EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La corrida et les combats de coqs sont des actes de cruauté, tels que définis à larticle 521-1 du code pénal, qui bénéficient dune exonération pénale lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée.

Ce motif dérogatoire dordre culturel nenlève rien au caractère cruel et violent de ces spectacles.

Législateurs et État expriment indubitablement leur volonté de protéger les mineurs de lexposition à la violence, au titre de leur vulnérabilité, unanimement et légalement établie (226-14 et 434-3 du code pénal, entre autres).

Ainsi, pour ne citer que ceux-ci, larticle 227-24 du code pénal pénalise les messages à caractère violent lorsquils sont susceptibles d'être vus ou perçus par un mineur ; larticle 521-1 du même code majore les peines pour actes de cruauté sur un animal détenu lorsque ces actes sont commis en présence dun mineur ; larticle D4153-37 du code du travail interdit d'affecter les jeunes à des travaux d'abattage, d'euthanasie et d'équarrissage des animaux.

Dans le même esprit, le 10 novembre 2022, le président de la République a initié un « laboratoire pour la protection de lenfance en ligne », réunissant une série dacteurs internationaux, plateformes, ONG et régulateurs. Ce laboratoire doit permettre de mieux protéger les mineurs de lexposition croissante à la violence en ligne, à la pornographie et au harcèlement.

LAutorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique encadre, quant à elle, la diffusion de la corrida à la télévision, « pour éviter de heurter la sensibilité des téléspectateurs », imposant une signalétique jeunesse obligatoire et interdisant la diffusion de la mise à mort.

Toutes les voix convergent et unanimement saccordent pour préserver les mineurs de lexposition à la violence, quelle quelle soit. De fait, chacun sait quune telle exposition engendre une confusion des valeurs, laquelle peut contribuer à un état violent.

De nombreuses études rapportent une augmentation des actes de maltraitance animale chez les enfants ayant été exposés aux violences sur les animaux, et ceci même en dehors des violences sur les animaux de compagnie dans le cadre domestique.

Si le format « en ligne » de lexposition à la violence des mineurs est préjudiciable et reconnu comme tel par tous, comment légitimer et laisser perdurer une exposition réelle sans le filtre de l'écran ?

Ces violences-spectacles dans un climat émotionnel joyeux engendrent chez lenfant une confusion des valeurs d'autant plus grande qu'elles sont cautionnées et plébiscitées par les référents familiaux de confiance.

Le Comité des droits de lenfant de lONU, chargé de surveiller la mise en oeuvre de la Convention internationale des droits de lenfant (CIDE) par ses États parties, convention ratifiée par la France en 1990, reproche à la France cette complaisante exemption : lintérêt supérieur de lenfant étant en jeu, la responsabilité des États lemporte sur celle des détenteurs de lautorité parentale. Ainsi, en 2016, le comité a recommandé à la France « de redoubler defforts pour faire évoluer les traditions violentes et les pratiques qui ont un effet préjudiciable sur le bien-être des enfants, et notamment dinterdire laccès des enfants aux spectacles de tauromachie ou à des spectacles apparentés ».

Les États parties s'engagent à soumettre au Comité, tous les cinq ans, des rapports publics sur le suivi dapplication des recommandations. Cependant, aucun des rapports de la France ne mentionne ces pratiques traditionnelles violentes qui lui sont reprochées.

Plus récemment, le CDE de l'ONU, dans son observation générale n°26 publiée le 22 août 2023, déclare que « les enfants doivent être protégés contre toutes les formes de violence physique et psychologique et contre l'exposition à la violence, comme la violence domestique ou la violence infligée aux animaux. »

Il est de notre rôle de législateur de ne pas accepter cette tolérance étatique et dinterdire aujourd'hui laccès aux corridas et aux combats de coqs aux mineurs de moins de 16 ans.

Tel est lobjet de la présente proposition de loi.

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