EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Ces dernières années, le contexte de la sûreté dans les transports s'est profondément dégradé. Les terribles drames de l'attentat de la gare Saint-Charles en 2017 ou encore les attaques au couteau de la gare du Nord du mois de janvier 2023 le prouvent.

En 2022, selon un rapport du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), les services de police et de gendarmerie ont enregistré près de 124 570 personnes victimes de vols et de violences dans les transports en commun, constatant une insécurité croissante s'exprimant de diverses manières, allant jusqu'à l'agression mortelle d'un chauffeur de bus à Bayonne en 2020.

La loi « Savary-Leroux » de 2016 a apporté un socle juridique à la prévention de l'insécurité dans les transports, renforcé par la suite au Sénat dans le cadre de l'examen du projet de loi « Sécurité globale ». Il reste néanmoins indispensable de conforter le continuum de sécurité par la coordination de l'ensemble des forces de sûreté, afin de répondre aux enjeux et aux défis de la violence, de l'insécurité et des incivilités à chaque moment et chaque étape de la vie dans l'espace public.

Dans ce continuum de sécurité, la garantie de la sûreté des personnes et des biens dans les transports, ainsi que la protection des infrastructures de transports participent à l'attractivité des transports collectifs. Or, le report modal a un rôle clé à jouer dans la transition écologique de notre pays.

Compte tenu de la pluralité des environnements (surface, souterrain, quais, gares...), des caractéristiques singulières des espaces accueillant les services de transports (confinés, issues nombreuses, interconnexions multiples...), des différentes formes de criminalité (pickpocket, harcèlement, violences, risques terroristes...) et des flux importants d'usagers, il apparaît indispensable de renforcer les prérogatives des forces de sécurité.

Il faut rappeler qu'outre un risque terroriste prégnant, s'ajoutent, pour nos forces de sécurité nationales et les agents de sûreté des opérateurs de transports, des défis inédits à venir pour notre pays, tels que l'accueil, en 2024, des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Face à ces évolutions, les usagers interrogés expriment une nouvelle demande de sécurité à laquelle il faut répondre de manière concrète et efficace.

C'est pourquoi il est aujourd'hui nécessaire d'encourager une coopération encore plus étroite entre les forces de sécurité intérieure et le GPSR de la RATP et la SUGE de la SNCF, tout en accordant à ces derniers, l'ensemble des outils qui leur permettront d'assurer leurs missions face à l'accroissement de la violence et de la criminalité.

À ce titre, et afin de collaborer encore plus efficacement avec les forces régaliennes dans le cadre du continuum de sécurité, la présente proposition de loi propose l'adoption d'un certain nombre de mesures, nécessaires à la garantie d'une sécurité de haut niveau, dans le prolongement des lois Savary-Leroux et Sécurité Globale.

Aussi, il est proposé de franchir une étape décisive dans le renforcement des prérogatives des forces de sécurité pour répondre aux manquements suivants :

- Les attaques terroristes qui ont touché le monde ferroviaire montrent que le danger peut survenir de manière inattendue et que subordonner la réalisation de palpations préventives à une décision administrative préalable ne répond pas à la réalité du terrain.

- Le code des transports ne permet d'exclure des services de transport que les personnes présentes dans les emprises ou véhicules de transport ayant commis une infraction à la police du transport ou ayant refusé une mesure de sûreté. L'efficacité de ces dispositions en termes de prévention est donc limitée puisque les personnes qui, avant d'entrer en gare, présentent un comportement dangereux ou qui refusent de se soumettre à des contrôles de sûreté (inspection de bagage, palpations), ne peuvent pas être empêchées d'entrer.

- Actuellement, les agents du service interne de sécurité des opérateurs de transport ne peuvent assurer une mission sur la voie publique que si un ordre de mission spécifique, indiquant la date, la durée, le lieu et l'objet de la mission est préalablement porté à la connaissance des services de la police et des unités de la gendarmerie nationale territorialement compétents. Si cette procédure est parfaitement justifiée pour des interventions programmées, elle est, en revanche, totalement inadaptée pour faire face à des événements imprévus aux abords immédiats de leur zone naturelle de compétence.

- Actuellement, les agents des services internes de sécurité de la SNCF ne peuvent pas sécuriser des véhicules routiers « longue distance » qui peuvent néanmoins constituer une offre complémentaire à l'offre ferroviaire et qui dès lors, devraient faire l'objet d'une protection identique afin de garantir le continuum de sécurité.

Aussi, la présente proposition de loi vise à répondre à ces difficultés.

Le Chapitre Ier vise à renforcer les pouvoirs des agents des services internes de sécurité des opérateurs de transports. L'article 1er facilite les palpations de sécurité lorsqu'il existe des éléments objectifs laissant penser qu'une personne pourrait détenir des objets susceptibles de présenter un risque pour la sécurité des voyageurs. Ces mêmes objets pourront ainsi être retirés à l'occasion des palpations préventives ou des inspections visuelles de bagages. L'article 2 élargit le périmètre d'intervention des agents du service interne de sécurité des opérateurs de transports, aux abords immédiats des gares et emprises, lorsque le caractère inopiné ou urgent de la situation le justifie. L'article 3 crée une nouvelle interdiction d'entrée en gare. L'article 4 permet aux opérateurs ferroviaires, agissant en qualité d'opérateurs de sûreté, de recourir, de leur propre initiative, à des équipes cynotechniques. L'article 5 autorise les agents du service interne de sécurité de la SNCF à intervenir dans les services de transport routier interurbains dès lors que ces services sont interconnectés avec les services de transport ferroviaire.

Le Chapitre II a pour objet de renforcer le continuum de sécurité afin d'améliorer la sécurisation de nos transports. L'article 6 prévoit le libre accès des agents de la police municipale aux espaces et matériels roulants des transports de voyageurs. L'article 7 autorise les agents d'Île-de-France Mobilités dûment habilités, à visionner au sein de CCOS les images des systèmes de vidéoprotection déployés dans les réseaux de transport en commun dans les mêmes conditions que celles applicables aux agents de la SNCF et de la RATP.

Le Chapitre III vise à sécuriser l'offre de transport grâce à la technologie qui est à notre disposition aujourd'hui. L'article 8 vise la pérennisation de l'usage des caméras-piétons pour les agents de contrôle, à la suite de l'actuelle expérimentation dont le bilan est positif selon les opérateurs. L'article 9 vise à permettre le recours à des traitements algorithmiques pour améliorer les délais de réponses aux réquisitions judiciaires. L'article 10 vise à permettre la collecte et le traitement de données sensibles par les agents SUGE et RATP dans le seul cadre du traitement d'infractions flagrantes. L'article 11 autorise les opérateurs de transport public de voyageurs à mettre en oeuvre, dans un cadre légal restreint, un système de captation du son dans les matériels qu'ils exploitent.

Le Chapitre IV prévoit de nouveaux dispositifs pénaux pour mieux réprimer les délits relatifs aux transports. L'article 12 crée un délit d'« incivilités d'habitude » visant à sanctionner plus sévèrement les contrevenants réguliers aussi bien aux règles tarifaires que de comportement, à bord et dans les espaces. L'article 13 vise la création d'une interdiction de paraître spécifique aux réseaux de transport public. L'article 14 qui vise à réprimer les oublis de bagages par négligence ayant des conséquences sur l'exploitation des trains et métros. L'article 15 prévoit la création d'un délit de « bus et trainsurfing ».

Le Chapitre V et l'article 16 prévoient la création d'un fichier administratif pour centraliser les auteurs d'infraction dans les transports, notamment pour rendre effective l'interdiction de paraître créée à l'article 13 de la présente proposition de loi.

Le Chapitre VI prévoit des mesures de sécurisation du recrutement et de l'affectation en lien avec les transports. L'article 17 prévoit de rendre automatique l'information de l'opérateur de transport lorsqu'un agent habilité au transport de voyageurs perd la totalité des points de son permis de conduire. L'article 18 prévoit la simplification des procédures administratives requises lors du recrutement des agents de sûreté aéroportuaire tout en maintenant le même niveau de sûreté dans le contrôle des antécédents.

Enfin, le Chapitre VII et l'article 19 permettent la simplification de la procédure de fiabilisation des données recueillies auprès des auteurs d'infractions.

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