EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La décision du Conseil constitutionnel 2023-863 DC, du 25 janvier 2024, relative à la loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, a censuré 32 des 86 articles du texte adopté par les parlementaires, mais seulement deux articles ont réellement été déclarés inconstitutionnels sur le fond.

En l'espèce, il s'agit de :

- L'instauration d'un débat annuel au Parlement sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration et d'intégration et la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement fixant, pour les trois années à venir, le nombre des étrangers admis à s'installer durablement en France ;

- L'autorisation de relever des empreintes digitales et la prise de photographie d'un étranger sans son consentement.

Les autres dispositions censurées, inscrites dans le texte par voie d'amendements parlementaires, ont été déclarées non conformes simplement en raison d'un objet jugé sans rapport avec le projet de loi initial du gouvernement. Il s'agit d'une interprétation subjective du juge constitutionnel, suivant les observations qui lui avaient été faites par le gouvernement de veiller « au respect par le législateur du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution. », selon une formule tout à fait particulière à ce cas.

Cette décision du Conseil constitutionnel peut apparaître comme une atteinte au droit d'amendement des parlementaires. C'est pourquoi cette proposition de loi ne fait que reprendre les termes de la loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration censurés sur la forme et non sur le fond, en vue de contourner la possibilité de censure en raison de l'article 45 de la Constitution.

Ce texte est déposé dans le but de confirmer des dispositions ayant fait consensus au sein des deux assemblées et de faire respecter la démocratie représentative.

Sur le plan politique : les dispositions censurées sont toutes des mesures exigeant un peu plus de fermeté dans le contrôle de l'immigration. Le texte est désormais tout à fait déséquilibré dans son contenu. Les mesures favorisant l'intégration et permettant, notamment, la régularisation d'au moins 10 000 clandestins par an dans les métiers dits « en tension » sont, elles, maintenues. C'est pourquoi la mise en application de cette loi pose un grave problème d'orientation dans le contexte d'immigration actuel et au vu des attentes des Français.

Cette proposition de loi n'est ni une loi exhaustive sur l'immigration ni une validation des principes insuffisants qui y sont établis. Elle est un véhicule de secours visant à faire appliquer la loi adoptée au Parlement et obligeant le Conseil constitutionnel à se positionner sur le fond en cas de nouvelle censure de ses articles.

Par conséquent, ce texte :

- Conditionne la délivrance d'une autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial à la justification préalable par l'étranger d'un certain niveau de connaissance de la langue française ;

- Permet la vérification, par le maire, des conditions de soutenabilité de la demande de regroupement familial en fonction des conditions de logements et de ressources du demandeur. De plus, le maire procède à des vérifications en cas de suspicions frauduleuses ;

- Prévoit de nouvelles conditions à remplir par l'étranger marié avec un ressortissant français pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » d'une durée d'un an ;

- Allonge la durée de conditions spécifiques à remplir par l'étranger souhaitant bénéficier de certains titres de séjour pour motif familial ;

- N'octroie un titre de séjour « vie privée et familiale » qu'en l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, à l'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale ;

- Fixe les critères de gravité de l'état de santé pour lesquels délivrer un titre de séjour pour soins ;

- Subordonne la première délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant » au dépôt d'une caution par l'étranger ;

- Détermine les modalités de justification du caractère sérieux et réel des études suivies par un étranger bénéficiant d'une carte de séjour portant la mention « étudiant » et les conséquences de leur méconnaissance ;

- Prévoit que sont majorés les droits d'inscription versés aux établissements publics d'enseignement supérieur à caractère scientifique, culturel ou professionnel par les étudiants étrangers en mobilité internationale ;

- Exclut les étrangers en situation irrégulière du bénéfice de la réduction tarifaire accordée pour certains titres de transport aux personnes remplissant des conditions de ressources ;

- Prévoit de délivrer un visa de long séjour de plein droit aux ressortissants britanniques propriétaires d'une résidence secondaire en France ;

- Prévoit que le séjour irrégulier d'un étranger majeur est puni d'une peine d'amende délictuelle et d'une peine complémentaire de trois ans d'interdiction du territoire français ;

- Aggrave la peine d'amende punissant le fait de contracter un mariage ou de reconnaître un enfant aux seules fins d'obtenir un titre de séjour ou le bénéfice d'une protection contre l'éloignement, ou d'acquérir la nationalité française ;

- Soumet le bénéfice du droit au logement, de l'aide personnelle au logement, de l'allocation personnalisée d'autonomie et des prestations familiales pour l'étranger non ressortissant de l'Union européenne à une condition de résidence en France d'une durée d'au moins cinq ans ou d'affiliation au titre d'une activité professionnelle depuis au moins trente mois ;

- Prévoit que les actes et les décisions de justice étrangers relatifs à l'état civil, produits par un ressortissant étranger pour justifier notamment de son identité et de ses liens familiaux, doivent être préalablement légalisés ;

- Étend les possibilités de recourir à la déchéance de nationalité française ;

- Restreint l'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France ainsi que via d'autres voies d'acquisition ;

- Étend les prérogatives du procureur de la République en cas de suspicion de mariage frauduleux ;

- Prévoit que la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » au jeune majeur ayant été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans est désormais subordonnée à l'absence avérée de liens avec sa famille restée dans son pays d'origine ;

- Prévoit que l'évaluation de la situation d'une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection de sa famille est réalisée sur la base d'un cahier des charges national défini en concertation avec les départements ;

- Prévoit que l'aide au développement solidaire doit prendre en compte le degré de coopération des États en matière de lutte contre l'immigration irrégulière ;

- Prévoit que, lorsqu'il prend une décision de refus de séjour, de retrait d'un titre ou d'un document de séjour ou d'expulsion, le représentant de l'État dans le département informe sans délai les organismes de sécurité sociale et Pôle emploi. Il précise également certaines conditions dans lesquelles ces organismes procèdent à la radiation de l'assuré étranger ;

- Précise que l'aide au retour dans le pays d'origine susceptible de bénéficier à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ne peut lui être attribuée qu'une seule fois ;

- Renforce les refus d'entrée à la frontière ou au titre de l'asile ;

- Modifie les critères tenant à l'âge et à l'établissement d'un lien de filiation permettant de demander la réunification familiale, ainsi que la date à laquelle doit s'apprécier la minorité de l'enfant ;

- Prévoit que l'étranger ne bénéficiant pas d'un droit au séjour en France et faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure d'expulsion ne peut être hébergé au sein du dispositif d'hébergement d'urgence que dans l'attente de son éloignement ;

- Inclut les places de certains hébergements destinés aux demandeurs d'asile dans les logements pris en compte au titre des obligations des communes tenant au nombre de logements locatifs sociaux sur leur territoire ;

- Prévoit que, sauf décision motivée de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, les personnes ayant fait l'objet d'une décision de rejet définitive de leur demande d'asile ne peuvent pas se maintenir dans le lieu d'hébergement dans lequel ils ont été admis, et d'autre part, de préciser les cas où l'autorité administrative compétente ou le gestionnaire du lieu d'hébergement saisit le juge, après mise en demeure restée infructueuse, afin qu'il soit enjoint à l'occupant d'un lieu d'hébergement pour demandeur d'asile de l'évacuer ;

- Modifie les conditions d'acquisition de la nationalité française pour les mineurs nés de parents étrangers dans certains territoires ultramarins.

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