EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'article 50 de la Charte Olympique dispose qu'« aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n'est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique ». Si le mouvement olympique a, par cette formulation, souhaité que la neutralité soit la règle, c'est bien parce que le sport est porteur d'un message qui s'adresse à toutes et à tous, sans distinction ou discrimination ; et parce que les particularismes s'effacent devant les performances sportives et les valeurs portées par les athlètes : l'excellence, l'égalité, le respect des règles, de soi et des autres.

Pourtant, depuis plusieurs années, différents rapports et enquêtes ont souligné la faiblesse du sport face à la radicalisation et aux dérives contre les principes de la République. Si la laïcité garantit la liberté de conscience et la liberté religieuse de chacun, elle pose un cadre à l'exercice de ces libertés, qui est de ne pas troubler l'ordre public. Cette condition sine qua non n'étant pas toujours respectée, tous les acteurs du sport s'accordent sur la nécessité de renforcer certains dispositifs, afin d'assurer à tous une pratique sereine et pacifiée.

La loi confortant le respect des principes de la République, adoptée en 2021, a apporté quelques réponses sur cette problématique, et plusieurs propositions travaillées au Sénat ont ainsi été adoptées et maintenues dans le texte définitif. Ainsi, le Sénat a permis de renforcer les garanties apportées par le contrat de délégation et le respect du contrat d'engagement républicain, en étendant le contrôle d'honorabilité des encadrants et en incluant des modules relatifs à la laïcité, à la promotion des principes de la République et à la prévention de la radicalisation dans les programmes des formations aux professions du sport, ainsi que dans celles pour les juges et arbitres.

Cependant, il est regrettable que tous les moyens n'aient pas été mis en oeuvre afin d'assurer la neutralité dans la pratique sportive, ce qui provoque régulièrement des incidents ou des dérives.

Dans un premier temps, il convient donc de renforcer le respect des principes de la laïcité lors des compétitions sportives organisées par les fédérations sportives et associations affiliées sur le territoire, en interdisant le port de signes religieux ostensibles par les participants.

Si chacun peut, au quotidien et dans le cadre de la sphère privée, librement exercer sa religion, sur un terrain de sport c'est la neutralité qui s'impose. Le sport, porteur d'un message d'intégration, d'universalité, de dépassement de soi, n'a pas vocation à valoriser des appartenances particulières. Et c'est bien en se reposant sur un socle de règles communes que le sport peut véritablement se démocratiser auprès de différents publics et s'étendre à celles et ceux qui en ont trop longtemps été exclus.

Aujourd'hui, un flou juridique existe sur le port de signes religieux, et il est nécessaire que l'État définisse plus clairement les règles qui s'imposent lors des compétitions sportives. La question se pose actuellement sur le port du voile, qui n'est pas explicitement interdit, et qui ouvre la porte à l'émergence, dans les prochaines années, de clubs sportifs communautaires promouvant ouvertement le port de signes religieux. Par ailleurs, certaines fédérations se retrouvent d'ores et déjà confrontées à de telles problématiques et se retrouvent démunies face à l'absence de normes strictes imposées par l'État. Face à la multiplication de ces dérives, il est urgent de définir les règles dès à présent.

Fin 2021, un collectif de joueuses déposait ainsi un recours à l'encontre d'une fédération sportive qui décline dans son règlement l'article 50 de la charte olympique. Portée devant le Conseil d'État, la décision est incertaine du fait de l'absence de règlementation. Aujourd'hui, la question se pose dans une autre discipline où les incidents se sont multipliés dernièrement. La situation s'envenime, puisque la fédération concernée, en souhaitant faire respecter la loi par ses licencié(e)s, a depuis reçu des menaces intolérables.

Dans un second temps, il convient également de prévoir dans la loi le respect de la laïcité dans les règlements d'utilisation des piscines ou baignades artificielles publiques à usage collectif. Le non-respect des règles communes rompt la promesse d'égalité entre les usagers et peut ainsi porter atteinte au bon fonctionnement d'un service public comme une piscine municipale. En créant des dérogations pour satisfaire des revendications religieuses ou communautaires, on met ainsi en péril ce service public, comme le rappelle le Conseil d'État dans sa décision du 21 juin 2022. En accord avec la loi de 1905, la neutralité est donc bien un impératif qu'il convient de faire respecter par les agents comme par les particuliers au sein des infrastructures gérées par des collectivités.

Ces atteintes à la loi pourraient rester anecdotiques si elles n'étaient pas aussi fréquentes. En effet, la question de l'interdiction du burkini se pose tous les étés, comme à Grenoble, dans les îles de loisirs de la région Ile-de-France et dans d'autres collectivités. Des actions militantes appellent régulièrement à défendre l'accès des femmes aux piscines publiques et espaces de baignade publique et leur droit à y exprimer leurs convictions religieuses, défendant une vision de la femme et de la liberté d'expression qui ne sont pas celles reconnues et promues par la République française. Ces actions sont délibérément provocatrices, ne visent qu'à diviser, polariser les opinions, et obliger chacun à prendre parti dans un conflit qui n'a rien à voir avec la pratique sportive.

Dans le même temps, les maires et élus locaux ne peuvent prendre de décisions que sur la base des règles d'hygiène et de sécurité. Ils attendent donc que l'État prenne position sur ce sujet du respect de la laïcité. Il n'est en effet pas acceptable que ces choix soient individuels, faisant reposer sur les épaules des élus locaux des décisions parfois difficiles, et leur faisant assumer, seuls, les responsabilités - risques de représailles et de violences notamment - tout en ouvrant la porte à des dérives communautaristes.

Alors que ce dispositif a été rejeté par le gouvernement malgré son adoption par le Sénat en 2022, des collectifs ont depuis mené de nouvelles actions, appelant par exemple à la mise en place d'un référendum local sur ce sujet à Grenoble.

Face à ces dérives, il est urgent de porter une règlementation claire et ambitieuse dans la loi. Tel est l'objectif de la présente proposition de loi.

L'article 1er vise ainsi à interdire le port de signes religieux, et notamment du voile, dans les compétitions sportives organisées par les fédérations sportives et associations affiliées.

L'article 2 impose aux règlements intérieurs des piscines et espaces de baignades publiques l'interdiction du port de tenues à caractère religieux, tels que le burkini, puisqu'elles peuvent porter atteinte à l'ordre public et au bon fonctionnement d'un service public.