EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En France, le secteur du bâtiment représente plus de 46 millions de tonnes de déchets par an. Selon le Plan Régional de Gestion des Déchets, 90 % de ces déchets sont dits « non dangereux » et donc potentiellement valorisables, s'ils ne sont pas enfouis ni incinérés.

Compte tenu de la raréfaction des sites d'enfouissement, ainsi que d'une prise de conscience environnementale générale sur la question des déchets et des ressources, une meilleure valorisation doit aujourd'hui être soutenue, dans la continuité de la récente législation française.

La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (loi AGEC) a créé une nouvelle filière REP du bâtiment (responsabilité élargie des producteurs), afin de permettre la mise en place de filières de recyclage et de réemploi des déchets issus du secteur du bâtiment.

Cette loi met également en place l'obligation de mener un diagnostic des matériaux et déchets concernant les opérations de réhabilitation ou de construction de plus de 1000 m². Cela permet d'avoir un aperçu préalable des matériaux nécessaires et des déchets créés, afin d'optimiser l'utilisation de matériaux de réemploi et de mener les déchets vers la filière la plus adaptée.

Ainsi, de nombreuses démarches collaboratives ont été initiées entre l'État et les professionnels du secteur pour encourager le tri et le recyclage des déchets du bâtiment. Mais malgré cela, ce type de déchets n'est pas encore suffisamment valorisé en France.

Selon le Ministère de la Transition écologique, le taux global de valorisation de ces déchets varie fortement selon les secteurs d'activités : de 10 à 30 % pour la réhabilitation, 40 % pour la construction neuve, 60 % pour la démolition. Par ailleurs, seuls environ 30 % des déchets dits « non dangereux » sont revalorisés.

Cela représente un gâchis de matériaux mais aussi une pollution liée à l'enfouissement et à l'incinération.

En effet, l'enfouissement des déchets provoque un risque important de pollution des sols et des nappes phréatiques, et l'incinération engendre des émissions de CO² et de métaux lourds.

Cette proposition de loi a donc pour objectif de soutenir la valorisation et le réemploi des déchets provenant des matériaux et produits de chantiers en leur appliquant un taux réduit de Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) de 5,5 %.

Les matériaux provenant du réemploi répondent à un enjeu majeur de notre époque, celui de bâtir un monde plus résilient au travers de la réhabilitation de ce qui existe déjà.

Pour que ces matériaux soient retenus au moment de la passation des marchés, leurs prix doivent être compétitifs. Notre fiscalité peut et doit soutenir la transition écologique et énergétique dans le secteur du bâtiment.

Il sera bien sûr nécessaire de proposer et d'engager une évolution du droit européen. En effet, la fixation des taux de TVA est encadrée par la Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, qui comporte en annexe une liste de biens et services auquel peut s'appliquer un taux de TVA réduit.

En ce qui concerne le secteur du bâtiment, la directive prévoit que le taux réduit peut s'appliquer à la livraison, à la construction, à la rénovation et à la transformation de logements sociaux. Il peut également s'appliquer à la rénovation et à la réparation de logements privés. Cette directive ne vise ainsi pas les matériaux en tant que tels.

Une évolution du droit européen et national permettrait de soutenir la compétitivité du secteur du bâtiment en France, de lutter contre les pollutions liées à l'enfouissement et à l'incinération, et de favoriser l'émergence de filières de revalorisation des déchets, avec comme bénéfice direct la création de nombreux emplois qualifiés, adaptés à ces solutions constructives et bas carbone.