés par le demandeur ou le représentant de l'État dans le département.

Lorsque le recours est relatif à l'appréciation du degré de perte d'autonomie, la commission départementale recueille l'avis d'un médecin compétent en gérontologie, désigné par le président de la commission sur une liste établie par le président du conseil général.

Les décisions des commissions départementales sont susceptibles d'appel, dans les conditions fixées par l'article 129 du même code, devant la commission centrale d'aide sociale. L'appel peut être formé par le demandeur, le représentant de l'État dans le département ou le président du conseil général.

Le ministre chargé des personnes âgées peut exercer le recours prévu à l'article 131 du code de la famille et de l'aide sociale.

Art. 14.

Des recours en récupération des sommes versées au titre de la prestation d'autonomie sont exercés par le département contre ces personnes visées aux a), b) et c) du premier alinéa de l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale.

Lorsque la prestation d'autonomie a été versée à domicile, le recours est exercé sur la fraction de l'actif net successoral excédant un seuil fixé par décret.

Les dispositions de l'article 148 du code de la famille et de l'aide sociale sont applicables pour la garantie des recours prévus par le présent article lorsque la prestation a été versée en établissement.

Lorsque le bénéficiaire de la prestation d'autonomie a bénéficié de l'aide sociale à l'hébergement instituée par les articles 164 et 165 du code de la famille et de l'aide sociale, les sommes récupérées en application de l'article 146 de ce code et du présent article sont affectées prioritairement par le département à la couverture des dépenses d'aide sociale qu'il a supportées.

TITRE II

DE LA PRESTATION D'AUTONOMIE À DOMICILE

Art. 15.

La prestation d'autonomie à domicile ne peut être utilisée qu'à la rémunération du ou des salariés qui apportent leur aide au bénéficiaire, à celle d'un service d'aide à domicile qui a fait l'objet d'un agrément dans les conditions fixées à l'article 21 ou à celle des services rendus par la personne qui accueille le bénéficiaire de la prestation dans les conditions fixées par la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989.

Toutefois, elle peut être versée en espèces dans des conditions et jusqu'à concurrence d'un plafond fixé par décret, afin de permettre à son bénéficiaire de faire face aux frais, autres que de personnel, que nécessite sa situation de dépendance.

Art. 16.

Le bénéficiaire de la prestation doit déclarer au président du conseil général le nom du ou des salariés qu'il emploie et qui peuvent être membres de sa famille, à l'exception de son conjoint ; il est tenu d'indiquer son lien de parenté avec le salarié.

S'il recourt à un service d'aide à domicile, il doit également en faire la déclaration au président du conseil général.

La déclaration doit être faite dans un délai d'un mois à compter de la date d'attribution de la prestation ou de la première intervention du salarié ou du service.

Le bénéficiaire de la prestation est informé qu'à défaut de dépôt d'une déclaration dans ce délai, la prise en charge des services ainsi fournis ne sera pas assurée.

Art. 17.

Pour rémunérer son ou ses salariés, le bénéficiaire de la prestation peut utiliser un chèque-service particulier, dit chèque-autonomie, auquel sont applicables les dispositions de l'article 5 de la loi quinquennale n° 93-313 du 20 décembre 1993, à l'exception de la deuxième phrase du quatrième alinéa de cet article.

Art. 18.

La prestation d'autonomie est versée au bénéficiaire dans des conditions lui permettant de ne pas faire l'avance des frais de rémunération de son ou ses salariés ou du particulier qui l'accueille dans le cadre des dispositions de la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989.

Elle est versée directement au service d'aide à domicile.

Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.

Art. 19.

Le président du conseil général agrée les services d'aide à domicile dont les conditions d'organisation et de fonctionnement sont de nature à garantir que leurs interventions s'effectueront dans le respect de la personne dépendante, de sa santé, de sa sécurité et de son bien-être physique et moral.

L'agrément est accordé pour une durée déterminée par décret.

Il peut être suspendu.

Si les conditions d'obtention de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil général procède à son retrait par décision motivée.

Il en informe le bénéficiaire de la prestation et lui propose des solutions permettant la continuité de l'aide nécessaire.

Le président du conseil général informe le maire de la ou des communes concernées de toute décision d'agrément, de suspension ou de retrait de l'agrément d'un organisme.

Il établit et tient à jour la liste des organismes agréés. Cette liste, présentée par commune, est mise à la disposition du public.

Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret.

Art. 20.

Un suivi médico-social, comportant notamment le contrôle de l'effectivité de l'aide, doit être assuré à la résidence du bénéficiaire de la prestation afin de veiller à la bonne utilisation de celle-ci et à la qualité du service rendu.

Le service de la prestation d'autonomie est interrompu par le président du conseil général dans des conditions fixées par voie réglementaire lorsqu'il est établi que son bénéficiaire ne reçoit pas d'aide effective, ou si il apparaît que le service rendu présente un risque pour la santé, la sécurité ou le bien-être physique et moral de la personne âgée. En ce cas, le président du conseil général propose au bénéficiaire toute solution permettant d'assurer la continuité de la prestation.

TITRE III

DE LA PRESTATION D'AUTONOMIE EN ÉTABLISSEMENT

Art. 21.

Le bénéfice de la prestation d'autonomie est ouvert aux personnes qui sont accueillies dans les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées, mentionnés au 5 de l'article 3 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, à celles qui sont hébergées, dans les conditions fixées au dernier alinéa du même article, ainsi qu'aux personnes accueillies dans les établissements de santé mentionnés au 2° de l'article L. 711-2 du code de la santé publique.

Art. 22.

Lorsqu'une personne bénéficiait avant son entrée en établissement de la prestation d'autonomie à domicile, le montant de cette prestation peut être révisé dans les conditions fixées à l'article 7.

Art. 23.

Les conditions dans lesquelles le montant de la prestation est, le cas échéant, réduit compte tenu des frais liés à la prise en charge de la dépendance de l'intéressé, exposés dans l'établissement, sont fixées par voie réglementaire.

Art. 24.

Le bénéficiaire de la prestation d'autonomie en établissement dont les revenus, augmentés de ladite prestation et déduction faite éventuellement d'une somme minimale fixée par décret maintenue à la disposition de son conjoint demeurant au domicile, ne lui permettent pas d'acquitter la totalité des frais liés à la prise en charge de la dépendance, peut être admis, pour la part de ces frais non couverte, au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement.

Art. 25.

La prestation d'autonomie en établissement est versée directement à l'établissement qui reçoit le bénéficiaire de la prestation sauf si celui-ci réside dans un foyer-logement où il emploie un ou des salariés ou rémunère lui-même un service d'aide à domicile.

TITRE IV

DISPOSITIONS FINANCIÈRES

Art. 26.

Le financement de la prestation d'autonomie est assuré par le département de résidence et par un versement du Fonds de solidarité vieillesse institué par l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. Les modalités de ce versement sont déterminées par décret.

Art. 27.

Pendant une période transitoire de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, le versement du Fonds de solidarité vieillesse servi aux départements est égal à la différence entre le coût annuel par département de la prestation, avant l'exercice des recours prévus à l'article 14, et les dépenses de référence des départements déterminées selon les modalités prévues au présent article et aux articles 28 et 29.

Les dépenses de référence sont égales au montant des dépenses consacrées au cours de l'année 1995 par le département, au titre de l'allocation compensatrice pour tierce personne instituée par l'article 39 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975, aux personnes résidant à domicile ou en foyer-logement et remplissant les conditions d'âge fixées par le décret prévu à l'article premier.

À compter de la date fixée par le décret prévu à l'article 40, les dépenses de référence sont majorées du montant des dépenses consacrées par le département aux personnes âgées hébergées en établissement remplissant les conditions d'âge fixées par le décret prévu à l'article premier, au titre de l'allocation compensatrice pour tierce personne instituée par l'article 39 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 et au titre de l'aide sociale à l'hébergement instituée par les articles 164 et 165 du code de la famille et de l'aide sociale.

Il est appliqué aux dépenses d'aide sociale à l'hébergement prises en compte au titre de cette majoration un coefficient établi en fonction du montant des recouvrements de cette aide effectués par les départements en application des dispositions de l'article 146 de ce code. Ce coefficient est fixé par voie réglementaire, à l'issue d'une enquête qui sera menée en 1996 auprès d'un échantillon de départements et après avis de la commission instituée par l'article 94 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983.

Art. 28.

Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles le montant des dépenses consacrées par chaque département aux personnes âgées dépendantes peut être réévalué en ce qui concerne les dépenses d'allocation compensatrice pour tierce personne lorsque cette allocation n'est pas ou est incomplètement versée aux personnes hébergées en établissement.

L'appréciation de la situation de chaque département au regard du versement de l'allocation compensatrice pour tierce personne est opérée par référence :

1° au montant moyen de cette allocation servie à domicile par chaque département ;

2° au nombre de bénéficiaires de cette allocation à domicile et en établissement constaté au niveau national ;

3° à la capacité d'accueil dans les établissements mentionnés à l'article 21 des personnes âgées ayant atteint l'âge moyen d'entrée dans ces établissements.

Le montant de la réévaluation des dépenses consacrées à l'allocation compensatrice pour tierce personne est déterminé après avis de la commission instituée par l'article 94 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983.

Art. 29.

Le montant des dépenses de référence déterminées en application des dispositions des articles 27 et 28 évolue pendant la période transitoire définie à l'article 27 comme la dotation globale de fonctionnement instituée par l'article L. 234-1 du code des communes.

Art. 30.

À l'issue de la période transitoire définie à l'article 27, le versement du Fonds de solidarité vieillesse et la participation du département évoluent comme la dotation globale de fonctionnement.

Le montant total du versement du Fonds et de la participation du département est comparé annuellement au coût de la prestation d'autonomie.

Lorsque ce coût est inférieur au montant total ainsi déterminé, un ajustement du versement du Fonds est effectué à due concurrence de la différence constatée. Lorsque ce coût est supérieur à ce montant, la différence est prise en charge, par moitié, par le Fonds et le département.

Art. 31.

Le versement du fonds de solidarité vieillesse est diminué d'un montant égal au produit des recouvrements prévus à l'article 14 multiplié par le taux de participation du Fonds au financement de la prestation d'autonomie au cours de l'année précédente. Ce montant est minoré de la moitié des frais de recouvrement exposés par le département.

Art. 32.

Dans chaque département, la différence entre le coût de la prestation d'autonomie et le montant du versement du Fonds de solidarité vieillesse est prise en compte pour le calcul de la participation financière des communes, prévue à l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983.

Art. 33.

Les conditions d'application des articles 27 à 32, notamment les modalités de la détermination du montant des dépenses consacrées par chaque département aux personnes remplissant les conditions définies à l'article premier, sont fixées par voie réglementaire.

Art. 34.

I. - À la fin du 1° de l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale sont ajoutés les mots : « et de participer au financement de la prestation d autonomie instituée par la loi n° du ».

II. - L'article L. 135-2 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 135-2. - Les dépenses prises en charge par le Fonds mentionné à l'article L. 135-1 font l'objet de trois sections distinctes ainsi constituées :

« Section I. - Dépenses au titre d'avantages d'assurance vieillesse... (le reste de la section I sans changement). »

III. - Est introduite dans cet article L. 135-2, après la section I, une section I bis ainsi rédigée :

« Section I bis. - Participation au financement de la prestation d'autonomie.

« La contribution de la solidarité nationale au financement de la prestation d'autonomie instituée par la loi n° du ».

TITRE V

DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES

Art. 35.

Un bilan de la mise en oeuvre de la prestation d'autonomie, accompagné des statistiques correspondantes, est établi annuellement par le président du conseil général, examiné par le conseil général et transmis au préfet.

Un décret détermine les modalités de présentation du bilan.

Art. 36.

Dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, chaque département établit un plan départemental d'action en faveur des personnes âgées évaluant les besoins de celles-ci et précisant les modalités de collaboration entre les différents intervenants dans l'aide à ces personnes.

Les modalités d'élaboration de ce plan sont déterminées par voie réglementaire.

Art. 37.

Au c ) du premier alinéa de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, après les mots : « soit de l'allocation compensatrice pour tierce personne », sont insérés les mots : « ou de la prestation d'autonomie ».

Art. 38.

L'article 39 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 est modifié ainsi qu'il suit :

1° Au premier alinéa du I, après les mots : « tout handicapé », sont ajoutés les mots : « dont l'âge est inférieur à celui déterminé en application de l'article premier de la loi n° du » ;

2° Le I est complété par les dispositions suivantes :

« Les personnes ayant obtenu le bénéfice de l'allocation compensatrice pour aide d'une tierce personne avant l'âge ouvrant droit au bénéfice de la prestation d'autonomie déterminé en application de l'article premier de la loi n° du peuvent choisir de continuer à être régies par les dispositions du présent chapitre au-delà de cet âge.

« À cette fin, elles sont informées, six mois au moins avant la date à laquelle elles atteindront cet âge, du montant de la prestation d'autonomie à laquelle elles pourront prétendre à cette date. Elles disposent d'un délai de trois mois à compter de la notification qui leur est faite de ce montant pour opter, à titre définitif, pour le maintien de l'allocation compensatrice ou pour le bénéfice de la prestation d'autonomie ; à défaut d'option, elles restent régies par les dispositions du présent chapitre. »

3° Le IV est abrogé.

Art. 39.

I - Les droits des personnes bénéficiant, à la date d'entrée en vigueur du décret prévu à l'article premier de la présente loi, de l'allocation compensatrice pour aide d'une tierce personne instituée par l'article 39 de la loi n° 75-534 du 30 juin 1975, et qui ont bénéficie de cette allocation pour la première fois après l'âge déterminé par ledit décret seront examinés au regard des dispositions de la présente loi dans le délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de ce décret. Jusqu'à l'intervention de la décision du président du conseil général mentionnée à l'article 7, l'allocation compensatrice continue à être versée.

Dans le cas où la prestation d'autonomie est refusée, ou fixée à un montant inférieur, l'allocation compensatrice continue à être versée.

II. - Les personnes ayant dépassé, à la date de publication du décret mentionné au I, l'âge déterminé par ce décret, qui avaient bénéficié pour la première fois de l'allocation compensatrice pour aide d'une tierce personne avant cet âge sont informées, dans le délai d'un an suivant l'entrée en vigueur de ce décret, du montant de la prestation d'autonomie auquel elles peuvent prétendre. Elles disposent d'un délai de trois mois à compter de la notification qui leur est faite de ce montant pour opter, à titre définitif, pour le maintien de l'allocation compensatrice ou pour le bénéfice de la prestation d'autonomie ; à défaut d'option, elles restent régies par les dispositions relatives à l'allocation compensatrice.

Art. 40.

Sauf si elles concernent les personnes résidant en foyer-logement mentionnées à l'article 25, les dispositions du titre III de la présente loi et celles des articles 39 et 40, en tant qu'elles concernent des personnes se trouvant en établissement, entreront en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1 er juillet 1997.

Toutefois, les personnes qui entreront avant cette date dans un établissement d'hébergement mentionné à l'article 21 en raison de l'évolution de leur état de dépendance pourront prétendre, après une nouvelle instruction de leur demande effectuée dans les conditions prévues à l'article 7, au bénéfice de la prestation d'autonomie si le droit à cette prestation leur avait été reconnu lorsqu'elles vivaient à domicile.

Art. 41.

L'agrément prévu à l'article 19 doit être demandé au président du conseil général par les services d'aide à domicile existant à la date de publication de la présente loi dans les trois mois suivant cette date.

Le président prend une décision dans un délai maximum de six mois ; à défaut, l'agrément est réputé être accordé.

Jusqu'à l'intervention de cette décision, la prestation d'autonomie à domicile peut être affectée à la rémunération de ces services par le bénéficiaire de la prestation.

Art. 42.

Sauf dispositions contraires, les mesures d'application de la présente loi sont prises par décret en Conseil d'État.

Art. 43.

Le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi dans un délai de trois ans à compter de la date de son entrée en vigueur.

Fait à Paris, le 4 octobre 1995.

Signé : Alain JUPPÉ.

Par le Premier ministre :

Le ministre de la solidarité entre les générations.

Signé : Colette CODACCIONI.

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