EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Frontière « naturelle » entre la France et l'Allemagne, en même temps qu'interface essentielle pour les échanges humains et commerciaux entre les deux pays, le Rhin fait de longue date l'objet d'une coopération bilatérale particulière. Cette gestion commune du Rhin, qui possède le statut de fleuve international, par ses États riverains est en effet ancrée de longue date en droit international et « l'Acte de Mannheim » du 17 octobre 1868 (Convention pour la navigation du Rhin) constitue l'un des plus anciens engagements internationaux en vigueur.

À mesure que la coopération policière transfrontalière s'est développée de part et d'autre du Rhin, les unités de gendarmerie fluviale et de la police fluviale allemande (Wasserschutzpolizei), qui avaient été créées à partir de 1968 dans les deux pays, ont développé leurs échanges, tant pour assurer la sécurité de la navigation sur le Rhin que pour lutter contre les infractions commises sur le fleuve ou le long de celui-ci. Cette coopération s'est naturellement accrue à mesure que le cadre juridique de cette coopération transfrontalière s'est affermi.

Au regard des possibilités nouvelles offertes par le droit de l'Union européenne relatif à l'espace de liberté, de sécurité et de justice, la proposition des acteurs locaux d'envisager des formes de coopération policière plus intégrées sur le Rhin a été validée par les gouvernements. Dans le cadre de « l'agenda franco-allemand 2020 », adopté le 4 février 2010, ils ont ainsi exprimé leur volonté « [d']approfondir et systématiser la coopération policière en zone frontalière, notamment en créant une unité fluviale franco-allemande sur le Rhin ». Cette intention s'est concrétisée dans un premier temps en avril 2011, avec la signature d'un arrangement portant création à titre expérimental d'une compagnie fluviale commune.

Afin d'assurer la parfaite sécurité juridique de la coopération souhaitée et de tirer les enseignements de la phase d'expérimentation, les autorités françaises et bade-wurtembergeoises ont débuté en 2013 la négociation d'un engagement juridiquement contraignant. Cet accord devait permettre la pleine mutualisation des moyens humains et matériels des cinq unités françaises et allemandes compétentes sur le Rhin franco-allemand et l'accroissement de leur efficacité opérationnelle.

La signature de l'accord pérennisant la création de la compagnie de gendarmerie fluviale franco-allemande sur le Rhin est finalement intervenue à Strasbourg le 6 juillet 2022.

L'accord comporte un préambule, vingt-deux articles (regroupés en six titres) et une annexe.

Le préambule rappelle le cadre juridique de référence auquel le nouvel accord s'adosse (s'agissant de la gestion commune du Rhin et de la coopération policière transfrontalière), ainsi que les attendus de la création de cette unité commune.

Le titre Ier est consacré aux principes généraux de l'accord : l'article 1er indique son objet, la création de la compagnie de gendarmerie fluviale franco-allemande (CG2FA), et l'article 2 précise l'articulation entre l'accord d'une part et d'autre part le droit de l'Union européenne et l'Accord de Vittel1(*).

Le titre II contient les dispositions relatives à l'organisation et au fonctionnement de la CG2FA. L'article 3 précise la nature juridique de l'unité, unité mixte dans sa composition et unité commune dans son emploi mais qui reste - conformément aux exigences juridiques des deux États - une unité binationale. L'article 4 définit la zone de compétence de l'unité. L'article 5 énonce les règles relatives au commandement du personnel de l'unité, constituée de deux détachements nationaux. L'article 6, sans figer l'effectif de l'unité, rappelle la nécessité de veiller à l'équilibre des effectifs des deux détachements. L'article 7 décrit les principes généraux régissant l'emploi opérationnel de l'unité. L'article 8 règle les questions relatives au port de l'uniforme de service, à l'emport et à l'usage de l'armement de service et à la conduite des véhicules et embarcations. L'article 9 dispose les modalités financières applicables.

Le titre III est consacré aux aspects opérationnels de l'activité de la CG2FA. L'article 10 décrit les missions de l'unité : surveillance de la navigation ; enquêtes administratives et judiciaires en lien avec des infractions à la navigation fluviale, des infractions pénales ou des accidents ; secours et assistance aux personnes ; appui à la gestion de grands événements ; patrouilles terrestres. L'article 11 rappelle les prérogatives dont disposent les agents de l'unité en vertu de leur droit interne, du droit de l'UE ou d'engagements préexistants.

Le titre IV agrège les dispositions relatives à l'accès aux traitements nationaux de données à caractère personnel et à l'échange d'informations policières (article 12), au fichier commun de l'unité (article 13), à la sécurité des locaux et à la confidentialité des informations et documents (article 14) et aux archives (article 15).

Le titre V comprend les dispositions de nature statutaire. L'article 16 organise la protection juridique des agents présents sur le territoire de l'autre État. L'article 17 définit les règles applicables en cas de dommages causés ou subis par les agents.

Le titre VI regroupe les dispositions communes et finales de l'accord. L'article 18 prévoit la possibilité de conclure des accords ou arrangements d'exécution. L'article 19 rappelle la possibilité, inhérente à toute coopération interétatique, de refuser une demande de coopération ou d'assistance de l'autre Partie.

L'article 20 organise le suivi de la mise en oeuvre de l'accord. L'article 21 contient la clause usuelle de règlement non-juridictionnel des différends entre les Parties. Les dispositions finales font l'objet de l'article 22.

L'accord comporte enfin une annexe, à laquelle est jointe une carte, détaillant la zone de compétence de l'unité (points kilométriques/lieux marquants).

Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Bade-Wurtemberg relatif à la création d'une compagnie de gendarmerie fluviale franco-allemande sur le Rhin.

* 1 Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération dans l'exercice des missions de police de la navigation sur le secteur franco-allemand du Rhin du 10 novembre 2000.