ÉTUDE D'IMPACT

PROJET DE LOI

de simplification de la vie économique

NOR : ECOM2409377L/Bleue-1

7 mai 2024

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION GÉNÉRALE 5

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS 18

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION 22

TABLEAU D'INDICATEURS 25

TITRE IER - SIMPLIFIER L'ORGANISATION DE L'ADMINISTRATION 30

Article 1er - Simplifier l'organisation administrative en supprimant des comités, commissions, conseils et observatoires 30

TITRE II - SIMPLIFIER LES DÉMARCHES ADMINISTRATIVES DES ENTREPRISES 47

Article 2 - Simplifier les démarches 47

Article 3 - Développer les rescrits sectoriels et la cristallisation des normes applicables aux entreprises 58

TITRE III - FACILITER L'ACCÈS DE TOUTES LES ENTREPRISES À LA COMMANDE PUBLIQUE 66

Article 4 - Faciliter l'accès à la commande publique en ligne 66

Article 5 - Unifier le contentieux des marchés publics entre le juge administratif et le juge judiciaire 79

TITRE IV - SIMPLIFIER LES OBLIGATIONS PESANT SUR L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES ENTREPRISES 99

CHAPITRE IER - SIMPLIFIER LES OBLIGATIONS D'INFORMATION 99

Article 6 - Faciliter les processus de vente de fonds de commerce et de cessions d'entreprises en réduisant le délai d'information préalable des salariés 99

Article 7 - Simplifier la présentation des bulletins de paie 114

CHAPITRE II - ALLÉGER LES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LA CROISSANCE DES ENTREPRISES 122

Article 8 - Réhausser les seuils de notification des concentrations 122

TITRE V - FACILITER ET SÉCURISER LE RÈGLEMENT DES LITIGES 140

CHAPITRE IER - ELARGIR LES DISPOSITIFS NON-JURIDICTIONNELS DE RÈGLEMENT DES LITIGES 140

Article 9 - Généraliser les dispositifs de médiation entre les entreprises et les organismes publics, les promouvoir et en simplifier l'accès 140

Article 10 - Adapter les régimes des sanctions pesant sur les chefs d'entreprises 163

CHAPITRE II - SIMPLIFIER ET CLARIFIER CERTAINES FORMES DE CONTRATS 179

Article 11 - Simplifier le droit des contrats spéciaux 179

CHAPITRE III - SIMPLIFIER ET ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES JUDICIAIRES 187

Article 12 - Accélérer le traitement des requêtes devant la juridiction administrative 187

TITRE VI - ALIGNER LES DROITS DES TRÈS PETITES ENTREPRISES SUR CEUX DES PARTICULIERS 200

Article 13 - Aligner le droit des très petites entreprises sur celui des particuliers en matière bancaire 200

Article 14 - Simplifier et faciliter les relations avec les prestataires de services d'assurance 213

TITRE VII - FACILITER L'ESSOR DE PROJETS INDUSTRIELS ET D'INFRASTRUCTURES 231

Article 15 - Faciliter la conduite de projets stratégiques 231

Article 16 - Accélérer les projets stratégiques pour la transition énergétique 247

Article 17 - Accélérer et simplifier les déploiements de réseaux mobiles 255

Article 18 - Simplifier la mise en oeuvre des compensations des atteintes à la biodiversité 275

TITRE VIII - SIMPLIFIER POUR ACCELERER LA TRANSITION ENERGETIQUE ET ECOLOGIQUE DE NOTRE ECONOMIE 285

Article 19 - Moderniser le droit minier pour faciliter la transition énergétique 285

Article 20 - Dérogation aux règles des plans locaux d'urbanisme (PLU) pour l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable 310

Article 21 - Simplifier des obligations relatives au biogaz 319

TITRE IX - SIMPLIFIER POUR INNOVER 328

Article 22 - Faciliter l'innovation issue de la recherche 328

Article 23 - Intégrer l'innovation dans le mandat de la Commission nationale de l'informatique et des libertés 348

TITRE X - SIMPLIFIER LE DÉVELOPPEMENT DES COMMERCES 355

Articles 24, 25, 26 - Faciliter l'installation et l'exploitation des commerces 355

TITRE XI - ASSURER UNE SIMPLIFICATION DURABLE 389

Article 27 - Instaurer un test petites et moyennes entreprises 389

TITRE XII - DISPOSITIONS DIVERSES 397

Article 28 - Clarifier le droit des procédures civiles d'exécution 397

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Depuis 2017, sous l'autorité du Président de la République Emmanuel Macron, le gouvernement a agi avec la préoccupation constante de simplifier la vie des entreprises, afin de leur permettre de se développer.

Simplifier drastiquement est enjeu majeur pour notre économie : la charge des normes, des démarches, des complexités du quotidien pèse pour au moins 3 % du PIB sur notre économie. Simplifier drastiquement relève aussi d'un enjeu de justice sociale : les TPE, les PME, voire les ETI n'ont tout simplement pas les moyens humains de mettre en oeuvre les normes quand elles sont en fait adaptées à de très grandes entreprises.

Cette transformation consiste avant tout à faire confiance à celles et ceux qui développent l'activité économique et créent des emplois, en prenant les mesures nécessaires pour que la relation avec l'administration repose bien d'avantage sur le principe de confiance et que les enjeux de la mise en oeuvre concrète sur le terrain des normes législatives et réglementaires dans la vie économique quotidienne soient mieux pris en compte. Cette transformation consiste également à ce que l'administration soit davantage accessible et disponible pour accompagner la création d'activité et d'emplois. Il en va de la libération des capacités de créativité, de production de richesses, d'inventivité et de savoir-faire de tous nos compatriotes.

Ce projet de loi de simplification a été préparé en partant prioritairement des besoins et des demandes des TPE et des PME. Une consultation citoyenne, lancée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique Bruno le Maire et par la ministre déléguée chargée des entreprises, du tourisme et de la consommation Olivia Grégoire sur la plateforme make.org., a recueilli plus de 5 000 propositions et plus de 700 000 votes sur l'ensemble des propositions. Le rapport de la consultation citoyenne a été publié fin janvier 2024.

Le projet de loi s'inspire également de travaux parlementaires : ceux conduits par le sénateur Olivier Rietmann, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, et celui de cinq parlementaires, Mmes Anne-Cécile Violland et Nadège Havet et MM. Louis Margueritte, Alexis Izard et Philippe Bolo publié le 15 février 20241(*).

La simplification est un enjeu majeur et un chantier d'ampleur. Ce présent projet de loi est un point de départ et non un aboutissement. Il vise à donner un nouvel élan à la société et à l'économie française pour libérer pleinement le potentiel de croissance et de création d'emplois dans notre pays. Ce projet de loi devra donc nécessairement être suivi d'autres projets de loi à l'avenir. En outre, beaucoup d'autres mesures ne relèvent pas uniquement de la loi.

Ce projet de loi s'inscrit dans trois principes essentiels.

Le premier c'est de diminuer radicalement la charge engendrée par les démarches administratives - première demande exprimée dans le cadre des consultations menées. Il s'agit d'opérationnaliser le principe du « dites-le nous une fois » mais, au-delà, de remettre en question de manière systémique et systématique l'opportunité de chacune des démarches administratives imposée à nos concitoyens et nos entrepreneurs. C'est l'objectif de suppression des formulaires Cerfa et au-delà, la suppression d'obligations de déclarations, la déclaration plutôt que l'autorisation, un silence qui vaut accord plutôt qu'un silence qui vaut refus. Supprimer des démarches, c'est supprimer de la bureaucratie et libérer de la ressource pour renforcer le véritable service public, y compris en « réhumanisant » l'accès à l'administration lorsque c'est nécessaire. Dématérialiser ne doit en effet jamais se faire au détriment d'une administration accessible de manière « omnicanale », y compris grâce à des procédures papier rationnalisées, pour les usagers qui le demandent.

Le deuxième grand principe, c'est de changer de paradigme dans la relation entre l'administration et les entreprises. La confiance doit être remise au coeur de cette relation. Plutôt que de contrôler pour sanctionner à tout prix, il s'agit de proposer systématiquement un accompagnement, de promouvoir la transparence, la mise en conformité, la médiation, la sécurisation de l'entreprise.

Le troisième grand principe, c'est la rationalisation de la norme, que ce projet de loi ne vise pas à épuiser mais qu'il vise à amorcer dans de nombreux secteurs. Limiter les contraintes inutiles, accélérer les délais, éviter les surtranspositions, renoncer aux process excessivement rigides. Cette démarche exige de procéder à un peignage fin de l'ensemble de notre droit, qui ne pourra être durablement effectuée que par un travail sur le long cours, notamment au moyen d'une loi annuelle de simplification. Le présent projet de loi vise d'ores et déjà à purger un grand nombre des irritants récurrents remontés par les professionnels dans le cadre des consultations menées et à assurer, notamment en évaluant mieux l'impact des normes qui seront adoptées à l'avenir sur nos petites entreprises, à jeter les bases d'une simplification durable.

Ce projet de loi est organisé en douze titres.

Le titre Ier propose des mesures de simplification de l'organisation de l'administration.

Le titre II vise à simplifier les démarches administratives des entreprises.

Le titre III contient des dispositions visant à faciliter l'accès de toutes les entreprises à la commande publique.

Le titre IV a pour objet la simplification d'obligations pesant sur l'organisation et le fonctionnement des entreprises.

Le titre V contient des dispositions pour faciliter et de sécuriser le règlement des litiges.

Le titre VI vise à aligner les droits des TPE sur ceux des particuliers.

Le titre VII contient des mesures visant à faciliter l'essor de projets industriels et d'infrastructures.

Le titre VIII propose des simplifications pour accélérer la transition énergétique et écologique de notre économie.

Le titre IX contient des mesures facilitant l'innovation issue de la recherche.

Le titre X a pour objectif de faciliter l'installation et les travaux des commerces et à fluidifier les relations entre bailleurs et commerçants.

Le titre XI vise à assurer une simplification durable.

Le titre XII correspond aux dispositions diverses.

TITRE Ier. - SIMPLIFIER L'ORGANISATION DE L'ADMINISTRATION

L'article 1er vise à simplifier et rationnaliser le paysage administratif en supprimant cinq commissions administratives consultatives :

- le Conseil supérieur de l'aviation civile ;

- la Commission supérieure du numérique et des Postes ;

- le Conseil stratégique de la recherche ;

- la commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général ;

- le comité national de la gestion des risques en forêt.

Certaines de ces commissions ne se sont pas, ou très peu, réunies au cours des dernières années. Il en va ainsi du Conseil stratégique de la recherche qui ne s'est pas réuni depuis 2015, ou encore du Conseil supérieur de l'aviation civile qui ne s'est pas réuni depuis 2016. Le comité national de la gestion des risques en forêt ne s'est, depuis sa création, réuni qu'à trois reprises (en 2013, 2016 et la dernière fois en 2017).

Par ailleurs, les corps d'inspection mis en extinction en application du décret n° 2021-1550 du 1er décembre 2021 ne pouvant plus mettre en place le dispositif de recrutement par la voie du tour extérieur prévu aux articles L. 326-6 et L. 326-7 du code général de la fonction publique, la commission qui, en application de ces articles, était chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général n'a plus lieu d'être.

Enfin, le rôle de la Commission supérieure du numérique et des Postes apparaît redondant avec celui de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des Postes et de la distribution de la Presse (Arcep) et du Conseil national du Numérique qui a été créé en 2011.

TITRE II. - SIMPLIFIER LES DÉMARCHES ADMINISTRATIVES DES ENTREPRISES

Afin d'alléger la charge déclarative des entreprises et d'améliorer les relations entre les entreprises et l'administration, un travail de détail doit être engagé pour simplifier très concrètement la vie des entreprises. L'article 2 habilite le Gouvernement à agir par ordonnances afin de permettre à l'administration de mener les travaux nécessaires à la simplification des démarches déclaratives des entreprises et d'accélérer ainsi le processus en faveur du pré-remplissage des formulaires et donc la suppression des déclarations/démarches redondantes et/ou superfétatoires. Il s'agira particulièrement de transformer des procédures d'autorisation en simples déclarations, et de supprimer des déclarations. Une analyse approfondie fondée sur un recensement fin devra permettre de s'assurer que ces simplifications sont faites sans porter préjudice à la participation du public, ni à l'ensemble des règles notamment européennes qui conduisent à des déclarations ou autorisations. Sur le fond, il sera également nécessaire de s'assurer que la protection de nos concitoyens reste maintenue à un niveau comparable mais avec moins de procédures.

L'article 3 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures de niveau législatif propres à permettre la création, sur demande d'une entreprise administré, d'une garantie consistant en une prise de position formelle sur l'application d'une norme à sa situation de fait ou à son projet, opposable à l'administration.

Ces instruments contribuent à renforcer la sécurité juridique et à simplifier les relations avec l'administration.

L'habilitation sollicitée est destinée à élargir leur utilisation dans de nouveaux champs de l'action administrative dont certains restent encore à identifier, ce qui justifie cette disposition d'habilitation sur le fondement de l'article 38 de la Constitution.

TITRE III. - FACILITER L'ACCÈS DE TOUTES LES ENTREPRISES À LA COMMANDE PUBLIQUE

L'article 4 fait obligation aux personnes publiques autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, ainsi qu'aux organismes de sécurité sociale, d'utiliser un unique profil d'acheteur mis gratuitement à leur disposition par l'État. Il poursuit ainsi un objectif d'harmonisation entre acheteurs publics donc de simplification pour les entreprises, dont les coûts de gestion interne seront ainsi réduits.

L'article 5 unifie le contentieux de la commande publique au profit de la compétence du juge administratif, en qualifiant d'administratif l'ensemble des contrats de la commande publique, à l'exception des marchés relevant du livre V de la deuxième partie du code de la commande publique et des contrats de concession relevant du livre II de la troisième partie du même code. Il poursuit ainsi un objectif de simplification et d'uniformisation du contentieux de la commande publique en levant les incertitudes sur le juge compétent à saisir, en contribuant à accélérer le traitement des recours, en renforçant la sécurité juridique par une application uniforme des règles de la commande publique.

TITRE IV. - SIMPLIFIER LES OBLIGATIONS PESANT SUR L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES ENTREPRISES

Chapitre 1er. - Simplifier les obligations d'information

La loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire a mis en place un dispositif d'information des salariés d'une entreprise lorsqu'est envisagé un projet de vente, afin d'offrir aux salariés de l'entreprise la possibilité de présenter une offre d'acquisition. Cette obligation d'information préalable prévoit que les salariés sont avertis au moins deux mois avant la vente.

Les modifications des livres I et II du code de commerce portées par l'article 6 permettront de faciliter les ventes de fonds de commerces et d'entreprises de moins de 50 salariés, en réduisant le délai d'information obligatoire préalable des salariés de deux à un mois et en abaissant le plafond de l'amende civile pouvant être prononcée lorsqu'une action en responsabilité est engagée à 0,5 % du montant de la vente au lieu de 2%.

Ces modifications tirent en outre les conséquences des réformes législatives intervenues depuis la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, modifiant la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014, notamment la suppression des comités d'entreprise et l'introduction des comités sociaux et économiques.

Pour rendre le bulletin de paie plus simple à éditer et plus compréhensible, notamment sur les prélèvements opérés sur son salaire brut, l'article 7 permet à l'employeur de déroger aux modalités de remise des bulletins de paie définies au deuxième alinéa de l'article L. 3243-2 du code du travail pour transmettre au salarié des éléments qui ne figureront plus dans le bulletin de salaire même. Il permet en outre à l'employeur de remettre ces éléments uniquement par voie dématérialisée, sans que le salarié ne puisse s'y opposer

Ces différentes dispositions de l'article 7 entreront en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2027 afin de laisser le temps aux éditeurs de logiciels de prévoir les évolutions nécessaires à la mise en oeuvre de cette réforme de simplification.

Chapitre 2. - Alléger les contraintes qui pèsent sur la croissance des entreprises

L'article 8 a pour objet de réhausser les seuils de notification des concentrations devant l'Autorité de la concurrence, exprimés en chiffre d'affaires. Cette réforme permettrait d'alléger les procédures administratives des entreprises, et en particulier des petites et moyennes entreprises actives en France, puisque le rehaussement des seuils de notification conduirait à dispenser la notification d'un nombre important d'opérations (estimé de 20 à 30 % des opérations aujourd'hui notifiées), non problématiques d'un point de vue concurrentiel.

L'absence de réévaluation des seuils généraux depuis 2004 et des seuils applicables au commerce de détail depuis 2008 et l'augmentation parallèle du taux d'inflation et du PIB nominal français ont mécaniquement fait diminuer le niveau relatif de ces seuils et ont contribué à une augmentation significative du nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence.

TITRE V. - FACILITER ET SÉCURISER LE RÈGLEMENT DES LITIGES

Chapitre 1er. - Elargir les dispositifs non-juridictionnels de règlement des litiges

L'article 9 simplifie et unifie les dispositions du code des relations entre le public et l'administration en matière de règlement amiable des différends avec l'administration, sous la dénomination unique de médiation. Il prévoit que l'administration met à la disposition du public les services d'un médiateur dans des domaines et dans des conditions déterminés par décret en Conseil d'Etat. Les entreprises pourront activer ce dispositif en vue du traitement amiable et rapide de leurs différends avec l'administration. Pour assurer l'attractivité de la médiation et la préservation du droit à un recours effectif, les délais de recours contentieux sont interrompus et les délais de prescription suspendus dans les conditions prévues par le code de justice administrative.

L'article L. 574-5 du code monétaire et financier punit d'une peine de 6 mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende le fait de ne pas déclarer au RCS les informations relatives aux bénéficiaires effectifs, ou de déclarer des informations inexactes ou incomplètes.

Ce délit est fortement critiqué par les entreprises, qui jugent une telle pénalisation excessive. Le rapport parlementaire « Rendre des heures aux Français » remis au ministre de l'économie le 15 février 2024 s'en est fait l'écho dans sa proposition n° 12.

La peine d'emprisonnement n'est pas la plus adaptée pour réprimer de tels manquements, la plupart du temps purement formels, découlant de la méconnaissance d'une obligation déclarative. Il est donc proposé à l'article 10 de supprimer la peine d'emprisonnement pour la remplacer par une peine d'amende plus importante afin de maintenir l'aspect dissuasif de la répression et de se conformer aux engagements internationaux de la France. Le quantum de l'amende proposé s'inspire de ce qui est prévu dans d'autres pays de l'Union européenne, notamment le Luxembourg. Il est proposé de faire de même sur la peine maximale prévue en matière d'obstacle aux vérifications et contrôle du commissaire aux comptes ou de l'auditeur de durabilité en matière d'information de durabilité.

Chapitre 2. - Simplifier et clarifier certains pans du droit

Le droit des contrats spéciaux est une branche du droit privé qui fixe les règles spécifiques à certains contrats nommés, dont les modèles les plus usuels figurent dans le code civil (tels que les contrats de vente, d'entreprise, de location, de prêt ou de mandat). Ces règles spéciales complètent et s'articulent avec le droit commun des contrats mais elles datent pour l'essentiel du code Napoléon de 1804.

En conséquence, ces dispositions ne correspondent plus aux besoins de la vie économique et sociale actuels alors que les contrats spéciaux sont pourtant utilisés quotidiennement et tiennent une place importante notamment dans le monde des affaires. Compte tenu de la grande technicité de la matière, l'article 11 vise à habiliter le Gouvernement à réformer par ordonnance le droit des contrats spéciaux, dans un délai de deux ans. Cette habilitation porte sur les principaux contrats spéciaux régis par le code civil : la vente, l'échange, le louage d'ouvrage ou contrat d'entreprise, le bail ou contrat de location, le prêt, le dépôt et le séquestre, les contrats aléatoires et le mandat.

Chapitre 3. - Simplifier et accélérer les procédures judiciaires

L'article 12 modifie des dispositions du code de justice administrative relatives aux magistrats honoraires et au juge des référés. Ces mesures visent à fluidifier et accélérer le traitement des requêtes et des référés, l'organisation des enquêtes publiques et l'exécution des décisions juridictionnelles des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

Ainsi, cet article permet aux magistrats honoraires des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de compléter une formation de jugement en cas de vacance ou d'empêchement d'un membre de cette formation, d'accomplir toute diligence utile pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution, ainsi que d'exercer les fonctions pouvant être déléguées à un magistrat administratif dans le cadre des enquêtes publiques relatives aux projets, plans et programmes ayant une incidence sur l'environnement. Cet article supprime la condition de grade de premier conseiller, prévue à l'article L. 511-2 du code de justice administrative, qui conditionne l'accès à l'exercice des fonctions de juge des référés pour les magistrats désignés par les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

TITRE VI. - ALIGNER LES DROITS DES TRÈS PETITES ENTREPRISES SUR CEUX DES PARTICULIERS

L'article 13 vise à porter des mesures de simplification relevant du domaine bancaire nécessaires pour rendre plus fluides et plus transparentes les relations d'affaires entre les TPE et les établissements bancaires.

En premier lieu, une précision est apportée au code monétaire et financier pour garantir la gratuité de toute clôture de comptes bancaires détenus par des professionnels. Cette mesure permet de favoriser la mise en concurrence des établissements bancaires et la qualité des services offerts par les banques aux entreprises.

En deuxième lieu, pour les TPE, l'envoi gratuit d'un relevé annuel des frais bancaires acquittés par l'entreprise contribue à renforcer la transparence tarifaire, la comparabilité des prix et donc la concurrence.

L'article 14 vise à contribuer à la simplification dans le champ des assurances à travers trois mesures : en premier lieu, en améliorant l'information délivrée aux entreprises lors d'une réalisation unilatérale d'un contrat par un assureur ; en deuxième lieu, en permettant aux entreprises de procéder à la résiliation à tout moment de certains contrats d'assurance ; et, en troisième lieu, en encadrant les délais d'indemnisation des assurés dans le cadre des dommages aux biens, afin d'accélérer les procédures.

TITRE VII. - FACILITER L'ESSOR DES PROJETS INDUSTRIELS ET D'INFRASTRUCTURE

L'article 15 concerne les centres de données, plus communément appelés « datacenters ». Ils constituent l'infrastructure sous-jacente indispensable au fonctionnement de l'ensemble de l'économie numérique, et par extension, compte tenu de la vaste transition numérique en cours, de l'économie comme de la société française. Or, le déploiement des centres de données les plus importants en termes d'impact sur la transition numérique ou sur la souveraineté nationale ne fait à ce jour l'objet d'aucun cadre favorable spécifique, quand bien même il est essentiel de pouvoir sécuriser leur implantation rapide sur le territoire. L'extension du dispositif de « projet d'intérêt national majeur », introduit avec la loi Industrie verte pour les projets industriels les plus stratégiques, aux centres de données d'envergure comparable participera à accélérer t sécuriser leur implantation en France.

Le développement d'infrastructures pour la transition énergétique est assuré par des entités soumises au code de la commande publique (Etat ou entreprises publiques). A titre d'illustration, l'Etat assure pour l'éolien en mer la conduite des études techniques et environnementales pour l'éolien en mer. RTE assure le raccordement des parcs éoliens en mer au réseau de transport d'électricité, qui nécessite la construction de postes électriques spécifiques. L'article L.2113-10 du code de la commande publique prévoit l'allotissement des marchés publics pour assurer l'accès des PME à la commande publique. L'article 16 propose d'élargir les cas de dérogation à ce principe en exonérant les marchés portant sur certaines infrastructures concourant à la transition énergétique tout en préservant l'accessibilité aux PME. Cela permettra de renforcer l'attractivité de ces marchés pour les fournisseurs dans un contexte de fortes tensions d'approvisionnement. De plus, l'article L.2193-11 du code de la commande publique prévoit actuellement le paiement direct des sous-traitants. Ces dispositions ont vocation à protéger les sous-traitants d'une possible défaillance de l'entreprise principale, au prix d'un traitement administratif plus lourd pour le titulaire principal du marché et les sous-traitants. Compte tenu des garanties portant sur les acteurs principaux de ce type de marché, l'article 16 propose également d'assouplir le cadre légal, en laissant la possibilité aux sous-traitants de renoncer au paiement direct lorsqu'ils y trouvent un intérêt. Cette évolution ne remet pas en question l'obligation de déclarer les sous-traitants.

Le déploiement du très haut débit mobile sur tout le territoire est une priorité pour le gouvernement. Or, il existe deux sources majeures de complexité pour les entreprises associées à ce projet, toutes deux liées à l'installation des antennes de téléphonie mobile. D'abord, dans la mesure où les maires peuvent retirer une décision d'urbanisme entachée d'illégalité, les opérateurs doivent attendre l'expiration du délai de trois mois avant de lancer les travaux d'installation, ce qui retarde le déploiement de la couverture numérique. Ensuite, compte tenu des investissements engagés et de la durée de leur amortissement, l'incertitude existe quant au maintien sur le site d'infrastructures de téléphonie mobile en raison de la chaine des contrats et baux impliquant différents acteurs. Dans ce contexte, l'article 17 vise à améliorer la lisibilité de ces deux régimes et à renforcer leur efficacité dans l'esprit de la loi qui les a créées initialement.

La mise en oeuvre de la séquence éviter-réduire-compenser est un enjeu central pour les projets d'implantation industrielle comme pour les projets d'aménagement ou d'infrastructure. Du fait d'un temps insuffisant ou d'un défaut d'anticipation, elle aboutit parfois à des difficultés à mettre en oeuvre ces compensations dans le calendrier prévisionnel d'autorisation et d'implantation du projet, ce qui peut devenir limitant, voire bloquant, pour des projets d'implantation industrielle notamment de grande ampleur. L'article 18 vise à modifier le cadre applicable à la compensation pour, tout en maintenant l'exigence de qualité de la compensation environnementale, donner plus de temps aux porteurs de projets pour la mettre en oeuvre, en leur permettant de réaliser des mesures compensatoires après le démarrage des travaux lorsque cela est approprié.

TITRE VIII - SIMPLIFIER POUR ACCÉLÉRER LA TRANSITION ÉNERGETIQUE ET ÉCOLOGIQUE DE NOTRE ÉCONOMIE

Chapitre 1er. - Simplifier la transition énergétique et l'essor des énergies renouvelables

L'article 19 vise à accélérer les procédures d'attribution et de refus des permis exclusifs de recherche des mines et de géothermie tout en prenant en compte les avis du public plus tôt dans la procédure, en parallèle du recueil des autres avis. Il ouvre la possibilité de réutiliser des ouvrages miniers pour créer un stockage géologique de dioxyde de carbone, et non pas seulement pour un autre usage régi par le code minier. Il propose de pouvoir invoquer la survenue de circonstances exceptionnelles pour accorder une prolongation de ce permis si son exécution a été empêchée. L'article vise enfin à instaurer en Guyane une autorisation préfectorale unique réglementant les conditions d'occupation temporaire du domaine privé et public de l'Etat, d'exploration et d'exploitation des substances concessibles, en unifiant les procédures.

L'article 20 permettra à l'autorité compétente de déroger aux règles des plans locaux d'urbanisme, afin de contribuer notamment au déploiement des pompes à chaleur air/eau collectives et des énergies renouvelables implantées sur les bâtiments, dont l'usage est amené à se développer fortement dans les prochaines années, conformément aux trajectoires de la planification écologique de la France. C'est une recommandation de l'étude « sur les freins et leviers à la diffusion de la pompe à chaleur en logement collectif » réalisée par la Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature et publiée en 2023. Les limites de gabarit et de hauteur imposées par les PLU, qui concernent les équipements techniques tels que les pompes à chaleur, peuvent en effet être bloquantes.

L'article 21 vise à supprimer l'obligation de réaliser un bilan carbone pour le soutien au biogaz dans le cadre des procédures de mise en concurrence, introduite en 2019. Il convient dans un premier temps de rappeler que le développement du biogaz est un des leviers de décarbonation de notre système énergétique et de réduction de notre dépendance à l'importation de gaz naturel, notamment russe. Les assurances en la matière sont déjà obtenues par d'autres dispositions. Après la transposition par l'ordonnance n° 2021-235 du 3 mars 2021 de la directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018, l'obligation de réalisation de bilan carbone est devenue redondante avec les obligations relatives aux exigences de réduction d'émissions de gaz à effet de serre liées à la production du biométhane et d'électricité par cogénération de biogaz. De plus, le cahier des charges des procédures de mise en concurrence mentionnées aux articles L. 446-5, L. 446-14 et L. 446-15 peut prévoir l'obligation d'un bilan de carbone.

TITRE IX. - SIMPLIFIER POUR INNOVER

L'article 22 propose de simplifier les démarches à réaliser dans le cadre de recherches en matière de santé.

D'une part, il simplifie les démarches administratives des promoteurs de recherches impliquant la personne humaine (RIPH), notamment industriels, ayant reçu une autorisation et/ou un avis favorable pour la mise en oeuvre d'une recherche biomédicale ou relevant des règlements européens sur le médicament, le dispositif médical ou le dispositif médical de diagnostic in vitro, afin qu'ils puissent importer ou exporter les échantillons nécessaires à la recherche sans accomplir de formalité supplémentaire. Il prévoit en outre de simplifier les opérations d'import-export pour les entités juridiques en charges de biobanques au moyen d'autorisations globales d'import-export aux entités portant des biocollections et d'effectuer des contrôles a posteriori des opérations de transferts. Ceci permettra d'augmenter très significativement la compétitivité des structures françaises, privées ou publiques.

D'autre part, il vise à encourager le recours aux référentiels de la CNIL pour les traitements de données dans le domaine de la santé en permettant aux organismes publics ou privés représentatifs des acteurs concernés de proposer des référentiels à la CNIL et en prévoyant que celle-ci élabore et publie une stratégie comportant une programmation des référentiels à adopter, portant notamment sur les catégories de traitements les plus usuels. En outre, pour les études, évaluations et les recherches n'impliquant pas la personne humaine, il offre la possibilité, en cas d'avis favorable par un comité scientifique et éthique (CSE) local, de se dispenser de l'avis du Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (CESREES).

L'article 23 modifie l'article 8 de la loi dite « informatique et libertés » afin d'intégrer la prise en compte des enjeux d'innovation dans l'ensemble des missions de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) ce qui permettra de simplifier le dialogue avec les acteurs économiques et de promouvoir des approches innovantes et simplifiées tout en respectant les dispositions en vigueur en matière de protection des données.

TITRE X. - FACILITER L'INSTALLATION ET LES TRAVAUX DES COMMERCES ET FLUIDIFIER LES RELATIONS ENTRE BAILLEURS ET COMMERCANTS

L'article 24 modifie le régime des baux commerciaux en instaurant un principe de paiement mensuel du loyer pour tout preneur qui en fait la demande et une limitation du dépôt de garantie à trois mois de loyer, afin de limiter les sorties de trésorerie liées à la location du local. Il prévoit également un transfert l'obligation de restitution du dépôt de garantie vers le bailleur-acquéreur, en cas de vente d'un local commercial loué, afin de faciliter la restitution en fin de location.

L'article 25 porte plusieurs dispositions de simplification relatives à l'aménagement commercial. Il prévoit de modifier la définition de l'intérêt pour agir à l'encontre d'une autorisation d'exploitation commerciale afin de limiter les recours dilatoires. Une seconde disposition vise à simplifier la réorganisation interne des ensembles commerciaux en facilitant le transfert de droits commerciaux à l'intérieur de l'ensemble.

L'article 26 remplace le système d'autorisation par un système de déclaration pour la réalisation des travaux dans certains établissements recevant du public, afin de simplifier les travaux à l'intérieur des magasins situés dans l'enceinte de grands centres commerciaux.

TITRE XI. - ASSURER UNE SIMPLIFICATION DURABLE

L'article 27 institue l'évaluation par l'administration des conséquences prévisibles pour les petites et moyennes entreprises des projets de lois qui les concernent.

TITRE XII. - DISPOSITIONS DIVERSES

L'article 28 tire les conséquences de la décision n° 2023-1068 QPC du 17 novembre 2023 du Conseil constitutionnel en clarifiant la procédure de saisie des droits incorporels dans le code des procédures civiles d'exécution. En outre, il réintroduit dans le code de l'organisation judiciaire la compétence du juge de l'exécution, abrogée par la décision précitée, pour trancher les contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée.

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

Article

Objet de l'article

Consultations obligatoires

Consultations facultatives

1er

Simplifier l'organisation administrative en supprimant des comités, commissions, conseils et observatoires

Autorité de Régulation des Communications Electroniques, des Postes et de la distribution de la Presse (ARCEP)

Néant

2

Simplifier les démarches

Néant

Néant

3

Développer les rescrits sectoriels et la cristallisation des normes applicables aux entreprises

Néant

Néant

4

Faciliter l'accès à la commande publique en ligne

Néant

Principaux établissements publics de l'État

Direction générale de l'offre de soins (DGOS)

Direction de la sécurité sociale (DSS)

5

Unifier le contentieux des marchés publics entre le juge administratif et le juge judiciaire

Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel

Néant

6

Faciliter les processus de ventes de fonds de commerce et d'entreprises en réduisant le délai d'information préalable des salariés

Néant

Néant

7

Simplifier la présentation des bulletins de paie

Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP)

Néant

8

Rehausser les seuils de notification des concentrations

Néant

Autorité de la concurrence

9

Généraliser les dispositifs de médiation entre les entreprises et les organismes publics, les promouvoir et en simplifier l'accès

Néant

Néant

10

Adapter les régimes des sanctions pesant sur les chefs d'entreprises

Néant

Néant

11

Simplifier le droit des contrats spéciaux

Néant

Néant

12

Accélérer le traitement des requêtes devant la juridiction administrative

Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (CSTACAA)

Néant

13

Aligner le droit des très petites entreprises sur celui des particuliers en matière bancaire

Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF)

Fédération bancaire française (FBF)

Etablissements de crédit

14

Simplifier et faciliter les relations avec les prestataires de services d'assurance

Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF)

France Assureurs

Experts d'assurance

Agents généraux d'assurance (Agéa)

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

15

Favoriser la conduite de projets stratégiques

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Néant

16

Accélérer les projets stratégiques pour la transition énergétique

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Néant

17

Accélérer et simplifier les déploiements de réseaux mobiles

Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP)

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Néant

18

Simplifier la mise en oeuvre des compensations des atteintes à la biodiversité

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Néant

19

Moderniser le droit minier pour faciliter la transition énergétique

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Mission interministérielle de l'eau

Collectivités d'outre-mer (Conseils régional et départemental de la Guadeloupe, Conseil régional et départemental de La Réunion, Assemblée de Martinique, Assemblée de Guyane, Conseil départemental de Mayotte)

Néant

20

Dérogation aux règles des plans locaux d'urbanisme (PLU) pour l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Néant

21

Simplifier les obligations relatives au biogaz

Néant

Néant

22

Faciliter l'innovation issue de la recherche

Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)

Direction générale de la santé, direction générale de l'offre de soin, ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, commission national des recherches impliquant la personne humaine, syndicats professionnels (LEEM, SNITEM, FranceBiotech, AFCROs), comité national de coordination de la recherche (CNCR), UNICANCER, Conférence DG CHU, RESPIC, représentation des investigateurs, AP-HP, Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), Alliance pour la Recherche et l'Innovation des Industries de Santé (ARIIS)

23

Intégrer l'innovation dans le mandat de la Commission nationale de l'informatique et des libertés

Commission nationale informatique et libertés (CNIL)

Néant

24, 25, 26

Faciliter l'installation et l'exploitation des travaux des commerces

Conseil national d'évaluation des normes (CNEN)

Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE)

Alliance du Commerce

Fédération représentative du commerce spécialisé (PROCOS)

Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires (FACT)

Fédération des Entreprises Immobilières (FEI)

Foncières cotées

Conseil national du commerce

Conseil national consultatif des personnes handicapées

27

Instaurer un test petites et moyennes entreprises

Néant

Néant

28

Clarifier le droit des procédures civiles d'exécution

Néant

Néant

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION

Article

Objet de l'article

Textes d'application

Administration compétente

1er

Simplifier l'organisation administrative en supprimant des comités, commissions, conseils et observatoires

Décrets simples

Décrets en Conseil d'Etat

A déterminer

2

Simplifier les démarches

Ordonnances

Direction générale des entreprises

3

Développer les rescrits sectoriels et la cristallisation des normes applicables aux entreprises

Ordonnances

A déterminer

4

Faciliter l'accès à la commande publique en ligne

Décret en Conseil d'Etat

Ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

5

Unifier le contentieux des marchés publics entre le juge administratif et le juge judiciaire

Décret en Conseil d'Etat

Direction des affaires juridiques du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

6

Faciliter les processus de ventes de fonds de commerce et d'entreprises en réduisant le délai d'information préalable des salariés

Néant

Sans objet

7

Simplifier la présentation des bulletins de paie

Décret en Conseil d'Etat

Décret simple

Direction de la sécurité sociale

Direction générale du travail

8

Rehausser les seuils de notification des concentrations

Néant

Sans objet

9

Généraliser les dispositifs de médiation entre les entreprises et les organismes publics, les promouvoir et en simplifier l'accès

Décret en Conseil d'Etat

Ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN) / Médiateur des entreprises

10

Adapter les régimes des sanctions pesant sur les chefs d'entreprises

Néant

Sans objet

11

Simplifier le droit des contrats spéciaux

Ordonnance

Direction des affaires civiles et du Sceau

12

Accélérer le traitement des requêtes devant la juridiction administrative

Arrêté

Ministère de la Justice

13

Aligner le droit des très petites entreprises sur celui des particuliers en matière bancaire

Décret simple

Ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique (MEFSIN)

Direction générale du Trésor

14

Simplifier et faciliter les relations avec les prestataires de services d'assurance

Décrets en Conseil d'Etat

Ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

15

Faciliter la conduite de projets stratégiques

Décrets simples

Décret en Conseil d'Etat

Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature

Direction générale des entreprises

16

Accélérer les projets stratégiques pour la transition énergétique

Décret

Direction générale de l'énergie et du climat

Direction générale des entreprises

17

Accélérer et simplifier les déploiements de réseaux mobiles

Néant

Sans objet

18

Simplifier la mise en oeuvre des compensations des atteintes à la biodiversité

Décret

Direction générale des entreprises

Commissariat général au développement durable

19

Moderniser le droit minier pour faciliter la transition énergétique

Décret en Conseil d'Etat

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires :

Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) ;

Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN),

Direction générale de la prévention des risques (DGPR).

20

Dérogation aux règles des plans locaux d'urbanisme (PLU) pour l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable

Décret en Conseil d'Etat

Direction Générale de l'Aménagement, du Logement et de la Nature (DGALN)

21

Simplifier les obligations relatives au biogaz

Néant

Sans objet

22

Faciliter l'innovation issue de la recherche

Décret en Conseil d'Etat

Ministère de la Justice,

Ministère chargé de la Santé

23

Intégrer l'innovation dans le mandat de la Commission nationale de l'informatique et des libertés

Néant

Sans objet

24, 25, 26

Faciliter l'installation et l'exploitation les travaux des commerces

Décret en Conseil d'Etat

Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature

Direction générale des entreprises

Ministère de l'Intérieur

27

Instaurer un test petites et moyennes entreprises

Décret en Conseil d'Etat

Direction générale des entreprises

28

Clarifier le droit des procédures civiles d'exécution

Néant

Clarification de la procédure de saisie des droits incorporels

TABLEAU D'INDICATEURS

Indicateur

Objectif et modalités de l'indicateur

Objectif visé (en valeur et/ou en tendance)

Horizon temporel de l'évaluation (période ou année)

Identification et objectif des dispositions concernées

Demandes d'autorisation traitées par le MESR

Nombre de demandes d'autorisation d'import-export traitées par le MESR dans le cadre de recherches biologiques

Diminution

1-3 ans

 

Autorisation d'entités juridiques à effectuer des imports exports

Nombre d'entités ayant demandé une autorisation globale d'import-export pour leur activité de biobanques

Augmentation

1 an

 

Autorisation d'entités juridiques à effectuer des imports exports

Nombre d'entités ayant obtenu une autorisation globale d'import-export pour leur activité de biobanques

Augmentation

2 ans

 

Pourcentage d'administrations mettant à la disposition des entreprises les services d'un conciliateur ou d'un médiateur

 

Juin 2025 :
50 %

Décembre 2025 : 100 %

Juin 2026

 

Nombre d'opérations qui sortent du champ de l'obligation de notification

Nombre d'opérations concernées par la dispense de l'obligation de notification à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre d'opérations notifiées sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence

Annuel

Simplifier et alléger les charges pesant sur les entreprises pour notifier une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence : suppression de la charge administrative et des frais de conseil associés à la préparation du dossier de notification et mise en oeuvre plus rapide des opérations non soumises à un contrôle de l'Autorité de la concurrence (frais d'avocat, exception faite des plus petites entreprises qui pour certaines notifient leurs opérations sans avoir recours à un avocat, temps de l'instruction par les services de l'Autorité notamment)

Nombre d'entreprises concernées

Nombre d'entreprises concernées par la dispense de l'obligation de notification d'une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre d'entreprises concernées par la notification d'une opération de concentration sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre d'entreprises concernées par une notification obligatoire à l'Autorité de la concurrence et allégement de la charge pour ces dernières

Annuel

Idem

Nombre de PME concernées

Nombre de PME concernées par la dispense de l'obligation de notification d'une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre de PME concernées par la notification d'une opération de concentration sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre de PME concernées par les opérations obligatoirement notifiées à l'Autorité de la concurrence et allégement de la charge pour ces dernières

Annuel

Idem

Nombre d'opérations qui sortent du champ de l'obligation de notification

Nombre d'opérations concernées par la dispense de l'obligation de notification à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre d'opérations notifiées sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence

Annuel

Simplifier et alléger les charges pesant sur les entreprises pour notifier une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence : suppression de la charge administrative et des frais de conseil associés (avocats, économistes, etc.) à la préparation du dossier de notification et mise en oeuvre plus rapide des opérations non soumises à un contrôle de l'Autorité de la concurrence

Nombre d'entreprises concernées

Nombre d'entreprises concernées par la dispense de l'obligation de notification d'une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre d'entreprises concernées par la notification d'une opération de concentration sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre d'entreprises concernées par une notification obligatoire à l'Autorité de la concurrence et allégement de la charge pour ces dernières

Annuel

Idem

Nombre de PME concernées

Nombre de PME concernées par la dispense de l'obligation de notification d'une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence, par rapport au nombre de PME concernées par la notification d'une opération de concentration sur les 5 dernières années avant l'entrée en vigueur du dispositif (2018-2022)

Baisse du nombre de PME concernées par les opérations obligatoirement notifiées à l'Autorité de la concurrence et allégement de la charge pour ces dernières

Annuel

Idem

Pourcentage d'administrations mettant à la disposition des entreprises les services d'un conciliateur ou d'un médiateur

 

Juin 2025 :
50 %

Décembre 2025 : 100 %

Juin 2026

 

Autorisation de recherche intégrant des données externes

Nombre de demande d'autorisation de recherche biomédicales intégrant tout ou partie d'un bras externe, mobilisant des données de vie réelle directement ou virtuelles

Augmentation

1 à 3 ans

 

Référentiels CNIL - clarification du champ d'application de la LIL

Nombre de référentiels simplifiant les démarches en matière de traitements de données de santé 

Augmentation du nombre de référentiels ; diminution du nombre de demandes d'autorisation adressées à la CNIL

1 à 3 ans

 

TITRE IER - SIMPLIFIER L'ORGANISATION DE L'ADMINISTRATION

Article 1er - Simplifier l'organisation administrative en supprimant des comités, commissions, conseils et observatoires

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Conseil stratégique de la recherche

La stratégie nationale en matière de recherche a été successivement mise en oeuvre par le Conseil supérieur de recherche et de la technologie (créé en 1982), par le Comité d'orientation stratégique (créé en 1995), par le Conseil national de la science (créé en 1998), par le Haut Conseil de la science et de la technologie (créé en 2006).

Le Conseil stratégique de la recherche a été créé par l'article 95 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, codifié à l'article L. 120-1 du code de la recherche.

Aux termes de l'article L. 120-1 du code de la recherche, le Conseil stratégique de la recherche « propose les grandes orientations de la stratégie nationale de recherche » (définie à l'article L. 111-6 du code de la recherche) et « participe à l'évaluation de leur mise en oeuvre ».

Le Conseil stratégique est présidé par le Premier ministre ou, par délégation, par le ministre chargé de la recherche.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Aux termes de l'article D. 6442-1 du code des transports, le Conseil supérieur de l'aviation civile « peut être consulté par le ministre chargé de l'aviation civile sur toute question intéressant le transport aérien, notamment dans les domaines du développement durable, des entreprises et des services de transport aérien, des aérodromes et des clients du transport aérien. Il peut recueillir son avis sur les projets de loi et de règlement et sur les projets de texte de l'Union européenne ».

Le Conseil supérieur de l'aviation civile est placé auprès du ministre chargé de l'aviation civile (article D. 6441-1 du code des transports). Le Conseil supérieur de l'aviation civile peut, « lorsqu'il en décide à la majorité, présenter au ministre chargé de l'aviation civile toute proposition portant sur des questions intéressant le transport aérien » (D. 6441-3 du code des transports).

Par ailleurs, l'article L. 6441-1 du code des transports, tel qu'institué par l'article 10 de la loi n° 2018-699 visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination, prévoit que le Conseil supérieur de l'aviation civile comprend parmi ses membres un député et un sénateur.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

La commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général a été créée par l'article 8 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, codifié par l'ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code général de la fonction publique.

Elle est désormais prévue par l'article L. 326-7 du code générale de la fonction publique qui dispose que « les nominations prononcées au titre de l'article L. 326-6 ne peuvent intervenir qu'après consultation d'une commission chargée d'apprécier l'aptitude des intéressés à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général, en tenant compte de leurs fonctions antérieures et de leur expérience.

L'avis de la commission est communiqué aux intéressés sur leur demande.
Le sens de l'avis de la commission sur les nominations prononcées est publié au Journal officiel en même temps que l'acte de nomination. »

Sa composition et son fonctionnement sont déterminés par les dispositions du décret n° 94-1085 du 14 décembre 1994 relatif aux modalités de nomination au tour extérieur dans certains corps d'inspection et de contrôle de la fonction publique de l'Etat.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

La Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) est issue de la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications (CSSPPT) créée par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public des postes et télécommunications. L'objectif de CSSPPT était d'établir un contrôle parlementaire fort sur les activités postales et de communications électroniques au moment du changement de statut de La Poste et de France Télécom.

La loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle a confirmé ses missions, en élargissant son domaine d'intervention aux communications électroniques. Avec la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques (CSSPPCE) est devenue la Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP).

L'article L. 125 du code des postes et des communications électroniques dispose que la CSNP « veille à l'évolution équilibrée des secteurs des postes et des communications électroniques et étudie les questions relatives à la neutralité de l'internet. Elle émet, à cette fin, un avis sur les projets de modification de la législation applicable à ces secteurs, sur les projets de cahier des charges de La Poste et des opérateurs chargés du service universel des communications électroniques et les projets de contrats de plan de La Poste.

Par ailleurs, la CSNP « est consultée par les ministres chargés des postes et des communications électroniques lors de la préparation des directives communautaires relatives à ces secteurs. Elle peut être consultée par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et par les commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat sur les questions relevant de sa compétence. » (ibid.)

Elle peut saisir l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) sur « des questions concernant la compétence de cette autorité en matière de contrôle et de sanction du respect, par les opérateurs, des obligations de service public et de service universel qui leur sont applicables » (ibid.)

Elle peut « suggérer les modifications de nature législative et réglementaire que lui paraît appeler l'évolution technologique, économique et sociale des activités postales et de communications électroniques » (ibid.).

Elle formule des recommandations « pour l'exercice d'une concurrence loyale dans les activités postales et de communications électroniques » et rend un rapport annuel au Parlement et au Premier ministre sur le service public des postes et celui des communications électroniques (ibid.).

Comité national de la gestion des risques en forêt

Le comité national de la gestion des risques en forêt a été créé par l'article 68 de la Loi de Modernisation de l'Agriculture et de la Pêche (LMAP) du 27 juillet 2010, codifié à l'article L. 261-4-1 du code forestier (ancien).

Au sein du code forestier nouveau, l'article D. 351-1 prévoit que le Comité national de la gestion des risques en forêt est compétent en matière de gestion des risques sanitaire, climatologique, météorologique ou liés à l'incendie.

Le comité est consulté sur les textes d'application du chapitre relatif à l'assurance des bois et forêts des particuliers (chapitre 1er du livre III de la partie réglementaire du code forestier nouveau.

Il peut également être consulté par le ministre chargé de la forêt, de l'environnement, de l'économie ou de l'outre-mer sur : « 1° La connaissance des risques sanitaire, climatologique, météorologique ou liés à l'incendie ainsi que tout autre risque affectant la forêt ; 2° Les instruments appropriés de gestion de ces risques, y compris les techniques autres que l'assurance » (article D. 351-1 du code forestier nouveau)

Le Comité se réunit sur convocation de son président ou à la demande du ministre et son secrétariat est assuré par le ministère chargé des forêts.

Le comité est également mentionné à l'article L. 351-1 du code forestier (nouveau), relatif aux surfaces forestières considérées comme assurables.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Conseil stratégique de la recherche

La loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, prise en application de l'article 34 de la Constitution, a créé le Conseil stratégique de la recherche.

Conseil supérieur de l'aviation civile

En vertu de la loi organique, (II de l'article LO 145 du code électoral pour les députés et article LO 297 du même code pour les sénateurs), la désignation en cette qualité d'un député ou d'un sénateur dans une institution ou un organisme extérieur relève de la loi. C'est la raison pour laquelle la présence d'un député et d'un sénateur au sein du conseil supérieur de l'aviation civile est prévue par l'article L. 6441-1 du code des transports, constituant l'unique article du chapitre unique du titre IV du livre IV de la sixième partie de la partie législative du code des transports. Cette disposition ne pouvant donc être déclassée, son abrogation requiert l'adoption d'une disposition législative.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

La commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général a été créée par l'article 8 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public. Cet article 8 posait une dérogation aux règles de droit commun relatives à l'accès à la fonction publique édictées notamment par l'article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, prise en application de l'article 34 e la Constitution du 4 octobre 1958.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

La loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public des postes et télécommunications, prise en application de l'article 34 de la Constitution, a créé la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications (CSSPPCE).

La loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique a transformé la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications (CSSPPCE) en Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP).

La mesure envisagée, supprimant la Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP), s'inscrit dans le champ de l'article 34 de la Constitution.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Le Comité national de la gestion des risques en forêt a été créé par l'article 68 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, codifié à l'article L. 261-4-1 du code forestier (ancien). Ces dispositions relevant du domaine du règlement ont été recodifiées dans la partie réglementaire du nouveau code forestier par l'effet du décret n° 2012-836 du 29 juin 2012. A l'article L. 351-1 du code forestier (nouveau) et en application de l'article 34 de la Constitution, la loi continue de prévoir que son avis est requis pour la détermination des surfaces forestières considérées comme assurables contre le risque de tempête.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Sans objet.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Conseil stratégique de la recherche

Cette instance ne s'est pas réunie depuis 2015.

En raison de l'absence d'activité de cette instance et de la mise en place d'un conseil présidentiel de la science, placé auprès du président de la République, ainsi que des agences de programme, son maintien n'apparait plus pertinent.

Le Conseil supérieur de la recherche étant institué par l'article L. 120-1 du code de la recherche, une modification législative est nécessaire pour sa suppression.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Cette instance ne s'est pas réunie depuis 2016.

Le Conseil supérieur de l'aviation civile étant notamment institué par l'article L. 6441-1 du code des transports, une modification législative est nécessaire pour sa suppression.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Tous les corps d'inspection générale et de contrôle mis en extinction (IGF, IGA, IGAS, IGESR, IGEDD, CGAER, IG Agriculture, IGAC, CGEFI) et fonctionnalisés (celles précédemment énumérées et l'IG Justice) ne peuvent plus relever, de droit, du dispositif de recrutement par la voie du tour extérieur prévu par les articles L. 326-6 et L. 326-7 du CGFP, la mise en extinction y faisant obstacle.

En outre, ces dispositions ne s'appliquent pas davantage aux services suivants qui ne disposent pas de corps propre :

- Inspection générale des affaires étrangères ;

- Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGE) ;

- Inspection générale des affaires maritimes ;

- Inspection générale police nationale.

Ne sont pas non plus concernés les agents ne relevant pas du code général de la fonction publique, notamment les militaires (IG des armées, contrôle général des armées, IG gendarmerie nationale).

Eu égard à ces éléments, et n'identifiant pas d'autres services d'inspection générale ou de contrôle pouvant relever de ce dispositif, la commission peut être supprimée dans la mesure où elle est devenue sans objet.

Le Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général étant institué par l'article 8 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, traduit à l'article L. 326-7 du code général de la fonction publique, une modification législative est nécessaire pour sa suppression.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes

La création de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse et celle du Conseil National du Numérique rendent obsolète la pertinence de la Commission Supérieure du Numérique et de la Poste. Il convient donc de réduire cette dépense considérée aujourd'hui comme peu efficiente.

Le Commission Supérieure du Numérique et des Postes étant institué par l'article L. 125 du code des postes et des communications électroniques, une modification législative est nécessaire pour sa suppression.

Par ailleurs, un avis de cette commission est mentionné dans la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Cette instance ne s'est pas réunie depuis 2017, et s'était d'ailleurs très peu réunie.

Il convient de noter que le recours au CNGRF devrait être envisagé dans le cadre de la modification de textes relatifs aux assurances ou aux risques forestiers. Les dispositifs fiscaux liés à l'encouragement de l'assurance étant de nature législative, et ayant dans le passé plutôt été traité sous forme d'amendements au projet de loi de finance, cette disposition était le plus souvent inopérante dans la réalité.

La composition actuelle du CNGRF soulève par ailleurs des questions, puisque seuls les propriétaires forestiers privés sont représentés. Or la question des risques transcende la propriété, et le fait que l'ONF représentant les forêts publiques, soit 25% du couvert forestier total, ne soit pas représenté interroge. Par ailleurs, l'interprofession France-Bois-Forêt qui représente l'intégralité de la filière n'y siège pas non plus. D'autres acteurs pourraient aussi être légitime à siéger au sein de cette assemblée, en particulier les établissements publics disposant d'information sur les risques. Enfin, les travaux interministériels sur les risques en forêt, particulièrement sur les incendies, se conduisent actuellement sous forme de groupes de travail co-animés par les ministères en charge que via cette instance, il y avait donc lieu de la supprimer.

Le Comité national de la gestion des risques en forêt étant prévu par l'article L. 351-1 du code forestier (nouveau), une modification législative est nécessaire pour sa suppression.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La suppression de ces instances contribuera à simplifier les relations administratives et institutionnelles, à accélérer les délais de prise de décision et à rationaliser le budget alloué aux organes consultatifs.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Conseil stratégique de la recherche

Aucune autre option n'a été envisagée.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Aucune autre option n'a été envisagée.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Aucune autre option n'a été envisagée.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

Il a été envisagé dans le cadre des réflexions de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, de rapprocher la CSNP du Conseil national du numérique (CNNum) afin de constituer une grande instance de concertation et de dialogue avec la société civile autour des enjeux du numérique, associant toutes les catégories de parties prenantes. Cela aurait pu s'effectuer en augmentant le nombre de parlementaires au sein du CNNum, qui comprend déjà deux députés et deux sénateurs, voire, s'il était décidé de conserver le rôle consultatif de la CSNP, en créant une sous-commission constituée de parlementaires au sein du CNNum.

Cette hypothèse n'a pas été retenue.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Une évolution du CNGRF dans sa composition pour mieux prendre en compte la diversité des risques et des propriétaires a été un temps envisagé pour répondre aux enjeux développés plus haut. Cette hypothèse n'a pas été retenue.

3.2. OPTION RETENUE

Conseil stratégique de la recherche

Le présent article a pour objet de supprimer le Conseil stratégique de la recherche.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Le présent article a pour objet d'abroger l'article L. 6441-1 du code des transports (article unique du Titre IV du livre IV dudit code), instituant le Conseil supérieur de l'aviation civile, qui prévoit la présence parmi ses membres d'un député et d'un sénateur et renvoie au décret simple la définition de ses missions, de sa composition au-delà des deux parlementaires, de son organisation et de ses modalités de fonctionnement. La structure du code impose d'abroger le titre IV du livre IV de sa partie législative.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Le présent article a pour objet de supprimer la Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

Le présent article a pour objet de supprimer la Commission Supérieure du Numérique et des Postes dont le rôle est redondant avec d'autres organes ayant également un rôle consultatif.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Le présent article a pour objet de supprimer le Comité national de la gestion des risques en forêt.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Conseil stratégique de la recherche

Le chapitre préliminaire du titre II du livre Ier du code de la recherche est abrogé. Les articles L. 145-1, L. 147-1 et L. 146-1 du code de la recherche sont modifiés.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Le titre IV du livre IV de la sixième partie de la partie législative du code des transports est abrogé.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Les articles L. 326-6 et L. 326-7 du code général de la fonction publique sont abrogés.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

Les articles L.2, L. 2-2, L. 33-2, L. 34-11, L. 35-3, L. 43, L. 44-4, L. 131, L. 135 du code des postes et communications électroniques sont modifiés.

L'article L. 125 du code des postes et communications électroniques est abrogé.

Les articles 6 et 38 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom sont modifiés en cohérence.

Comité national de la gestion des risques en forêt

L'article L. 351-1 du code forestier est modifié.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Conseil stratégique de la recherche

Néant.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Néant.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Néant.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

L'impact sera marginal sur le groupe La Poste et les entreprises du secteur des communications électroniques, le régulateur étant l'ARCEP qui dispose en outre de pouvoir de sanctions pour mener à bien sa mission.

L'article L. 125 du CPCE prévoit notamment que la CSNP « veille à l'évolution équilibrée des secteurs des postes et des communications électroniques et étudie les questions relatives à la neutralité de l'internet. Elle émet, à cette fin, un avis sur les projets de modification de la législation applicable à ces secteurs, sur les projets de cahier des charges de La Poste et des opérateurs chargés du service universel des communications électroniques et les projets de contrats de plan de La Poste ».

Ce rôle semble particulièrement redondant avec celui de l'ARCEP.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Néant.

4.2.3. Impacts budgétaires

Conseil stratégique de la recherche

Le coût de fonctionnement de la commission était nul sur les dernières années. Sa suppression ne conduira pas à un allègement budgétaire direct.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Le coût de fonctionnement de la commission était nul sur les dernières années. Sa suppression ne conduira pas à un allègement budgétaire direct.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Le coût de fonctionnement de la commission était nul sur les dernières années. Sa suppression ne conduira pas à un allègement budgétaire direct.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes

Cette suppression représente un allégement budgétaire. Les coûts de fonctionnement s'élevaient en 2023 à 18 231€ auxquels il convient d'ajouter le coût d'indemnisation des personnalités qualifiées de 16 453€ en 2023 ainsi que la masse salariale de 2 ETP (à la charge du Ministère de l'Economie et des Finances).

Comité national de la gestion des risques en forêt

Le coût de fonctionnement de la commission était nul sur les dernières années. Sa suppression ne conduira pas à un allègement budgétaire direct.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le Conseil stratégique de la recherche comprend un représentant des régions (article L. 120-1 du code de la recherche.

Le Conseil supérieur de l'aviation civile comprend un conseiller régional désigné par l'Association des régions de France et un conseiller départemental désigné par l'Assemblée des départements de France (article D. 6441-5 du code des transports).

La suppression de la Commission Supérieure du Numérique et des Postes n'aurait aucun impact sur les collectivités territoriales.

Le CNGRF ne comportait pas de représentant des collectivités territoriales. Sa suppression n'a par ailleurs pas d'autre impact sur les collectivités territoriales.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Conseil stratégique de la recherche

La suppression du conseil stratégique de la recherche contribuera à alléger la charge administrative des services su ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que celle des 26 membres de l'instance.

Conseil supérieur de l'aviation civile

La suppression du conseil supérieur de l'aviation civile contribuera à alléger la charge administrative des services du ministère chargé de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ainsi que celle des 28 membres de l'instance.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

La suppression de la commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général contribuera à alléger la charge administrative des services du ministère chargé de la transformation et de la fonction publiques, ainsi que celle des 6 membres de l'instance.

Commission supérieure du numérique et des postes

La suppression de la commission supérieure du numérique et des postes contribuera à alléger la charge administrative des services du ministère chargé de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique, ainsi que celle des 8 membres de l'instance. Cela constituera également un allègement pour les différents intervenants appelés à solliciter l'avis de la CSNP ou à intervenir devant elle.

Comité national de la gestion des risques en forêt

La suppression du comité national de la gestion des risques en forêt contribuera à alléger la charge administrative des services du ministère chargé de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, ainsi que celle des 13 membres de l'instance.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Conseil stratégique de la recherche

Sans effet. En juin 2023, le rapport « sur l'écosystème de la recherche et de l'innovation » remis à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche par Philippe Gillet, formule des propositions « pour engager le processus de rénovation et de simplification de l'écosystème national » et ce dans la continuité des impulsions données par la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur.

Parmi les propositions formulées, l'une concerne le pilotage de la stratégie de la recherche et l'évolution du cadre institutionnel. Ainsi, il est proposé la suppression du Conseil stratégique de la recherche et la représentation de la science au plus haut niveau de l'Etat.

Ainsi, au vu de l'absence d'activité de cette instance, des préconisations formulées dans le rapport mentionné précédemment et compte tenu de la mise en place d'un conseil présidentiel de la science, placé auprès du président de la République, et des agences de programme, son maintien n'apparait plus pertinent.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Néant.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

La commission étant devenue sans objet, sa suppression n'a pas d'impact.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

Marginal, les saisines pour avis de la CSNP sont doublées d'une saisine de l'ARCEP. Le rôle principal de la CSNP concerne le contrôle des activités postales par le Parlement. Si ce rôle, antérieur à celui de la création de l'ARCEP, était pleinement justifié, il est aujourd'hui moindre.

L'ARCEP a en charge la production d'un rapport au Gouvernement et au Parlement sur les missions de service public que sont : le service universel postal, l'aménagement du territoire et la distribution de la presse. Ce rapport fait l'objet d'un avis de la CSNP avant sa présentation au Parlement et au Gouvernement.

L'instance de régulation du secteur est l'ARCEP (autorité administrative indépendante) L'utilité d'une commission parlementaire spécialisée dans le domaine des postes et des communications électroniques n'est donc plus démontrée.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Néant, le CNGRF ne publiant pas ses avis ni ses comptes rendus de réunions.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La question des risques forestiers continuera d'être traitée de manière plus souple, aussi la suppression du CNGRF n'aura pas d'impact direct sur la politique publique des risques en forêts et aucun impact environnemental. Par ailleurs, les travaux du CNGRF concernaient surtout questions financières et assurantielles liées aux risques.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Conseil stratégique de la recherche

Aucune consultation n'est requise et aucune consultation facultative n'a été organisée.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Aucune consultation n'est requise et aucune consultation facultative n'a été organisée.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Aucune consultation n'est requise et aucune consultation facultative n'a été organisée.

Commission supérieure du numérique et des postes

En application de l'article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, l'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) a été sollicité. L'ARCEP a rendu son avis le 16 avril 2024.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Aucune consultation n'est requise et aucune consultation facultative n'a été organisée. Une consultation informelle des principales parties prenantes a eu lieu.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La présente mesure entrera en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La présente mesure s'applique sur l'ensemble du territoire de la République française.

5.2.3. Textes d'application

Conseil stratégique de la recherche

Un décret en Conseil d'Etat (notamment pour modifier les articles R. 114-6, R. 329-2, R. 329-5, R. 329-14 et les tableaux figurant aux articles R.145-2, R.146-2, R. 147-2, R. 365-2, R. 366-2 et R. 367-2 du code de la recherche) et un décret simple (notamment pour abroger les articles D. 120-1 à D. 120-4 et modifier les tableaux figurant aux articles D. 145-1, D. 146-1 et D. 147-1 du code de la recherche) devront être pris.

Conseil supérieur de l'aviation civile

Un décret simple devra être pris pour abroger le titre IV du livre IV de la sixième partie de la partie réglementaire du code des transports.

Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou de contrôleur général

Un décret en Conseil d'Etat et en conseil des ministres devra être pris pour abroger les dispositions pertinentes du décret n° 94-1085 du 17 décembre 1994 relatif aux modalités de nomination au tour extérieur dans certains corps d'inspection et de contrôle de la fonction publique d'Etat.

Commission Supérieure du Numérique et des Postes (CSNP)

Un décret en Conseil d'Etat (notamment pour modifier l'article R. 1-1-8 du code des postes et communications électroniques) et un décret simple (pour abroger les chapitres Ier, II et III du Titre II du Livre III du code des postes et communications électroniques) devront être pris.

Comité national de la gestion des risques en forêt

Un décret simple devra être pris pour abroger les dispositions réglementaires relatives au Comité national de la gestion des risques en forêt (D. 351-1 à D. 351-3 du code forestier nouveau).

TITRE II - SIMPLIFIER LES DÉMARCHES ADMINISTRATIVES DES ENTREPRISES

Article 2 - Simplifier les démarches

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Prévu par le code des relations entre le public et l'administration (CRPA)2(*), les administrations sont légalement contraintes de mettre en oeuvre le « Dites-le nous une fois », principe leur interdisant de redemander une pièce, une information ou une donnée dès lors qu'elles l'ont en leur possession ou qu'elles peuvent l'obtenir auprès d'une autre administration. Ce principe peine à se déployer, mettant en évidence une sur-administration pour des raisons, parfois louables, telles que la lutte contre la fraude ou encore un défaut de système d'échange de données embarqué ab initio par les administrations dès la conception d'un dispositif.

Le rapport du Sénat « La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises » (juin 2023) fait état d'un coût de la lourdeur normative évalué à près de 3 % du produit intérieur brut, soit 70 Md€ par an. Par ailleurs, la consultation qui s'est tenue jusqu'au 29 décembre, réunissant près de 33 000 participants, 5 500 propositions et près de 730 000 votes, a révélé que les deux premières préoccupations en matière de simplification sont la simplification des démarches et des procédures (21 % des propositions), des normes et des réglementations (11 % des propositions)3(*). Ainsi plébiscité lors de la consultation publique du chantier simplification, il est proposé d'ancrer le « Dites-le nous une fois » comme un principe fort d'action de l'administration dans ses relations avec les entreprises.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance répond aux exigences de l'article 38 de la Constitution, qui prévoit que « Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse.

A l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. »

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Plusieurs textes européens doivent être mentionnés :

- Règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données). Ce règlement, qui encadre le traitement des données sur tout le territoire de l'UE, est entré en application le 25 mai 2018 et s'inscrit dans la continuité de la loi française « Informatique et Libertés » de 1978, modifiée par la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, établissant des règles sur la collecte et l'utilisation des données sur le territoire français. Il a été conçu autour de trois objectifs :

· renforcer les droits des personnes ;

· responsabiliser les acteurs traitant des données ;

· crédibiliser la régulation grâce à une coopération renforcée entre les autorités de protection des données.

- Règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides de minimis. Ce règlement définit le cadre applicable aux aides dont les montants ne relèvent pas du contrôle des aides d'État par l'Union européenne et n'impliquent pas de notification à la Commission pour autorisation, parce qu'ils sont considérés comme n'ayant aucune incidence sur la concurrence et les échanges dans le marché intérieur ;

- Accord interinstitutionnel entre le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission européenne « Mieux légiférer » du 13 avril 2016. Par cet accord, les trois institutions confirment leur objectif de simplifier la législation européenne et de réduire les lourdeurs administratives tout en veillant à ce que les objectifs de la législation soient atteints, en s'efforçant notamment :

· d'employer plus fréquemment la technique de la refonte pour modifier la législation existante et, lorsque celle-ci n'est pas appropriée, à codifier les textes législatifs dès que possible après l'adoption d'un acte modificatif ;

· de privilégier les instruments réglementaires les plus efficaces, tels que l'harmonisation et la reconnaissance mutuelle, pour éviter la réglementation excessive et les lourdeurs administratives.

Dans le cadre de cet accord interinstitutionnel, la Commission présente chaque année une synthèse (y compris un examen annuel de la charge) des efforts de l'Union en vue de simplifier la législation et de réduire les lourdeurs administratives, en employant son programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT) ;

- Directive (UE) n° 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises. Cette directive modifie le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE et impose aux entreprises la publication d'informations en matière de durabilité. En application de cette directive, les grandes entreprises et les petites et moyennes entreprises devront inclure, dans le rapport de gestion, les informations qui permettent de comprendre les incidences de l'entreprise sur les questions de durabilité, la manière dont ces questions de durabilité influent sur l'évolution des affaires, les résultats et la situation de l'entreprise. L'application des dispositions de la directive sera échelonnée dans le temps en fonction des types d'entreprises.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Une démarche similaire de simplification des démarches administratives pour les entreprises reposant sur l'échange des données entre administrations (principe du « Dites-le nous une fois ») a été mis en place en Belgique par la loi Only Once du 5 mai 2014, garantissant le principe de la collecte unique de données dans le fonctionnement des services et instances qui relèvent ou exécutent certaines missions pour l'autorité et portant simplification et harmonisation des formulaires électroniques et papier.

Cette loi s'inscrit dans le plan d'action fédéral pour la simplification administrative (« Plan Kafka »), déployé à partir de juin 2014, et couvrant l'ensemble des démarches pour les entreprises, à la fois en termes de formulaires à remplir, d'obligations d'enregistrement et d'agrément, de documents ou données à conserver, etc. Le Plan Kafka offre une palette d'outils, notamment méthodologiques, permettant d'effectuer une évaluation micro-économique des coûts liés à la complexité administrative (déclinaison de la Méthode des Coûts Standard, utilisée à l'échelle internationale) et une évaluation macro-économique (à travers une enquête bisanuelle sur la perception des charges administratives, réalisée auprès d'un échantillon représentatif d'entreprises et d'indépendants). Le Plan Kafka contient également un outil permettant aux usagers de signaler des complexités persistantes et des solutions pour simplifier.

Dans le cadre de la collecte unique des données prévue par la loi Only Once du 5 mai 2014, le Service pour la simplification administrative a pris un rôle de coordination et a ensuite offert un support à tous les services publics fédéraux concernés :

- Soutien dans la cartographie de la situation actuelle et l'identification des omissions vis-à-vis de la loi Only Once ;

- Accompagnement sur la mise en place de plans d'actions individuels pour l'implémentation de la loi Only Once ;

- Contact bilatéral avec les services publics pour mesurer la progression de l'implémentation ;

- Rapport de progression au gouvernement.

Dans son rapport du 22 avril 2020 « Fonctionnement de l'Agence pour la simplification administrative et mise en oeuvre du plan d'action fédéral », la Cour des comptes belge souligne l'impact de la simplification administrative, en termes de coûts financiers pour les entreprises, suite à l'entrée en vigueur de la loi Only Once de 2014 :

Source : Cour des comptes belge, avril 2020

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les obligations déclaratives (notamment les obligations de rapportage et les déclarations obligatoires) ainsi que les démarches liées à l'octroi d'aides ou de subventions (notamment pour la préparation des dossiers de candidatures et la collecte de pièces justificatives) constituent l'un des premiers irritants pour les entreprises.

En particulier pour les petites entreprises, du fait du nombre important de démarches déclaratives à effectuer (notamment pour les entreprises recrutant du personnel) et du fait de la difficulté d'accès à l'information et de la compréhensibilité du vocabulaire juridique, le temps consacré à ces démarches est un frein important au développement des entreprises :

- pour les petites entreprises, dans lesquelles les démarches sont effectuées par le chef d'entreprise lui-même, elles impliquent d'y consacrer un temps important, qui ne peut être alloué au développement de l'activité économique et à la stratégie de l'entreprise. En particulier, elles constituent une source importante d'inquiétude pour le chef d'entreprise et un risque d'insécurité juridique ;

- pour les entreprises dans lesquelles les démarches sont effectuées par des agents spécialisés (notamment direction juridique ou direction des ressources humaines), elles impliquent la mobilisation d'une équipe dédiée et des frais de fonctionnement importants, qui ne peuvent être alloués à l'investissement.

La simplification des démarches déclaratives et des démarches administratives des entreprises est donc un levier majeur en matière de sécurité juridique et financière pour les entreprises et de développement des entreprises.

Dans la mesure où certaines démarches déclaratives ou administratives applicables aux entreprises trouvent leur fondement dans des dispositions législatives, en particulier s'agissant des conditions d'éligibilité aux dispositifs ou d'assujettissement aux formalités, leur modification ou leur suppression impliquera un vecteur de niveau législatif (complété, le cas échéant, par un ajustement des dispositions réglementaires y afférentes).

Pour ce qui concerne la transformation d'autorisations en déclarations et la suppression de déclaration, la nécessité de légiférer résulte du fait que certains de ces régimes sont définis au niveau législatif. L'habilitation porte donc sur la modification des régimes qui sont définis dans la loi et qui ne sont pas par ailleurs contraints à revêtir la forme soit d'une autorisation, soit d'une déclaration, par un texte de niveau supérieur, en particulier européen.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

S'agissant de la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration [1° et 2°], l'objectif poursuivi est une simplification profonde par une identification et un tri des procédures administratives, en vue de réinterroger leur niveau.

S'agissant de la simplification des procédures, formulaires ou démarches administratives des entreprises [3°] : Le déploiement des échanges d'informations entre administrations permet le pré-remplissage des formulaires, la suppression d'un grand nombre de démarches pour les entreprises, et « l'aller-vers » pour proposer des aides, des accompagnements, des droits ou rappeler des démarches restant à effectuer. Il convient cependant de s'assurer que, dès lors que les échanges automatisés d'informations et de données sont possibles entre les administrations, permettant par conséquent de ne plus solliciter l'entreprise pour les obtenir, les dispositions législatives soient ajustées afin de ne plus imposer les démarches devenues obsolètes aux entreprises.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

S'agissant de la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration [1° et 2°] : L'identification a priori d'autorisations précises à transformer en déclarations ou de déclarations précises à supprimer n'a pu être réalisée dans un calendrier compatible avec le présent projet de loi. L'alternative à l'habilitation est bien entendu une loi ultérieure portant les mesures une fois qu'elles auront été identifiées, arbitrées puis écrites. Cette option n'a pas été retenue car le calendrier contraint de présentation des projets de loi conduirait à des délais plus importants pour l'entrée en vigueur des simplifications visées.

S'agissant de la simplification des procédures, formulaires ou démarches administratives des entreprises [3°] : une solution envisageable serait, pour chaque projet ou cas d'usage, de prendre une mesure législative spécifique précisant :

i) la simplification de la démarche envisagée (allègement du formulaire),

ii) l'évolution législative de l'obligation (modification des codes concernés),

iii) rappelant que l'administration qui doit recevoir les données est bien habilitée à les recevoir dans le cadre de ses missions.

Concomitamment, chaque mesure devrait être accompagnée de dispositions réglementaires propres à chaque projet ou cas d'usage.

Cette option aurait le risque d'avoir des calendriers de mise en oeuvre très disparates selon chaque projet ou cas d'usage, puisqu'elle impliquerait d'avoir à disposition des vecteurs législatifs réguliers pour intégrer les simplifications, et dont le champ couvrirait l'ensemble des dispositions à modifier (qui peuvent relever de codes distincts). Il en découlerait un manque de lisibilité et de prévisibilité pour les entreprises, et une insécurité juridique forte. Par ailleurs, la multiplication des vecteurs irait à l'encontre de l'objectif de sobriété normative, rappelé notamment par la Délégation aux entreprises du Sénat dans son rapport d'information de la mission de suivi sur la simplification des normes applicables aux entreprises de juin 20234(*), lequel énonce sept recommandations de sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises.

3.2. DISPOSITIF RETENU

La mesure proposée prévoit une habilitation à agir par ordonnances dans un délai de dix-huit mois afin :

- de procéder à la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration applicables aux entreprises d'une part : la mesure prévoit un article d'habilitation précisément parce qu'il n'existe pas d'état des lieux. Une mission inter inspections va être lancée par le Gouvernement pour établir un état des lieux des procédures d'autorisation figurant dans les différents codes, et des déclarations obligatoires de niveau législatif. A partir de cet état des lieux, il sera possible d'examiner les propositions de cette mission en vue : i) de transformer des autorisations en déclarations (éventuellement en déclarations avec droit d'opposition de l'administration dans un délai déterminé) ; ii) de supprimer des déclarations dont l'utilité n'est pas démontrée ;

- simplifier les démarches déclaratives, les formalités obligatoires et les démarches en matière de demandes d'aide ou de subvention à destination des entreprises (personnes physiques ou personnes morales) dès lors que ces démarches peuvent être effectuées à l'aide d'une transmission automatisée de données entre administrations.

S'agissant de la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration [1° et 2°], l'option retenue a été d'envoyer un signal explicite de la volonté de progresser sur cette question par l'inscription dans la loi d'un article d'habilitation. S'agissant de la simplification des procédures, formulaires ou démarches administratives des entreprises [3°], le plein déploiement du principe « Dites-le nous une fois » implique un alignement et une coordination entre :

- Les évolutions de la réglementation en vigueur (qu'elle soit de niveau législatif ou réglementaire), notamment en matière de démarches obligatoires pour les entreprises ;

- Les évolutions en matière d'échanges de données entre administrations, afin de s'assurer que les informations que l'entreprise n'a plus à fournir par elle-même seront bien obtenues par l'administration demanderesse, à partir des données d'une autre administration ;

- Les évolutions techniques en matière de téléservices à destination des entreprises, afin de permettre l'alimentation des téléservices à partir des données déjà disponibles ;

- Les évolutions des formulaires existants que l'entreprise devra compléter permettront d'assurer la transmission automatisée à l'ensemble des administrations, notamment via une interface de programmation (désignée couramment par l'acronyme API - application programming interface).

Ces chantiers doivent donc être menés de concert et impliquent, de la part de chaque administration concernée par la démarche, un travail de recensement de l'ensemble des obligations en vigueur, de l'état de transmission des données entre administrations s'agissant de ces obligations (travail à mener avec la direction interministérielle du numérique -DINUM), et d'adaptation des mesures relatives aux obligations de transmission des formulaires (travail à mener avec la DINUM et la direction interministérielle de la transformation publique - DITP).

Le dispositif retenu consiste à faire évoluer certaines dispositions d'ordre législatif afin d'assurer l'alignement des obligations déclaratives avec les données dont disposent les administrations et de supprimer les obligations devenues inutiles ou de clarifier les dispositions résiduelles qui impliqueraient une obligation de transmission de données de la part des entreprises alors même que l'APIsation permettra de supprimer l'ensemble de la démarche.

A titre d'exemple, l'article L. 310-2 du code de commerce définit les conditions de la vente au déballage en ces termes : « Les ventes au déballage font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune dont dépend le lieu de la vente, dont une copie est adressée concomitamment à l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation dans le département du lieu de vente. » Même en permettant le pré-remplissage de la déclaration préalable grâce à l'échange de données entre la mairie et l'autorité administrative, du fait de la rédaction actuelle du L. 310-2, l'entreprise sera toujours tenue d'effectuer le double envoi de la déclaration 1° au maire et 2° à l'autorité administrative. Pour garantir la suppression complète de la démarche pour l'entreprise, il faudra donc clarifier l'article L. 310-2 pour préciser qu'il n'y a plus d'obligation pour l'entreprise de transmettre deux fois, dès lors que l'autorité administrative peut obtenir la donnée auprès du maire. Le nombre de déclarations préalables au titre des ventes au déballage fait l'objet de plus de 115 000 CERFA par an.

A titre d'exemple également, les articles L. 232-22 et L. 223-31 du code de commerce imposent aux sociétés commerciales, et notamment aux sociétés unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), de déposer leurs comptes annuels sur la plateforme du guichet unique auprès des greffiers des tribunaux de commerce (GTC) dans le mois ou les deux mois suivant l'approbation des comptes annuels par l'assemblée générale ordinaire annuelle, en vue d'une transmission aux greffiers des tribunaux de commerce. Ce dépôt est payant. En parallèle, les entreprises doivent déposer leur liasse fiscale à la direction générale des finances publiques (DGFIP) en mai, à titre gratuit. Ce double dépôt, selon des formats et des calendriers différents, constitue une charge administrative et financière pour les entreprises. Afin de supprimer l'obligation de dépôt des comptes annuels au GTC, il pourrait être envisagé que la DGFIP, à partir du dépôt de la liasse fiscale aux impôts, se charge de transmettre ces informations au GTC. S'agissant des EURL, cela permettrait de supprimer 500 000 dépôts des comptes par an, et les coûts de dépôt afférents. Outre la mise en place de la transmission des données entre la DGFIP et le GTC, une telle mesure impliquerait également la modification des articles L. 232-22 et L. 223-31 du code de commerce, afin de supprimer l'obligation de dépôt par l'entreprise auprès du GTC.

Sur le modèle de ces deux exemples, de nombreuses dispositions de niveau législatif devront être ajustées afin de donner toute leur portée à l'échange de données entre administrations et permettre la suppression effective de la démarche pour les entreprises.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

S'agissant de la simplification des régimes d'autorisation et de déclaration [1° et 2°] :

La simplification dont cet article donne un signal clair constitue une attente profonde de nos concitoyens.

Les services administratifs auront à collaborer activement aux travaux de la mission interministérielle puis, en fonction des arbitrages rendus, à rédiger les ordonnances et les décrets de simplification correspondant aux mesures retenues.

S'agissant de la simplification des procédures, formulaires ou démarches administratives des entreprises [3°] :

L'impact attendu de la clarification des modalités de circulation des données entre administrations et de l'alignement des obligations déclaratives avec la circulation des données entre administrations est le suivant :

- Assurer le pré-remplissage du formulaire ou la suppression des démarches pour l'entreprise ;

- Raccourcir de plusieurs mois le traitement des demandes ;

- Réduire, au sein des entreprises, le travail juridique et administratif dédié au cadrage des échanges de données ;

- Renforcer la sécurité juridique pour les entreprises.

Du point de vue de l'administration, les mesures de simplification permettront de :

- Réduire le temps agent (de l'organisme gestionnaire) dédié à l'instruction des dossiers ;

- Lutter contre les fraudes, puisque l'information sera récupérée directement auprès de l'administration qui en est responsable ;

- Améliorer significativement le service rendu au public ;

- Réduire les recours et les besoins d'accompagnement des publics.

5. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Le travail de recensement, le travail d'expertise des évolutions législatives et réglementaires éventuelles, et le travail d'évolution des outils (notamment systèmes d'information) justifie un délai de dix-huit mois afin de pouvoir aboutir à une simplification coordonnée et sécurisée des démarches, et compte tenu de la technicité des dispositions à prendre et des ajustements en matière de systèmes d'information y afférents.

Un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

A titre de comparaison, dans le cadre de la réforme belge de 2014 fixant le cadre de la collecte unique des données, la loi Only Once du 5 mai 2014 a prévu une phase transitoire allant jusqu'au 1er janvier 2016, soit une durée de montée en charge de vingt mois.

Article 3 - Développer les rescrits sectoriels et la cristallisation des normes applicables aux entreprises

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Dans son étude de novembre 2013 consacrée au rescrit, le Conseil d'Etat le définit comme une « prise de position formelle de l'administration, qui lui est opposable, sur l'application d'une norme à une situation de fait décrite loyalement dans la demande présentée par une personne et qui ne requiert aucune décision administrative ultérieure »5(*).

Selon le Conseil d'Etat, « le propre de la prise de position opposable, par la garantie qu'elle apporte, est d'entraver la capacité d'action future de l'administration »6(*). Néanmoins, « la garantie apportée par le rescrit (...) n'engage l'administration que si elle a été complètement éclairée sur l'ensemble des éléments de fait au vu desquels elle a pris position, ce qui suppose que le demandeur soit de bonne foi »7(*).

Face à l'inflation des normes et à leur instabilité qui pèsent sur la vie des entreprises, le rescrit contribue à renforcer la sécurité juridique et à faciliter leurs relations avec l'administration.

Plusieurs domaines font d'ores et déjà l'objet de rescrits. D'abord institué en matière fiscale8(*), le rescrit a été étendu en 2005 dans le domaine de la sécurité sociale9(*), puis dans le code des douanes10(*). Le Conseil d'État soulignait dans son étude les effets positifs de ce rescrit, qui protège et prémunit contre un changement d'avis de l'administration, et suggérait l'extension de ce dispositif aux autres prélèvements obligatoires, ainsi qu'à d'autres champs de l'activité économique11(*).

Dans le prolongement de cette étude, deux textes sont intervenus ces dernières années pour étendre le rescrit :

- sur le fondement de l' article 9 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises, a été adoptée l' ordonnance n° 2015-1628 du 10 décembre 2015 relative aux garanties consistant en une prise de position formelle, opposable à l'administration, sur l'application d'une norme à la situation de fait ou au projet du demandeur, qui a étendu le rescrit à de nouveaux domaines tels que la consommation.

- l' article 21 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance (ESSOC) a institué des rescrits sectoriels concernant, par exemple, les redevances perçues par les agences de l'eau12(*) et le délai de paiement des entreprises13(*).

Dans la même logique, d'autres instruments participent à l'objectif de sécurisation des entreprises telles que les « pré-décisions », qui s'inscrivent dans une procédure devant aboutir à une décision administrative finale ainsi que la cristallisation des normes applicables aux entreprises, qui leur garantit, pendant une durée déterminée, l'application des normes en vigueur à la date à laquelle elles ont conçu leur projet.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Comme l'a rappelé le Conseil d'Etat dans son étude de novembre 2013, « le législateur méconnaîtrait la séparation des pouvoirs requise dans un État de droit et prescrite par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 16 août 1789 et n'exercerait pas pleinement ses prérogatives s'il autorisait l'administration, sans aucune condition ou sans fixer de limites précises, à déroger par des rescrits à la loi qu'il a adoptée »14(*). Le Conseil d'Etat souligne que : « la garantie d'opposabilité du rescrit ne semble pas en elle-même contraire à la Constitution ». Il précise toutefois que : « l'administration ne peut être affranchie sans réserve du principe de légalité qui lui fait obligation d'appliquer la loi. Une dérogation insuffisamment encadrée à ce principe conduisant en pratique à vider la loi de sa portée par l'octroi de rescrits illégaux serait contraire à ces exigences constitutionnelles. »

Le Conseil d'Etat estime ainsi que : « la constitutionnalité des rescrits repose ainsi sur une conciliation entre le principe de légalité et l'objectif d'assurer aux usagers de l'administration davantage de sécurité juridique. Apprécier cette conciliation nécessite de préciser la portée réelle du mécanisme du rescrit et ses limites. »15(*)

Le respect du principe de légalité implique que le rescrit ait un effet relatif (par rapport à la situation de la demande et la législation applicable) et que sa garantie puisse « être remise en cause pour l'avenir »16(*).

Le Conseil constitutionnel a également reconnu la conformité à la Constitution d'un mécanisme de rescrit juridictionnel, instauré par l' article 54 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (ESSOC).

Cette procédure permettait, à titre expérimental, au bénéficiaire ou à l'auteur d'une décision administrative non réglementaire s'insérant dans une opération complexe, de saisir le tribunal administratif afin de lui demander d'apprécier la légalité externe de cette décision. La constatation de la régularité de la décision par la juridiction faisait alors obstacle à l'invocation de tout moyen de légalité externe à l'encontre de cet acte, par voie d'action ou d'exception.

Dans sa décision n° 2019-794 QPC du 28 juin 2019, le Conseil constitutionnel a validé ce mécanisme en jugeant qu'« en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu limiter l'incertitude juridique pesant sur certains projets de grande ampleur qui nécessitent l'intervention de plusieurs décisions administratives successives constituant une opération complexe et dont les éventuelles illégalités peuvent être, de ce fait, invoquées jusqu'à la contestation de la décision finale. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général ».

Dans la mesure où cette procédure concernait uniquement certaines décisions non réglementaires dans des champs prédéfinis, se limitait aux motifs de légalité externe de l'acte, et où la demande en appréciation de légalité externe était « rendue publique dans des conditions permettant à toute personne ayant un intérêt à agir d'être informée des conséquences éventuelles de cette demande sur les recours ultérieurs et d'intervenir à la procédure », le Conseil constitutionnel a conclu à sa conformité avec le droit à un recours juridictionnel effectif.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Néant. Des éléments très spécifiques aux rescrits fiscaux ont été interprété par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), notamment au regard des règles relatives à l'avantage sélectif qu'ils peuvent procurer à leur destinataire (voir notamment CJUE, affaires jointes C-885/19 P, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission et C-898/19 P, Irlande/Commission, 8 novembre 2022). L'objet ne semble pas tout à fait comparable avec celui du présent article.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La création de nouveaux rescrits sectoriels impose de recourir à la loi. En effet, dans son avis du 23 novembre 2017 sur le projet de loi ESSOC, le Conseil d'Etat a estimé que l'institution de rescrits et la détermination de leurs régimes relèvent, sous peine d'incompétence négative du législateur, de la loi qui doit définir de manière suffisamment précise les cas et les conditions dans lesquelles les rescrits peuvent intervenir.

De même, dans la mesure où la cristallisation des normes applicables permettrait de déroger à des règles ultérieures, y compris de nature législative, l'intervention du législateur est nécessaire.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

En cohérence avec l'objet du présent projet de loi qui vise à simplifier la vie des administrés, cette disposition permet au Gouvernement d'instituer par ordonnances de nouveaux rescrits sectoriels et de nouvelles procédures visant à cristalliser l'application des normes en vigueur pour des projets des entreprises, dans la continuité de la démarche suivie en 2014 et en 2018, afin d'améliorer la confiance réciproque entre les administrations et les entreprises.

Le principe cardinal de ces instruments repose en effet sur une relation de confiance et de loyauté entre un demandeur de bonne foi et une administration à l'écoute des besoins ressentis par les administrés, confrontés à la complexité et l'évolution permanente des normes. En témoigne le rescrit fiscal, qui connait un succès certain grâce à une délivrance rapide et aux garanties octroyées, avec 20 000 rescrits délivrés par les services des finances publiques en 2022.

L'institution de nouveaux rescrits répond à des demandes exprimées récemment. Dans un rapport du 15 février dernier intitulé « Rendre des heures aux Français - 14 mesures pour simplifier la vie de nos entreprises » remis aux ministres Bruno Le Maire et Olivia Grégoire, des parlementaires proposent ainsi de développer le rescrit en faisant valoir notamment que « L'utilisation du rescrit, pour l'instant essentiellement cantonné au domaine fiscal, permettrait (...) de rassurer les chefs d'entreprises. L'ouverture d'une base publique de rescrits permettrait en outre de sécuriser les décisions des TPE et PME »17(*).

Les nouveaux rescrits appelés de leurs voeux par les parlementaires, qui ne font que relayer une demande des entreprises et des citoyens, permettront ainsi de renforcer la sécurité juridique des porteurs de projet et contribueront à leur faciliter la vie administrative.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La première option envisageable est de prévoir directement dans la loi les nouveaux rescrits sectoriels et les nouvelles procédures de cristallisation des normes, ce qui implique que le législateur précise, dans chaque domaine, la norme concernée par ces instruments, de fixer ses conditions et ses limites et de renvoyer au pouvoir réglementaire la détermination de ses modalités d'application.

La seconde option envisageable est, en application de l'article 38 de la Constitution, une habilitation donnée par le législateur au Gouvernement de créer par ordonnances des rescrits sectoriels et procédures de cristallisation des normes applicables aux entreprises.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue est la seconde, à savoir un article d'habilitation, en application de l'article 38 de la Constitution, qui permettra au Gouvernement, après identification de l'ensemble des législations concernées, de prendre par voie d'ordonnances toute mesure relevant de la loi afin d'étendre les rescrits sectoriels et la cristallisation des normes applicables aux projets des entreprises.

Dans les matières qui seront déterminées par les ordonnances, le projet d'habilitation renvoie aux ordonnances le soin de fixer :

- Les conditions de publication et d'opposabilité à l'administration de sa prise de position formelle, délivrée à la suite d'une demande écrite d'une entreprise, sur l'application d'une règle de droit à une situation de fait ou sur la cristallisation des normes applicables à son projet ;

- Les conditions dans lesquelles le juge administratif peut être saisi d'un recours contre ces actes ;

- Pour les demandes de rescrit, les conditions dans lesquelles le demandeur peut solliciter de l'administration un second examen de sa demande.

Le projet de loi circonscrit également les conditions dans lesquelles le rescrit ou la cristallisation des normes applicables seront accordées ou remises en cause :

- Elles sont accordées sur la base d'un dossier préalable ;

- Elles peuvent s'accompagner d'un engagement de l'administration sur le délai d'intervention des décisions administratives nécessaires à la réalisation d'un projet ou d'informations sur les procédures d'instruction de ce projet ;

- Elles peuvent être remises en cause pour l'avenir, dans des conditions fixées par les ordonnances ;

- Elles ne peuvent faire obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires visant à préserver la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement.

L'habilitation retient une acception large de l'administration. En effet, alors que l'article 10 du projet de loi ESSOC mentionnait uniquement l'Etat et ses établissements publics administratifs, le renvoi à l'article L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration a pour effet d'inclure dans le champ des nouvelles garanties, non seulement l'Etat et ses établissements publics administratifs, mais également les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d'un service public administratif, telles que les organismes de sécurité sociale.

Le choix de passer par une habilitation s'explique par le souhait d'identifier de la manière la plus pertinente, avec l'ensemble des administrations concernées, les dispositions sectorielles sur lesquelles porteront les nouveaux rescrits et les nouvelles procédures de cristallisation, sur le modèle de la démarche suivie par le législateur en 201418(*).

L'avantage de cette option est d'inscrire dans la loi les principes fondamentaux applicables à ces nouvelles garanties ainsi que leur régime, tout en permettant au Gouvernement de les instituer dans les domaines concernés.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS SUR LE PUBLIC

Les nouvelles garanties qui seront instituées par ordonnances en application du présent article renforceront les garanties applicables aux porteurs de projet en leur assurant un environnement plus sécurisé au regard des normes applicables.

Répondant à la demande des entreprises, un tel dispositif constitue l'un des axes de la démarche de simplification poursuivie par le Gouvernement dans le cadre de ce projet de loi.

L'analyse précise des conséquences attendues sur le public sera effectuée dans la fiche d'impact des ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

4.2. IMPACTS SUR LES ADMINISTRATIONS

La mesure prévue par la disposition envisagée concerne aussi bien l'Etat et ses établissements publics que le secteur public local et les organismes de sécurité sociale.

Pour les nouveaux domaines dans lesquels les dispositifs de demande de prise de position formelle ou de cristallisation des normes applicables seront mis en oeuvre, une charge de travail supplémentaire pèsera sur les services concernés notamment par l'instruction de demandes, la notification des prises de position formelle ou des décisions de l'administration et la vérification que les conditions des rescrits sont remplies et maintenues.

A titre d'illustration, le rapport d'activité de la DGFIP concernant l'année 2022 indique : « En 2022, 20 000 rescrits ont été délivrés par les services des finances publiques et 82% des demandes ont été traitées en moins de trois mois ».

Le nombre de demandes relatives aux nouveaux rescrits sera évidemment inférieur à celui du rescrit fiscal qui demeure l'un des plus utilisé à l'heure actuelle, mais la charge de travail induite par les nouveaux rescrits ainsi que par les nouvelles procédures de cristallisation augmentera nécessairement même si elle est, à ce stade, difficile à évaluer.

L'analyse précise des conséquences attendues sur les administrations sera effectuée dans la fiche d'impact des ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

4.3. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Le délai laissé au Gouvernement pour prendre par ordonnance les mesures prévues au présent article est fixé à dix-huit mois. Il est en effet nécessaire de prévoir un délai suffisamment long pour mener, comme en 2015, « un important travail de coordination interministérielle »19(*).

Un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

TITRE III - FACILITER L'ACCÈS DE TOUTES LES ENTREPRISES À LA COMMANDE PUBLIQUE

Article 4 - Faciliter l'accès à la commande publique en ligne

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Par son poids dans l'activité économique, la commande publique constitue un soutien important pour les entreprises et notamment les PME et TPE20(*). Selon l'Observatoire économique de la commande publique, celles-ci ont bénéficié de 61% des 235 600 contrats publics d'un montant supérieur à 90 000 euros hors taxes attribués en 2022, pour un montant global estimatif de marchés de 44 milliards d'euros21(*).

Depuis le 1er octobre 2018, la dématérialisation des procédures de passation des contrats de la commande publique est en principe obligatoire, quoique dans des degrés divers selon la nature du contrat. Ainsi, l'article L. 2132-2 du code de la commande publique prévoit que « les communications et les échanges d'informations effectuées dans le cadre de la procédure de passation d'un marché sont réalisés par voie électronique, selon des modalités et sous réserve des exceptions prévues par voie réglementaire », tandis que l'article L. 3122-5 prévoit que ceux-ci sont facultatifs s'agissant des contrats de concession. En revanche, l'autorité concédante est bien tenue d'offrir, par voie électronique, un accès gratuit, libre, direct et complet aux documents de la consultation, dans les conditions et sous réserve des exceptions prévues par voie réglementaire (article L. 3122-4 du code de la commande publique).

La dématérialisation des procédures de passation des marchés de défense et de sécurité est, quant à elle, entièrement facultative (article L. 2332-2 du code de la commande publique).

Le profil d'acheteur est l'outil central de dématérialisation des procédures de passation des marchés. Il s'agit d'un ensemble de moyens informatiques permettant aux acheteurs et aux autorités concédantes de déposer des avis de publicité, de mettre en ligne les documents de la consultation, de réceptionner les candidatures et les offres, d'échanger des documents et des informations avec les opérateurs économiques.

Les articles R. 2132-3 (auquel renvoie l'article R. 2332-5 s'agissant des marchés de défense et de sécurité) et R. 3122-10 du code de la commande publique disposent, à cet égard, que « le profil d'acheteur est la plateforme de dématérialisation permettant notamment aux acheteurs [et aux autorités concédantes] de mettre les documents de la consultation à disposition des opérateurs économiques par voie électronique et de réceptionner par voie électronique les documents transmis par les candidats et les soumissionnaires ».

Tous les acheteurs doivent en principe publier sur cette plateforme les documents de la consultation pour les marchés publics (hors défense ou sécurité) dont la valeur du besoin estimé est égale ou supérieure à 40 000 € HT (article R. 2123-2 du code de la commande publique). Aucun seuil n'est prévu s'agissant des contrats de concession. Il peut être dérogé à cette obligation dans certains cas prévus aux articles R. 2132-12 et R. 3122-11, par exemple pour certains contrats portant sur des services sociaux, lorsque les documents impliquent la présentation de maquettes ou de prototypes ne pouvant être transmis par voie électronique, ou à raison du caractère particulièrement sensible des informations devant être transmises.

L'accès à la commande publique est très éclaté. Chaque donneur d'ordre public est libre de définir le profil d'acheteur qu'il retient pour mettre à disposition des entreprises les documents complets des consultations de marché dématérialisées répondant à ses besoins et où les soumissionnaires intéressés devront déposer leur offre, elles aussi dématérialisées.

Pour certains donneurs d'ordre public, le profil d'acheteur peut être leur site internet institutionnel. Beaucoup s'appuient cependant sur des opérateurs privés offrant les fonctionnalités requises d'une plateforme de dématérialisation, qui recourent eux-mêmes à des éditeurs de logiciels. Les données publiées sur data.gouv.fr recensent à ce jour plus de 700 profils acheteurs hors sites internet institutionnels, les dix principaux regroupant 50% des donneurs d'ordre public.

Seul l'État a adopté une approche plus centralisée : toutes les administrations au niveau central et déconcentré doivent obligatoirement utiliser le profil d'acheteur dénommé « Plateforme des achats de l'État » (PLACE), créé par l' arrêté du 11 octobre 2012, auquel a succédé un arrêté du 20 mai 2020, et qui a remplacé la place des marchés interministérielle (PMI) ouverte en novembre 2008. Ce profil est mis à disposition par le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Le morcellement des profils d'acheteur, hors État, constitue un obstacle à l'accès à la commande publique pour les opérateurs économiques. Ceux-ci sont obligés de recourir à autant de profils acheteurs que nécessaire pour connaître et répondre aux consultations de marchés publiées par la cible de clients publics qu'ils visent. Ils doivent dès lors faire face à de multiples modalités de recours à ces profils d'acheteur, aux règles de gestion et d'authentification, à des ergonomies, ou des prérequis de signature électronique différents, engendrant pour elles un coût de gestion22(*).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Premièrement, le Conseil constitutionnel reconnaît expressément, depuis sa décision du 30 novembre 2006, la valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle des personnes publiques, comme découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 178923(*). Les personnes morales de droit public se voient ainsi reconnaître la « liberté de contracter ou de ne pas contracter »24(*), au même titre que les personnes privées.

Le législateur peut toutefois apporter au principe de la liberté contractuelle des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi25(*). Il a pu, à cet égard, être considéré que les principes fondamentaux de la commande publique - liberté d'accès, égalité de traitement et transparence - étaient « au moins aussi importants pour les contrats publics que la liberté contractuelle »26(*).

Par ailleurs, et de manière générale, la simplification du droit, comme la codification, répond à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi27(*).

Or, le présent projet de loi s'inscrit parfaitement dans ce cadre constitutionnel car, même si l'on devait considérer qu'il met fin à la liberté de certains acheteurs et autorités concédantes de s'appuyer sur des opérateurs privés pour acquérir ou avoir à disposition un profil d'acheteur, il permet d'assurer la cohérence de la dématérialisation de la commande publique et une mise en oeuvre uniforme et harmonisée, tout en facilitant l'accès des opérateurs économique à la commande publique en réduisant significativement le nombre de profils d'acheteur que ceux-ci seraient amenés à consulter.

Deuxièmement, le législateur ne peut porter à l'économie des conventions et contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant28(*), ce qui, en pratique, impose au législateur de justifier d'un tel motif s'il entend apporter des modifications à des contrats en cours d'exécution29(*).

Au cas présent, et comme mentionné, certains acheteurs ou autorités concédantes ont conclu des marchés publics, et notamment des accords-cadres, afin de concevoir, développer ou encore maintenir leurs propres profils d'acheteur pour la passation de leurs marchés. Ces contrats, qui les lient avec leurs prestataires, sont pour la plupart d'entre eux en cours d'exécution ou de renouvellement et beaucoup n'arriveront pas à leur terme avant 2028, voire au-delà.

Au regard du poids économique que peuvent représenter ces contrats, le présent article prévoit, d'une part que le dispositif entre en vigueur à une date fixée par décret en fonction de la catégorie d'acheteurs et d'autorités concédantes, et au plus tard le 31 décembre 2028 et, d'autre part, qu'il s'applique sans préjudice des contrats en cours à la date de publication de la loi, ou de ceux pour lesquels une consultation ou un avis de publicité est en cours à cette même date.

Aucune atteinte aux contrats en cours ne peut ainsi être caractérisée.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

L'article 53 de la directive 2014/24/UE s'agissant des pouvoirs adjudicateurs, 73 de la directive 2014/25/UE s'agissant des entités adjudicatrices, 34 de la directive 2014/23/UE s'agissant des autorités concédantes, et 36 de la directive 2009/81/CE s'agissant des marchés publics dans le domaine de la défense et de la sécurité, prévoient la mise à disposition des documents de marché par voie électronique, cette dernière n'étant facultative que pour les marchés publics de défense et de sécurité.

Des dérogations sont toutefois possibles, comme transposées en droit national, lorsqu'une transmission électronique n'est pas adaptée ou lorsque des exigences de confidentialité s'y opposent.

Le recours obligatoire au profil d'acheteur n'est prévu que pour la publication des avis de préinformation s'agissant des marchés des pouvoirs adjudicateurs (article 49 de la directive 2014/24/UE), ou des avis périodiques indicatifs s'agissant des marchés des entités adjudicatrices (article 67 de la directive 2014/25/UE). Dans les autres hypothèses, qu'il s'agisse des documents d'une autre nature, ou des contrats de concession et des marchés de défense et de sécurité, le recours au profil d'acheteur est facultatif.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

La Belgique dispose d'une plateforme nationale gratuite pour la soumission et la publication de contrats de la commande publique : https://www.publicprocurement.be/.

Cette plateforme a été développée sur les fonds de l'état Belge et est mise à disposition gratuitement de tous les utilisateurs (acheteurs et opérateurs économiques). Seuls les régions fédérales Belges ont pour obligation de financer cette plateforme par le biais d'un impôt, tous les autres utilisateurs y accèdent gratuitement. Cette plateforme permet d'avoir accès à un module de publication similaire au BOAMP (= Bulletin des adjudications) sur lequel la publication des contrats de la commande publique est obligatoire au-delà d'un certain seuil. La plateforme donne aussi accès à un volet comprenant des modules de soumission des offres, de discussions entre parties, d'eCatalogue, etc. Ce volet n'est pas obligatoire, mais disponible gratuitement si souhaité par les parties. Il ne comprend pas en revanche un module contrat (contract management, clausier, partage de contrats, etc) qui est actuellement prévu dans une future roadmap. La Belgique indique que cela n'empêche pas des solutions privées d'exister et de fonctionner en parallèle. Le fait est que les solutions privées fournissent des fonctionnalités supplémentaires (volet contrat, analyse par IA, etc.) ce qui permet visiblement à la plateforme publicprocurement.be d'exister sans porter atteinte au droit de la concurrence.

L'Irlande fonctionne de la même manière avec un profil d'acheteur (tendering platform - module soumission) national : https://www.etenders.gov.ie/epps/home.do lié à un eSender national (module publication). Tous deux développés par la même société (European Dynamics).

En revanche, a contrario de la Belgique, la plateforme Irlandaise est développée et maintenue par une société privée qui détient les droits sur le code. L'Irlande envisage donc de développer une solution nationale propriétaire qui lui permettrait de confier les développements futurs et la maintenance à quiconque.

Aux Pays-Bas, le profil d'acheteur qui domine le marché néerlandais est TenderNed qui est une solution de publication de consultations européens c'est-à-dire ceux dépassant les seuils prévus par la Commission (avis de marché, réponses, mais aussi outils pour le rapportage). Cette plateforme peut être utilisée par les collectivités pour les autres marchés publics, sans obligation. Elle comprend un observatoire avec des chiffres sur la commande publique, toutefois incomplet du fait de l'absence d'obligation pour les marchés publics non européens. Il existe principalement un opérateur privé concurrent qui est Mercell.

De ce que nous a dit notre interlocuteur à la commission, il n'y a pas vraiment d'autre solution centralisée. Effectivement, dans les autres pays approchés les solutions sont plus ou moins diversifiées. Par exemple :

Il existe, en Allemagne, un site pour les appels d'offres au niveau national (die Vergabeplattform des Bundes - evergabe-online.de), ainsi que des sites au niveau des Länder.

Le Portugal dispose seulement de cinq plateformes électroniques certifiées pour les marchés publics (certification obligatoire par l'Institut des marchés publics, de l'immobilier et de la construction - IMPIC), et d'un portail des marchés publics, dénommé "portail de base", aux termes et aux fins de l'article 472 du code des contrats publics.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

En vertu de l'article 34 de la constitution, seul le législateur est compétent pour étendre le champ d'application d'une mesure, dont le caractère obligatoire et la finalité pourraient être de nature à déroger, notamment, au principe de la liberté contractuelle.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Il s'agit de mettre à disposition des opérateurs économiques intéressés, sur un profil d'acheteur unifié, l'ensemble des consultations de marchés publics conduites par les organismes de sécurité sociale et les personnes morales de droit public autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements. Ce profil d'acheteur commun centraliserait de l'ordre de 4300 services acheteurs pour 100 000 consultations de marchés d'un montant supérieur à 40 000 euros hors taxes annuelles.

Actuellement, PLACE, obligatoire pour les services de l'État et au-delà, accessible sur la base d'une adhésion libre pour le périmètre sus visé, est utilisé par 2400 services acheteurs publics, dont 650 d'établissements publics de l'État, 415 d'établissements publics de santé et 130 des organismes de sécurité sociale, auxquels s'additionnent 240 services acheteurs des organismes consulaires, de groupements d'intérêt public (GIP), d'autorités constitutionnelles, des autorités administratives indépendantes (AAI) et autorités publiques indépendantes (API), ainsi que d'associations déclarées soumises à la commande publique, pour 39 400 consultations de marchés d'un montant supérieur à 40 000 euros hors taxes annuelles. Le regroupement sur PLACE de la publication dématérialisée des consultations de marchés publics pour le périmètre visé est donc d'ores et déjà engagé, sans être obligatoire.

A ce jour, les services acheteurs non utilisateurs de PLACE s'appuient sur les profils d'acheteurs mis à disposition par des opérateurs privés, qui eux-mêmes s'appuient sur des éditeurs de logiciels de profil d'acheteur.

Le présent article poursuit ainsi un objectif de simplification et d'harmonisation en prévoyant que l'État met gratuitement un profil d'acheteur à disposition des acheteurs et des autorités concédantes, tout en imposant aux personnes publiques autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements et aux organismes de sécurité sociale d'y avoir recours. Il est toutefois laissé le soin au pouvoir réglementaire de déterminer les conditions de cette mise à disposition et, surtout, de prévoir des exceptions au sein du périmètre des acheteurs et des autorités concédantes concernés. Il est également permis aux autres acheteurs et autorités concédantes d'utiliser le profil d'acheteur mis gratuitement à disposition par l'État.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Option 1 : Incitation à une adhésion libre au profil d'acheteur PLACE (écartée)

La place de marché interministérielle PLACE a été ouverte dès novembre 2008 pour les services de l'État. Son accès en adhésion libre a été étendu dès janvier 2010 aux chambres de commerce et d'industrie, dès janvier 2012 aux établissements publics de l'État, puis aux établissements publics hospitaliers en septembre 2016.

Cette possibilité d'adhésion libre à PLACE visait déjà l'objectif de simplification de l'accès des opérateurs économiques à la commande publique de la sphère État. Le constat est que seulement la moitié des services acheteurs des établissements publics de l'État, 30% pour les établissements publics de santé et 30% pour les organismes de sécurité sociale, recourent à ce profil d'acheteur en 2024.

Le statut quo est donc écarté en ce qu'il ne permet pas d'aboutir en lui-même à la simplification visée.

Option 2 : Étendre le recours obligatoire à un profil d'acheteur unique à l'ensemble des pouvoirs adjudicateurs et des autorités concédantes (écartée)

Il a été envisagé d'inscrire dans la loi que « l'acheteur [ou l'autorité concédante] utilise le profil d'acheteur qui est mis gratuitement à sa disposition par l'État dans les conditions définies par voie réglementaire ». Cette formulation englobante aurait eu pour effet d'étendre le recours obligatoire au profil d'acheteur mis à disposition par l'État à l'ensemble des pouvoirs adjudicateurs et des autorités concédantes, y compris les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, ainsi qu'aux personnes privées.

Cependant, afin de préserver la libre administration des collectivités territoriales et leurs structures de mutualisation, et en dépit des objectifs de simplification et d'accès à la commande publique poursuivis par le projet de loi, cette option a été écartée au profit d'un périmètre plus restreint.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé d'étendre l'obligation d'utiliser la plateforme d'achats de l'État aux personnes morales de droit public autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, ainsi qu'aux organismes de sécurité sociale. Le projet de loi prévoit, en pratique, que l'État met gratuitement à disposition de ces acheteurs et autorités concédantes un profil d'acheteur.

Cette formulation large permet d'inclure, notamment, les établissements publics de santé, ainsi que, lorsqu'ils sont constitués sous forme de personnes morales de droit public, les groupements de coopération sanitaire et les groupements de coopération sociale ou médico-sociale, ou encore des groupements d'intérêt public, et des personnes publiques sui generis.

Le renvoi au pouvoir règlementaire permettra à celui-ci d'affiner les catégories d'acheteurs ou d'autorités concédantes concernées ce qui, sans préjuger du contenu d'un futur décret, pourrait par exemple permettre d'exclure les établissements publics à caractère industriel et commercial non soumis aux règles de la comptabilité publique, et, en tout état de cause, de tenir compte de certaines spécificités.

Il est également renvoyé au pouvoir règlementaire le soin de préciser la date d'entrée en vigueur des présentes dispositions.

Il est par ailleurs prévu que l'ensemble des acheteurs et des autorités concédantes puissent avoir recours gratuitement au profil d'acheteur mis à disposition par l'État.

Est visé en complément une harmonisation des normes techniques afin d'assurer l'interopérabilité entre les différents profils d'acheteurs (PLACE et autres auxquels a recours notamment le secteur local). Cette interopérabilité entre profils d'acheteurs est un des objectifs du plan de transformation numérique de la commande publique conduit par le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Via celle-ci, une entreprise utilisant un quelconque des profils d'acheteur pourra accéder aux consultations de marchés publiées sur celui-ci mais aussi publiées sur l'ensemble des profils d'acheteur concurrents. Symétriquement, l'entreprise pourrait répondre aux consultations de marchés de n'importe quel profil d'acheteur interconnecté, depuis celui dont il est adhérent et dont il a l'habitude.

Cette approche technique, plus complexe que la rationalisation proposée du nombre de profils d'acheteur pour la sphère État, peut être satisfaite par voie réglementaire.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure envisagée, portant extension du recours à la plateforme d'achats (PLACE), crée dans le code de la commande publique :

- deux nouveaux alinéas à l'article L. 2132-2 à l'usage des acheteurs ;

- deux nouveaux alinéas à l'article L. 3122-4, à l'usage des autorités concédantes.

Par ailleurs, les articles suivants du code de la commande publique sont modifiés : L. 2651-1, L. 2661-1, L. 2671-1, L. 2681-1, L. 2651-2, L. 2661-2, L. 2671-2, L. 2681-2, L. 3351-1, L. 3361-1, L. 3371-1, L. 3381-1, L. 3351-2, L. 3381-2, L. 3361-2, L. 3371-2.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Si les textes européens prévoient le principe d'un recours obligatoire au profil d'acheteur dans des cas précis, tels qu'exposés au point 1.3, ils n'imposent nullement à chaque acheteur ou à chaque autorité concédante d'utiliser son propre profil d'acheteur. Les Etats membres restent donc libres de définir les modalités d'usage de la plateforme numérique. Par conséquent, la mesure envisagée ne méconnaît d'aucune manière le cadre européen.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Impact sur les opérateurs économiques, candidats à l'attribution d'un contrat de la commande publique :

Les opérateurs économiques ont d'ores et déjà la nécessité de recourir à un profil d'acheteur pour répondre aux consultations de marchés publics de la sphère État. Il n'y a donc pas introduction pour celles-ci d'une obligation nouvelle. Le principe pour l'accès à la commande publique étant la gratuité, l'effet de la mesure est aussi neutre sur ce plan. Les opérateurs économiques devraient cependant voir leurs coûts de gestion internes réduits, de par l'harmonisation des pratiques qu'apportera un profil d'acheteur unifié sur le périmètre visé. Aucune donnée statistique ne permet d'estimer cet impact financier favorable.

Impact sur les opérateurs économiques privés proposant des plateformes de dématérialisation et éditeurs de logiciels de profil d'acheteur :

L'activité des opérateurs privés de plateforme de dématérialisation et des éditeurs de logiciels de profil d'acheteur sera faiblement impactée. Le profil acheteur PLACE ainsi étendu couvrirait 17% estimé du volume de dématérialisation de consultations de marché d'un montant supérieur à 40 000 euros hors taxes annuelles, pour 7,5 % à ce jour. 83% de l'activité du secteur restera donc dans le champ concurrentiel comme actuellement.

4.2.3. Impacts budgétaires

Les coûts induits par l'extension de PLACE sur le périmètre visé sont estimés, sous réserve d'une étude approfondie, à deux millions d'euros en investissement pour le développement de interfaces nécessaires entre PLACE et les systèmes d'information amont et aval tiers des entités publiques concernées par l'extension, et pour la conduite du changement.

Ils sont estimés à trois millions d'euros en fonctionnement courant, pour le redimensionnement applicatif du profil d'acheteur, sa maintenance et son exploitation, ainsi que pour l'assistance aux utilisateurs. Ce coût additionnel représente 81% du coût actuel de fonctionnement de PLACE. L'éventuel coût de redimensionnement de l'infrastructure technique, qui dépendra des solutions d'hébergement qui seront retenues, ne peut être estimé à date.

L'extension supposera un ajustement limité des ressources en emplois pour l'agence pour l'informatique financière de l'État et pour la direction des achats de l'État, pour assurer la mise en oeuvre et le fonctionnement pérenne de cette extension auprès des 1900 services acheteurs qui seraient nouveaux bénéficiaires de PLACE.

En regard, les services achat des établissements visés bénéficieront de la gratuité de l'accès à PLACE, là où le recours actuel de ceux-ci aux opérateurs privés opérants sur cette activité est payant, pouvant aller jusqu'à quelques milliers d'euros annuels.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'obligation prévue au nouvel article L. 2132-2 ne s'appliquera pas aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics et à leurs groupements.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Comme indiqué, l'impact porte sur la Direction des Achats de l'Etat et sur l'Agence pour l'Informatique Financière de l'Etat avec un besoin de ressources ETP estimé à cinq ETP au total.

Pour les acheteurs concernés par l'extension proposée de PLACE utilisant actuellement des profils d'acheteur autres, il y aura probablement un besoin de formation ponctuel, mais limité puisque les fonctionnalités d'un profil d'acheteur sont normées. Les principaux de ces acheteurs sont l`Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), l'Agence du numérique en santé (ANS), l'Agence française de développement (AFD), l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), le Centre national d'études spatiales (CNES), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), l'Etablissement public du château, du musée, du domaine national de Versailles (EPV), l'Etablissement public du palais de la Découverte et de la Cité des sciences et de l'industrie (Universcience), l'Etablissement public foncier de Normandie (EPF Normandie), l'Etablissements publics d'aménagement de Marne-la-Vallée (EPAMARNE) et du secteur IV de Marne-la-Vallée, France compétences, Le Grand port maritime de Marseille (Port de Marseille Fos), l'Institut national de l'audiovisuel (INA), l'Institution de gestion sociale des armées (IGESA), la Monnaie de Paris, l'Opéra national de Paris, la Société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO), les Universités Côte d'Azur, de Montpellier (UM) et de Toulouse-III (Paul Sabatier).

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Néant.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Des consultations sont engagées avec la direction générale de l'offre de soins (DGOS) du ministère du travail, de la santé et des solidarités et de la direction de la sécurité sociale (DSS), pour l'extension de PLACE à l'ensemble respectivement des établissements publics de santé et des organismes de sécurité sociale. La perspective de cette extension ne rencontre pas d'obstacle à ce stade.

La consultation des principaux établissements publics de l'État non encore utilisateurs de PLACE est par ailleurs engagée.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

S'agissant de l'obligation pour les acheteurs et les autorités concédantes relevant de la sphère étatique d'utiliser la Plateforme de l'État pour recevoir tous les marchés, cette disposition entrera en vigueur au plus tard le 31 décembre 2028.

L'État pourra toutefois autoriser les acheteurs qui en feront la demande à utiliser gratuitement son profil d'acheteur dès la date de publication de la présente loi. Ce mécanisme d'autorisation permettra à l'État d'apprécier préalablement dans quelle mesure son profil d'acheteur est, à un moment donné, en capacité d'accueillir un afflux plus ou moins importants de nouveaux contrats et, si nécessaire, de refuser temporairement l'accès à un acheteur ou à une autorité concédante.

Enfin, ces dispositions ne s'appliquent pas aux contrats en cours à la date de publication de la loi, ou de ceux pour lesquels une consultation ou un avis de publicité est en cours à cette même date.

5.2.2. Application dans l'espace

La présente mesure s'appliquera à l'ensemble du territoire métropolitain, et de plein droit aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution. L'application en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises est prévue, avec des adaptations, au II du présent article.

5.2.3. Textes d'application

Les présentes dispositions appellent des mesures d'application par décret en Conseil d'Etat permettant d'harmoniser les dispositions réglementaires existantes dans le code de la commande publique, ainsi que d'affiner le périmètre des acheteurs et des autorités concédantes concernées. Le pouvoir réglementaire pourra prévoir une entrée en vigueur anticipée, en fonction, si besoin, des catégories d'acheteurs et d'autorités concédantes.

Article 5 - Unifier le contentieux des marchés publics entre le juge administratif et le juge judiciaire

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La qualification de la nature administrative ou privée d'un contrat est décisive car elle permet de déterminer le régime applicable et la compétence juridictionnelle en vertu du principe selon lequel « la compétence suit le fond ». Cette qualification juridique peut être textuelle ou résulter, dans le silence des textes, de l'application d'un double critère jurisprudentiel désormais bien établi, à la fois organique (présence directe ou indirecte d'une personne publique) et matériel (exécution d'un service public30(*) ou clause exorbitante du droit commun31(*)).

Quel que soit le procédé de qualification, il découle du caractère administratif ou privé d'un contrat un dualisme juridictionnel : les contrats administratifs relèvent de la compétence du juge administratif tandis que les contrats de droit privé sont soumis à la compétence du juge judiciaire.

Les principaux contrats administratifs par détermination de la loi32(*), qualifiés comme tels par le législateur dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, sont les contrats de la commande publique33(*) conclus par des personnes morales de droit public34(*), conformément à l'article L. 6 du CCP. Une telle qualification parachève une évolution amorcée par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF).

En effet, historiquement, la qualification des marchés publics fut longtemps déterminée à partir de l'application des critères jurisprudentiels précités et, ceci, y compris dans l'hypothèse où les contrats étaient par ailleurs soumis à l'ancien code des marchés publics. Cette circonstance ne suffisait pas à elle seule à conférer par exemple une nature administrative à des contrats de fourniture d'équipements conclus par une collectivité publique, en l'absence de participation de la personne privée cocontractante à l'exécution du service public et de clause exorbitante du droit commun, comme l'avait jugé le Tribunal des conflits dans sa décision Commune de Sauve du 5 juillet 1999 (n° 03142, au recueil).

Revenant sur cette jurisprudence, l'article 2 de la loi MURCEF avait clarifié l'état du droit en prévoyant expressément que « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs ». Était ainsi créé pour l'avenir35(*) un bloc de compétence administrative pour les contrats obligatoirement soumis au code des marchés publics, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice afin d'éviter que le contentieux des marchés publics puisse être porté, selon le cas, devant l'un ou l'autre ordre de juridiction, comme l'avait rappelé le Conseil d'État dans son avis Société maj blanchisseries de Pantin du 29 juillet 2002 (n° 246921, au recueil) 36(*).

Toutefois, cette qualification ne concernait pas tous les marchés publics conclus par des personnes publiques dès lors que certaines d'entre elles n'étaient pas soumises au code des marchés publics, telles que les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) nationaux et les groupements d'intérêts public (GIP). En vertu de l' ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, la détermination de la nature des marchés conclus par les personnes publiques en application de cette ordonnance dépendait de la réunion des critères jurisprudentiels classiques précités du contrat administratif.

Les ordonnances relatives aux marchés publics et aux contrats de concession des 23 juillet 2015 et 29 janvier 201637(*) portant transposition des directives européennes du 26 février 201438(*) et désormais codifiées dans le CCP ont clarifié et simplifié les règles de répartition des compétences juridictionnelles.

Désormais, en vertu de l'article L. 6 précité, les contrats de la commande publique sont des contrats administratifs dès lors qu'ils sont conclus par des personnes morales de droit public39(*). Une telle qualification législative fondée sur le critère organique emporte, outre la compétence du juge administratif, l'application du régime général inhérent à ces contrats, rappelé par l'article L. 6 (pouvoir de contrôle, continuité du service public, modification et résiliation unilatérales, théorie de l'imprévision).

Seuls les « autres marchés publics et contrats de concession »40(*), exclus du champ d'application des directives européennes précitées, eu égard à leurs spécificités, ne sont pas automatiquement administratifs même s'ils sont conclus par des personnes morales de droit public. Ils peuvent l'être « en raison de leur objet ou de leurs clauses », c'est-à-dire en vertu des critères jurisprudentiels d'identification des contrats administratifs déjà mentionnés41(*). À défaut d'être administratifs, ces contrats spécifiques sont de droit privé et relèvent en conséquence de la compétence du juge judiciaire.

Il en est de même, et plus généralement, pour les contrats de la commande publique conclus par les personnes morales de droit privé par une application a contrario de l'article L. 6 précité. Ainsi, en l'état du droit, et sauf qualification législative particulière42(*), les marchés conclus par des personnes privées sont de droit privé et soumis, à ce titre, aux règles du code civil, même si l'une des parties est chargée d'une mission de service public ou si le contrat contient des clauses exorbitantes du droit commun.

Il s'ensuit que les marchés publics et contrats de concession relevant du code conclus par des entreprises publiques43(*), des sociétés locales à statut spécifique44(*), des organismes privés d'habitation à loyer modéré (HLM)45(*) ou encore des associations dont les ressources sont principalement procurées par des personnes publiques, sont, sauf exception46(*), de droit privé et relèvent par conséquent de la compétence du juge judiciaire et du régime contentieux organisé à cet effet par l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique et, pour les aspects purement procéduraux, par le code de procédure civile (CPC)47(*).

En dépit de la clarification apportée par l'article L. 6 fondée sur ce critère organique, le bloc de compétence juridictionnelle qui en découle ne permet pas de résoudre toutes les difficultés de qualification du contrat et donc du juge compétent, nées en particulier de l'intervention conjointe de personnes soumises au droit privé et d'autres au droit public dans le cadre de procédés de mutualisation des achats (accords-cadres, groupements de commandes) de plus en plus fréquents48(*). Au-delà de ces questions d'identification, plusieurs difficultés résultent de la dualité des contrats administratifs et privés de la commande publique. Outre celles en matière d'exécution inhérentes à leurs régimes juridiques différents49(*), d'autres apparaissent au niveau contentieux.

En premier lieu, il n'est pas toujours aisé pour les opérateurs économiques mais également pour les juridictions elles-mêmes de déterminer l'ordre juridictionnel compétent. Ainsi, en 2022, 17 % des affaires traitées par le Tribunal des conflits ont concerné la matière contractuelle50(*). De plus, et à l'inverse des tribunaux administratifs, seuls 11 tribunaux judiciaires sur 164 sont spécialement désignés à cet effet pour connaître de la passation des contrats privés de la commande publique51(*), rendant plus difficile l'identification du juge compétent au sein même de l'ordre judiciaire.

En second lieu, les délais de jugement apparaissent en moyenne plus longs devant le juge judiciaire52(*), notamment en raison de fréquents renvois d'audience dans les procédures d'urgence, entraînant des répercussions sur les acheteurs et les autorités concédantes puisque la signature du contrat est automatiquement suspendue.

En troisième lieu, le partage du contentieux entre deux juges différents pour connaître de contrats pourtant soumis à des règles procédurales de passation identiques issues de la transposition des directives européennes précitées, peut conduire, même si le juge judiciaire n'hésite pas à s'inspirer largement des solutions de la jurisprudence administrative, à des interprétations divergentes, ce qui nuit à la cohérence et à la sécurité juridiques.

Enfin, le décalage entre les ordres judiciaire et administratif est encore renforcé par la création prétorienne d'un recours de pleine juridiction dit « Tarn-et-Garonne »53(*), permettant à tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation et ses clauses de contester la validité du contrat et dont l'équivalent n'existe pas devant le juge judiciaire. Si la différence de traitement qui en résulte pour les candidats et les soumissionnaires selon qu'il est question de l'attribution d'un contrat privé ou d'un contrat administratif de la commande publique n'a pas été jugée contraire au principe d'égalité devant la loi54(*), il n'en demeure pas moins qu'elle met en lumière la nécessité de garantir une protection juridictionnelle effective aux opérateurs économiques afin de corriger les irrégularités les plus graves dans le cadre de l'attribution des contrats de la commande publique et ce, quelle que soit leur nature.

Qu'ils soient administratifs ou privés, les contrats de la commande publique répondent en définitive au même objectif de satisfaction des besoins d'un pouvoir adjudicateur ou d'une entité adjudicatrice dont la nature publique ou privée n'est d'ailleurs pas prise en compte par les directives européennes précitées de 2014 (cf. infra, cadre conventionnel).

Les personnes privées concernées sont soumises au CCP en raison de leurs liens étroits avec la « sphère publique » et les contrats qu'elles concluent, en leur qualité d'organisme de droit public au sens du droit de l'Union européenne (UE), peuvent avoir, dans certains cas, un objet bien plus « administratif », car en lien avec la satisfaction de besoins d'intérêt général, que ceux, pourtant passés par une personne publique, qui porteraient, par exemple, sur l'acquisition de simples fournitures. L'application du critère organique pour retenir la nature administrative du contrat n'est donc pas nécessairement adaptée à la réalité et n'apparaît plus in fine comme un critère indispensable de qualification dès lors que certains contrats pourtant passés par des personnes privées sont d'ores et déjà reconnus comme administratifs par la loi.

L'ensemble des raisons évoquées ci-dessus militent donc en faveur d'une unification du régime de l'ensemble des contrats de la commande publique qui seront désormais administratifs par détermination de la loi et relèveront en conséquence de la compétence du juge administratif.

Une telle réforme sera source d'une double simplification. Elle permettra d'une part, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de simplifier et d'uniformiser le contentieux de la commande publique, levant ainsi toute incertitude sur le juge compétent pour les entreprises tout en leur garantissant une protection juridictionnelle effective sous l'effet de la jurisprudence Tarn-et-Garonne précitée. Elle renforcera d'autre part la sécurité juridique par une application uniforme des règles de la commande publique pour l'ensemble de ses acteurs.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Aucune règle ou principe de valeur constitutionnelle ne s'oppose à ce que le législateur qualifie d'administratif un contrat pourtant conclu entre personnes privées. Une telle qualification emporte néanmoins des conséquences sur la répartition des compétences entre les deux ordres de juridictions.

Dans sa décision du 23 janvier 1987 relative à la conformité à la Constitution de la loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence ( Cons. Const., décision n° 86-224 DC), le Conseil constitutionnel a érigé en principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR), « conformément à la conception française de la séparation des pouvoirs, (...) celui selon lequel, à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l'annulation ou la réformation des décisions prises, dans l'exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ; ».

Il a néanmoins admis dans la même décision que, « dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une législation ou d'une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au législateur, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les règles de compétence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intéressé »55(*).

Il résulte de cette jurisprudence réitérée à plusieurs reprises, tant dans le cadre du contrôle a priori56(*) qu'a posteriori57(*), que seul le législateur est compétent pour unifier les règles de compétence juridictionnelle entre les deux ordres de juridictions et qu'un tel aménagement doit être « précis, limité » et « justifié par les nécessités d'une bonne administration de la justice » qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle58(*). Il a ainsi censuré, au titre de ce contrôle, plusieurs dispositifs d'unification de contentieux confiant aux juridictions judiciaires le soin de contrôler des actes relevant de l'exercice de prérogatives de puissance publique, en méconnaissance du principe constitutionnel de compétence de la juridiction administrative59(*).

En l'occurrence, l'unification envisagée s'inscrit parfaitement dans le cadre du respect des exigences constitutionnelles rappelées ci-dessous en ce qu'elle a pour objet de confier au juge administratif, juge « naturel » du contrat administratif, la compétence pour connaître de tout litige relatif à la passation et à l'exécution des contrats privés de la commande publique. Cet aménagement se révèle précis - dès lors qu'il vise une catégorie particulière de contrats - et limité en ce qu'il ne concerne qu'une faible part du contentieux de la commande publique (cf. infra, impacts sur les services administratifs). De surcroît, il répond parfaitement aux nécessités d'une bonne administration de la justice, eu égard aux difficultés déjà relevées tenant à la dualité des ordres de juridiction en matière de commande publique.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le droit de la commande publique est en grande partie encadré par le droit de l'UE, lequel est indifférent au statut public ou privé des personnes qui y sont soumises. Ainsi, si elle satisfait aux trois conditions cumulatives énoncées à l'article 2, §4 de la directive 2014/24/UE précitée60(*) dont l'article L. 1211-1 du CCP assure la transposition, une personne morale de droit privé au sens du droit interne sera qualifiée « d'organisme de droit public » et par conséquent de pouvoir adjudicateur au sens de cette directive61(*). La CJCE a ainsi jugé que « le statut de droit privé d'une entité ne constitue pas un critère susceptible d'exclure sa qualification de pouvoir adjudicateur » et que l'effet utile de la directive « Recours » et des directives européennes en matière de marchés publics « ne serait pas pleinement préservé si l'application de ces directives à une entité répondant aux trois conditions susmentionnées pouvait être exclue du seul fait que, conformément au droit national auquel elle est soumise, sa forme et son régime juridique relèvent du droit privé »62(*).

La nature privée ou administrative des contrats de la commande publique relevant du droit interne est donc indifférente pour la qualification d'un contrat de la commande publique au regard du droit du l'UE. Les directives européennes imposent des règles spécifiques de passation des contrats de la commande publique, y compris à certains contrats passés par des personnes privées et pouvant être qualifiés en droit français de contrats de droit privé, en raison notamment des liens que ces personnes entretiennent avec les autorités publiques et du rôle de ces contrats dans la satisfaction de besoins d'intérêt général.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Le droit français définit très précisément un régime spécifique des contrats administratifs, se distinguant à ce titre des législations des autres États membres de l'UE, également soumis aux directives européennes en matière de commande publique.

L'exemple de la Belgique est néanmoins susceptible d'éclairer le bien-fondé de l'unification du contentieux de la commande publique envisagée dans notre ordre juridique. En effet, en matière contractuelle, la juridiction judiciaire belge est compétente pour connaître du contentieux dit « subjectif », concernant les litiges nés de l'exécution du contrat tandis que le juge administratif est lui compétent pour le contentieux dit « objectif » découlant des règles de passation du contrat. Cette incompétence du Conseil d'État belge pour connaître du contrat une fois celui-ci signé l'a conduit à faire sienne la théorie de l'acte détachable créée au début du XXe siècle par le Conseil d'État français63(*) puis abandonnée avec la jurisprudence précitée Tarn-et-Garonne. Les juges belges sont alors également confrontés aux difficultés liées aux conséquences sur le contrat de l'annulation de l'acte détachable qui en constitue le fondement, ce qui justifierait le regroupement du contentieux entre les mains d'un seul juge, qu'il s'agisse du Conseil d'État belge ou d'une nouvelle juridiction spécialisée.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La réforme envisagée qui vise à mettre fin à la dualité des contrats administratifs et privés de la commande publique est nécessaire au regard des nombreuses difficultés évoquées supra (cadre général), que ce soit en matière de qualification et d'exécution du contrat ou sur le plan contentieux. Il résulte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel mentionnée supra (cadre constitutionnel) que seul le législateur est compétent pour unifier les règles de compétence juridictionnelle entre les deux ordres de juridictions. Les modifications législatives apportées au CCP permettront de résoudre ces difficultés et poursuivent deux objectifs principaux.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

En premier lieu, elles seront source d'une simplification et d'une uniformisation du contentieux de la commande publique, levant ainsi toute incertitude sur le juge compétent à saisir pour les entreprises dont les recours, y compris en urgence, seront traités dans des délais plus brefs devant le juge administratif. Celles-ci bénéficieront également désormais en leur qualité de tiers aux marchés conclus par des acheteurs privés, d'une voie de recours spécifique en contestation de la validité du contrat, en application de la jurisprudence Tarn-et-Garonne précitée.

En second lieu, la création d'un bloc de compétence unique en faveur du juge administratif pour l'ensemble des contrats passés en application du code de la commande publique renforcera la sécurité juridique par une interprétation et une application uniformes des règles de la commande publique pour l'ensemble de ses acteurs.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Seule l'intervention du législateur, compétent pour qualifier un contrat d'administratif et unifier en conséquence le contentieux de la commande publique en faveur du juge administratif, permettra d'atteindre les objectifs poursuivis.

Plusieurs options législatives alternatives au dispositif retenu ont été envisagées et écartées pour les raisons suivantes :

Option 1 : Procéder à l'unification du contentieux des contrats privés de la commande publique sans modification de leur nature et donc du régime de droit privé qui leur est appliqué (écartée)

Cette option permettait de ne pas remettre en cause le critère organique sur lequel repose la distinction entre un contrat administratif et un contrat de droit privé et dont l'importance a été réaffirmée à plusieurs reprises par la jurisprudence64(*). Toutefois, il a été jugé peu cohérent, dans une démarche de simplification du droit et au regard du principe selon lequel « la compétence suit le fond », de confier au juge administratif le soin de connaître de contrats qui resteront de droit privé.

Option 2 : Procéder à l'unification du contentieux des contrats privés de la commande publique seulement au stade de la passation et non de l'exécution du contrat (écartée)

Il a aussi été envisagé d'unifier seulement le contentieux de la passation devant le juge administratif (référés précontractuel et contractuel, recours « Tarn-et-Garonne ») et donc de laisser au juge naturellement désigné en fonction de la nature du contrat le soin de connaître des problèmes d'exécution. Cette option a été écartée pour plusieurs raisons. En effet, deux juges différents auraient été compétents pour statuer sur les contrats privés de la commande publique et la question des modifications des contrats en cours d'exécution présentait de sérieuses difficultés juridiques. De surcroît, ce dispositif a été retenu en Belgique et ne semble pas donner satisfaction dès lors qu'il est désormais envisagé de regrouper le contentieux entre les mains d'un seul et même juge (cf. supra, éléments de droit comparé).

3.2. DISPOSITIF RETENU

Il a donc été fait le choix d'étendre la qualification de contrat administratif à l'ensemble des contrats de la commande publique qui seront désormais administratifs et relèveront en conséquence de la compétence du juge administratif. Cette qualification aura pour effet de conférer aux personnes privées soumises au code les prérogatives de puissance publique attachées au régime des contrats administratifs, mentionnées à l'article L. 6 qui peuvent s'appliquer même dans le silence du contrat (modification et résiliation unilatérales pour motif d'intérêt général). Or, les personnes privées peuvent déjà être dotées de prérogatives de puissance publique dès lors qu'elles sont chargées d'une mission de service public65(*) et peuvent même prendre des actes administratifs notamment lorsqu'elles sont chargées d'un service public administratif66(*) ou d'un service public industriel et commercial67(*).

Il apparaît de surcroît logique de soumettre à un régime de droit administratif des personnes morales de droit privé, souvent étroitement contrôlées par les personnes publiques et amenées à conclure des contrats qualifiés certes de droit privé mais relevant d'un régime juridique largement inspiré des règles générales applicables aux contrats administratifs et dont le juge judiciaire fait d'ailleurs couramment application.

Une telle évolution n'entrainerait d'ailleurs pas un changement fondamental dans les pratiques contractuelles. De nombreux marchés publics de droit privé, notamment conclus par des organismes HLM ou des SEM d'aménagement, contiennent des clauses exorbitantes de droit commun dès lors qu'ils se réfèrent aux cahiers des clauses administratives générales (CCAG)68(*). Dans un arrêt du 11 mai 2022, la Cour de cassation a d'ailleurs jugé que, dès lors que le moyen de la clause réputée « non écrite » de l'article 1171 du code civil n'avait pas été soulevé en l'espèce, une SEM d'aménagement pouvait légalement, en application du CCAG travaux, résilier le contrat pour un motif d'intérêt général tiré de la volonté de recherche d'économies69(*).

De plus, la réforme du droit des contrats opérée par l' ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 rapproche le droit civil du droit administratif sur un certain nombre de points en ce qu'elle confère notamment aux parties des pouvoirs d'action unilatérale qui peuvent s'apparenter à de telles prérogatives (exception d'inexécution et possibilité de suspendre le contrat en cas d'inexécution suffisamment grave de l'autre partie ; exécution forcée en nature sans recours préalable au juge ; résolution du contrat par simple notification) et constituer autant de menaces pour la bonne réalisation des prestations.

Enfin, certains contrats pourtant passés par des personnes privées sont d'ores et déjà reconnus comme administratifs par la loi, que ce soit en application d'une disposition spéciale ou parce que le contrat emporte occupation du domaine public (cf. supra, cadre général). L'ordonnance n° 2009-864 du 15 juillet 2009 relative aux contrats de concession de travaux publics avait par ailleurs également qualifié d'administratifs de tels contrats, qu'ils soient conclus par des personnes publiques ou privées70(*). Le critère organique n'apparaît donc plus comme un critère indispensable pour caractériser l'administrativité d'un contrat.

En définitive, l'extension de la qualification de contrat administratif à l'ensemble des contrats de la commande publique a été jugée la plus à même de répondre à ces évolutions en donnant les moyens aux acheteurs, publics comme privés, de disposer des leviers indispensables à la bonne exécution de contrats dès lors qu'ils contribuent à la satisfaction de l'intérêt général. Elle s'inscrit de surcroît en cohérence avec le principe selon lequel le régime juridique des contrats administratifs commande la compétence du juge administratif.

Si elle a nécessairement pour conséquence d'une part de confier à des personnes privées des prérogatives qui, par leur nature exorbitante, constituent une exception au droit contractuel classique et d'autre part de limiter la marge de manoeuvre des personnes publiques dans le choix du mode d'organisation de leurs activités et des outils contractuels à leur disposition, ces deux inconvénients n'ont pas été considérés comme de nature à remettre en cause le choix opéré guidé par une logique de simplification de l'état du droit pour l'ensemble des acteurs de la commande publique.

Il a également été fait le choix de ne pas appliquer le dispositif retenu aux contrats « exclus » du champ d'application des directives européennes précitées, mentionnés respectivement au livre V de la deuxième partie (« autres marchés publics » et au livre II de la troisième partie (« autres contrats de concession ») du code de la commande publique. En effet, il s'agit d'une catégorie résiduelle de marchés publics et de contrats de concession pour lesquels les règles de préparation et de passation prévues par le CCP ne s'appliquent pas en raison précisément de leurs spécificités (articles L. 2500-1 et L. 3200-1 du CCP). Ces contrats sont très divers, ce sont par exemple les contrats signés dans le cadre des relations entre entités liées (quasi-régie, coopération entre pouvoirs adjudicateurs, contrats signés entre une grande entité adjudicatrice du secteur de l'énergie avec ses filiales, etc.), ou encore les contrats d'acquisition de biens immobiliers, les contrats d'emprunts bancaires, les contrats d'acquisition ou de transfert de valeurs mobilières ou d'autres instruments financiers, les contrats de services juridiques (certification et authentification de documents par les notaires, représentation légale d'un client par un avocat, services fournis par des administrateurs ou tuteurs désignés par les juridictions tels que les huissiers de justice, etc.), les contrats relatifs à certains services en matière de recherche et développement et les contrats conclus en application de règles ou d'accords internationaux.

Ces contrats, même conclus par une personne publique, sont souvent des contrats qui ne peuvent être qualifiés d'administratifs « en raison de leur objet ou de leurs clauses » (article L. 6 du CCP). Rien ne justifierait a fortiori que les contrats conclus par des personnes privées soient qualifiés d'administratifs par la loi et soumis à un régime exorbitant du droit commun, comme la modification ou la résiliation unilatérales.

Bien qu'ils ne se prêtent pas ou difficilement à l'application des règles de publicité et de mise en concurrence, les principes fondamentaux de la commande publique garantis au niveau constitutionnel et européen - liberté d'accès, égalité de traitement, transparence des procédures - peuvent néanmoins trouver à s'appliquer pour la passation de certains d'entre eux, comme l'a reconnu le Conseil d'État à l'occasion de l'examen du CCP71(*).

Il convient donc de maintenir les dispositions de l'ordonnance précitée du 7 mai 2009 relatives aux procédures de recours devant le juge judiciaire, spécialement désigné à cet effet72(*), qui n'ont vocation désormais à s'appliquer qu'aux seuls contrats de droit privé mentionnés au livre V de la deuxième partie et au livre II de la troisième partie du CCP.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1 Impacts sur l'ordre juridique interne

La qualification administrative de l'ensemble des contrats de la commande publique implique une modification de l'article L. 6 du CCP qui prévoit, en l'état, que les contrats relevant du code sont des contrats administratifs « s'ils sont conclus par des personnes morales de droit public ». Il s'agit de supprimer ce critère organique afin que les contrats de la commande publique, définis à l'article L. 2 du code, y compris ceux conclus entre personnes privées et donc de droit privé, soient désormais qualifiés de contrats administratifs et relèvent en conséquence de la compétence des juridictions administratives. Les seuls contrats de droit privé restants qui pourront, le cas échéant, relever de la compétence du juge judiciaire seront les autres marchés publics mentionnés au livre V de la deuxième partie et les autres contrats de concession visés au livre II de la troisième partie.

Les autres modifications législatives apportées visent à en tirer les conséquences.

Les dispositions relatives à la conciliation et à la médiation dans le cadre du règlement alternatif des différends ont été modifiées, sinon supprimées, en ce qu'elles reposaient sur la nature administrative ou privée du contrat (abrogation des articles L. 2197-2 et L. 3137-2 ; suppression des références à la nature du contrat et au cadre privé applicable aux articles L. 2197-1, L. 2197-3, L. 2197-4 et L. 3137-1).

Des ajustements purement rédactionnels ont également été effectués pour les dispositions relatives à la modification et à la résiliation unilatérales des marchés et contrats de concession (articles L. 2194-1, L. 2194-2, L. 2195-3 et L. 3135-1, L. 3135-2 et L. 3136-3) et au règlement alternatif des différends pour les contrats « exclus » (articles L. 2521-4 et L. 3221-6).

4.1.2 Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La réforme envisagée s'inscrit en cohérence avec les exigences posées par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui, en application de la directive « Recours » précitée, « impose aux États membres (...) de prendre les mesures nécessaires pour garantir l'existence de recours efficaces et aussi rapides que possible contre les décisions des pouvoirs adjudicateurs incompatibles avec le droit de l'Union et pour assurer que les procédures de recours soient accessibles à toute personne ayant ou ayant eu un intérêt à obtenir un marché déterminé et ayant été ou risquant d'être lésée par une violation alléguée » tout en précisant également, en vertu du principe d'autonomie procédurale, que « cette directive laisse ainsi aux États membres un pouvoir discrétionnaire dans le choix des garanties de procédure qu'elle prévoit et des formalités y afférentes »73(*).

L'unification du contentieux de la commande publique qui aura notamment pour effet d'accélérer les délais de jugement et d'ouvrir aux tiers à des contrats de droit privé de la commande publique une voie de recours spécifique en contestation de la validité du contrat, jusque-là réservée aux seuls contrats administratifs en application de la jurisprudence « Tarn-et-Garonne », satisfait parfaitement à ces exigences.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1 Impacts macroéconomiques

Sans objet.

4.2.2 Impact sur les entreprises

La réforme envisagée n'impose pas d'obligations nouvelles aux entreprises mais vise au contraire à simplifier l'état du droit applicable, tant pour l'application des règles substantielles de la commande publique que pour celles relatives aux procédures contentieuses propres à ces contrats.

Elle permettra également de sécuriser juridiquement l'exécution des marchés publics qui sont actuellement de droit privé et participera à l'uniformisation des pratiques des acheteurs. En effet, bien qu'ils soient inadaptés à cette catégorie de marchés en raison des nombreuses clauses qu'ils contiennent susceptibles d'être réputées non écrites74(*), les CCAG sont pourtant couramment utilisés par les acheteurs privés. Les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices de droit privé pourront donc désormais faire référence aux CCAG dans le cadre de leurs marchés en toute sécurité juridique.

4.2.3 Impacts budgétaires

La réforme envisagée n'induit pas un coût budgétaire supplémentaire pour l'État.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les modifications apportées au CCP n'ont pas d'impact sur les collectivités territoriales et leurs groupements dès lors qu'elles n'affecteront pas, au titre de leurs moyens d'action économique, leur faculté de créer des sociétés locales à statut spécifique, telles que des SEM ou des SPL, dont le statut de droit privé restera inchangé.

Il en est de même s'agissant du contrôle de légalité exercé par le préfet qui porte notamment sur les délibérations portant création de ces sociétés, relatives aux contrats conclus entre les collectivités ou leurs groupements et celles-ci ou sur « les décisions relevant de l'exercice de prérogatives de puissance publique, prises par les sociétés d'économie mixte locales pour le compte » d'une commune ou d'un établissement public de coopération intercommunale, d'un département ou d'une institution interdépartementale ou d'une région ou d'un établissement public interrégional75(*).

En revanche, les marchés publics et les contrats de concession conclus par les sociétés concernées qui seront désormais administratifs par détermination de la loi ne feront pas l'objet d'un contrôle de légalité puisque celui-ci repose sur l'application d'un critère organique qui lui aussi restera inchangé. Seuls « les marchés et les accords-cadres d'un montant au moins égal à un seuil défini par décret, les marchés de partenariat ainsi que les contrats de concession, dont les délégations de service public, et les concessions d'aménagement »76(*) conclus par les collectivités territoriales et leurs établissements publics sont transmis au représentant de l'État au titre du contrôle de légalité.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Compte tenu du volume réduit du contentieux des contrats de droit privé de la commande publique, l'impact sur les deux ordres de juridictions sera en tout état de cause limité.

Il permettra d'alléger la charge de travail des 11 tribunaux judiciaires de première instance spécialement désignés77(*) pour connaître de la passation des contrats privés de la commande publique78(*) qui resteront néanmoins compétents, mais de manière très résiduelle, pour connaître du contentieux relatif aux contrats de droit privé « exclus » (cf. supra, dispositif retenu).

L'augmentation du nombre de requêtes devant les juridictions administratives sera limitée au regard de la faible volumétrie du contentieux concerné. Il ressort des chiffres du recensement de la commande publique que les acheteurs privés, qui représentent seulement 5 % des acheteurs (environ 350 contre près de 9000 acheteurs publics), ont conclu environ 23 000 marchés de droit privé, soit environ 12 % du nombre total de marchés recensés. Compte tenu du taux de recours contre les marchés publics devant le juge administratif (4 393 requêtes enregistrées devant les tribunaux administratifs sur un total de 169 146 marchés publics conclus en 2022, soit environ 2,5%), l'unification du contentieux des marchés pourrait avoir pour effet d'augmenter en théorie de 0,2 point de pourcentage la part du contentieux des contrats et marchés dans le contentieux total des tribunaux administratifs, qui passerait de 1,8% à 2%79(*).

Le fonctionnement et l'organisation des juridictions administratives ne seront dès lors pas affectés de manière significative par la réforme envisagée qui n'emporte pas modification des règles de procédure contentieuses applicables aux contrats administratifs devant le juge administratif. La matière contractuelle (contrats de la commande publique et autres contrats administratifs) représente d'ailleurs une part résiduelle de l'activité des juridictions administratives, qui par ailleurs est en diminution80(*).

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1 Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.2 Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.3 Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Sans objet.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Les modifications envisagées relatives à l'unification du contentieux de la commande publique nécessitent, dès lors qu'elles affectent nécessairement la compétence des tribunaux administratifs, la consultation du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (CSTACAA) en application du L. 232-3 du code de justice administrative81(*). Le CSTACAA a rendu un avis favorable le 10 avril 2024. En revanche, cette mesure qui n'affecte pas, par elle-même, la compétence du Conseil d'État, au sens des dispositions de l'article L. 132-2 du même code, n'appelle pas une consultation obligatoire de la commission supérieure du Conseil d'État (CSCE).

De même, pour les raisons évoquées ci-dessus (cf. supra, impacts sur les collectivités territoriales), les dispositions envisagées n'appellent pas une consultation du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) puisqu'elles ne créent pas ou ne modifient pas des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, au sens du deuxième alinéa du I de l'article L. 1212-2 du CGCT. Par ailleurs, le Conseil d'État a jugé tant dans le cadre de ses fonctions consultative82(*) que contentieuse83(*), que doivent être regardées comme de telles normes soit celles qui les « concernent spécifiquement ou principalement, soit celles qui affectent de façon significative leurs compétences, leur organisation, leur fonctionnement ou leurs finances [souligné par nous] ».

5.2 MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1 Application dans le temps

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Elle s'appliquera de plein droit aux collectivités territoriales régies par l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte) et certaines des collectivités relevant de l'article 74 (Saint-Barthélemy, Saint Martin et Saint-Pierre et Miquelon).

Elle est également rendue applicable dans les îles Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises par le II du présent article.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Elle s'appliquera de plein droit aux collectivités territoriales régies par l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte) et certaines des collectivités relevant de l'article 74 (Saint-Barthélemy, Saint Martin et Saint-Pierre et Miquelon).

Elle est également rendue applicable dans les îles Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises par le II du présent article.

5.2.3 Textes d'application

Les présentes dispositions appelleront des mesures règlementaires d'application (décret en Conseil d'Etat) à des fins d'harmonisation et de coordination.

TITRE IV - SIMPLIFIER LES OBLIGATIONS PESANT SUR L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES ENTREPRISES

CHAPITRE IER - SIMPLIFIER LES OBLIGATIONS D'INFORMATION

Article 6 - Faciliter les processus de vente de fonds de commerce et de cessions d'entreprises en réduisant le délai d'information préalable des salariés

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

a) Cadre économique

L'enjeu des transmissions d'entreprises pour les années à venir constitue un enjeu majeur notamment du fait du vieillissement des chefs d'entreprises. Ainsi, dans son rapport de synthèse de 2023, CCI France évalue le nombre d'entreprises à reprendre en France dans les dix prochaines années à 350 00084(*) et estime, s'agissant des transmissions d'entreprise à venir, qu'entre 10% et 15% des entreprises potentiellement à reprendre seront transmises en interne soit dans le cadre d'une transmission familiale, soit dans le cadre d'une transmission aux salariés. Par ailleurs, et à titre d'exemple, en Ile-de-France, 137 000 entreprises employant au moins un salarié ont à leur tête un dirigeant âgé de 55 ans ou plus, qui sera donc concerné par la transmission ou la cession de son entreprise à moyen ou long terme. Faute de trouver un repreneur, ces entreprises, qui emploient 841 000 salariés, pourraient disparaître85(*).

Les données chiffrées soulignent par ailleurs un risque plus avéré en matière de transmission d'entreprises pour les entreprises de moins de 50 salariés en comparaison des entreprises de 50 salariés ou plus. Ainsi, une étude BPCE L'Observatoire d'avril 2021 souligne qu'en 2019, le taux de transmission des entreprises de moins de 50 salariés s'élève à 2,5% des entreprises de moins de 50 salariés contre 4,2% s'agissant des entreprises de 50 à 249 salariés et 7,5% pour les entreprises de 250 salariés ou plus86(*). Les données relatives aux entreprises de moins de 50 salariés soulignent que les difficultés sont identiques quel que soit le nombre de salariés de l'entreprise (de 1 à 5 salariés, de 6 à 9 salariés ou de 10 à 49 salariés), et mettent en évidence qu'il s'agit là d'une tendance stable en comparaison de 2012 et 2016.

Taux de transmission d'entreprise

En %

2012

2016

2019

1 à 49 salariés

 

 

2,5

1 à 5 salariés

2,7

2,6

2,5

6 à 9 salariés

2,3

2,3

2,5

10 à 49 salariés

2,2

2,4

2,5

50 à 249 salariés

4,2

4,4

4,2

250 à 4 999 salariés

9,5

9,7

7,5

Source : Etude BPCE L'Observatoire d'avril 2021 sur la base des données Bodacc 2019

Une autre étude BPCE L'Observatoire de mai 2019, portant sur les transmissions d'entreprises en 2016, permet de montrer que, dans le même temps, les entreprises de moins de 50 salariés connaissent un taux nettement plus élevé de disparitions (3,7% de l'ensemble des entreprises de moins de 50 salariés) que les entreprises de 50 salariés ou plus (1,6% de l'ensemble des entreprises de 50 salariés ou plus).

Taux de disparition d'entreprises

En %

2016

1 à 49 salariés

3,7

1 à 5 salariés

4,1

6 à 9 salariés

2,6

10 à 49 salariés

2,7

50 à 249 salariés

1,8

250 à 4 999 salariés

0,9

Source : Etude BPCE L'Observatoire de mai 2019

Prises ensemble, ces données laissent présumer que les mécanismes relatifs à la transmission des entreprises de moins de 50 salariés peinent à produire leurs effets (au vu du faible taux de transmission), avec pour conséquence la disparition d'un nombre importants d'entreprises (au vu du taux de disparition particulièrement élevé) et de leurs emplois.

L'étude d'impact de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire précisait déjà qu'il était estimé que 100 000 à 200 000 emplois disparaissaient pour absence de repreneurs. Plus récemment un rapport d'information du Sénat d'octobre 202287(*) précisait qu'à côté des 60 000 transmissions annuelles d'entreprise, 30 000 disparitions d'entreprise devaient « être regrettées ».

Par ailleurs, les données chiffrées 2014-2019 démontrent que le taux de survie à trois ans des repreneurs d'un fonds de commerce (92 à 95%) est supérieur de près de 20 points au taux de survie à trois ans de l'ensemble des entreprises créées (75%)88(*). Ces chiffres soulignent donc l'importance de la transmission d'entreprise pour maintenir l'activité économique des entreprises ainsi que les emplois créés.

b) Cadre juridique

La loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, dite « loi Hamon », a mis en place un dispositif d'information des salariés d'une entreprise lorsqu'il est envisagé un projet de vente du fonds de commerce89(*), ou en cas de vente de leur société90(*), c'est-à-dire en cas de vente des parts sociales, actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital des SARL ou des actions de sociétés par actions (SAS, SA). Le dispositif est entré en vigueur à compter du 1er novembre 2014.

Sont concernées l'ensemble des entreprises de moins de 250 salariés, avec des modalités d'information renforcées dès lors que l'entreprise dispose d'un comité social et économique aux compétences élargies (à partir de 50 salariés)91(*).

Pour les entreprises de moins de 50 salariés, l'obligation d'information préalable impose que les salariés soient avertis au plus tard deux mois avant la vente du fonds de commerce ou de leur société selon un régime similaire.

Ce dispositif d'information préalable des salariés vise à favoriser la transmission de fonds de commerces ou de sociétés à leurs salariés, en offrant à ceux-ci la possibilité de présenter une offre d'acquisition. Il ne s'applique pas en cas de succession, de liquidation du régime matrimonial ou de cession du fonds à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant. Il ne s'applique pas davantage aux entreprises faisant l'objet d'une procédure de conciliation, ou d'une procédure collective.

L'obligation d'information des salariés comporte la notification de la volonté du cédant de procéder à une vente d'une part, et du fait que les salariés peuvent présenter une offre d'achat d'autre part. La loi n'impose la transmission d'aucune autre information et d'aucun document relatif au fonctionnement, à la comptabilité ou à la stratégie de l'entreprise.

Les salariés peuvent être informés par tout moyen de nature à rendre la date de réception certaine : lors d'une réunion d'information, avec signature d'un registre de présence, par affichage avec signature d'un registre daté, par courrier électronique en utilisant un procédé permettant d'attester de manière certaine la date de réception et par remise en main propre avec émargement ou récépissé, ou encore par acte d'un commissaire de justice ou d'un avocat.

Toute offre d'achat présentée par un ou plusieurs salariés doit être communiquée sans délai au propriétaire. En revanche, cette offre ne revêt pas de caractère prioritaire par rapport aux autres offres proposées et le propriétaire est libre d'entrer ou non en négociation avec les salariés. La loi ne prévoit pas que le refus d'étudier ou d'accepter une offre doit être motivé.

Lorsque chaque salarié a fait connaître sa décision de ne pas présenter d'offre, la vente du fonds de commerce ou de la société peut intervenir avant l'expiration des deux mois.

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2016, a opéré un premier assouplissement du dispositif s'agissant des entreprises de moins de 50 salariés. D'une part, elle a supprimé le fait que la cession intervenue en méconnaissance du délai préalable peut être annulée à la demande de tout salarié. D'autre part, elle a instauré une amende civile dont le plafond est fixé à 2% maximum du montant de la vente lorsqu'une action en responsabilité est engagée. Ainsi, si le fonds de commerce ou la société est vendue sans que les salariés aient été informés au préalable dans le délai de deux mois, ces derniers peuvent saisir le juge pour obtenir réparation de leur préjudice. L'action en responsabilité civile que pourrait engager le salarié contre le propriétaire de la participation ou du fonds cédé ou le chef d'entreprise ou l'exploitant du fonds est une action en responsabilité de droit commun fondée sur l'article 1242 du code civil.

Dans le cadre de cette action en responsabilité, le tribunal peut en outre, à la demande du ministère public, prononcer une amende civile plafonnée à 2% du montant de la vente.

Les données relatives au crédit d'impôt pour le rachat des entreprises par les salariés (n° 320134) laissent supposer que, si le dispositif de droit d'information préalable des salariés a pu avoir un impact positif sur les exercices 2014 à 2016, le nombre de rachats d'entreprises par les salariés s'est stabilisé depuis autour de 50 reprises par an (contre 40 en avant l'entrée en vigueur de la loi Hamon).

Alors que la loi Hamon avait pour objectif de favoriser la transmission d'entreprise, il convient de noter que le taux de transmissions d'entreprises n'a pas connu d'évolution notable depuis l'entrée en vigueur de la loi s'agissant des entreprises visées par le dispositif du droit d'information préalable :

Taux de transmission d'entreprise

En %

2012

2016

2019

1 à 5 salariés

2,7

2,6

2,5

6 à 9 salariés

2,3

2,3

2,5

10 à 49 salariés

2,2

2,4

2,5

50 à 249 salariés

4,2

4,4

4,2

D'autres réformes législatives sont intervenues depuis 2016.

Ainsi, le comité social et économique (CSE) est devenu, en remplacement du comité d'entreprise, l'instance de représentation du personnel dans l'entreprise. Il doit être mis en place dans les entreprises de plus de 11 salariés en application de l'article L. 2311-2 du code du travail. Les membres du CSE sont élus par les salariés de l'entreprise pour une durée maximale de quatre ans. Les compétences, la composition et le fonctionnement du CSE varient selon la taille de l'entreprise. En effet, alors que les CSE des entreprises de moins de cinquante salariés ont pour mission de présenter à l'employeur les réclamations individuelles des salariés92(*) (), les CSE des entreprises employant plus de cinquante salariés ont pour mission d'assurer une expression collective des salariés dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production, notamment au regard des conséquences environnementales de ces décisions (article L 2312-8 du code du travail).

L'article L. 2322-1 du code de travail, auquel font références les textes imposant une obligation d'information des salariés, a été abrogé par l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 201793(*).

En outre, l'ordonnance du 12 mars 201494(*) a introduit la procédure de sauvegarde accélérée et la sauvegarde financière accélérée comme variante de la sauvegarde accélérée. La sauvegarde accélérée95(*) est une variante de la sauvegarde ouverte, sous condition de certification des comptes par un commissaire aux comptes ou un expert-comptable, lorsque les négociations conduites en conciliation ont échoué, mais sont susceptibles de recueillir l'accord d'une majorité de créanciers, que l'on aura, le cas échéant, réunis en classes de « parties affectées » (qui peuvent englober les détenteurs de capital dès lors que leurs droits sont modifiés par le projet de plan). Il s'agit alors en quelque sorte de « forcer la main des créanciers récalcitrants ». Cette procédure est le vecteur choisi par la France pour transposer la directive du 20 juin 2019, dite « restructuration et insolvabilité ». Les effets de la sauvegarde accélérée peuvent, le cas échéant, être cantonnés aux seuls créanciers financiers, procédure désignée sous le nom de sauvegarde financière accélérée).

L'ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 202196(*), portant transposition de la directive précitée, a supprimé la sauvegarde financière accélérée pour ne conserver que la procédure de sauvegarde accélérée.

Les textes relatifs aux exceptions à l'obligation préalable d'information des salariés mentionnent « la procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires régies par le livre VI » ne mentionnent donc pas la sauvegarde accélérée.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Il ressort de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel que l'obligation d'information des salariés, qui s'impose en cas de cession d'une participation majoritaire en vertu de l'article 20 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, n'interdit pas au propriétaire de céder librement sa participation dans la société à l'acquéreur de son choix et aux conditions qu'il estime les plus conformes à ses intérêts. Ainsi, l'instauration d'une obligation d'information ou son allègement ne portent aucune atteinte au droit de propriété du cédant ( 2015-476 QPC, 17 juillet 2015).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Plusieurs textes européens doivent être mentionnés :

- Directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements. Cette directive a pour but de créer un cadre commun aux travailleurs à l'échelle de l'Union européenne en cas de transfert de la propriété d'une entreprise ou d'un établissement où ils travaillent et de prévoir des obligations à la charge des cédants et des cessionnaires. Le texte prévoit notamment l'obligation de transfert des contrats de travail du cédant au cessionnaire, les travailleurs ou leurs représentants devant être informés de ce transfert (date, motif, conséquences et mesures envisagées).

- Directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne - Déclaration conjointe du Parlement européen, du Conseil et de la Commission sur la représentation des travailleurs. Cette directive, qui s'applique a minima à l'ensemble des entreprises de 50 travailleurs, prévoit que « l'information sur l'évolution récente et l'évolution probable des activités de l'entreprise ou de l'établissement et de sa situation économique » doit s'effectuer « à un moment, d'une façon et avec un contenu appropriés, susceptibles notamment de permettre aux représentants des travailleurs de procéder à un examen adéquat et de préparer, le cas échéant, la consultation » (article 4). La vente d'une entreprise impliquant une évolution de la situation économique de l'entreprise ou de l'établissement, les Etats doivent donc garantir, pour l'ensemble des entreprises de 50 salariés ou plus, que les représentants des travailleurs puissent organiser une consultation. S'agissant des délais d'information, en revanche, la directive laisse une marge d'appréciation.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

En Belgique, existe une obligation d'information préalable en cas de fermeture de l'entreprise, laquelle est applicable aux entreprises (ou division de l'entreprise) qui occupaient au moins 20 travailleurs en moyenne au cours des quatre trimestres qui précèdent le trimestre au cours duquel la cessation définitive de l'activité principale de l'entreprise a eu lieu. L'employeur doit informer, sans délai, les travailleurs, par l'affichage à un endroit apparent dans les locaux de l'entreprise, d'un avis daté et signé.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les différentes enquêtes de BPCE L'Observatoire s'agissant des transmissions et disparitions d'entreprises soulignent que le taux de transmission des entreprises de moins de 50 salariés est plus faible que celui des entreprises de 50 salariés ou plus, et que le taux de disparitions est nettement plus élevé pour les entreprises de moins de 50 salariés que pour les entreprises de 50 salariés ou plus, laissant présumer que les mécanismes relatifs à la transmission des entreprises de moins de 50 salariés peinent à produire leurs effets, avec pour conséquence la disparition d'un nombre important d'entreprises et de leurs emplois.

Par ailleurs, le nombre de disparitions d'entreprises est en forte croissance, particulièrement au sein des petites entreprises. La Banque de France dénombre ainsi environ 1300 disparitions supplémentaires d'entreprises de moins de 50 salariés entre 2014 et 2023, contre 110 disparitions supplémentaires d'entreprises de 50 à 249 salariés.

S'agissant des freins éventuels à la transmission des petites entreprises, les organisations professionnelles (U2P) estiment que l'obligation d'information des salariés constitue une charge administrative importante pour les entreprises et que le délai de deux mois serait, selon elles, de nature à compromettre la vente ou la cession en ce qu'il dissuaderait les potentiels acquéreurs, contraints d'attendre avant de conclure l'opération. La critique principale adressée au dispositif est que peu de salariés rachètent leur entreprise97(*) alors que ce délai s'impose à toutes les transactions98(*).

Compte tenu de ce risque plus élevé de non-transmission des entreprises de moins de 50 salariés, et afin d'aider au mieux les chefs d'entreprises à trouver un acquéreur et d'éviter que l'entreprise ne disparaisse faute de repreneur, il convient donc d'envisager, pour ces entreprises, un allégement du dispositif dans la continuité de l'assouplissement opéré par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, en réduisant le délai de deux à un mois et en réduisant le plafond de l'amende civile si la responsabilité du propriétaire est reconnue.

En outre, dans un souci de cohérence, il doit être procédé à la clarification des dispositions des articles L. 141-23 et suivants et des articles L. 23-10-1 et suivants du code de commerce, afin de prendre en compte les réformes intervenues depuis la « loi Hamon » de 2014.

Conformément à l'article 34 de la Constitution, la décision de modifier le dispositif d'information préalable des salariés intéressant le régime de la propriété et des obligations commerciales est de niveau législatif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les objectifs poursuivis sont d'une part de réduire la charge administrative des entreprises de moins de 50 salariés en matière de transmission d'entreprise et, d'autre part, d'éviter la dissuasion des potentiels acquéreurs. Par ailleurs, selon l'observatoire BPCE, en 2016, les cessions d'entreprises au sein des entreprises de moins de 50 salariés ont permis de préserver environ 180 000 emplois. Cette mesure ayant pour but de favoriser les cessions d'entreprise au sein des entreprises de moins de 50 salariés, particulièrement touchées par la défaillance d'entreprise, elle poursuit également l'objectif de préservation d'emploi dans les petites entreprises.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTION ENVISAGÉE

La suppression totale de l'obligation d'information a été écartée puisqu'elle supprimerait la possibilité d'un projet de reprise par les salariés et l'examen de la possibilité de mobiliser les financements nécessaires, allant à l'encontre du droit introduit par la Loi Hamon précitée.

Pour rappel l'objectif de la loi du 31 juillet 2014 était de faire émerger une offre de reprise des actifs pour favoriser la pérennité des entreprises99(*).

Pour ces mêmes raisons a été également écartée l'option consistant à rehausser les seuils d'effectifs de l'entreprise pour laquelle s'applique l'obligation d'information :

- Pour l'information au sein des entreprises de 1 à 49 salariés : cela aurait pour effet de supprimer le droit d'information et la possibilité d'un projet de reprise par les salariés ;

- Pour l'information au sein des entreprises de 50 à 250 salariés : cela serait sans effet puisque le code du travail prévoit déjà une information du comité social et économique à attributions renforcées, lequel est mis en place dans les entreprises de 50 salariés ou plus.

3.2. OPTION RETENUE 

Dans un esprit de compromis, et dans l'objectif de simplifier les démarches pour les entreprises les plus affectées par le risque de non-transmission, il est possible d'agir sur le délai légal, afin de ne pas retarder la vente tout en permettant aux salariés intéressés de présenter une offre de reprise structurée.

Il est proposé de réduire le délai d'information préalable obligatoire de deux à un mois pour les entreprises qui ne disposent pas d'un comité social et économique exerçant les attributions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 2312-1 du code du travail.

Il est proposé en outre de réduire, pour les entreprises qui ne disposent pas de comité social et économique, le plafond de l'amende civile sanctionnant le manquement au respect de l'obligation, en fixant le plafond de la sanction à 0,5 % du montant de la vente, au lieu de 2 %.

L'option retenue consiste à modifier les dispositions du code de commerce relatives, d'une part aux ventes de fonds de commerce et d'entreprises de moins de 50 salariés pour modifier le délai et abaisser le plafond de l'amende civile, et d'autre part aux ventes de fonds de commerce et d'entreprises de 50 à 250 salariés pour prendre en compte de la suppression des comités d'entreprise et introduction des comités sociaux et économiques (11 salariés, mais avec des compétences élargies à partir de 50 salariés).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les dispositions législatives modifiées figurent dans le code de commerce. Ainsi, sont modifiées :

- les dispositions des sections 3 et 4 du titre IV du livre Ier du code de commerce relatives à l'information préalable obligatoire des salariés en cas de cession de fonds de commerce, soit des articles L. 141-23, L. 141-25, L. 141-27 et L. 141-28 ;

- les dispositions des sections 1 et 2 du chapitre X du titre III du livre II du code de commerce relatives à l'information préalable obligatoire des salariés en cas de cession de fonds de commerce, soit des articles L. 23-10-1, L. 23-10-3 et L. 23-10-7.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les dispositions envisagées sont en cohérence avec les textes européens en vigueur :

- Directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements. Etant donné que cette directive impose une communication aux travailleurs ou à leurs représentants « en temps utile avant le transfert », la réduction du délai reste en adéquation avec cette obligation.

- Directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne - Déclaration conjointe du Parlement européen, du Conseil et de la Commission sur la représentation des travailleurs. Cette directive impose, pour les entreprises de plus de 50 salariés, une information des représentants du personnel sur l'évolution récente et l'évolution probable des activités de l'entreprise ou de l'établissement et de sa situation économique » laquelle doit s'effectuer « à un moment, d'une façon et avec un contenu appropriés, susceptibles notamment de permettre aux représentants des travailleurs de procéder à un examen adéquat et de préparer, le cas échéant, la consultation » (article 4). La disposition envisagée n'a pas pour effet de limiter ou supprimer l'information des représentants du personnel. Ainsi, les dispositions envisagées restent en adéquation avec l'obligation citée par la directive.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Sans objet.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La réduction du délai d'information permettra d'accélérer la conclusion de la cession ou de la vente, augmentant ainsi le nombre de potentiels acquéreurs. La réduction, pour les entreprises qui ne disposent pas de comité social et économique, du plafond de l'amende civile sanctionnant le manquement au respect de l'obligation, à 0,5 % du montant de la vente, au lieu de 2 % permettra également d'accroître le nombre d'acheteurs potentiels. Ces mesures permettront ainsi de réduire le risque de compromission de la vente et de maintenir le potentiel productif associé.

Cette réduction du délai aura également une incidence favorable sur l'activité de l'entreprise elle-même en réduisant la période d'incertitude sur son avenir.

Enfin, si cela réduit la durée de préparation d'une offre de reprise par les salariés intéressés, le délai d'un mois peut suffire à fournir une réponse structurée et adaptée. L'intérêt de ce dispositif, qui permet à des salariés de pouvoir proposer une alternative lors de la transmission, est conservé.

Ce soutien à la reprise des entreprises sera d'autant plus important qu'on s'attend à environ 350 000 entreprises en situation de reprise dans la prochaine décennie d'après CCI France, compte tenu de la démographie des dirigeants actuels d'entreprises. Selon l'observatoire BPCE, en 2016, environ 60% des cessions étaient réalisées par les entreprises de moins de 50 salariés. Appliquée aux projections de CCI France, il est possible d'envisager qu'environ 210 000 cessions d'entreprises de moins de 50 salariés auront lieu sur les dix prochaines années, soit environ 21 000 par an. Ainsi, il parait essentiel d'agir sur les cessions d'entreprises au sein des entreprises de moins de 50 salariés.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans objet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Sans objet.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Sans objet.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

A titre d'exemple, en Ile-de-France, 137 000 entreprises employant au moins un salarié ont à leur tête un dirigeant âgé de 55 ans ou plus, qui sera donc concerné par la transmission ou la cession de son entreprise à moyen ou long terme. Faute de trouver un repreneur, ces entreprises, qui emploient 841 000 salariés, pourraient disparaître100(*). Selon l'observatoire BPCE, en 2016, les cessions d'entreprises au sein des entreprises de moins de 50 salariés ont permis de préserver environ 180 000 emplois.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Sans objet.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aucune consultation obligatoire ni aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La réduction du délai nécessitera un différé d'entrée en vigueur de deux mois pour éviter de fragiliser les cessions en cours. En effet, pour les cessions comprises dans un délai inférieur à deux mois avant l'entrée en vigueur du projet de loi, celles-ci feront déjà l'objet d'une consultation des salariés en cours au regard des dispositions précédentes. Ainsi, une entrée en vigueur différée de deux mois permet de prendre en compte les nouvelles cessions non comprises dans le régime précédent.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article sera applicable de plein droit dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution, y compris à Mayotte.

Les articles L. 141-23, L. 141-25, L. 141-27, L. 141-28, L. 23-10-1, L. 23-10-3 et L. 23-10-7 n'ayant pas été étendus à Wallis et Futuna, les modifications de ces articles prévus par le présent article n'ont pas à être étendu à cette collectivité.

En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, collectivités soumises au principe de spécialité législative, les lois et règlements n'y sont applicables que dans les matières relevant statutairement de la compétence de l'État et sur mention expresse d'applicabilité. En matière de droit commercial, l'Etat n'est pas compétent dans ces collectivités.

En Nouvelle-Calédonie, la loi du pays n° 2012-2 du 20 janvier 2012 relative au transfert des compétences de l'Etat en matière de droit civil, de règles concernant l'état civil et de droit commercial a transféré, en effet, à cette collectivité les compétences en matière de droit commercial. En Polynésie française, le droit commercial ne fait pas partie des matières dont la compétence a été dévolue à l'Etat par l'article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

En conclusion, le présent article ne nécessite aucune mesure expresse d'extension outre-mer.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

Article 7 - Simplifier la présentation des bulletins de paie

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Des réformes importantes ont été engagées par l'État depuis une dizaine d'années afin de faciliter les procédures de paie et de déclarations sociales. Le déploiement de la déclaration sociale nominative (DSN), à compter de 2017, s'est ainsi accompagné d'un effort de simplification des paramètres de calcul de la paie avec la mise en place d'un « comité de normalisation des données sociales ». Ces travaux n'ont abouti que partiellement, la détermination des différents taux, assiettes et exonérations de cotisation et de contributions applicables répondant toujours aujourd'hui à des règles multiples et souvent complexes. Ils devraient toutefois se poursuivre dans les années à venir grâce notamment à la nouvelle création, en 2023, d'un « comité chargé de la simplification et de la qualité des déclarations des données sociales ».

Ces efforts en faveur de la simplification de la paie doivent être distingués, même s'ils ne sont pas sans lien dès lors que la complexité de la paie contraint nécessairement la façon dont son contenu peut être restitué, de ceux engagés en parallèle depuis plus de vingt ans en faveur de la simplification du bulletin de paie, qui ainsi donné lieu à plusieurs évolutions :

- la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier rend facultative la mention des cotisations patronales, dès lors qu'un récapitulatif annuel est transmis au salarié ;

-  le décret n° 2005-239 du 14 mars 2005 portant simplification de diverses dispositions dans les domaines du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et modifiant le code du travail autorise le regroupement sur une même ligne des cotisations ayant la même assiette et le même organisme. La circulaire du 30 juin 2005 relative à la simplification du bulletin de paie a explicité ces principes et proposé des maquettes de bulletins de paie simplifiés ;

- la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures a quant à elle permis la dématérialisation du bulletin de paie et sa remise au salarié par voie électronique aux salariés volontaires. Cette évolution a ainsi ouvert la voie à une généralisation du format dématérialisé du bulletin de paie, sauf opposition du salarié ;

-  la loi n° 2012-387 du 22 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives harmonise la présentation de l'ensemble des bulletins de paie avec pour objectif de rapprocher les données mentionnées de celles qui allaient être transmises avec la DSN mise en oeuvre progressivement à partir de 2017 ;

- le décret n° 2016-190 du 25 février 2016 relatif aux mentions figurant sur le bulletin de paie s'inscrit dans le prolongement de ces précédents travaux d'harmonisation et s'appuie sur les conclusions du rapport « Pour une clarification du bulletin de paie » remis au Gouvernement en 2015101(*). Il rend notamment obligatoire la mise en place d'un bulletin de paie simplifié dans toutes les entreprises de plus de 300 salariés au 1er janvier 2017 puis pour toutes les entreprises à compter du 1er janvier 2018. Afin de rendre plus lisible la fiche de paie, les cotisations sont regroupées avec des libellés plus clairs. Les cotisations de protection sociale sont ainsi regroupées au sein des cinq branches de risque et les contributions qui sont uniquement à la charge de l'employeur sont regroupées sous la ligne « autres contributions dues par l'employeur ».

Malgré ces initiatives successives, le bulletin de paie se caractérise toutefois encore par une trop grande complexité. Cette complexité est pour partie la conséquence directe des modalités de financement de la protection sociale en France et de la richesse de la négociation conventionnelle. Elle est également due aux différents usages auxquels répond le bulletin de paie, outre sa vocation originelle de justificatif du montant net à payer remis par l'employeur au salarié (article L. 3243-2 du code du travail) : attestation du revenu du salarié auprès d'acteurs tiers (établissements bancaires), document de référence en cas de contrôle et support souvent privilégié par l'employeur pour transmettre des informations au salarié. Le format actuel du bulletin de paie semble toutefois excessivement complexe au vu des usages qui en sont faits.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La mesure envisagée modifie les droits et obligations relatifs aux relations de travail entre les employeurs et leurs salariés et touche donc à un principe fondamental du droit du travail. Elle s'inscrit à ce titre dans le champ de l'article 34 de la Constitution.

Le Conseil constitutionnel n'a jamais eu à se prononcer sur l'obligation de remise d'un bulletin de paie par l'employeur.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Aucune norme ou jurisprudence européenne n'encadre ces dispositions.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Néant.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le bulletin de salaire comporte un ensemble d'informations périphériques au salaire net à payer qui se sont multipliées au fil du temps par les initiatives cumulées des partenaires sociaux, de l'Etat et des entreprises elles-mêmes. Ces évolutions se sont en outre traduites par un accroissement du nombre d'éléments de paie figurant sur le bulletin afin que chaque destinataires ou utilisateurs (salarié mais également gestionnaires de paie ou membres des corps de contrôle) puisse y retrouver les données intéressantes pour lui, amoindrissant ainsi la lisibilité du document pour le salarié.

Une nouvelle réforme de simplification du bulletin de paie paraît donc nécessaire afin de le rendre plus lisible et plus compréhensible pour les salariés et plus simple à éditer pour leurs employeurs. Dans cette version très simplifiée, seuls les principaux agrégats composant la rémunération seraient désormais restitués, sans le détail des prélèvements sociaux réalisés.

Afin que le salarié puisse, s'il le souhaite, vérifier le montant de la rémunération nette qui lui est versée, une mise à disposition systématique par l'employeur des informations nécessaires à la reconstitution des montants qui figurent sur son bulletin doit toutefois être prévue. Pour que cette mise à disposition puisse se faire selon les mêmes modalités pour tous les salariés d'un même employeur et selon le vecteur de son choix, une dérogation aux modalités de remise des bulletins de paie, telles que définies au deuxième alinéa de l'article L. 3243-2 du code du travail doit être prévue dans la loi.

La mesure simplifie donc le format du bulletin de paie que doit transmettre chaque employeur à son salarié. En contrepartie, il crée ainsi une obligation de mise à disposition systématique de la composition de la rémunération nette du salarié en complément qui nécessite une modification législative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'ambition poursuivie par le législateur est de clarifier le bulletin de paie sans accroître la complexité administrative pour l'employeur. La mesure proposée poursuit ainsi deux objectifs afin de centrer l'information du salarié sur ce qui est pour lui essentiel :

- Le premier objectif est de rendre le bulletin de paie plus simple à éditer. Il s'agit de simplifier la présentation des éléments de paie figurant sur le bulletin de paie en créant un modèle avec un nombre fortement réduit de lignes, accédant ainsi à la demande de nombreux acteurs économiques.

- Le second objectif est que le salarié comprenne mieux, au-delà du justificatif du net à payer, à quoi servent les prélèvements qui sont opérés sur son salaire brut avec un niveau de lecture adapté à ses besoins.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La remise au salarié d'un bulletin de paie récapitulatif détaillé annuel en complément du bulletin de paie simplifié mensuel a été écartée en raison du coût de l'édition obligatoire que représenterait un treizième bulletin pour les employeurs, par ailleurs non vécu comme une source de simplification. En effet, le contrôle de ce bulletin aurait engendré une charge de travail supplémentaire pour les gestionnaires de paye.

La reconstitution d'un bulletin de paie détaillé à partir des seuls éléments déclarés par les employeurs via la déclaration sociale nominative (DSN) a également été écartée, dans la mesure où cette restitution, qui ne peut pas être complètement contemporaine, ne pourrait pas être complète puisque divers éléments ayant un impact sur le revenu net versé ne sont pas pour autant déclarés en DSN (remboursements de frais professionnels, avance sur salaire, etc..).

Il aurait également pu être envisagé d'obliger l'employeur à recourir au même vecteur que celui choisi par le salarié pour la remise de son bulletin de paie pour permettre à ce dernier de disposer de l'ensemble des informations nécessaires à la reconstitution des montants qui figurent sur son bulletin. Le choix a toutefois été fait de laisser la possibilité aux employeurs de mettre ces informations détaillées à la disposition sous un format numérique uniquement ce qui nécessitait de modifier la loi.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de présenter de façon plus synthétique les éléments de paie au salarié, il est proposé la création d'un bulletin de paie mensuel très simplifié.

Les évolutions envisagées se traduiront par un affichage agrégé de certains détails existants aujourd'hui. Ainsi, seuls les principaux agrégats de la rémunération seront désormais restitués en globalisant les lignes relatives aux cotisations et contributions sociales obligatoires et en y intégrant directement les éventuelles exonérations de cotisations qui s'y appliquent. Les montants globaux des contributions et cotisations salariales et patronale seraient toutefois toujours renseignés pour valoriser l'effort global de l'employeur et permettre au salarié de comprendre la constitution de salaire net.

Ce premier volet de la mesure ne nécessite pas de disposition législative, mais appelle des textes de niveau réglementaire (décret en Conseil d'Etat et arrêté).

Par ailleurs, afin de permettre au salarié qui le souhaiterait de recalculer le montant de sa rémunération nette versée à partir du montant brut malgré la disparition de leur détail au sein du bulletin de paie, l'option retenue consiste à prévoir, en complément du bulletin de paie mensuel très simplifié, l'obligation de mise à disposition du salarié par l'employeur des éléments nécessaires à ce calcul de manière systématique et mensuelle. Ces éléments complémentaires pourront être transmis sous le format privilégié par l'employeur. La dématérialisation de ces informations n'est donc pas une obligation pour l'employeur, mais une faculté. Pour ce faire, il faut préciser dans la loi que l'employeur pourra déroger aux modalités de remise des bulletins de paie définies au deuxième alinéa de l'article L. 3243-2 du code du travail.

Enfin, cette information du salarié sera complétée dans un second temps par l'affichage de certains éléments de paie sur le portail national des droits sociaux (PNDS) afin d'éclairer le salarié sur l'affectation des cotisations et contributions dues au titre de sa rémunération entre les différents risques sociaux et les droits sociaux créés en contrepartie.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie l'article L. 3243-2 du code du travail.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Sans objet.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La simplification du bulletin de paie va diminuer les coûts de traitement, d'émission voire d'édition des bulletins et de stockage des bulletins de paie.

S'agissant de la mise à dispositions des éléments détaillés ayant servi à établir la paie du salarié, l'employeur pourra en outre choisir le format le moins onéreux

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant. Sauf exception les dispositions du code du travail relatives au salaire, y compris celles relatives au bulletin de paie (L. 3243-2 à L. 3243-5 du code du travail) ne sont pas applicables aux employeurs de droit public, conformément aux dispositions de l'article L. 3211-1 du code du travail.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les services qui peuvent utiliser, lors du contrôle des entreprises, des informations qui figurent aujourd'hui sur les bulletins de paie mais qui ont vocation à disparaitre d'ici 2027, devront adapter leur pratique en mobilisant les autres sources qui seront mises à leur disposition (déclarations sociale nominatives et informations détaillées qui devront être mises à dispositions des salariés en complément des nouveaux bulletins de paie notamment).

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Les dispositions de l'article garantissent que la mise en place d'un bulletin de paie très simplifié ne s'accompagnent pas d'une diminution du niveau d'information possible des salariés sur la composition et le calcul de leurs montants brut et net de rémunération.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Le bulletin de paie très simplifié comportera moins de lignes ce qui permettra de renforcer son accessibilité.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les particuliers concernés bénéficieront de bulletins de paie plus lisibles et de nouveaux services leur permettant de disposer d'informations plus détaillées sur les éléments pris en compte pour le calcul du montant net qui leur est versé, non plus de façon systématique et indifférenciée, mais en fonction de leurs besoins.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Conformément aux dispositions du 2° de l'article L. 2271-1 du code du travail, la commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) a été consultée le 2 avril 2024 et a rendu un avis 8 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les nouvelles règles prévues par la présente mesure entreront en vigueur à une date définie par décret compter du 1er janvier 2027 afin de permettre aux employeurs, aux éditeurs de logiciels de paie et aux organismes qui gèrent et alimentent le PNDS de mener les travaux techniques nécessaires à la mise en oeuvre des évolutions prévues.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions du présent article seront applicables dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, qui sont soumis au principe de l'identité législative en la matière.

Cette mesure ne s'applique par en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, ainsi qu'aux Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) qui sont régies par le principe de spécialité législative. Les relations du travail y sont organisées par d'autres textes.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat viendra préciser les conditions dans lesquelles sont mises à disposition du salarié les éléments détaillés qui viendront compléter son information ainsi que, le cas échéant, les modalités de mise à disposition de ces éléments sous forme électronique. Un décret simple définira la durée pendant laquelle ces éléments resteront disponibles.

CHAPITRE II - ALLÉGER LES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LA CROISSANCE DES ENTREPRISES

Article 8 - Réhausser les seuils de notification des concentrations

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'Autorité de la concurrence est l'autorité administrative indépendante en charge du contrôle des concentrations en France. À ce titre, l'Autorité de la concurrence est tenue d'examiner toute opération de concentration, telle que définie à l'article L. 430-1 du code de commerce, dès lors qu'elle franchit certains seuils exprimés en chiffres d'affaires définis à l'article L. 430-2 du code de commerce. Les concentrations couvrent les opérations entrainant un changement durable du contrôle des entreprises concernées et donc de la structure du marché. Elles peuvent prendre différentes formes : fusion d'entreprises antérieurement indépendantes, prise de contrôle d'une entreprise par une autre entreprise, création par deux sociétés persistantes d'une entreprise commune. Ces opérations font l'objet d'une notification obligatoire à l'Autorité de la concurrence, qui doit intervenir avant la réalisation de l'opération de concentration, conformément à l'article L. 430-3 du code de commerce. L'Autorité de la concurrence a l'obligation de se prononcer dans un délai contraint fixé par la loi (articles L. 430-5 à L. 430-7 du code de commerce), afin de ne pas ralentir plus que nécessaire les activités économiques des entreprises. Pour les cas ne présentant pas de difficultés particulières, l'Autorité effectue un examen rapide sous 25 jours ouvrés (phase 1).
Si, au terme de ce premier examen, des doutes subsistent quant au risque d'atteinte à la concurrence, l'Autorité ouvre une procédure d'examen approfondi (phase 2) et dispose de 65 jours ouvrés supplémentaires.

L'article L. 430-8 du code de commerce prévoit plusieurs sanctions à l'égard des entreprises ayant réalisé des opérations de concentration sans avoir procédé à la notification préalable obligatoire. Elle peut obliger les sociétés à procéder à la notification, à moins de revenir à l'état antérieur à la concentration. En outre, elle peut leur infliger une sanction pécuniaire : jusqu'à 5% du chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France pour les personnes morales et 1,5 millions d'euros pour les personnes physiques.

Les seuils applicables au contrôle national des concentrations ont varié à plusieurs reprises dans la législation française depuis l'instauration d'un tel contrôle.

La loi n° 77-806 du 19 juillet 1977 relative au contrôle de la concentration économique et à la répression des ententes illicites et des abus de position dominante mettait pour la première fois en oeuvre un contrôle des opérations de concentration fondé sur un mécanisme de notification volontaire des parties à l'opération, qui réalisaient plus de 25 % des ventes ou des achats sur le(s) marché(s) concerné(s) par l'opération. Un contrôle plus spécifique des concentrations a été instauré, toujours sur une base volontaire, par l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, avec deux seuils alternatifs : une opération de concentration était contrôlable (i) si le chiffre d'affaires total des parties à l'opération était supérieur à sept milliards de francs et le chiffre d'affaires d'au moins deux des parties était supérieur à deux milliards de francs, ou (ii) si les parties réalisaient plus de 25 % des ventes ou des achats sur le(s) marché(s) concerné(s).

La loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (dite « NRE ») a modifié le système en instaurant une procédure de notification obligatoire des concentrations auprès du ministre chargé de l'économie et des finances, à la condition que deux seuils exprimés en chiffre d'affaires soient cumulativement atteints : (i) le chiffre d'affaires mondial de l'ensemble des parties à la concentration doit être supérieur à 150 millions d'euros et (ii) le chiffre d'affaires en France d'au moins deux des parties à l'opération doit être supérieur à 15 millions d'euros. Le seuil alternatif en parts de marché a ainsi été abandonné. Ces seuils sont applicables à tous les secteurs économiques et pour l'ensemble du territoire national.

L'ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004 a porté de 15 à 50 millions d'euros le second seuil en chiffre d'affaires. La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (dite « LME ») a transféré la compétence du contrôle des concentrations du ministre chargé de l'économie à l'Autorité de la concurrence. La LME a également introduit, outre les seuils généraux, des seuils spécifiques pour les opérations portant sur le commerce de détail et pour les opérations impliquant une entreprise active dans les départements et certaines collectivités d'outre-mer. En 2010, un seuil spécifique au commerce de détail en outre-mer a été mis en place, à la suite des recommandations de l'Autorité de la concurrence dans le cadre de son avis de 2009 concernant le fonctionnement de la concurrence en outre-mer, et initialement fixé à 7,5 millions d'euros. Il a par la suite, en 2012, été abaissé à 5 millions d'euros, pour tenir compte du fait que les chiffres d'affaires réalisés en outre-mer par le commerce de détail sont en moyenne inférieurs à ceux réalisés en métropole, et s'assurer ainsi que ces opérations n'échappent pas au contrôle de l'Autorité.

À ce jour, le contrôle des concentrations s'inscrit dans le cadre légal défini par les articles L. 430-1 à L. 430-10 du code de commerce. Sa mise en oeuvre est précisée par les articles R. 430-2 à R. 430-10 de la partie réglementaire du code de commerce.

1.1.1. Les seuils applicables à tous les secteurs économiques et pour l'ensemble du territoire national (seuils dits « généraux »)

Le paragraphe I de l'article L. 430-2 du code de commerce définit le niveau des seuils généraux, applicables à tous les secteurs économiques et pour l'ensemble du territoire national depuis 2004. En vertu de cet article, une concentration doit être notifiée à l'Autorité de la concurrence si les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies :

Ø le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 150 millions d'euros ;

Ø le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé individuellement en France par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 50 millions d'euros ; et

Ø l'opération n'entre pas dans le champ de compétence de la Commission définie par le règlement 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.

1.1.2. Les seuils applicables aux entreprises actives dans le commerce de détail (seuils dits « commerce de détail »)

Depuis la LME de 2008, le commerce de détail fait l'objet de dispositions spécifiques qui adaptent les seuils applicables à la contrôlabilité des concentrations à ce secteur. La notion de commerce de détail est définie par référence aux règles applicables en matière d'équipement commercial. Un magasin de commerce de détail s'entend comme un magasin qui effectue, pour plus de la moitié de son chiffre d'affaires, de la vente de marchandises (ainsi que certaines prestations de service à caractère artisanal) à des consommateurs pour un usage domestique (Lignes directrices de l'Autorité de la concurrence relatives au contrôle des concentrations, 2020, §103).

Selon le paragraphe II de l'article L. 430-2 du code de commerce, lorsque deux au moins des parties à la concentration exploitent un ou plusieurs magasins de commerce de détail, la concentration doit être notifiée à l'Autorité de la concurrence si les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies :

Ø le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 75 millions d'euros ;

Ø le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France dans le secteur du commerce de détail par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 15 millions d'euros ;

Ø l'opération n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004.

Cette disposition permet à l'Autorité de la concurrence de contrôler des concentrations non soumises au contrôle des concentrations en vertu des seuils du I de l'article L. 430-2 qui pourraient affaiblir substantiellement la concurrence dans certaines zones de chalandise locales.

1.1.3. Les seuils applicables aux entreprises actives dans les départements et certaines collectivités d'outre-mer (seuils dits « outre-mer ») 

Depuis la LME de 2008, le paragraphe III de l'article L. 430-2 dispose que lorsque au moins une des parties à la concentration exerce tout ou partie de son activité dans un ou plusieurs départements d'outre-mer, dans le département de Mayotte, dans les îles Wallis et Futuna ou dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, la concentration doit être notifiée à l'Autorité de la concurrence si les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies:

Ø le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 75 millions d'euros ;

Ø le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé individuellement dans au moins un des départements ou collectivités territoriales concernés par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 15 millions d'euros, ou à 5 millions d'euros dans le secteur du commerce de détail sans qu'il soit nécessaire que ce seuil soit atteint par l'ensemble des entreprises concernées dans le même département ou la même collectivité territoriale ;

Ø l'opération n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004.

Cette disposition permet à l'Autorité de la concurrence de contrôler des concentrations non soumises au contrôle des concentrations en vertu des seuils du I et II de l'article L. 430-2 qui pourraient affaiblir substantiellement la concurrence dans certains départements et collectivités d'outre-mer.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La liberté d'entreprendre est un principe général à valeur constitutionnelle qui découle de l'article 4 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789102(*) .

Par la décision QPC du 30 novembre 2012, le Conseil constitutionnel consacre la double portée de la liberté d'entreprendre, qui comprend : "non seulement la liberté d'accéder à une profession ou à une activité économique mais également la liberté dans l'exercice de cette profession ou de cette activité"103(*).

Il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi104(*).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le règlement (CE) n° 139/2004 du 20 janvier 2004 du Conseil, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (« le règlement 139/2004 ») régit le contrôle des concentrations de dimension communautaire.

Certaines de ses dispositions sont directement applicables, notamment :

- L'article premier, qui fixe la limite des compétences respectives de la Commission européenne et des autorités de concurrence nationales en fonction des chiffres d'affaires des entreprises concernées par la concentration. Une concentration est de dimension communautaire lorsque le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial par l'ensemble des entreprises concernées représente un montant supérieur à cinq milliards d'euros, et que le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par au moins deux des entreprises concernées représente un montant supérieur à 250 millions d'euros, à moins que chacune des entreprises concernées réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total dans la Communauté à l'intérieur d'un seul et même État membre.

- L'article 5, qui précise le mode de calcul des chiffres d'affaires mentionnés à l'article L. 430-2 du code de commerce.

- Les articles 4 (paragraphes 4 et 5), 9 et 22, qui prévoient les mécanismes de renvoi d'une concentration entre la Commission et les autorités nationales de concurrence des États membres. D'une part, les renvois d'affaires de dimension européenne vers les autorités nationales de concurrence peuvent être effectués soit à la demande des entreprises (article 4§4), soit à la demande des États membres (article 9), éventuellement sur invitation de la Commission (article 9). D'autre part, des concentrations de dimension nationale peuvent être renvoyées devant la Commission à la demande des entreprises (Article 4§5) ou à la demande des États membres (article 22).

Les autres dispositions du règlement 139/2004 ne sont pas directement applicables au contrôle des concentrations par l'Autorité. Toutefois, dans un souci de cohérence et d'harmonisation avec la pratique européenne, l'Autorité se réfère, pour déterminer la portée des différentes notions relatives au contrôle des concentrations utilisées dans le code de commerce, aux notions mentionnées par le règlement 139/2004.

En outre, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne établie depuis son arrêt du 21 février 1973 « Continental Can » (aff. C-6/72) - et récemment rappelée dans son arrêt du 16 mars 2023 « Towercast » (aff. C-449/21) - affirme qu'une opération de concentration non soumise à un contrôle des concentrations, notamment parce que le chiffre d'affaires des entreprises concernées est inférieur aux seuils applicables, peut faire l'objet d'un examen contentieux au titre de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux abus de position dominante

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Une analyse comparative du nombre d'opérations notifiées auprès des autorités de concurrence nationales au sein de l'Union européenne permet d'appréhender le niveau important de notifications examinées en France.

En effet, sur les vingt-sept États membres de l'Union européenne (hors Luxembourg qui ne dispose pas d'un régime de contrôle des concentrations), seules quatre autorités de concurrence (en Allemagne, en Autriche, en France et en Pologne) reçoivent plus de 200 notifications par an. D'autres États membres tels que l'Italie, l'Espagne ou encore la Belgique reçoivent moins de 100 notifications par an105(*).

S'agissant de la Commission européenne, qui examine les opérations de concentration ayant une dimension européenne conformément au règlement n° 139/2004 précité, le nombre annuel de notifications n'est pas sensiblement supérieur à celui de la France, comme il ressort des Tableaux 1 et 2 ci-dessous.

Tableau 1 - Nombre d'opérations notifiées annuellement à l'Autorité de la concurrence française entre 2010 et 2023

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence

213

231

193

214

192

218

235

252

240

280

209

268

284

300

Variation annuelle

 

+8,5 %

-16,5 %

+10,9 %

-10,3 %

+13,5 %

+7,8 %

+7,2 %

-4,8 %

+16,7 %

-25,4 %

+28,2 %

+6,0%

+5,6 %

Tableau 2 - Nombre d'opérations notifiées annuellement à la Commission européenne entre 2015 et 2022

(source : site internet de la Commission européenne)

Année

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Nombre d'opérations notifiées à la Commission européenne

330

357

376

407

378

359

403

365

Par ailleurs, face à un nombre croissant de notifications, plusieurs juridictions ont procédé à un relèvement récent de leurs seuils de notification.

À titre d'exemple, l'Allemagne a procédé à un relèvement des seuils de notification à son autorité de concurrence nationale (« Bundeskartellamt ») en 2021. Face à un nombre croissant de notifications depuis au moins 2015, cette réforme visait essentiellement à simplifier le contrôle des concentrations notamment pour les petites et moyennes entreprises, et permettre au Bundeskartellamt de se concentrer sur les concentrations atteignant une taille critique. Ainsi, l'Allemagne a relevé de manière substantielle les deux seuils de chiffre d'affaires réalisés au niveau national (de 25 à 50 millions pour le chiffre d'affaires réalisé en Allemagne par au moins une entreprise concernée, et de 5 à 17,5 millions d'euros pour le chiffre d'affaires réalisé en Allemagne par une autre entreprise concernée), tout en laissant inchangé le seuil en chiffre d'affaires mondial de l'ensemble des entreprises concernées (500 millions d'euros).

A la suite de cette réforme, entrée en vigueur le 19 janvier 2021, l'Allemagne a pu observer une baisse manifeste d'opérations notifiées (environ 20 % entre 2021 et 2022).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le contrôle des concentrations en France relève déjà du domaine de la loi (article L. 430-1 et suivants du code de commerce). La révision des seuils applicables à ce contrôle implique dès lors une modification de la disposition législative prévue à l'article L. 430-2 du code de commerce.

Les trois séries de seuils de chiffre d'affaires qui fondent le contrôle des concentrations en France n'ont jamais été révisés depuis leur entrée en vigueur, c'est-à-dire depuis le 27 mars 2004 pour les seuils généraux - soit 20 ans - et depuis le 13 novembre 2008 pour les seuils commerce de détail et les seuils outre-mer - soit près de 16 ans.

La situation économique en France a pourtant fortement évolué sur cette période. Le niveau des prix en France a progressé depuis 2004 - et de manière particulièrement importante au cours des cinq dernières années - pour atteindre en décembre 2023 un taux d'inflation cumulé d'environ 39,3 %106(*). Le taux de croissance cumulée du Produit Intérieur Brut (ci-après PIB) nominal français a atteint 65 % sur la même période107(*). Cette évolution reflète, à proportion, l'augmentation du niveau moyen de chiffre d'affaires des entreprises actives sur le territoire national. Par conséquent, l'absence de mise à jour des seuils de contrôle des concentrations a mécaniquement entrainé une diminution du niveau relatif de ces seuils et a contribué à une augmentation significative du nombre d'opérations notifiées auprès de l'Autorité de la concurrence. Entre 2010 et 2022, ces dernières ont ainsi augmenté de 30 % (Tableau 1 ci-dessus).

Le champ d'application de l'obligation de notification des opérations de concentration ne permet désormais plus de concentrer le contrôle sur les seules opérations susceptibles de porter atteinte à la concurrence, faisant dès lors peser sur certaines entreprises, pour des opérations ne soulevant pas de préoccupations concurrentielles, une charge administrative importante et certains frais (notamment de conseil juridique et/ou économique), ainsi que des délais d'examen par l'Autorité de la concurrence retardant le délai de mise en oeuvre de l'opération.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le relèvement des seuils proposé, à savoir les seuils généraux et les seuils commerce de détail, feraient ainsi sortir du champ du contrôle 20 à 30% des opérations aujourd'hui notifiées, allégeant d'autant la charge administrative pour les entreprises concernées. Les seuils spécifiques à l'Outre-mer ne sont pas modifiés.

Comme il a été indiqué, l'absence de réévaluation des seuils généraux depuis 2004 et des seuils commerce de détail depuis 2008 et l'augmentation parallèle du taux d'inflation et du PIB nominal français ont mécaniquement fait diminuer le niveau relatif de ces seuils et ont contribué à une augmentation significative du nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence, conduisant cette dernière à progressivement consacrer des ressources croissantes à l'examen d'opérations qui, dans un nombre important de cas, ne posent pas de problèmes d'un point de vue concurrentiel.

En effet, la tendance du nombre de notifications à l'Autorité de la concurrence est en augmentation depuis 2010 ce qui implique mécaniquement une augmentation du nombre d'opérations notifiées à l'Autorité selon la procédure simplifiée, étant celles qui ne posent généralement pas de problèmes de concurrence. On constate par exemple que le nombre d'opérations notifiées selon la procédure simplifiée est en augmentation constante depuis 2019 (hors année 2020 marquée par la crise du Covid) passant de 199 opérations en 2019 à 246 opérations en 2022.

Année

Nb opérations notifiées selon la procédure simplifiée

2019

199

2020

160

2021

226

2022

246

Du point de vue des entreprises, le contrôle des concentrations, bien qu'indispensable à la mission de défense de l'ordre public économique menée par l'Autorité de la concurrence et au maintien de marchés concurrentiels, constitue une charge administrative, et ce d'autant plus lorsque les opérations concernées ne soulèvent pas de préoccupations concurrentielles sur les marchés en cause.

Dans ce contexte, il apparait nécessaire de mettre à jour le niveau de seuils en chiffre d'affaires déclenchant une obligation de notification auprès de l'Autorité de la concurrence afin de l'adapter à l'évolution de l'économie française au cours des vingt dernières années.

Cette réforme permettrait également de simplifier les procédures administratives des entreprises puisque le rehaussement des seuils de notification conduirait à dispenser la notification d'un nombre important d'opérations, non problématiques d'un point de vue concurrentiel. Dès lors, cela conduirait à une diminution des charges administratives induites par le contrôle de concentration, au bénéfice en particulier des petites et moyennes entreprises actives en France.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La révision du niveau des seuils proposée ne nécessite pas la création d'une nouvelle règle de droit. Elle implique une actualisation de l'article L. 430-2, I et II, du code de commerce. Aucune autre option n'a donc été envisagée.

3.2. OPTION RETENUE

La présente disposition réhausse les seuils de notification des concentrations devant l'Autorité de la concurrence, exprimés en chiffre d'affaires, par la modification de la disposition législative prévue à l'article L. 430-2 paragraphes I (seuils généraux) et II (seuils applicables au commerce de détail) du code de commerce.

Tableau 3 - Seuils révisés sur la base du taux de croissance cumulé du PIB nominal français en 2023 (depuis 2004 pour les seuils généraux et depuis 2008 pour les seuils commerce de détail)

 

Seuils en vigueur

Seuils révisés

(Révision arrondie (2023))

Seuils généraux

Français

50 000 000

80 000 000

Mondial

150 000 000

250 000 000

Seuils commerce de détail

Français

15 000 000

20 000 000

Mondial

75 000 000

100 000 000

Les taux de croissance du PIB nominal retenus pour le relèvement des seuils généraux et des seuils spécifiques au commerce de détail sont présentés ci-dessous :

Tableau 4 - Taux de croissance cumulé du PIB nominal français entre 2004/2008 et les années 2018 à 2023

(source : OCDE)

 

Taux de croissance cumulé du PIB 2018

Taux de croissance cumulé du PIB 2019

Taux de croissance cumulé du PIB 2020

Taux de croissance cumulé du PIB 2021

Taux de croissance cumulé du PIB 2022

Taux de croissance cumulé du PIB 2023

France - depuis 2004 (applicable aux seuils généraux)

39 %

43,4 %

36,2 %

46,9 %

55,1 %

65 %

France - depuis 2008

(applicable aux seuils commerce de détail)

18,7 %

22,5 %

16,3 %

25,5 %

32,5 %

40,7 %

Les seuils révisés sur cette base sont présentés dans le Tableau 5.

Il est proposé de laisser inchangés les seuils de notification de l'article L. 430-2 paragraphe III du code de commerce, applicables à certains départements et collectivités d'outre-mer, qui incluent un seuil local tout secteur confondu (15 millions d'euros) et un seuil local spécifique au commerce de détail (5 millions d'euros). Il convient de souligner que le seuil de 5 millions d'euros est suffisamment bas pour permettre à l'Autorité de contrôler un grand nombre d'opérations, y compris celles portant sur la cession d'un seul supermarché. Depuis l'introduction des seuils spécifiques aux DROM en 2008, l'Autorité a pu contrôler une quarantaine d'opérations de concentration dans des secteurs divers, principalement dans celui du commerce de détail, mais également dans le secteur du transport, immobilier et de la santé. Ces seuils, particulièrement bas, permettent à l'Autorité de la concurrence d'examiner au plus près les évolutions des marchés ultramarins, lesquels se caractérisent par un degré de concentration souvent élevé, et dans lesquels les conditions de concurrence demeurent sensibles et le coût de la vie demeure particulièrement élevé.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La révision est opérée aux paragraphes I et II de l'article L. 430-2 existant, en remplaçant les seuils actuels par les seuils révisés, soit :

« I.- Est soumise aux dispositions des articles L.430-3 et suivants du présent titre toute opération de concentration, au sens de l'article L.430-1, lorsque sont réunies les trois conditions suivantes :

- le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 250 millions d'euros [anciennement 150 millions d'euros] ;

- le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 80 millions d'euros [anciennement 50 millions d'euros] ;

- l'opération n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.

II.- Lorsque deux au moins des parties à la concentration exploitent un ou plusieurs magasins de commerce de détail, est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du présent titre toute opération de concentration, au sens de l'article L. 430-1, lorsque sont réunies les trois conditions suivantes :

- le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 100 millions d'euros [anciennement 75 millions d'euros] ;

- le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France dans le secteur du commerce de détail par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 20 millions d'euros [anciennement 15 millions d'euros] ;

- l'opération n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, précité. »

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le droit des concentrations français s'articule avec le droit des concentrations européen et plus particulièrement avec le règlement n° 139/2004 du 20 janvier 2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises précité.

Le relèvement des seuils de notification en France n'aurait pas d'impact sur le contrôle des concentrations exercé par la Commission européenne, dans la mesure où les seuils de notification en France resteraient inférieurs aux seuils de notification européens, et que l'article L. 430-2 continuerait à prévoir qu'une opération de concentration ne peut être notifiée à l'Autorité de la concurrence lorsqu'elle rentre dans le champ de compétence de la Commission tel que défini par le règlement 139/2004 précité.

Enfin, aucune disposition du règlement n° 139/2004 ne fait référence au niveau des seuils de contrôle des concentrations défini par chaque État membre, qui restent libres de déterminer le niveau qu'ils estiment pertinent.

En conséquence, l'articulation entre le droit des concentrations français et le droit des concentrations européen resterait inchangée avec la révision des seuils proposée.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

L'impact économique d'une révision des seuils de concentration peut être mesuré en évaluant le nombre d'opérations qui n'auraient pas été notifiées à l'Autorité de la concurrence, dans l'hypothèse d'une révision « rétroactive » de ces seuils entre 2018 et 2022, sur la base du taux de croissance cumulé annuel du PIB nominal français, depuis 2004 jusqu'à l'année considérée pour les seuils généraux, et depuis 2008 jusqu'à l'année considérée pour les seuils commerce de détail.

Cette évaluation permet également d'identifier, parmi les opérations qui n'auraient pas été notifiées, celles qui ont soulevé des préoccupations de concurrence au terme de l'analyse de l'Autorité de la concurrence - c'est-à-dire les opérations de concentrations ayant nécessité des engagements ou ayant été interdites.

Sur la base des résultats obtenus, le nombre d'opérations qui n'auraient pas été notifiées à l'Autorité de la concurrence sur la période 2018 à 2022 est présenté ci-dessous :

Tableau 4 - Nombre et type d'opérations qui n'auraient pas été notifiées à l'Autorité de la concurrence sur la période 2018-2022 - révision des seuils annuelle en fonction du taux de croissance cumulé du PIB nominal courant français entre 2004/2008 et l'année considérée (2018 à 2022)

 

Seuils généraux

(L. 430-2 I)

Seuils commerce de détail (L. 430-2 II)

Global

 

En valeur absolue

En valeur relative

En valeur absolue

En valeur relative

En valeur absolue

En valeur relative

Nombres d'opérations non notifiées

266

37 %

112

20 %

378

29 %

Simplifiées non notifiées

(hors retraits des simplifiées)

210

39 %

99

20 %

309

30 %

Phase 1 sans engagements non notifiées (incluant les retraits)

39

35 %

2

8 %

41

30 %

Phase 1 avec engagements non notifiées

3

14 %

0

0%

3

10 %

Phase 2 (incluant les retraits)

0

0 %

0

0%

0

0 %

Il ressort de cette analyse que 378 opérations de concentrations n'auraient pas été notifiées à l'Autorité de la concurrence entre 2018 et 2022, dont :

- 309 opérations ayant abouti sur une décision simplifiée ;

- 41 opérations ayant abouti sur une décision de phase I sans engagements ;

- 3 opérations ayant abouti sur une décision de phase I avec engagements ;

- aucune opération ayant abouti sur une décision de phase II (examen approfondi).

En proportion, environ 37 % des opérations notifiées en vertu des seuils généraux et environ 20 % des opérations notifiées en vertu des seuils commerce de détail ne feraient plus l'objet d'un contrôle par l'Autorité de la concurrence.

On observe que très peu d'opérations soulevant des risques pour la concurrence auraient été exclues du périmètre de contrôle de l'Autorité de la concurrence. L'impact d'une telle révision concernerait, en valeur absolue comme en valeur relative, surtout les opérations relevant de la procédure de traitement simplifié, qui ne posent pas de problème de concurrence. Dans le secteur du commerce de détail plus particulièrement, l'application des nouveaux seuils ne devrait en principe pas modifier la profondeur du contrôle de l'Autorité de la concurrence, dans la mesure où seules deux opérations autorisées en phase 1 sans engagements n'auraient pas été notifiées, la totalité des autres opérations concernées étant des procédures simplifiées.

Ces résultats ne préjugent pas du nombre de concentrations potentiellement problématiques à venir qui ne seraient pas examinées par l'Autorité de la concurrence compte tenu du chiffre d'affaires des entreprises concernées.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La révision des seuils de contrôle des concentrations est également de nature à réduire la charge administrative relative à l'obligation de notification qui incombe aux entreprises et plus particulièrement aux petites et moyennes entreprises, qui sont le plus souvent concernées par les opérations ne soulevant pas de problème de concurrence.

Sur la base des mêmes hypothèses retenues pour le calcul de l'impact de la réforme sur le nombre d'opérations notifiées à l'Autorité de la concurrence, le nombre d'entreprises, y compris de petites et moyennes entreprises, qui n'auraient pas eu à notifier leurs opérations de concentration dans ces circonstances, est présenté dans le tableau ci-dessous.

Tableau 5 - Nombre d'entreprises, y compris de petites et moyennes entreprises, qui n'auraient pas notifié leurs opérations de concentration à l'Autorité de la concurrence (entre 2018 et 2022)

Seuils

Nombre d'entreprises qui auraient échappé à l'obligation de notifier

Part de petites et moyennes entreprises (en %)

Seuils généraux

500

12 %

Seuils commerce de détail

300

60 %

Il ressort des chiffres ci-dessus qu'environ 800 entreprises n'auraient pas eu à notifier leurs opérations de concentration à l'Autorité de la concurrence entre 2018 et 2022, et n'auraient dès lors pas eu à soutenir la charge administrative afférente à une telle notification (recueil des informations pertinentes, échanges avec les conseils, etc.). Une révision des seuils relatifs au commerce de détail aurait un impact relativement plus significatif pour les petites et moyennes entreprises, puisque ces dernières représentent la majorité des entreprises concernées par les opérations notifiées en vertu de ces seuils.

4.2.3. Impacts budgétaires

La baisse du nombre d'opérations examinées impliquera logiquement une mobilisation moins massive des effectifs de l'Autorité et de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) pour l'activité de contrôle des concentrations.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Sans objet.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La réévaluation des seuils de notification permettrait à l'Autorité de la concurrence une allocation plus efficiente et plus efficace de ses ressources dédiées au contrôle des concentrations, déjà relativement limitées.

En effet, outre l'augmentation croissante du nombre d'opérations de concentration notifiées à l'Autorité de la concurrence, on assiste à une complexification de certains dossiers ainsi qu'à un élargissement du champ du contrôle de celle-ci.

D'une part, le rehaussement des seuils permettrait de diminuer le nombre d'opérations à faible impact concurrentiel notifiées à l'Autorité de la concurrence, et dès lors d'affecter les ressources nécessaires à l'examen de ces opérations à des dossiers plus problématiques, et donc de rendre son contrôle plus efficace au bénéfice de l'économie française. Il s'agit en particulier des opérations faisant l'objet d'une analyse approfondie (phase 2), en hausse ces dernières années. Ces dossiers nécessitent en effet l'engagement de ressources importantes, se traduisant par la constitution d'équipes de rapporteurs plus nombreux et mobilisées pendant au moins plusieurs mois pour le traitement d'une seule opération.

D'autre part, des évolutions récentes en matière de contrôle des concentrations sont venues élargir le champ du contrôle de l'Autorité de la concurrence. Il s'agit à titre d'exemple de la possibilité pour l'Autorité de la concurrence de demander le renvoi à la Commission européenne d'une opération de concentration ne franchissant pas les seuils de l'article L 430-2 du code de commerce sur le fondement de l'article 22 du règlement européen sur les concentrations ; de la possibilité d'examiner les opérations de concentration portées à la connaissance de la Commission européenne par les contrôleurs d'accès conformément à l'article 14 du règlement sur les marchés numériques (DMA) ; ou encore, à la suite de l'arrêt « Towercast » de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 16 mars 2023 (aff. C-449/21), d'examiner une opération de concentration sur le fondement de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux abus de position dominante.

Enfin, un renforcement de la coopération européenne et internationale a eu lieu ces dernières années en matière de contrôle des concentrations. Ainsi, à titre d'exemple, il est fréquent que la Commission européenne renvoie l'examen de certaines opérations de concentration à l'Autorité de la concurrence, notamment sur le fondement de l'article 4(4) du règlement n° 139/2004 précité. Entre 2009 et 2022, la Commission européenne a ainsi renvoyé 35 dossiers à l'Autorité de la concurrence estimant qu'elle était la mieux placée pour les instruire, compte tenu de son expérience et du fait que les effets des opérations se produisaient principalement sur le territoire français. En 2024, plusieurs de ces renvois concernent l'acquisition de points de vente du groupe Casino par des enseignes concurrentes, telles qu'Auchan et Carrefour.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Sans objet.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Sans objet.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La consultation menée auprès de l'Autorité de la concurrence n'est pas rendue obligatoire par les textes et a été menée dans le cadre d'échanges informels inter-institutionnels.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les nouvelles dispositions entrent en vigueur trois mois après la publication de la loi au Journal officiel de République française afin de laisser le temps aux entreprises d'évaluer la contrôlabilité des opérations envisagées sur la base des nouveaux seuils, et à l'Autorité d'évaluer l'issue des opérations en cours de pré-notification sur la base des anciens seuils.

5.2.2. Application dans l'espace

La réforme s'applique sur l'ensemble du territoire national. Les seuils spécifiques relatifs à l'outre-mer ne sont pas modifiés.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne requiert pas de texte d'application.

TITRE V - FACILITER ET SÉCURISER LE RÈGLEMENT DES LITIGES

CHAPITRE IER - ELARGIR LES DISPOSITIFS NON-JURIDICTIONNELS DE RÈGLEMENT DES LITIGES

Article 9 - Généraliser les dispositifs de médiation entre les entreprises et les organismes publics, les promouvoir et en simplifier l'accès

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

1.1.1. L'émergence de la médiation dans les relations des usagers, personnes physiques et morales, avec l'administration

Depuis les années 1970, différents textes ont entrepris de renouveler les modalités de l'action publique dans les relations avec les usagers, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises : loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 relative au médiateur de la République108(*), loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ou encore loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 sur l'accès aux documents administratifs, loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs et loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'Administration et le public.

Dès le début des années 1990, le Conseil d'Etat a soutenu la mise en oeuvre des modes amiables de règlement des différends avec l'administration109(*).

Il a ensuite été précisé, par une circulaire du 6 février 1995110(*), que la recherche d'une solution amiable devait être envisagée dans tous les cas où elle permettrait d'éviter un contentieux inutile et coûteux, tant pour l'administration que pour les personnes intéressées, physiques ou morales.

Sur le fondement de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens, a été adopté un  code des relations entre le public et l'administration (CRPA), qui est entré en vigueur le 1er janvier 2016.

C'est à l'occasion de cette codification qu'a été introduite une disposition générale permettant au public (personnes physiques ou morales de droit privé) d'engager une procédure de conciliation ou de médiation en vue du règlement amiable d'un différend avec l'administration, avant qu'une procédure juridictionnelle ne soit, en cas d'échec, engagée ou menée à son terme (article L. 421-1 du CRPA).

Dans le domaine des relations contractuelles, les articles L. 2197-1 du code de la commande publique pour les marchés publics et L. 3137-1 pour les contrats de concession, disposent que « les parties à un contrat administratif peuvent recourir à un tiers conciliateur ou médiateur dans les conditions fixées par les chapitres Ier et II du titre II du livre IV du code des relations entre le public et l'administration. ».

La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (dite loi « ESSOC ») a posé les fondements d'un changement de posture dans le dialogue avec l'administration, notamment à travers l'institution du droit à l'erreur qui permet de se tromper dans des déclarations à l'administration sans risquer de sanction dès le premier manquement111(*), ainsi que des dispositifs de médiation spécifiques hors du champ des relations contractuelles.

Sans préjudice des dispositifs existants, l'article 36 de la loi ESSOC a ainsi mis en place, pour une durée de trois ans, un régime expérimental élargi de médiation, prévu pour toutes les administrations dans leurs relations avec les entreprises (administrations et établissements publics de l'Etat, collectivités territoriales et organismes de sécurité sociale).

Cette médiation dite « élargie » a été mise en oeuvre dans le respect des règles relatives aux délais de recours et de prescription prévues à l'article L. 213-6 du code de justice administrative, prévoyant l'interruption des délais de recours contentieux et la suspension des prescriptions lors de l'ouverture de la médiation. Ces délais recommencent à courir lorsque la médiation est formellement terminée et, s'agissant des délais de prescription, pour une durée minimale de six mois.

L'expérimentation de médiation entre entreprises et administration a été confiée au Médiateur des entreprises par le décret n° 2018-919 du 26 octobre 2018. Conformément à l'article 37-1 de la Constitution, ce décret a défini le périmètre de l'expérimentation. Il identifie ainsi quatre territoires : les régions Centre-Val de Loire, Grand Est, Normandie, et Provence-Alpes-Côte d'Azur, et quatre secteurs économiques de mise en oeuvre : la construction, l'industrie manufacturière, l'information et la communication.

Le médiateur des entreprises

Institué en 2010 à la suite des Etats Généraux de l'industrie, la mission du Médiateur des entreprises112(*) était initialement centrée sur la résolution des différends conventionnels entre acteurs économiques (différends inter-entreprises et litiges liés à l'exécution de la commande publique113(*)). A l'occasion de l'expérimentation de médiation prévue par la loi ESSOC, elle a été étendue aux différends non contractuels entre entreprises et administrations, en l'absence de dispositifs déjà existants, par exemple dans le domaine fiscal, s'agissant du Médiateur des ministères économiques et financiers114(*).

Le Conseil d'Etat a posé le cadre de la mission générale de promotion des modes amiables de règlement des différends confiée au Médiateur des entreprises, dans une décision du 17 mars 2017, M. Perez et Ordre des avocats de Paris :

Il propose « gratuitement à tous les acheteurs et à toutes les entreprises, quelles que soient leurs ressources, et donc notamment à ceux disposant de moyens limités, un dispositif de médiation. Il exerce la mission d'intérêt général, qui relève de l'Etat, de développer les modes alternatifs de règlement des litiges, corollaire d'une bonne administration de la justice ».

L'expérimentation s'est formellement achevée à la fin du mois d'octobre 2021 et a fait l'objet d'un rapport au Parlement.

D'un point de vue quantitatif, 959 demandes de médiation portant sur les relations entre entreprises et administrations ont été traitées par le Médiateur des entreprises entre 2019 et 2021 (14,2 % des saisines sur la période), qu'il s'agisse des aides aux entreprises, du soutien à l'innovation, ou encore de blocages survenus dans la mise en oeuvre de procédures administratives, avec un taux de résolution moyen de 78,4% tous motifs de saisine confondus et dans un délai de traitement moyen de trois mois.

Cette médiation élargie a été mise en oeuvre conformément aux principes fondamentaux relatifs à la conduite des médiations, posés en France dès la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative (article 21115(*)), adoptés en droit européen dans la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (article 3)116(*), et repris dans le code de justice administrative par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Ces principes fondamentaux impliquent que les médiateurs accomplissent leur mission avec impartialité, compétence, indépendance et diligence.

De même, la médiation est soumise au principe de confidentialité dans les conditions prévues à l'article L. 213-2 du code de justice administrative. A ce titre, les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d'une instance judiciaire ou arbitrale sans l'accord des parties.

Le médiateur agit comme un intervenant impartial et indépendant : il ne prend parti ni pour le demandeur, ni pour l'administration mais oeuvre pour une solution mutuellement acceptable. Dans cet objectif, la médiation permet à l'entreprise et à l'organisation publique en charge de son dossier de nouer ou de renouer le dialogue et de lever les malentendus et les incompréhensions, préalable à la recherche d'une solution, dans le respect de la légalité.

Cette expérimentation a montré les bénéfices de la médiation sur la qualité des relations entretenues entre les entreprises et les administrations :

- Bénéfice pédagogique pour la compréhension de l'action administrative : l'intervention du médiateur est l'occasion de faire oeuvre de pédagogie auprès des parties pour une meilleure compréhension des points de vue ;

- Bénéfice d'un réexamen rapide de la situation de l'entreprise concernée (trois mois en moyenne), notamment à la lumière des précisions ou des éléments d'appréciation nouveaux apportés. Les demandes orientées vers les autres dispositifs de médiation institutionnelle sont accompagnées afin d'épargner à l'entreprise des démarches redondantes, génératrices de délais supplémentaires ;

- Bénéfice d'une mise en oeuvre concrète du « droit à l'erreur », également consacré par la loi ESSOC.

L'étude annuelle du Conseil d'Etat de 2023 «  Réussir le dernier kilomètre de l'action publique » cite notamment le Médiateur des entreprises au titre « des dispositifs (qui) reposent sur une logique de tiers de confiance. Ils apparaissent très utiles et devraient être encouragés et développés ».

Les médiateurs des services au public

Certaines administrations en relation avec les entreprises ont déjà mis en place des dispositifs de médiation permettant d'accueillir et de traiter à l'amiable les situations litigieuses : par exemple, le médiateur des ministères économiques et financiers (décret n° 2002-612 du 26 avril 2002 instituant un médiateur du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie), le médiateur dans les organismes de sécurité sociale dont les URSSAF (article L. 217-7-1 code de la sécurité sociale), le médiateur de l'Agence de services et de paiement. Ces médiateurs dits « institutionnels » interviennent, selon le cas, en préconisant une solution ou en oeuvrant à une solution commune sans formuler de recommandation

Les cadres juridiques des médiateurs institutionnels sont synthétisés dans un tableau mis à disposition sur son site par le Club des médiateurs des services au public.

Selon les statistiques consolidées sur le site, ces médiateurs institutionnels ont été saisis en 2020 de 70 500 demandes en provenance de particuliers et d'entreprises, avec une augmentation sensible liée au contexte exceptionnel de la crise sanitaire. 47 000 demandes ont été jugées recevables. Les médiateurs ont donné satisfaction totale ou partielle à près des deux tiers des demandes formulées par les requérants.

Par leur positionnement, leur expérience, leur autorité morale et professionnelle, et par l'indépendance dont ils disposent au sein de l'institution, ces médiateurs ont un rôle singulier : non seulement ils favorisent le règlement des différends mais ils contribuent également à les prévenir par leurs préconisations d'amélioration des processus ( https://clubdesmediateurs.fr).

1.1.2. Une base législative spécifique pour l'institution facultative de médiateurs territoriaux

La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique encadre l'institution de médiateurs territoriaux par les communes, les départements, les régions et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre117(*).

L'instauration de médiateurs territoriaux ne présente pas de caractère obligatoire. Toutefois, si un médiateur existe ou est créé, il doit impérativement respecter ces dispositions. Le champ de compétence du médiateur n'est pas formellement borné, puisque le texte prévoit que « la délibération qui institue le médiateur territorial définit le champ de ses compétences ».

La saisine du médiateur territorial interrompt les délais de recours contentieux et suspend les prescriptions dans les conditions prévues à l'article L. 213-6 du code de justice administrative.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL ET DROIT EUROPÉEN EN VIGUEUR

Dans sa décision n° 2019-778 du 21 mars 2019 relative à la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, qui vise notamment à développer les modes de règlement alternatifs des différends, en subordonnant à une tentative de règlement amiable préalable la recevabilité de certaines demandes en matière civile, le Conseil constitutionnel a affirmé que la démarche du législateur visant à réduire le nombre des litiges soumis au juge participe de la poursuite de l'objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice118(*).

En droit français, comme en droit européen, la médiation est avant tout une approche de résolution des différends ; elle est appréhendée en termes de processus et de principes à respecter pour la conduire efficacement. Des codes de conduite et d'éthiques complètent ce cadre général119(*).

Le Conseil national de la médiation, récemment mis en place par le décret n° 2022-1353 du 25 octobre 2022 a notamment vocation à proposer un recueil de déontologie applicable à la pratique de la médiation et à proposer des référentiels nationaux de formation des médiateurs et faire toute recommandation sur la formation120(*).

La loi n° 95-125 du 8 février 1995 précitée a ainsi posé, dans des termes généraux, le cadre de la médiation conventionnelle et judiciaire par la définition du « processus de médiation » et des règles générales, « sans préjudice de règles complémentaires propres à certaines médiations ou à certains médiateurs » (article 21-1).

La directive européenne du 21 mai 2008 précitée portant sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale reste tout aussi générale en visant : « un processus structuré, quelle que soit la manière dont il est nommé ou visé, dans lequel deux ou plusieurs parties à un litige tentent par elles-mêmes, volontairement, de parvenir à un accord sur la résolution de leur litige avec l'aide d'un médiateur.

Ce processus peut être engagé par les parties, suggéré ou ordonné par une juridiction ou prescrit par le droit d'un État membre » dont sont exclues celles intervenant dans le cadre d'une procédure judiciaire.

La transposition de la directive par l'ordonnance du 16 novembre 2011 a modifié l'article 21 de la loi de 1995 précitée et défini la médiation en matière civile comme « tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige »,

L'article 1530 du code de procédure civile définit la médiation et la conciliation conventionnelles dans les mêmes termes, et précise que le tiers choisi par les parties accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence :

« La médiation et la conciliation conventionnelles régies par le présent titre s'entendent, en application des articles 21 et 21-2 de la loi du 8 février 1995 susmentionnée, de tout processus structuré, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers choisi par elles qui accomplit sa mission avec impartialité, compétence et diligence ».

Le code de justice administrative (CJA) a également intégré la définition de la médiation issue de la directive du 21 mai 2008 (article 213-1).

Enfin, les articles L. 421-1 et L. 421-2 du CRPA dans leur rédaction issue de l'ordonnance n°2015-1341 du 23 octobre 2015, prévoient la possibilité d'une médiation ou d'une conciliation pour le traitement des différends entre l'administration et le public. Ces deux modes de règlement amiable ne sont pas définis par les textes ou la jurisprudence et reposent en pratique sur l'intervention d'un tiers impartial et indépendant.

S'agissant des relations entre l'administration et le public, l'intervention d'un tiers indépendant, médiateur identifié dans les administrations, s'inscrit dans l'esprit de la Recommandation du Conseil de l'Europe sur la promotion des modes alternatifs de règlement des litiges entre les autorités administratives et les personnes privées adoptée par le Comité des Ministres le 5 septembre 2001 ( R. 2001.9)

« Considérant les principaux avantages des modes alternatifs de règlement des différends administratifs peuvent être, éventuellement et selon les cas, des procédures simplifiées et assouplies avec une plus grande célérité et un moindre coût, le règlement à l'amiable, le règlement par des spécialistes, le recours à l'équité et non pas seulement à la légalité stricte, et une plus grande discrétion ».

Cette recommandation précise que « dans le cas s'y prêtant, il doit être possible de résoudre les litiges administratifs par des moyens autres que le recours aux tribunaux (...) ».

Le groupe de travail permanent de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ), créé en 2006, est chargé de faciliter la mise en oeuvre des recommandations du comité des ministres aux États membres du Conseil de l'Europe. Il a diffusé le 7 décembre 2007, des lignes directrices visant à améliorer la mise en oeuvre de la Recommandation sur les modes alternatifs de règlement des litiges entre les autorités administratives et les personnes privées -

Ces lignes directrices reposent avant tout sur des bonnes pratiques de conduite des modes amiables de règlement des différends entre les administrations et le public : information nécessaire sur la possibilité d'avoir recours aux modes alternatifs, indépendance et l'impartialité des conciliateurs, des médiateurs et des arbitres, garantie d'une procédure équitable permettant notamment de respecter les droits des parties et le principe d'égalité.

En matière d'articulation avec les voies de recours, ces lignes directrices préconisent en revanche d'ancrer dans les textes la suspension des délais de prescription au moment de l'ouverture des médiations, conciliations ou arbitrages.

C'est l'option retenue par la mesure proposée afin homogénéiser le cadre de la médiation institutionnelle, et surtout les droits des demandeurs, quel que soit le médiateur saisi.

1.3. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Les pays de common law (Royaume-Uni, États-Unis, Canada, Nouvelle- Zélande et ancien Commonwealth) sont traditionnellement considérés comme plus ouverts aux mécanismes alternatifs de résolution des litiges (Alternative Dispute Resolution, ADR) que les pays de droit écrit romano-germanique (Allemagne, Espagne, France, Italie...)121(*).

« S'agissant des relations avec l'administration, sous la forme de contre-pouvoirs démocratiques, la meilleure illustration en est fournie par l'institution de l'ombudsman créée, en 1809 par le roi de Suède, pour initialement contrôler l'application que l'administration faisait de ses lois. Ce n'est qu'au cours du XXe siècle qu'il aura pour compétence de réguler les conflits entre les citoyens et l'administration »122(*).

L'International Ombudsman Institute répertorie à ce jour dans le monde près de 120 ombudsmans123(*).

Au-delà de la diversité des situations et des statuts qui leur sont reconnus à travers le monde, les ombudsmans ont une fonction centrale de contrôle de l'action administrative, à l'instar du Défenseur des droits en France.

Le Défenseur des droits dispose en effet d'une compétence générale pour faire respecter les droits des usagers des services publics. Il peut être saisi, ou se saisir d'office pour des difficultés rencontrées avec une administration de l'État (préfecture, ministère, centre des impôts, consulat...), une collectivité locale, ou encore un organisme chargé de la gestion d'un service public : caisses d'allocations familiales (CAF), caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), Pôle emploi, fournisseurs d'énergie (EDF, GDF), gestionnaires de transports publics (SNCF), etc.124(*)

S'il peut mener des médiations, conciliations et proposer des transactions, le Défenseur des droits dispose, de par son statut d'autorité administrative indépendante, de pouvoirs de contrôle très étendus à l'égard des administrations mises en cause, qui vont bien au-delà du cadre juridique général mis en place pour les médiations : pouvoirs d'enquête élargis (audition, communication de pièces), et s'il estime qu'une faute a été commise, engagement de poursuites disciplinaires auprès de l'autorité compétente, et enfin possibilité de présenter des observations devant les juridictions judiciaires et administratives à l'appui d'un réclamant.

S'agissant des différends entre entreprises et administrations, les interventions du Défenseur des droits et des médiateurs institutionnels s'organisent, de façon pragmatique, par la voie de conventions, permettant l'information et l'orientation ou la réorientation des demandeurs. Plusieurs textes instituant des médiateurs institutionnels prévoient formellement qu'ils sont les correspondants du Défenseur des droits125(*).

Par ailleurs, le positionnement du Défenseur des droits garantit, en droit et dans les faits, la possibilité d'une saisine par les requérants qui s'estimeraient insatisfaits à la suite d'une médiation institutionnelle.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le recours à un vecteur législatif s'impose pour trois raisons.

2.1.1. Les dispositifs de médiation sont encore incomplets dans les administrations en relation directe avec les entreprises

En dehors du champ des relations contractuelles, l'engagement effectif des modes amiables de règlement des différends n'est pas encore suffisamment développé pour les différends entre entreprises et administrations.

Comme l'a illustré la consultation publique menée sur « make.org » entre le 15 novembre et le 29 décembre 2023, en amont de la préparation du présent projet de loi, les entreprises expriment une demande d'évolution sur la nature et le cadre du dialogue avec l'administration126(*), en particulier le besoin d'établir ou de rétablir un dialogue inexistant ou rompu (procédure bloquée, refus d'autorisation ou d'agrément, aide tardant à être versée, divergence d'interprétation sur l'application d'un texte, etc.).

Ces situations contribuent à alimenter une forme de défiance réciproque entre les entreprises et les organismes publics, voire à nourrir un rejet des politiques publiques. Du côté des entreprises, ces blocages et incompréhensions accroissent la charge administrative, et les privent de la visibilité nécessaire à la poursuite ou au développement de leur activité. Du côté des administrations, ils sont sources de contentieux potentiellement longs et coûteux.

L'expérience des médiations institutionnelles existantes et l'expérimentation mise en oeuvre dans le cadre de la loi ESSOC précitée démontrent que la médiation constitue une réponse efficace à ces difficultés.

Or, à titre d'exemple, et sans préjudice des recours administratifs susceptibles d'être activés, il n'existe pas de médiation institutionnelle ouverte aux entreprises permettant de traiter des différends, par exemple, dans des domaines relevant du travail, de la formation professionnelle, de compétences du ministère de l'intérieur, ou touchant à la protection des populations : réglementations sanitaires, protection du consommateur, accès aux professions réglementées, etc. De même, le Conseil d'Etat a récemment précisé les opportunités de médiation encore inexploitées en matière du droit de l'urbanisme127(*).

Les dispositifs existants sont aussi insuffisamment valorisés auprès des entreprises et des services publics. Une communication forte et récurrente sur la médiation en direction des acteurs privés et publics est indispensable. Il s'agit d'ancrer un changement de posture et de diffuser en interne une culture de la médiation dans les administrations.

Enfin, le recours à un vecteur législatif est rendu nécessaire par le champ couvert : il s'agit en effet de mettre à la disposition du public les services d'un médiateur non seulement dans les administrations de l'Etat, dans ses établissements publics administratifs et plus généralement dans les organismes de droit public, mais aussi dans les organismes de droit privé chargés d'une mission de service public administratif.

2.1.2. L'interruption des délais de recours contentieux en cas de saisine du médiateur doit être généralisée

Les conséquences de la mise en oeuvre des processus de médiation sur les délais de recours contentieux et les prescriptions ne sont pas homogènes. Selon les médiateurs saisis, les délais de recours contentieux sont soit interrompus, soit suspendus ou continuent à courir.

Le développement de la médiation, tout en préservant le droit à un recours effectif, impose une clarification et la généralisation par la loi de l'interruption des délais de recours contentieux et de la suspension des prescriptions. La préservation des délais de recours est un enjeu majeur de l'attractivité et donc du développement de la médiation.

Cette mesure relève du domaine de la loi.

2.1.3 Le titre II du Livre IV du code des relations entre le public et l'administration est modifié pour unifier la terminologie du règlement amiable des différends avec l'administration sous la dénomination unique de « médiation »

La mise en oeuvre du dispositif de médiation entre les entreprises et l'administration est l'occasion d'unifier la terminologie du code des relations entre le public et l'administration, qui prévoit aujourd'hui la possibilité d'une « conciliation » ou d'une médiation » pour la résolution amiable des différends avec l'administration, autour de la notion unique et plus lisible de « médiation ».

En effet, ni les textes ni la jurisprudence ne donnent à la conciliation, en droit public, un contenu différent qui justifie le maintien de ces deux notions dans le CRPA.

Afin de lever toute ambiguïté sur la portée respective de l'une ou de l'autre des terminologies, il est opportun de prévoir un seul régime de règlement amiable des litiges dans le titre II du Livre IV du CRPA consacré au règlement des différends avec l'administration, sous la dénomination de médiation.

Cette modification assure une mise en cohérence du code des relations entre le public et l'administration avec le code de justice administrative pour les modes de règlement amiable des litiges relevant de la compétence du juge administratif. L'opportunité de cette mise en cohérence a été soulignée par le législateur à l'occasion de l'adoption de la loi J21 précitée128(*).

Elle conduit à supprimer la notion de « conciliation » dans les dispositions suivantes du titre II du Livre IV du CRPA :

- intitulé du chapitre 1er « conciliation et médiation dans un cadre non juridictionnel »,

- article L421-1 qui pose le principe général du règlement amiable avant l'engagement d'une procédure juridictionnelle,

- intitulé du chapitre 2 « conciliation et médiation dans un cadre juridictionnel ».

Par ailleurs, s'agissant des dispositions d'application relatives à la médiation dans un cadre non juridictionnel, la mise en oeuvre du dispositif de médiation entre les entreprises et les administrations conduit à modifier la rédaction de l'article L421-2 du CRPA129(*).

Cet article n'a pas fait l'objet de mesures règlementaires spécifiques et s'avère obsolète130(*).

La nouvelle rédaction pose le principe général selon lequel l'administration, à l'exclusion des collectivités territoriales mentionnées à l'article L. 1112-34 du code général des collectivités territoriales, met à la disposition du public les services d'un médiateur dans des domaines et dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat. 

Les modifications rédactionnelles apportées au CRPA contribuent à une meilleure lisibilité des dispositions relatives au règlement amiable des différends avec l'administration et relèvent du domaine de la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Qualité du dialogue entre entreprises et administration

Le présent projet de loi s'inscrit dans la continuité de la loi ESSOC précitée en renforçant la relation de confiance entre les entreprises et l'administration.

La mesure visant à généraliser et faciliter l'accès à des services de médiation pour accueillir et traiter les différends entre les entreprises et les administrations permet d'ouvrir ou rouvrir des voies de dialogue apaisé à un stade précoce. Elle contribue à restaurer la confiance dans les politiques publiques.

La généralisation et la simplification de l'accès aux dispositifs de médiation traduit un véritable changement de posture de l'administration dans ses relations avec les entreprises. Elle vise à diffuser une culture du dialogue et de la médiation dans l'ensemble de ses services.

Elle contribue ainsi à réduire la charge administrative et les délais de traitement des blocages qui pèsent sur la vie des entreprises et leur développement.

Sécurité juridique et droit au recours effectif

Il est nécessaire d'homogénéiser les règles, actuellement disparates, sur l'effet interruptif des délais de recours en cas de saisine d'un médiateur institutionnel.

Cette mesure contribue à la clarté et à la lisibilité du droit ainsi reconnu aux demandeurs en matière d'accès à la médiation. Elle évite de procéder à une saisine parallèle du juge, tout en préservant leur droit au recours en cas de médiation infructueuse. Enfin, elle renforce à l'attractivité des modes amiables de règlement des différends avec l'administration.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. MISE EN PLACE D'UNE OFFRE DE SERVICE DE MÉDIATION DANS LES ADMINISTRATIONS EN RELATION AVEC LES ENTREPRISES

Trois options ont été identifiées pour développer le recours à la médiation entre les administrations et les entreprises.

Première option : mener des actions de communication pour mieux faire connaître, d'une part, les médiations institutionnelles existantes, d'autre part, la possibilité de saisir le juge pour demander la désignation d'un médiateur.

Cette option, reposant sur l'information et la sensibilisation des acteurs économiques et des administrations pour les inviter à recourir davantage aux dispositifs existants, voire à s'emparer de la possibilité offerte par le code de justice administrative de saisir le juge pour obtenir la désignation d'un médiateur en cas de litige, ne serait pas efficiente. Elle serait sans effet sur les administrations qui n'ont pas déjà mis en place un tel dispositif. Elle ne permettrait pas de généraliser la médiation à l'ensemble des administrations en relation avec les entreprises, ni d'en simplifier l'accès en mettant à la disposition de ces dernières les services d'un médiateur.

Deuxième option : rendre la médiation obligatoire pour tous les différends entre les entreprises et les administrations de l'Etat.

La deuxième option consisterait à généraliser la médiation préalable obligatoire expérimentée dans le cadre de la loi ESSOC. Cette expérimentation a été introduite dans la loi par voie d'amendement au stade de la discussion en séance publique à l'Assemblée nationale, le ministre de la justice ayant accepté la proposition des rapporteurs.

« Faisant le constat du peu de succès des recours gracieux ou hiérarchiques dans les contentieux de masse et du peu d'enthousiasme des administrations à remettre en cause leur propre décision, les rapporteurs ont proposé d'expérimenter, pour certains contentieux de masse (fonction publique et droits sociaux), le recours préalable à des médiateurs institutionnels indépendants de l'administration qui a pris la décision »131(*).

S'agissant du cas particulier des litiges de la fonction publique et relatifs à certains litiges sociaux, le décret n° 2022-433 du 25 mars 2022 a confirmé la procédure de médiation préalable obligatoire, suite à cette expérimentation.

Cette option de la généralisation de la médiation préalable obligatoire a été écartée pour trois raisons :

- Le rapport de France Stratégie sur la médiation132(*), comme la doctrine, rappellent que la médiation repose sur l'absolue liberté des parties. Surtout, comme l'indique le Conseil d'Etat dans son rapport du 2 septembre 2021 sur l'expérimentation de médiation préalable obligatoire : « La médiation préalable obligatoire n'est pas la seule voie en phase précontentieuse et elle doit s'articuler avec d'autres initiatives de médiation conventionnelle « libre », notamment, la médiation à l'initiative des parties telle que prévue aux articles L. 213-5 et 6 du code de justice administrative. Là où la médiation conventionnelle fonctionne bien, quantitativement et qualitativement, la plus-value de la médiation préalable obligatoire n'est pas évidente au-delà des garanties qu'elle offre quant aux modalités de sa mise en oeuvre, notamment en ce qui concerne ses effets juridiques : interruption des délais de recours et la suspension des prescriptions » ;

- Il s'agit de traiter les blocages et de renouer le dialogue le plus en amont possible ;

- Outre qu'elle porterait le risque d'encourager les démarches dilatoires, la médiation obligatoire généralisée serait un facteur de complexification des processus, à l'inverse de l'objectif recherché de simplification.

Troisième option : mettre à la disposition des entreprises un service de médiation dans les administrations en relation avec les entreprises, afin d'accueillir et traiter à l'amiable les situations litigieuses rencontrées par les acteurs économiques.

C'est donc cette troisième option, privilégiant l'approche de la médiation conventionnelle fondée sur la volonté des parties, qui a été retenue. Elle repose sur l'institution d'une offre de service de médiation dans les administrations de l'Etat en relation avec les entreprises, afin d'accueillir et traiter à l'amiable, dans le respect de la légalité et au plus près du terrain aux niveaux national et déconcentré, les situations litigieuses rencontrées par les acteurs économiques.

A cette fin, l'option retenue a été de compléter le code des relations entre le public et l'administration, en prévoyant, à l'article L. 421-2 modifié , la mise à la disposition du public, par l'administration, des services d'un médiateur dans des domaines et dans des conditions déterminés par décret en Conseil d'Etat133(*). Les entreprises pourront activer ce dispositif en vue du traitement amiable et rapide de leurs différends avec l'administration.

3.2. GÉNÉRALISATION DE L'INTERRUPTION DES DÉLAIS DE RECOURS CONTENTIEUX ET SUSPENSION DES PRESCRIPTIONS

En l'état actuel du droit, selon le médiateur saisi, les délais de recours contentieux sont soit interrompus, soit suspendus ou continuent à courir. Il y a en effet une hétérogénéité des différents régimes de médiation, certains entraînant ou non une interruption des délais de recours134(*). Les dernières réformes de la médiation administrative (lois J21 et ESSOC précitées) ont toutes prévu, sous des formes diverses, une certaine automaticité de l'interruption des délais de recours contentieux en cas de saisine du médiateur, creusant ainsi l'écart entre les différents régimes de médiation.

Le principe de l'effet interruptif du processus de médiation est prévu en matière de médiation territoriale135(*).

Le rapport de France Stratégie précité relève que plusieurs médiateurs dont la saisine n'interrompt pas les délais de recours incitent eux-mêmes les demandeurs à saisir le juge en parallèle de la médiation pour leur éviter de perdre leur droit au recours si le processus de médiation dure plus de deux mois, ce qui est souvent le cas.

L'option du statu quo n'est pas satisfaisante et n'a pas été retenue pour plusieurs raisons :

- La nécessité de la clarté et de la lisibilité du droit ;

- L'importance du droit au recours effectif ;

- L'inconvénient d'une saisine en parallèle du juge, alors que l'un des objectifs de la médiation est précisément d'être un mode alternatif de règlement des conflits ;

- L'homogénéisation des statuts des médiateurs institutionnels ;

- L'affirmation d'un lien de confiance avec l'administration, la disposition à ouvrir ou rouvrir les voies de dialogue.

La préservation des délais de recours est un enjeu majeur de l'attractivité et donc du développement de la médiation.

C'est la raison pour laquelle l'option retenue a été de créer un article L. 421-3 nouveau du code des relations entre le public et l'administration afin d'harmoniser les conséquences de la mise en oeuvre des processus de médiation sur les délais de recours contentieux et les prescriptions, dans les conditions prévues par l'article L. 213-6 du code de justice administrative.

Elle conduit également à modifier l'article L. 217-7-1 II. du code de la sécurité sociale et l'article L. 723-34-1 du code rural et de la pêche maritime afin de prévoir l'interruption (et non plus la suspension) des délais de recours contentieux en cas d'engagement d'une procédure de médiation auprès des médiateurs des organismes de sécurité sociale du régime général dont les URSSAF et de la mutualité sociale agricole. Cette modification sera rendue applicable au Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants et ses instances régionales par voie réglementaire. La modification de l'article L. 217-7-1 II. du code de la sécurité sociale permet également d'ajouter, à l'instar des dispositions applicables aux travailleurs indépendants ayant recours à la médiation des instances du CPSTI, deux conditions de recevabilité de la demande de médiation (en cas procédure en cours de rescrit ou de transaction, la médiation pourra intervenir après ces procédures) dans une logique de simplification pour les entreprises et d'harmonisation du traitement des demandes de médiation dans la branche du recouvrement.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le titre II du livre IV du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) est modifié :

 Dans l'intitulé du chapitre Ier du titre II du livre IV sur le règlement non juridictionnel des différends avec l'administration, les mots : « conciliation et médiation » sont remplacés par le mot : « médiation » ;

A l'article L. 421-1, les mots : « procédure de conciliation ou de médiation » sont remplacés par les mots : « procédure de médiation ».

Dans l'intitulé du chapitre II du titre II du livre IV sur le règlement juridictionnel des différends avec l'administration, les mots : « conciliation et médiation » sont remplacés par le mot : « médiation » ;

L'article L421-2 est remplacé par un nouvel article qui prévoit que l'administration met à la disposition du public les services d'un médiateur dans des domaines et dans des conditions déterminés par décret en Conseil d'Etat. Les collectivités territoriales mentionnées à l'article L. 1112-34 du code général des collectivités territoriales sont exclues de cette disposition.

Il est créé un article L. 421-3 nouveau posant le principe de l'interruption des délais de recours contentieux et la suspension des prescriptions dans les conditions prévues à l'article L. 213-6 du code de justice administrative.

Les articles L. 552-12, L. 562-12 et L. 575-1 sont complétés pour permettre une pleine application des articles L. 421-1, L. 421-2 et L. 421-3 en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.

Le code de la sécurité sociale est modifié :

- L'article L. 217-7-1 II du code de la sécurité sociale prévoit l'interruption (et non plus la suspension) des délais de recours contentieux en cas d'engagement d'une procédure de médiation auprès des médiateurs des organismes de sécurité sociale du régime général ainsi que deux conditions de recevabilité de la procédure de médiation.

Le code rural et de la pêche maritime est modifié :

- L'article L. 723-34-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit l'interruption (et non plus la suspension) des délais de recours contentieux en cas d'engagement d'une procédure de médiation auprès du médiateur de la mutualité sociale agricole.

4.1.2. Articulation avec le droit européen

Le projet de loi est cohérent avec le cadre européen présenté supra (cf. point 1.2).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

La mesure concerne toutes les entreprises, quelles que soient leur taille et leur forme juridique, et les associations employeuses. Elle vise ainsi les personnes morales de droit privé et les entreprises individuelles qui n'ont pas la personnalité morale.

Elle s'adresse aux entreprises confrontées à une difficulté, voire une situation de blocage dans leur relation avec l'administration : refus d'autorisation ou d'agrément, procédure bloquée, aide tardant à être versée, divergence d'interprétation sur l'application d'un texte à la situation de l'entreprise, etc. Ces situations, qui relèvent de la sphère non contractuelle, présentent souvent un degré de complexité suffisamment élevé pour ne pouvoir être prises en charge par les dispositifs d'accueil téléphonique des administrations. Le recours à la médiation permet de restaurer le dialogue avec l'administration, de favoriser la levée des malentendus et des incompréhensions, de faciliter s'il y a lieu la recherche de solutions mutuellement acceptables dans le respect de la légalité pour résoudre à l'amiable le différend. A titre d'illustration, le dernier rapport d'activité de la médiation de l'URSSAF publié en 2023 indique que les demandes de médiations recevables formées par les usagers conduisent à une réussite totale dans 84 % des cas et partielle dans 4 % des cas : dans 44% des cas, la demande initiale est prise en charge par le service interne ; la décision de l'organisme est révisée dans 12% des cas, et 8% des situations traitées aboutissent à un accord amiable. Dans 36% des cas enfin, la médiation permet une explication pédagogique de la décision contestée ou des règles applicables (résolution par pédagogie).

Le recours à la médiation permet donc de réduire la charge administrative qui pèse sur les entreprises, de leur faire faire des économies notamment en prévenant les contentieux qui peuvent s'avérer long et coûteux, de leur donner la visibilité nécessaire à la poursuite ou au développement de leur activité et de renforcer ainsi leur compétitivité.

4.2.2. Impacts budgétaires

Sans pouvoir être mesuré avec précision, l'impact budgétaire pour l'Etat est limité.

Le coût d'un service de médiation est constitué essentiellement des charges de personnels : salaires et dépenses de formation. Les services de médiation existants sont en général des structures légères, aux effectifs limités : à titre d'illustration, le médiateur des ministères économiques et financiers institué en 2002 emploie en 2024 une quinzaine d'agents, soit 0,01% des effectifs des ministères pour lesquels il exerce la mission de médiation ; les médiations réalisées par le médiateur de Bercy sur demande des entreprises représentent un tiers des dossiers, les autres médiations étant effectuées sur saisine de particuliers ( Rapport annuel 2023 du médiateur des ministères économiques et financiers).

Au démarrage du dispositif en année 1 et 2, le nombre d'agents nécessaire par entité est compris entre un et deux ETP136(*). Cette dépense peut être absorbée à coût budgétaire constant par redéploiement. Des coûts de formation à la médiation sont à prévoir (deux jours par agent). Les médiateurs sont en général des agents en seconde partie de carrière compte tenu de l'expérience requise pour exercer cette fonction, qui peut s'inscrire dans un parcours de séniorisation. Par ailleurs, il est possible de s'appuyer sur une mutualisation des moyens avec un dispositif existant, y compris le cas échéant le médiateur des entreprises, dont le réseau est constitué pour partie de médiateurs délégués bénévoles.

Enfin, le coût représenté par le service de médiation doit être mis en regard des économies réalisées : réduction du « coût du non recours à la médiation » (coût de gestion des réclamations multiples générées par chaque situation de blocage), diminution du nombre de recours administratifs (recours gracieux et hiérarchiques) et contentieux. Le coût net réel est donc moins élevé. La quantification du coût du non recours à la médiation a fait l'objet d'une étude réalisée en avril 2011 par ADR Center à la demande de la commission des affaires juridiques du Parlement Européen. En s'appuyant sur l'analyse de deux pays (Belgique et Italie), les auteurs de l'étude ont mis en évidence les bénéfices retirés de la médiation en termes de coût et de gain de temps, en comparaison des coûts et pertes de temps induits par les contentieux.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le présent article n'a pas d'impact sur les collectivités territoriales puisque l'institution de médiateurs territoriaux est déjà encadrée par la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique137(*). Elles sont expressément exclues du champ d'application de l'article 421-2 modifié du code des relations entre le public et l'administration.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure concerne les administrations de l'Etat, ses établissements publics administratifs et les organismes chargés par l'Etat d'une mission de service public administratif. Chacune de ces entités devra offrir, au niveau national comme au niveau déconcentré, et si elle n'en dispose pas déjà, un service de médiation permettant d'accueillir et de traiter à l'amiable les situations litigieuses rencontrées par les entreprises.

La charge administrative induite est constituée essentiellement par les dépenses de personnel, et marginalement par les coûts de formation à la médiation et la prise en charge des fonctions support (gestion des ressources humaines, logistique, communication, etc.). Son coût n'a pu être estimé, mais il restera limité au regard du nombre d'ETP nécessaire dans chaque administration concernée et de la possibilité de mutualiser ces dépenses (cf. point 4.2.2. ci-dessus).

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Le dispositif prévu par la loi permet de préciser par décret les domaines et les conditions dans lesquelles l'administration met à la disposition du public les services d'un médiateur.

Le dispositif ne remet pas en cause les conditions des médiations obligatoires spécifiques aux décisions prises par France Travail, y compris pour le bénéfice des aides sociales, pour le compte de l'Etat, ou pour les litiges de la fonction publique138(*).

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aucune consultation obligatoire ni aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions de cet article entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal Officiel de la République Française. Pour des motifs de sécurité juridique et de lisibilité de la loi, l'interruption des délais de recours contentieux et la suspension des prescriptions prévues par le nouvel article L. 421-3 du code des relations entre le public et l'administration s'appliqueront aux médiations auxquelles il est recouru à compter de cette entrée en vigueur.

S'agissant de la mise à disposition des services d'un médiateur par l'administration, le décret d'application publié après la promulgation de la loi prévoira une date d'entrée en vigueur différée : cette mesure fera en effet l'objet d'un plan de déploiement progressif dans les administrations et organismes qui n'ont pas déjà mis en place un tel dispositif. La mise à disposition des services d'un médiateur ne reposera pas sur un modèle unique, mais sur des schémas d'organisation propres à chaque entité dans le respect des dispositions du décret. Dans les établissements publics et les organismes de droit privé chargés d'une mission de service public administratif, les organes de gouvernance devront se prononcer. Par ailleurs, le médiateur qui sera désigné devra avoir suivi une formation.

Le plan de déploiement sera coconstruit avec les acteurs, représentants des administrations concernées, des médiateurs institutionnels déjà opérationnels et des entreprises. Il sera formalisé par voie de circulaire du Premier ministre.

Ainsi le décret d'application pourrait entrer en vigueur un an après sa publication, la circulaire pouvant inviter les administrations concernées à anticiper cette date pour la mise en place du dispositif.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique sur l'ensemble du territoire de la République.

En application de l'article 73 de la Constitution, les dispositions législatives et réglementaires du code des relations entre le public et l'administration sont applicables de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à la Réunion, à Mayotte en l'absence de dispositions spécifiques relatives au livre IV sur le règlement des différends avec l'administration.

Les dispositions législatives et réglementaires du code des relations entre le public et l'administration sont applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les Terres australes et antarctiques françaises en l'absence de dispositions spécifiques relatives au livre IV sur le règlement des différends avec l'administration.

Elles s'appliquent de plein droit aux relations entre le public et l'Etat, les communes et leurs établissements publics en Polynésie française (7° de l'article 7 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française) et en Nouvelle-Calédonie (7° de l'article 6-2 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie). Les articles L. 552-12 et L. 562-12 du code des relations entre le public et l'administration sont complétés pour que les articles L.421-1, L. 421-2 et L. 421-3 s'appliquent également aux relations entre le public et les organismes et personnes de droit public et de droit privé autres que les établissements publics, placés sous le contrôle de l'Etat ou des communes, ces règles étant de la compétence de l'Etat sous le régime de la spécialité législative.

Enfin, pour Wallis-et-Futuna, l'ensemble des dispositions relatives aux relations entre le public, d'une part, et l'Etat, ses établissements publics et les autres organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés par l'Etat d'une mission de service public administratif, et, le cas échéant, industriel et commercial, d'autre part, relèvent de la compétence de l'Etat sous le régime de la spécialité législative. Il convient donc de compléter l'article L. 575-1 du code des relations entre le public et l'administration pour y étendre les articles L. 421.1, L421-2 et L.421-3.

5.2.3. Textes d'application

Les domaines et les conditions dans lesquelles l'administration met à la disposition du public les services d'un médiateur sont déterminés par décret en Conseil d'Etat. Une circulaire du Premier ministre formalisera le plan de déploiement du dispositif.

La généralisation de l'interruption des délais de recours contentieux et suspension des prescriptions ne requiert pas de texte d'application.

Article 10 - Adapter les régimes des sanctions pesant sur les chefs d'entreprises

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

Le dispositif national de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme (LCC-FT), qui n'a cessé de se développer depuis plusieurs années, a conduit à la création de nouvelles obligations déclaratives à l'égard des entreprises dans le but de favoriser une plus grande transparence.

Ainsi, la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants a institué un système de contrôle des opérations financières, de prévention et de détection des activités de blanchiment. Ce dispositif a, par la suite et sous l'impulsion du droit européen, été renforcé.

La directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme évoque pour la première fois la notion de bénéficiaire effectif, qu'elle définit comme étant « la ou les personnes physiques qui, en dernier lieu, possède(nt) ou contrôle(nt) le client et/ou la personne physique pour laquelle une transaction est exécutée ou une activité réalisée »139(*). Cette notion a été insérée dans le code monétaire et financier140(*) par l'ordonnance n° 2009-104 du 30 janvier 2009 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Ces textes ne prévoient qu'une obligation d'identification et de vérification des clients et des bénéficiaires effectifs par les entreprises.

La directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme (dite « quatrième directive antiblanchiment ») modifiée par la directive (UE) 2018/843 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 (dite « cinquième directive antiblanchiment ») a précisé le dispositif en créant une obligation, à la charge des entreprises, d'obtenir et de conserver des informations adéquates, exactes et actuelles sur leurs bénéficiaires effectifs141(*). Le bénéficiaire effectif est défini comme la personne physique qui contrôle en dernier lieu directement ou indirectement le client ou pour laquelle une opération est exécutée ou une activité exercée. Il s'agit de la ou des personnes physiques qui : i) soit détiennent directement ou indirectement plus de 25 % du capital ou des droits de vote d'une société, ii) soit exercent par tout autre moyen un pouvoir de contrôle, iii) soit à défaut le ou les représentants légaux de la société.142(*) Ces informations doivent être conservées dans un registre central. L'article 58 de la directive prévoit que les Etats membres doivent mettre en place des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives en cas de non-respect des obligations qu'elle édicte.

Cette directive a été transposée notamment par l'ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 renforçant le dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, dont l'article 18 modifie l'article L. 561-46 du code monétaire et financier, aux termes duquel les sociétés civiles et commerciales déclarent au registre du commerce et des sociétés, par l'intermédiaire du guichet unique des formalités d'entreprises les informations relatives aux bénéficiaires effectifs.

Ainsi, les personnes morales sont tenues d'obtenir et de conserver des informations exactes et actualisées sur leurs bénéficiaires effectifs au titre de l'article L. 561-45-1 du code monétaire et financier. Le même article prévoit que les sociétés fournissent ces informations aux personnes assujetties à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme mentionnées à l'article L. 561-2 du code monétaire et financier dans le cadre de l'application de leurs mesures de vigilance.

Les sanctions en cas de manquement aux obligations de déclaration des bénéficiaires effectifs d'une personne morale, ou de déclaration incomplète ou erronée, sont prévues à l'article L. 574-5 du code monétaire et financier : une peine d'emprisonnement de six mois et une amende de 7 500 euros. Pour les personnes physiques, la sanction peut être accompagnée d'autres peines :

- interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer une activité professionnelle, de manière définitive ou pour une durée déterminée ne pouvant excéder cinq ans ;

- interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale, soit de manière définitive, soit pour une durée déterminée qui ne peut excéder quinze ans ;

- privation partielle des droits civils et civiques.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

La directive n° 2022/2464 dite « CSRD143(*) » du 14 décembre 2022 opère une refonte du reporting et de l'audit extra-financier afin d'imposer aux entreprises la publication, au sein du rapport de gestion, d'informations en matière de « durabilité », à savoir des informations portant sur les enjeux en matière de responsabilité sociale de l'entreprise (données environnementales, sociales et de gouvernance).

Ces informations doivent être fiables, comparables et accessibles et répondre au principe dit de « double matérialité », englobant d'une part les impacts de l'activité de l'entreprise sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernement d'entreprise (les critères ESG), et d'autre part les incidences de ces enjeux sur l'activité de l'entreprise.

La directive prévoit la création de normes européennes de reporting de durabilité détaillées, dites normes ESRS144(*), permettant d'encadrer et d'harmoniser les publications des entreprises. La Commission européenne a mandaté l'EFRAG - le groupe consultatif européen sur l'information financière - pour la préparation de ces normes standardisées.

Si les normes « tout-secteur » ont été précisées aux annexes I et II du règlement délégué (UE) 2023/2772 du 31 juillet 2023, l'EFRAG poursuit actuellement les travaux de standardisation relatifs aux normes dédiées aux PME ainsi qu'aux normes sectorielles, lesquelles devraient être adoptées d'ici juin 2026.

La directive, conçue dans une logique de parallélisme entre les missions de certification financière et extra-financière, étend les règles prévues pour l'audit financier à l'audit de durabilité. Elle prévoit ainsi que les informations publiées en matière de durabilité devront être certifiées par un commissaire aux comptes ou par un organisme tiers indépendant accrédité. L'ensemble des professionnels procédant à cette nouvelle mission seront supervisés par la Haute autorité de l'audit (H2A), qui remplace le Haut conseil du commissariat aux comptes (H3C).

Enfin, la directive exige que des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » soient prévues, tant vis-à-vis des entreprises soumises à l'obligation de reporting extra-financier que des professionnels qui certifient les rapports, en cas de non-respect des exigences qu'elle fixe145(*).

La directive CSRD a été transposée en droit français par l'ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d'informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d'entreprise des sociétés commerciales et le décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023.

L'ordonnance de transposition146(*) conserve le parallélisme entre la certification financière et extra-financière. Elle prévoit notamment des sanctions pénales en cas de défaut de désignation d'un commissaire aux comptes ou de l'auditeur des informations de durabilité et en cas d'entrave à la certification des informations en matière de durabilité, calquées sur les sanctions applicables dans le cadre de l'audit financier (article L. 821-6 1° et 3° du code de commerce). Il s'agit des dispositions pénales prévues à l'article L. 822-40 (concernant les organismes tiers indépendants) et à l'article L. 821-6 2° (concernant les commissaires aux comptes) du même code.

Les articles L. 821-6 et L. 822-40 du code de commerce incriminent le fait de faire « obstacle aux vérifications ou contrôles » des commissaires aux comptes ou auditeurs des informations en matière de durabilité « ou de leur refuser la communication sur place de toutes les pièces utiles à l'exercice de leur mission et, notamment, de tous contrats, livres, documents comptables et registres de procès-verbaux ». Ces faits sont punis d'une peine de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

La jurisprudence et la doctrine entendent très largement la notion « d'obstacle » et s'accordent pour dire qu'elle englobe le refus de communication de pièces147(*). L'équilibre de la répression réside néanmoins dans le caractère intentionnel de ce délit : pour qu'il soit caractérisé, encore faut-il démontrer que la personne a volontairement entravé les opérations de l'audit de durabilité en refusant de communiquer certains éléments.

Le délit d'entrave à l'audit de durabilité est ainsi critiqué à la fois pour son caractère excessif et imprécis.

En effet, à la différence du dispositif de certification en matière d'informations financières, qui repose sur la mise en oeuvre de normes connues de longue date par les commissaires aux comptes et les entreprises, le dispositif de certification d'informations extra-financière est nouveau, et s'appuie sur des normes professionnelles toujours en cours d'élaboration.

Il en résulte que les entreprises ne savent pas toujours quels documents elles doivent transmettre aux commissaires aux comptes ou auditeurs et celles dont elles sont en droit de refuser la transmission.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur la question spécifique de la déclaration des bénéficiaires effectifs.

Toutefois, il résulte d'une jurisprudence constante que les peines doivent être strictement nécessaires, c'est-à-dire proportionnées à la gravité du manquement et à ce qui est nécessaire pour assurer le respect de la règle. Ce principe est contrôlé par le Conseil constitutionnel au regard des finalités qu'il fixe au système pénal, c'est-à-dire la protection de la société, la punition du condamné et l'amendement et la réintégration de celui-ci (décision n° 93-334 DC du 20 janvier 1994, cons. 12). Le Conseil constitutionnel n'exerce toutefois qu'un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation en cette matière.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur la question spécifique de l'entrave à la certification des informations en matière de durabilité ni sur l'infraction plus ancienne d'entrave à l'audit financier.

L'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 énonce que « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ». Néanmoins, le Conseil constitutionnel opère un contrôle restreint du respect du principe de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines, limité à l'erreur manifeste d'appréciation, rappelant régulièrement qu' « il n'appartient pas au Conseil constitutionnel dans le cadre de la mission qui lui est confiée par l'article 61 de la Constitution, de substituer sa propre appréciation à celle du législateur en ce qui concerne la nécessité des peines attachées aux infractions définies par celui-ci148(*). »

Il juge ainsi, par exemple, que l'insuffisante sévérité de la sanction encourue ne saurait constituer une méconnaissance du principe de proportionnalité des peines149(*).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

L'article 58 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme (mentionnée supra) prévoit que les Etats membres doivent mettre en place des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives en cas de non-respect des obligations qu'elle édicte.

La Cour de justice de l'Union européenne a invalidé, dans un arrêt du 22 novembre 2022 (n° C-37/20 et C-601/20, Luxembourg Business Registers), la disposition de la cinquième directive européenne anti-blanchiment prévoyant l'ouverture du registre des bénéficiaires effectifs (RBE) au grand public.

Cette décision a eu pour conséquence de provoquer un retour au droit antérieur s'agissant des modalités d'accès aux informations relatives aux bénéficiaires effectifs, c'est-à-dire un retour à la quatrième directive européenne anti-blanchiment (directive (UE) 2015/849 du 20 mai 2015), qui conditionne l'accès aux informations relatives aux bénéficiaires effectifs à la démonstration d'un intérêt légitime.

En revanche, la Cour européenne des droits de l'Homme n'a pas eu l'occasion de se prononcer spécifiquement sur l'obligation de déclaration des bénéficiaires effectifs ni sur les sanctions prononcées en cas de fausse déclaration ou absence de déclaration.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

La Cour européenne des droits de l'Homme ne s'est pas prononcée sur la question spécifique de l'entrave à la certification des informations en matière de durabilité ni sur l'infraction plus ancienne d'entrave à l'audit financier.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Le Groupe d'Action Financière (GAFI), organisme international de surveillance du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, apprécie notamment le caractère proportionné et dissuasif des sanctions prévues en cas de manquement aux obligations déclaratives, notamment celles relatives au défaut de déclaration ou à de fausses déclarations relatives aux bénéficiaires effectifs (critère 13 de la recommandation 24 : « La responsabilité ainsi que des sanctions dissuasives et proportionnées devraient être prévues lorsque nécessaire pour toute personne morale ou physique qui ne respecte pas ces exigences »).

Par ailleurs, le paragraphe 1 de l'article 30 de la quatrième directive antiblanchiment modifiée précise que « les États membres veillent à ce que les sociétés et autres entités juridiques constituées sur leur territoire aient l'obligation d'obtenir et de conserver des informations adéquates, exactes et actuelles sur leurs bénéficiaires effectifs, y compris des précisions sur les intérêts effectifs détenus. Les États membres veillent à ce que toute infraction au présent article fasse l'objet de mesures ou de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives. »

En procédant à une analyse comparée, plusieurs juridictions prévoient une possible peine de prison en cas de manquements aux obligations déclaratives, parmi lesquels l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, les Pays-Bas, l'Irlande, la Grèce, la Suède, la Finlande, mais aussi le Canada, Israël et le Japon. Le GAFI estime que ces pays disposent d'un régime de sanction proportionné et dissuasif.

D'autres ne prévoient pas de peine d'emprisonnement : Espagne, Portugal, Etats-Unis, Norvège, Luxembourg et Autriche. A noter qu'au sein de cette catégorie, le GAFI estime que seuls le Luxembourg et l'Autriche disposent d'un régime de sanction proportionné et dissuasif, selon le GAFI, de par l'ampleur des amendes prévues.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

L'article 34 de la Constitution prévoit que la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables relève du domaine de la loi. Aussi le régime de sanction prévu en cas de non-respect des obligations déclaratives des personnes morales a été institué par voie législative, et nécessite une loi pour être modifié.

Ce régime de sanction, prévu en l'état par l'article L. 574-5, est jugé inadapté par les fédérations professionnelles et doit évoluer pour se conformer à l'objectif de dépénalisation du droit des affaires. En outre, il n'apparaît pas comme strictement nécessaire afin de garantir un effet « efficace, proportionné et dissuasif » de la sanction pour manquement aux obligations de déclaration des bénéficiaires effectifs.

En effet, la consultation lancée par le ministère de l'Economie en novembre 2023 mettait en exergue la volonté des professionnels de simplifier les démarches administratives pesant sur les entreprises.

Le rapport parlementaire remis le 15 février 2024 au ministre de l'Economie150(*) soulignait le caractère inadapté de la pénalisation de certaines procédures déclaratives, en citant comme exemple la déclaration au registre des bénéficiaires effectifs.

Il est apparu qu'elle constitue également une peine inadaptée, dès lors qu'aucune peine d'emprisonnement n'a été prononcée en cas de non déclaration ou de fausses déclarations depuis la mise en place du régime de sanctions.

Tableau 1 : Orientations des personnes mises en cause pour l'infraction « NON DECLARATION DES INFORMATIONS RELATIVES AUX BENEFICIAIRES EFFECTIFS AU REGISTRE DU COMMERCE ET DES SOCIETES »

Unité de compte : Personnes

2019

2020

2021

2022

Affaires orientées

4 618

252

5 239

2 173

Affaires non poursuivables

<5

 

<5

17

Affaires poursuivables

4 617

252

5 236

2 156

Classement sans suite inopportunité

 

 

 

12

Réponse pénale

4 617

252

5 236

2 144

Taux de réponse pénale

100,0%

100,0%

100,0%

99,4%

Procédures alternatives

4 617

248

5 231

2 140

Taux de procédures alternatives

100,0%

98,4%

99,9%

99,8%

     dt autres poursuites ou sanctions de nature non pénale

4 615

237

5 119

1 639

Poursuites

 

<5

5

<5

Taux de poursuites

 

1,6%

0,1%

0,2%

     dt poursuites correctionnelles

 

<5

5

<5

Source : SG-SSER SID/CASSIOPEE-Traitement DACG/PEPP

Tableau 2 : Orientations des personnes mises en cause pour l'infraction « DECLARATION D'INFORMATION INEXACTE OU INCOMPLETE RELATIVE A UN BENEFICIAIRE EFFECTIF AU REGISTRE DU COMMERCE ET DES SOCIETES »

Unité de compte : Personnes (lien strict) - mise à jour : 08/03/2024

2019

2020

2021

2022

Affaires orientées

0

1 582

1 451

Affaires non poursuivables

 

 

Affaires poursuivables

 

 

1 582

1 451

Classement sans suite inopportunité

 

 

Réponse pénale

 

 

1 582

1 451

Taux de réponse pénale

   

100,0%

100,0%

Procédures alternatives

 

 

1 581

1 450

Taux de procédures alternatives

   

99,9%

99,9%

     dt rappel à la loi / avertissement

 

 

1 567

 

     dt autres poursuites ou sanctions de nature non pénale

 

 

6

1 449

Poursuites

 

 

<5

<5

Taux de poursuites

   

0,1%

0,1%

     dt saisines du JI

 

 

 

<5

     dt poursuites devant le TP

 

 

<5

 

Source : SG-SSER SID/CASSIOPEE-Traitement DACG/PEPP

Tableau 3 : Condamnations prononcées pour l'infraction « NON DECLARATION DES INFORMATIONS RELATIVES AUX BENEFICIAIRES EFFECTIFS AU REGISTRE DU COMMERCE ET DES SOCIETES » par les juridictions de première instance

Année

Condamnations (infraction principale)

Emp.

Ensemble des amendes

Amendes fermes

Montant moyen de l'ensemble des amendes fermes

2020

<5

0

<5

<5

400 €

2021

<5

0

<5

<5

510 €

2022

<5

0

<5

0

 

Source : SG-SSER SID/CASSIOPEE-Traitement DACG/PEPP

Ce dernier tableau montre que sur les cinq affaires ayant donné lieu à une condamnation, aucune n'a donné lieu à une peine d'emprisonnement.

Par ailleurs, aucune condamnation n'a été prononcée pour l'infraction « déclaration d'information inexacte ou incomplète relative à un bénéficiaire effectif au registre du commerce et des sociétés ».

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

L'article 34 de la Constitution prévoit que la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables relève du domaine de la loi. Aussi le régime de sanction prévu en cas de non-respect des obligations déclaratives des personnes morales a été institué par voie législative, et nécessite une loi pour être modifié.

Le délit d'entrave à l'audit de durabilité, critiqué à la fois pour son caractère excessif et imprécis, doit être supprimé pour se conformer à l'objectif de dépénalisation du droit des affaires et apporter davantage de sécurité juridique aux acteurs économiques.

En effet, à la différence du dispositif de certification en matière d'informations financières, qui repose sur la mise en oeuvre de normes connues de longue date par les commissaires aux comptes et les entreprises, le dispositif de certification d'informations extra-financière est nouveau, et s'appuie sur des normes professionnelles toujours en cours d'élaboration.

Un dispositif répressif n'apparaît donc pas adapté à ce stade, et en tout état de cause prématuré à ce stade au regard du fait que les normes standardisées ESRS n'ont pas encore été adoptées par la Commission européenne.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

La présente disposition contribuera à la cohérence du régime de sanctions encourues par un chef d'entreprise en cas de manquement à ses obligations déclaratives, tout en préservant le caractère dissuasif de la sanction.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

L'objectif poursuivi est celui de dépénalisation du droit des affaires.

En effet, la consultation lancée par le ministère de l'Economie en novembre 2023 mettait en exergue la volonté des professionnels de simplifier les démarches administratives pesant sur les entreprises.

Le rapport parlementaire remis le 15 février 2024 au ministre de l'Economie151(*) soulignait le caractère inadapté de la pénalisation de certaines obligations imposées aux entreprises.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

En parallèle de l'option retenue, l'hypothèse d'un basculement complet du régime de sanction aujourd'hui pénal vers un régime totalement administratif a été explorée. Elle ne semble cependant pas permettre de préserver le caractère dissuasif du régime de sanction, critère essentiel dans les évaluations par le Groupe d'Action Financière des dispositifs nationaux de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, pour lequel la France bénéficie jusqu'à ce jour d'une évaluation positive (notation en grande partie conforme).

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

Il a été envisagé de supprimer la référence à l'obligation de « communication sur place de toutes les pièces utiles à l'exercice de leur mission » en laissant subsister le cadre général du délit d'entrave à l'audit de durabilité. Néanmoins, la portée juridique d'une telle modification est incertaine au regard du caractère particulièrement large de la notion d'obstacle retenue par la jurisprudence, laquelle englobe l'absence de transmission des documents utiles. C'est la raison pour laquelle il a été décidé de ne pas retenir cette option.

Il a également été envisagé de remplacer la sanction pénale du délit d'entrave à l'audit de durabilité par une sanction administrative. Néanmoins, une telle modification de la nature de la sanction n'apparait pas opportune dans la mesure où elle ne modifiera pas le périmètre de l'audit de durabilité ni la précision des informations à communiquer, pour les dirigeants d'entreprise, aux commissaires aux comptes ou organismes tiers indépendants, et n'apparait donc pas plus protectrice. Une telle option n'irait par ailleurs pas dans le sens d'une simplification du droit des affaires puisqu'elle impliquerait de déterminer l'autorité chargée de prononcer cette nouvelle sanction et impliquerait la création d'une nouvelle procédure, source de davantage de complexité.

3.2. OPTION RETENUE

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

L'option retenue est celle d'une modification de l'article L. 574-5 afin de supprimer la peine d'emprisonnement de six mois pour les personnes manquant à leurs obligations déclaratives en matière de bénéficiaires effectifs des personnes morales et d'aggraver la peine d'amende de manière à préserver l'effet dissuasif du régime de sanction. L'amende pour une personne physique pourrait ainsi atteindre 250.000 euros et, en vertu de l'article 131-38 du code pénal, le quintuple pour une personne morale, soit 1.250.000 euros. Le GAFI a estimé dans son évaluation du Luxembourg que ce montant suffit à rendre le régime de sanction proportionné et dissuasif, en l'absence d'une peine de prison.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

L'option retenue est de supprimer le délit d'entrave à l'audit de durabilité.

En revanche, les incriminations relatives à l'audit des informations de durabilité s'agissant de la non-désignation et de la non-convocation en assemblée générale des commissaires aux comptes ou auditeur de durabilité sont maintenues.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

La présente disposition conduit à une modification de l'article L. 574.5 du code monétaire et financier.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

L'article L. 821-6 du code de commerce est modifié. L'article L. 822-40 du code de commerce est abrogé.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

La directive 2015/849 du 20 mai 2015 précitée prévoit la mise en place de sanctions, sans précisions sur leur nature. La suppression de la peine d'emprisonnement ne méconnaitrait pas les exigences de la directive.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

Les modifications législatives respectent le droit international et le droit de l'Union européenne.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

La disposition conduira à modifier les peines encourues en cas de manquement aux obligations déclaratives des sociétés concernant leurs bénéficiaires effectifs. La modification proposée préserverait l'effet dissuasif du régime de sanction.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

La présente disposition conduira à supprimer le délit d'entrave à l'audit de durabilité.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La suppression du délit d'entrave à l'audit de durabilité n'emportera, a priori, aucune conséquence sur les services judiciaires. Le caractère très récent de l'infraction ne permet pas au ministère de la Justice de disposer d'éléments statistiques sur le nombre de dossiers en cours qui devrait être toutefois très marginal, voire nul.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La modification apportée au régime de sanctions concernant les obligations déclaratives sur les bénéficiaires effectifs permettra de préserver un effet dissuasif à travers l'aspect pécuniaire. Cette modification ne fait pas obstacle à l'objectif poursuivi de complétude et d'exactitude des informations déclarées au registre des bénéficiaires effectifs. Ce registre se trouvera ainsi renforcé dans son rôle pour lutter contre les fraudes, le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme ou encore la corruption.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Les professions assujetties à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ont des obligations de vérification de l'identité de leurs clients, qui implique l'identification des bénéficiaires effectifs des personnes morales avec qui elles entrent en relation d'affaires. Pour mener à bien cette obligation, les professionnels assujettis interrogent leurs clients et s'appuient sur les informations accessibles au registre des bénéficiaires effectifs, aussi est-il essentiel pour ces professionnels que le registre soit dument renseigné et ce avec exactitude. Ainsi les professionnels assujettis ont intérêt à ce que le régime de sanctions en cas de manquement aux obligations déclaratives des personnes morales demeure dissuasif.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aucune consultation n'est nécessaire et aucune consultation facultative n'a été réalisée.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Aux termes de l'article 112-1 du code pénal, seules peuvent être prononcées les peines légalement applicables à la date de l'infraction. Par exception, les dispositions nouvelles plus favorables s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée.

Ces dispositions seront donc applicables aux faits commis antérieurement à l'entrée en vigueur de la nouvelle disposition, le lendemain de la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française, et auront pour conséquence de mettre un terme à toutes les procédures en cours.

5.2.2. Application dans l'espace

Concernant les obligations déclaratives relatives aux bénéficiaires effectifs

Ces dispositions seront applicables sans adaptation sur l'ensemble du territoire national.

Cette disposition est applicable en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à la Réunion (article L. 711-1 du code monétaire et financier), à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon (article L. 711-2 du code monétaire et financier), et aucune adaptation n'est nécessaire concernant ces collectivités.

Concernant les missions de certification des informations extra-financières

Cette disposition sera applicable sans adaptation sur l'ensemble du territoire national.

Cette disposition est applicable en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à la Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, et aucune adaptation n'est nécessaire concernant ces collectivités.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article ne nécessite aucune mesure d'application.

CHAPITRE II - SIMPLIFIER ET CLARIFIER CERTAINES FORMES DE CONTRATS

Article 11 - Simplifier le droit des contrats spéciaux

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le droit des contrats spéciaux, ou droit spécial des contrats, est une branche du droit privé qui fixe « les dispositions propres à chaque contrat ou à chaque catégorie de contrat, indépendamment des règles générales applicables à l'ensemble des contrats »152(*).

Le droit des contrats spéciaux est ainsi le corps de règles qui gouverne les contrats les plus usuels, par lesquels les personnes comme les entreprises s'échangent des biens ou se rendent des services.

Il détermine ce faisant « les règles particulières à chaque contrat »153(*). Ces règles complètent celles du droit commun des contrats lequel énonce les règles générales applicables à l'ensemble des contrats, qu'ils aient ou non une dénomination propre. Elles dérogent aux règles générales en principe mais elles peuvent également les adapter.

Les principales figures de contrats spéciaux sont prévues dans le code civil. D'autres contrats spéciaux peuvent également être régis par des codes particuliers (contrat de travail dans le code du travail, contrat d'assurance dans le code des assurances, etc.). Pour identifier chaque corps de règles et pour permettre la qualification des contrats, la loi donne un nom à chacun d'eux. On parle ainsi à leur égard de contrats nommés.

Le droit des contrats spéciaux n'a pas été modifié par l' ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, ratifiée par la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018, qui a, en revanche, profondément remanié le droit commun des contrats.

Il en résulte que l'essentiel des dispositions du code civil relatives au droit des contrats spéciaux datent du Code Napoléon de 1804.

Les titres consacrés à ces contrats se trouvent, dans le livre III du code civil, aux articles 1582 et suivants, qui couvrent successivement la vente (titre VI - art. 1582 à 1701-1), l'échange (titre VII - art. 1702 à 1707), le contrat de louage (titre VIII - art. 1708 à 1831), le prêt (titre X - art. 1874 à 1914), le dépôt et le séquestre (titre XI - art. 1915 à 1963), les contrats aléatoires (titre XII - art. 1965 à 1983) et le mandat (titre XIII - art. 1984 à 2010).

Ces contrats seront l'objet de la réforme du droit des contrats spéciaux.

En revanche, sera exclue la société (titre IX - art. 1832 à 1873), qui n'est pas seulement un contrat mais aussi une personne morale, et ne relève pas stricto sensu du droit des contrats spéciaux. De même, la fiducie154(*) (titre XIV - art. 2011 à 2030), récemment introduite en droit français par la loi n° 2007-211 du 19 février 2007155(*), ne fera pas l'objet d'une refonte.

Parmi les contrats qui seront réformés, figurent :

· La vente, contrat par lequel l'une des parties, le vendeur, transmet la propriété d'une chose à une autre, l'acheteur ou l'acquéreur, qui s'oblige à lui en payer le prix (article 1582 du code civil.). Elle est le plus usité de tous les contrats et sert classiquement de modèle aux autres contrats spéciaux. Elle est également le contrat le mieux encadré juridiquement : une centaine d'articles lui sont consacrés dans le code civil ;

· L'échange, contrat par lequel les parties (les co-permutants) se donnent respectivement une chose pour une autre (article 1702 du code civil) ;

· Le contrat de louage, qui se subdivise en deux espèces : louage de chose et louage d'ouvrage (article 1708 du code civil.).

Le louage de chose, encore dénommé contrat de bail ou de location, contrat par lequel le bailleur s'oblige, moyennant un loyer, à faire jouir le locataire d'une chose immobilière ou mobilière pendant un certain temps (article 1709 du code civil) ;

Le louage d'ouvrage, ou contrat d'entreprise, contrat en vertu duquel l'entrepreneur s'engage à réaliser un ouvrage déterminé pour une autre personne, appelée maître de l'ouvrage, qui lui en paye le prix (article 1710 du code civil).

· Le prêt, contrat en vertu duquel le prêteur remet une chose à l'emprunteur, afin que celui-ci s'en serve, à charge de restitution (article 1874 du code civil.). Il se subdivise lui-même en deux espèces : le prêt à usage, anciennement appelé commodat, et le prêt de consommation. Le prêt à usage est un prêt essentiellement gratuit portant sur un corps certain que l'emprunteur doit restituer en nature après s'en être servi (article 1875 du code civil.). Le prêt de consommation, qui est onéreux ou gratuit, porte sur une somme d'argent ou une certaine quantité de choses qui se consomment par l'usage, à charge pour l'emprunteur d'en rendre au prêteur autant de mêmes espèce et qualité (art. 1892 c. civ.).

· Le dépôt, contrat, gratuit ou onéreux, par lequel le dépositaire reçoit une chose mobilière ou immobilière que lui confie le déposant, et accepte de la garder et de la restituer en nature (article 1915 du code civil.). Le séquestre est, quant à lui, une variété de dépôt qui consiste à confier à la garde d'un tiers une chose litigieuse jusqu'au règlement du litige (article 1956 du code civil.). La loi prévoit une autre espèce de dépôt, dit dépôt hôtelier, entre les aubergistes ou hôteliers et le voyageur qui loge chez eux, en vertu duquel les premiers répondent comme dépositaires des effets personnels divers que celui-ci apporte dans leur établissement (article 1952 du code civil)

· Les contrats aléatoires, qui sont des contrats dont l'objet est de faire dépendre les prestations des parties d'un évènement incertain dont la survenance ou les résultats feront que l'un réalisera un gain, l'autre subira une perte, tels par exemple le jeu, le pari et le contrat de rente viagère.

· Enfin, le mandat, contrat par lequel le mandant confère à une personne qui en accepte la charge, le mandataire, le pouvoir et la mission d'accomplir pour elle et en son nom un acte juridique (article 1984 du code civil).

Les dispositions du code civil relatives à ces contrats sont, pour beaucoup d'entre elles, supplétives de volonté, de sorte que les parties peuvent y déroger par des stipulations contraires.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Sans objet.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Sans objet.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Aucun élément de droit comparé n'a été pris en compte dans le cadre de la rédaction de la présente habilitation.

En revanche, ces éléments seront recherchés et analysés dans le cadre de l'élaboration de la réforme à venir par ordonnance, comme par exemple le code civil québécois, adopté en 1991 ou, le cas échéant, le droit belge, dont la réforme en la matière est en cours.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Cette réforme est du niveau législatif et relève de la compétence de la loi conformément à l'article 34 de la Constitution (qui confère au Parlement la compétence pour fixer les principes fondamentaux « du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales »). Une telle réforme s'avère nécessaire en ce que les dispositions relatives au droit des contrats spéciaux datent pour l'essentiel de 1804.

Par ailleurs, les carences et le manque d'actualisation des règles écrites ont laissé une grande place aux constructions prétoriennes ce qui a pu nuire à l'accessibilité et l'intelligibilité de ce droit.

De plus, le développement des nouvelles formes de relations contractuelles, de nouvelles utilisations de certains contrats, notamment à buts professionnels et mercantiles, et l'essor des technologies numériques ont également fait apparaître de nouvelles pratiques qu'il est parfois nécessaire de règlementer. A titre d'exemple, le contrat de mandat ou le contrat de dépôt sont des contrats traditionnellement gratuits et considérés comme des services d'amis. Les dispositions du code civil pour ces contrats définissent un régime juridique cohérent par rapport à cette gratuité. Or, aujourd'hui, ces contrats se sont largement professionnalisés et donnent lieu à rémunération. Il convient donc d'adapter notre droit.

En outre, le vieillissement des dispositions en la matière a entraîné non seulement une altération de la sécurité juridique en droit interne mais également une perte d'attractivité du droit français des contrats dans le monde.

Les dispositions sur les contrats spéciaux ne correspondent plus en conséquence aux besoins de la vie économique et sociale du XXIème siècle, alors que ces contrats sont utilisés quotidiennement, pour la pratique des affaires ou pour des besoins d'ordre privé. Le devis, par exemple, n'est pas actuellement régi par le code civil et génère un abondant contentieux. Dans le cadre du contrat d'entreprise, l'ordonnance pourra comprendre des dispositions relatives au devis ce qui permettra de résorber le contentieux et de répondre au besoin actuel de sécurisation de la vie économique.

Enfin, la réforme du droit commun des contrats par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 pose par ailleurs des problèmes d'articulation avec le droit spécial des contrats. Ainsi, dans le contrat d'entreprise, les parties ne déterminent pas nécessairement le prix du contrat au moment de sa conclusion. Il peut donc revenir au juge la faculté, sous certaines conditions, de fixer ce prix, ce que le droit commun actuel issu de la réforme de 2016 ne permet pas de faire de manière satisfaisante. L'ordonnance aura donc vocation à harmoniser les règles de fixation de prix.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La réforme du droit des contrats spéciaux permettra de poursuivre la vaste oeuvre de rénovation du droit des obligations engagée par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Elle s'inscrit de manière plus générale dans le mouvement de modernisation du code civil qui s'est engagé depuis la célébration de son bicentenaire en 2004.

La réforme aura d'abord pour objectif de mettre les dispositions relatives aux contrats spéciaux en conformité avec le droit positif. En ce sens, elle doit tendre à consolider des principes jurisprudentiels acquis et à intégrer les innovations nécessaires pour embrasser les besoins juridiques contemporains.

La réforme doit ensuite tenir compte de la multiplication et de la massification des transactions, de l'essor pris par certains contrats considérés comme mineurs en 1804, ainsi que des progrès technologiques et du développement du numérique qui ont fait apparaître de nouvelles formes de relations contractuelles. Le mandat, par exemple, s'est diversifié par rapport à 1804. Aujourd'hui, il connaît différentes formes comme le mandat en blanc (le mandat donné sans désigner expressément un mandataire), la commission (contrat conclu au nom du mandataire pour le compte du mandant - il s'agit d'une sorte de représentation) ou encore le courtage (ou contrat d'entremise).

La modernisation du code civil en matière de contrats spéciaux poursuit également un objectif de simplification et de clarification du droit, ce qui permettra de le rendre plus accessible et plus lisible pour les praticiens mais aussi pour les citoyens. Cet objectif s'avère indispensable dans un pays de tradition juridique écrite pour parvenir à une meilleure prévisibilité de la règle.

Enfin, la réforme vise à assurer, dans le prolongement de celle opérée par l'ordonnance du 10 février 2016 précitée, une cohérence du droit des contrats spéciaux avec le droit commun des contrats.

Réformer le droit des contrats spéciaux contribuera ainsi à le rendre plus effectif et attractif pour l'ensemble des acteurs économiques, sur le plan national mais aussi sur les plans européen et international.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Sur le fond, il aurait pu être envisageable de réformer le droit des contrats spéciaux :

- soit par l'adoption de plusieurs textes législatifs, chacun d'eux étant dédié à un contrat,

- soit par l'adoption d'un texte législatif unique et globale, qui inclut l'ensemble des nouvelles dispositions consacrées aux contrats réformés.

Ces options n'ont pas été retenues :

- d'abord, parce que la réforme projetée vise à réformer près de 400 articles du code civil et autres ;

- ensuite, parce que le sujet est technique et nécessite une analyse des contrats dans leur ensemble. Il serait inopportun, voire risqué, de moderniser le droit de chaque contrat isolément, en procédant à une réforme propre à chacun ;

- enfin, cela participe de l'objectif de sobriété normative.

3.2. OPTION RETENUE

Le choix a été fait de réformer le droit des contrats spéciaux en application de l'article 38 de la Constitution, soit par voie d'habilitation.

Les contrats spéciaux présentent des liens de proximité les uns avec les autres, à l'image de la vente et du louage d'ouvrage (ou contrat d'entreprise). Certaines questions méritent donc d'être abordées au regard de tous, comme celle de la conformité de la chose ou encore celle de la charge des risques, sauf à créer des disparités de régime difficilement compréhensibles et génératrices de contentieux.

Une réflexion d'ensemble permet également d'adopter un vocabulaire uniforme. Aussi, une réforme globale vise à optimiser la cohérence des régimes juridiques et la bonne articulation des textes les uns à l'égard des autres.

Par ailleurs, le nombre de dispositions devant être réformées ensemble est important (près de 400 articles). En outre, la matière contractuelle est particulièrement technique, spécialement s'agissant de contrats spéciaux.

Une habilitation à légiférer par voie d'ordonnance apparaît dès lors comme le moyen de garantir la cohérence de la matière et sa bonne articulation avec le droit commun des contrats tel qu'issu de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 févier 2016, ratifiée par la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

L'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact exposant les dispositions de l'ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

5. CONSULTATIONS MENÉES

Afin de préparer ce projet de réforme, deux rapports, remis au garde des Sceaux respectivement en 2017 et en avril 2023, constituent une base de travail précieuse pour la rédaction de l'ordonnance :

- d'une part, l'« offre de réforme du droit des contrats spéciaux », rédigée par un groupe d'universitaires sous l'égide de l'association Henri Capitant ;

- d'autre part, l'« avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux », élaboré, dans le cadre d'une mission que la Chancellerie a mise en place, par un groupe de travail composé d'universitaires et de praticiens spécialistes de la matière (magistrat, avocat).

Ce second rapport, publié sur le site du ministère de la justice le 29 juillet 2022, a, en outre, été soumis à consultation publique jusqu'au 15 janvier 2023. Cette consultation a permis de recueillir des commentaires et observations émanant à la fois d'universitaires et de praticiens - principalement avocats et notaires - ainsi que d'organisations professionnelles et d'institutions publiques.

Dans le cadre de la rédaction de l'ordonnance, des consultations seront également menées avec l'ensemble des acteurs concernés directement ou indirectement : professionnels, représentants de différents secteurs d'activités, représentants de consommateurs et universitaires notamment.

6. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Concernant l'habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures prévues au présent article, un délai d'habilitation de vingt-quatre mois est nécessaire.

Ce délai est justifié d'une part par la technicité de la matière. Il y a également la nécessité d'assurer la coordination et la cohérence des dispositions à prendre avec celles d'autres codes, tels le code de la consommation et le code de commerce notamment, et avec la réforme du droit commun des contrats opérée par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. D'autre part, il s'explique par le nombre de dispositions concernées qui portent aujourd'hui sur près de quatre cents articles.

Un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de quatre mois à compter de la publication de l'ordonnance.

CHAPITRE III - SIMPLIFIER ET ACCÉLÉRER LES PROCÉDURES JUDICIAIRES

Article 12 - Accélérer le traitement des requêtes devant la juridiction administrative

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le code de justice administrative prévoit la possibilité de recourir aux magistrats honoraires ainsi que la possibilité pour certains magistrats administratifs de statuer en qualité de juge des référés.

Les magistrats honoraires sont des magistrats qui, lors de leur admission à la retraite, sont autorisés à se prévaloir de l'honorariat de leurs fonctions afin de continuer à bénéficier de certains privilèges attachés à leurs anciennes fonctions et dans des cas déterminés à exercer certaines fonctions juridictionnelles ou non-juridictionnelles. S'agissant de ces dernières fonctions, l'article L. 222-2 du code de justice administrative prévoit ainsi que « dans tous les cas où la participation d'un magistrat de tribunal administratif ou de cour administrative d'appel à une commission est prévue, la désignation peut porter sur un magistrat honoraire ».

Les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel comptaient 53 magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative pour l'année 2023.

Le statut des magistrats honoraires exerçant au sein des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel est déterminé par les articles L. 222-2-1 et suivants du code de justice administrative.

L'article L. 222-2-1 du code de justice administrative énumère les fonctions juridictionnelles que peuvent exercer les magistrats honoraires au sein des tribunaux administratifs. Aux termes de ces dispositions, « Le président du tribunal administratif peut désigner des magistrats administratifs honoraires (...) pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale dans la limite d'un magistrat honoraire par formation de jugement. / Les magistrats honoraires peuvent également statuer : / 1° Sur les recours relevant de la compétence du juge statuant seul ; / 2° Sur les référés présentés sur le fondement du livre V ; / 3° Sur les recours en annulation dont le tribunal est saisi en application des articles L. 614-8, L. 614-15 ou L. 732-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. ». L'article L. 222-5 du même code prévoit par ailleurs que « Le président de la cour administrative d'appel peut désigner des magistrats honoraires inscrits sur la liste prévue à l'article  L. 222-2-1 pour exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale ou pour statuer sur les référés présentés sur le fondement du livre V. ».

Les fonctions confiées aux magistrats honoraires ont progressivement évolué. La loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration a prévu que les magistrats honoraires sont compétents « pour statuer sur les litiges relatifs aux arrêtés de reconduite à la frontière ». Les lois n° 2011-672 du 16 juin 2011156(*) et n° 2016-274 du 7 mars 2016157(*) ont étendu cette compétence à certains recours en contentieux des étrangers. La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019158(*) a opéré un élargissement important des fonctions attribuées aux magistrats honoraires, en leur donnant compétence pour « exercer les fonctions de rapporteur en formation collégiale dans la limite d'un magistrat honoraire par formation de jugement », ainsi que pour statuer sur « les recours relevant de la compétence du juge statuant seul » et sur « les référés présentés sur le fondement du livre V ».

Si le recours aux magistrats honoraires s'est progressivement accru, ces derniers ne peuvent pas compléter une formation de jugement, en cas de vacance ou d'empêchement de l'un de ses membres. En outre, ils ne peuvent exercer les fonctions pouvant être déléguées à un magistrat administratif dans le cadre des enquêtes publiques relatives aux projets, plans et programmes ayant une incidence sur l'environnement sur le fondement des articles L. 123-1 et suivants du code de l'environnement. Ces missions consistent notamment à désigner les commissaires enquêteurs ou les membres de la commission d'enquête, à demander à ces commissaires enquêteurs ou membres de la commission de compléter leurs conclusions, à fixer par ordonnance le montant de l'indemnité due aux commissaires enquêteurs ou encore le montant de la provision versée par le responsable du projet et, le cas échéant, celui de l'allocation provisionnelle demandée par les commissaires enquêteurs. Les magistrats honoraires ne peuvent enfin en l'état du droit être chargés d'accomplir les diligences utiles pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution.

Or, l'élargissement des missions pouvant être confiées aux magistrats honoraires est un moyen de répondre à la hausse du nombre de recours enregistrés par les juridictions administratives. Le rapport public annuel du Conseil d'Etat pour l'année 2022 indique ainsi que le nombre d'affaires enregistrées par les tribunaux administratifs en 2018, 2019, 2020, 2021 et 2022 était respectivement de 213 029, 231 280, 210 514, 241 384 et 241 187. Le nombre d'affaires enregistrées par les cours administratives d'appel pour ces mêmes années était respectivement de 33 773, 35 684, 30 229, 34 012 et 30 446.

En outre, la juridiction administrative observe une hausse des demandes d'exécution des décisions de justice. Le rapport public annuel pour l'année 2022 indiquait ainsi que « L'année 2021 avait été caractérisée par une augmentation très sensible et inédite du nombre de demandes d'exécution (+ 23 % toutes juridictions confondues). La hausse s'est poursuivie en 2022, mais de manière beaucoup plus modeste : 4601 nouvelles demandes ont été enregistrées, contre 4487 en 2021, soit une progression de 2,5 % environ. ».

Enfin, les vacances de poste sont appelées à être plus fréquentes en cours d'année du fait du renforcement des obligations de mobilité des magistrats administratifs. En effet, depuis la réforme de l'encadrement supérieur de l'Etat, les magistrats recrutés après le 1er janvier 2023 sont soumis à une obligation de double mobilité, au grade de conseiller puis au grade de premier conseiller.

S'agissant des référés, le code de justice administrative prévoit au livre V de sa partie législative un titre Ier intitulé « Le juge des référés ». Au sein de ce titre, l'article L. 511-2 détermine les conditions que doivent remplir les magistrats désignés par les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pour exercer les fonctions de juge des référés. En l'état du droit, deux conditions cumulatives sont exigées, tenant à ce que, sauf absence ou empêchement, les magistrats désignés disposent d'une ancienneté minimale de deux ans et aient au moins atteint le grade de premier conseiller. Ces conditions résultent de la loi n° 2000-597 du 30 juin 2000 relative aux référés devant les juridictions administratives.

Depuis l'entrée en vigueur de ces dispositions, les règles applicables aux magistrats administratifs ont fortement évolué.

En premier lieu, le décret n° 2023-486 du 21 juin 2023 modifiant le statut des magistrats administratifs, pris en application de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'Etat, a modifié le nombre d'échelons au sein des grades des magistrats administratifs. L'article R. 234-1 du code de justice administrative disposait, dans sa version en vigueur du 16 avril 2022 au 1er juillet 2023, que le grade de « premier conseiller comporte huit échelons. Celui de conseiller en comporte sept. ». Depuis l'entrée en vigueur du décret du 21 juin 2023 précité, l'article R. 234-1 dispose que : « Les grades de conseiller, premier conseiller et président comprennent respectivement trente, trente-deux et vingt-six échelons. La durée passée dans chacun des échelons de ces grades est de dix-huit mois. ». Le nombre d'échelons pour les grades de conseiller et de premier conseiller a donc considérablement augmenté. Par conséquent, les magistrats au grade de conseiller n'atteignent le grade de premier conseiller qu'au bout de six ans. Dès lors, la condition de grade prévue par l'article L. 511-2 du code de justice administrative n'a plus la même portée que sous l'empire des anciennes dispositions de l'article R. 234-1 du code de justice administrative.

En deuxième lieu, la condition d'ancienneté de deux ans est devenue suffisante pour permettre aux magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de statuer par ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et pour siéger en juge unique sur le fondement de l'article R. 222-13 du même code. Ainsi, le décret n° 2023-1338 du 28 décembre 2023 a mis fin à la condition cumulative, aux termes de laquelle « les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller » sont compétents pour statuer sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, pour la remplacer par une condition alternative, aux termes de laquelle « les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans ou ayant atteint au moins le grade de premier conseiller » peuvent statuer par voie d'ordonnance sur le fondement de l'article R. 222-1. S'agissant de l'article R. 222-13, le pouvoir réglementaire a prévu une condition alternative dès 2006 pour la mise en oeuvre des pouvoirs conférés par l'article R. 222-13159(*).

En troisième et dernier lieu, les tribunaux administratifs font face à une augmentation croissante du nombre de référés : le nombre de référés enregistrés en 2019, 2021, 2022 et 2023 était respectivement de 34 421, 45 446, 47 282, et 47 646. Ces chiffres sont à rapporter au nombre de 701 premier conseillers affectés en juridiction au 1er mars 2024.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

En premier lieu, le cadre constitutionnel relatif aux magistrats honoraires résulte de la décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019160(*), par laquelle le Conseil constitutionnel a jugé qu' « Il résulte des dispositions précitées de l'article 16 de la Déclaration de 1789 que les principes d'indépendance et d'impartialité sont indissociables de l'exercice des fonctions juridictionnelles./ Il suit de là que les fonctions de magistrat de l'ordre administratif doivent en principe être exercées par des personnes qui entendent y consacrer leur vie professionnelle. Ces principes ne font pas obstacle à ce que, pour une part limitée, des fonctions normalement réservées aux magistrats administratifs en activité puissent être exercées à titre temporaire par des personnes qui n'entendent pas pour autant embrasser une telle carrière à condition que, dans cette hypothèse, des garanties appropriées permettent de satisfaire aux principes d'indépendance et d'impartialité. Il importe à cette fin que les intéressés soient soumis aux droits et obligations applicables à l'ensemble des magistrats, sous la seule réserve des dispositions spécifiques qu'impose l'exercice à titre temporaire de leurs fonctions. ». Le Conseil a ainsi jugé que « l'extension des fonctions pouvant être exercées par les magistrats administratifs honoraires, s'accompagne de la soumission de ces magistrats aux mêmes obligations et garanties statutaires d'indépendance et d'impartialité que celles applicables aux magistrats en activité. » et qu' « en prévoyant que les magistrats administratifs honoraires ne peuvent être désignés pour exercer des fonctions de rapporteur en formation collégiale que dans la limite d'un magistrat honoraire par formation de jugement, le législateur a garanti que les fonctions exercées par des magistrats honoraires ne représentent qu'une part limitée de celles normalement réservées à des magistrats en activité. ».

En deuxième lieu, la célérité de la juridiction administrative répond au principe constitutionnel de droit à un recours effectif et à l'objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice. Les mesures envisagées, consistant à permettre aux magistrats honoraires de compléter une formation de jugement et d'assurer certaines fonctions dans le cadre des enquêtes publiques en matière environnementale, répondent à cet objectif de célérité de la justice administrative.

S'agissant du droit à un recours effectif, le Conseil constitutionnel a considéré qu'il découlait de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, en jugeant, par une décision n° 96-373 du 9 avril 1996161(*), « qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen : « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; qu'il résulte de cette disposition qu'en principe il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction ». Le juge constitutionnel a réaffirmé sa jurisprudence par une décision n° 2014-387 QPC du 4 avril 2014162(*).

S'agissant de l'objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice, le Conseil constitutionnel a jugé par une décision n° 89-26 DC du 28 juillet 1989 que « la bonne administration de la justice commande que l'exercice d'une voie de recours appropriée assure la garantie effective des droits des intéressés ». L'exigence de statuer dans un délai raisonnable de jugement repose également sur des considérations de bonne administration de la justice163(*).

En troisième et dernier lieu, le Conseil constitutionnel a consacré le droit à l'exécution des décisions juridictionnelles, par une décision n° 2014-455 QPC du 6 mars 2015, M. Jean de M, en jugeant « qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; qu'est garanti par cette disposition le droit des personnes à exercer un recours juridictionnel effectif qui comprend celui d'obtenir l'exécution des décisions juridictionnelles »164(*).

En confiant aux magistrats honoraires la compétence pour accomplir les diligences utiles pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution, la mesure contribue à la bonne administration de la justice.

Les procédures de référé, prévues au livre V du code de justice administrative, contribuent également à satisfaire ces exigences constitutionnelles. En ce sens, la modification de l'article L. 511-2 du code de justice administrative a pour objet de permettre à un nombre plus important de magistrats administratifs d'exercer les fonctions de juge des référés et ainsi à garantir le recours effectif au juge, une bonne administration de la justice et un délai raisonnable de jugement.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

La célérité de la juridiction administrative répond aux exigences conventionnelles de droit à un recours effectif. Le droit au recours est garanti par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dont l'article 13 prévoit que « toute personne dont les droits et libertés reconnus (...) dans la convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale ». La Cour européenne des droits de l'homme juge que le recours exigé par l'article 13 « doit être effectif en fait comme en droit »165(*), mais également que l'article 13 de la Convention « garantit un recours effectif devant une instance nationale permettant de se plaindre d'une méconnaissance de l'obligation d'entendre les causes dans un délai raisonnable »166(*).

La Cour de justice de l'Union européenne juge également que l'existence d'un contrôle juridictionnel constitue la traduction « d'un principe général du droit qui se trouve à la base des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres »167(*).

Par ailleurs, la Cour européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a consacré le droit à l'exécution des décisions juridictionnelles, par une décision Hornsby c/ Grèce du 19 mars 1997, en jugeant que « L'exécution d'un jugement ou d'un arrêt, de quelque juridiction que ce soit, doit donc être considérée comme faisant partie intégrante du « procès » au sens de l'article 6 » (§40).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La mesure proposée modifie une disposition de nature législative, les missions confiées aux magistrats honoraires exerçant au sein des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel étant déterminées par les articles L. 222-2-1 et L. 222-5 du code de justice administrative. Le législateur est compétent dès lors qu'il lui appartient de garantir « que les fonctions exercées par des magistrats honoraires ne représentent qu'une part limitée de celles normalement réservées à des magistrats en activité », en application du principe d'indépendance et d'impartialité, indissociables de l'exercice des fonctions juridictionnelles168(*). Le Conseil d'Etat a jugé en ce sens que « seule la loi peut fixer les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs »169(*). Doivent ainsi être de nature législative les dispositions qui concernent l'indépendance des membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, l'article 34 de la Constitution prévoyant que la loi fixe les règles concernant « les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques » et les « les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'Etat »170(*).

Par ailleurs et s'agissant de la modification de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, pour les mêmes motifs qu'énoncés supra et dès lors que la mesure envisagée modifie une disposition de nature législative, le recours au législateur est nécessaire.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cette mesure a pour objectif de permettre aux tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de traiter un nombre de requêtes plus important en palliant la vacance ou l'empêchement d'un magistrat à statuer au sein d'une formation de jugement. Elle permet également d'augmenter au sein des tribunaux administratifs le nombre de magistrats pouvant exercer des fonctions afférentes aux enquêtes publiques relatives aux projets, plans et programmes ayant une incidence sur l'environnement. Elle répond enfin à l'augmentation du nombre de demandes d'exécution des décisions juridictionnelles.

Cette mesure a également pour objectif de faciliter et d'accélérer le traitement des requêtes en référé. Elle répond à l'augmentation du nombre de requêtes en référé enregistrées dans les tribunaux administratifs constatée sur la période courant de l'année 2019 à l'année 2023. Elle constitue également une mesure rendue nécessaire suite au décret n° 2023-486 du 21 juin 2023 modifiant le statut des magistrats administratifs, pris en application de l'ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'Etat, et modifiant les dispositions de l'article R. 234-1 du code de justice administrative.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Néant.

3.2. OPTION RETENUE

En premier lieu, il est proposé de modifier l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative afin de prévoir que les magistrats honoraires des tribunaux administratifs peuvent exercer trois nouvelles fonctions.

Ainsi, le premier alinéa de l'article L. 222-2-1 est modifié pour permettre aux magistrats honoraires de compléter une formation de jugement. Cette mesure permettra de répondre à la vacance ou à l'empêchement d'un membre d'une formation de jugement.

Par ailleurs, un nouvel alinéa prévoit que les magistrats honoraires peuvent être désignés par le président du tribunal administratif pour accomplir les diligences utiles pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution.

Enfin, un nouvel alinéa prévoit que les magistrats honoraires pourront également être désignés pour assurer les missions pouvant être déléguées à un conseiller désigné à cette fin en application des articles L. 123-3 à L. 123-18 du code de l'environnement, c'est-à-dire relatives aux enquêtes publiques relatives aux projets, plans et programmes ayant une incidence sur l'environnement.

En deuxième lieu, il est proposé de modifier l'article L. 222-5 du code de justice administrative afin de prévoir que les magistrats honoraires des cours administratives d'appel peuvent exercer deux nouvelles fonctions.

D'une part, le premier alinéa de l'article L. 222-5 est modifié pour permettre aux magistrats honoraires de compléter une formation de jugement, dans la limite d'un magistrat honoraire par formation de jugement.

D'autre part, un alinéa est inséré après l'alinéa 1er pour permettre aux magistrats honoraires d'accomplir les diligences utiles pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution.

En troisième et dernier lieu, il est proposé de modifier l'article L. 511-2 du code de justice administrative afin de supprimer la condition de grade pour les magistrats désignés par les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pour exercer les fonctions de juge des référés. Seule la condition d'ancienneté de deux ans est maintenue et conditionne l'accès à ces fonctions.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure envisagée modifie les articles L. 222-2-1, L. 222-5 et L. 511-2 du code de justice administrative.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les mesures envisagées visent à permettre aux magistrats honoraires de compléter une formation de jugement, d'assurer certaines fonctions dans le cadre des enquêtes publiques en matière environnementale, et suppriment la condition de grade relative à l'exercice des fonctions de juge des référés. Elles répondent au cadre conventionnel présenté supra, notamment à l'objectif de célérité de la justice administrative.

Par ailleurs, en confiant aux magistrats honoraires la compétence pour accomplir les diligences utiles pour assurer l'exécution d'une décision juridictionnelle faisant l'objet d'une demande d'exécution, la mesure contribue à la bonne administration de la justice.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Néant.

4.2.3. Impacts budgétaires

Les dispositions de l'article D. 222-24-1 du code de justice administrative prévoient que : « Les magistrats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles sur le fondement de l'article L. 222-2-1 ou des fonctions d'aide à la décision sur le fondement de l'article L. 222-2-3 perçoivent une indemnité dont le montant, qui peut varier selon la nature des fonctions exercées, et les modalités d'attribution sont fixés par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé du budget.

Le montant annuel alloué au magistrat honoraire au titre de ces fonctions ne peut excéder 27 000 €.

Ils sont indemnisés de leurs frais de déplacement temporaire dans les conditions prévues par le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 modifié fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat. »

L' arrêté du 3 août 2020 fixant le montant des indemnités dues aux magistrats administratifs honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles ou d'aide à la décision prévoit, en fonction de la nature des fonctions, le montant perçu par le magistrat honoraire par dossier inscrit au rôle d'une audience.

Les nouvelles fonctions impliquent que cette grille indemnitaire soit complétée. Eu égard au montant des indemnités, au nombre de magistrats honoraires et au montant annuel maximal pouvant être alloué, l'impact budgétaire de cette nouvelle mesure ne devrait pas être conséquent.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.4. IMPACTS SUR LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES

La mesure envisagée permet de fluidifier le fonctionnement de la juridiction administrative. La possibilité ouverte aux magistrats honoraires de compléter une formation de jugement sans exercer les fonctions de rapporteur permet de pallier occasionnellement la vacance ou l'empêchement d'un magistrat en fonction. Les missions relatives à l'organisation des enquêtes publiques et à l'exécution des décisions juridictionnelles contribuent à l'allégement de la charge de travail du chef de juridiction, et ce dans un contexte d'augmentation des demandes d'exécution des décisions juridictionnelles. Enfin, la suppression de la condition de grade pour l'exercice des fonctions de juge des référés permet d'accroître le nombre de magistrats pouvant exercer ces fonctions et facilite ainsi le fonctionnement de la juridiction administrative.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure envisagée contribue au fonctionnement régulier de la juridiction administrative, à la célérité et à la bonne administration de la justice. Elle participe à une meilleure exécution des décisions juridictionnelles.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La présente mesure contribue à la célérité de la justice administrative et bénéficie donc aux justiciables.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

En permettant aux magistrats honoraires d'exercer les fonctions dévolues aux magistrats en matière d'enquêtes publiques relatives aux projets, plans et programmes ayant une incidence sur l'environnement, la présente mesure contribue à faciliter l'organisation de ces enquêtes publiques par les tribunaux administratifs.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel a été consulté en application de l'article L. 232-3 du code de justice administrative. Aux termes de ces dispositions : « Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel connaît des questions intéressant le fonctionnement et l'organisation des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (...) / Il émet un avis sur toute question relative au statut des magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi qu'à leur régime indemnitaire, à leur formation, à l'égalité professionnelle, à la parité et à la lutte contre toutes les discriminations. ». Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel a rendu un avis favorable le 10 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions relatives à la procédure administrative contentieuse sont applicables de plein droit dans les collectivités régies par le principe d'identité législative, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie (6° de l'article 6-2 de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 organique relative à la Nouvelle-Calédonie), en Polynésie française (6° de l'article 7 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française), dans les Terres australes et antarctiques françaises (8° de l'article 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton), et à Wallis-et-Futuna (a de l'article 4 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer. Le présent article est donc applicable sur l'ensemble du territoire de la République, sans qu'aucune mention expresse d'applicabilité ne soit nécessaire. 

5.2.3. Textes d'application

Les présentes dispositions appellent un nouvel arrêté déterminant la rémunération perçue par les magistrats honoraires pour l'exercice des nouvelles fonctions qui leurs sont confiées.

TITRE VI - ALIGNER LES DROITS DES TRÈS PETITES ENTREPRISES SUR CEUX DES PARTICULIERS

Article 13 - Aligner le droit des très petites entreprises sur celui des particuliers en matière bancaire

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le présent article vise à porter des mesures de simplification relevant du domaine bancaire nécessaires pour rendre plus fluides et plus transparentes les relations d'affaires entre les très petites entreprises (TPE) / petites et moyennes entreprises (PME)171(*) et les établissements bancaires. Plusieurs axes sont poursuivis, en premier lieu en améliorant la lisibilité de la norme garantissant la gratuité de toute clôture de comptes bancaires détenus par des professionnels, en deuxième lieu, pour les TPE, et en second lieu en prévoyant l'envoi gratuit d'un relevé annuel des frais bancaires acquittés par l'entreprise.

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

Aux termes du I. de l'article L. 312-1-7 du code monétaire et financier, la « clôture de tout compte de dépôt ou compte sur livret est gratuite » sans que soit précisé que cela s'applique autant aux personnes morales que physiques.

Cet article figure à la sous-section 2 du chapitre sur les comptes et aux dépôts du code monétaire et financier relative aux relations des établissements de crédit avec le client, toutes clientèles confondues. Ainsi, lorsque les dispositions de cette sous-section ciblent spécifiquement les consommateurs et les micro-entrepreneurs, elles font l'objet d'une précision textuelle limitant la portée de la norme aux personnes physiques agissant ou pas pour des besoins professionnels. Le I. de l'article L. 312-1-7 ne fait l'objet d'aucune restriction de périmètre dans son application, il s'applique donc à l'ensemble des clients de l'établissement de crédit, quelle que soit leur nature.

Néanmoins, lors des opérations de clôture de compte bancaire pour les clients professionnels, des frais peuvent, dans la pratique, être prélevés pour l'acte de clôture.

L'absence de précision de la disposition légale créé donc une ambiguïté qu'il est nécessaire de lever afin que la clôture de comptes bancaires des clients professionnels, dont le plus grand sont des TPE et des PME, puissent s'opérer de manière simple et sans équivoque sur leur tarification.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

La mise à disposition d'un relevé annuel des frais acquittés simplifierait la lisibilité de la tarification bancaire acquittée pour des entreprises de très petite taille soucieuses de maîtriser ce coût.

La vocation de ce relevé, déjà mis à la disposition annuellement des consommateurs aux termes de l'article L. 314-7 du code monétaire et financier, est d'offrir au client une vue globale et harmonisée de la facturation des services et des produits qu'il utilise dans le cadre de la gestion de son compte.

Le rapport «  Accès des TPE et PME aux services bancaires » du 7 mai 2021 de l'Observatoire du financement des entreprises mentionne, s'agissant des offres bancaires aux PME et aux TPE, des différenciations tarifaires globalement favorables et adaptées aux clients TPE. La comparaison de ces offres atteste d'une offre concurrentielle variée.

Toutefois, concernant la comparabilité des offres, certaines difficultés ont été relevées par l'Observatoire du financement des entreprises. Sur les 1 519 avis recueillis, 32 % considèrent ces offres peu ou pas comparables entre elles. La perception apparaissait nettement plus favorable dans le cas des entreprises ayant plusieurs banques. Les résultats détaillés de cette enquête, auprès de la CMA, de la CPME, du MEDEF et de l'U2P, annexés au rapport, démontrent plus précisément que les entrepreneurs sont critiques sur le « manque de lisibilité et de clarté des tarifs bancaires ».

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'alignement des droits des TPE/PME sur ceux des particuliers en matière bancaire a pour but de leur garantir un niveau de protection plus élevé dans la relation avec les établissements de crédit tout en respectant la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre des parties prenantes.

Les propositions avancées se fondent sur le respect des principes du droit constitutionnel français, à savoir la liberté contractuelle, consacrée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que par la jurisprudence du Conseil constitutionnel (voir notamment la décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998 et la Décision n° 2013-672 DC du 13 juin 2013) et la liberté d'entreprendre, protégée par la Constitution française, notamment par la décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982 et l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Outre le respect des libertés précitées, les mesures envisagées visent à atteindre l'objectif de valeur constitutionnelle, d'accessibilité et d'intelligibilité du droit, principe consacré par la décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 du Conseil constitutionnel, qui implique que les règles de droit doivent être claires, précises et compréhensibles par tous, y compris les TPE qui ne disposent pas nécessairement de moyens juridiques importants.

Le principe d'égalité, qui découle de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, requiert de ne pas créer de différence de traitement qui ne serait pas justifiée par une différence de situation ou par un motif d'intérêt général en rapport avec l'objet de la loi.172(*)

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les mesures proposées s'inscrivent dans le cadre du droit primaire de l'Union européenne, notamment en ce qui concerne la liberté d'entreprise consacrée à l'article 16 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la liberté de concurrence des articles 101 et 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE), visant à garantir un environnement économique juste et équitable, en prévenant les pratiques anticoncurrentielles et en favorisant une concurrence saine entre les entreprises.

La directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur la comparabilité des frais liés aux comptes de paiement, le changement de compte de paiement et l'accès à un compte de paiement assorti de prestations de base fixe des règles relative à la transparence et à la comparabilité des frais facturés aux consommateurs pour les comptes de paiement qu'ils détiennent dans l'Union, ainsi que des règles concernant le changement de compte de paiement dans un État membre et des règles visant à faciliter l'ouverture transfrontalière d'un compte de paiement pour les consommateurs.

Le consommateur y est néanmoins défini comme toute personne physique qui agit à des fins étrangères à son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.

Aucun acte du droit dérivé de l'Union européenne n'encadre donc les conditions dans lesquelles un compte détenu par des professionnels peut être clôturé ou les règles de transparence sur les frais facturés à ces mêmes professionnels.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Néant.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

Cette disposition vise à clarifier le droit existant applicable en cas de fermeture de compte auprès d'un établissement de crédit. La clôture de compte de dépôt est gratuite. Néanmoins, l'article L. 312-1-7 du code monétaire et financier ne précise pas la nature juridique du détenteur dudit compte pouvant bénéficier de cette gratuité. Dans l'ambiguïté, des clôtures de comptes détenus par des professionnels peuvent donc conduire le cas échéant à des facturations de frais bancaires.

Afin de remédier à cette situation, il est nécessaire de sécuriser le cadre juridique applicable. La précision doit être apportée à la disposition législative correspondante dans le code monétaire et financier. Il y a donc nécessité de légiférer.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

Les professionnels sont informés des frais bancaires payés via les supports et outils bancaires mis à leur disposition par leurs banques. Ainsi, les banques communiquent toutes les informations sur les frais bancaires nécessaires à la tenue de comptabilité de l'entreprise sous forme d'un relevé mensuel, notamment pour distinguer les opérations soumises ou non à la TVA. Les clients professionnels ont en outre accès aux plaquettes tarifaires dédiées.

Dans le rapport du 7 mai 2021 sur l'accès des TPE et PME aux services bancaires de l'Observatoire du financement des entreprises, les fédérations professionnelles notent néanmoins que leurs adhérents critiquent le manque de lisibilité et de clarté des tarifs bancaires alors que les entrepreneurs ont « peu de temps et pas forcément le temps de décortiquer les contrats ».

Afin d'offrir aux consommateurs une vue globale, harmonisée et unique de la facturation des services et des produits bancaires utilisés dans le cadre du compte, un relevé annuel de frais est mis gratuitement à la disposition des clients. Cette mesure produirait un bénéfice similaire en cas d'extension aux très petites entreprises.

Pour mettre en oeuvre cette mesure, les établissements de crédit auraient à remplir une obligation dans le cadre d'une relation commerciale pour l'essentiel régie par la liberté contractuelle, principe de niveau législatif. Il est donc nécessaire de légiférer pour mettre en oeuvre ce dispositif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

Cette mesure poursuit l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.

Elle vise à garantir l'application de la loi, c'est-à-dire l'absence de frais appliqués par la banque pour l'acte même de clôture du compte bancaire détenus par des professionnels, sans préjudice de la faculté pour l'établissement de crédit de porter au débit du compte les sommes conventionnellement dues par le client (intérêts, commissions, frais pour les chèques émis avant la clôture, effets de commerce revenant impayés, etc.) y compris postérieurement à la clôture s'ils sont la conséquence d'engagements antérieurs à la clôture.

La meilleure lisibilité de la norme permet de sécuriser les entreprises et de favoriser la mise en concurrence des établissements bancaires.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

Pour les TPE, l'envoi gratuit d'un relevé annuel des frais bancaires acquittés par l'entreprise contribue à renforcer la transparence tarifaire, la comparabilité des prix et donc la concurrence.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

Aucune autre option n'a été envisagée.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

Dans le cadre actuel, deux relevés annuels sont adressés par les banques à leurs clients TPE/PME :

- un relevé annuel sur les frais liés aux financements de court terme, mis en place depuis 2016, à la suite des engagements pris par la profession bancaire au sein de l'Observatoire du financement des entreprises ;

- un relevé annuel sur les frais liés aux encaissements par carte bancaire.

Les clients TPE/PME, s'agissant des frais bancaires attachés au fonctionnement du compte courant, reçoivent par ailleurs un relevé mensuel.

Une première piste aurait pu être de compléter le relevé annuel des frais liés aux encaissements par carte bancaire par les frais attachés au fonctionnement du compte. A des fins de plus grande lisibilité, et du fait de la différence fondamentale de nature entre ces deux types de frais - entre d'une part des frais associés à des choix de solution de paiement et liés à la nature des actes d'achat et, d'autre part, des frais plus communs entre les professionnels associés à des fonctions courantes du compte bancaire - il a été privilégié la voie d'un relevé spécifique similaire à celui envoyé aux consommateurs.

Une seconde piste aurait pu être de mettre en place un tel relevé pour les clients TPE comme PME. Aux termes du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 qui précise les critères permettant de déterminer l'appartenance à une catégorie d'entreprises :

- une microentreprise est une entreprise dont l'effectif est inférieur à 10 personnes et dont le chiffre d'affaires ou le total du bilan annuel n'excède pas 2 millions d'euros ;

- une PME est une entreprise dont l'effectif est inférieur à 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total de bilan n'excède pas 43 millions d'euros.

D'après l'INSEE173(*), en 2018 la France dénombrait 2 135 424 TPE (93,6 % du total des entreprises en France) et 139 286 PME (6,1 % du total).

Les PME disposent davantage que les TPE d'une structuration interne de la fonction financière. Par ailleurs, la mesure vise à cibler les petites entreprises de proximité qui ne disposent souvent pas du temps nécessaire ou des moyens pour identifier les informations tarifaires, les rendre lisibles et analysables. Pour ces différentes raisons, la proposition se concentre sur les TPE.

3.2. OPTION RETENUE

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

En apportant une précision au code monétaire et financier, la mesure permet de garantir l'absence de frais de clôture de compte bancaire pour les professionnels. L'article L. 312-1-7 du code monétaire et financier est modifié à cette fin.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

La mesure vise à étendre aux TPE l'envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires dont bénéficient déjà les particuliers en modifiant l'article L. 314-7 du code monétaire et financier.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie l'article L. 312-1-7 du code monétaire et financier afin de prévoir explicitement la gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales.

Par ailleurs, l'article L. 314-7 du même code est modifié afin d'étendre aux TPE l'envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires dont bénéficient déjà les particuliers.

Ces dispositions apparaissent conformes à la Constitution.

a) S'agissant de la gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

La disposition envisagée ne modifie pas l'état du droit existant. Par suite, elle ne saurait ni porter une quelconque atteinte à la liberté d'entreprendre ni, en l'absence de rétroactivité, porter atteinte aux contrats en cours.

b) S'agissant de l'envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE

Si elle porte atteinte à la liberté d'entreprendre des établissements de crédits et, de manière sous-jacente, à la liberté de fixer ses tarifs, cette atteinte est, au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, proportionnée à l'objectif poursuivi.

Ainsi que le reconnaît le Conseil constitutionnel, il est possible de concilier la liberté d'entreprendre avec un motif d'intérêt général, celui-ci étant largement entendu. Le Conseil a ainsi reconnu « des nécessités économiques d'intérêt général propres » au secteur de la communication (27 juillet 2000, n° 2000-433 DC, cons. 40) ou encore le développement de la concurrence (12 août 2022, n° 2022-843, cons. 34).

En l'espèce, il convient de relever, en premier lieu, l'atteinte limitée portée par la mesure envisagée à la liberté d'entreprendre. D'une part, si le coût est difficilement chiffrable (cf. infra), le relevé pourra être édité de manière dématérialisée et, à terme, de façon automatisée, ce qui limite la charge pesant sur les établissements de crédit. D'autre part, l'obligation d'envoi d'un relevé annuel ne bénéficiera qu'aux TPE, ce qui limite le champ d'application de la mesure. En deuxième lieu, compte tenu du bénéfice attendu de cette mesure pour la concurrence et de la nécessité de diminuer les charges pesant sur les TPE afin de les rendre plus compétitives, cette atteinte apparaît proportionnée.

Il semble que les contrats conclus entre les TPE et les établissements bancaires ne prévoient pas de clauses relatives à l'envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires. Dans ces conditions, la disposition ne paraît pas porter atteinte aux contrats en cours.

Le principe d'égalité est, enfin, respecté. En l'espèce, si la mesure ne concerne que les TPE et non les plus grandes entreprises, la différence de traitement ainsi instituée est justifiée par une différence de situation en rapport direct avec l'objet de la loi. En effet, les plus petites entreprises, qui disposent de moins de ressources juridiques et financières, ont besoin d'un accès facilité à l'information sur les frais bancaires qui sont prélevés.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les garanties apportées aux TPE/PME dans le domaine bancaire le sont dans le respect des principes de concurrence établis par le droit européen. Les propositions avancées garantissent également un traitement équitable et transparent des entreprises sur le marché bancaire par le biais de règles identiques pour tous les acteurs et univoques.

Comme évoqué supra, aucune disposition du droit dérivé de l'UE ne fait obstacle aux dispositions envisagées.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

a) Gratuité de la clôture de comptes détenus par des professionnels personnes morales

Cette mesure offre aux entreprises une clarification du cadre tarifaire applicable lors de la clôture d'un compte bancaire.

Elle n'ajoute pas d'élément nouveau au droit existant. Son impact financier est donc limité mais, sur un plan économique, elle contribue à sécuriser les entreprises en cas de clôture de compte.

b) Envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaires aux TPE clientes

La mesure n'emporte pas d'impact financier direct pour les TPE bénéficiaires.

La mise à disposition gratuite d'un relevé annuel des frais bancaires acquittés permet en revanche aux TPE de disposer d'un outil simple de comparaison tarifaire entre établissements de crédit. Cette mesure de transparence et de lisibilité est à même de donner aux TPE une information utile dans les échanges avec leur agence bancaire.

S'agissant de l'impact sur les établissements de crédit, la FBF estime que, pour chaque groupe bancaire, les coûts minimaux de développement informatique seraient d'environ 1 M€ et les coûts annuels de gestion de plusieurs centaines de milliers d'euros.

Ces estimations n'ont pas pu faire l'objet d'une contre-expertise du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. En particulier, une hypothèse de faible dématérialisation de la diffusion du relevé aurait un effet majorant sur le coût annuel de gestion du dispositif. S'agissant du coût à l'échelle du secteur bancaire des développements informatiques requis, ils seraient sur la base de l'estimation de la FBF de 6 M€, soit un coût unitaire d'environ 2,8 € par TPE - dans l'hypothèse d'une absence totale de multi-bancarisation de cette clientèle.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Néant.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Ces mesures concourent dans l'ensemble à une simplification dans le champ bancaire aux bénéfices des entreprises, en particulier des TPE/PME et des micro-entrepreneurs.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Le présent article est sans impact pour les particuliers puisqu'ils sont déjà concernés par les dispositions envisagées.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Sans objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Les établissements de crédit ont été consultés sur l'ensemble de ces mesures ainsi que leur fédération, la Fédération bancaire française.

La consultation du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières prévu à l'article L. 614-2 du code monétaire et financier a eu lieu selon la procédure d'urgence. Un avis favorable a été émis le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Afin de permettre un temps de sécurisation et d'appropriation du dispositif par les établissements de crédit, une entrée en vigueur différée au 1er janvier 2025 est prévue pour la mesure relative à l'envoi gratuit d'un relevé annuel de frais bancaire.

En revanche, dans la mesure où la gratuité de la clôture des comptes est, en principe, déjà applicable, aucune entrée en vigueur différée n'est apparue nécessaire.

5.2.2. Application dans l'espace

Application de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte

Conformément au principe dit de « l'identité législative », les lois et règlements s'appliquent de plein droit, sans mention d'applicabilité expresse, dans les départements et régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution.

Application de plein droit à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint Pierre et Miquelon

Les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon prévoient que la plupart des lois et règlements y sont applicables de plein droit :

Le principe de l'applicabilité de plein droit des normes juridiques s'applique à Saint-Barthélemy et à Saint Martin, en vertu de leur statut, défini par la loi organique du 21 février 2007174(*). L'article LO. 6213-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), issu de cette loi, énonce ainsi que : « Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent de la loi organique en application de l'article 74 de la Constitution ou de la compétence de la collectivité en application de l'article LO. 6214-3 » (la matière bancaire et financière n'en fait pas partie).

L'article LO. 6313-1 du CGCT comporte des dispositions identiques pour Saint-Martin.

A Saint Pierre et Miquelon, les lois et règlements sont également applicables de plein droit en vertu de l'article LO. 6413-1 du CGCT : « Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'exception de celles qui interviennent dans les matières relevant de la loi organique en application de l'article 74 de la Constitution ou dans l'une des matières relevant de la compétence de la collectivité en application du II de l'article LO. 6414-1 » (la matière bancaire et financière n'en fait pas partie).

Application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna

En application du principe dit de « spécialité législative », les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l'article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l'article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l'Etat et sur mention expresse d'applicabilité.

L'Etat est compétent dans toute la matière bancaire et financière dans ces trois collectivités :

- En Nouvelle-Calédonie, cette compétence est prévue par le 5° du I de l'article 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, article qui définit les compétences de l'Etat dans cette collectivité ;

- En Polynésie française, cette compétence est prévue en application du 7° de l'article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, article qui liste les compétences de l'Etat dans cette collectivité ; l'article 13 précisant par ailleurs que la Polynésie française est compétente dans tous les domaines qui ne relèvent pas de la compétence de l'Etat ;

- Dans les îles Wallis et Futuna, jusqu'à l'intervention des dispositions organiques prévues par l'article 74 de la Constitution, le régime législatif et règlementaire des îles Wallis et Futuna est déterminé par (i) la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 modifiée, conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer; (ii) le décret n° 57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l'assemblée territoriale, du conseil territorial et de l'administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna.

Ce décret liste, en son article 40, les domaines dans lesquels l'assemblée de Wallis et Futuna prend des délibérations portant réglementation territoriale. Parmi ces 41 items, aucun ne concerne, de près ou de loin, les domaines bancaires et financiers.

Il s'agit de rendre applicables dans les collectivités du Pacifique, les modifications :

- De l'article L. 312-7-1 dans les tableaux compteurs Lifou des articles L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 et,

- De l'article L. 314-7 dans les tableaux compteurs Lifou des articles L. 752-10, L. 753-10 et L. 754-8 du code monétaire et financier.

Cette mention expresse d'applicabilité s'accompagne d'une adaptation de la notion de micro-entreprise existant dans la partie réglementaire du livre VII du code précité puisque la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 n'a pas été rendue applicable dans le Pacifique, définition issue des critères retenus par la recommandation 2003/361/CE de la Commission européenne du 6 mai 2003 pour définir les micro, petites et moyennes entreprises.

5.2.3. Textes d'application

La disposition emporte, le cas échéant, des précisions à apporter au décret n° 2014-373 du 27 mars 2014 relatif à la dénomination commune des principaux frais et services bancaires.

Article 14 - Simplifier et faciliter les relations avec les prestataires de services d'assurance

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le présent article vise à contribuer à la simplification dans le champ des assurances à travers trois mesures : en premier lieu, en améliorant l'information délivrée aux entreprises lors d'une réalisation unilatérale d'un contrat par un assureur, en deuxième lieu, en permettant aux entreprises de procéder à la résiliation à tout moment de certains contrats d'assurance et, en troisième lieu, en encadrant les délais d'indemnisation des assureurs à la suite d'un sinistre pour accélérer les réparations.

a. Modalités de résiliation unilatérale des contrats

La possibilité de résilier à la date anniversaire d'un contrat est ouverte tant pour l'assureur que pour l'assuré ( article L. 113-12 du code des assurances). En revanche, en cas de résiliation unilatérale du contrat par l'assureur, ce dernier n'est tenu de motiver sa décision que pour les contrats couvrant une personne physique en dehors de son activité professionnelle ( article L. 113-12-1 du code des assurances).

La transparence des conditions de résiliations des contrats est donc actuellement plus limitée pour les professionnels que pour les particuliers.

b. Résiliation infra-annuelle des contrats

L'article L. 113-15-2 du code des assurances, issu de la loi dite « Hamon » (loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation), confère aux assurés le droit de résilier à tout moment, sans frais ni pénalités, les contrats d'assurance couvrant les personnes physiques, à l'exception des activités professionnelles, après une année de souscription. Cette faculté de résiliation dite infra-annuelle (ou RIA) concerne les contrats conclus ou tacitement reconduits à partir du décret n° 2014-1685 du 29 décembre 2014 relatif à la résiliation à tout moment de contrats d'assurance et portant application de l'article L. 113-15-2 du code des assurances.

L'article L. 113-15-2 du code des assurances a été plus récemment modifié par la loi n° 2019-733 du 14 juillet 2019 relative au droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé afin d'étendre cette faculté de résiliation infra-annuelle aux assurés souhaitant résilier leur contrat de complémentaire santé à tout moment, sans frais ni pénalité, après un an de souscription. Avant cette loi, la résiliation était possible uniquement une fois par an, avant la date d'anniversaire du contrat. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er décembre 2020 et s'applique à tous les contrats, y compris ceux en cours à cette date.

Enfin, cette possibilité de résiliation infra-annuelle a été étendue à l'assurance emprunteur par la loi n° 2022-270 du 28 février 2022 (dite loi « Lemoine ») pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur. Jusqu'alors, l'assuré-emprunteur disposait d'un délai de 12 mois pour résilier le contrat d'assurance groupe lié au prêt à compter de la signature de l'offre de prêt ; au-delà de la première année, l'emprunteur avait la faculté d'utiliser la résiliation annuelle de l'article L. 113-12 du code des assurances. Désormais, l'emprunteur peut résilier à tout moment, y compris la première année, si cette résiliation est suivie d'un changement d'assureur. Les assurés visés par cette mesure sont les emprunteurs ayant conclu un prêt mentionné au 1° de l'article L. 313-1 du code de la consommation. En d'autres termes, il s'agit des emprunteurs, personnes physiques ou morales, ayant souscrit un prêt immobilier pour un bien à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation. Le nouvel article L. 113-12-2 s'applique aux offres de prêts émises à compter du 1er juin 2022 ainsi qu'aux contrats en cours d'exécution à partir du 1er septembre 2022.

Les professionnels ne peuvent quant à eux résilier qu'à la date anniversaire du contrat, même s'il a été souscrit depuis plus d'un an. Cette différence de traitement entre particuliers et petites entreprises n'apparaît pas légitime, dans la mesure où beaucoup d'entre elles se trouvent dans une situation où elles ne disposent pas de la possibilité de mobiliser leurs ressources pour trouver les meilleurs produits d'assurance avant la date butoir et voient leur contrat reconduit pour un an. De même, elle ne permet pas à ces entreprises de faire jouer la concurrence pour obtenir une baisse du prix de leur police.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

En matière de délai d'indemnisation en assurance, le principe est que la liberté contractuelle s'applique. L'article L. 113-5 du code des assurances prévoit ainsi que « l'assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat ».

L'expertise d'assurance n'est pas réglementée en France, en dehors de certains cas particuliers comme l'expertise automobile, qui est une profession réglementée encadrée par le code de la route.

Une autre exception notoire réside dans le cadre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dans lequel certains délais sont encadrés par la loi depuis la loi n° 2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles. L'article L. 125-2 du code des assurances fixe les délais suivants :

- À compter de la déclaration de sinistre, l'assureur a un mois pour informer l'assuré des modalités de mise en jeu des garanties prévues au contrat et pour ordonner une expertise lorsqu'il le juge nécessaire ;

- L'assureur fait une proposition d'indemnisation ou de réparation en nature dans un délai d'un mois à compter de la réception de l'état estimatif transmis par l'assuré (en l'absence d'expertise) ou de la réception du rapport d'expertise ;

A compter de la réception de l'accord de l'assuré sur la proposition d'indemnisation, l'assureur a un délai d'un mois pour missionner l'entreprise de réparation ou 21 jours pour verser l'indemnisation.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'alignement des droits des très petites (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) sur ceux des particuliers en matière d'assurance s'inscrit dans un cadre constitutionnel précis : il s'agit de garantir aux PME/TPE un accès effectif à l'assurance, tout en respectant la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre des parties prenantes.

Les propositions avancées se fondent sur le respect des principes du droit constitutionnel français, à savoir la liberté contractuelle, consacrée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que par la jurisprudence du Conseil constitutionnel (voir notamment la décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998 et la décision n° 2013-672 DC du 13 juin 2013) et la liberté d'entreprendre, également protégée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et rappelée par la décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982.

Outre le respect des libertés précitées, les mesures envisagées visent à atteindre l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité du droit, consacré par la décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 du Conseil constitutionnel, qui implique que les règles de droit doivent être claires, précises et compréhensibles par tous, y compris les TPE qui ne disposent pas nécessairement de moyens juridiques importants.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Il était impératif de garantir une égalité d'accès au marché assurantiel pour les PME/TPE, tout en veillant au respect des principes de concurrence établis par le droit européen. Les mesures proposées doivent s'inscrire dans cette perspective, notamment en ce qui concerne la liberté d'entreprise consacré à l'article 16 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de la liberté de concurrence des articles 101 et 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE), visant à garantir un environnement économique juste et équitable, en prévenant les pratiques anticoncurrentielles et en favorisant une concurrence saine entre les entreprises.

L'article 101 TFUE précise notamment que : « Sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur, et notamment ceux qui consistent à : (...) appliquer, à l'égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence (...). »

L'article 102 TFUE stipule quant à lui que : « Est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci.

Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à :

a) imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables, (...)

c) appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence, (...) »

A ce titre, les propositions avancées visent à aligner les droits des PME/TPE sur ceux des particuliers en matière d'assurance, tout en garantissant la conformité de ces dispositions avec les principes cardinaux du droit européen. La proposition d'ouvrir la possibilité de résiliation infra/annuelle pour les TPE/PME en assurance multirisques professionnelle, ainsi que l'obligation faite aux assureurs de formuler une proposition d'indemnisation dans un délai de six mois, encadrant notamment de versement de l'indemnité, sont des étapes essentielles pour garantir un traitement équitable et transparent des entreprises sur le marché de l'assurance.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

L'encadrement des délais d'indemnisation est très différent selon les pays. Dans le cadre de l'élaboration de cette mesure, 4 pays ont été sollicités pour comparaison internationale : la Belgique, le Royaume-Uni, l'Espagne et l'Allemagne.

Belgique

En Belgique, la législation prévoit des règles, assorties de sanctions, pour un certain nombre de branches d'assurance (responsabilité civile auto, incendie, et vie). Toutefois, de nombreuses branches ne sont soumises à aucune obligation réglementaire s'agissant des délais, mais éventuellement à des règles de bonne conduite établies par Assuralia, l'union professionnelle des assurances.

Dans le cadre du processus d'indemnisation à la suite d'un dommage, l'assureur peut nommer un expert (mais n'en a pas l'obligation) pour établir une évaluation de son offre d'indemnisation. Cette dernière doit être présentée dans un délai de 3 mois (ou 90 jours) dans certains cas, tels que la RC Auto et l'assurance incendie. Si l'assureur ne respecte pas ce premier délai de 3 mois pour soumettre une offre d'indemnisation ou une réponse motivée, il doit payer i) une somme majorée du taux d'intérêt légal ou ii) une somme forfaitaire, dans le cas où la responsabilité est contestée, ou le dommage pas entièrement quantifié ou quantifiable.

Lorsque le montant de l'offre d'indemnisation n'est pas contesté, l'assureur doit procéder au paiement dans un délai de 30 jours. En cas de contestation, un processus d'expertise/contre-expertise sera engagé. La loi prévoit en principe un délai de 90 jours pour finaliser ce processus. Le dommage est ensuite indemnisé dans les 30 jours qui suivent la clôture de l'expertise.

En cas de non-respect de ces délais un montant forfaitaire de 250 € par jour de retour est prévu pour les assurances RC Auto.

En outre, un projet de loi relatif aux délais et sanctions des paiements des prestations d'assurance est en cours d'examen par la Chambre des représentants. Sa publication au journal officiel devrait intervenir courant avril, et son entrée en vigueur pourrait ainsi avoir lieu le 1er octobre 2024. Ce projet de loi vise à étendre les règles applicables aux assurances autour de trois axes :

- Assurances de responsabilité (par exemple RC Vie privée, RC objective incendie et explosion dans les lieux accessibles au public) : extension des règles applicables en assurance RC Auto ;

- Assurances de choses (par exemple assurances Auto dégâts matériels, Vol...) : extension des règles applicables en assurance incendie ;

- Autres assurances (par exemple assurances Santé, Accidents, à l'exception de l'assurance Accidents du travail, qui est soumise à un régime légal spécifique) : introduction d'une disposition générale qui prévoit que l'assureur effectue la prestation convenue dès qu'il dispose de tous les éléments nécessaires à cette fin et au plus tard dans les 30 jours qui suivent cette date, disposant d'un délai de 3 mois pour formuler une offre d'indemnisation.

En cas de sinistre dû à une catastrophe naturelle, lesquelles sont couvertes par les assurances incendie en Belgique, le ministre en charge de l'économie peut prolonger les délais prévus par la législation, par voie réglementaire. Cette disposition est conservée dans le projet de loi décrit ci-dessus.

Aucune statistique concernant les durées moyennes d'indemnisation de sinistres n'a été identifiée. L'Ombudsman des assurances, qui couvre les plaintes des particuliers et d'un certain nombre d'entreprises, fait cependant état de l'importante part des demandes d'intervention liées au délai de gestion des sinistres. En 2021, 22% des dossiers soumis correspondaient à une demande du consommateur liée aux délais de gestion des sinistres, en raison notamment de la surcharge de travail liée aux inondations. En 2022, les plaintes relatives aux délais de gestion concernaient près d'une demande d'intervention sur trois.

Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, l'Enterprise Act de 2016 ne prévoit pas de délai spécifique mais exige un « délai raisonnable » pour la réalisation des paiements d'indemnisation à tous les souscripteurs de couverture d'assurance.

Dans le cas où un assureur tarde à indemniser l'assuré dans ce cadre, l'assuré est en droit de demander réparation à l'assureur pour tout dommage supplémentaire résultant d'une indemnisation tardive.

Le délai moyen d'indemnisation est de 10,5 semaines.

Espagne

En Espagne, c'est la Ley 50/1980, du 8 octobre 1980 qui réglemente les droits et les obligations de l'assuré et de l'assureur. Cette loi encadre les contrats d'assurances, ainsi selon cette dernière, en cas de sinistre :

- L'assuré dispose d'un délai de 7 jours pour déclarer le sinistre à l'assurance après en avoir pris connaissance, à moins que la police d'assurance ne fixe un délai plus long.

- Après la déclaration du sinistre, l'assuré dispose de 5 jours pour fournir une estimation écrite des dommages.

- Un expert évalue les pertes économiques subies et rédige une expertise. S'il n'y a pas d'accord entre l'assuré et l'assureur sur le montant de l'indemnisation, chaque partie désigne son propre expert.

- Après la phase d'expertise, la compagnie d'assurance est tenue de verser l'indemnité. En tout état de cause, l'assureur dispose d'un délai de 40 jours à compter de la déclaration du sinistre pour verser un montant minimum de l'indemnisation total et de trois mois pour verser.

Si l'assureur ne respecte pas les délais de paiement de l'indemnité et qu'il ne peut justifier de son manquement, il sera tenu de verser une pénalité à l'assuré. L'indemnité pour retard de paiement correspond au paiement d'un intérêt annuel égal au taux d'intérêt légal en vigueur au moment où il court, majoré de 50 % ; cet intérêt est réputé courir par jour, sans qu'il soit nécessaire d'introduire une demande en justice.

Toutefois, après deux ans à compter de la survenance de la créance, l'intérêt annuel ne peut être inférieur à 20 %.

A noter que l'Espagne présente la particularité d'avoir fait le choix de définir une catégorie globale de risques extraordinaires qui englobent de nombreux risques climatiques (inondations extraordinaires, cyclones exceptionnels, vents supérieurs à 120km/h...). L'assurance de ces risques extraordinaires repose sur une entreprise publique, le « Consorcio de compensación de Seguros » (CCS) qui est rattachée au ministère de l'Economie, du Commerce et des Entreprises par l'intermédiaire de la Direction générale des assurances et des caisses de retraite.

En 2022, le délai moyen de paiement après l'évaluation définitive d'un sinistre s'est élevé à 25 jours pour les assurances agricoles et à 26 jours pour les lignes d'assurance du bétail.

Allemagne

En Allemagne, aucune disposition générale n'est prévue sur les délais d'indemnisation. En revanche, le superviseur, la BaFin, peut intervenir en cas de retard injustifié.

Les deux autres mesures portées par le présent article n'ont pas fait l'objet de comparaison internationale.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

a. Modalités de résiliation unilatérale des contrats

Cette proposition vise à aligner le droit des professionnels sur celui des particuliers en étendant à toutes les entreprises l'obligation de motivation de résiliation unilatérale d'un contrat de la part des assureurs. Elle permettra une transparence accrue des relations entre l'assureur et l'entreprise.

Cette modification, qui encadre les relations contractuelles entre professionnels assurés et assureurs, relève du domaine de la loi, à l'instar de l'article L. 113-12-1 du code des assurances qui a créé ce droit au profit des particuliers.

b. Résiliation infra-annuelle des contrats

La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite « Loi Hamon » poursuit un but de protection du consommateur en permettant aux personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles de résilier, après un délai d'un an, sans frais ni pénalités les contrats et adhésions tacitement reconductibles. Cette faculté n'est permise que sur certains types de contrats assurantiels à savoir l'automobile, l'emprunteur, la santé et l'habitation. Les professionnels ne peuvent quant à eux résilier qu'à la date anniversaire du contrat.

Il est proposé d'étendre cette possibilité de résiliation aux contrats dommages aux biens des TPE/PME afin de rendre la gestion de leurs contrats d'assurance plus aisée, ce qui répond à un objectif propre à la taille de ces structures qui n'ont pas des services de gestion comparable à ceux des grandes entreprises.

Cette modification, qui encadre les relations contractuelles entre professionnels assurés et assureurs, relève du domaine de la loi, à l'instar de l'article L. 113-15-2 du code des assurances qui a créé ce droit au profit des particuliers.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

A quelques exceptions près, la procédure et les délais d'indemnisation en assurance ne font l'objet d'aucun encadrement particulier, ce qui peut faire naître un sentiment de frustration chez certains assurés et rallonger le versement des indemnités dans certains cas.

Il est proposé, pour les contrats de couverture de dommages aux biens, de poser un délai de principe de six mois entre la déclaration de sinistre et l'offre d'indemnisation afin d'accélérer l'indemnisation dans son ensemble, ce qui permettra aux assurés professionnels de reprendre plus rapidement leurs activités.

Cette modification, qui encadre les relations contractuelles entre professionnels assurés et assureurs, relève du domaine de la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

a. Modalités de résiliation unilatérale

Cette mesure vise à accroître la transparence des relations entre l'assureur et l'entreprise.

b. Résiliation infra-annuelle

Cette mesure a pour objectif de permettre aux TPE/PME de résilier leur contrat d'assurance sans attendre la date anniversaire du contrat, afin de faciliter la gestion de leurs contrats d'assurance.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

L'objectif de l'encadrement des délais d'indemnisation en assurance vise à accélérer l'indemnisation dans son ensemble pour en cas de dommages aux biens. En outre, cela donnera à l'assuré une meilleure visibilité sur le règlement de son sinistre.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

a. Modalités de résiliation unilatérale

L'obligation pour l'assureur de justifier la résiliation unilatérale d'un contrat vis-à-vis de son assuré particulier existait déjà dans la loi. Pour l'étendre aux professionnels, aucune autre option n'a été envisagée que celle de modifier l'article L. 113-12-1 du code des assurances.

b. Résiliation infra-annuelle

Le droit à résiliation infra-annuel existait déjà dans la loi pour un assuré particulier. Pour l'étendre aux professionnels, aucune autre option n'a été envisagée que celle de créer un nouvel article qui leur est dédié, à la suite de celui instituant ce droit pour les particuliers.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

Deux options ont été envisagées :

- Prévoir dans la loi un délai d'indemnisation plus court en cas de non recours à un expert d'assurance qu'en cas de recours à un expert d'assurance ;

- Prévoir un délai d'indemnisation unique, tant en cas de recours à un expert qu'en absence d'intervention d'un expert.

3.2. OPTION RETENUE

a. Modalités de résiliation unilatérale

Le droit des professionnels est aligné sur celui des particuliers en étendant à toutes les entreprises l'obligation pour les assureurs de motivation de résiliation unilatérale d'un contrat, avec une modification de l'article L. 113-12-1 du code des assurances.

b. Résiliation infra-annuelle

La mesure retenue vise à étendre la possibilité de résiliation infra-annuelle, après un délai d'un an, aux contrats dommages aux biens des TPE/PME. Cela passe par la création de l'article L. 113-15-2-1 dans le code des assurances.

Plusieurs garanties seront exclues par décret en Conseil d'Etat de son champ d'application (catastrophes naturelles, construction, pertes d'exploitation, automobile notamment), ainsi que certains types de sinistre (cyber-dommage, tempêtes, litiges de responsabilité civile), en raison de leurs particularités (existence de règles spéciales) ou de leur complexité intrinsèque (par exemple les situations appelant un grand nombre d'expertises, qui rend difficile leur inclusion dans le délai de droit commun).

c. Encadrement des délais d'indemnisation

Afin de permettre un encadrement des délais plus adapté, il a été retenu de distinguer les délais d'indemnisation en fonction du recours à l'expertise. En cas de recours à une expertise, le délai d'indemnisation est de 6 mois à compter de la date de déclaration du sinistre. En cas de non recours à une expertise, le délai d'indemnisation est réduit à 2 mois à compter de la date de déclaration des sinistres.

Cet encadrement des délais concerne l'ensemble des assurés, particuliers comme entreprises.

Cela passe par la création de l'article L. 121-18 dans le code des assurances.

Plusieurs garanties seront exclues par décret en Conseil d'Etat de son champ d'application (catastrophes naturelles, automobile notamment), ainsi que certains types de sinistre (cyber-dommage, tempêtes, les grands risques, litiges de responsabilité civile), en raison de leurs particularités (existence de règles spéciales) ou de leur complexité intrinsèque (par exemple les situations appelant un grand nombre d'expertises, qui rend difficile leur inclusion dans le délai de droit commun).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

a. Modalités de résiliation unilatérale

L'article L. 113-12-1 du code des assurances est modifié.

Cette modification s'inscrit dans la continuité des droits reconnus au profit des assurés par l'article L. 113-12 du code des assurances. Elle contribue à la protection des assurés en rééquilibrant les rapports de force avec les assureurs, ce qui la rend compatible avec les principes constitutionnels de liberté d'entreprendre.

b. Résiliation infra-annuelle

L'article L. 113-15-2-1 est créé dans le code des assurances.

Cette modification s'inscrit dans la continuité des droits reconnus au profit des assurés par l'article L. 113-15-2 du code des assurances. Elle contribue à la protection des assurés en rééquilibrant les rapports de force avec les assureurs, ce qui la rend compatible avec les principes constitutionnels de liberté d'entreprendre.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

L'article L. 121-18 est créé dans le code des assurances.

Cette modification contribue à la protection des assurés en rééquilibrant les rapports avec les assureurs dans le cadre de contrats d'assurance couvrant les dommages aux biens. Elle permet aux assurés de disposer du droit effectif d'obtenir indemnisation dans les meilleurs délais conformément aux contrats qui les lient avec leurs assureurs, ce qui la rend compatible avec les principes constitutionnels de liberté d'entreprendre.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La libre prestation de services des assureurs dans des conditions de marché égales, protégée par les articles 101 et 102 TFUE, n'est pas entravée par ces dispositions.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

a. Modalités de résiliation unilatérale

Cette mesure n'emporte pas d'enjeux économiques ou financiers pour les entreprises mais améliore la transparence des relations entre l'assureur et l'entreprise. Elle devrait en particulier permettre à l'entreprise qui voit son contrat résilier soit d'engager une renégociation plus constructive avec son assureur, soit de solliciter plus efficacement un assureur ou un intermédiaire d'assurance en vue de l'établissement d'un contrat correspondant à ses besoins de couverture.

b. Résiliation infra-annuelle

Cette mesure ne concerne que les TPE/PME.

A partir d'un an après la prise d'effet de son contrat, la TPE/PME pourra résilier à tout moment son contrat d'assurance dommages sans attendre la date anniversaire du contrat. Elle pourra ainsi potentiellement bénéficier de meilleures conditions tarifaires ainsi que plus de souplesse de gestion de ses contrats.

Pour les assureurs, cette mesure devrait augmenter le nombre de résiliation de contrats mais, en parallèle, générer de nouveaux portefeuilles clients grâce au jeu de la concurrence.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

En 2022, le nombre de contrats dommages aux biens des professionnels s'élevaient à près de 5 380 000175(*) en France. Le coût moyen d'un sinistre est de 6 890 €.

Il n'existe pas de chiffres consolidés sur les délais moyens d'indemnisation actuels des sinistres en entreprise. Néanmoins, d'après les assureurs, la durée moyenne constatée pour clôturer un sinistre serait de 12 à 15 mois. Il est à noter qu'il s'agit du délai de clôture, qui comprend donc le versement de l'ensemble de l'indemnisation avec le règlement de toutes les factures. Le délai d'indemnisation instauré par cette mesure encadre le délai entre la déclaration d'un sinistre et la proposition d'indemnisation de l'assureur à l'assuré.

La mesure proposée vise à encadrer ce délai d'indemnisation à 6 mois en cas de recours à une expertise, à 2 mois sinon. Elle permettra ainsi d'accélérer l'indemnisation des entreprises en cas de sinistre, améliorant par conséquent la continuité de leur activité. Pour autant, elle vise à proposer un mécanisme équilibré afin de ne pas mettre les assureurs en situation de ne pas pouvoir remplir leurs obligations.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

a. Modalités de résiliation unilatérale

Cette mesure n'emporte pas d'enjeux économiques ou financiers pour les collectivités territoriales mais améliore la transparence des relations entre l'assureur et la collectivité.

b. Résiliation infra-annuelle

Cette mesure vise uniquement les TPE/PME et non les collectivités territoriales.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

En 2022, le nombre de contrats dommages aux biens des collectivités territoriales était de 82 100. Le coût moyen d'un sinistre est de 3 890 €.

La mesure proposée vise à encadrer le délai d'indemnisation des collectivités territoriales à 6 mois en cas de recours à une expertise, à 2 mois sinon. Cette mesure permettra ainsi d'accélérer l'indemnisation des collectivités territoriales en cas de sinistre, améliorant par conséquent la continuité de leur activité.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Néant.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Ces mesures concourent dans l'ensemble à une simplification assurantielle pour les assurés, notamment professionnels.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Les professionnels assurés pourront bénéficier des nouveaux droits reconnus par la loi.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

a. Modalités de résiliation unilatérale

Les particuliers étaient déjà concernés par cette mesure, qui n'emporte pas d'impact supplémentaire les concernant.

b. Résiliation infra-annuelle

Néant, cette mesure ne concerne que les TPE/PME.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

Les assurances les plus répandues pour les particuliers sont les assurances multirisques habitation (MRH) et les assurances automobiles.

En 2022, le nombre de contrats MRH s'élève à 45,4 M avec un coût moyen de sinistre de 2 137 €. La charge totale des sinistres survenus s'établit à 8,1 Md€.

Il n'existe pas de chiffres consolidés sur les délais moyens d'indemnisation actuel des sinistres pour les particuliers en matière de dommages aux biens. Le délai moyen d'indemnisation pour des sinistres simples semblerait toutefois se situer entre 30 et 60 jours.

La mesure proposée vise à encadrer ce délai d'indemnisation à 6 mois en cas de recours à une expertise, à 2 mois sinon. Elle permettra ainsi d'accélérer l'indemnisation des particuliers en cas de sinistre, améliorant par conséquent la reprise de leur vie normale.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La consultation du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, prévue à l'article L. 614-2 du code monétaire et financier, a été réalisée le 28 mars 2024 et s'est achevée le 3 avril.

A titre facultatif, les assureurs ont été consultés sur l'ensemble de ces mesures à travers leur fédération, France Assureurs durant le premier trimestre 2024. Les agents généraux d'assurance ont également été sollicités. En sus, les experts d'assurance et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) ont été consultés sur la mesure des délais d'indemnisation.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition relative à l'obligation de motivation entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal Officiel de la République Française.

Les autres dispositions entreront en vigueur 4 mois après la publication du décret d'application. Ces dispositions ne s'appliqueront pas aux contrats conclus avant cette date.

5.2.2. Application dans l'espace

1. Application de plein droit du projet de texte en Guadeloupe, Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint Pierre et Miquelon.

Conformément au principe dit de « l'identité législative », les lois et règlements s'appliquent de plein droit, donc sans mention spéciale, dans les collectivités d'outre-mer de l'article 73 de la Constitution. Le régime législatif et réglementaire applicable en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion et, depuis le 31 mars 2011, à Mayotte est celui de la métropole.

Les dispositions du présent texte ne font l'objet d'aucune adaptation spécifique afin de prendre en compte les caractéristiques et contraintes particulières des collectivités d'outre-mer de l'article 73 de la Constitution.

Les statuts de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et de Saint Pierre et Miquelon prévoient que la plupart des lois et règlements y sont applicables de plein droit :

- Le principe de l'applicabilité de plein droit des normes juridiques s'applique à Saint-Barthélemy et Saint Martin, en vertu de leur statut défini par la loi organique du 21 février 2007. L'article LO 6213-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), issu de cette loi, énonce ainsi que : « Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent [...] de la compétence de la collectivité » Les contrats d'assurance n'en font pas partie des compétences dévolues à la collectivité de Saint-Barthélemy et demeurent de la compétence de l'Etat ;

- L'article LO 6313-1 du CGCT porte des dispositions identiques pour Saint-Martin ;

- A Saint Pierre et Miquelon, les lois et règlements français sont également applicables de plein droit en vertu de l'article LO 6413-1 du CGCT (« Les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'exception de celles qui interviennent [...] dans l'une des matières relevant de la compétence de la collectivité. » Les contrats d'assurance n'en font pas partie des compétences dévolues à la collectivité de Saint-Pierre et Miquelon et demeurent de la compétence de l'Etat.

Les collectivités de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et de Saint Pierre et Miquelon sont ainsi soumises de plein droit aux dispositions du code des assurances relatifs aux contrats d'assurance.

2. Absence d'application de plein droit des projets de texte en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna

Cadre général

En application du principe dit de la « spécialité législative », les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et au territoire des îles Wallis et Futuna que sur mention expresse du texte en cause ou s'ils y ont été rendus applicables par un texte spécial.

- La Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de droit des assurances en vertu du 16° de l'article 22 de la loi organique modifiée n° LO 99-209 du 19 mars 1999. Dans ces conditions, les dispositions législatives n'y sont pas applicables et ne sont pas étendues.

- En Polynésie française, l'article 13 de la loi organique modifiée n° 2004-192 du 27 février 2004 précise que la Polynésie française est compétente dans tous les domaines qui ne relèvent pas de la compétence de l'Etat, listés à l'article 14 de cette même loi organique, qui ne mentionne pas le droit des assurances. Dans ces conditions, les dispositions législatives n'y sont pas applicables et ne sont pas étendues.

- Dans le territoire des îles Wallis et Futuna, les lois et règlements s'appliquent uniquement sur mention expresse, en vertu de l'article 4 de la loi n°61-814 du 29 juillet 1961. L'applicabilité des textes est donc subordonnée à l'adoption d'une disposition expresse d'extension. La portée de ce principe s'étend à tous les textes y compris les textes modificatifs.

Application aux îles Wallis et Futuna

Il est prévu d'étendre aux îles Wallis et Futuna les dispositions de l'article L. 113-15-2-1 du code des assurances. Cette extension s'inscrit dans la logique de celle de l'article L. 113-15-2, qui institue le droit à résiliation infra-annuelle au profit des particuliers. Par conséquent, l'application de ces dispositions aux îles Wallis et Futuna permettra aux professionnels de bénéficier du même droit à résiliation que ceux des autres territoires sous le régime de l'identité législative.

5.2.3. Textes d'application

a. Modalités de résiliation unilatérale

Cette mesure ne nécessite pas de texte d'application.

b. Résiliation infra-annuelle

Un décret en Conseil d'Etat fixe la liste des contrats exclus du bénéfice de ce droit à résiliation.

c. Encadrement des délais d'indemnisation

Un décret en Conseil d'Etat fixera les conditions d'application du nouvel article L. 121-18 du code des assurances.

TITRE VII - FACILITER L'ESSOR DE PROJETS INDUSTRIELS ET D'INFRASTRUCTURES

Article 15 - Faciliter la conduite de projets stratégiques

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les centres de données, plus communément appelés « datacenters », constituent l'infrastructure sous-jacente nécessaire au fonctionnement de l'ensemble de l'économie numérique ; ils sont essentiels à la continuité opérationnelle des services informatiques de grands groupes comme des PME, mais aussi des administrations comme des services publics les plus essentiels comme par exemple les hôpitaux. Ils sont également indispensables à l'innovation numérique et la transition numérique de la société : ils supportent et supporteront toujours plus de cas d'usage liés au stockage et au traitement des données à distance, c'est-à-dire ce qu'on appelle communément le « cloud » et le « cloud-computing ». Il est notable que l'implantation de ces centres de données, et notamment des plus grands d'entre eux, sur le sol français apporte des réelles sources supplémentaires de capacité à garantir notre souveraineté numérique176(*). A ce jour, à l'exclusion des centres de données mis en oeuvre par un tiers pour son propre compte, plus de 200 centres de données sont recensés en France, d'une taille très variable.177(*)

Le déploiement des centres de données les plus importants en termes d'impact sur la transition numérique et/ou sur la souveraineté nationale ne fait l'objet d'aucun cadre spécifique à ce jour, quand bien même il est essentiel de pouvoir sécuriser leur implantation sur le territoire national dans des délais les plus courts possibles. Les centres de données d'envergure nationale ou européenne sont caractérisés par une grande empreinte foncière et des besoins importants en puissance électrique : à titre d'exemple, un centre de données moyen consomme environ 100MW, là où un centre de donnée d'envergure nationale ou européenne a une consommation supérieure à 400MW, pouvant dépasser dans certains cas 1GWh. Concernant le foncier, les centres de données d'envergure nationale ou européenne visés par la mesure représentent une empreinte foncière d'environ 30 à 50ha selon les cas. Des sites de cette taille, présentant une réelle maitrise foncière et une continuité géographique suffisante, sont de plus en plus rares en France. L'aménagement préalable des sites, pouvant inclure l'artificialisation de sols, est souvent indispensable et peut nécessiter la modification d'un ou de plusieurs documents d'urbanisme et/ou de planification. Or, les procédures liées au raccordement ou au foncier, et notamment la mise en compatibilité des documents d'urbanisme, peuvent être particulièrement longues à mettre en place. Ces projets nécessitent donc un cadre dédié pour garantir un déploiement rapide et efficace sur le territoire.

La loi n° 2023-973 relative à l'industrie verte a apporté des modifications majeures de la procédure d'autorisation environnementale qui s'applique aux centres de données lorsque ceux-ci sont amenés à être considérés comme des installations classés pour la protection de l'environnement (ICPE)178(*). Cependant, la plupart des autres mesures d'accélération introduites par ladite loi « Industrie verte », principalement liées à l'urbanisme, la raison impérative d'intérêt public majeur (RIIPM) et le raccordement au réseau d'électricité, ne peuvent aujourd'hui s'appliquer aux centres de données.

Le cadre applicable à la mise en compatibilité des documents de planification et d'urbanisme :

La mise en oeuvre de la construction d'un centre de données peut nécessiter la mise en compatibilité des documents de planification régionale et des documents locaux d'urbanisme : schéma de cohérence territoriale (SCoT), plan local d'urbanisme (PLU) et carte communale. La nécessité de cette mise en compatibilité sera d'autant plus certaine lorsqu'il s'agit d'un centre de donnée d'envergure nationale ou européenne du fait de son ampleur et de sa complexité, plusieurs documents pouvant être impactés de manière simultanée.

Plusieurs procédures permettant l'évolution des documents de planification régionale et des documents d'urbanisme sont déjà prévues par le code de l'urbanisme :

- La procédure d'évolution conduite par la collectivité compétente en matière d'aménagement ou d'urbanisme. Compte-tenu de l'ampleur des projets de centre de données concernés, une évolution des orientations des documents de planification régionale (schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire - SRADDET ; schéma d'aménagement région - SA - en outre-mer ; schéma directeur de la région Ile-de-France - SDRIF ; plan d'aménagement et de développement durable de la Corse - PADDUC) et des documents d'urbanisme (schéma de cohérence territoriale, plan local d'urbanisme ou carte communale) serait indispensable et nécessiterait de réviser179(*) ces documents. Outre la complexité intrinsèque d'une telle révision pour les collectivités locales compétente et ses parties prenantes, cette procédure prendrait, avec le cadre en vigueur, entre trois à six ans. Ce délai reculerait donc de plusieurs années la date de mise en service du centre de données et ouvrirait la possibilité de contentieux, retardant encore la sécurisation juridique des opérations de construction, et donc leur réalisation effective. De tels délais seraient incompatibles avec les enjeux de souverainetés numérique et nationale ici en jeu. Il est par ailleurs souhaitable de minimiser les risques de contentieux liés à la révision même du document de planification ou d'urbanisme.

- La procédure de déclaration180(*) de projet, permet simultanément une adaptation du document d'urbanisme et la mise en oeuvre de la procédure de déclaration d'utilité publique du projet. Plus rapide qu'une révision, elle ne peut cependant être mise en oeuvre par l'Etat lorsqu'elle a pour effet de porter atteinte à l'économie générale du projet d'aménagement stratégique du SCoT ou, en son absence, du projet d'aménagement et de développement durables du PLU. Or, un projet de centre de données d'envergure nationale ou européenne est potentiellement de nature à porter atteinte à l'économie générale de ces documents.

- La qualification de projet d'intérêt général (PIG)181(*), prononcée par l'Etat, peut concerner tout projet d'ouvrage, de travaux ou de protection présentant un caractère d'utilité publique. Ces projets peuvent être qualifiés de PIG à la double condition, d'une part, que le projet soit notamment destiné à la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'équipement ou au fonctionnement d'un service public et, d'autre part, qu'il ait fait l'objet soit d'une décision d'une personne ayant la capacité d'exproprier, arrêtant le principe et les conditions de réalisation du projet, et mise à la disposition du public, soit d'une inscription dans un des documents de planification prévus par les lois et règlements, approuvée par l'autorité compétente et ayant fait l'objet d'une publication. Dès que la qualification de PIG est prononcée, la collectivité compétente a l'obligation de mettre son document d'urbanisme en compatibilité avec ce PIG. A défaut d'y procéder dans un délai de six mois, le représentant de l'Etat peut y procéder d'office. L'objet du PIG se limite ainsi à la qualification juridique d'un projet. Ce n'est qu'au travers de l'évolution des documents d'urbanisme que le PIG produira des effets juridiques sur l'utilisation des sols. Les dispositions relatives à la mise en compatibilité d'un document d'urbanisme avec un PIG prévoient, depuis l'ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicables aux documents d'urbanisme et pour les documents d'urbanisme entrant dans son champ d'application182(*), le recours à une procédure de modification simplifiée avec enquête publique. Les documents d'urbanisme élaborés antérieurement ou n'ayant pas encore engagé une révision à la date du 1er avril 2021 restent soumis à une procédure de révision ou de modification, suivie d'une enquête publique. Dans les deux cas, ces procédures sont trop longues aux regards des enjeux et objectifs évoqués et augmentent le risque contentieux en raison du nombre d'étapes procédurales qu'elles impliquent.

- La procédure intégrée183(*) permet également la mise en compatibilité simultanée de documents d'urbanisme et de documents sectoriels ou de planification régionale, avec un projet immobilier de création ou de d'extension de locaux d'activités économiques. Elle est susceptible d'aboutir plus rapidement qu'une procédure de révision et peut être mise en oeuvre par l'Etat, qu'importe l'impact du projet sur le SCoT ou le PLU. De plus, l'octroi du permis de construire est aussi accéléré, puisque la demande d'autorisation d'urbanisme peut être déposée dès l'engagement de la procédure. Toutefois, cette procédure nécessite une bonne coordination de l'ensemble des acteurs, d'autant plus lorsque des documents sectoriels doivent être adaptés. L'ensemble des administrations publiques doit se mobiliser en amont du lancement de la procédure, afin de mesurer l'ampleur du projet, d'apprécier ses différentes dimensions, et de coordonner la mise en oeuvre d'une procédure unique aux délais resserrés. Par ailleurs, la procédure intégrée, comme la procédure de déclaration de projet ou d'utilité publique, impose l'organisation d'une enquête publique portant à la fois sur l'intérêt général du projet et sur les dispositions de mise en compatibilité du document. L'enquête publique se déroule sur au minimum 4 mois, et cette durée n'est pas compatible avec l'installation accélérée d'un centre de données d'envergure nationale ou européenne où la mise en compatibilité doit parfois pouvoir être réalisée en quelques mois maximum.

- Enfin, s'agissant de la procédure de projet d'intérêt national majeur (PINM), introduite par la loi n° 2023-973 relative à l'industrie verte en 2023, qui a créé l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme. La qualification de PINM, par décret simple, permet, sur accord de la collectivité compétente, une mise en compatibilité directe des documents de planification et d'urbanisme avec ledit projet par l'Etat et l'accélération des procédures de raccordement au réseau d'électricité. Par ailleurs, l'article L. 300-6-2 confère à l'autorité administrative de l'Etat la compétence de se prononcer sur les autorisations d'urbanisme portant sur les travaux, les installations, les constructions et les aménagements d'un projet d'intérêt national majeur. La procédure de PINM est réservée à ce jour aux projets industriels qui revêtent, eu égard à leur objet et à leur envergure, notamment en termes d'investissement et d'emploi, une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale. Or, les centres de données d'envergure nationale ou européenne, s'ils peuvent revêtirent une importance comparable au regard de leur objet et de leur envergure en terme d'investissement pour la souveraineté nationale et l'intérêt national, ne relèvent pas stricto sensu de la catégorie des projets industriels, et ont un impact relativement modéré en termes d'emplois comparé à un site industriel.

Ainsi, les procédures existantes soit n'incluent pas expressément dans leur champ les centres de données d'envergure nationale ou européenne, soit sont non seulement incompatibles avec la complexité d'un projet cette nature, mais conduiraient à augmenter de plusieurs années la durée de construction et créeraient des risques supplémentaires pour le projet, notamment contentieux, en raison de la multiplicité des étapes procédurales.

Le cadre applicable aux procédures de raccordement au réseau de transport d'électricité :

Le fonctionnement de centres de données, notamment pour les plus importants d'entre eux, est particulièrement dépendant d'un raccordement au réseau électrique. Le déploiement de centres de données doit ainsi nécessairement être accompagné de l'extension et du renforcement du réseau de transport d'électricité vers ces sites.

Or, les réseaux d'électricité sont des infrastructures à durée de vie longue. Une ligne électrique peut être ainsi maintenue sans limitation de durée. Les câbles et les pylônes doivent être changés après plusieurs décennies, mais le tracé d'une ligne peut ne pas changer.

Cette inscription de l'infrastructure électrique dans le temps s'accompagne d'investissements et de travaux importants planifiés longtemps à l'avance. C'est particulièrement vrai pour le réseau de transport, dont l'horizon d'investissement est de l'ordre de la décennie. Cette planification est d'autant plus complexe qu'elle s'appuie sur plusieurs documents, établis à la fois au niveau national et régional, à travers par exemple le Schéma décennal de développement du réseau (SDDR) publié par RTE, ainsi que les schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR).

Etabli en application de l'article L. 321-6 du code de l'énergie, le schéma décennal mentionne les principales infrastructures de transport d'électricité qui doivent être construites ou modifiées de manière significative dans les dix ans, répertorie les investissements déjà décidés ainsi que les nouveaux investissements qui doivent être réalisés dans les trois ans, en fournissant un calendrier de tous les projets d'investissements.

Etabli en application de l'article L. 321-7 du code de l'énergie, la capacité globale du S3REnR est approuvé par le préfet de région. Le schéma régional de raccordement élaboré par RTE en concertation avec les acteurs du secteur définit les ouvrages à créer ou renforcer pour mettre à disposition de la production à partir de sources d'énergies renouvelables cette capacité globale de raccordement.

Ainsi, le cadre actuel permet difficilement l'installation rapide d'équipements répondant aux besoins, souvent importants, de projets de centre de données d'envergure nationale ou européenne.

Le cadre applicable aux dérogations à l'obligation de protection stricte des espèces protégées :

Les projets peuvent, dans certains cas, devoir demander une dérogation à l'obligation de protection stricte des espèces protégées. Une telle dérogation est soumise à des conditions strictes. Il convient en effet de démontrer :

- L'absence de solution alternative de moindre impact ;

- Que l'opération ne nuit pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ;

- Que le projet répond à une raison impérative d'intérêt public majeur.

Par analogie avec un projet bénéficiant d'une déclaration d'utilité publique (DUP) au sens de l'article L. 121-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, il peut s'écouler plusieurs années entre l'étude d'impact initiale, la DUP et le dépôt d'une demande de dérogation espèces protégées, laquelle portera sur un projet plus précis, plus finalisé, potentiellement modifié par rapport à l'étude d'impact initiale. Pour obtenir une dérogation espèces protégées, le pétitionnaire doit démontrer que son projet remplit les conditions posées à l'article L. 411-2 du code de l'environnement. A défaut, l'ensemble des opérations réalisées précédemment aura été mené en vain.

Or, la démonstration de l'existence d'une raison impérative d'intérêt public majeur attachée au projet est souvent une difficulté pour les porteurs de projet résultant de l'appréhension de cette notion issue du droit européen (article 16 de la directive dite « Habitats ») et transposée en droit français à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

Il est ainsi possible qu'un projet de centre de données d'envergure nationale ou européenne soit finalement stoppé après plusieurs années d'études, faute pour le projet de caractériser une raison impérative d'intérêt public majeur.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La mesure relative à l'élargissement du statut de projet d'intérêt national majeur aux centres de données s'inscrit dans le cadre constitutionnel suivant :

- l'article 72 de la Constitution, selon lequel les collectivités territoriales « s'administrent librement par des conseils élus » et cela « dans les conditions prévues par la loi ».

- l'article 7 de la Charte de l'environnement dispose que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Au sujet de la reconnaissance du caractère de raison impérative d'intérêt public majeur, l'article 16 de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dispose :

« 1. À condition qu'il n'existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, les États membres peuvent déroger aux dispositions des articles 12, 13, 14 et de l'article 15 points a) et b) :

a) dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ;

b) pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ;

c) dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques, ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ;

d) à des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ;

e) pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié par les autorités nationales compétentes de certains spécimens des espèces figurant à l'annexe IV. »

S'agissant de l'état du droit, il est important de mentionner que la raison impérative d'intérêt public majeur est la première condition examinée par le juge, qui s'attache dans le cadre de son examen à évaluer la motivation du projet indépendamment de ses effets sur l'environnement.

Dans son « Document d'orientation sur la protection stricte des espèces animales d'intérêt communautaire en vertu de la directive « Habitats » du 12 octobre 2021 », qui détaille la mise en oeuvre des articles 12 et 16 de la directive dite « Habitats », la Commission européenne détaille les modalités d'examen des critères de dérogation posés à l'article 16 de la directive Habitats et, en particulier, l'ordre d'examen des questions.

Elle précise ainsi que :

« (3-15) L'article 16 définit trois critères qui doivent tous être respectés pour qu'une dérogation soit octroyée :

1) la démonstration d'une ou de plusieurs des raisons énumérées à l'article 16, paragraphe 1, points a) à d), ou l'autorisation, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, de la prise ou de la détention d'un nombre limité et spécifié par les autorités nationales compétentes de certains spécimens des espèces figurant à l'annexe IV [point e)] ;

2) l'absence d'une autre solution satisfaisante, et

3) l'assurance qu'une dérogation ne nuira pas au maintien des populations dans un état de conservation favorable.

Le troisième critère reflète l'objectif global de la directive « Habitat », qui a pour objet de contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (article 2, paragraphe 1). Les mesures prises doivent viser à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages. Elles doivent également tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que des particularités régionales et locales (article 2, paragraphes 2 et 3).

La demande doit satisfaire le premier critère avant que les deuxième et troisième critères puissent être examinés. Concrètement, il est inutile d'examiner la question des autres solutions satisfaisantes et de l'incidence sur l'état de conservation si l'action ne satisfait pas à l'article 16, paragraphe 1, points a) à e). » (page 53).

Ainsi, à supposer même que le projet envisagé bénéficie d'une séquence « éviter / réduire / compenser » vertueuse et aboutie, si le projet en lui-même n'est pas reconnu comme une raison impérative d'intérêt public majeur, la dérogation sera refusée.

1.4. ELÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'installation de centres de donnée d'envergure nationale ou européenne représente un enjeu majeur de souveraineté national comme pour la transition numérique. Or, le cadre actuel ne prévoit aucune mesure d'accélération procédurale suffisante applicable auxdits centres de données. En matière de mise en compatibilité de document d'urbanisme, les procédures sont soit trop longues à mener soit ne permettent pas de modifier suffisamment le document d'urbanisme. En matière de raccordement au réseau d'électricité, les procédures existantes ne permettent pas de raccorder suffisamment vite ces projets particulièrement stratégiques et aux besoins importants en électricité. Concernant la RIIPM, celle-ci est reconnue à un stade trop tardif du projet pour lui apporter la sécurité juridique suffisante.

La procédure de projet d'intérêt national majeur (PINM - article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme), qui vise des projets industriels comparables auxdits centres de données en termes d'envergure d'investissement ou d'importance pour la souveraineté nationale, a créé un cadre d'accélération procédurale qui répondrait particulièrement bien à leurs enjeux d'implantation, aussi bien pour les raccordements que les procédures liées au foncier et aux espèces protégées.

L'écriture actuelle du I de l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme, définissant les projets éligibles à la procédure, vise explicitement les projets de nature industriel. Or, les centres de données d'envergure nationale ou européenne, s'ils peuvent revêtirent une importance comparable au regard de leur objet et de leur envergure en terme d'investissement pour la souveraineté nationale et l'intérêt national, ne relèvent pas stricto sensu de la catégorie des projets industriels, et ont un impact relativement modéré en termes d'emplois comparé à un site industriel.

Ainsi, les procédures existantes soit n'incluent pas expressément dans leur champ les centres de données d'envergure nationale ou européenne, soit sont non seulement incompatibles avec la complexité d'un projet cette nature, mais conduiraient à augmenter de plusieurs années la durée de construction et créeraient des risques supplémentaires pour le projet, notamment contentieux, en raison de la multiplicité des étapes procédurales.

Il est donc nécessaire de modifier directement, par voie législative, l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme si l'on souhaite que les centres de données revêtant un intérêt national majeur pour la transition numérique ou la souveraineté nationale puisse être éligible à cette procédure de projet d'intérêt général majeur.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure vise à accélérer l'implantation des centres de données d'intérêt national majeur pour la souveraineté nationale, la transition écologique ou la transition numérique française.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Seule la procédure PINM permet d'accélérer des projets de centre de données d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale à la fois sur la mise en compatibilité des documents d'urbanisme, les raccordements au réseau d'électricité et les garanties de même niveau pour la raison impérative d'intérêt public majeur. Les autres options existantes (cf. 1.1. supra) ne répondent pas aux objectifs d'accélération et de simplification procédurales recherchés.

Concernant l'extension du champ de la procédure de PINM, il a été examiné une option alternative à la solution retenue. Au I de l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme, il a été envisager de remplacer la notion de « projet industriel » par « projet économique » et rendre non-cumulatifs les critères d'envergure en termes d'investissement et en termes d'emploi.

Si une telle modification permet effectivement d'inclure les centres de données d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale, elle élargit plus largement le champ de la procédure à d'autres activités qui ne présentent pour autant pas les mêmes enjeux car font déjà l'objet de procédures d'accélération dédiées, ou bien ne présentent pas la même criticité en matière de souveraineté nationale. Compte tenu de la force de la procédure PINM sur l'ensemble de ses composantes, il n'est pas apparu opportun de l'élargir d'une telle manière. L'option n'a donc pas été retenue.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé au présent article d'étendre le champ de la procédure de PINM aux centres de données d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale uniquement. Le statut de PINM permettra aux projets d'implantation de centres de données identifiés de bénéficier d'accélération procédurales quant à la mise en compatibilité des documents d'urbanisme, le raccordement au réseau d'électricité ou la reconnaissance de la RIIPM.

Pour cela, l'article L. 300-6-2 est complété d'un I bis qui créé une nouvelle catégorie de projets éligibles à la procédure de PINM que sont les centres de données relevant de l'intérêt national majeur eu égard à leur objet ou leur envergure, notamment en termes d'investissement, une importance particulière pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La disposition modifie le champ de l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme en y créant la catégorie des centres de données d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale dans un nouveau I bis dédié.

Par conséquent, la disposition modifie le champ des articles 27 et 29 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, qui inclura donc les centres de données reconnu par décret comme projet d'intérêt national majeur au titre de l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme.

La mesure proposée ne faisant qu'étendre le champ d'application de l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme sans en changer la portée, elle ne remet pas plus en cause que l'article tel qu'il existe actuellement l'article 72 de la Constitution selon lequel les collectivités territoriales « s'administrent librement par des conseils élus » et cela « dans les conditions prévues par la loi ».

Par ailleurs, la mesure envisagée n'a pas pour objet ni pour effet de porter atteinte au droit de toute personne, « d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement », garanti par l'article 7 de la Charte de l'environnement et qui s'exerce, en vertu de l'article 7 de la Charte lui-même, « dans les conditions et les limites définies par la loi ».

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Néant.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure permet de faciliter l'implantation de projet de centre des données d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale, c'est-à-dire de centres de données d'envergure nationale ou européenne permettant l'hébergement de données et de services de cloud-computing pour de nombreux cas d'usages utiles à l'économie française. En ce sens, l'impact économique de la mesure sera fort pour l'ensemble de l'économie française en permettant d'accélérer sa transformation numérique.

La mesure va également permettrait d'accroitre l'attractivité du territoire national par rapport aux investissements dans la construction de centres de données de grande envergure.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Pour la filière des infrastructures numériques, la mesure va permettre une accélération procédurale de l'implantation de nouveaux centres de données d'envergure, et ainsi le développement des entreprises de la filière, des équipementiers aux fournisseurs de solutions logicielles ou aux entreprises utilisant les centres de données pour des applications numériques.

Avec l'implantation de nouveaux centres de données d'envergure nationale ou européenne, les entreprises françaises vont avoir accès à de plus grandes capacités de stockage de leurs données en cloud ainsi qu'à de plus nombreux services numériques associés de type cloud computing. Leur transformation numérique sera donc largement accélérée.

Ces hausses de capacité seront disponibles pour les entreprises françaises dans un contexte de souveraineté nationale et numérique accru, les centres de données étant hébergés sur le sol français.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'impact de cette nouvelle mesure est favorable pour les collectivités territoriales porteuses de documents d'urbanisme (établissements publics de coopération intercommunale, communes), avec une prise en charge de mise en compatibilité des documents d'urbanisme par l'Etat, qui nécessiterait sans cela des ressources nombreuses et potentiellement spécialisées. En effet, le coût d'une révision d'un document d'urbanisme permettant l'accueil d'un projet industriel d'intérêt majeur est en moyenne de 30 000 € pour une commune et de 190 000 € pour une intercommunalité.

Le transfert de la compétence pour instruire et délivrer l'autorisation d'urbanisme liée aux projets industriels d'intérêt national majeur à l'Etat allègera la charge des collectivités territoriales (communes) qui disposent par défaut de cette compétence.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La procédure de PINM est connue par les directions d'administration centrale qui sont en charge (direction générale des entreprises - DGE, et direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature - DGALN). La procédure de mise en compatibilité, engendrée par la procédure de PINM, est connue des services administratifs de l'Etat chargés de l'analyse des dossiers de mise en compatibilité (préfectures de département, directions départementales des territoires - DDT, directions départementales des territoires et de la mer - DDTM), ce qui facilitera la mise en oeuvre de la mesure. Cette mesure n'engendre donc pas de coûts nouveaux supplémentaires en tant que tels mais a pour conséquence la mobilisation des agents des services de l'Etat compétent (DDTM) et des services d'administration centrale, dont les effectifs devront être, le cas échéant, adaptés en conséquence.

Concernant la reconnaissance de la RIIPM pour certains projets d'intérêt national majeur, l'impact sur les services administratifs est limité. Par exemple, la mesure implique l'analyse d'un nouveau volet et conduit à l'examen du premier critère de la dérogation espèces protégées. Néanmoins, il s'agit simplement d'une anticipation de cet examen, il n'y a donc pas d'ajout de charge (et, d'ailleurs, bien au contraire si le projet n'est pas reconnu comme raison impérative et n'est donc pas poursuivi). Cette mesure risque également d'accroitre le facteur contentieux sur le décret de mise en compatibilité, puisque la RIIPM fait partie des moyens régulièrement soulevés par les requérants contre les projets. Néanmoins, là encore, il s'agit d'une anticipation de la phase contentieuse.

Le transfert de compétences en matière d'autorisation d'urbanisme des projets de centres de données d'intérêt national majeur à l'État induit une charge supplémentaire pour les services déconcentrés de l'État qui procèderont à l'instruction de ces projets. Leurs effectifs devront être, le cas échéant, adaptés en conséquence.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

L'implantation de nouveaux centres de données d'envergure nationale ou européenne permettra d'accroitre la souveraineté numérique de la Nation et d'accélérer la transformation numérique des entreprises et de la société.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure pourra accroitre la disponibilité de services numériques et de capacité de stockage de données disponible en France, y compris pour les services et les données des particuliers.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Au sujet de la reconnaissance de la RIIPM pour les projets d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale, en dehors d'une consommation foncière de quelques centaines d'hectares dans les prochaines années qui devra respecter la trajectoire d'artificialisation vers le « zéro artificialisation nette » (ZAN), la mesure n'aura pas d'impact sur l'environnement. En effet, non seulement la disposition envisagée n'instaure pas une reconnaissance systématique de cette condition pour tous les projets d'implantation de centres de données, puisqu'elle concerne uniquement un nombre très restreint de projets ayant fait l'objet de la procédure de reconnaissance par décret de l'intérêt national majeur prévue à l'article L. 300-6-2 du code de l'urbanisme, mais, en plus, les autres conditions nécessaires pour obtenir une dérogation espèce protégée resteront applicables. Notamment la démonstration de l'absence de solution alternative de moindre impact et le fait que l'opération ne nuit pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, qui a rendu un avis favorable tacite, le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La présente disposition est applicable sur l'ensemble du territoire français, y compris aux contrats soumis au code de la commande publique dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

5.2.3. Textes d'application

Des décrets identifiant nominalement les projets d'intérêt national majeur pour la transition écologique, la transition numérique ou la souveraineté nationale devront être pris afin que la disposition soit applicable auxdits projets. Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions dans lesquelles la raison impérative d'intérêt public majeur peut être reconnue par l'autorité administrative compétente en application du deuxième alinéa de l'article L. 411-2-1 du code de l'environnement.

Article 16 - Accélérer les projets stratégiques pour la transition énergétique

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le développement de nouveaux parcs éoliens en mer, à hauteur de 45GW d'ici 2050 ainsi que l'ensemble des infrastructures concourant directement à la transition énergétique sont nécessaires pour augmenter notre production d'électricité décarbonée. L'Etat assure la conduite des études techniques et environnementales pour l'éolien en mer. RTE assure le raccordement des parcs éoliens en mer au réseau de transport d'électricité, qui nécessite la construction de postes électriques spécifiques. Ce raccordement contribue à l'augmentation des capacités souveraines de production d'énergie décarbonée, avec un coût parmi les plus bas pour des installations neuves de production d'électricité.

1° - L'article L. 2113-10 du code de la commande publique impose aux entités adjudicatrices et pouvoirs adjudicateurs de conclure des marchés par lots séparés pour assurer l'accessibilité des PME à la commande publique. L'article L. 2113-11 du même code prévoit des exceptions renforcées par la loi n°2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte qui a introduit la possibilité de déroger au principe d'allotissement en cas de risque de procédure infructueuse. Néanmoins, ces exceptions ne sont pas adaptées aux spécificités des projets d'infrastructures concourant directement à la transition énergétique, pour lesquels il existe des risques d'interface (lié à la coordination entre intervenants ou à son absence) et de manque d'attractivité pour les entreprises du secteur particulièrement forts.

2° - L'article L. 2193-11 du code de la commande publique prévoit actuellement le paiement direct des sous-traitants. Il s'agit d'une reprise du titre II de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance. Si ces dispositions ont vocation à protéger les sous-traitants d'une possible défaillance de l'entreprise principale, elles imposent un traitement administratif potentiellement plus lourd à la fois pour le titulaire principal du marché et pour les sous-traitants, générant parfois des risques de délais de traitement supplémentaires. Les règles de forme imposées pour la rédaction des factures nécessitent de fréquents échanges avec le titulaire du marché et les sous-traitants. Au délai de ces temps d'échanges préalables, le délai de traitement des factures par l'administration - qui implique de nombreuses étapes telles que la signature du service fait, la demande de mise en paiement, la mise en paiement - peut être conséquent. En effet, entre le dépôt de la facture par le sous-traitant et le paiement effectif de ce dernier, il peut s'écouler entre 2 et 5 mois. Cela est particulièrement prégnant dans le cas des études techniques et environnementales pour l'éolien en mer dont l'Etat assure la conduite depuis la loi du 10 août 2018 dite « Essoc ». Ces études sont nécessaires à la réalisation des projets car leurs résultats sont mobilisés pour publier les cahiers des charges (pour les études techniques) et le dépôt des offres des candidats.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Concernant la simplification du code de la commande publique en faveur de l'accélération des projets stratégiques pour la transition énergétique, le Conseil d'Etat, dans son avis n° 407325 du 11 juillet 2023, relatif au projet de loi relatif à l'accélération de la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 et au traitement des copropriétés dégradées (§19), a estimé que « la nouvelle possibilité de dérogation au principe d'allotissement et la nouvelle possibilité de recours aux marchés globaux ne soulèvent pas de difficulté d'ordre constitutionnel ou conventionnel ».

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

1° - Le droit international n'impose pas le recours à l'allotissement. Le droit européen en fait une simple possibilité : l'article 65 de la directive 2014/25 dispose que « les États membres peuvent rendre obligatoire la passation de marchés sous la forme de lots distincts dans des conditions qui seront définies conformément à leur droit national et dans le respect du droit de l'Union ». L'article 46 de la directive 2014/24 est rédigé dans des termes comparables.

2° - Le cadre conventionnel n'impose pas le paiement direct du sous-traitant.

1.4. ELÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

1° - Les dérogations possibles au principe d'allotissement prévues par l'article L. 2113-11 du code de la commande publique ne permettent pas aux entités adjudicatrices d'assurer l'attractivité de leurs projets d'infrastructures énergétiques d'ampleur, notamment pour les projets de parcs éoliens en mer. L'exception introduite par la loi dite « Industrie verte » (risque de procédure infructueuse) ne semble pas être de nature à apporter les garanties suffisantes aux fournisseurs, dans la mesure où ce risque demeure complexe à démontrer pour les entités adjudicatrices. Dans un contexte où la concurrence internationale sur les approvisionnements rend nécessaire un effort particulier de clarification et de facilitation de la commande publique, une exception dédiée aux projets d'infrastructure concourant directement à la transition énergétique apparaît comme une condition de réussite de la transition énergétique.

2° - De même, l'introduction d'une possibilité de renoncer au paiement direct à l'initiative des sous-traitants de rang 1 pour les projets d'infrastructure concourant directement à la transition énergétique apparaît comme une condition supplémentaire au succès de la transition énergétique en cours. Concernant l'éolien en mer, les études techniques et environnementales conduites par l'Etat sont essentielles pour assurer le développement rapide des parcs et minimiser le tarif de soutien public demandé par les énergéticiens qui assureront leur construction et leur exploitation. Il est donc important de faciliter le passage par l'Etat de ces marchés critiques d'autant plus qu'ils sont pilotés directement par les services comptables ministériels (et non par une entité ou agence dédiée). Les autres marchés publics portant sur des infrastructures concourant à la transition énergétique doivent également bénéficier de cette possibilité afin d'optimiser leur fonctionnement.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

1° - Dans un contexte de fort développement des projets liés à la transition énergétique, et au regard de la nécessité de sécuriser les approvisionnements des gestionnaires d'infrastructures, la mesure vise à élargir les cas de dérogation au principe d'allotissement, sans remettre en cause l'accessibilité des petites et moyennes entreprises à la commande publique. Elle apportera une souplesse supplémentaire aux entités adjudicatrices et renforcera l'attractivité des marchés pour les opérateurs situés sur le territoire national.

2° - La renonciation du sous-traitant au paiement direct, à sa demande, permettrait de raccourcir les délais de paiement, et dans certains cas d'alléger la charge administrative et comptable des titulaires des marchés et leurs sous-traitants qui sont parfois des structures de taille petite ou moyenne. Il s'agit donc d'une mesure de simplification du droit français des marchés publics, qui introduira de la souplesse et de l'agilité dans les relations entre l'acheteur, le titulaire du marché et son sous-traitant direct, tout en assurant la protection de ce dernier, qui pourra toujours, s'il le souhaite, conserver son droit au paiement direct.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Pour les deux premières mesures (1° et 2°), les options qui ont été envisagées sont :

- Conserver le dispositif actuel ;

- Introduire une dérogation pour les installations de production d'électricité en mer et leur raccordement ;

- Introduire une dérogation pour les projets d'infrastructures concourant directement à la transition énergétique.

L'option consistant à ne pas légiférer exposerait les projets concernés à des risques supplémentaires de surcoûts et de délais, ou pourrait exposer les maîtres d'ouvrage à des risques d'interface qu'ils jugent inopportuns de supporter.

3.2. OPTION RETENUE

1° - L'option retenue consiste à exonérer de l'obligation d'allotir, fixée à l'article L. 2113-10 du code de la commande publique, l'ensemble des marchés passés par des entités adjudicatrices et de pouvoirs adjudicateurs pour les marchés portant sur des projets d'infrastructures concourant directement à la transition énergétique au-delà d'un certain montant fixé par voie réglementaire afin de garantir l'accès aux PME à la commande publique sur ces projets Le montant du seuil envisagé est de 10 millions d'euros - le même seuil retenu par le décret du 27 décembre 2023 d'application de la loi « Industrie verte » sur l'application des offres variables - qui apparaît comme un point d'équilibre garantissant l'efficacité de la mesure et une protection suffisante des PME.

2° - L'option retenue consiste à donner la possibilité au sous-traitant direct du titulaire (sous-traitant de rang 1) du marché de renoncer expressément au bénéfice du paiement direct, par dérogation au L. 2193-11 du code de la commande publique.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Les mesures ne modifient pas l'ordre juridique interne.  Elles n'ont, en outre, pas vocation à être codifiées.

Le dispositif contribue également à l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le droit conventionnel n'impose pas le recours à l'allotissement ni le paiement direct au sous-traitant.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La disposition n'a, par elle-même, aucun impact macroéconomique. Elle permettra en revanche de contribuer à l'accélération de la mise en oeuvre de projets d'infrastructures concourant directement à une production d'électricité à un des prix les plus bas pour les moyens de production d'énergie décarboné. Enfin, des impacts en matière d'emplois industriels peuvent être anticipés grâce à une plus forte attractivité des marchés d'infrastructures concourant directement à la transition énergétique pour les opérateurs économiques nationaux. Par ailleurs, la renonciation du sous-traitant au paiement direct permettrait de raccourcir les délais de paiement et, dans certains cas, d'alléger la charge administrative du sous-traitant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

1° - La mesure renforcera l'attractivité des marchés les plus conséquents - supérieurs au seuil fixé par décret et concernant les plus gros ouvrages, en nombre limité - pour les entreprises tout en permettant aux TPE et PME de répondre aux offres de marchés publics inférieurs à ce seuil.

2° - La renonciation du sous-traitant au paiement direct permettrait de raccourcir les délais de paiement et, dans certains cas, d'alléger la charge administrative du sous-traitant. En effet, les règles de forme imposées pour la rédaction des factures nécessitent de fréquents échanges avec le titulaire du marché et les sous-traitants. Le sous-traitant sera toutefois toujours dans l'obligation de se déclarer au maître d'ouvrage. Enfin, cette disposition ne fait que donner la possibilité de renoncer au paiement direct, donc le sous-traitant sera toujours en mesure de conserver le paiement direct s'il juge ce régime plus favorable.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La renonciation du sous-traitant au paiement direct (mesure 2°) permettrait de raccourcir les délais de paiement et, dans certains cas, d'alléger la charge de l'administration. Le traitement des factures des sous-traitants par l'administration implique de nombreuses étapes telles que la signature du service fait, la demande de mise en paiement, la mise en paiement, qui peut entrainer des délais importants et ainsi retarder le paiement effectif des sous-traitants. Cette mesure induit une baisse de charge pour les services de l'Etat qui n'auront plus à instruire les factures des sous-traitants qui en font la demande.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Les mesures permettront d'accélérer la transition énergétique et de renforcer la souveraineté énergétique et industrielle de la Nation.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les mesures concourent à la production d'énergie décarbonée à bas prix dont les ménages bénéficient ainsi qu'à l'équilibre, la sécurité et la sûreté du système électrique dont dépend l'approvisionnement en électricité de chaque foyer.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette disposition n'a, par elle-même, aucun impact environnemental. Elle permettra en revanche de contribuer à l'accélération de la mise en oeuvre de projets d'infrastructures concourant directement à la transition énergétique, et, par là-même, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce qui contribuera directement aux objectifs de lutte contre le réchauffement climatique.

S'agissant spécifiquement des parcs éoliens en mer, la prise en compte de l'environnement est un enjeu majeur de ces projets. L'exercice de planification spatiale maritime est la première étape de l'évitement. Pour minimiser les potentielles externalités négatives de l'éolien en mer, une démarche dite ERC - pour « éviter, réduire, compenser » - est ensuite suivie minutieusement depuis le choix de la zone jusqu'au démantèlement. Les parties prenantes doivent ainsi éviter les atteintes à l'environnement, réduire celles qui n'ont pu être suffisamment évitées, ou en dernier lieu, compenser les effets qui n'auraient pu être évités ou suffisamment réduits.

Il est important de rappeler que le développement des parcs éoliens en mer a commencé dans les années 1990, et qu'à ce titre, un nombre important de retours d'expérience existe. Par exemple, la Belgique offre un retour d'expérience de plus de 10 ans sur les effets des parcs éoliens sur l'environnement marin et pour lequel l'Institut royal des sciences naturelles de Belgique (équivalent du Muséum d'histoire naturelle en France) affiche les conclusions suivantes : « Les impacts environnementaux des parcs éoliens offshore ne sont ni noirs ni blancs : les fondations créent divers récifs d'invertébrés des fonds marins autour des turbines mais ne constituent pas une alternative équivalente aux promouvoir les impacts jugés bons en vue d'un développement maximal des parcs éoliens en mer, respectueux de l'environnement. »

Par ailleurs, la création de l'Observatoire de l'éolien en mer en 2022 permettra également de poursuivre l'amélioration des connaissances sur la biodiversité marine et les impacts de l'éolien en mer.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, qui a rendu un avis favorable tacite, le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La présente disposition est applicable sur l'ensemble du territoire français, y compris aux contrats soumis au code de la commande publique dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

5.2.3. Textes d'application

Un décret d'application devra être pris pour fixer le montant à partir duquel la dérogation au principe d'allotissement est possible.

Article 17 - Accélérer et simplifier les déploiements de réseaux mobiles

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les opérateurs d'infrastructures et de téléphonie mobile établissent des plans de financement/investissement dans le cadre de leurs plans de déploiement des réseaux mobiles, ces plans tiennent notamment compte du délai estimé de délivrance des autorisations administratives ou décisions de non-opposition accordées pour l'édification des antennes de téléphonie mobile.

1) Les autorisations administratives

Le principe général veut que le retrait d'une autorisation administrative est possible dans un délai de quatre mois, conformément aux dispositions de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par dérogation à ce principe, les autorisations d'urbanisme peuvent être retirées dans un délai de trois mois à condition qu'elles soient illégales (article L. 424-5 du code de l'urbanisme). Dans le cadre du déploiement des réseaux de communications électroniques, la possible remise en cause de la décision favorable à l'installation d'une antenne mobile dans le délai de 3 mois conduit à une insécurité juridique pour ces opérateurs, ce qui conduit à renchérir le coût du déploiement.

En premier lieu, l'opérateur d'infrastructure ou, s'il choisit d'agir seul, l'opérateur de téléphonie mobile doit décider s'il commence les travaux avant l'expiration du délai ou attend que celui-ci soit expiré. Chaque choix comporte des avantages et des inconvénients : en lançant des travaux, l'opérateur peut rentabiliser plus rapidement son investissement, mais peut avoir des difficultés à rassurer ses clients (les opérateurs de téléphonie mobile, les fournisseurs de service très haut débit radio) sur la pérennité du site ; en attendant l'expiration du délai, il peut éviter les coûts significatifs qui résulteraient d'un retrait ultérieur, toutefois ce délai représente un manque à gagner.

En second lieu, s'il commence les travaux et se voit ensuite retirer son autorisation, il peut soit agir immédiatement en justice en contestant la décision de retrait et attendre l'issue du procès ; soit en parallèle, ou sans retenir l'option contentieuse, rechercher un nouveau site et initier de nouvelles démarches de demandes d'autorisation administrative. Or, les aléas inhérents aux autorisations d'urbanisme sont source de complexité et représente un coût pour les entreprises dans le cadre du déploiement de la couverture numérique du territoire auquel les opérateurs de téléphonies sont engagés auprès de l'Etat.

Le déploiement du haut débit mobile : une priorité du gouvernement

Le Gouvernement a fait de la couverture numérique des territoires l'une de ses priorités, notamment par le déploiement de réseaux mobiles.

A cet égard, les procédures successives d'attributions de fréquences mobiles lancées par le Gouvernement ont imposé aux opérateurs mobiles un ensemble d'obligations strictes de couverture et de qualité de service pour le service voix184(*) et l'accès au très haut débit mobile (4G et 5G)185(*) sur l'ensemble du territoire, qui sont juridiquement opposables sur la durée de leurs autorisations.

Les autorisations d'utilisation de fréquences de la bande 3,4 - 3,8 GHz (fréquences dites « 5G ») délivrées aux opérateurs de communications électroniques en 2020 comprennent des obligations ambitieuses en matière d'aménagement du territoire. A titre d'exemple, les opérateurs doivent suivre une trajectoire exigeante dans les déploiements des équipements en bande 3,4 - 3,8 GHz : 3 000 sites en 2022 ; 8 000 sites en 2024 ; et 10 500 sites en 2025. AÌ l'horizon 2030 la totalitéì des sites devront fournir un service de type 5G.

Est également prévu un mécanisme pour s'assurer que les zones non urbaines bénéficieront aussi de ces déploiements. Ainsi, 25 % des sites en bande 3,4 - 3,8 GHz devront être déployés dans une zone rassemblant les communes des zones peu denses et celles des territoires d'industrie, hors des principales agglomérations.

Or, comme toute autre activité de construction, le déploiement de sites mobiles nécessite des décisions d'urbanisme (article L. 421-1 du code de l'urbanisme).

Les décisions d'autorisations d'urbanisme

Les décisions d'autorisations d'urbanisme peuvent concerner les déclarations préalables de travaux, les permis de construire, ou les permis d'aménager ou de démolir.

L'article L. 424-1 du code de l'urbanisme prévoit que l'autorité compétente (le maire, le plus souvent) « se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable ».

La problématique : les décisions d'autorisation d'urbanisme créatrices de droit comportant des illégalités

Une décision d'autorisation urbanisme favorable, et donc créatrice de droits, peut s'avérer illégale ; dans ce cas, l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme dispose que l'autorité peut retirer une décision d'autorisation d'urbanisme dans les trois mois suivant sa délivrance.

Le retrait d'une telle décision étant susceptible d'entrainer des conséquences en chaîne186(*), le législateur avait prévu, à l'article 222 de la loi n° 2018-1021 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique de 2018 (loi dite « ELAN »), une dérogation, qui était temporaire187(*). .

Historique des réponses du législateur

Comme l'illustre le tableau ci-dessous, la problématique a été marquée par une certaine oscillation législative.

Tableau 1 : Possibilité de retrait d'une décision d'urbanisme positive

Date

Jusqu'en 2005

2006-2013

2014-2017

2018-2022

2023 >

Décision de non-opposition

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Décision ne peut être retirée

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Décision ne peut être retirée pour les antennes de téléphonie mobile

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Autres décisions d'urbanisme

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Décision ne peut être retirée pour les antennes de téléphonie mobile

Décision peut être retirée, en cas d'illégalité

Texte

Code de l'urbanisme

Loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement

Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové

Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique

Néant

Disposition

Livre IV

Article 6

Article 61 IV

Article 222

Expiration de la dérogation prévue à l'article 222

2006 : suppression du droit de retrait pour les décisions de non-opposition

L'article 6 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement a ratifié l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme. L'article 15 de l'ordonnance a réécrit le livre IV du code de l'urbanisme et notamment les règles relatives au retrait des décisions d'urbanisme. En effet, pointant « une source importante d'insécurité pour les déclarants », le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance note que « la sécurité juridique apportée par le régime de la déclaration préalable sera améliorée ». Ainsi naît l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme qui dispose que « [l]a décision de non-opposition à la déclaration préalable ne peut faire l'objet d'aucun retrait ».

2014 : retour du droit de retrait pour les décisions de non-opposition

L'article 61 IV de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR) modifie l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme en rétablissant le droit pour les autorités locales de retirer les décisions de non-opposition. Cette modification est issue d'un amendement, dont l'exposé sommaire note que « [l]e recours contentieux est [actuellement] l'unique solution de censure d'une décision de non-opposition illégale ». Ainsi, poursuit-il, « [p]ermettre le retrait d'une décision de non-opposition aÌ une déclaration de travaux par l'autoritéì administrative saisi d'un recours gracieux évite de saisir la justice et une condamnation indemnitaire importante de la collectivitéì publique et/ou de son bénéficiaire s'il n'a pas encore réaliséì les travaux ». La décision de non-opposition suit donc à nouveau le même régime que le permis de construire, d'aménager ou de démolir.

2018 : dérogation temporaire du droit de retrait pour les décisions relatives aux antennes de téléphonie mobile

En janvier 2018 a été signé un accord aux termes duquel les opérateurs mobiles devaient équiper en 4G, avant fin 2022, l'ensemble des communes du programme zones blanches centres bourgs.

Dans ce contexte, l'article 222 de la loi n° 2018-1021 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique de 2018 (loi dite « ELAN ») a prévu une dérogation au droit de l'autorité administrative de retirer ses décisions d'autorisation, dès lors que ces décisions concernent l'établissement d'antennes de téléphonie mobile, et ce jusqu'au 31 décembre 2022. Aux termes de cet article : « A titre expérimental, par dérogation à l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme et jusqu'au 31 décembre 2022, les décisions d'urbanisme autorisant ou ne s'opposant pas à l'implantation d'antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d'accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées... »

Cette dérogation a permis aux opérateurs de télécommunications de ne pas attendre l'expiration du délai de trois mois (pendant lequel le retrait est possible) dans le déploiement de leurs réseaux mobiles.

Cette mesure dérogatoire n'est pas la seule à favoriser le déploiement des antennes de téléphonie mobile. Pour rappel, les implantations d'antennes sont exclues de l'obligation de respecter le principe de continuité de l'urbanisation en montagne (article L. 122-3 du code de l'urbanisme) ainsi que de l'obligation d'obtenir un avis conforme de l'Architecte des bâtiments de France (article L. 632-2-1 du code du patrimoine).

2023 : expiration de la dérogation temporaire

La dérogation temporaire prévue à l'article 222 de la loi n° 2018-1021 dite ELAN a expiré. Les décisions d'urbanisme autorisant ou ne s'opposant pas à l'implantation d'antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d'accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées.

2)   Assurer au vendeur ou au bailleur que l'objet pour lequel il contracte, à savoir l'exploitation d'une antenne de téléphonie mobile, sera réalisé

Le Gouvernement a fait de la couverture numérique des territoires l'une de ses priorités, notamment par le déploiement de réseaux mobiles.

En 2018, le Gouvernement et l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse ont lancé le programme ambitieux du New Deal mobile visant à accélérer et généraliser les déploiements 4G, en particulier sur les zones peu denses, les zones blanches et les zones grises. Au titre de ce programme, des engagements juridiquement contraignants ont été pris par les opérateurs et retranscrits dans leurs autorisations d'utilisation de fréquences, dont notamment l'obligation de couverture en services mobiles de très haut débit de zones identifiées par la puissance publique comme étant non ou mal couvertes en services voix, SMS et 4G, qui constitue le dispositif de couverture ciblée.

Le déploiement des stations radioélectriques sur l'ensemble du territoire national suppose l'intervention de plusieurs acteurs que sont, principalement, les opérateurs de téléphonie mobile en charge de la fourniture de services de communications électroniques, au moyen d'antennes d'émission ou de réception de signaux radioélectriques (antennes de téléphonie mobile), et les opérateurs d'infrastructure en charge de l'édification et de l'exploitation de pylônes ou autre construction supportant ces antennes, sur un terrain loué ou acquis

Pour simplifier l'élaboration de projets de développements d'infrastructures numériques et alléger la charge administrative des travaux d'études, les opérateurs de communications électroniques et les opérateurs d'infrastructures ont besoin de visibilité à long terme quant à la durée de l'implantation des antennes destinées à assurer la couverture numérique mobile du territoire. En effet, les opérateurs de communications électroniques sont astreints à des obligations de couverture mobile et les opérateurs d'infrastructure soumis à des investissements conséquents, qui s'amortissent sur plusieurs années.

Il s'avère que l'article L. 34-9-1-1 du code des postes et des communications électroniques (CPCE), créé par l'article 33 de la loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France (REEN) qui a institué un dispositif d'information du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale sur le territoire duquel est envisagé l'acquisition ou la location d'un terrain aux fins d'édification d'une infrastructure d'accueil d'une antenne de téléphone mobile, répond imparfaitement à ce besoin de sécurisation nécessaire au déploiement d'infrastructures de communications électroniques mobiles.

Depuis la séparation des activités de gestionnaire d'infrastructures et de fournisseurs de services librement choisis par les opérateurs télécoms, la mise à disposition des terrains destinés à l'implantation d'un site mobile est réalisée au moyen d'une convention conclue à titre onéreux avec les propriétaires fonciers et l'opérateur d'infrastructure, pour une durée d'au moins 12 ans.

Le type et le contenu de la convention conclue avec l'opérateur d'infrastructure dépend de la nature du propriétaire (personne publique ou privée), voire de celle du terrain lorsqu'il est propriété d'une personne publique. Le bail civil semble être le contrat le plus utilisé pour la location de terrains privés ou de dépendances du domaine privé des personnes publiques. Des conventions d'occupation du domaine public sont également établies pour la mise à disposition de dépendances du domaine public à des fins de couverture mobile.

Lors de la signature d'une convention pour un terrain non encore exploité à des fins de téléphonie mobile, lorsque le preneur à bail ou l'acquéreur entend exploiter le terrain à des fins d'installation d'antennes de téléphonie mobile, il doit s'assurer que l'objectif poursuivi annoncé sera bien susceptible d'être réalisé : possibilité de construire des infrastructures d'accueil et exploitation de ces infrastructures en contractant avec des opérateurs de téléphonie mobile. Si l'autorisation d'urbanisme n'est pas délivrée ou si les opérateurs de téléphonie mobile ne souhaitent pas recourir à des antennes édifiées dans certaines zones, cela peut conduire à des pylônes « orphelins » créant une pollution visuelle inutile et engendrant une charge administrative certaine pour de nombreux acteurs parties prenantes (opérateurs de téléphonie mobile, collectivités territoriales, opérateurs d'infrastructures).

Il en est de même lors du renouvellement d'une convention. En outre, en cas d'échec des différentes négociations qui doivent être menées, l'abandon du site par les opérateurs d'infrastructures ou de communications électroniques peut conduire à la création de nouvelles zones blanches et à l'échec de la transmission des communications d'urgence.

Enfin, que ce soit pour la signature initiale pour un site non développé, ou pour le renouvellement d'un bail où existent déjà des infrastructures d'accueil, il est important de sécuriser l'exploitation, par des opérateurs de téléphonie mobile, des infrastructures d'accueil, que celles-ci soient implantées sur un terrain ou un immeuble de toute nature tel que, par exemple, le toit d'un immeuble.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Les propositions avancées se fondent sur le respect des principes constitutionnels, notamment:

- la charte de l'environnement, notamment son article 1er (« Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé »), dans la mesure où les mesures proposées visent à limiter l'implantation d'antennes de téléphonie mobile non exploitées ; et

- la liberté d'entreprendre, protégée par la Constitution française (voir la décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982) et l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Outre le respect des libertés précitées, les mesures envisagées visent à atteindre l'objectif de valeur constitutionnelle, d'accessibilité et intelligibilité du droit, principe consacré par la décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 du Conseil constitutionnel, qui implique que les règles de droit doivent être claires, précises et compréhensibles par tous.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le secteur des communications électroniques est soumis à une régulation économique qui a fait partie d'un mouvement de libéralisation des marchés à l'initiative des autorités européennes. Depuis 1990, plusieurs « paquets » télécom ont créé un cadre réglementaire harmonisé au sein de l'Union européenne pour la réglementation des réseaux et des services de communications électroniques. En ce sens, une régulation du secteur a été mis en place entre le ministre chargé des postes et des communications électriques ainsi qu'un régulateur indépendant qu'est l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.

Dans la perspective de faciliter le déploiement des réseaux de communications électroniques à haut débit tout en réduisant les coûts liés à ce déploiement, la directive 2014/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à des mesures visant à réduire le coût du déploiement de réseaux de communications électroniques à haut débit a introduit un ensemble de mesures harmonisées pour répondre aux progrès réalisés dans le domaine des technologies numériques et pour répondre aux besoins croissants et futurs des entreprises et des citoyens européens nécessitant un accès à des réseaux qui ont une capacité plus élevée.

Aussi, le cadre réglementaire des communications électroniques a récemment fait l'objet d'une refonte dans le cadre de l'adoption de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen, par laquelle de nouveaux acteurs sont entrés dans le champ de la régulation et de nouvelles priorités ont été données comme le déploiement de réseaux de nouvelle génération tels que l'accès à la 5G et à la fibre optique ainsi que la mutualisation des infrastructures afin d'accélérer leur déploiement au sein des Etats membres de l'Union européenne.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

En matière d'autorisations d'urbanisme

Au Royaume-Uni, les autorités locales peuvent retirer une décision d'urbanisme tant que la construction en question n'est pas terminée. Il s'agit cependant d'une issue extrêmement rare, car d'une part le bénéficiaire de la décision peut faire appel du retrait auprès du ministre compétent, et, d'autre part, l'autorité en question doit indemniser le bénéficiaire de la décision pour les travaux entrepris (v. par exemple, l'article 107 du Town and Country Planning Act 1990).

En Irlande, le dispositif est identique (v. l'article 195 du Planning and Development Act 2000).

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

En Italie, un droit de préférence existe.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les modifications proposées sont du niveau législatif et relèvent de la compétence de la loi conformément à l'article 34 de la Constitution (qui confère au Parlement la compétence pour fixer les principes fondamentaux « du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ».

En matière d'autorisations d'urbanisme

La fin de la dérogation temporaire, prévue à l'article 222 de la loi n° 2018-1021 dite ELAN, conduit, de nouveau, les opérateurs à attendre l'expiration du délai de 3 mois avant d'initier les travaux d'installation. Ce laps de temps conduit donc à un délai minimum de 3 mois dans le déploiement des réseaux mobiles voire beaucoup plus si l'autorisation est retirée, un nouveau site d'installation devant être recherché et les démarches administratives recommencées.

Cette situation ne peut être résolu autrement que par voie législative.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

Une dichotomie apparait entre l'esprit de l'article L.34-9-1-1 et sa rédaction entrainant une complexité dans la mise en oeuvre des dispositions. En outre, est également marquée de complexité l'articulation de cet article avec l'article L. 425-17 du code de l'urbanisme, créé par l'article 33 de la loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 dite REEN, qui précise que les travaux destinés à l'aménagement de terrains, à l'édification de poteaux, de pylônes ou de toute autre construction supportant des antennes d'émission ou de réception de signaux radioélectriques aux fins de fournir au public un service de communications électroniques ne peuvent être réalisés avant, s'il y a lieu, l'information du maire prévue à l'article L 34-9-1-1 du CPCE.

La rédaction actuelle conduit à une première difficulté : les entreprises et les services administratifs s'interrogent sur la notion de « acquéreur ou preneur d'un contrat de bail [...] qui, sans être soumis lui-même à l'article L. 33-1 [du CPCE] » afin de vérifier si un mandat d'un opérateur de communications électroniques mobiles doit être fourni par l'acquéreur ou le preneur à bail. L'article L.33-1 ayant fait l'objet d'une réforme issue de l'ordonnance n° 2021-650 du 26 mai 2021 portant transposition de la directive (UE) 2018/1972, il ne semble en effet plus adapté à exclure les sociétés à même donc de faire exploiter les antennes pour la fourniture d'un service mobile.

La deuxième difficulté tient à la divergence entre l'esprit de la loi et sa rédaction. Ainsi, l'article L. 425-17 du code de l'urbanisme est marquée par une ambiguïté rédactionnelle et peut laisser entendre qu'une autorisation d'urbanisme pour réaliser des travaux est nécessaire que ces travaux aient lieu sur un terrain ou sur le toit d'un bâtiment, alors que la rédaction de l'article L. 34-9-1-1 du CPCE ne mentionne que les terrains, ce qui parait exclure de ce dispositif les autres possibilités d'accueil de pylône tel par exemple que les toits de bâtiments.

La troisième difficulté tient aux conséquences nées de l'absence de prise en compte des situations de reprise de bail d'un terrain où précédemment un opérateur d'infrastructure avait édifié des pylônes en contractant avec le précédent preneur à bail. Ainsi lorsque le nouveau preneur à bail destine le terrain à l'édification de pylône mais que ces pylônes sont d'ores et déjà construits, les différents acteurs se demandent alors si un mandat est nécessaire. Cette situation, qui entraîne de multiples échanges, est source de retard dans le traitement du dossier et peut potentiellement conduire à des contentieux.

Enfin, la référence faite à une attestation de « mandat » de la part d'un opérateur de téléphonie mobile n'est pas adaptée puisque, tout d'abord, elle ne renvoie à aucune réalité juridique et en particulier au régime de mandat prévu à l'article 1984 du code civil. Aussi, elle ne correspond pas aux objectifs de couverture mobile du gouvernement, cette notion n'implique pas d'engagement de la part de cet opérateur de téléphonie mobile d'exploiter les antennes implantées par les opérateurs d'infrastructures. Un mandant peut en effet décider de ne pas utiliser l'infrastructure construite par son mandataire.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

En matière d'autorisations d'urbanisme

Il s'agit de réduire l'insécurité juridique à laquelle sont confrontés les opérateurs de téléphonie dans les trois mois de la délivrance de la décision favorable à l'installation d'équipements. Cette simplification aura pour effet direct de faciliter le déploiement des réseaux de communications électroniques ainsi que de renforcer la couverture numérique du territoire en cohérence avec le New Deal Mobile et l'importance d'une excellente couverture pour la bonne activité des entreprises.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

La proposition de modification vise à clarifier la réglementation en la rendant immédiatement accessible aux acteurs concernés et en allégeant ainsi la charge administrative induite par l'insécurité juridique.

Aussi, elle vise à prendre en compte une situation nouvelle, qui ne l'est actuellement pas, dans la rédaction de l'article L. 34-9-1-1 du code des communications électroniques. En effet, d'après certaines lectures, seule l'installation de nouvelles infrastructures passives est envisagée par le texte. La modification proposée va permettre d'intégrer les situations dans les lesquelles les installations sont déjà existantes sur l'emplacement. De plus, la proposition de modification vise à rendre plus efficace le dispositif en intégrant une sanction, à savoir la nullité relative du contrat ou de la convention, en cas d'absence d'information du maire ou de non-transmission, à celui-ci, d'un document attestant de l'obtention, par l'acquéreur ou le preneur à bail, d'un engagement auprès d'un opérateur de téléphonie mobile ayant vocation à utiliser cette infrastructure d'accueil.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

En matière d'autorisations d'urbanisme

Différentes options, toutes de niveau législatif, ont été examinées. Deux options se présentaient : limiter le délai dans lequel l'autorité peut retirer sa décision positive (par exemple, deux ou un mois) ou supprimer la possibilité de retrait.

La disposition offrant la plus grande sécurité pour les opérateurs est celle de la suppression de de la possibilité de retrait.

Concernant la délimitation du champ de la dérogation, les options principales s'articulaient autour de deux choix : limiter ou non la suppression au seul secteur de la téléphonie mobile ; limiter ou non la suppression aux seules décisions de non-opposition. Le tableau ci-dessous schématise les options possibles.

Tableau 2 : Possibilité de retrait d'une décision d'urbanisme positive

 

Non-opposition à déclaration préalable uniquement

Non-opposition et permis de construire

Toutes décisions d'urbanisme

Secteur radiotéléphonie uniquement

Option non retenue

Option retenue

Option non retenue

Tous secteurs

Option non retenue

Option non retenue

Option non retenue

Restreindre la dérogation au seul secteur de la téléphonie mobile, et en l'appliquant à deux types de décisions d'urbanisme positives (non-opposition à déclaration préalable et délivrance de permis de construire) est apparu l'option la plus proportionnée au regard des différents objectifs d'intérêt général poursuivis :

- la nécessité absolue du maintien des communications d'urgence qui sont indispensables pour la réception des appels entre les usagers et les centres de réception d'appels destinés aux services publics chargés de la sauvegarde des vies humaines, des interventions de police, de la lutte contre l'incendie ou bien de l'urgence social ;

- l'amélioration progressive de la qualité du réseau mobile dans la perspective du respect des obligations mises en place par le dispositif du New Deal mobile imposant un standard d'exigences pour « une bonne couverture mobile » sur l'ensemble du territoire ;

- la réduction de l'empreinte environnementale en évitant de multiplier l'implantation de plusieurs antennes de téléphonie mobile sur un même territoire ainsi que le démantèlement des infrastructures passives destinées à les accueillir et la réimplantation sur un autre terrain de ces dernières.

En proposant de pérenniser cette dérogation, il est espéré mettre fin à l'instabilité législative créatrice d'insécurité juridique et de complexité dans la lisibilité de la norme.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

Différentes options, toutes de niveau législatif, ont été examinées : création d'un nouveau type de contrat : le « bail télécom », création d'une présomption de domanialité publique, création de nouvelles servitudes. Toutes ces hypothèses, au mieux, répondaient imparfaitement à la problématique posée, et au pire, conduisaient à une complexification de loi ou à des risques d'inconventionnalité.

Par exemple, il a été considéré la possibilité d'une modification du cadre contractuel pour la location de foncier destinée à l'implantation des antennes, par exemple en adaptant les dispositions du code civil relatif au contrat de bail, en créant un contrat spécifique appelé « bail télécom », ou en imposant le recours au bail commercial. Le cadre constitutionnel, international (CEDH) et européen est peu favorable à l'introduction de ce type de dispositif, au regard des atteintes à certains principes fondamentaux auxquels il pourrait porter atteinte. Par ailleurs, pour être efficace, le nouveau dispositif devrait s'appliquer aux contrats en cours.

Il a été examiné possibilité d'introduire une présomption de domanialité publique, afin d'aider les collectivités territoriales à contracter dans de meilleures conditions et se prémunir des conséquences négatives d'un changement de locataire, telles que la perte de couverture numérique. Toutefois, une telle présomption ne pourrait concerner que le domaine public de de ces personnes publiques et porterait une atteinte forte aux principes de domanialité publique.

Enfin, a été envisagée la possibilité d'instituer, sur les terrains, des servitudes prévues à l'article L.45-9 du code des postes et communications électroniques, pour faciliter l'implantation des infrastructures mobiles. Toutefois, les servitudes prévues par l'article L. 45-9 du code des postes et communications électroniques ne confèrent qu'un droit de passage et non un droit de jouissance ou d'usage. En outre, il n'est pas certain que les opérateurs d'infrastructures soient, en tant que tels, des « exploitants des réseaux ouverts au public ». Cette piste n'est donc pas exploitable.

3.2. OPTIONS RETENUES

En matière d'autorisations d'urbanisme

L'option retenue consiste à :

- recréer le dispositif expérimental permettant de maintenir une décision créatrice de droits comportant des illégalités au profit des opérateurs de communications électroniques, ce qui implique de supprimer, de manière permanente, le droit pour les autorités locales de retirer, en cas d'illégalité, les décisions de non-opposition à déclaration de travaux préalable et les décisions de délivrance de permis de construire ;

- limiter la suppression au seul secteur de la téléphonie mobile ;

- effectuer cette modification du droit actuel en complétant l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme par un article L. 424-5-1, dont la rédaction s'inspirera de celle de l'article 222 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) ;

- suppression du dispositif expérimental par souci de cohérence entre l'ancien article et le nouvel article créé.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

Réécrire l'article L.34-9-1-1 du CPCE apparait être l'option qui s'insère le mieux dans le corpus juridique en assurant une meilleure lisibilité de la norme actuelle et de son esprit.

Pour précision, la nouvelle rédaction rend expressément applicable les dispositions aux emplacements susceptibles d'accueillir des antennes du terrain aux toits des immeubles en passant par les châteaux d'eau, à titre d'exemple.

Cette nouvelle rédaction clarifie également le sens à donner au mot « édification » afin de prendre en compte les situations où l'installation préexiste au moment de la reprise de contrat de location du terrain.

Elle remplace la notion de « mandat » par la notion d' « engagement ».

Elle restreint le champ de la dérogation à la détention d'un engagement d'un opérateur de téléphonie mobile aux seuls opérateurs de téléphonie mobile.

Enfin, elle apporte une précision supplémentaire quant à la sanction (possibilité d'invoquer la nullité relative du contrat) en cas d'absence d'information du maire et de non-transmission d'un document attestant d'un engagement d'un opérateur de téléphonie mobile ayant vocation à utiliser cette infrastructure d'accueil, par l'acquéreur ou le preneur à bail. L'idée est de pouvoir donner la possibilité aux contractants de se défaire d'un contrat qui ne permettrait finalement pas d'exploiter l'infrastructure passive destinée à fournir au public un service de communications électroniques.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

En matière d'autorisations d'urbanisme

L'option retenue implique la modification de la partie législative du code de l'urbanisme par création d'un nouvel article L. 424-5-1.

En outre, l'article 222 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique de 2018 est supprimé.

A l'instar des précédentes dispositions législatives, ces dispositions sont proportionnées et respectueuses du cadre constitutionnel.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

Le choix est fait de modifier la rédaction de l'article L. 34-9-1-1 du code des postes et des communications électroniques. Il n'y aura aucun impact sur les autres codes en vigueur.

L'actuelle disposition ainsi réécrite assurera une meilleure lisibilité et accessibilité de la règle de droit.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

En matière d'autorisations d'urbanisme

Néant.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

La modification proposée du code des communications électroniques et des postes s'inscrit dans la continuité du cadre réglementaire européen fixé, notamment par la directive 2018/1972 et la directive 2014/61 puisqu'elle vient renforcer la sécurité des réseaux de communications électroniques et favoriser le déploiement d'une couverture mobile de nouvelle génération adaptée aux objectifs fixés en matière de connectivité par l'Union européenne.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

L'amélioration de la couverture mobile du territoire a des répercussions positives sur les recettes des opérateurs de téléphonie mobile, notamment en leur permettant d'attirer de nouveaux clients. Par conséquent, la prévention de la réapparition de zones blanches et le maintien d'une bonne couverture mobile va permettre aux opérateurs de conserver leur compétitivité sur le marché voire même d'accroitre leur projet dans la perspective d'un développement accru et simplifier des antennes sur les zones restantes à couvrir.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

En matière d'autorisations d'urbanisme

La mesure proposée va permettre aux opérateurs d'infrastructures d'accueil (aujourd'hui au nombre de cinq), et de ce fait les opérateurs de téléphonie mobile également (aujourd'hui au nombre de quatre), de réduire le délai ainsi que le coût des formalités administratives à réaliser et par incidence le coût des déploiements induit par ces formalités obligatoires. Dans le même sens, la possibilité pour ces acteurs de procéder au lancement des travaux sans attendre l'expiration du délai de trois mois va permettre de rationaliser la procédure administrative et d'atténuer l'insécurité à laquelle ils sont confrontés.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

La proposition simplifiera, pour les opérateurs de téléphonie mobile, la poursuite des objectifs gouvernementaux en matière de haut débit mobile pour tous.

Elle sécurisa également les investissements des opérateurs d'infrastructure existants. La mesure proposée n'aura pas d'impact financier pour les entreprises puisqu'il s'agit simplement de clarifier une obligation d'information existante.

4.2.3. Impacts budgétaires

Les deux mesures entendent accélérer le déploiement des réseaux mobiles et n'ont pas d'impacts budgétaires.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

En matière d'autorisations d'urbanisme

La proposition, en elle-même, ne crée pas de charge administrative supplémentaire pour les collectivités territoriales.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

La proposition ne créera pas de charge administrative supplémentaire substantielle pour les collectivités territoriales, le principe du dispositif existant déjà. En revanche, cela sécurisera mieux la couverture mobile dont dépendent leurs administrés puisqu'elle vise à renforcer l'information et la transparence vis-à-vis des communes dans lesquels des équipements vont être installés pour assurer une haute connectivité sur le territoire. L'information la plus en amont possible des maires va également avoir pour effet de renforcer l'acceptabilité du projet d'installation d'équipements tels que les pylônes auprès de la population notamment dans la démarche de position des pylônes dans la commune.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La clarification des dispositions de l'article L.34-9-1-1 existant aura comme avantage de réduire le risque de contentieux sur la signification de cette disposition au regard de son manque de lisibilité actuel.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Sur le plan social, l'accès à une connectivité mobile de qualité (sms, voix et données) constitue un enjeu majeur, notamment en zone rurale. En effet, la présence d'une couverture mobile sur un territoire permet en premier lieu de rendre possible l'accès aux appels d'urgence et constitue à ce titre un facteur renforçant la sécurité des biens et des personnes. En outre, comme le relève la Commission européenne188(*), le lien entre développement économique et connectivité mobile est largement démontré. Une étude chiffre ce gain, en ce qui concerne les pays en développement, à entre 0,6 à 0,8 point de croissance annuelle du PIB189(*). En conséquence, cette mesure visant à limiter la réapparition de zones blanches contribuera au désenclavement des territoires ruraux.

Afin de renforcer la visibilité de déploiement des opérateurs mobiles, la pérennisation de l'ancien dispositif expérimental relatif à l'impossibilité pour les maires de retirer une décision favorable ou de non-opposition accordée va permettre de sécuriser juridiquement l'obtention des autorisations administrations nécessaires à l'implantation des antennes. Une connexion mobile est aujourd'hui une nécessité pour beaucoup de Français sur le plan social. Dans la mesure où la proposition contribuera à éviter la réapparition des zones blanches, elle permettra aux Français de continuer à tisser des liens entre eux, à interagir avec l'administration et à effectuer leurs achats, même en situation de mobilité.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

En matière d'autorisations d'urbanisme

La disposition aura pour effet de sécuriser le déploiement des antennes mobiles et in fine d'assurer une meilleure couverture numérique du territoire utile à tous les citoyens.

Concernant la réalisation de l'objet contractuel

La mesure envisagée aura deux effets positifs pour les particuliers. Tout d'abord, elle aura pour effet de sécuriser le déploiement d'un internet très haut débit sur le territoire en favorisant le maintien des installations existantes lors du renouvellement des baux. Ensuite, l'information préalable donné au maire sur le projet d'installation d'équipement par tout type d'acteur concerné par la mesure va également favoriser l'acceptabilité du projet d'installation par la population.

La proposition permettra d'assurer aux particuliers une connectivité à l'internet haut débit sécurisé et sans risque d'interruption.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure s'inscrirait dans la continuité de la réduction de l'empreinte environnementale du numérique, objectif porté par la loi n°2021-1485 du 15 novembre 2021 (dite « loi REEN ») qui fait suite au constat des impacts conséquents du numérique sur l'environnement.

Dans ce cadre, le renforcement de l'information du maire lors du déploiement des infrastructures des réseaux de communications électroniques sur son territoire prévu par l'insertion d'un nouvel article L. 34-9-1-1 du CPCE avait pour objectif : « de rationnaliser la consommation du foncier et d'éviter la spéculation sur des terrains d'assiette potentiels et la construction d'infrastructures laissées ensuite vacantes faute d'utilisateurs identifiés préalablement au lancement des projets »190(*).

Les modifications proposées viseraient à limiter dans un sens la pollution visuelle présente dans les collectivités territoriales et dans un autre sens, à limiter le démontage et la réinstallation des infrastructures passives et ce, à différents endroits de la commune. Ce phénomène peut ainsi avoir des impacts environnementaux sur les divers emplacements sur lesquels les infrastructures passives et les antennes pourraient être installés. Par conséquent, concentrer l'installation de ces infrastructures à un seul terrain, en combinant avec les objectifs de la mutualisation des infrastructures, permet de prévenir des impacts potentiels sur l'environnement à plusieurs emplacements de la commune.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, qui a rendu un avis favorable tacite, le 12 avril 2024.

En application de l'article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, le présent article a été soumis à l'examen de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, qui a rendu un avis favorable n° 2024-0772, le 16 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le nouvel article L. 424-5-1 du code de l'urbanisme s'appliquera aux autorisations d'urbanisme délivrées à compter du trentième jour suivant la publication de la loi au Journal officiel de la République française pour tenir compte des situations en cours.

Les autres dispositions entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

L'article est applicable de plein droit dans les départements relevant de l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion).

Les modifications du code de l'urbanisme, qui relèvent de la compétence urbanisme, ne seront pas applicables dans les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution (Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna), ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et Antarctique françaises.

Les modifications du code des postes et des communications électroniques et des postes, qui relèvent de la compétence télécommunications, ne seront pas applicables dans les trois collectivités du Pacifique (Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Nouvelle-Calédonie ainsi que les Terres australes et Antarctique françaises) qui disposent de compétences propres en matière de télécommunications.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article n'appelle pas de textes d'application.

Article 18 - Simplifier la mise en oeuvre des compensations des atteintes à la biodiversité

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'obligation de prévention et de correction des atteintes à la biodiversité, introduite par la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature et encadrée par le droit européen191(*), se traduit dans le droit français par la mise en oeuvre, pour les projets, plans et programmes visés par le code de l'environnement, de mesures visant à éviter, réduire, et de compenser (séquence « ERC ») leur impact sur la biodiversité. Ces étapes sont successives : l'impératif de compenser n'intervient qu'après la mise en oeuvre de mesure d'évitement et de réduction des atteintes, et seulement si leurs effets sont insuffisants pour réaliser l'objectif « d'absence de perte nette, voire de gain de biodiversité » introduit par la loi n° 2016-1087 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages du 8 août 2016.

Si le principe de compensation est consacré dès 1976 dans la loi puis dans la Constitution en 2005, sa mise en oeuvre effective est récente et progressive. Le droit de la compensation se caractérise par une construction composite : il est le résultat de l'agrégation de différents régimes de protections d'environnements naturels, introduits par le droit européen dès 1992192(*), puis éclairés par la jurisprudence. Ainsi, les projets, plans et programmes soumis à l'obligation de compensation sont ceux soumis à évaluation environnementale (article L. 122-1 du code de l'environnement), aux régimes Natura 2000 (articles L. 414-4 à L. 414-7 et R. 414-19 à R. 414-29 du même code), et au régime relatif aux espèces protégées (articles L. 411-1 à L. 411-3 et R. 411-1 à R. 411-14 du même code), à la législation sur l'eau (articles L. 214-1 à L. 214-11 et R. 214-1 à R. 214-60 du même code), au régime de défrichement (articles L. 341-1 à L. 342-1 et R. 341-1 à R. 341-7 du code forestier) et plus généralement soumis au principe « d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement » prévu au II  de l'article L.110-1 du code de l'environnement.

En 2016, la loi n° 2016-1087 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a introduit un socle de dispositions communes aux différents régimes de compensation, initiant par là un chemin nécessaire d'harmonisation des régimes de compensation. Les articles L.163-1-A à L.163-5 du code de l'environnement consacrent le régime suivant : placée sous la responsabilité du maître d'ouvrage, la mise en oeuvre de la compensation doit viser un objectif d'absence de perte nette, voire de gain pour la biodiversité et se traduire par une obligation de résultats. Les mesures de compensations doivent être « effectives pendant toute la durée des atteintes », soit dès les débuts des travaux d'aménagements afin d'éviter toute perte intermédiaire supplémentaire.

Les projets d'aménagement d'envergure sont fréquemment soumis à plusieurs régimes de compensation (zones humides, espèces protégées, sites Natura 2000...), entraînant une accumulation des différentes procédures et autorités administratives impliquées. Cette diversité de normes et d'acteurs, ajoutée à une tension foncière, rendent difficiles l'anticipation des mesures de compensation et peuvent engendrer des retards significatifs voire bloquer le déploiement des projets, plans ou programmes qui ne peuvent être initiés sans le lancement des mesures de compensation193(*).

L'ordre de cette séquence traduit une hiérarchie. L'évitement est à privilégier, car il garantit l'absence complète d'atteinte à l'environnement. La réduction implique ensuite d'atténuer au maximum les impacts qui n'ont pu être évités.

La compensation des atteintes à la biodiversité n'intervient enfin qu'en dernier recours, dans le cas où certains impacts n'ont pu être ni évités, ni suffisamment réduits. La compensation apporte alors une contrepartie de manière à atteindre « un objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité » conformément à l'article L. 110-1 du code de l'environnement.

La compensation doit respecter plusieurs conditions : l'efficacité, la temporalité, la pérennité, la proximité fonctionnelle et l'équivalence écologique.

La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte a apporté une simplification, par l'instauration de « sites naturels de compensation, de restauration ou de renaturation » (SNCRR - article L163-1-A du code de l'environnement), afin de permettre une anticipation de la compensation. Ce dispositif a pris le relais des « sites naturels de compensation » (SNC) qui étaient jugés trop complexes à mettre en oeuvre et avaient une utilisation très faible (un seul site agréé en France). Cet outil d'anticipation permet à un aménageur de recourir à des actions de restauration préalablement réalisées pour justifier de la bonne réalisation de ses obligations de compensation avant de commencer ses travaux.

Enfin, si un principe de non-régression consacré au 9° du II de l'art. L. 110-1 du code de l'environnement s'impose au pouvoir réglementaire lorsqu'il détermine des règles relatives à l'environnement, le Conseil d'Etat a reconnu, dans un arrêt du 27 mars 2023194(*) qu'il n'est pas invocable lorsque le législateur entend en écarter l'application dans un domaine particulier ou lorsqu'il a institué un régime protecteur de l'environnement et confié au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions de mise en oeuvre de dérogations qu'il a lui-même prévues à ce régime.

1.1. CADRE CONSTITUTIONNEL

La norme constitutionnelle applicable est la Charte de l'environnement, dont les articles 3 et 4 disposent respectivement que « toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » et que « toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi ».

1.1. CADRE CONVENTIONNEL

La directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992, dite « directive habitats-faune-flore », constitue un des fondements du cadre applicable à la protection de la biodiversité au niveau européen. Elle vient compléter le cadre spécifique établi par la directive 79/409/CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, dite « directive oiseaux », modifiée par la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009. Ces directives identifient les types d'habitats naturels et les espèces concernées respectivement dans leurs annexes I et II. Ces directives visent à atteindre un objectif de non-perte nette de biodiversité, et stipulent que la réparation des dommages environnementaux ne peut se limiter à une compensation financière, mais doit également inclure la restauration de l'environnement à son état initial. Ces principes ont été progressivement transposés dans le droit français.

Par ailleurs, la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, modifiée en 2014, connue sous le nom de « directive projets », établit un processus d'évaluation environnementale pour les projets, plans et programmes ayant des incidences significatives sur l'environnement. Elle exige notamment que le porteur de projet inclut dans son rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement une description des caractéristiques du projet ainsi que des mesures envisagées pour éviter, prévenir, réduire et, si possible, compenser les effets néfastes sur l'environnement. Ces dispositions offrent donc un cadre général aux Etats membres pour apprécier les règles de mise en oeuvre concrète de la compensation tout en maintenant un objectif élevé de « maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle ».

Conformément à l'article 1er, sous i) de la directive « Habitats » « l'état de conservation d'une espèce est favorable lorsque i) la population «se maintient à long terme en tant que composante viable de ses habitats naturels », ii) « l'aire de répartition naturelle de l'espèce n'est ni réduite ni susceptible de l'être dans un avenir prévisible » et iii) « il existe, et continuera probablement d'exister, un habitat suffisamment grand pour maintenir ses populations à long terme ».

La CJUE a eu l'occasion d'interpréter cette disposition à plusieurs reprises dans le cadre de ses décisions. Ces interprétations demeurent très générales. Les précisions données par la CJUE sont mentionnées par la Commission européenne dans un document d'orientation195(*), dans lequel elle a jugé que le maintien d'un état de conservation dépendait de « l'incidence cumulée des différentes dérogations affectant des zones locales ». Par ailleurs, dans l'affaire C-674/1, la CJUE a jugé que « si l'examen des meilleures données scientifiques disponibles laisse subsister une incertitude sur le point de savoir si une telle dérogation nuira ou non au maintien ou au rétablissement des populations d'une espèce menacée d'extinction dans un état de conservation favorable, l'État membre doit s'abstenir de l'adopter ou de la mettre en oeuvre ».

Concernant plus spécifiquement la mise en place de mesures compensatoires, le document d'orientation de la Commission indique notamment, dans sa section 3.3.3., que « Idéalement, les mesures compensatoires devraient : [...] être efficaces avant que la détérioration ou la destruction d'un site de reproduction ou d'une aire de repos ne survienne ou au plus tard au moment où elle commence à survenir. »

1.2. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

D'autres pays européens ont adopté des dispositifs présentant des souplesses pour la seule prise en compte de la biodiversité ordinaire toutefois. Par exemple, l'Allemagne dispose, avec le système « Ökokonto »  d'un assouplissement en termes de proximité et de substituabilité196(*), mais pour lequel le bénéfice écologique est discutable197(*).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les porteurs de projets ont parfois des difficultés à identifier les terrains nécessaires à la réalisation des mesures de compensation. Par ailleurs « les porteurs de projet n'obtiennent qu'à un stade avancé du projet l'assurance de l'acceptation par l'administration des mesures compensatoires qu'ils proposent (exemple : après l'avis du CNPN, intervenant deux mois après sa saisine, en cas de demande de dérogation « espèce protégée ») » souligne le rapport Guillot (2022). L'article L. 163-1 du code de l'environnement exige la mise en oeuvre effective des mesures de compensation « pendant toute la durée des atteintes » (article L. 163-1 du code de l'environnement), soit dès le début de la durée des travaux. Cette exigence, dans un contexte de raréfaction du foncier disponible et de multiplicité des régimes de compensation, peut entraîner des retards importants dans la mise en oeuvre des projets, plans ou programmes concernés. A titre d'exemple, les zones portuaires - territoires privilégiées de la réindustrialisation - sont soumises à une mise en oeuvre complexe des mesures de compensation de par la particularité de leur localisation. Les mesures de compensations des zones humides requièrent en effet des délais d'opérationnalisation significatifs, alors même que la faisabilité des mesures est assurée. De tels retards sont susceptibles d'entraîner un coût économique important pour les porteurs et de ce fait impactent la réalisation des projets et l'attractivité française.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi est celui, hors recours à un SNCRR, d'un démarrage plus rapide des projets dans le cas où la mise en place préalable de mesures de compensation des atteintes à la biodiversité, après vérification de leur caractère compensable, s'avère complexe en termes de disponibilité ou de maitrise foncière et longue à mettre en oeuvre, sans nuire pour autant à la qualité de la compensation, mais en permettant au contraire qu'elle se fasse dans le cadre spatio-temporel le plus pertinent, tant pour la compensation des atteintes que le déploiement du projet.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une autre option aurait été l'introduction d'une dérogation temporaire, dans l'attente de la mise en oeuvre d'une réelle offre de SNCRR, permettant la réalisation des mesures compensatoires dans un délai raisonnable. Cette dérogation pourrait être assortie de la mise en place d'une consignation de fonds afin de sécuriser la mise en oeuvre effective des mesures de compensation et pourrait également être circonscrite à certaines zones où la pression foncière autour des zones d'aménagement est forte. Cette option n'a pas été retenue car la mise en oeuvre des SNCRR ne couvrira à court et moyen terme qu'une partie de la demande de compensation.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de ne pas bouleverser le système français de compensation des atteintes à la biodiversité, le gouvernement a retenu une option qui vise à permettre dans le cas où le projet, plan ou programme est autorisé par l'autorité compétente, que la mise en oeuvre effective des mesures de compensation puisse être lancée à l'issue du début des travaux, dans un délai raisonnable. L'objectif final d'absence de perte nette, voire de gain de biodiversité, reste assuré.

La mise en oeuvre de la notion de « délai raisonnable » pourrait être définie par voie d'instruction aux services. En tout état de cause, le plan de compensation aura été validé avant le début des travaux, étant attaché à l'autorisation administrative nécessaire à leur lancement.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure modifie l'article L. 163-1 du code de l'environnement.

L'esprit de la mesure proposée ne contrevient pas au cadre constitutionnel applicable, dans la mesure où il s'agit avant tout d'une adaptation ne remettant pas en cause l'objectif final de préservation de la biodiversité.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La conventionnalité du dispositif français semble demeurer puisque la mesure ne remet pas en question l'objectif de « maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées ».

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La disposition peut accélérer la réalisation de projets à fort impact économique de plusieurs mois, augmentant notamment le niveau de production industrielle en France à court, moyen et long termes.

A titre d'exemple, les projets industriels s'installant dans les zones industrialo-portuaires, zones essentielles à la réindustrialisation par leur connexion aux flux logistiques mondiaux, sont soumis à des contraintes en termes de biodiversité particulièrement importantes, notamment pour le régime de compensation applicables aux zones humides. La complexité des opérations de compensation et la nécessité de trouver du foncier en grande quantité à proximité de ces zones industriellement denses entrainent aujourd'hui de nombreux retards. Introduire la possibilité d'un décalage entre le début des atteintes à la biodiversité et leur compensation éviterait la dissuasion de l'installation de nombreux projets par crainte d'enlisement des délais dans la mise en oeuvre des plans de compensation, sans pour autant réduire la qualité ou l'effectivité à terme de celles-ci.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La disposition est de nature à accélérer l'implantation de nouveaux projets, plans ou programmes par les entreprises, notamment industrielles. La maitrise foncière et la faisabilité des mesures compensatoires devant être assurée pour les projets visés par la mesure, la mise en oeuvre différée du plan de compensation dans un délai raisonnable ne fragilise l'acte d'autorisation du projet. Toutefois, il est à noter qu'un décalage trop important entre les impacts environnementaux induits par le projet et les mesures de compensation requises pourraient entraîner de nouvelles atteintes, et ainsi nécessiter de nouvelles mesures compensatoires. Ce risque sera pris en compte pour l'estimation par l'autorité compétente du délai raisonnable introduit par la mesure.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les collectivités territoriales sont susceptibles d'être maîtres d'ouvrage de projets soumis à mesure de compensation des atteintes à la biodiversité obligatoire, ou propriétaire du foncier concerné par les mesures de compensation, et bénéficieront à ce titre de la simplification.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'instruction des demandes d'autorisation environnementales par les services de l'État sous l'autorité des préfets sera modifiée dans la mesure où la temporalité de la proposition des mesures, de leur encadrement, et de la vérification de leur effectivité pourra être retardée et découpée en plusieurs phases potentiellement éloignées les unes des autres. Toutes ces phases pourront entrainer une modification des autorisations.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Sans objet.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Sans objet.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Sans objet.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Sans objet.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Sans objet.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Le public sera à plusieurs reprises invité à prendre connaissance des modifications du projet du fait de la précision en plusieurs phases des mesures compensatoires.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Bien que la priorité reste donnée à l'absence de perte nette de biodiversité en permanence, la mesure peut conduire, dans des situations le justifiant et sous le contrôle des préfets, à des périodes intermédiaires où ce n'est pas le cas. L'objectif final d'absence de perte nette, voire de gain de biodiversité, reste toutefois assuré.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, en application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, qui a rendu un avis favorable tacite le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entre en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Départements d'Outre-mer

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion

Application de plein droit

Mayotte

Application de plein droit

Collectivités d'Outre-mer

Saint Martin et Saint Barthélémy

Application de plein droit

Saint Pierre et Miquelon

Application de plein droit

Autres (Polynésie française, Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, TAAF)

Dispositions non applicables

5.2.3. Textes d'application

L'introduction du « délai raisonnable » nécessitera un décret pour préciser les modalités d'acceptation de mesures de compensation dans un délai « raisonnable ».

TITRE VIII - SIMPLIFIER POUR ACCELERER LA TRANSITION ENERGETIQUE ET ECOLOGIQUE DE NOTRE ECONOMIE

Article 19 - Moderniser le droit minier pour faciliter la transition énergétique

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

a) Le régime applicable

Le cadre juridique applicable aux mines est très ancien. Ses origines sont antérieures à la Révolution française, à une époque où le roi s'efforçait de contenir les ingérences des seigneurs sur les droits de la couronne.

Après la Révolution, une première loi sur les mines a été examinée par l'Assemblée nationale puis décrétée le 12 juillet 1791 et promulguée le 28 du même mois. Sous l'Empire, ensuite, cette loi a été abrogée et remplacée par la loi du 21 avril 1810 concernant les mines, les minières et les carrières. Cette loi a fondé les principes fondamentaux du droit minier français : la classification des mines et carrières, la notion de substance concessible, une redevance payée à l'Etat, la distinction entre propriété de la mine et propriété du sol, une surveillance par l'administration et l'établissement d'une police des mines.

Un premier code a été élaboré par le décret n° 56-838 du 16 août 1956 portant code minier. Il ne comportait qu'une partie législative. Ce n'est qu'en 2011 que le cadre législatif a été réorganisé à droit constant pour répondre aux derniers standards légistiques en la matière (code minier dit « nouveau »).

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a réformé en profondeur le code minier afin de développer un modèle extractif responsable et exemplaire, et de corriger les dispositions du code minier devenues obsolètes ou insuffisamment précises notamment en matière de protection de l'environnement. Cette réforme était nécessaire pour doter l'Etat des outils juridiques permettant notamment de refuser des permis miniers d'exploration ou d'exploitation pour des motifs environnementaux.

Enfin, pour réaliser la double transition écologique et numérique, la Commission européenne a proposé en mars 2023 un projet de réglementation européenne sur les matières premières critiques (cuivre, lithium, terres rares, tungstène...) afin d'accroître et diversifier son approvisionnement en matières premières critiques, de renforcer la circularité et de soutenir la recherche et l'innovation dans l'intérêt stratégique de l'Union ainsi qu'un projet de règlement pour une industrie « zéro net » découlant du plan industriel du pacte vert pour l'Europe, qui vise à accroître la production de technologies propres dans l'UE (géothermie, hydrogène natif...).

Le régime légal des mines

Les substances minérales ou fossiles, dites « concessibles » et énumérées dans le code minier, relèvent du régime légal des mines mentionné à l'article L. 100-1 du code minier. Leur prospection et leur exploitation sont autorisées par l'Etat, éventuellement sans l'accord du propriétaire du sol. L'Etat fixe les conditions d'exploration et d'exploitation. Le principe selon lequel l'usage du sous-sol en matière minière échappe au propriétaire du sol a d'ailleurs, en cohérence avec les dispositions de la loi de 1791 précitée, été affirmé par l'article 552 du code civil, dès sa promulgation en 1804.

Le code minier désigne ainsi nommément les substances présentant un intérêt général pour l'Etat, notamment du fait de leur rareté, de leur valeur économique voire de leur caractère stratégique, ainsi que, dans certains cas, les modalités d'exploitation dans le sous-sol profond qui nécessitent une maîtrise du foncier que seuls les pouvoirs publics peuvent organiser.

La notion de mine repose uniquement sur cette désignation des substances, que l'extraction se fasse à ciel-ouvert ou en sous-sol, que la substance exploitée le soit sous forme solide ou liquide. Sont notamment concernés les substances énergétiques (houille, hydrocarbures liquides ou gazeux, substances utiles à l'énergie atomique et gites géothermiques), les métaux ferreux ou non, qui sont parfois distingués entre métaux de base (aluminium, cuivre, étain, nickel, plomb, zinc), métaux précieux (or, argent, platine, palladium) et autres métaux (métaux mineurs, métaux d'alliages, terres rares) et certaines autres matières susceptibles d'avoir un usage industriel (dioxyde de carbone, sel, soufre, fluorine...) .

Par convention, les mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux sont parfois désignées sous le terme de « Mines H », le terme de « Mines M » étant utilisé pour les autres mines, qu'elles soient relatives à des ressources minérales énergétiques ou non.

Substances de carrières à terre et en mer

Les autres substances, qui ne relèvent pas du régime légal des mines, sont regroupées au sein de la catégorie des « carrières », prévue à l'actuel article L. 100-2 du code minier. Depuis la loi n° 93-3 du 4 janvier 1993 relative aux carrières, l'exploitation des substances de carrières relève de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) définie par le code de l'environnement. Cette législation régit, depuis lors, les autorisations relatives à leur ouverture ou à leur gestion, en application de l'actuel article L. 331-1 du code minier. Le livre III du code minier a pour objet d'assurer une coordination entre les deux codes. Il définit ainsi les dispositions relatives au passage d'une substance de carrières à la catégorie des substances de mines, dans l'actuel article L. 312-1 du code minier qui prévoit une telle possibilité par décret en Conseil d'Etat. Il précise également les outils du code minier mobilisables pour traiter les cas particuliers où les ressources connues et accessibles d'une substance particulière de carrières sont insuffisantes pour répondre aux besoins.

Dans ce dernier cas, le code minier prévoit la possibilité de créer des zones spéciales de carrières, définies par décret en Conseil d'Etat après enquête publique en application de l'actuel article L. 321-1 du code minier, dans lesquelles les dispositions du code minier permettant la prospection ou l'exploitation de substances sans le consentement du propriétaire du sol peuvent être mises en oeuvre. Ces dispositions prennent la forme d'une autorisation de recherches prévue aux actuels articles L. 322-1 à L. 322-8 du code minier ou d'un permis exclusif de carrières régi par les actuels articles L. 332-1 à L. 332-6 du code minier.

Le cas des granulats marins est spécifique, dans la mesure où ces substances relèvent du régime légal des carrières, alors que leur gestion relève du code minier. Leur statut juridique a été défini par la loi n° 76-646 du 16 juillet 1976 relative à la prospection, à la recherche et à l'exploitation des substances minérales non visées à l'article 2 du code minier et contenues dans les fonds marins de domaine public métropolitain, dont l'article 1er dispose que : « la recherche et l'exploitation des substances minérales non visées à l'article [L. 111-1] du code minier et contenues dans les fonds marins appartenant au domaine public métropolitain sont soumises au régime prévu par le code minier pour les gisements appartenant à la catégorie des mines ». Cette même loi, dans sa version initiale, écartait de son champ d'application les « exploitations d'amendements marins ». Cette exemption a été supprimée par la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines. L'extraction de ces matériaux, granulats siliceux comme substances calcaires, ne peut donc plus être réalisée qu'après obtention d'un titre minier.

Le cadre défini par le code minier s'applique également, d'une part, aux plates-formes et autres engins d'exploration ou d'exploitation, ainsi que leurs annexes, et, d'autre part, aux bâtiments de mer qui participent directement aux opérations d'exploration ou d'exploitation sur le plateau continental et la zone économique exclusive, dans les mêmes conditions que s'ils se trouvaient en territoire français métropolitain. Ce cadre juridique est issu des lois n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l'exploration du plateau continental et à l'exploitation de ses ressources naturelles et n° 76-655 du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, remplacées par l'ordonnance n° 2016-1687 relative aux espaces maritimes sous souveraineté ou juridiction française qui rassemble dans le droit français de manière formelle et appropriée les principes de délimitation des espaces maritimes français et consolide les dispositions sur l'exploration et l'exploitation dans la zone économique exclusive (ZEE) et sur le plateau ratifiée par le parlement en 2017.

Enfin, les dispositions actuellement en vigueur imposent que les litiges relatifs à la délivrance des titres et autorisations miniers soient systématiquement soumis au contentieux de pleine juridiction.

Pour compléter ce cadre juridique, il convient par ailleurs de mentionner deux initiatives récentes de la Commission européenne concernant l'industrie extractive.

Stockages souterrains et géothermie

Outre les substances minérales et fossiles énumérées par le code minier, relèvent également du code minier la recherche, la création, les essais, l'aménagement et l'exploitation de cavités souterraines naturelles ou artificielles ou de formations souterraines naturelles présentant les qualités requises pour constituer des réservoirs étanches, ou susceptibles d'être rendus tels, en vue du stockage de gaz naturel, d'hydrocarbures liquides, liquéfiés ou gazeux, d'hydrogène ou de produits chimiques à destination industrielle ou énergétique.

Relèvent également du code minier la recherche et l'exploitation de gîtes géothermiques. Définis à l'article L. 112-1 du code minier, les gîtes géothermiques sont des gîtes renfermés dans le sein de la terre dont on peut extraire ou avec lesquels on peut échanger de l'énergie sous forme thermique, notamment par conduction ou par l'intermédiaire des eaux chaudes et des vapeurs souterraines qu'ils contiennent. Pour soutenir le développement de cette filière d'énergie renouvelable et atteindre les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de l'énergie notamment pour la géothermie profonde, le législateur a adapté les dispositions du code minier à cette activité et les a simplifiées pour inciter les acteurs économiques à lancer plus de projets dans ce domaine. Ainsi, l'ordonnance n° 2019-794 du 24 juillet 2019 modifiant les dispositions du code minier relatives à l'octroi et à la prolongation des titres d'exploration et d'exploitation des gîtes géothermiques a posé les premières bases de la réforme des titres de géothermie, en venant simplifier la législation applicable dans le but de permettre aux entreprises et aux collectivités territoriales de choisir le titre de géothermie le plus adapté en fonction de la finalité et de la maturité du projet, du degré de complexité, du caractère innovant ainsi que la durée des travaux. Elle prend en compte la prise de risque des opérateurs et les investissements consentis en leur permettant de valoriser leurs découvertes, quelles qu'elles soient, et en leur permettant de garder l'exclusivité de l'exploitation tant qu'ils n'ont pas atteint l'équilibre économique.

Par ailleurs, pour le stockage géologique de dioxyde de carbone, introduit dans le code de l'environnement par l'article 80 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, les formations géologiques aptes au stockage sont assimilées à des mines ou des gisements miniers et les travaux de recherches aux travaux de recherches de mines.

b) Le droit minier applicable en outre-mer

- Dispositions applicables à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte

Le régime juridique est le même que celui applicable en métropole. L'État délivre, à terre, les titres miniers (ministre chargé des mines, voire Premier ministre pour les décrets) et les autorisations d'exploitation (préfet).

A compter du 1er juillet 2024, en vertu de l'article L. 611-1, toutes les substances de mines, à l'exception des hydrocarbures liquides et gazeux, ainsi que les substances autres que celles mentionnées à l'article L.611-1 en mer ou à terre seront exploitables dans le cadre des autorisations d'exploitation.

Une commission départementale des mines a été instituée par l'article 68-19 de l'ancien code minier. Elle est chargée d'examiner toutes les demandes de titres miniers à terre et en mer ainsi que les demandes d'autorisations d'exploitation. Elle émet un avis (simple) préalablement à l'intervention des décisions relatives aux titres miniers relevant de la compétence de l'Etat.

La délivrance des titres miniers en mer (sur le domaine public maritime ainsi que sur le plateau continental et la zone économique exclusive) relève de la compétence de la région, sauf pour ce qui concerne les demandes portant sur des minerais ou produits utiles à l'énergie atomique (article L. 611-31 du code minier). La région prend les décisions énumérées à l'article L. 611-31 du même code après avis du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies et doit les motiver si elle s'en écarte (article L. 611-32 du même code).

- Dispositions applicables à la Guyane

S'agissant de la Guyane, le schéma départemental d'orientation minière, régi par les articles L.621-1 à L. 621-7 du code minier, délimite les zones interdites à l'activité minière et sous contraintes. Il ne s'applique pas en mer.

L'ordonnance n° 2022-537 du 13 avril 2022 relative à l'adaptation outre-mer du code minier a introduit dans le code minier un régime spécifique aux autorisations de recherches minières, délivrées exclusivement sur le domaine privé ou public de l'Etat en Guyane par le préfet, encadré par ses articles L. 621-17 à L. 6121-28.

- Dispositions applicables à Saint-Barthélemy

L'article L. 631-1 du code minier prévoit que les dispositions communes à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte, regroupées au sein du titre Ier du livre VI du code minier, s'appliquent également à Saint-Barthélemy. L'État conserve donc la compétence d'attribution des titres miniers à terre ainsi que pour les autorisations d'exploitation. Les titres miniers en mer, comme pour ce qui concerne les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution, sont délivrés par la collectivité.

- Dispositions applicables à Saint-Martin

Les dispositions des articles LO 6311 à LO 6314-6 du code général des collectivités territoriales sont dans l'ensemble identiques à celles concernant Saint-Barthélemy. Toutefois, l'environnement ne figure pas dans les domaines susceptibles d'être réglementés par la collectivité.

Le nouvel article L. 641-1 du code minier rend applicables à Saint-Martin les dispositions relatives à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à Mayotte avec les mêmes réserves que pour Saint-Barthélemy.

- Dispositions applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon

Sous réserve de l'article LO 6414-1 du code général des collectivités territoriales, selon lequel la collectivité « fixe les règles applicables en matière d'impôts, droits et taxes (...) et urbanisme, construction » et « peut adapter les lois et règlements en vigueur localement », « les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon » en application de l'article LO 6413-1 du code général des collectivités territoriales.

Le code minier s'applique à terre en vertu de l'article LO 6413-1 du code général des collectivités territoriales. L'État y délivre donc les titres miniers.

Selon les termes de l'article LO 6414-3 du code général des collectivités territoriales, l'État peut concéder, sous réserve des engagements internationaux de la France, à la collectivité l'exercice des compétences, en vertu d'un cahier des charges approuvé par décret en Conseil d'État pris après avis du conseil territorial en mer. Un tel cahier des charges n'a à ce jour jamais été adopté.

- Dispositions applicables aux Terres australes et antarctiques françaises

Les articles L. 661-1 et L. 661-2 introduits dans le nouveau code minier prévoient que ce dernier s'applique aux Terres australes et antarctiques françaises.

Le régime encadrant les activités minières s'applique donc dans les Terres australes et antarctiques françaises comme sur le territoire métropolitain, sauf droit d'entrée et de séjour des étrangers, en application de l'article L. 661-2 du code minier. L'État reçoit par conséquent la compétence de délivrer les titres miniers à terre et en mer.

- Dispositions applicables à la Polynésie française

La loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, notamment le 4° de son article 14, réserve à l'État la compétence sur les seules « matières premières stratégiques telles qu'elles sont définies pour l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des hydrocarbures liquides ou gazeux ».

Les matières classées stratégiques sont listées dans une décision du Président de la Communauté en date du 14 avril 1959. Elle contient pour l'heure les minerais ou produits utiles à l'énergie atomique et les hydrocarbures liquides ou gazeux.

A l'exception du régime applicable aux matières stratégiques, le droit minier de la Polynésie française est régi (terre, domaine public maritime, ZEE) par les « lois du pays » adoptées par l'assemblée de la collectivité. En revanche, l'État est compétent sur le plateau continental au-delà des 200 milles marins des lignes de base.

- Dispositions applicables à la Nouvelle-Calédonie

L'État y est compétent pour les seules substances mentionnées au 1° de l'article 19 du décret n° 54-1110 du 13 novembre 1954 portant réforme du régime des substances minérales dans les territoires d'outre-mer, en application des articles L. 681-1 du code minier et 21 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, à savoir les substances utiles aux recherches et réalisations concernant l'énergie atomique telles qu'elles sont énumérées dans un décret en Conseil d'État (...) et les installations qui en font usage.

Le décret n° 56-992 du 28 septembre 1956, pris en application du code minier de 1956 et définissant les substances utiles à l'énergie atomique, énumère ces substances.

La collectivité de Nouvelle-Calédonie est compétente dans les matières suivantes :

• réglementation et exercice des droits d'exploration, d'exploitation et de gestion et de conservation des ressources naturelles non biologiques de la ZEE ;

• réglementation relative aux hydrocarbures, chrome, nickel et cobalt (article 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie) qui a donné lieu à l'élaboration, pour ces trois dernières substances, d'un code minier de Nouvelle-Calédonie.

L'État est seul compétent pour réglementer et exercer les droits d'exploration, d'exploitation et de gestion et de conservation des ressources naturelles de la partie du plateau continental situé au-delà des 200 milles marins des lignes de base.

- Dispositions applicables aux Îles Wallis et Futuna

L'article L. 691-1 du code minier soumet l'exploration et l'exploitation des substances minérales ou fossiles à Wallis et Futuna, au livres Ier, à l'exception de ses titres VIII (sécurité et santé au travail) et IX (autres dispositions sociales), au livre III, à l'exception de son titre V (réglementation sociale) et aux livres IV et V du code minier, « dans le respect des compétences dévolues à cette collectivité ».

En matière minière, selon l'article 40 du décret n° 57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l'assemblée territoriale, du conseil territorial et de l'administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna : « l'assemblée prend des délibérations portant réglementation territoriale dans les matières suivantes : (...) 21° modalités d'application du régime des substances minérales (...) », qu'elle n'a pas, à ce jour, adoptée.

Certaines dispositions datant des années 1950, aujourd'hui obsolètes, n'ont pas été supprimées.

- Dispositions applicables à l'ile de Clipperton

Le code minier, en tant que texte législatif national, s'applique dans son intégralité sur l'île de Clipperton. L'État y délivre les titres miniers à terre et en mer.

c) Les industries extractives minières en France

Filière des mines et de la métallurgie

Situés en amont de la chaîne de valeur, les industriels français qui produisent, transforment et recyclent les matières premières minérales constituent un maillon indispensable de l'approvisionnement d'industries aval aussi capitales que la construction, l'aéronautique et l'espace, la défense, l'automobile, la mécanique, les composants électroniques ou les énergies renouvelables. A ce titre, la filière mines et métallurgie est un important moteur transversal de l'économie française et représente 36 Mds€ de chiffre d'affaires et 110 000 emplois industriels directs pour une valeur ajoutée de 11 Mds d'euros.

Au regard de la concurrence sur les ressources minérales qui ne cesse de croître, compte tenu du développement de la population mondiale, des nouveaux usages, des mobilités ou des nouveaux besoins liés à la transition bas-carbone, ainsi que des risques d'approvisionnement concernant certains alliages critiques ou souverains198(*), ou des tensions sur divers matières premières et minerais, il apparait nécessaire d'assurer notre indépendance et de renforcer la résilience de l'économie nationale et européenne en sécurisant nos circuits d'approvisionnement, depuis l'étape de l'extraction des matières premières jusqu'à leur recyclage et leur réutilisation.

L'accélération de la production et de la valorisation sur le territoire européen de matières premières est donc un axe stratégique de la résilience et de la performance économique de nos industries nationales et européennes. Cette approche nécessite de soutenir une production durable et compétitive, alliant la valorisation des matières premières primaires sur la base d'une gestion dynamique et modernisée des ressources du sous-sol et des matières premières secondaires issues des gisements de chutes et rebuts de production, de produits en fin de vie et de déchets, leur valorisation systématique via un recyclage réalisé sur le territoire de l'Union au profit des filières industrielles européennes.

La production minière de France en substances minérales est dominée par les sels de sodium en métropole (16 exploitations représentant 4,5 Mt/an) et l'or en Guyane (1 t/an). La production relative aux substances métalliques est relativement faible (étain, tantale-niobium).

D'ici 2030, la France pourrait se doter de deux nouveaux sites d'extraction de substances critiques, avec un projet de mine souterraine de lithium d'Imerys à Beauvoir et un projet de pilote d'exploitation d'hélium dans la Nièvre par 45-8 energy).

L'activité d'exploration est pour l'heure limitée, alors que la France figure parmi les pays membres de l'Union à plus fort potentiel géologique (tungstène, antimoine, or, cuivre, lithium...). Actuellement, les opérateurs miniers portent principalement leur intérêt sur des substances jugées critiques et/ou stratégiques par la Commission européenne qui n'ont jamais été investiguées sur le territoire national (le lithium associé à la géothermie haute température, l'hélium et l'hydrogène natif) ou dont l'exploitation s'est interrompue pour des raisons économiques (cuivre, zinc, niobium, germanium, tungstène...).

Filière de granulats marins

La production nationale de granulats marins, en progression constante depuis 10 ans (7,1 Mt en 2022) joue un rôle primordial dans l'approvisionnement des régions littorales et des axes fluviaux pour les besoins du BTP. Elle permet d'assurer 20 à 60% des besoins en granulats siliceux des départementaux littoraux de l'Atlantique et de la Manche, et jusqu'à 80% des besoins sur l'axe Le Havre-Fécamp.

Le marché de production des granulats marins est occupé par une vingtaine d'entreprises, filiales de grands groupes (CEMEX, GSM, EUROVIA, LAFARGE) et de groupes familiaux d'envergure régionale. Ces entreprises utilisent 30 terminaux sabliers dans une quinzaine de ports français. Certains ports dépendent à plus de 50 % de cette activité, comme les ports de Dieppe, de Quimper et des Sables d'Olonne. 18 concessions sont actives, situées en Manche et sur la façade Atlantique. L'activité de production de granulats marins, dont le chiffre d'affaires global annuel avoisine 80 M€, génère près de 1 000 emplois dont 650 directs. Les emplois indirects générés concernent notamment des sous-traitants spécialisés dans la réparation et l'entretien des bateaux, et dans le transport. L'exploitation de granulats marins est une activité économique qui soutient l'emploi dans la filière du BTP.

Filière géothermique

La géothermie valorise l'énergie thermique du sous-sol et des nappes d'eau souterraines (aquifères). Elle peut être exploitée dans divers secteurs (résidentiel, tertiaire, agricole, industriel) pour produire de la chaleur et du froid ou encore de l'électricité (essentiellement en outre-mer). La géothermie profonde est celle dont la profondeur des forages dépasse les 200 mètres et dont la puissance échangée avec le sous-sol est supérieure à 500 kW (profondeur en Ile-de-France de l'ordre de 1500 mètres et 3000 mètres en Alsace).

Depuis 2010, la France a doublé sa puissance installée en géothermie profonde. On compte 77 installations de géothermie profonde, dont 54 dans le bassin Parisien, 17 dans le bassin aquitain, les autres étant situées en Alsace, dans le couloir Rhodanien et en Limagne. Ces installations totalisent 2.2 TWh de production thermique renouvelable en 2023. 87% de cette production est destinée au chauffage urbain, 8% à la chaleur industrielle, 3% à l'agriculture et 2% à des établissements thermaux.

La programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE2) fixe un objectif de 4 à 5,2 TWh de consommation finale de chaleur issue de géothermie profonde en 2028.

L'exploitation de la géothermie en outre-mer présente un intérêt évident pour la résilience et la souveraineté énergétique de ces territoires, et la décarbonation de la production d'énergie.

Trois concessions sont actives en métropole et en outre-mer, dont une en Guadeloupe, la concession de Bouillante et une en Alsace, la concession de Rittershoffen, utilisée pour produire de la chaleur industrielle. La capacité de production de la centrale de Bouillante va bientôt passer de 15 à 25 MW, avec la réalisation de nouveaux forages, ce qui représentera plus de 10% de la production annuelle d'électricité de l'île, à partir de 2025.

La géothermie pour produire de la chaleur collective renouvelable générait 3200 emplois en 2019, soit une augmentation de 22 % depuis 2017.

Filière de stockage souterrain

La France compte 13 stockages souterrains de gaz naturel en nappe aquifère et un stockage dans un gisement déplété199(*). Neuf cavités minées permettent également le stockage de gaz de pétrole liquéfié. Cela représente une capacité totale de stockage de 14 milliards de m3. Sur un ensemble de six sites de stockages souterrains, il existe 78 cavités salines qui permettent de stocker des produits pétroliers et du gaz. Cette activité génère environ 800 emplois.

Par ailleurs, le stockage souterrain d'hydrogène a vocation à se développer. En effet, l'hydrogène est appelé à jouer un rôle significatif pour atteindre les objectifs de décarbonation, en complément des autres solutions de production d'énergie bas carbone. La Stratégie nationale bas-carbone publiée en 2020 (SNBC 2) prévoyait la production d'environ 1 000 kt/an d'hydrogène par électrolyse à l'horizon 2050. Afin d'accélérer la décarbonation de certains secteurs, conformément aux ambitions du paquet « fit for 55 »200(*) l'État français envisage une accélération de ces objectifs, avec une production d'hydrogène par électrolyse qui atteindrait 600 kt/an dès l'horizon 2030. L'accès à des stockages massifs d'hydrogène et les éléments du réseau nécessaires participeraient à l'atteinte de ces objectifs.

Parmi les différentes solutions possibles pour stocker l'hydrogène, le stockage en cavité saline apparaît aujourd'hui comme la solution de stockage de masse la plus aboutie et la plus économique.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article proposé concerne les titres miniers ainsi que des projets d'exploitation de mines dans les DROM (AEX) et de stockage de CO2.

L'article 34 de la Constitution précise notamment que la loi détermine les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ainsi que de la préservation de l'environnement.

L'article 1er de la Charte de l'environnement reconnaît le droit de chacun « de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Son article 3, dispose que « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ».

La Charte de l'environnement dispose également dans son article 6 que « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social. »

Le principe de participation du public figure enfin parmi les principes du droit de l'environnement depuis la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement et figure désormais au niveau constitutionnel sous la forme d'un « droit de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement », à l'article 7 de la Charte de l'environnement de 2004.

L'article 7 de la charte de l'environnement dispose : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ».

La décision portant sur un titre minier détermine notamment le cadre général et le périmètre des travaux miniers. Au regard de son objet et de ses effets, elle est ainsi susceptible de porter atteinte à l'environnement.

Le présent projet d'article prévoit non seulement le principe de la participation du public, mais aussi ses modalités pour certaines catégories de projets soumis à évaluation environnementale (AEX) ainsi que pour les titres miniers.

Il prévoit enfin les modalités de gestion des substances minérales ou fossiles et des usages du sous-sol mentionnés dans le Code minier, bien commun administré par l'Etat, sous réserve des compétences dévolues aux collectivités mentionnées aux titres XII et XIII de la Constitution et des dispositions spécifiques qui leur sont applicables générant des droits immobiliers distincts de la propriété du sol ainsi que de l'occupation temporaire du domaine privé de l'Etat.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les travaux d'exploitation de mines réalisés en Outre-mer par le biais d'autorisations d'exploitation (AEX) ainsi que les travaux de captage et de stockage géologique de CO2 sont des projets qui ont des incidences sur l'environnement et relèvent de la Directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Néant.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVI

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Accélération des procédures pour la délivrance des permis exclusifs de recherche de mines

Le délai réel de la procédure s'écarte significativement du délai réglementaire. En France, le délai total moyen de la procédure d'octroi ou de prolongation de permis exclusifs de recherche de mines sur la période 2002-2022 est de 3 ans pour un délai théorique qui devrait être compris entre 12 et 18 mois.

Or, la réglementation européenne sur les matières premières critiques prévoit une durée de procédure d'octroi des autorisations nécessaires pour les projets stratégiques dans l'Union dans le secteur de l'extraction ne dépassant pas 24 mois. En France, ce délai doit être respecté pour délivrer le titre minier (gestion des droits immobiliers) et l'autorisation environnementale nécessaires aux projets.

Afin de permettre à la France de rester attractive en Europe mais également au niveau international, de réaliser la transformation écologique et énergétique nécessaire pour respecter ses engagements vis-à-vis du pacte vert et de participer à la sécurisation d'approvisionnement intérieur diversifié et durable de l'Union, une accélération des procédures d'attribution ou de refus des permis exclusifs de recherche des mines est donc nécessaire.

Réutilisation d'ouvrages miniers

L'Union européenne s'est engagée à accélérer la décarbonation de son économie et à déployer de manière ambitieuse les sources d'énergie renouvelables afin de parvenir à la neutralité climatique d'ici à 2050. Pour ce faire, il est nécessaire de prévoir des mesures pour atteindre l'objectif de 50 millions de tonnes de capacité opérationnelle annuelle de stockage souterrain de CO2 d'ici à 2030 à l'échelle de l'Union, et ainsi soutenir la décarbonation des industries européennes et lutter contre le changement climatique.

Afin d'atteindre cet objectif ambitieux, le projet de règlement relatif à l'établissement d'un cadre de mesure en vue de renforcer l'écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro-net » prévoit la contribution individuelle des producteurs de pétrole et de gaz à l'objectif de capacité d'injection et de stockage de CO2. Cette contribution individuelle se formalise notamment au travers de la mise à disposition de puits de pétrole qui ne sont plus exploités. Afin de permettre à la France de répondre aux objectifs de ce projet de règlement, en terme de capacité d'injection et de stockage de CO2, il convient de modifier le code minier afin d'y introduire ce changement d'usage du sous-sol.

En introduisant dans le code minier, des dispositions permettant de transformer et céder des puits d'hydrocarbures liquides ou gazeux en vue d'un nouvel usage, à savoir le stockage souterrain de CO2, la France contribue à l'objectif de décarbonation à horizon 2050.

Autorisation unique d'occupation du domaine et d'exploitation minière

Il en est de même pour les délais d'instruction et les formalités permettant aux artisans mineurs de Guyane d'exploiter des gisements concessibles. Le contexte particulier de ce territoire en proie à une féroce prédation économique et la typologie des entreprises concernées nécessitent une rationalisation des procédures et la désignation de la Police des mines comme interlocuteur privilégié.

Des directives régionales d'aménagement forestier prévoient des objectifs de gestion multifonctionnelle des forêts domaniales de Guyane. L'accueil des activités minières est limitée à certains secteurs, en prenant en compte en particulier les enjeux environnementaux et sous condition de modalités d'accès et d'intensité des perturbations générées sur le bassin versant concerné. Ces zonages des possibilités de prospection et d'exploitation minière établis par le gestionnaire du domaine public et privé de l'Etat sont pris en compte par le schéma départemental d'orientation minière de Guyane.

Contrairement aux titres miniers, le régime des autorisations de recherche et d'exploitation de mines (ARM et AEX) ne permet à l'autorité administrative ni d'autoriser le titulaire à occuper un terrain, ni d'instaurer des servitudes de passage pour l'accès au site d'exploitation, ni d'ouvrir au propriétaire du sol un droit à être indemnisé à raison du préjudice subi.

Ces différences de modalités d'ouverture de droits d'occupation et d'accès entre les deux régimes ne sont plus justifiées aujourd'hui, dans la mesure où les exploitants mettent en oeuvre les mêmes techniques et les mêmes moyens et ont les mêmes besoins en matière d'accès aux domaines privé et public de l'Etat.

La demande d'accord préalable de l'Office national des forêts (ONF), puis le conventionnement entre l'ONF et l'exploitant minier, représentent aujourd'hui des étapes supplémentaires dans le processus d'octroi des autorisations de recherche et d'exploitation de mines par le préfet qui entraînent un allongement des délais.

La présente mesure vise donc à instaurer une autorisation préfectorale unique réglementant les conditions d'occupation temporaire du domaine privé et public de l'Etat, d'exploration et d'exploitation, après consultation de l'ONF par le service instructeur.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi est de réduire de moitié les délais d'instruction des permis exclusifs de recherche miniers, afin de porter la durée d'instruction, actuellement comprise entre 12 et 18 mois à un délai de 6 à 9 mois, notamment grâce à la parallélisation de certaines procédures, dans l'esprit de ce qui a été mis en place dans le cadre de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte

I. Accélérer les procédures d'instruction des demandes de permis exclusifs de recherche

Les explorateurs mettent en avant la longueur excessive et rédhibitoire de l'instruction pour instruire des demandes d'octroi et de prolongation de permis exclusifs de recherche (PER), en comparaison avec la durée des procédures mises en oeuvre dans d'autres pays tels que l'Allemagne.

Les modifications proposées concernent une procédure qui n'est pas encore entrée en vigueur puisque la réforme du code minier issue de la loi climat résilience de 2021 puis des ordonnances qui ont suivis en avril 2022 et novembre 2022 sur le volet des titres miniers ne rentrera en vigueur qu'au 1er juillet 2024. Pour ce qui concerne les travaux miniers, qui ne sont pas visés par la présente disposition, les nouvelles dispositions législatives sont en vigueur depuis le 1er juillet 2023 et bénéficieront des réformes procédurales issues de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte sur la procédure d'instruction de l'autorisation environnementale.

La proposition ne touche à aucun des éléments fondamentaux de la réforme précitée et vise uniquement à paralléliser les procédures pour réduire le délai global de délivrance des autorisations, ce qui constituera une simplification de la procédure. Il convient de préciser que ces demandes ne sont pas instruites par les collectivités, mais que ces dernières sont consultées pour avis par le préfet pendant la procédure, comme dans le cadre des autorisations environnementales.

La proposition vise également à simplifier la formalité de demande de consentement des détenteurs de titres miniers présents sur le périmètre concerné en cas d'absence d'avis favorable ; le ministre pourra trancher le désaccord sans consulter le Conseil général de l'économie.

Afin de rétablir une proportionnalité dans les procédures d'attribution des titres miniers et de géothermie, il est par ailleurs proposé de supprimer les avis environnementaux, économiques et sociaux pour les permis exclusifs de recherche. En effet, après examen de préconfiguration, il apparaît que les enjeux environnementaux, économiques et sociaux des PER ne nécessitent pas, sauf exception, d'analyse spécifique de la part des corps d'inspection.

II. Rendre possible la prolongation du PER en cas de circonstances exceptionnelles qui auraient bloqué les recherches en raison d'aléas liés à la recherche minière par une procédure simple et rapide consistant en une décision du ministre sur simple demande, l'absence de réponse valant accord au bout de six mois.

Cette possibilité existe déjà pour les permis de recherche d'hydrocarbures ; il s'agit donc ici d'étendre cette possibilité à toutes les autres substances de mines.

III. Réutilisation d'ouvrages miniers

L'introduction dans le code minier de dispositions permettant de transformer et céder des puits d'hydrocarbures liquides ou gazeux en vue d'un nouvel usage, à savoir le stockage souterrain de CO2, doit permettre à la France de répondre aux objectifs du projet de règlement pour une industrie « zéro net ».

Sur les 1 105 puits qui sont en exploitation ou en sommeil, aujourd'hui en France, seuls 789 puits ont une profondeur compatible avec un stockage souterrain de CO2 (profondeur supérieure à 800 m). Toutefois, la Direction générale de l'énergie et du climat estime qu'environ 50 % des 789 puits précités présenteraient les caractéristiques requises, en termes de profondeur et de diamètre, pour un stockage souterrain de CO2.

IV. Autorisation unique d'occupation temporaire du domaine et d'exploitation de mines

L'objectif est de faciliter les démarches des artisans mineurs, sans remettre en cause les exigences environnementales.

L'exploration ou l'exploitation aurifère en Guyane est réalisée très majoritairement sous le régime des autorisations de recherches minières (ARM) et des autorisations d'exploitation de mines (AEX) bien adapté à des petites exploitations alluvionnaires « à ciel ouvert » et par procédé gravimétrique et soumis à évaluation environnementale.

Les autorisations d'exploration et d'exploitation sont accordées par arrêté préfectoral fixant des prescriptions spécifiques aux circonstances locales et aux activités projetées, afin d'assurer la prévention des pollutions, des risques et des nuisances et la réhabilitation du site après travaux.

De son côté, l'Office national des forêts (ONF), gestionnaire du domaine privé de l'Etat en Guyane, demande préalablement à tous travaux de recherche ou d'exploitation minière que l'entreprise minière signe avec lui une convention d'occupation temporaire du domaine forestier pour activité minière (Cotam), qui fixe notamment les conditions d'occupation et d'utilisation des terrains forestiers, les taux des redevances versées à l'ONF ainsi que les conditions d'octroi du quitus en fin de travaux. Cette convention fixe à l'entreprise des obligations en contrepartie de l'autorisation donnée par l'ONF d'occuper la zone considérée et d'y accéder.

Il est proposé d'intégrer dans l'autorisation préfectorale d'exploration et d'exploitation minière, après consultation de l'ONF par le service instructeur, les conditions d'occupation temporaire du domaine privé et public de l'Etat qui font actuellement l'objet d'un conventionnement spécifique entre l'ONF et l'exploitant (conditions d'occupation et d'utilisation des terrains ainsi que les dispositions relatives aux accès, relatives à des opérations à l'extérieur du périmètre...).

Les opérateurs n'auront ainsi qu'un seul dossier de demande, qu'une seule autorisation et, à la fin de l'occupation du domaine public ou privé de l'Etat, qu'un seul quitus, le tout instruit par un interlocuteur unique, ce qui constitue pour le demandeur une simplification appréciable.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

En application de la hiérarchie des normes, l'option modification par la voie règlementaire n'a pas été retenue. Les bases légales actuelles ne permettent pas d'accélérer efficacement les procédures d'instruction des demandes de permis exclusifs de recherche et d'installation d'opérateurs miniers en Guyane ou de prendre en compte des circonstances exceptionnelles comme la période COVID pour allonger la validité de ces titres.

Des tentatives de coordination et d'homogénéisation des pratiques ont été tentées ces dernières années en Guyane entre la Police des mines et le gestionnaire du domaine privé de l'Etat.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le dispositif proposé réforme les processus d'analyse environnementale, économique et sociale et d'instruction des demandes de titres miniers détaillé à l'article L. 114-2 du code minier dans sa version applicable au 1er juillet 2024 afin d'accélérer les procédures d'attribution et de refus des permis exclusifs de recherche des mines et de géothermie et de prendre en compte les avis du public, des collectivités et service concernés plus tôt dans le déroulement de la procédure.

Le dispositif proposé simplifie la prise en compte des avis des détenteurs de titres miniers présents sur le périmètre demandé pour les seules demandes de titres miniers.

Le dispositif proposé permet d'invoquer la survenue de circonstances exceptionnelles et d'accorder une prolongation du permis exclusif de recherche de mines sans réduction de surface au-delà de la limite maximale de 15 ans.

Le dispositif proposé instaure en Guyane une autorisation préfectorale unique réglementant les conditions d'occupation temporaire du domaine privé et public de l'Etat, d'exploration et d'exploitation des substances concessibles afin de mieux évaluer l'impact environnemental global du projet, d'accélérer les procédures et de renforcer l'action de l'État.

Enfin, le dispositif retenu permet de transformer et céder des puits d'hydrocarbures liquides ou gazeux en vue d'un nouvel usage, à savoir le stockage souterrain de CO2.

Le I. de l'article proposé :

- conserve les dispositions actuelles du III et IV de l'article L.114-2 du Code minier pour les seules concessions (pas de parallélisation des procédures) en les plaçant dans un nouveau II ;

- introduit au nouveau III les nouvelles modalités d''instruction des autorisations environnementales et les rend applicables à la procédure d'instruction des seuls permis exclusifs de recherche afin de l'accélérer. Afin de rétablir une proportionnalité dans les procédures d'attribution des titres miniers et de géothermie, les avis environnementaux, économiques et sociaux sont supprimés pour les permis exclusifs de recherche.

- remplace avec le III de l'article proposé  la demande de consentement des détenteurs de titres miniers et de stockage souterrain présents sur le périmètre demandé par une consultation, afin de simplifier la procédure spécifique d'instruction, issue de la loi Climat et résilience, qui prévoit une procédure longue et complexe. S'agissant de la géothermie le dispositif actuel, soutenu par la filière de géothermie, est conservé et n'est donc pas modifié. Il comporte des spécificités adaptées à l'activité. Il encadre les cas de connexions hydrauliques entre des gîtes géothermiques explorés et/ou exploités par différents opérateurs sur différentes zones (situation pouvant être rencontrée dans certaines régions caractérisées par un réseau de failles pouvant connecter des ressources géothermiques profondes à haute température avec les ressources à basse température en surface). Il vise à objectiver les situations réelles de conflit sur les ressources qui sont connectées en favorisant en amont du dépôt du dossier les discussions entre le demandeur d'un titre et le titulaire d'un titre minier existant et à permettre à l'autorité administrative de trancher en cas de désaccord.

Le V. de l'article proposé conserve également le consentement pour les stockages souterrains mais supprime l'avis du Conseil général de l'économie en cas de désaccord.

Le II. de l'article proposé vise à garantir aux bénéficiaires de permis exclusifs de recherche de mines, notamment les TPE et PME minières spécialisées dans l'exploration du sous-sol, de pouvoir engager le programme de travaux qu'ils se sont engagés à réaliser pour obtenir leur titre minier.

Au regard de leurs capacités financières limitées, les permis exclusifs de recherche sont octroyés pour de plus courtes périodes aux TPE et PME minières spécialisées dans l'exploration du sous-sol. De ce fait, les aléas de la recherche minière (grande étendue géographique des premiers permis d'exploration, conditions météorologiques, facteurs liés aux contraintes de disponibilité de matériels spécifiques et coûteux, contentieux engagés devant les juridictions ...) pénalisent plus fortement ces petites entreprises minières. Dans ce contexte, il est proposé de pouvoir invoquer la survenue de circonstances exceptionnelles pour accorder une prolongation du permis exclusif de recherche de mines sans réduction de surface au-delà de la limite maximale de 15 ans.

Le IV. de l'article proposé introduit dans le code minier des dispositions permettant de transformer et céder des puits d'hydrocarbures liquides ou gazeux en vue d'un nouvel usage, à savoir le stockage souterrain de CO2, pour permettre à la France d'être en capacité de répondre aux objectifs du projet de règlement pour une industrie « zéro net ».

Sur les 1 105 puits qui sont en exploitation ou en sommeil, aujourd'hui en France, seuls 789 puits ont une profondeur compatible avec un stockage souterrain de CO2 (profondeur supérieure à 800 m). Toutefois, la Direction générale de l'énergie et du climat estime qu'environ 50 % des 789 puits précités présenteraient les caractéristiques requises, en termes de profondeur et de diamètre du puits, pour un stockage souterrain de CO2.

Les VI. à VIII. de l'article proposé concernent le régime particulier d'exploitation de mines dans les DROM donnant lieu à la délivrance d'autorisations d'exploitation et d'exploration pour la seule Guyane portant sur l'attribution des autorisations de recherches minières (ARM).

L'exploitation aurifère en Guyane est réalisée très majoritairement sous ce régime spécifique des autorisations d'exploitation de mines (AEX) bien adapté à des petites exploitations alluvionnaires « à ciel ouvert » et par procédé gravimétrique.

Les autorisations d'exploitation sont accordées par arrêté préfectoral fixant des prescriptions spécifiques aux circonstances locales et aux activités projetées afin d'assurer la prévention des pollutions, des risques et des nuisances et la réhabilitation du site après travaux.

De son côté, l'ONF, gestionnaire du domaine privé forestier de l'Etat, demande, préalablement à tous travaux de recherche ou d'exploitation minière, que l'entreprise aurifère signe avec lui une convention d'occupation temporaire du domaine forestier pour activité minière (Cotam), qui fixe notamment les conditions d'occupation et d'utilisation des terrains forestiers, les taux des redevances versées à l'ONF ainsi que les conditions d'octroi du quitus en fin de travaux. Cette convention fixe à l'entreprise des obligations en contrepartie de l'autorisation donnée par l'ONF d'occuper la zone considérée et d'y accéder.

Il est proposé de simplifier ce dispositif en renonçant au dispositif existant de conventionnement entre l'ONF et l'exploitant aurifère pour les sujets liés aux travaux d'exploration et d'exploitation, l'ensemble des conditions d'occupation et d'utilisation des terrains ainsi que les dispositions relatives aux accès, relatives à des opérations à l'extérieur du périmètre étant fixées dans les actes de l'autorité administrative.

Une même fusion des procédures est également prévue pour les demandes d'autorisation de recherche minière sur le seul domaine privé ou public de l'État en Guyane.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les innovations juridiques sont mineures et concernent principalement des dispositions du code minier qui devaient entrer en vigueur à partir du 1er juillet 2024.

La disposition proposée modifie plusieurs articles du code minier :

- les articles L. 114-2, L. 142-2-1, L. 152-2 et L. 163-11 du livre Ier relatif au régime légal des mines ;

- l'article L. 252-1 du livre II relatif au régime légal des stockages souterrains ;

- les articles L. 611-1-2, L 611-2-3 et L.621-22 du livre VI relatif aux dispositions relatives à l'Outre-mer.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Cette mesure a pour objectif d'accélérer et de simplifier la procédure d'obtention de permis exclusif de recherche de mines et de géothermie sur tout le territoire national et des autorisations de recherche et d'exploitation de mines dans les DROM de plusieurs mois et donc de réduire les délais d'implantation des nouvelles activités ou d'extension d'activités existantes. Ces délais réduits seront plus compatibles avec la réalité économique des PME/TPE spécialisées dans l'exploration

Cette mesure permettra également aux entreprises françaises de gagner en compétitivité en leur permettant d'accéder au plus rapidement à leur marché et de se prémunir face à des circonstances exceptionnelles.

La diminution de la durée des procédures aura également des effets favorables sur le coût complet des projets en limitant la mobilisation des capacités d'investissement des entreprises et favorisera également la création d'emplois industriels.

Cette mesure vise à favoriser la relance de la valorisation des ressources et des usages du sous-sol d'intérêt général et concourant aux objectifs de développement durable des territoires et de la Nation.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les mesures proposées, qui constituent des simplifications de procédures, auront un impact positif pour les entreprises, puisqu'elles permettront de :

- réduire les délais d'instruction des demandes des titres d'exploration ;

- faciliter la prolongation des permis exclusifs de recherche de mines en cas de circonstances exceptionnelles ;

- simplifier les démarches administratives pour les artisans mineurs de Guyane.

La disposition relative à la réutilisation d'ouvrages miniers permettra aux producteurs d'hydrocarbures liquides ou gazeux d'étendre les possibilités de changement d'usage des puits qu'ils exploitent.

Ce transfert s'accompagne du transfert des droits et obligations relatifs aux installations transférées mentionnés au titre V du présent livre du code minier. Il est approuvé par l'autorité administrative, sous réserve de l'exécution par le cédant de la procédure d'arrêt de travaux pour toutes les installations non nécessaires au nouvel usage projeté et sous réserve de l'octroi préalable d'un titre minier pour ce nouvel usage. La mise en oeuvre de cette disposition n'aura donc aucun impact financier négatif pour les entreprises concernées.

Il convient de préciser que les puits pour lesquels un changement d'usage ne sera pas envisageable devront faire l'objet d'une cessation d'activité en application des dispositions en vigueur, au frais de l'exploitant.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Comme pour les porteurs de projets privés, dans le cas où un projet industriel (ex. géothermie) est porté par une collectivité ou dans le cas particulier des demandes de titres miniers en mer dans les Outre-mer, la mesure proposée a pour effet d'accélérer et de simplifier les procédures de ces projets et demandes de titres.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure envisagée n'implique aucune instruction supplémentaire, ni analyse complémentaire, pour les services instructeurs.

Cette mesure a vocation à simplifier les procédures de délivrance des permis exclusifs de recherche d'une part, et des autorisations permettant aux artisans mineurs principalement guyanais d'occuper temporairement le domaine public et privé de l'Etat et d'exploiter des substances concessibles.

Pour les PER et les AEX, la simplification de la procédure d'autorisation permet de gagner en fluidité et en transparence.

La parallélisation des instructions de chaque service permet de responsabiliser chacun au respect du délai d'instruction, actuellement non respecté, sans entraver le déroulement global de la procédure. En effet, les services instructeurs ne seront plus en attente des contributions des autres services, chacun des avis étant mis en ligne, dès sa finalisation, sur le forum du site CAMINO.

Enfin, l'autorisation unique pour l'occupation temporaire du domaine public et privé de l'Etat et l'exploitation des substances concessibles donnera aux pouvoirs publics une vision globale du projet et permettra une meilleure coordination de l'instruction de la procédure par le préfet puis de son suivi tout au long de vie de l'AEX.

En ce qui concerne les dispositions sur la réutilisation d'ouvrages miniers, la procédure de transfert des ouvrages doit être approuvée par l'autorité administrative, sous réserve de l'exécution par le cédant de la procédure d'arrêt de travaux pour toutes les installations non nécessaires au nouvel usage projeté et sous réserve de l'octroi préalable d'un titre minier pour ce nouvel usage.

Dans la mesure où ce sont les mêmes inspecteurs en région ou en département qui réalisent à la fois l'instruction des demandes de transfert, l'instruction de la procédure d'arrêt de travaux, et le contrôle des établissements de leur ressort géographique, qui peut conduire parfois à devoir ajuster les prescriptions applicables aux sites, l'impact sera neutre car en l'absence de transfert, ils auront à contrôler la cessation d'activité des puits d'hydrocarbures.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

L'accélération et la simplification de la mise en oeuvre de projets de valorisation des ressources et des usages du sous-sol qui concourent aux objectifs de développement durable des territoires et de la Nation doit contribuer au développement d'une activité extractive sur le territoire national, en veillant à un haut niveau d'exigences environnementales et sociales, à la relocalisation de chaînes de valeur, à la sécurisation des circuits d'approvisionnement et à la réduction de la dépendance de la France aux importations.

En France métropolitaine, la géothermie profonde est principalement orientée vers la production de chaleur pour des réseaux de chaleur urbains. L'accélération des procédures géothermie va contribuer à atteindre la neutralité carbone. En effet, la décarbonation de la chaleur constitue un enjeu considérable, puisque la chaleur représente environ la moitié de la consommation énergétique nationale et reste produite à 75 % à partir de gaz et de fioul.

Pour répondre à l'urgence de la situation climatique et au besoin de décarbonation de l'industrie française, le Captage et Stockage géologique du CO2 (CSC) apparaît dans les différents scénarios de neutralité carbone pour apporter une réponse complémentaire aux leviers que sont l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette disposition n'aura pas d'impact environnemental direct, puisqu'elle ne retire aucune garantie au régime de protection des espèces et n'assouplit pas le régime existant de dérogation.

5. CONSULTATIONS MENÉES ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Les collectivités ultra-marines suivantes ont été consultées : Conseils régional et départemental de la Guadeloupe, Conseil régional et départemental de La Réunion, Assemblée de Martinique, Assemblée de Guyane, Conseil départemental de Mayotte.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera aux nouvelles demandes déposées à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure envisagée n'aucun impact sur la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna, la Polynésie française et les Terres australes et antarctiques françaises. La répartition des compétences minières entre Etat et collectivité y demeure en effet inchangée.

Concernant les départements d'Outre-mer, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Mayotte, le code minier s'applique de plein droit. Ces collectivités sont donc concernées par les modifications apportées au livre VI du code minier, notamment les mesures touchant l'autorisation d'exploitation et la Guyane seule pour l'autorisation de recherche minière.

5.2.3. Textes d'application

En l'absence de partie réglementaire du code minier, la mesure envisagée nécessitera l'adoption d'un décret en Conseil d'Etat pour réviser les décrets suivants :

- Décret relatif aux titres miniers et aux titres de stockage souterrain ;

- Décret relatif aux titres de recherches et d'exploitation de géothermie ;

- Décret relatif aux dispositions spécifiques aux départements et régions d'outre-mer (DROM) concernant les substances de mines à terre et en mer et les substances de carrière en mer.

Ces projets de textes d'application de la loi Climat refondent les procédures suivantes applicables jusqu'au 1er juillet 2024 :

- Décret n° 78-498 du 28 mars 1978 modifié relatif aux titres de recherches et d'exploitation de géothermie ;

- Décret n° 2001-204 du 6 mars 2001 relatif aux autorisations d'exploitation de mines dans les départements d'outre-mer ;

- Décret n° 2006-648 du 2 juin 2006 relatif aux titres miniers et aux titres de stockage souterrain ;

- Décret n° 2006-798 du 7 juillet 2006 relatif à la prospection, à la recherche et à l'exploitation de substances minérales ou fossiles contenues dans les fonds marins du domaine public et du plateau continental métropolitains.

Article 20 - Dérogation aux règles des plans locaux d'urbanisme (PLU) pour l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable

1. ETAT DE LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le code de l'urbanisme, dans le Titre V de son Livre Ier, fixe les exigences relatives au plan local d'urbanisme. Ce plan comporte des règles d'urbanisme applicables aux bâtiments de la zone géographique concernée et aux nouvelles constructions. Des exigences sur l'emprise au sol, la hauteur, l'implantation et l'aspect extérieur des constructions peuvent figurer dans ce plan local d'urbanisme, et peuvent s'appliquer aux bâtiments et aux équipements techniques qui sont présents dans ou sur le bâtiment.

Des dérogations à ces règles peuvent être accordées par l'autorité compétente, par décision motivée, dans certains cas de figures identifiés dans la section dédiée du code de l'urbanisme (« Dérogations au plan local d'urbanisme » déterminées aux articles L. 152-3 à L. 152-6-4). Des dérogations existent ainsi pour la reconstruction de bâtiments détruits ou endommagés à la suite d'une catastrophe naturelle survenue depuis moins d'un an, la restauration ou la reconstruction d'immeubles protégés au titre de la législation sur les monuments historiques, des travaux permettant l'accessibilité des personnes handicapées à un logement existant (article L. 152-4), la mise en oeuvre d'isolation ou de protection contre le rayonnement solaire, l'installation d'ombrières utilisant des procédés de production d'énergie renouvelable situées sur des aires de stationnement (article L. 152-5), la végétalisation des façades ou toitures en zones urbaines ou à urbaniser (article L. 152-5-1), les constructions faisant preuve d'exemplarité environnementale (article L. 152-5-2) ou d'autres dérogations spécifiques.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La mesure envisagée s'inscrit dans le cadre des objectifs portés par la Charte de l'Environnement, et notamment ses articles 3 et 6 qui disposent respectivement que « toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » et que « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social. »

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le paquet européen « Ajustement à l'objectif 55 » comprend plusieurs textes visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et développer les énergies renouvelables. En particulier, la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, modifiée par la directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023, promeut le développement des énergies renouvelables dans les bâtiments.

L'article 15 « Procédures administratives, réglementations et codes » dispose dans son premier paragraphe que « Les États membres prennent notamment les mesures appropriées pour veiller à ce que [...] les procédures administratives soient simplifiées et accélérées au niveau administratif approprié et des délais prévisibles soient fixés pour les procédures visées au premier alinéa ».

L'article 15 bis « Intégration de l'énergie renouvelable dans le secteur du bâtiment » dispose dans son paragraphe 3 que « Les États membres introduisent des mesures appropriées dans leur réglementation et leur code du bâtiment nationaux, et le cas échéant, dans leurs régimes d'aide, afin d'augmenter la part d'électricité et de chauffage et de refroidissement provenant de sources renouvelables produite sur site ou à proximité ainsi que d'énergie renouvelable soutirée du réseau dans le parc immobilier. »

1.4. ELÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Néant.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La proposition d'élargir les dérogations aux règles des plans locaux d'urbanisme relatives à l'emprise au sol, à la hauteur, à l'implantation et à l'aspect extérieur des constructions dans le cas de l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable ou de systèmes de chauffage, de climatisation et de production d'eau sanitaire à partir d'énergie renouvelable, vise à simplifier l'installation de systèmes renouvelables, et notamment de pompes à chaleur en logement collectif, de panneaux photovoltaïques et de panneaux solaires thermiques.

Dans le cas des pompes à chaleur, c'est une recommandation de l'étude « sur les freins et leviers à la diffusion de la pompe à chaleur en logement collectif » réalisée pour la Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature et publiée en 2023.

Les limites de hauteur et de gabarit ou d'aspect extérieur, imposées par les PLU, qui concernent les équipements techniques tels que les pompes à chaleur, peuvent en effet être bloquantes. Cela concerne aussi les panneaux solaires en toiture, qui ont vocation à être installés sur les bâtiments existants, notamment dans le cadre de l'application des articles L. 171-4 et 5 du code de la construction et de l'habitation (articles 41 et 43 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergie renouvelables).

Dans le cadre législatif actuel :

- L'article L. 111-16 du code de l'urbanisme permet déjà de déroger aux règles relatives à l'aspect extérieur des constructions des PLU dès la délivrance des autorisations d'urbanisme, pour implanter des dispositifs d'énergies renouvelables. Cette disposition ne concerne que les règles d'aspect extérieur mais pas de hauteur ou de gabarit des constructions et n'est donc pas suffisante pour permettre l'installation d'énergies renouvelables ou de pompes à chaleur sur les bâtiments.

- L'article L. 152-5-1 du code de l'urbanisme permet une dérogation de hauteur en cas d'installation de toiture végétalisée mais pas pour les installations d'énergies renouvelables (notamment sur bâtiments existants).

- Le bonus de constructibilité permis par L. 151-28 du code de l'urbanisme, 3°) peut être sollicité pour les constructions énergétiquement exemplaires201(*) soumises à la RE2020, mais le dispositif n'est pas adapté en cas d'installation d'énergies renouvelables sur les bâtiments existants. De plus le bonus de constructibilité est un dispositif qui doit être prévu par les collectivités dans leurs PLU(i). A défaut, il n'y a pas de dérogation possible.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi par cette disposition est de permettre à l'autorité compétente de déroger, sur décision motivée, aux règles des plans locaux d'urbanisme, afin de contribuer au déploiement des énergies renouvelables comme les pompes à chaleur air/eau collectives et les panneaux solaires photovoltaïques ou thermiques implantés sur les bâtiments, dont l'usage est amené à se développer fortement dans les prochaines années, conformément aux trajectoires de la planification écologique de la France.

En particulier, le décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie fixe à l'article 3 un objectif de puissance installée d'énergie radiative du soleil de 20,1 GW pour 2023 et de 35,1 GW (Option basse) à 44,0 GW (Option haute) pour 2028, ainsi qu'à l'article 4 un objectif de développement de la chaleur renouvelable par les pompes à chaleur aérothermiques, les pompes à chaleur géothermiques et le solaire thermique de respectivement 35, 4,6 et 1,75 TWh pour 2023 et de 39, 5 et 1,85 TWh (Option basse) à 45, 7 et 2,5 TWh (Option haute) pour 2028.

Ces objectifs sont en cours de révision dans le cadre de la Stratégie française énergie climat, et la stratégie mise en consultation en septembre202(*) fixe des objectifs de 54 à 60 GW d'énergie photovoltaïque et de 39,6 TWh pour les pompes à chaleur (aérothermiques et géothermiques) pour 2023 et 44 à 52 TWh pour 2028.

La disposition prévue dans l'article concourt à l'atteinte de ces objectifs.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Outre l'option retenue, plusieurs options de rédaction ont été envisagées : ajouter les systèmes de production d'énergie renouvelable à l'article L. 152-5-1 qui vise la végétalisation en toiture ou créer un nouvel article spécifique à ces systèmes.

Les différences entre ces articles fondant la dérogation reposent sur les éléments auxquels il peut être dérogé (emprise au sol, hauteur, implantation et/ou aspect extérieur des constructions) et sur le périmètre de bâtiments concernés (tous les bâtiments couverts par les PLU ou en excluant les bâtiments classés ou protégés).

3.2. OPTION RETENUE

La mesure s'inscrit dans la continuité des dérogations prévues aux articles L. 152-5 à L. 152-5-2 du code de l'urbanisme qui visent à améliorer la performance environnementale des bâtiments.

Les types d'installations concernées sont les systèmes de production d'énergie renouvelable au sens de l'article L. 211-2 du code de l'énergie. En pratique, la disposition s'appliquera principalement aux installations de pompes à chaleur et de production d'énergie solaire photovoltaïque ou thermique.

Une référence spécifique est faite aux systèmes de chauffage, de climatisation et de production d'eau chaude sanitaire pour indiquer que la disposition s'applique en particulier à la production de chaleur renouvelable des pompes à chaleur installées en toiture, et ne concerne pas uniquement les installations de production d'électricité renouvelable.

Il a été retenu d'inscrire la disposition à l'article L. 152-5 du code de l'urbanisme, afin de retenir les quatre motifs de dérogation (emprise au sol, hauteur, implantation et aspect extérieur des constructions) pertinents pour l'installation de production d'énergie renouvelable, tout en conservant l'exclusion des bâtiments classés ou protégés en application du code du patrimoine.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La disposition s'inscrit dans le cadre de la Charte de l'environnement rappelé dans le cadre constitutionnel au 1.2. En favorisant le développement des énergies renouvelables et en conséquence la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la mesure proposée répond aux objectifs portés par la Charte de l'Environnement et notamment ses articles 3 et 6.

La mesure répond notamment aux objectifs de développement des énergies renouvelables et de limitation des émissions de gaz à effet de serre listés aux articles L. 100-1 et L. 100-4 du code de l'énergie.

L'article L. 152-5 du code de l'urbanisme est modifié, par l'ajout d'un 5°.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La disposition permet de répondre aux exigences fixées par la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, comme indiqué dans le cadre conventionnel décrit au 1.3, en simplifiant les procédures d'installation d'énergie renouvelable, et en développant les énergies renouvelables dans les bâtiments.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Néant.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

L'impact sera positif sur les entreprises de fabrication, d'installation et de maintenance de pompes à chaleur, de panneaux solaires photovoltaïques et thermiques. Cette disposition devrait permettre, lorsque le maître d'ouvrage en fait la demande et si l'autorité d'urbanisme donne son accord, d'installer ces systèmes d'énergie renouvelable là où il n'est actuellement pas possible de le faire à cause de restrictions trop fortes des plans locaux d'urbanisme.

Les dérogations donneront aussi plus de liberté aux maîtres d'ouvrage (MOA) et aux maîtres d'oeuvre (MOE) dans l'installation de systèmes produisant des énergies renouvelables.

Le calcul du gain de la simplification pour les entreprises n'est toutefois pas réalisable. En effet, il n'est pas possible d'estimer le nombre de bâtiments qui utiliseraient cette dérogation car cela dépend de la volonté des maîtres d'ouvrages à demander cette dérogation et de l'avis de l'autorité d'urbanisme qui autorise ou non l'utilisation de cette dérogation.

4.2.3. Impacts budgétaires

La mise en place de cette mesure devrait permettre une meilleure mobilisation des aides publiques existantes (MaPrimeRénov' Copropriétés par exemple) pour la rénovation énergétique des bâtiments, en élargissant la gamme de projets pouvant être réalisés.

Cependant, l'impact budgétaire de cette mesure ne peut être chiffré. Il n'est pas possible à ce stade d'estimer le nombre de bâtiments qui utiliseraient cette dérogation car cela dépend de la volonté des maîtres d'ouvrages à demander cette dérogation et de l'avis de l'autorité d'urbanisme qui autorise ou non l'utilisation de cette dérogation.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La disposition permettra aux collectivités territoriales, qui sont autorités compétentes, d'accorder des dérogations au plan local d'urbanisme pour pouvoir installer un plus grand nombre de systèmes de production d'énergie renouvelable, sans avoir à modifier leur plan local d'urbanisme.

La mesure impliquera un nombre plus important de dossiers de dérogations à traiter pour les collectivités. Cette activité s'inscrira cependant dans le cadre préexistant de l'attribution de dérogations prévues au L. 152-5 du code de l'urbanisme.

En comparaison à une procédure de révision de PLU, la mesure permettra une plus grande souplesse pour les collectivités désireuses de faciliter l'emploi d'énergies renouvelables (et donc de répondre à leurs objectifs en la matière).

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Un travail de communication et d'explication concernant les enjeux des énergies renouvelables et de la chaleur renouvelable est à prévoir auprès des collectivités territoriales concernées et des acteurs du bâtiment. Ce travail sera réalisé par l'administration centrale, avec le relais des services déconcentrés de l'Etat203(*) lors de l'accompagnement des collectivités territoriales dans la mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Néant.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Cette disposition a un impact positif sur les particuliers : en facilitant l'installation de systèmes de production d'énergie renouvelable sur les bâtiments à usage d'habitation, elle permet de réaliser des économies d'énergie, visibles sur les factures.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette disposition a un impact environnemental positif car, en simplifiant l'installation de pompes à chaleur, de panneaux solaires thermiques ou photovoltaïques, elle permettra de faciliter le remplacement ou la réduction de l'usage de chaudières à combustibles fossiles et de faciliter le déploiement d'électricité et de chaleur renouvelable. Ce faisant, elle participera au développement de la production d'électricité décarbonée, en contribuant à la réduction des émissions du secteur électrique et au développement d'usages électriques décarbonés.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes qui a rendu un avis favorable tacite, le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le dispositif entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cet article s'appliquera sur tout le territoire français disposant d'un plan local d'urbanisme. Au 31 décembre 2021, 19 308 communes étaient couvertes par un PLU, sur un total d'environ 34 955 communes françaises (12 299 communes étaient couvertes par un PLU communal et 7 009 communes l'étaient par un PLU intercommunal).

5.2.3. Textes d'application

Les modalités d'application de l'article modifié du code de l'urbanisme seront détaillées dans un décret en Conseil d'Etat.

Article 21 - Simplifier des obligations relatives au biogaz

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'atteinte de l'objectif de neutralité carbone nécessite la production de biogaz, afin de décarboner les usages pour lesquels la consommation de gaz méthane est difficilement substituable par un autre vecteur énergétique, notamment la production de chaleur à haute température dans l'industrie.

La méthanisation est la seule technologie éprouvée pour la production de biogaz. La méthanisation implique l'utilisation de matière organique pouvant être dégradée facilement par des micro-organismes. Les matières (intrants) pouvant être utilisées dans un méthaniseur comprennent les déchets ménagers, les déchets organiques de l'industrie agro-alimentaire, les effluents d'élevages, les déchets végétaux, les produits agricoles et les matières résultat du traitement des eaux usées. Afin de permettre un développement de la méthanisation tout en limitant la concurrence avec l'alimentation, l'article D. 543-292 du code de l'environnement prévoit qu'un méthaniseur ne peut utiliser plus de 15 % des cultures alimentaires ou énergétiques, cultivées à titre de culture principale.

Plusieurs dispositifs de soutien dans le cadre des procédures de mise en concurrence ont été mis en place pour accompagner le développement de la filière de production de biogaz par méthanisation :

- Le dispositif d'obligation d'achat du biogaz injecté dans un réseau de gaz naturel suite à appel d'offres est destiné à soutenir les projets ayant une capacité de production supérieure à 25 GWh/an. Son principe et ses modalités de mise en oeuvre sont décrits aux articles L. 446-5 et R. 446-12-2 à R. 446-12-19 du code de l'énergie. Le premier appel d'offres a été lancé en décembre 2023 avec une première date limite de remise des offres le 15 février 2024 pour la contractualisation d'une capacité de production cumulée de 500 GWh PCS/an. Il sera suivi de deux autres appels d'offres en 2024 également, avec des dates limites prévisionnelles respectivement fixées en juin et décembre, portant chacun sur la contractualisation d'une capacité de production cumulée de 550 GWh PCS/an. Pour chaque période, un volume de 200 GWh PCS/an est réservé en priorité aux projets présentant une production annuelle prévisionnelle inférieure à 50 GWh PCS/an.

- Le dispositif de complément de rémunération suite à appel d'offres pour l'électricité produite par le biogaz issu de la méthanisation est destiné aux installations éloignées des réseaux de gaz naturel (articles L. 311-10 à L. 311-13 du code de l'énergie). L'appel d'offres a été lancé en 2016 avec trois périodes de remise des offres (s'étalant entre février 2016 jusqu'en août 2018), avant la publication de la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Pour chaque période, la puissance cumulée des installations de production d'électricité à partir de biogaz appelée est de 60 MWe. Au 31 décembre 2023, 1 065 installations produisant de l'électricité à partir de biogaz sont raccordées au réseau.

D'autres dispositifs de soutien sont en cours de déploiement :

- Le dispositif de complément de rémunération pour le biogaz non injecté dans un réseau de gaz naturel est destiné à permettre un soutien à la méthanisation sur l'ensemble du territoire, y compris dans les zones éloignées des réseaux de gaz naturel, en favorisant la valorisation du biogaz sous forme de carburant pour véhicules (GNV). En effet, l'article L. 446-7 du code de l'énergie prévoit que tout producteur de biogaz majoritairement destiné à des usages liés à la mobilité, désigné à l'issue d'une procédure d'appel à projets prévue à l'article L. 446-14 du code de l'énergie dans un premier temps et d'une procédure d'appel d'offres prévue à l'article L. 446-15 du code de l'énergie dans un second temps, peut bénéficier d'un complément de rémunération. Ce complément de rémunération est versé par l'Etat sous forme d'aide au fonctionnement en €/MWh, afin de couvrir l'ensemble des coûts investis et d'assurer une juste rémunération du producteur. A ce jour, le cahier des charges encadrant les modalités de l'appel à projets est en cours de finalisation et sera soumis pour validation à la commission de régulation de l'énergie (CRE) puis fera l'objet d'une notification à la Commission Européenne.

Au-delà de la méthanisation, d'autres technologies de production de gaz bas-carbone, comme par exemple la gazéification de biomasse et de déchets, font actuellement l'objet d'expérimentations. Des premiers démonstrateurs ont été financés par le biais du Programme d'investissements d'avenir (PIA), mis en place par l'État pour financer des investissements innovants et prometteurs sur le territoire, sur des technologies permettant de valoriser de nouveaux intrants (gazéification de déchets, pyrolyse de boues issues du traitement des eaux usées...). L'enjeu est désormais de pouvoir passer de la phase de démonstration technologique à une phase d'expérimentation permettant de tester ces technologies en conditions réelles d'exploitation, afin d'analyser leur potentiel et la contribution qu'elles pourraient apporter au mix énergétique.

Le dispositif de contrat d'expérimentation (complément de rémunération suite à une procédure d'appel à projet), créé par l'article 33 de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, permet de soutenir des projets de production de biogaz qui utilisent des technologies innovantes. L'article L. 446-24 du code de l'énergie prévoit donc que l'autorité administrative peut recourir à un appel à projets pour sélectionner des projets de production de biogaz qui utilisent des technologies innovantes. Les producteurs de biogaz désignés peuvent bénéficier d'un contrat d'expérimentation pour le biogaz injecté dans le réseau de gaz naturel (contrat d'achat dont les conditions de rémunération sont fixées au cas par cas et ajustés au besoin par la Commission de régulation de l'énergie afin que la rémunération totale des capitaux immobilisés par le projet reste suffisante et raisonnable).

La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat a introduit l'obligation de réalisation de bilan carbone pour les dispositifs de soutien à la production de biogaz mis en place dans le cadre des procédures de mise en concurrence. Ainsi, l'article L. 446-1 du code de l'énergie introduit une obligation de réaliser un bilan carbone pour les dispositifs de soutien au biogaz suivants :

- Obligation d'achat suite à une procédure d'appel d'offres destiné aux installations de production de biogaz injecté dans un réseau de gaz naturel : tout producteur de biogaz injecté dans le réseau de gaz naturel désigné à l'issue d'une procédure d'appel d'offres de l'article L. 446-5 bénéficiera d'un contrat d'obligation d'achat ;

- Complément de rémunération suite à des procédures d'appels à projets ou d'appels d'offres destinés aux installations de production de biogaz : tout producteur de biogaz désigné à l'issue d'une procédure d'appel à projets prévue à l'article L. 446-14 du code de l'énergie ou d'une procédure d'appel d'offres de l'article L. 446-15 du code de l'énergie, peut bénéficier d'un complément de rémunération.

L'article 89 de la loi n°2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables prévoit que l'article L. 446-1 du code de l'énergie est également applicable aux dispositifs de soutien à la production d'électricité à partir de biogaz dont la procédure de mise en concurrence a été lancée en application de l'article L. 311-10 du code de l'énergie après la publication de loi citée.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La Charte de l'environnement dispose dans son article 1er que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » et dans son article 6 que « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social. ».

Par ailleurs, la liberté d'entreprendre et le libre usage des biens, sont reconnus comme principes à valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le pacte vert pour l'Europe a pour objectifs la fin des émissions nettes de gaz à effet de serre d'ici à 2050. Dans ce cadre, la communication REPowerEU publiée par la Commission européenne encourage le développement du biométhane.

La directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (dite RED II) tend à accélérer la progression des énergies renouvelables, y compris les biogaz, dans le système énergétique.

Elle a été transposée par l'ordonnance n° 2021-235 du 3 mars 2021 s'agissant du volet durabilité des bioénergies qui soumet l'ensemble des installations de production de bioénergies (au-dessus d'un seuil de puissance), dont les installations de production de biogaz :

- à des exigences de « durabilité », portant selon le type de biomasse et les conditions de production (L. 281-7 à L. 281-10 du code de l'énergie),

- à des exigences de réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES), réductions calculées en « cycle de vie du produit » et par rapport à un combustible fossile de référence

- et à des exigences d'efficacité énergétique des installations de production électrique à partir de biomasse (L. 281-5 et L. 281-6 du code de l'énergie).

En particulier, elle conditionne l'admissibilité à une aide financière et la comptabilisation pour l'atteinte des objectifs et obligations fixés au niveau européen en matière d'énergies au respect de critères de « durabilité » et de réduction d'émissions de GES.

Par ailleurs, s'agissant de l'usage carburant du gaz naturel, le biogaz utilisé pour réduire son intensité carbone devra également répondre à des exigences de durabilité, correspondant entre autres à un seuil de minimum de 50 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport au carburant fossile de référence, pour l'application de l'article 266 sexdecies du code des douanes qui prévoit le mécanisme de réduction de l'intensité des émissions de gaz à effet de serre des énergies utilisées dans les transports à compter du 1er janvier 2026.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat a introduit l'obligation de réalisation de bilan carbone pour les dispositifs de soutien à la production de biogaz mis en place dans le cadre des procédures de mise en concurrence. Ainsi, l'article L. 446-1 du code de l'énergie introduit une obligation de réaliser un bilan carbone pour ces dispositifs de soutien au biogaz.

En outre, en application de l'article L. 281-4, les installations de production de biogaz injecté dans un réseau de gaz naturel (ou de biogaz sans injection dans les réseaux de gaz naturel dont les caractéristiques permettrait son injection) dont les capacités de production sont supérieures à 19,5 GWh PCS/an et les installations d'une puissance thermique nominale supérieure à 2 MW produisant de l'électricité, de la chaleur ou du froid à partir du biogaz doivent établir un bilan carbone afin de justifier du respect des exigences de réduction d'émissions de GES.

Les installations de production de biogaz soumises aux exigences de réductions des émissions de gaz à effet de serre (mentionnées aux articles L. 281-5 et L. 281-6 du code de l'énergie) correspondent à celles visées dans les dispositifs de soutien à la production de biogaz mis en place dans le cadre des procédures de mise en concurrence mentionnées dans les articles L. 311-10, L. 446-5, L. 446-14 et L. 446-15.

L'obligation de réalisation de bilan carbone est donc redondante avec les obligations relatives à la durabilité et aux exigences de réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES) du biométhane.

La suppression de l'obligation de réalisation de bilan carbone pour les dispositifs de soutien à la production de biogaz mis en place dans le cadre des procédures de mise en concurrence nécessite donc une disposition législative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objet de la mesure envisagée est de faciliter l'intelligibilité du cadre législatif et réglementaire et de limiter la charge administrative pour les porteurs de projets.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une autre option serait de conserver le doublon, c'est-à-dire une double exigence relative aux émissions de gaz à effet de serre des installations.

Pour des raisons d'intelligibilité du code de l'énergie et de rationalisation des exigences de l'administration vis-à-vis des porteurs de projet, cette option n'a pas été retenue.

3.2. OPTION RETENUE

A l'issue de l'analyse présentée ci-dessus, la seule option consiste à supprimer l'article mentionnant l'obligation de réalisation d'un bilan carbone pour les dispositifs de soutien à la production de biogaz mis en place dans le cadre des procédures de mise en concurrence.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

L'article proposé supprime l'article L. 446-1 du code de l'énergie, seul article de la section 1 du chapitre VI du titre IV du livre IV dudit code.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

L'article supprimé est redondant avec les exigences de « durabilité » et de réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES), issues de la directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (dite RED II), et transposée par l'ordonnance n° 2021-235 du 3 mars 2021.

4.1.3. Impacts économiques et financiers

4.1.4. Impacts macroéconomiques

Aucun impact sur la filière biogaz n'est à prévoir dès lors que les installations qui doivent aujourd'hui mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 446-1 du code de l'énergie mettent déjà en oeuvre les exigences de la directive RED II.

4.1.5. Impacts sur les entreprises

Cette simplification est destinée à faciliter l'intelligibilité de la réglementation pour les porteurs de projets d'installation de production de biogaz.

La mesure aura donc un impact positif pour les entreprises.

4.1.6. Impacts budgétaires

Néant.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La suppression de cet article permet de limiter la charge administrative des candidats aux procédures de mise en concurrence mentionnées aux articles L. 311-10, L. 446-5, L.446-14 et L. 446-15 du code de l'énergie lors de la constitution de dossier de candidature.

Elle permet également d'alléger la charge d'instruction de ces dossiers par les services de la Commission de régulation de l'énergie, qui n'aura plus besoin d'analyser les bilans carbone fournis dans les dossiers.

4.4. IMPACTS SOCIAUX

4.4.1. Impacts sur la société

Néant.

4.4.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.4.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.4.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.4.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.6. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les dispositions proposées tendent à améliorer la lisibilité de la réglementation, et de ce fait à accélérer le développement du biogaz. Le biogaz produit répond aux exigences environnementales européennes et présente donc un impact environnemental positif en facilitant la décarbonation des usages pour lesquels la consommation de gaz est difficilement substituable par d'autres vecteurs énergétiques.

En outre, les installations de production de biogaz relèvent également d'une ou plusieurs rubriques de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Les principales rubriques concernées sont les rubriques 2781 (Installations de méthanisation de déchets non dangereux ou de matière végétale brute, à l'exclusion des installations de méthanisation d'eaux usées ou de boues d'épuration urbaines lorsqu'elles sont méthanisées sur leur site de production) et 3140 (installations de gazéification ou liquéfaction de charbon ou autres combustibles). Les arrêtés ministériels de prescriptions génériques associés à ces rubriques prévoient des dispositions permettant de réduire et limiter les impacts environnementaux des installations (notamment, il existe des prescriptions encadrant le stockage des digestat, les risques de fuites de biogaz et le plan d'épandage contribuant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de ces installations).

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La mesure n'est pas soumise à consultations obligatoires et aucune consultation facultative n'a été conduite.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions proposées s'appliqueront sur l'ensemble du territoire de la République française. Il convient toutefois de noter qu'il n'existe pas à ce jour de réseau de gaz naturel, où est injecté le biogaz, en dehors du territoire métropolitain continental.

5.2.3. Textes d'application

Le présent article n'appelle pas de mesure d'application.

TITRE IX - SIMPLIFIER POUR INNOVER

Article 22 - Faciliter l'innovation issue de la recherche

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le plan France 2030 lancé en 2021 par le président Emmanuel Macron poursuit différents objectifs dont celui de faire de la France la première nation européenne innovante et souveraine en santé. C'est dans cet objectif que l'Agence de l'Innovation en Santé a été créée, produit du plan FR2030 et en charge de le piloter sur la verticale santé.

Lancée en novembre 2022, l'Agence de l'innovation en santé (AIS), entité placée sous l'autorité du Premier Ministre, au sein du Secrétariat Général pour l'Investissement (SGPI), doit concrétiser cette volonté et s'est dès lors attelée à replacer la France en tête du peloton européen, cette discipline étant soumise à une concurrence internationale très importante. L'AIS travaille notamment sur la simplification et la fluidification de l'ensemble du processus conduisant à la mise en place d'une recherche clinique: autorisation règlementaire, contractualisation du promoteur avec les centres, mise en place de l'essai clinique (formation des équipes et élaboration du circuit du médicament) puis inclusion des patients. L'objectif est donc de réduire les délais sur l'ensemble de la chaîne de l'autorisation jusqu'à l'inclusion effective des patients dans les études biomédicales permettant de valider les innovations concernées afin de les limiter à moins de 120 jours tels qu'annoncé dans le Plan Innovation Santé 2030. Les travaux menés permettent d'identifier deux voies de simplification et fluidification dans le domaine de la recherche, qui font l'objet du I du présent article.

Concernant la phase d'autorisation de la recherche clinique, en plus de l'autorisation de l'Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) ou son équivalent dans les autres états membres de l'Union Européenne, les promoteurs204(*) doivent obtenir une autorisation administrative additionnelle délivrée par le ministère chargé de la recherche dès lors que le projet de recherche requiert l'importation et l'exportation d'échantillons biologiques, prévue aux articles L. 1221-12, L. 1235-1 et L. 1245-5-1 du code de la santé publique. L'utilisation d'échantillons biologiques issus du corps humain est une composante majeure de la recherche clinique régie par les article L. 1121-1 et suivants du code de la santé et les règlements européens respectivement relatifs aux essais cliniques de médicaments, aux dispositifs médicaux et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et le fait que la majorité des études portant sur des médicaments ou dispositifs innovants impliquent des centres, promoteurs ou laboratoires centralisés à l'étranger rend indispensable l'étape d'import ou d'export des échantillons. En 2023, 1 000 demandes ont fait l'objet d'une demande d'autorisation d'export, dont 48% concernait une recherche impliquant la personne humaine ou un essais clinique médicament. Dans ces conditions, une autorisation de recherche incluant la possibilité d'importer et d'exporter des échantillons biologiques sans démarche supplémentaire apparait indispensable.

En cohérence avec cette simplification et avec les dispositions de l'article L. 1121-1 du code de la santé publique relatif à la recherche clinique, des ajustements sont apportés aux dispositions de ce code concernant la conservation d'éléments et produits du corps humains dans la recherche clinique (articles L. 1243-3, 6ème alinéa et L. 1243-4 dernier alinéa). Il s'agit d'étendre explicitement l'exception qu'elles prévoient pour les recherches impliquant la personne humaine aux autres types de recherches cliniques (essais cliniques de médicament, de dispositif médicaux et de dispositif médicaux de diagnostic in vitro).

Un volet plus général de l'encadrement des projets de recherche en santé concerne également le traitement des données à caractère personnel utilisées à cette fin, que le II du présent article vise dès lors à simplifier.

A cet égard, il convient de rappeler que le règlement général sur la protection des données (RGPD)205(*) prévoit un principe général d'interdiction de traiter des données à caractère personnel concernant la santé. Il prévoit néanmoins des exceptions dans le cadre desquelles de telles données peuvent faire l'objet d'un traitement. Il s'agit notamment des cas dans lesquels :

- le traitement est nécessaire aux fins de la médecine préventive ou de la médecine du travail, de l'appréciation de la capacité de travail du travailleur, de diagnostics médicaux, de la prise en charge sanitaire ou sociale, ou de la gestion des systèmes et des services de soins de santé ou de protection sociale ;

- le traitement est nécessaire pour des motifs d'intérêt public dans le domaine de la santé publique, tels que la protection contre les menaces transfrontalières graves pesant sur la santé, ou aux fins de garantir des normes élevées de qualité et de sécurité des soins de santé et des médicaments ou des dispositifs médicaux ;

- le traitement est nécessaire à des fins de recherche scientifique.

Le point 4 de l'article 9 du RGPD prévoit par ailleurs que les États membres peuvent maintenir ou introduire des conditions supplémentaires, y compris des limitations, en ce qui concerne le traitement des données génétiques, des données biométriques ou des données concernant la santé.

Avec la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, qui est venue modifier la loi « informatique et libertés »206(*) (LIL) afin d'adapter le droit national au RGPD, le législateur a fait le choix de faire usage de cette marge de manoeuvre pour maintenir le régime d'autorisation qui existait s'agissant des traitements de données concernant la santé, notamment introduit par l'une des lois de bioéthique de 1994 en matière de recherche dans le domaine de la santé207(*).

Délivrer une autorisation208(*) suppose que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) procède à l'analyse de la conformité du traitement envisagé, aussi bien d'un point de vue juridique que technique, aux exigences légales et réglementaires applicables, en particulier en matière de protection des données personnelles.

Afin de concentrer son analyse sur les traitements présentant les risques plus importants (grands volumes de données, données d'une sensibilité particulière, etc.) ou des montages innovants et/ou complexes, la CNIL dispose d'un pouvoir de simplification des démarches des responsables de traitement, dans la mesure où elle peut adopter des référentiels (appelées méthodologies de référence en matière de recherche) permettant de mettre en oeuvre des traitements de données sur la base d'une déclaration de conformité, et sans avoir à solliciter son autorisation.

Bien que l'élaboration de référentiels de simplification soit une compétence de la CNIL depuis plusieurs décennies (autorisations uniques, normes simplifiées, actes réglementaires uniques, méthodologies de référence), c'est la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 précitée qui a posé le principe général selon lequel seuls les projets non conformes aux référentiels doivent être soumis à la CNIL pour autorisation. En effet, auparavant :

- l'article 54 de la LIL prévoyait, s'agissant des traitements de données de santé dans le cadre de recherches en santé « pour les catégories les plus usuelles de traitements automatisés ayant pour finalité la recherche dans le domaine de la santé et portant sur des données ne permettant pas une identification directe des personnes concernées, la commission peut homologuer et publier des méthodologies de référence, (...). » ;

- plus largement, l'article 25 de la LIL prévoyait « les traitements qui répondent à une même finalité, portent sur des catégories de données identiques et ont les mêmes destinataires ou catégories de destinataires peuvent être autorisés par une décision unique de la commission. Dans ce cas, le responsable de chaque traitement adresse à la commission un engagement de conformité de celui-ci à la description figurant dans l'autorisation. »

La CNIL ne pouvait donc décider d'adopter, en opportunité, que des mesures de simplification lorsque les modalités de mise en oeuvre de traitements étaient suffisamment similaires pour établir un cadre précis et englobant la plupart des projets répondant à la typologie visée.

Si la première méthodologie de référence a été adoptée en 2006, la CNIL a, depuis 2015, adopté plusieurs référentiels dans le domaine de la santé. Actuellement, il existe treize référentiels permettant la mise en oeuvre de traitements de données de santé sur la base d'une déclaration de conformité :

- Délibération n° 2019-057 du 9 mai 2019 portant adoption d'un référentiel relatif aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre à des fins de gestion des vigilances sanitaires ;

- Délibération n° 2021-118 du 7 octobre 2021 portant adoption d'un référentiel relatif aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre à des fins de création d'entrepôts de données dans le domaine de la santé ;

- Délibération n° 2022-107 du 22 septembre 2022 portant adoption d'un référentiel relatif aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre par le laboratoire titulaire des droits d'exploitation d'un médicament bénéficiant d'une autorisation d'accès précoce ;

- Délibération n° 2022-106 du 22 septembre 2022 portant adoption d'un référentiel relatif aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre par le laboratoire titulaire des droits d'exploitation d'un médicament bénéficiant d'une autorisation d'accès compassionnel ;

- Délibération n° 2018-153 du 3 mai 2018 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre des recherches dans le domaine de la santé avec recueil du consentement de la personne concernée (MR-001) et abrogeant la délibération n° 2016-262 du 21 juillet 2016 ;

- Délibération n° 2015-256 du 16 juillet 2015 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre des études non interventionnelles de performances en matière de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (MR-002) ;

- Délibération n° 2018-154 du 3 mai 2018 portant homologation de la méthodologie de référence relative au traitement des données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre des recherches dans le domaine de la santé ne nécessitant pas le recueil du consentement de la personne concernée (MR-003) et abrogeant la délibération n° 2016-263 du 21 juillet 2016 ;

- Délibération n° 2018-155 du 3 mai 2018 portant homologation de la méthodologie de référence relative aux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre des recherches n'impliquant pas la personne humaine, des études et évaluations dans le domaine de la santé (MR-004) ;

- Délibération n° 2018-256 du 7 juin 2018 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données nécessitant l'accès par des établissements de santé et des fédérations aux données du PMSI et des résumés de passage aux urgences (RPU) centralisées et mises à disposition sur la plateforme sécurisée de l'ATIH (MR 005) ;

- Délibération n° 2018-257 du 7 juin 2018 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données nécessitant l'accès pour le compte des personnes produisant ou commercialisant des produits mentionnés au II de l'article L. 5311-1 du code de la santé publique aux données du PMSI centralisées et mises à disposition par l'ATIH par l'intermédiaire d'une solution sécurisée (MR 006) ;

- Délibération n° 2023-082 du 20 juillet 2023 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données de la base principale du Système national des données de santé mis en oeuvre à des fins de recherche, d'étude ou d'évaluation dans le domaine de la santé par les organismes agissant dans le cadre de leur mission d'intérêt public (MR-007) ;

- Délibération n° 2023-083 du 20 juillet 2023 portant homologation d'une méthodologie de référence relative aux traitements de données de la base principale du Système national des données de santé mis en oeuvre à des fins de recherche, d'étude ou d'évaluation dans le domaine de la santé par les organismes agissant dans le cadre de leurs intérêts légitimes (MR-008) ;

- Délibération n° 2022-124 du 13 octobre 2022 portant adoption d'un référentiel portant sur la description et les garanties de procédure permettant la mise à disposition en vue de leur traitement de l'échantillon du système national des données de santé (ESND) et des bases de données thématiques appelées « datamarts » du système national d'information interrégimes de l'assurance maladie (SNIIRAM) présentant un faible risque d'impact sur la vie privée et abrogeant la délibération n° 2020-072 du 16 juillet 2020.

Lorsque les traitements de données envisagés ne sont pas conformes à l'un de ces référentiels, une autorisation doit être obtenue auprès de la CNIL préalablement à leur mise en oeuvre. La loi de 2018 précitée a introduit le principe selon lequel le silence de la CNIL à l'issue du délai dont elle dispose (deux mois renouvelables une fois) vaut acceptation de la demande, expressément prévu au V de l'article 66 de la LIL209(*).

Dans les suites des récents rapports portant notamment sur la réutilisation de données, en particulier le rapport coordonné par Jérôme Marchand-Arvier210(*) et celui établi par la Commission de l'intelligence artificielle211(*), qui pointent la nécessité de simplifier davantage les démarches administratives préalables à la mise en oeuvre de projets de recherche dans le domaine de la santé, a été mis en évidence le besoin de faciliter le recours aux référentiels de simplification existants (notamment les méthodologies de référence en matière de recherche) et de simplifier la procédure d'élaboration et de recours à ces cadres, afin de favoriser la mise en oeuvre de projets de recherche innovants, tout en garantissant le respect des principes de protection des données prévus par le RGPD et la loi informatique et libertés. Ceci doit permettre que le recours à ces référentiels, et donc à la procédure déclaratoire de conformité, devienne la norme et la procédure d'autorisation l'exception.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

S`agissant des mesures contenues au II du présent article, il convient de rappeler que l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression ». La liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 implique le droit au respect de la vie privée212(*).

Il résulte du droit au respect de la vie privée que la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en oeuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif213(*). Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités214(*).

De manière constante, le Conseil constitutionnel juge « qu'il appartient (...) au législateur de concilier, d'une part, le droit au respect de la vie privée et, d'autre part, les exigences de valeur constitutionnelle qui s'attachent tant à la protection de la santé, qui implique la coordination des soins et la prévention des prescriptions inutiles ou dangereuses, qu'à l'équilibre financier de la sécurité sociale »215(*). En ce qui concerne en particulier le traitement de données à des fins de recherche, le Conseil constitutionnel a jugé que l'objectif d'améliorer les connaissances sur une épidémie poursuivait également l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé216(*).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Concernant le grand I, l'Union Européenne fixe la réglementation sur trois grands champs des recherches incluant des personnes : le médicament, les dispositifs médicaux et les dispositifs médicaux de diagnostiques in vitro. Ces recherches dites cliniques sont régies par le règlement (UE) n° 536/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain, le règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux et le règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.

Les recherches cliniques ne relevant pas de ces champs sont régies par le seul droit national (article L. 1121-1 et suivant du code la santé publique).

En ce qui concerne les dispositions relatives au traitement des données de santé, l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales consacre le droit au respect de la vie privée et familiale.

La Cour européenne des droits de l'homme considère que la protection des données à caractère personnel joue un rôle fondamental pour l'exercice de ce droit. A cet égard, la législation interne doit ménager des garanties appropriées pour empêcher toute utilisation de données à caractère personnel qui ne serait pas conforme aux garanties prévues dans cet article, assurer que ces données sont pertinentes et non excessives par rapport aux finalités pour lesquelles elles sont enregistrées, et conservées sous une forme permettant l'identification des personnes concernées pendant une durée n'excédant pas celle nécessaire aux finalités pour lesquelles elles sont enregistrées. Le droit interne doit également contenir des garanties aptes à protéger efficacement les données à caractère personnel enregistrées contre les usages impropres et abusifs. Ces considérations valent tout spécialement lorsqu'est en jeu la protection de catégories particulières de données plus sensibles, lesquelles revêtent une grande importance pour les personnes concernées217(*).

L'article 16 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, en son article 8, prévoient que toute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant. La Charte précise qu'elles doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d'un autre fondement légitime prévu par la loi. Celle-ci a également le droit d'accéder aux données collectées la concernant et d'en obtenir la rectification. Le respect de ces règles est soumis au contrôle d'une autorité administrative.

Conformément aux stipulations de l'article 52 de la Charte, applicable lorsque les Etats membres mettent en oeuvre le droit de l'Union, toute limitation de l'exercice de ce droit fondamental doit être prévue par la loi, respecter son contenu essentiel et, dans le respect du principe de proportionnalité, être nécessaire et répondre effectivement à des objectifs d'intérêt général reconnus par l'Union ou au besoin de protection des droits et libertés d'autrui. La Cour de justice de l'Union européenne considère que les limitations susceptibles d'être légitimement apportées au droit à la protection des données à caractère personnel correspondent à celles tolérées dans le cadre de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales218(*).

Le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et le Conseil, dit RGPD, crée un cadre européen au traitement des données à caractère personnel des personnes physiques.

L'article 5 du RGPD pose les grands principes auxquels doit se conformer tout traitement de données à caractère personnel : licéité, loyauté et transparence ; limitation des finalités ; minimisation des données ; exactitude des données ; limitation de la conservation des données ; intégrité et confidentialité des données. Son article 6 prévoit que le traitement n'est licite que si au moins une des conditions qu'il mentionne est remplie. Tel est le cas notamment si la personne concernée a consenti au traitement de ses données à caractère personnel pour une ou plusieurs finalités spécifiques, si le traitement est nécessaire au respect d'une obligation légale à laquelle le responsable du traitement est soumis ou si le traitement est nécessaire à l'exécution d'une mission d'intérêt public ou relevant de l'exercice de l'autorité publique dont est investi le responsable du traitement. Son article 9 paragraphe 2 prévoit par ailleurs que, par dérogation à l'article 9 paragraphe 1 interdisant le traitement des données concernant la santé d'une personne physique, de tels traitements peuvent être mis en oeuvre dans certaines hypothèses, et en particulier si la personne concernée a donné son consentement explicite ou si le traitement est nécessaire pour des motifs d'intérêt public dans le domaine de la santé publique. L'article 89 du RGPD prévoit en outre des garanties minimales à respecter en cas de traitements mis en oeuvre à des fins de recherche (mesures techniques et organisationnelles pour assurer en particulier le respect du principe de minimisation des données, notamment la pseudonymisation des données).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Le régime d'autorisation préalable à la mise en oeuvre d'un traitement dans le domaine de la santé constitue une des marges de manoeuvre laissées au droit national par le RGPD.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Pour le I :

Les dispositions du I modifient des articles de la partie législative du code de la santé publique (L. 1221-12, L. 1235-1 L. 1243-3, L. 1243-4 et L. 1245-5-1) qui relèvent de la loi.

Actuellement, les promoteurs de recherche clinique, notamment industriels, ayant obtenu un avis favorable d'un comité de protection des personnes (CPP) et, le cas échéant, l'autorisation de l'autorité compétente pour leur projet, doivent ensuite, dès lors que le projet requiert l'importation ou l'exportation d'éléments ou de produits issus du corps humain à visée de recherche en provenance d'un État membre ou non de l'Union européenne ou partie ou non à l'accord sur l'Espace économique européen, adresser une demande d'autorisation d'import ou d'export au ministère chargé de la recherche. Cette nouvelle autorisation est délivrée, par le ministère chargé de la recherche, après avis de l'Agence de biomédecine.

Cette étape est purement administrative dans la mesure où le ministère et l'Agence de la biomédecine ne font que constater l'autorisation de l'essai clinique délivrée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et/ou l'avis rendu par le CPP, sans évaluation complémentaire : en cas d'accord, ils n'ont aucune raison objective de refuser l'importation ou l'exportation. Cette étape engendre des délais supplémentaires, dans le démarrage des essais cliniques et susceptible d'impacter la compétitivité de la France en la matière.

Cette étape est vécue comme une formalité administrative par les différents acteurs publics ou privés. Ce délai supplémentaire, pouvant aller jusqu'à trois mois (article R. 1235-9 du code de la santé publique), peut entrainer des arbitrages défavorables à la France pour la conduite d'essais cliniques et des charges supplémentaires notamment pour des petites entreprises qui n'ont pas toujours les ressources en personnels pour effectuer de telles démarches administratives. Cela impacte donc l'attractivité de la France pour la réalisation de recherches biomédicales internationales.

En cohérence avec cette simplification et avec les dispositions de l'article L. 1121-1 du code de la santé publique, des ajustements sont apportés aux dispositions de ce code concernant la conservation d'éléments et produits du corps humains dans la recherche clinique (articles L. 1243-3, 6ème alinéa et L. 1243-4 dernier alinéa).

Pour le II :

Dans les suites des récents rapports précités portant notamment sur la réutilisation des données, il convient de faire évoluer les modalités d'adoption par la CNIL des référentiels permettant la mise en oeuvre de traitements de données de santé pour développer le recours à cette procédure de déclaration de conformité plutôt qu'à celle reposant sur une demande d'autorisation préalable auprès de cette commission. Il pourrait également être utile de modifier certaines modalités de délivrance des autorisations (avis préalables des comités compétents). L'article 34 de la Constitution réserve au législateur la compétence pour fixer « les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques », au titre desquelles figure le droit à la protection des données à caractère personnel. En outre, aux termes du second alinéa de l'article 1er de la loi organique du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, pris sur le fondement du dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution, la loi « fixe les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ». L'intervention du législateur est donc nécessaire à l'atteinte des objectifs précédemment présentés.

Il convient tout d'abord de réaffirmer le principe selon lequel, pour les traitements de données de santé soumis à formalités préalables auprès de la CNIL, la conformité à un référentiel élaboré par elle constitue la règle, et la demande d'autorisation l'exception, et également de favoriser l'élargissement du champ couvert par les référentiels.

Ces référentiels concernent le traitements mis en oeuvre dans le cadre de projets de recherche, études et évaluations dans le domaine de la santé, mais également des traitements de données de santé poursuivant d'autres finalités, telles que les vigilances sanitaires, les accès précoces et compassionnels aux médicaments, l'accès à des dispositifs médicaux, la création d'entrepôts de données de santé, etc.

Ces référentiels doivent permettre d'assurer un équilibre entre la protection des données et les finalités d'intérêt public poursuivies par les traitements mis en oeuvre, notamment en matière de développement de la recherche dans le domaine de la santé. En effet, il est crucial que la simplification des démarches des acteurs du secteur de la santé guide également l'action de la CNIL en matière d'accompagnement. Toutefois, au regard de la sensibilité des données dont l'utilisation est nécessaire pour atteindre ces objectifs, le maintien d'un régime de formalité préalable, visant à garantir la conformité des traitements de données mis en oeuvre aux principes de protection des données et de la vie privée, apparaît essentiel.

Afin de garantir cet équilibre, plusieurs évolutions sont proposées concernant les modalités d'adoption des référentiels :

- Premièrement, s'il appartient toujours à la CNIL d'adopter les référentiels santé, le projet prévoit d'ouvrir la possibilité pour certains acteurs (ministre chargé de la santé, acteurs représentatifs du secteur) de proposer des référentiels. En effet, il apparait nécessaire de maintenir la compétence exclusive de la CNIL pour valider le contenu des référentiels : en sa qualité d'autorité administrative indépendante et de régulateur en matière de protection des données, elle est la seule entité compétente pour déterminer si un référentiel répond aux principes du RGPD et de la LIL et, ainsi, si les traitements qui seront mis en oeuvre dans le cadre de ces référentiels seront ou non conformes à ces textes. Ce point est essentiel pour garantir la sécurité juridique des responsables de traitement, puisque la CNIL contrôlera en aval l'application du RGPD. La modification opérée aura également pour effet d'inciter les acteurs de terrain et ceux connaissant bien l'écosystème à proposer des référentiels correspondant à leurs besoins et adaptés à leurs pratiques, tout en complétant l'offre de simplification et les cas couverts par des référentiels.

- Deuxièmement, le texte précise qu'une seule déclaration de conformité à un référentiel permet à un responsable de traitement de mettre en oeuvre tous les traitements conformes au référentiel. Ce principe, déjà prévu par les référentiels existants, réaffirme la volonté du législateur de simplifier et de rationaliser les démarches devant être réalisées par les responsables de traitement.

Le projet prévoit également l'obligation pour la CNIL d'établir une stratégie de programmation des référentiels à adopter, portant notamment sur les catégories les plus usuelles de traitements de données de santé. Il laisse par ailleurs le soin au pouvoir réglementaire de fixer précisément les conditions dans lesquelles les référentiels seront élaborés et adoptés ainsi que les conditions d'élaboration de cette stratégie de programmation.

Enfin, s'agissant des avis rendus préalablement à l'autorisation de la CNIL, il est prévu d'introduire dans la loi un mécanisme permettant au responsable de traitement de se dispenser de l'avis du comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (CESREES), créé par l'article 76 de la LIL, lorsque le projet de traitement a fait l'objet d'un avis favorable d'un comité scientifique et éthique local dont le fonctionnement respecte un cahier des charges établi au niveau national par le ministre en charge de la santé pris après avis du CESREES.

En pratique, beaucoup d'organismes de recherche disposent de comités d'éthiques et scientifiques internes. Une telle disposition permettra de disposer d'un avis rendu par des comités connaissant les bases de données dont le traitement est envisagé (par exemple, un comité intervenant dans la gouvernance d'un entrepôt de données de santé), de désengorger le CESREES et de ne pas multiplier les procédures de demande d'avis. Il s'agit ainsi de permettre aux chercheurs de s'appuyer sur l'expertise de comités éthiques et scientifiques locaux, et de produire leurs avis avec un dossier de demande d'autorisation, sans avoir à solliciter de manière systématique et cumulative un avis du CESREES. Les conditions exactes de cette dispense seront fixées par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la CNIL, afin de réserver notamment le cas des projets impliquant plusieurs comités locaux.

Plus subsidiairement, il convient de clarifier dans la loi « informatique et libertés » le champ d'application des articles 65 et suivants, qui imposent la réalisation de formalités (déclaration de conformité ou demande d'autorisation) préalablement à la mise en oeuvre des traitements de données concernant la santé dans le domaine de la santé.

Enfin, le projet rend applicable ces nouvelles dispositions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, en modifiant le « compteur Lifou » prévu à l'article 125 de la loi « Informatique et Libertés ».

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le I du présent article vise à simplifier le circuit de sorte que les promoteurs de recherche (notamment industriels) ayant reçu une autorisation et/ou un avis favorable pour la mise en oeuvre d'une recherche biomédicale ou relevant des règlements européens sur le médicament, le dispositif médical ou le dispositif médical de diagnostic in vitro puissent importer ou exporter les échantillons nécessaires à la recherche sans accomplir de formalité supplémentaire. Cette simplification supprime une charge supplémentaire pour les promoteurs et diminue également la charge supportée par les équipes du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR) en charge du traitement de ces autorisations. Au regard de ces éléments, les dispositions relatives à la conservation sont également ajustées.

Pour le II, il est proposé de faire évoluer les modalités d'adoption par la CNIL des référentiels permettant la mise en oeuvre de traitements de données de santé sans qu'il soit nécessaire de procéder à une demande d'autorisation préalable après de cette commission. Il est également proposé de modifier certaines modalités de délivrance des autorisations (avis des comités compétents). L'objectif poursuivi est que, plus encore qu'aujourd'hui, la déclaration devienne la règle et l'autorisation l'exception.

Enfin, il est proposé de clarifier le champ d'application de la loi « informatique et libertés » s'agissant des traitements de données de santé soumis à formalités préalables. Il s'agit d'une simple clarification, mettant en cohérence le texte de l'article avec le titre de la section, afin d'assurer une meilleure sécurité juridique aux acteurs traitant des données de santé.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

En dehors du statu quo, aucune autre option n'a été identifiée.

3.2. OPTION RETENUE

Avec le soutien de la communauté de la recherche, académique ou privée, le I du présent article propose de simplifier les démarches administratives des promoteurs de recherches impliquant la personne humaine (RIPH), notamment industriels, ayant reçu une autorisation et/ou un avis favorable pour la mise en oeuvre d'une RIPH ou d'une recherche clinique relevant des règlements européens sur le médicament, le dispositif médical ou le dispositif médical de diagnostic in vitro, pour qu'ils puissent importer ou exporter les échantillons nécessaires à la recherche sans accomplir de formalité supplémentaire. Pour cela, l'obligation de présenter une demande d'autorisation d'importation ou d'exportation prévue aux derniers alinéas des articles L. 1221-12, 1235-1 et à l'article L. 1245-5-1 est supprimée pour ces recherches dès lors qu'elles sont autorisées. Cette simplification supprime une charge supplémentaire pour les chercheurs et diminue également la charge supportée par les équipes du MESR chargé du traitement de ces autorisations.

En cohérence avec cette simplification et avec les dispositions de l'article L. 1121-1 du code de la santé publique relatif à la recherche clinique, des ajustements sont apportés aux dispositions de ce code concernant la conservation d'éléments et produits du corps humains dans la recherche clinique (articles L. 1243-3, 6ème alinéa et L. 1243-4 dernier alinéa). Il s'agit d'étendre explicitement l'exception qu'elles prévoient pour les recherches impliquant la personne humaine aux autres types de recherches cliniques (essais cliniques de médicament, de dispositifs médicaux et de dispositif médicaux de diagnostic in vitro).

Le II permet à d'autres acteurs que la CNIL de proposer des référentiels dans le domaine de la santé, afin de favoriser un élargissement des traitements de données couverts par des référentiels ; de prévoir que la CNIL adopte une programmation des référentiels pour permettre aux opérateurs du secteur de mieux connaître les traitements usuels priorisés par la CNIL pour le développement de référentiels ; de prévoir la possibilité d'une seule déclaration de conformité pour plusieurs traitements de données relevant d'un même référentiel mis en oeuvre par un même responsable de traitement ; de limiter la saisine du CESREES aux projets n'ayant pas déjà fait l'objet de l'avis favorable du comité éthique et scientifique de l'entité disposant des données.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le I du présent article modifie plusieurs articles du code de la santé publique :

- Article L. 1221-12 ;

- Article L. 1235-1 ;

- Article L. 1243-3 ;

- Article L. 1243-4 ;

- Article L. 1245-5-1.

Le II du présent article modifie plusieurs articles de la loi du 6 janvier 1978 précitée dite « informatique et libertés » :

- Article 65 portant sur le champ d'application du chapitre concerné ;

- Article 66 portant sur les modalités d'adoption des référentiels et de délivrance des autorisations ;

- Article 73 portant sur les méthodologies de référence (référentiels dédiés à la recherche dans le domaine de la santé) ;

- Article 76 portant sur les avis rendus préalablement à l'autorisation de la CNIL

- Article 125 portant sur l'applicabilité des dispositions de cette loi à certains territoires d'outre-mer.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Pour le I, la présente mesure s'articule avec les dispositions européennes en vigueur en matière de recherches impliquant la personne humaine219(*)220(*)221(*).

Pour le II, il s'agit d'une application de la marge de manoeuvre prévue par le 4. de l'article 9 du RGPD222(*), qui permet aux États membres de maintenir ou introduire des conditions supplémentaires, y compris des limitations, en ce qui concerne le traitement des données génétiques, des données biométriques ou des données concernant la santé.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Pour le I, l'impact économique de la mesure sera important pour les acteurs académiques, tels que les organismes nationaux de recherche (Inserm, CNRS, etc.), les centres hospitaliers universitaires, ainsi que pour les acteurs industriels en ce qu'elle permettra :

- D'accroitre la compétitivité des filiales françaises vis-à-vis de filiales d'autres pays ;

- De renforcer l'attractivité de la recherche française, ces points étant pointés par les industriels comme étant un frein à l'attractivité de la France par rapport à ses voisins Européens, notamment l'Espagne et l'Allemagne ;

- De contribuer à augmenter le nombre d'études effectuées en France entrainant ainsi une augmentation de l'activité des entreprises impliquées dans ces projets ;

- De faciliter les démarches administratives.

Pour le II, l'impact économique peut s'analyser sous deux angles :

- direct : la clarification et la simplification de la règlementation pour les traitements de données de santé permettra de diminuer les coûts et délais des responsables de traitements, notamment en matière de recherche, pour la mise en oeuvre de leurs projets. Ceci signifie :

o un gain de compétitivité des acteurs du secteur de la santé ;

o à terme une meilleure accessibilité aux données concernant la santé, notamment à des fins de recherche.

- indirect : cette simplification permettrait de favoriser l'émergence de nouveaux référentiels, construits en collaboration avec les acteurs concernés et de proposer des cadres pédagogiques encore plus adaptés aux pratiques et aux besoins. Ainsi, elle favorisera la recherche et l'encadrement des traitements de données de santé (accès aux médicaments et dispositifs médicaux, vigilances sanitaires, etc.).

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Pour I, la mesure permettra d'éviter de multiples charges de traitement administratives aux entreprises, notamment aux entreprises étrangères qui doivent passer par ces étapes d'autorisations.

Actuellement, le MESR traite 1 000 demandes par an, dont 48% en recherches cliniques interventionnelles. Les délais actuels de traitement sont les suivants :

- 43% des dossiers en 15 jours ;

- 75% des dossiers en 30 jours ;

- 93% des dossiers en 60 jours ;

- 97% des dossiers en 90 jours.

Près de la moitié de ces autorisations, dans le cadre de recherche biomédicales, ne comporte aucune plus-value et crée un délai supplémentaire pour les promoteurs de recherches biomédicales privés ou publics car, par construction, ces échantillons et leur export dans le cadre de la recherche répondent à des besoins et motifs scientifiques. La démarche et le délai de trois mois supplémentaires à compter de l'accusé de réception pour vérifier ceci est donc inutile223(*).

Supprimer cette autorisation évitera aux entreprises et promoteurs académiques d'avoir à soumettre et à suivre des demandes d'autorisations. Un gain en termes de délai, d'attractivité par une optimisation du processus et d'économie de charges liées à ces opérations est à attendre.

Pour le II, la mesure vise principalement à créer des leviers d'accélération des démarches préalables à la mise en oeuvre de traitements de données dans le domaine de la santé, aussi bien en matière de recherche que pour les traitements de données mis en oeuvre par les industriels du secteur (accès au médicament et DM, vigilances sanitaires). Elle permettra d'étendre les typologies de traitements couverts par des référentiels, et d'inciter les acteurs à proposer des référentiels adaptés à leurs besoins.

4.2.3. Impacts budgétaires

La présente mesure n'introduit aucun coût supplémentaire. Pour le II, elle conduira, pour les acteurs du système de santé, à un gain de temps et une simplification de leurs démarches.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Pour le I, aucun impact n'est attendu pour les collectivités territoriales.

Aucun impact substantiel n'est de même attendu pour le II, les collectivités territoriales n'ayant pas vocation à mettre en oeuvre de nombreux traitements de données concernant la santé.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Pour le I, la mesure allègera le travail des équipes du MESR en charge du traitement du processus des autorisations.

Pour le II, les bénéfices attendus peuvent également concerner les services administratifs, qui peuvent être responsables de traitements de données concernant la santé soumis à formalités préalables auprès de la CNIL.

La mesure allègera aussi à terme la charge de la CNIL puisqu'elle devra développer de nouveaux référentiels, mais traitera moins d'autorisations individuelles de traitements de données.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Pour le I, la mesure impactera positivement les entreprises (cf. 4.2.2).

Pour le II, la mesure impactera l'ensemble des acteurs du système de santé et les organismes de recherche publics et privés, qui peuvent être responsables de traitements de données concernant la santé soumis à formalités préalables auprès de la CNIL.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La mesure ne présente pas d'impact spécifique pour les personnes en situation de handicap.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Aucun impact n'est attendu pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Aucun impact n'est attendu pour la jeunesse.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Aucun impact n'est attendu pour les professions règlementées.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Pour le I, aucun impact n'est attendu pour les assurés sociaux ou les patients.

Pour II, la mesure proposée aura un impact sur les usagers du système de santé, dans la mesure où les traitements de données de santé les concernant pourront être mis en oeuvre plus facilement et dans un cadre garantissant le respect de leurs droits et libertés.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure ne présente pas d'impact spécifique sur l'environnement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Pour le I, la mesure est élaborée par le Groupe de travail co-piloté par l'Agence de l'innovation en santé (AIS) et F-CRIN sur les nouvelles méthodologies de recherche clinique, notamment par le groupe traitant des études intégrant les données de vie réelle. La mesure a ensuite été proposée à l'occasion du workshop recherche clinique organisé par la Direction générale de la santé (DGS) et l'AIS le 08 Février 2024. Etaient représentés :

- Le Ministère Travail Santé et des solidarités (DGS, DGOS) ;

- Le Ministère Enseignement Supérieur et de la Recherche (MESR) ;

- La Commission Nationale des Recherches Impliquant la Personne Humaine ;

- Les syndicats professionnels : LEEM, SNITEM, FranceBiotech, AFCROs ;

- Le Comité National de Coordination de la Recherche (CNCR) ;

- UNICANCER

- RESPIC : est une association dédiée à la recherche fondée par dix établissements privés d'intérêt collectif (ESPIC) ;

- La conférence DG CHU,

- Représentation des investigateurs ;

- L'Assistance Publique -Hôpitaux de Paris ;

- L'ANSM ;

- L'Alliance pour la Recherche et l'Innovation des Industries de Santé (ARIIS)

- La CNIL.

La CNIL a en outre été consultée sur les dispositions prévues par le II du présent article, conformément à l'article 8 de la loi « Informatique et des Libertés » (délibération n°2024-030 du 11 avril 2024).

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le présent article entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La présente mesure est applicable en France métropolitaine et dans les départements et collectivités d'Outre-mer comme suit :

Collectivités d'Outre-mer

Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion

Mesure directement applicable

Mayotte

Mesure directement applicable

Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon

Mesure directement applicable

Autres (Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, TAAF)

Mesure non applicable pour le I

Mesure applicable pour le II, par modification de l'article 125 de la loi « informatique et libertés »

5.2.3. Textes d'application

Le I du présent article ne requiert pas de texte d'application.

Le II du présent article nécessite une modification du décret n° 2019-536 du 29 mai 2019 pris pour l'application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Article 23 - Intégrer l'innovation dans le mandat de la Commission nationale de l'informatique et des libertés

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La commission nationale informatique et libertés (CNIL) est chargée de veiller au respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (ci-après « loi informatique et libertés ») et est l'autorité nationale de contrôle au titre du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données, ci-après « RGPD »). A ce titre, la CNIL veille notamment à ce que les traitements de données à caractère personnel soient mis en oeuvre conformément aux dispositions en vigueur en la matière et elle informe toutes les personnes concernées et tous les responsables de traitements de leurs droits et obligations et peut, à cette fin, apporter une information adaptée aux collectivités territoriales, à leurs groupements et aux petites et moyennes entreprises. Dans ce cadre, par exemple, elle établit et publie des lignes directrices, recommandations ou référentiels destinés à faciliter la mise en conformité des traitements de données à caractère personnel avec les textes relatifs à la protection des données à caractère personnel et à procéder à l'évaluation préalable des risques par les responsables de traitement et leurs sous-traitants. Elle encourage l'élaboration de codes de conduite définissant les obligations qui incombent aux responsables de traitement et à leurs sous-traitants, compte tenu du risque inhérent aux traitements de données à caractère personnel pour les droits et libertés des personnes physiques, notamment des mineurs. Elle homologue et publie les méthodologies de référence destinées à favoriser la conformité des traitements de données de santé à caractère personnel. Elle donne également un avis sur les traitements qui intéressent la sûreté de l'État, la défense ou la sécurité publique ou qui ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales ou l'exécution des condamnations pénales ou des mesures de sûreté. Elle traite également les réclamations, pétitions et plaintes introduites par une personne concernée ou par un organisme, une organisation ou une association, examine ou enquête sur l'objet de la réclamation, dans la mesure nécessaire, et informe l'auteur de la réclamation de l'état d'avancement et de l'issue de l'enquête dans un délai raisonnable, notamment si un complément d'enquête ou une coordination avec une autre autorité de contrôle est nécessaire.

Or, l'émergence des technologies numériques et en particulier des technologies d'intelligence artificielle générative amène de nouveaux enjeux en matière de protection des données mais aussi de nouvelles opportunités de protection des données via de nouvelles techniques innovantes.

Ainsi, si la collecte et la réutilisation des données à caractère personnel des utilisateurs pour améliorer ou développer de nouveaux services ou technologies innovants ne sont pas à proprement parler de nouveaux sujets, il n'en demeure pas moins que des questions nouvelles continuent d'apparaître relativement à l'application des dispositions du RGPD et de la loi informatique et libertés au regard du développement rapide - et postérieur au RGPD - de nouvelles technologies, notamment en matière d'intelligence artificielle, qui pourront permettre à l'Europe de rattraper son retard face à ses concurrents mondiaux et de parvenir à faire bénéficier l'ensemble de ses citoyens, administrations et entreprises de ces technologies dans un cadre contrôlé.

La réussite de la transformation numérique des administrations et des entreprises repose ainsi sur la recherche d'un équilibre entre, d'une part, le développement des technologies innovantes et, d'autre part, la mise en oeuvre adaptée de la nécessaire protection des données à caractère personnel à la lumière des innovations technologiques.

Pour autant, la prise en compte de l'innovation dans l'exercice de ses missions ne figure pas dans les objectifs prévus par la loi pour la CNIL, alors même que cette prise en compte permettrait l'exercice d'une régulation par la CNIL plus ouverte aux enjeux d'innovation vis-à-vis des acteurs innovants.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Aux termes de l'article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, pris sur le fondement du dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution :

« Toute autorité administrative indépendante ou autorité publique indépendante est instituée par la loi.

La loi fixe les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ».

L'article 34 de la Constitution, qui énumère les matières relevant du domaine de la loi, dispose à son dernier alinéa que ces matières peuvent « être précisées et complétées par une loi organique ». Dans sa décision n° 2017-746 DC du 19 janvier 2017, relative à la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, le Conseil constitutionnel relève donc qu'est conforme à la Constitution le fait que le loi organique réserve « à la loi la création des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, la fixation des règles relatives à leur composition et leurs attributions ainsi que la détermination des principes fondamentaux de leur organisation et de leur fonctionnement. »

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le cadre européen de la protection des données est le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données - RGPD). Ce règlement, technologiquement neutre, évoque tout de même l'évolution rapide des technologies et la mondialisation et les nouveaux enjeux qu'ils entraînent pour la protection des données à caractère personnel dans ses considérants 6 et 7 en particulier. Cependant, au-delà de ce rappel général, l'innovation n'est pas évoquée en tant que telle par le RGPD, et notamment pas dans les missions des autorités de contrôle. En revanche, le RGPD confie expressément aux autorités nationales, à l'article 57, paragraphe 1er, au point i) la mission de suivre « les évolutions pertinentes, dans la mesure où elles ont une incidence sur la protection des données à caractère personnel, notamment dans le domaine des technologies de l'information » et au point v) de s'acquitter, d'une manière générale « de toute autre mission relative à la protection des données à caractère personnel ». C'est dans ce cadre que s'inscrit l'évolution des missions de la CNIL.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les missions de la CNIL, en tant qu'autorité indépendante, sont du domaine de la loi. L'article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes dispose en effet que : « La loi fixe les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l'organisation et au fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. » La mention de la prise en compte des enjeux liés à l'innovation dans le cadre de ces missions doit donc faire l'objet d'une évolution législative.

Il est à noter que la CNIL, en développant notamment son service de l'expertise, a développé une pratique grandissante de prise en compte des enjeux d'innovation. Elle a ainsi publié un rapport dès 2017 sur les enjeux éthiques des algorithmes et de l'intelligence artificielle, mené une consultation pour publier sa position sur de l'utilisation de caméras augmentées en 2022. La même année, elle a autorisé la création d'un cadre d'expérimentation de caméras « augmentées » pour assurer la sécurité des grands événements224(*), dans le cadre de son avis sur le projet de loi sur les jeux olympiques. En 2023, elle a également publié un plan d'action en matière d'intelligence artificielle pour le déploiement de systèmes d'IA respectueux de la vie privée des individus. Pour autant, l'inscription de cet objectif dans la loi apparaît nécessaire pour garantir cette prise en compte dans la durée et son amplification face à l'évolution actuelle des technologies, notamment en matière d'intelligence artificielle générative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La présente mesure vise, comme indiqué plus haut, à garantir que la CNIL prenne en compte, à leur juste niveau, les enjeux d'innovation dans l'exercice de ses missions.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

En dehors du statu quo, aucune autre option que la modification de la loi (article 8 de la loi informatique et libertés) ne semble envisageable afin de modifier le mandat de la CNIL.

3.2. OPTION RETENUE

Le présent article modifie l'article 8 de la loi informatique et libertés afin de préciser que la CNIL « prend également en compte, dans tous les domaines de son action, les enjeux d'innovation » et qu'elle « promeut, dans le cadre de ses missions, la juste prise en compte des enjeux d'innovation associés aux traitements des données à caractère personnel ».

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La précision apportée par cette mesure n'est pas identifiée directement dans le RGPD mais est cohérente avec celui-ci, notamment avec l'article 57, paragraphe 1er, point i) et v) du RGPD relatif aux missions des autorités de contrôle.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

S'il reste aujourd'hui difficile à estimer, la mesure aura un impact macro-économique lié à la simplification qu'elle engendrera pour les entreprises (voir point 4.2.2).

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure permettra, en permettant à la CNIL de mettre en oeuvre une approche ouverte à l'innovation, de simplifier le dialogue avec les acteurs économiques et de promouvoir des approches innovantes et simplifiées tout en respectant les dispositions en vigueur en matière de protection des données. Au final, la mesure bénéficiera donc tout autant aux entreprises mettant en oeuvre des traitements de données à caractère personnel, qu'aux entreprises proposant des solutions technologiques exploitant ces données ou renforçant leur protection.

4.2.3. Impacts budgétaires

La présente mesure n'introduit aucun coût supplémentaire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure pourra avoir un impact positif pour les collectivités mettant en oeuvre des traitements de données à caractère personnel.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure pourra avoir un impact positif pour les administrations publiques mettant en oeuvre des traitements de données à caractère personnel.

Elle n'aura pas d'impact sur les effectifs de la CNIL car elle se fera à ETP constant.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

La mesure impactera les entreprises (cf. 4.2.2).

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La mesure ne présente pas d'impact spécifique pour les personnes en situation de handicap.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Aucun impact n'est attendu pour l'égalité entre les femmes et les hommes.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Aucun impact spécifique n'est attendu pour la jeunesse.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Aucun impact spécifique n'est attendu pour les professions règlementées.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Aucun impact spécifique n'est attendu pour les particuliers

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure ne présente pas d'impact spécifique sur l'environnement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aux termes de l'article 8 de la loi informatique et libertés, la consultation de la commission nationale de l'informatique et des libertés est requise. Elle a rendu un avis (délibération n°2024-030) le 11 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La présente mesure est applicable dès l'entrée en vigueur de la loi, le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La loi informatique et libertés s'applique dans l'ensemble des territoires de la République.

Elle s'applique de plein droit en métropole ainsi que dans les collectivités qui relèvent de l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte).

L'article 125 de la loi informatique et libertés étend expressément l'application de la loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).

5.2.3. Textes d'application

La présente disposition ne nécessite pas de mesure d'application.

TITRE X - SIMPLIFIER LE DÉVELOPPEMENT DES COMMERCES

Articles 24, 25, 26 - Faciliter l'installation et l'exploitation des commerces

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'installation et l'exploitation des commerces impliquent l'accomplissement de plusieurs formalités. En effet, elles nécessitent l'obtention d'autorisations administratives, en application des dispositions du code de commerce et du code de la construction et de l'habitation et la conclusion d'un bail pour la mise à disposition d'un local, lorsque les commerçants n'en ont pas la propriété.

1.1.1. Le cadre général du régime des baux commerciaux

L'article L. 145-1 du code de commerce détermine le champ d'application du statut des baux commerciaux. Ce statut s'applique de plein droit aux contrats de bail portant sur des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité par un commerçant ou un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés ou par un chef d'entreprise immatriculé au répertoire des métiers.

En outre, il s'applique aux baux de locaux ou d'immeubles accessoires à l'exploitation d'un fonds de commerce lorsque leur privation est de nature à compromettre l'exploitation de ce fonds, s'ils appartiennent au propriétaire du local ou de l'immeuble où est situé l'établissement principal. Le statut des baux commerciaux bénéficie également aux contrats de bail portant sur des terrains nus sur lesquels ont été édifiées des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire.

En revanche, les baux de longue durée (tels que le bail emphytéotique, le bail à construction) et les baux de courte durée (tels que les baux dérogatoires, les contrats de location saisonnière et les conventions d'occupation précaire) ne bénéficient pas du statut des baux commerciaux.

Par ailleurs, les parties peuvent décider de soumettre leur contrat de bail à ce statut, bien que les exigences légales ne soient pas satisfaites, sous réserve de respecter les conditions dégagées par la jurisprudence.

Le statut des baux commerciaux fixe un ensemble de règles protectrices au profit des preneurs et en particulier :

- la fixation d'une durée minimale de neuf ans pour la mise à disposition du local ou de l'immeuble concerné (article L. 145-4 du code de commerce) ;

- le droit au renouvellement du bail (articles L. 145-8 et suivants du code de commerce) ;

- le versement d'une indemnité d'éviction dans le cas où le bailleur refuse ce renouvellement (article L. 145-14 du code de commerce) ;

- l'encadrement des modalités de révision des loyers commerciaux en cas de révision ou de renouvellement du bail avec un plafonnement (articles L. 145-38 et suivants du code de commerce) ;

- la répartition des charges, impôts, taxes et redevances entre les preneurs et les bailleurs (article L145-40-2 du code de commerce).

Néanmoins, il laisse une large place à la négociation entre les parties pour la détermination d'éléments du contrat, notamment s'agissant des conditions financières, et des modalités d'exécution.

Le toilettage du statut des baux commerciaux opéré dans le cadre de la loi LME du 4 août 2008

En 2003, sur initiative du garde des Sceaux, un groupe de travail présidé par Maître Pelletier, réunissant des spécialistes du droit des baux commerciaux et des représentants des professionnels, propriétaires et locataires des secteurs du commerce et de l'artisanat, a été missionné pour réfléchir sur l'opportunité de réformer la législation des baux commerciaux. Ces travaux ont débouché sur la formulation de 40 propositions et recommandations au sein d'un rapport, remis au garde des Sceaux en avril 2004.

Près de la moitié des mesures préconisées ont été reprises dans le cadre de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (dite « LME »). Elles ont permis un toilettage des baux commerciaux et professionnels sans modification fondamentale du statut. Ainsi, trois principales modernisations ont été opérées : la création de l'indice des loyers commerciaux (ILC), l'élargissement du champ de l'exercice du droit de préemption sur les fonds de commerce au profit des communes, la mise en place d'un bail dérogatoire d'une durée de deux années visant à permettre de tester une activité commercial nouvelle ou innovante sur une courte durée.

La modernisation du statut des baux commerciaux réalisée par la loi ACTPE du 18 juin 2014.

Dès août 2013, après une large concertation des acteurs du secteur du commerce, le législateur a souhaité garantir un équilibre dans la négociation entre les preneurs et les bailleurs de baux commerciaux, en raison d'un contexte marqué par une concurrence critique entre les enseignes et les commerces indépendants et une hausse des loyers commerciaux dans les grandes villes, tout en apportant davantage de souplesse aux règles régissant ces contrats.

En conséquence, la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (ACTPE) et le décret n° 2014-1317 du 3 novembre 2014 pris pour son application, ont procédé à la rénovation du régime des baux commerciaux : outre la clarification de l'imputation des charges entre locataires et bailleurs, qu'il s'agisse de la réalisation de l'inventaire ou de la répartition des charges entre les parties, l'assouplissement des règles de durée des baux au profit du preneur et la mise en place de nouvelles règles de négociation et de révision des loyers ont été adoptés.

Difficultés liées au financement du bail commercial

En dépit de ces initiatives, plusieurs évènements d'origines multifactorielles ont successivement impacté l'activité des entreprises, et en particulier des commerçants. En effet, peu après la crise sanitaire, les émeutes de juin et juillet 2023 et les mouvements sociaux ont conduit à une fermeture de certains commerces et à une baisse significative de leurs activités ; la crise énergétique, l'inflation et les inondations répétées ont quant à elles abouti à une augmentation des coûts liés à l'exploitation de leurs commerces. A cela s'ajoute, le remboursement des prêts garantis par l'Etat, auxquels doivent procéder les commerçants, dans un délai de six ans.

Dans ce contexte, le financement du bail commercial pèse de plus en plus lourdement sur la trésorerie des commerçants, aussi bien pour ceux en début d'activité que pour ceux dont l'exploitation est plus ancienne. En effet, en sus des investissements liés à l'acquisition d'un fonds de commerce et des marchandises, ces entreprises doivent également s'acquitter de loyers et de garanties payables à l'avance.

Ø Le paiement trimestriel du loyer commercial

Les dispositions du code de commerce relatives au bail commercial n'encadrent que la fixation du loyer lors de la révision triennale et lors du renouvellement du bail. Le loyer du bail commercial est ainsi librement fixé par les parties dans le contrat. De même, les modalités de paiement, à savoir la périodicité du loyer (mensuel, trimestriel, semestriel etc ) et le moment du paiement (à échoir ou à terme échu) du loyer ressortent de la liberté contractuelle.

En pratique, compte tenu du poids prépondérant des bailleurs dans la négociation, ces derniers exigent d'une part, un paiement trimestriel du loyer. Les sommes acquittées sont, en plus, payées à l'avance. Ces pratiques sont courantes au sein du secteur du commerce.

Ce n'est qu'à titre exceptionnel, durant la pandémie COVID-19, que certains bailleurs ont accepté de mettre en place, à titre provisoire, un paiement mensuel des loyers, pour certaines enseignes qui rencontraient de graves difficultés financières. En revanche, cette tolérance a pris fin, dès que les commerçants bénéficiaires ont retrouvé une activité normale.

Ainsi, en début de contrat puis, à chaque début de trimestre, les commerçants sont amenés à verser trois mois de loyers en une seule fois.

Par comparaison, en matière de logement, le législateur225(*) a consacré le principe de paiement mensuel du loyer dès lors que le locataire en fait la demande.

Ø Le versement d'un dépôt de garantie excédant trois mois de loyer commercial

Le dépôt de garantie est une somme versée par le preneur à bail en début de contrat afin de garantir la bonne exécution du contrat. Il constitue le plus souvent une garantie contre les éventuels loyers impayés ou le défaut de remise en état des locaux.

Ce versement n'est pas obligatoire. Il s'agit d'un usage établi au sein du secteur du commerce dont le montant est librement déterminé par les parties.

En effet, la loi ne subordonne pas la prise à bail au versement de cette somme ni ne limite le montant acquitté à ce titre. Seul l'article L. 145-40 du code de commerce encadre indirectement le dépôt de garantie en prévoyant que les sommes payées d'avance excédant celles qui correspondent à plus de deux termes de loyer produisent des intérêts au profit du locataire. En d'autres termes, dès lors que le cumul des sommes perçues d'avance à titre de loyer et de garantie dépasse un montant équivalent à deux ou six mois de loyer, selon que le terme est mensuel ou trimestriel, le bailleur est tenu de verser au preneur des intérêts.

Compte tenu de cet article, la pratique la plus répandue consiste à fixer le montant de ce dépôt à trois mois de loyer226(*). Toutefois, ce montant peut être plus élevé sans que cette hausse ne soit nécessairement justifiée par des considérations relatives à l'exécution du contrat ou au local concerné.

S'il n'existe pas d'Observatoires de collecte des données portant sur les loyers commerciaux (loyer moyen, montant moyen du dépôt de garantie), les consultations menées auprès des fédérations professionnelles de ce secteur permettent d'identifier des déséquilibres importants en défaveur des commerçants. Les excès de certains bailleurs conduisent à ce que le montant du dépôt de garantie demandé dès la prise de bail corresponde à six ou neuf mois de loyers. En sus de freiner le démarrage de l'activité des nouveaux commerçants, ces excès limitent la trésorerie des commerçants dont le bail est encore en cours d'exécution.

Par comparaison, dans le domaine des baux d'habitation, le dépôt de garantie fait l'objet d'une limitation. Il ne peut excéder 1 à 2 mois de loyer au principal (hors charges) selon que le logement est non meublé227(*) ou meublé 228(*).

Difficultés liées à la restitution du dépôt de garantie dans le cadre du bail commercial, en cas de vente du local loué

Le dépôt de garantie est une dette personnelle du bailleur à l'égard du locataire et n'est pas attaché à l'immeuble. En cas de vente des locaux loués, la restitution du dépôt de garantie au locataire, incombe donc au bailleur originaire et ne se transmet pas à son ayant cause à titre particulier. Cette règle résulte clairement de la jurisprudence de la Cour de Cassation, en application des règles de droit commun.

En pratique, la solution est discutable car les baux sont généralement anciens et les biens font souvent l'objet de cessions, de sorte que le locataire qui quitte les lieux peut être confronté à des difficultés pour obtenir la restitution du dépôt de garantie.

Le preneur d'un bail d'habitation n'est plus confronté aux mêmes difficultés depuis la loi no 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, qui a mis expressément la restitution du dépôt de garantie à la charge du nouveau bailleur (article 103).

1.1.2. Le cadre général relatif à la procédure d'autorisation d'exploitation commerciale

La procédure d'Autorisation d'exploitation commerciale (AEC) est l'outil central de la politique d'aménagement commercial. Au gré des dernières évolutions législatives, cette procédure a notamment intégré les enjeux liés à la production d'énergies renouvelables, de lutte contre l'artificialisation des sols, de revitalisation des centres-villes.

Tout projet de création ou d'agrandissement d'un magasin ou d'un ensemble commercial de plus de 1 000 m² de surface de vente nécessite une AEC229(*). Cette autorisation est délivrée par les Commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC). En cas de recours sur la décision-avis230(*) de la CDAC, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) peut être saisie.

Afin de délivrer cette autorisation, les commissions prennent en considération 13 critères listés dans le code de commerce et vérifient, le cas échéant, la compatibilité du projet au Schéma de cohérence territoriale (Scot). Cette autorisation ne peut être délivrée pour un projet qui artificialise des sols que s'il respecte des critères dérogatoires définis à l'article L.752-6 du code de commerce.

Les recours sur les autorisations d'exploitation commercial sont encadrés par les dispositions suivantes :

- L'article L. 752-17-I du code de commerce prévoit : « Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial ».

- Le 6ème alinéa de l'article L. 752-17 précise également : « A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale est un préalable obligatoire au recours contentieux ».

- Enfin, l'article R. 752-31 du code de commerce indique que : « ... le recours est présenté au président de la Commission nationale d'aménagement commercial par tout moyen sécurisé ou, lorsqu'il est présenté par le préfet, par la voie administrative ordinaire. A peine d'irrecevabilité, le recours est motivé et accompagné de la justification de la qualité et de l'intérêt donnant pour agir de chaque requérant ... ».

Concernant les ensemble commerciaux, l'article L.752-2 du code de commerce mentionne que : « I. - Les regroupements de surfaces de vente de magasins voisins, sans création de surfaces supplémentaires, n'excédant pas 2 500 mètres carrés, ou 1 000 mètres carrés lorsque l'activité nouvelle est à prédominance alimentaire, ne sont pas soumis à une autorisation d'exploitation commerciale ». Actuellement, un regroupement de surfaces de ventes au sein d'un centre commercial ne nécessite pas d'autorisation d'exploitation commerciale à condition de respecter les critères susmentionnés. Ces derniers permettent d'éviter tout « saucissonnage » d'un projet qui serait réalisé par phases successives, visant à contourner la réglementation applicable.

Il est nécessaire de préciser que lorsqu'un magasin cesse d'être exploité au sein d'un ensemble commercial, il conserve ses droits pour une durée maximale de 3 ans. Cette disposition s'applique séparément pour chacun des commerces appartenant à l'ensemble commercial231(*). Ainsi, un commerce qui reste fermé plus de 3 ans perd sa commercialité et ses droits doivent être soustraits de la surface de vente autorisée pour l'ensemble commercial. La réouverture de ce commerce s'apparente donc à une extension de l'ensemble commercial.

Cependant, la création ou l'extension de nouveaux centres commerciaux s'annonce dorénavant très complexe au regard des nouvelles dispositions en matière de lutte contre l'artificialisation des sols prévues par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « Climat et Résilience ». Son article 215 prévoit notamment des critères contraignants pour démontrer la nécessité des projets de construction, l'interdiction d'implantation de nouveaux centres commerciaux de plus de 10 000 m2 et un régime strict d'examen de dérogation par le préfet pour les projets entre 3 000 m² et 10 000 m2.

Aussi, les centres commerciaux existants devront majoritairement, et régulièrement, se réinventer au sein de leurs volumes de construction respectifs via notamment des re-ventilations des droits commerciaux existants.

1.1.3. Le cadre général relatif à la procédure d'autorisation de travaux

L'ouverture ou la réouverture des exploitations, dont principalement les commerces (tels que les supermarchés, hypermarchés, magasins d'habillement de taille moyenne), est, de manière générale, subordonnée à la délivrance d'une autorisation administrative en application des articles L. 122-3 et L. 122-5 du code de la construction et de l'habitation (ci-après « CCH »), dans la mesure où il entre dans la catégorie des Etablissements recevant du public (ERP) dont l'ouverture est soumise à autorisation. Seuls les petits ERP isolés au sens de la sécurité incendie et susceptibles d'accueillir moins de 200 personnes en sont dispensés (par exemple, les boulangeries, les librairies, les snack bars).

L'article L. 122-3 précité prévoit qu'une « autorisation de travaux » doit être obtenue dans certains cas avant que les travaux ne puissent être réalisés.

L'article L. 122-5 précité prévoit qu'une autorisation doit être délivrée par l'autorité administrative avant que l'ERP ne puisse ouvrir.

La présente disposition ne porte que sur la procédure d'autorisation de travaux prévu à l'article L. 122-3. Elle vise à passer à un régime de déclaration de travaux.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

1.2.1. Le régime des baux commerciaux

Le statut particulier des baux commerciaux est compatible avec les droits et libertés garantis par la Constitution, en raison des objectifs d'intérêt général de maintien de l'équilibre entre les bailleurs et les preneurs ainsi que la préservation de l'activité économique des entreprises qu'il poursuit.

1.2.2. Le régime d'autorisation d'exploitation commerciale

Le régime d'autorisation d'exploitation commerciale s'inscrit dans le respect du droit de propriété. Aux termes de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Dès lors, la liberté « ne saurait elle-même être préservée si des restrictions arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d'entreprendre »232(*). Par ailleurs, « il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi »233(*).

Le Conseil constitutionnel a ainsi considéré que les dispositions en matière d'autorisation d'exploitation commerciale de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, ne portait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre eu égard à l'objectif poursuivi234(*).

1.2.3. Le régime de l'autorisation de travaux

Le régime de l'autorisation de travaux est compatible avec les droits et libertés garantis par la Constitution. Il s'inscrit dans le cadre prévu pour le législateur « d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi »235(*).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

1.3.1. Le régime des baux commerciaux

Au sein de l'Union européenne, la plupart des Etats membres ont institué un régime protégeant les droits des locataires. Parmi eux, la France est le seul pays à offrir une protection renforcée aux preneurs de baux commerciaux, en particulier en fin de bail. Toutefois, cette législation est pleinement compatible avec le droit de l'Union européenne. D'une part, l'article 345 du Traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne, qui pose le principe selon lequel le régime de la propriété dans les États membres relève de la compétence exclusive des autorités nationales, est applicable aux domaines des baux commerciaux. D'autre part, le statut des baux commerciaux ne remet pas en cause les libertés économiques consacrées par le droit de l'Union européenne ni les objectifs de libre concurrence.

S'agissant de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au travers de sa jurisprudence, la Cour de cassation a affirmé la compatibilité de ce régime avec les exigences de cette convention (Cass. 3e civ., 12 juin 1996, n° 94-14.862 ; Cass. 3e civ., 4 févr. 2009, n° 08-11.433).

1.3.2. Le régime d'autorisation d'exploitation commerciale

Le droit d'établissement et la liberté de prestation de services constituent des « libertés fondamentales » au sens du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de la directive « services » de 2006236(*). La Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) a confirmé en 2018 que le commerce de détail de produits est un « service » au sens de ladite directive « services »237(*).

1.3.3. Le régime de l'autorisation de travaux

Le droit d'établissement et la liberté de prestation de services constituent des « libertés fondamentales » au sens du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de la directive « services » de 2006238(*).

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La liberté d'entreprendre et la liberté contractuelle dérivant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (DDHC), les limites à leur exercice « ne peuvent être déterminées que par la loi ».

2.1.1. Institution du principe de mensualisation des loyers à la demande du preneur à bail d'un local commercial

La fixation du loyer initial, le rythme de paiement, généralement mensuel ou trimestriel, et les modalités de paiement relèvent de la liberté contractuelle des parties. En conséquence, ces conditions financières du bail commercial sont librement déterminées par les bailleurs et preneurs au moment de la conclusion du contrat, en tenant généralement compte des usages du secteur.

En début de contrat puis, à chaque début de trimestre, les commerçants sont amenés à verser trois mois de loyers en une seule fois.

Or, le loyer commercial représente une part non négligeable dans le chiffre d'affaires des commerçants. Il s'agit du second voire du premier poste de dépenses après les dépenses de personnel. En moyenne, le loyer commercial représente 15 % du chiffre d'affaires annuel239(*), avec des variations en fonction des secteurs : dans le textile, le loyer peut représenter jusqu'à 20 % du chiffre d'affaires annuel, pour les fleuristes jusqu'à 10 %, dans l'équipement de la maison environ 8 %, dans le secteur de la beauté-parfumerie et dans l'optique au-dessus de 15% du chiffre d'affaires annuel. Le niveau de loyer varie aussi fortement en fonction de la localisation du commerce : il est plus important en centre commercial et dans les centres villes des métropoles, alors qu'il est moins important dans les parcs d'activités commerciales.

A cela s'ajoute le fait que les entreprises du secteur du commerce, et en particulier les très petites entreprises (TPE) connaissent régulièrement des difficultés de trésorerie pour diverses raisons, certaines d'entre elles étant étroitement liées, voire quasi-inhérentes à leur activité ou à leur taille.

Tel est notamment le cas de la saisonnalité des ventes. D'après une étude de l'Insee, le quatrième trimestre240(*) représente 48 % des ventes pour les commerces de jouets, 36% des ventes pour les magasins spécialisés en électronique, 34 % des ventes pour les parfumeries et les librairies, 29 % des ventes pour les magasins de textiles, et 27 % des ventes pour les magasins d'habillement241(*). Les flux de trésorerie des commerces fluctuent donc au cours de l'année. A titre d'illustration, pour un commerce de jouets qui réalise 52 % de son chiffre d'affaires annuel242(*) entre janvier et octobre, la trimestrialisation conduit ce commerce à devoir verser trois mois de loyer en janvier, alors que le premier trimestre de l'année ne représente en moyenne que 17 % de ses ventes annuelles. Dès lors, le poids du le paiement de trois mois de loyers au mois de janvier représente pour ces commerces un décaissement de l'ordre de 22 % de leur chiffre d'affaires trimestriel243(*).

Plus largement, le secteur du commerce doit faire face à de fortes difficultés de trésorerie, qui sont exacerbées pour les TPE. En effet, les TPE sont les premières affectées par les difficultés de trésorerie. Une étude de l'observatoire du financement des entreprises montre qu'elles disposent d'une trésorerie équivalente à seulement 51 jours de chiffre d'affaires contre 76 jours de chiffre d'affaires en moyenne pour l'ensemble de l'économie244(*). Le secteur du commerce est dès lors l'un des secteurs économiques présentant le plus de difficultés de trésorerie pour les TPE.

En conséquence, le paiement trimestriel du loyer constitue une contrainte forte pour les commerçants qui voient leur trésorerie fortement impactée. Ces contraintes sont d'autant plus importantes pour certains secteurs, du fait de la saisonnalité de l'activité (jouets, habillement), et pour les plus petites entreprises. Par ailleurs, le paiement trimestriel n'est pas indispensable pour le bon exercice de l'activité des bailleurs. Sur la base d'un loyer représentant en moyenne 15 % du chiffre d'affaires annuel, en raison du paiement trimestriel, les commerçants locataires décaissent en début de trimestre environ 3,75 % de leur chiffre d'affaires annuel.

Par ailleurs, ces difficultés se trouvent parfois renforcées, par la mise en place d'un dépôt de garantie ou d'un cautionnement principalement destiné à garantir le non-paiement éventuel de loyers futurs. Là encore, l'usage est de prévoir au titre du dépôt de garantie un trimestre de loyers si le terme du loyer est trimestriel et à échoir et deux trimestres de loyers si le terme du loyer est trimestriel et échu.

Ainsi, afin de préserver l'ouverture de nouveaux commerces et d'éviter la fragilisation, à court ou moyen terme, des commerces en cours d'exploitation, il est essentiel de limiter et réguler ces sorties importantes de trésorerie liées au paiement trimestriel du loyer.

2.1.2. Limitation du montant exigé pour le dépôt de garantie en faveur du preneur à bail d'un local commercial

Dans la plupart des cas, les sommes exigées par les bailleurs, à titre de garantie, n'excèdent pas une somme correspondant à trois mois de loyers, afin d'éviter le versement d'intérêt au profit des commerçants locataires, en application de l'article L. 145-40 du code de commerce. En particulier, l'application de cet usage est reconnue par les deux fédérations représentatives des commerçants (Alliance du Commerce et PROCOS) mais également par les quatre grandes foncières commerciales concernées (Unibail Rodamco Westfield, Klépierre, Carmila, Mercialys).

Toutefois, aucune disposition légale ne prévoit de limitation. Cette situation conduit à ce que certains bailleurs conditionnent la location de locaux commerciaux à un dépôt de garantie de plus de trois mois de loyer.

La perception de ce supplément est un avantage pour les bailleurs, qui peuvent placer ces sommes, sur une longue durée, jusqu'à leur restitution au preneur : les baux commerciaux sont conclus pour une durée minimale de neuf ans et le commerçant bénéfice d'un droit au renouvellement de son bail, en application de l'article L. 145-4 et 145-8 du code de commerce.

En revanche, le poids du dépôt de garantie sur la trésorerie des commerçants est notable. Associé au paiement trimestriel du loyer, les commerçants décaissent, en général et a minima, six mois lors de l'entrée dans les locaux alors qu'ils n'ont pas encore démarré leurs activités commerciales. En cas d'excès, ces derniers sont contraints de verser plus de 9 mois245(*). La trimestrialisation des loyers et le paiement du dépôt de garantie représentent alors plus de 11,25 % de leur chiffre d'affaires annuel. Cette pratique est bien souvent constitutive d'un abus car non justifiée par les conditions du bail ou le local concerné.

2.1.3. Simplification de la restitution du dépôt de garantie au profit du preneur du bail commercial, en cas de vente du local loué

L'obligation de restitution du dépôt de garantie à la charge du bailleur initial, en cas de vente d'un local commercial loué, résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation en application des règles de droit commun (Cass. 3e civ., 25 févr. 2004, n° 02-16.589 ; Cass. 3e civ., 28 juin 2018, no 17-18.100). La Cour de cassation considère que la restitution du dépôt de garantie versé lors de la conclusion du bail reste une dette personnelle du propriétaire initial du local vendu, qui est seul tenu de la restitution.

La règle était la même en matière de baux d'habitation jusqu'à l'intervention du législateur qui a posé la règle inverse.

Aux termes de l'alinéa 8 de l'article 22 de la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, introduit par la loi no 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, c'est le propriétaire au jour du terme du bail qui est débiteur de la restitution.

En pratique, l'état du droit est préjudiciable aux preneurs de baux commerciaux qui louent des locaux pour une durée excédant, bien souvent, neuf ans au regard des renouvellements. En effet, dans la mesure où ces contrats sont généralement anciens et que les locaux concernés font fréquemment l'objet de cessions, le commerçant locataire qui souhaite quitter les lieux, est confronté à des difficultés au moment de la restitution de son dépôt de garantie, alors que les montants concernés peuvent être importants. Dans le cas où le bailleur initial est introuvable ou insolvable, le locataire se trouve dans l'impossibilité de récupérer le montant déposé au titre du dépôt de garantie.

D'ailleurs, face à cette situation, la Cour de cassation, depuis son rapport annuel de 2018246(*), préconise un alignement du régime de la restitution du dépôt de garantie en matière de bail commercial sur celui qui existe en matière de bail d'habitation.

Une intervention législative est nécessaire pour revenir sur la jurisprudence constante de la Cour de cassation en matière de dépôt de garantie.

2.1.4. Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Une majorité des recours déposés contre les avis et décisions des CDAC le sont par des enseignes concurrentes. Ainsi, les concurrents ont été à l'origine de 87% des recours en 2021 et de 86 % en 2020.

En 2022, la CNAC a examiné 180 recours, dont 157 recours émanant d'enseignes concurrentes247(*), soit un taux de 87%, stable par rapport aux années passées.

Il apparait que si la majorité des recours émanent de concurrents, la réforme de la législation sur l'aménagement commercial en 2008 a pourtant fixé des critères en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs pour la délivrance d'une autorisation d'exploitation commerciale à l'exclusion de tout critère économique.

La multiplication de recours, parfois dilatoires, et ne démontrant pas en quoi un projet est susceptible d'affecter l'activité des requérants de façon suffisamment directe et significative entraine une prolongation des délais d'instruction. Cette prolongation a des conséquences d'autant plus importantes pour les projets nécessitant un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale (soit le cas de 70 % des AEC en 2022).

Entre 2017 et 2022, le taux d'autorisation annuel des demandes d'exploitation commerciale dans les CDAC a varié entre 84 % et 88 %.

Sur la même période, le taux d'autorisation annuel en CNAC a varié entre 43 % et 59 %. Entre 29 % et 41 % de ces décisions ont été déférées à la juridiction administrative.

En 2022, la juridiction administrative s'est prononcée au fond sur 49 avis et décisions de la CNAC rendues au titre des années précédentes. Elle en a annulé 10 et confirmé 39.

En comparant les décisions de CDAC au nombre de décision de CNAC, on peut estimer qu'environ 30 % des décisions de CDAC font l'objet de recours auprès de la CNAC. A titre de comparaison, l'étude d'impact de la mesure visant à lutter contre les recours abusifs contre les permis de construire de la loi « Elan », estimait à entre 1,2 % et 1,6 % les recours contre les permis de construire.

La différence de taux d'acceptation entre CDAC et CNAC est lié à la méthode de délivrance des autorisations d'exploitation commerciale. L'article L.752-6 du code de commerce indique que les commissions d'aménagement commercial « prennent en considération » 13 critères pour rendre leur avis. Ces critères ne sont pas examinés dans un rapport de conformité mais par une méthode de type « faisceau d'indice » qui laisse une large part d'interprétation aux commissions. Le taux d'acceptation très différent entre CDAC et CNAC est notamment dû à cette méthode et aux différences de composition de ces commissions.

Il est estimé empiriquement qu'environ 15 à 20 % des requérants en CNAC seraient concernés par la présente disposition et ne pourraient plus démontrer leur intérêt pour agir. Il s'agit par exemple de très grandes surfaces (de type hypermarchés) qui attaquent les autorisations accordées à de bien moindre surfaces (drive comportant peu de pistes de ravitaillement, supermarchés ou commerces spécialisés d'un peu plus de 1 000 m² de surface de vente).

2.1.5. Mesure relative aux ensembles commerciaux

Le regroupement de cellules vacantes au sein d'un même ensemble commercial est autorisé et régi par l'article L.752-2 du code de commerce. Néanmoins, les conditions cumulatives sont strictes. Les mesures identifiées, à savoir le regroupement et les transferts des droits commerciaux autorisés au sein d'un même ensemble commercial, visent à simplifier, accélérer et rendre plus lisible la procédure d'autorisation d'exploitation commerciale. Concrètement, ces opérations visent à faciliter la réutilisation d'un local inexploité ou le réaménagement intérieur d'un ensemble commercial sans augmenter la surface de vente autorisée et sans générer une nouvelle consommation du foncier.

Par ces deux assouplissements législatifs, les ensembles commerciaux existants pourront évoluer de façon beaucoup plus agile et rapide. Actuellement, le délai de délivrance d'une AEC est au minimum de 4 mois (délai d'instruction et décision - avis de la CDAC). Ce délai est majoré :

- En cas de recours devant la CNAC : le requérant dispose d'un mois pour saisir cette dernière à compter de la publication de la décision - avis de la CDAC. Ensuite, la CNAC dispose de quatre mois pour rendre un avis - décision puis d'un mois pour le notifier : le délai de délivrance de l'AEC est ainsi rallongé de six mois ;

- En cas de contentieux devant la Cour d'appel administrative (CAA) ; le requérant dispose de deux mois pour la saisir à compter de la publication de la décision de la CNAC. A la suite d'une décision rendue par la CAA, un recours peut être éventuellement formé devant le Conseil d'État : le délai de délivrance de l'AEC est alors rallongé de six mois à dix ans.

2.1.6. Mesure relative à la déclaration de travaux

L'autorisation est délivrée par le préfet ou le maire, après instruction d'une durée de 4 mois, le silence valant acceptation (R. 122-21 CCH : « (...) à défaut de notification d'une décision expresse dans le délai de quatre mois mentionné à l'article R. 122-16, l'autorisation de travaux est considérée comme accordée »).

A noter que la règlementation prévoit déjà que lorsque le centre commercial en exploitation dispose d'une installation d'extinction automatique à eau appropriée aux risques, les exploitations de moins de 300 m² peuvent ne pas faire l'objet d'une visite de réception lorsque les rapports de vérifications techniques les concernent concluent à la conformité des locaux par rapport aux dispositions réglementaires, à charge pour le Responsable Unique de Sécurité (RUS) de centraliser ces rapports de vérification et de les transmettre au secrétariat de la commission de sécurité compétente (article M.1 de l'arrêté du 25 juin 1980 précité).

Alors que les travaux dans les exploitations de moins de 300 m² situés au sein d'un centre commercial sont d'ampleurs limités et encadrés par la réglementation ERP qui s'applique à l'ensemble du centre commercial, la procédure d'autorisation de travaux pour ces exploitations ajoute des délais importants au regard des enjeux de protection contre le risque d'incendie et retarde l'ouverture des commerces.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

2.2.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

L'instauration d'un paiement mensuel du loyer sur demande du preneur vise à limiter et réguler les sorties importantes de trésorerie liées au financement de la location des locaux commerciaux, en faveur des commerçants, qu'il s'agisse de ceux débutant leur activité ou ceux en cours d'exploitation depuis plusieurs années, eu égard à la situation économique difficile qu'ils connaissent. L'augmentation durable des sorties de trésorerie rend nécessaire la mise en place de nouvelles garanties en leur faveur.

Le plafonnement légal du dépôt de garantie à un trimestre a pour principal objectif de rééquilibrer les relations contractuelles. Il corrigera les baux commerciaux pour lesquels les commerçants se sont acquittés d'un dépôt de garantie excessif, en décalage avec les usages du secteur. Il permettra également d'éviter la persistance des pratiques inhabituelles pour l'avenir.

Le transfert de l'obligation de restituer le dépôt de garantie au nouveau bailleur vise à simplifier les démarches des commerçants-locataires qui quittent leurs locaux et souhaitent, dans ce contexte, obtenir la restitution des sommes versées pour le dépôt de garantie.

2.2.2. Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Cet ajustement législatif vise à limiter et à rationaliser l'intérêt à agir devant la CNAC afin de s'adapter aux évolutions du marché et du cadre législatif. Par ailleurs, la limitation de l'intérêt à agir permettra de réduire les recours purement dilatoires ainsi que les délais d'instruction des demandes de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.

2.2.3. Mesure relative aux ensembles commerciaux

Ces ajustements législatifs visent à moderniser et rationnaliser les équipements commerciaux existants afin de s'adapter aux évolutions du marché et du cadre législatif. Par ailleurs, l'exonération d'AEC par la sécurisation juridique des pratiques de re-ventilation des droits commerciaux existants, permettra :

- Un gain de temps très important (absence d'examen en CDAC) et de recours éventuels post décision CDAC) ;

- Aux ensembles commerciaux de participer aux objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols en facilitant la réutilisation et la réaffectation d'espaces existants dans un délai restreint.

2.2.4. Mesure relative à la déclaration de travaux

Accélérer l'ouverture des exploitations de plusieurs mois en passant d'une procédure d'autorisation de travaux à une procédure de déclaration de travaux dans certains cas précis. Ces cas seront précisés par norme règlementaire. Ils viseront des exploitations de taille limitée (moins de 300 m²), situés à l'intérieur de centres commerciaux disposant d'un système d'extinction adapté aux risques d'incendie. La nature de l'activité de ces exploitations ne devra pas être modifiée. Par exemple, cette procédure pourra être utilisée lors de l'ouverture d'un commerce si la précédente exploitation était également un commerce, mais pas si elle était un restaurant. La déclaration de travaux devra être certifiée par un tiers présentant des garanties de compétence et d'indépendance, dans des conditions définies par décret. L'autorité compétente pourra s'opposer aux travaux dans un délai déterminé réglementairement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Afin d'éviter une intervention législative dans la liberté contractuelle des parties, la voie conventionnelle a d'abord été privilégiée. Toutefois, bailleurs et preneurs des baux commerciaux ne sont pas parvenus à faire évoluer leurs pratiques, notamment par le biais de dialogues ou d'instruments de droit souple tels qu'une charte ou un guide de bonne pratique.

En l'absence de résultats, les commerçants appellent fortement à une évolution de la pratique en faveur de la mise en place du paiement mensuel du loyer et d'une limitation du montant maximum exigé au titre du dépôt de garantie

S'agissant de la mesure relative à la restitution du dépôt de garantie en cas de vente du local loué, compte tenu de l'état de la jurisprudence, aucune autre option n'a été envisagée.

3.1.2. Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Plusieurs options ont été envisagées.

Modifier l'article L. 752-1 du code de commerce qui prévoit que les projets de création ou d'extension de magasins ou d'ensembles commerciaux d'une surface de vente d'au moins 1 000 m² sont soumis à autorisation d'exploitation commerciale délivrée par une commission d'aménagement commercial. Il a été envisagé d'augmenter ce seuil de 1 000 m² supplémentaires, ce qui aurait pour conséquence de réduire le nombre de projets commerciaux examinés par les CDAC et par conséquent le nombre de recours déposés devant la CNAC.

Cette option aurait eu pour effet de faire échapper à l'examen des CDAC, composées principalement d'élus locaux, un nombre important de projets commerciaux pouvant avoir des effets économiques et structurels localement.

Limiter les recours des concurrents aux projets devant prendre place sur le périmètre d'un territoire bénéficiant de dispositifs de soutien institutionnel de type programmes « Action Coeur de Ville », « Petites Villes de Demain », « Opération de Revitalisation du Territoire », etc.

Cette option avait pour objectif de limiter les recours des concurrents pour des projets susceptibles de s'installer sur des territoires donnés connaissant des difficultés récurrentes et reconnues, notamment dans les centres-villes, et pour lesquels des mesures de soutien sont mises en place.

Cependant, cette option, après examen, est apparue source de complexité, notamment en ce qui concerne la détermination des mesures de soutien susceptibles de justifier une limitation des recours des concurrents.

La solution proposée a ainsi semblé la plus simple, efficace et respectueuse du cadre global de l'aménagement commercial tout en permettant d'accélérer la réalisation des projets.

3.1.3. Mesure relative aux ensembles commerciaux

Aucune autre option n'a été envisagée.

3.1.4. Mesure relative à la déclaration de travaux

Il aurait pu être envisagé de remplacer l'actuel système de demande d'autorisation des travaux pour les boutiques de moins de 300 m² situées dans les centres commerciaux et dotés d'un Responsable Unique de Sécurité (RUS) par un système de déclaration. Ce régime déclaratif impliquerait le respect de normes minimales ou d'un cahier des charges préalablement établi et pourrait être assorti de visites a posteriori de la commission de sécurité. Cependant le RUS ne dispose pas de compétence en matière de sécurité incendie.

3.2. OPTION RETENUE

3.2.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

L'intervention du législateur, qui constitue une solution de dernier recours, est désormais retenue sans autre alternative possible, pour l'atteinte des objectifs recherchés. Des modifications des dispositions du code de commerce sont donc requises.

Il est alors proposé d'inscrire dans la loi, le principe de paiement mensuel pour tout preneur d'un local commercial qui en fait la demande. Les parties ne pourront pas déroger à cette règle dès lors que le commerçant locataire en aura fait la demande, afin de garantir son effectivité. Compte tenu de l'objectif poursuivi, cette mesure s'appliquera aux baux commerciaux conclus ou renouvelés postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi ainsi qu'aux contrats en cours à cette date.

L'instauration du principe de mensualisation n'a pas d'incidence sur le terme contractuel et ne fait pas obstacle à ce que les parties décident librement des modalités de transmission de la preuve du paiement du loyer. Ainsi, bailleurs et preneurs pourront, d'un commun accord, maintenir l'usage actuel consistant à transmettre une quittance à un rythme trimestriel, afin de faciliter la gestion comptable de ces entreprises.

En outre, il est proposé de limiter le montant qui peut être demandé à titre de garantie, par le bailleur au preneur d'un bail pour un local commercial. Le montant du dépôt de garantie ne pourra désormais excéder le montant des loyers dus pour un trimestre. Cette disposition, également d'ordre public, est applicable aux baux conclus après l'entrée en vigueur de la loi.

Enfin, il est envisagé de mettre à la charge du bailleur au jour de la fin du bail, la restitution du dépôt de garantie. Désormais, à la suite d'une mutation d'un local commercial loué, l'obligation de restitution sera à la charge du nouveau bailleur, peu important que l'ancien bailleur l'ait ou non transféré à son successeur ou que le locataire en ait été ou non avisé. Pour permettre aux propriétaires d'intégrer cette modification dans le cadre des futures cessions de locaux commerciaux, ces dispositions seront applicables aux mutations intervenant à l'expiration d'un délai de trois mois après la date d'entrée en vigueur de la loi.

3.2.2. Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Il est proposé de modifier l'article L. 752-17 du code de commerce pour exiger d'un professionnel souhaitant déposer un recours devant la CNAC contre l'avis de la CDAC qu'il démontre que son activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise, est susceptible d'être affectée de manière significative et directe.

Le recours déposé par un concurrent qui se contenterait, comme c'est le cas actuellement, d'indiquer que son activité est susceptible d'être impactée par le projet sera déclaré irrecevable par la CNAC. Il en sera de même si les effets du projet sur l'activité du concurrent sont estimés aléatoires et indirects.

3.2.3. Mesure relative aux ensembles commerciaux

L'article L.752-2 du code de commerce est modifié afin de permettre à ces ensembles commerciaux une réorganisation interne souple.

Premièrement, le critère de « voisinage » est retiré dans le cas de regroupement de cellules vacantes ayant conservé leurs droits commerciaux. Ainsi, le regroupement de magasins au sein d'un même ensemble commercial pourrait être réalisé sans AEC à condition :

- Qu'il ne soit pas créateur de surface de vente supplémentaire par rapport à la surface autorisée initialement pour le centre commercial ;

- Qu'il n'excède pas les 2 500 m² ou les 1 000 m² de surface de vente lorsque la nouvelle activité est à prédominance alimentaire.

Deuxièmement, le cumul et le transfert des droits commerciaux existants d'une ou plusieurs cellules commerciales vers une ou plusieurs cellules inexploitées depuis plus de 3 ans est sécurisé juridiquement.

3.2.4. Mesure relative à la déclaration de travaux

Pour ne pas faire appel au « responsable unique de sécurité » qui ne dispose pas de compétence en matière de sécurité incendie, il est proposé de créer, dans le CCH, une procédure de déclaration pour les travaux effectués dans un ERP de taille limité situé dans un centre commercial disposant d'un système d'extinction adapté aux risques d'incendie et sans changement d'activité. Cette déclaration est certifiée par un tiers présentant des garanties de compétence et d'indépendance, dans des conditions définies par décret. L'autorité compétente pourra s'opposer aux travaux dans un délai déterminé réglementairement.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

L'instauration du principe de paiement mensuel du loyer sur demande du preneur à bail d'un local commercial requiert la création d'un nouvel article L. 145-32-1 au sein du code de commerce et la modification de l'article L. 145-15 de ce code.

En outre, le plafonnement du montant exigé au titre du dépôt de garantie dans le cadre d'un bail commercial destiné à un usage commercial nécessite une modification de l'article L. 145-40 du code de commerce.

Par ailleurs, la mise en place d'une obligation d'une restitution du dépôt de garantie à la charge du dernier bailleur d'un local commercial loué requiert également une modification de l'article L. 145-40 du code de commerce.

B - Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

A - La mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir en matière d'aménagement commercial modifie le I de l'article L.752-17 du code de commerce.

C - Mesure relative aux ensembles commerciaux

Les mesures visant à faciliter l'évolution des ensembles commerciaux modifient l'article L.752-2 du code de commerce.

D - Mesure relative à la déclaration de travaux

L'article L. 122-3 du CCH qui définit la procédure d'autorisation de travaux en ERP est complété par un alinéa pour créer la procédure de déclaration de travaux en ERP.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Les deux mesures envisagées sont compatibles avec les droits et libertés garanties par le droit de l'Union européenne et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment les libertés économiques et la libre concurrence.

B - Mesures relatives à l'aménagement commercial

Le droit d'établissement et la liberté de prestation de services constituent des « libertés fondamentales » au sens du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de la directive « services » de 2006248(*).

La Cour de Justice de l'Union européenne a confirmé en 2018 que le commerce de détail de produit est un « service » au sens de ladite directive « services »249(*).

Ø Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

La modification envisagée de l'article L.752-17 du code de commerce permet de limiter les recours déposés par des concurrents contre les AEC délivrées par les CDAC ainsi que les contraintes de délais pour les porteurs de projets commerciaux lorsque le requérant, qui est un concurrent commercial, ne justifie pas d'un intérêt à agir significatif et direct. Cette modification ne constitue pas pour autant une atteinte au droit à un recours effectif prévu à l'article 13 de la Convention Européenne des Droits de l'homme puisque le droit au recours demeure.

Ø Mesure relative aux ensembles commerciaux

La modification envisagée de l'article L.752-2 du code de commerce permettrait d'exempter d'AEC les regroupements et les transferts de surfaces de vente de magasins situés au sein d'un ensemble commercial existant afin de faciliter le réaménagement intérieur des ensembles commerciaux. La facilitation de ces opérations favorisera la mixité fonctionnelle des ensembles commerciaux et sans déroger au principe de sobriété foncière. En permettant un allègement du régime des autorisations administratives nécessaires à l'implantation d'une activité commerciale lors d'un transfert de droits commerciaux existants, cette mesure apparait conforme à la directive « services ».

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

La mesure envisagée est compatible avec les droits et libertés garanties par le droit de l'Union européenne et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment les libertés économiques et la libre concurrence.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Néant.

B - Mesures relatives à l'aménagement commercial

Ø Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Cette mesure s'inscrit dans une démarche de simplification de la législation relative à l'aménagement commercial. Elle contribue à limiter les obstacles aux projets de création ou d'extension d'équipements commerciaux. Elle contribue aussi à la dynamique des territoires, à leur attractivité et à leur développement économique.

Ø Mesure relative aux ensembles commerciaux

Ces nouvelles mesures s'inscrivent dans une démarche d'ensemble visant à favoriser l'évolution des ensembles commerciaux existants et lutter contre la vacance commerciale au sein de ces établissements250(*). Elles contribueront donc à la dynamique des territoires, à leur attractivité et à leur développement économique.

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

La nouvelle mesure s'inscrit dans une démarche d'ensemble visant à favoriser l'évolution rapide des centres commerciaux existants et lutter contre la vacance commerciale au sein de ces établissements. Elle contribuera donc à la dynamisation des territoires, à leur attractivité et à leur développement économique.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Ø Instauration du paiement mensuel du loyer pour le preneur à bail d'un local commercial

Bien que le niveau de loyer des locaux commerciaux dépend de plusieurs facteurs (chiffre d'affaires, localisation géographique, facilités de desserte, taille du local), selon les fédérations représentatives du secteur (Alliance du commerce, PROCOS), le loyer représente en moyenne 15 % du chiffre d'affaires des commerçants locataires. Dès lors, avec le paiement trimestriel du loyer conduit à ce que ces commerçants versent, à chaque début de trimestre, au titre du loyer, 3,75 % de leur chiffre d'affaires annuel.

Avec le paiement mensuel, le montant dû chaque mois par le commerçant correspondra seulement à 1,25 % du chiffre d'affaires annuel. La trésorerie des commerçants s'en trouvera dès lors affectée positivement.

Pour autant, cette modification du rythme de paiement aura un impact limité sur les bailleurs, la mensualisation ayant seulement pour effet de réguler le flux de trésorerie. Elle n'entraine pas de diminution du montant annuel des loyers perçu par le bailleur, ni ne conduit à une restitution des sommes perçues pour les baux en cours d'exécution, car la mise en place de la mensualisation ne prendra effet qu'à la prochaine échéance de paiement du loyer stipulée par le bail.

Ø Limitation du montant exigé pour le dépôt de garantie à trois mois de loyers commerciaux

La limitation du dépôt de garantie envisagée est sans incidence sur la situation des bailleurs qui exigent le versement d'un montant équivalent à 3 mois de loyer maximum pour le dépôt de garantie. En effet, elle n'entrainera aucun changement de leur pratique.

Pour les bailleurs exigeant plus de trois mois de loyer, l'impact de cette mesure est limité. Ces derniers ne pourront plus exiger des dépôts de garantie trop élevés lors de la conclusion ou du renouvellement des baux. Ils pourront demander d'autres garanties si le bail ou le local loué le justifie (cautionnement ou garantie à première demande).

En revanche, l'impact de cette mesure est notable pour les commerçants-locataires. En exigeant un montant maximal de trois mois pour le dépôt de garantie le décaissement de la part des locataires serait limité à 3,75 % du chiffre d'affaires annuel. Par ailleurs, pour les commerçants contraints de verser un dépôt de garantie dont le montant excède trois mois de loyers, l'obligation de restituer les sommes excédentaires leur permettra de récupérer 3 à 6 mois de loyer, soit entre 3,75% et 7,5% de son chiffre d'affaires annuel.

B - Mesures relatives à l'aménagement commercial

Ø Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

La limitation des recours déposés par des concurrents contre les autorisations d'exploitation commerciales permettra de réduire les délais de délivrance d'AEC et de sécuriser juridiquement les projets de création ou d'extension d'équipements commerciaux.

Ø Mesure relative aux ensembles commerciaux

L'exonération d'AEC par la sécurisation juridique des pratiques de re-ventilation des droits commerciaux existants, permettra de faciliter la réutilisation et la réaffectation d'espaces existants dans un délai restreint. Ces mesures impacteront potentiellement les 838 centres commerciaux recensés sur le territoire français en 2020251(*).

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

Cette disposition vise à réduire les délais administratifs avant ouverture d'une exploitation. Elle pourra permettre à certaines exploitations d'ouvrir plusieurs mois plus tôt que dans la situation actuelle.

4.2.3. Impacts budgétaires

Néant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

4.3.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Néant.

4.3.2. Mesures relatives à l'aménagement commercial

Les collectivités ne sont pas directement concernées par ces mesures : l'attribution d'une autorisation d'exploitation commerciale ne relève pas de leur compétence.

Toutefois, elles peuvent être indirectement concernées à la fois en tant que membres des CDAC amenées à apprécier les effets de projets soumis à AEC et dans leur politique locale d'aménagement du territoire.

4.3.3. Mesure relative à la déclaration de travaux

Le passage d'une procédure d'autorisation de travaux à une procédure de déclaration de travaux en ERP conduira le maire à ne plus délivrer d'autorisation de travaux lorsque celui-ci est autorité compétente (R.122-7 du CCH).

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

4.4.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Néant.

4.4.2. Mesures relatives à l'aménagement commercial

Les services instructeurs en Direction départementale des territoires et de la mer (DDT-M) pour les CDAC et à la Direction générale des entreprises (DGE) pour la CNAC devront intégrer ces évolutions réglementaires.

A - Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

En matière d'AEC, les administrations centrales de l'État supporteront une charge moindre en matière d'instruction et de suivi administratif des dossiers de recours devant la CNAC.

B - Mesure relative aux ensembles commerciaux

En matière d'AEC, les services déconcentrés et des administrations centrales de l'État supporteront une charge moindre en matière d'instruction et de suivi administratif des dossiers de demande d'AEC dans le cadre des commissions d'aménagement commercial.

4.4.3. Mesure relative à la déclaration de travaux

Le passage d'une autorisation de travaux à une déclaration allègera la charge des services instructeurs en département en matière de réglementation incendie et accessibilité.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Néant.

B - Mesures relatives à l'aménagement commercial

Ø Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Néant.

Ø Mesure relative aux ensembles commerciaux

Cette disposition permettra aux ensembles commerciaux existants de développer leur mixité fonctionnelle et de répondre aux évolutions des modes de consommation de manière pérenne.

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

Néant.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La mesure relative à la déclaration de travaux modifie la procédure qui permet de vérifier le respect de la réglementation relative à l'accessibilité des établissements recevant du public (ERP) aux personnes en situation de handicap. Dans certains cas très limités, le contrôle « a priori » de l'autorisation de travaux sera transformé en contrôle « a posteriori » de la déclaration de travaux.

Cette disposition ne modifie toutefois en rien les règles d'accessibilité des ERP. Ces ERP devront toujours être accessibles aux personnes en situation de handicap, seule la manière de contrôler les travaux est modifiée.

On notera enfin que la procédure d'ouverture au public n'est pas modifiée ce qui permet de maintenir un contrôle de la bonne accessibilité des ERP.

Ainsi, cette disposition n'aura pas d'impact sur les personnes en situation de handicap.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Ø Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Pour l'exercice de leur activité, certaines professions règlementées sont susceptibles de recourir au bail commercial ou de placer volontairement le contrat de bail professionnel sous le régime du bail commercial. Dans ce cas, les mesures envisagées sont susceptibles de les concerner, en particulier s'agissant de la restitution du dépôt de garantie en cas de vente d'un local loué. La mensualisation du loyer et les

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

4.6.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Les baux commerciaux peuvent être conclus par des personnes physiques comme des personnes morales. Les mesures envisagées auront donc des implications sur les particuliers parties à un bail commercial, en qualité de preneurs d'un bail ou de bailleurs d'un local à usage commercial et sur ceux qui en concluront dès l'entrée en vigueur de la présente loi.

4.6.2. Mesures relatives à l'aménagement commercial

A - Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Cette disposition limitera les possibilités de recours pouvant être portées par des sociétés concurrentes mais n'aura pas d'effet sur les particuliers. Le droit au recours sur les permis de construire auxquels sont généralement attachés les AEC n'est pas modifié.

B - Mesure relative aux ensembles commerciaux

Néant.

4.6.3. Mesure relative à la déclaration de travaux

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

4.7.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Néant.

4.7.2. Mesures relatives à l'aménagement commercial

A - Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

Néant.

B - Mesure relative aux ensembles commerciaux

L'exonération d'AEC par la sécurisation juridique des pratiques de re-ventilation des droits commerciaux existants, permettra aux ensembles commerciaux de participer aux objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols en facilitant la réutilisation et la réaffectation d'espaces existants dans un délai restreint, sans passer par de nouvelles constructions. Par ailleurs, elle permettra aux ensembles commerciaux existants de développer leur mixité fonctionnelle et de répondre aux évolutions des modes de consommation de manière pérenne.

4.7.3. Mesure relative à la déclaration de travaux

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

5.1.1. Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Dans le domaine des baux commerciaux, aucune consultation ne revêt un caractère obligatoire.

Néanmoins, à titre facultatif, les organisations professionnelles représentatives du secteur du commerce ont été associées à une réflexion générale sur les baux commerciaux au travers des Rencontres de la simplification, lancées en 2023, et du Conseil National du Commerce.

Le Conseil National du Commerce est une instance partenariale, présidée par le ministre en charge du commerce, ayant pour objet d'associer les acteurs du commerce aux politiques publiques concernant le commerce, institué par le décret n° 2023-461 du 14 juin 2023. Il comprend notamment des acteurs publics nationaux et locaux, des entreprises ainsi que des organisations professionnelles du commerce. Au sein de cet organisme, un groupe de travail dédié à cette problématique a été créé.

Dans le cadre de ces travaux, les représentants des fédérations de commerçants (Alliance du commerce, PROCOS), les représentants des bailleurs (la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires, la Fédération des Entreprises Immobilières) et d'autres experts et professionnels du secteur commercent tels que des avocats et experts judiciaires en immobilier commercial et d'entreprise, ont formulé soixante-trois propositions parmi lesquelles figurent le paiement mensuel du loyer et la limitation du montant du dépôt de garantie.

En outre, de manière individuelle, les organisations professionnelles suivantes ont été consultées :

- l'Alliance du Commerce (représentant des enseignes) ;

- la Fédération représentative du commerce spécialisé (PROCOS) ;

- la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires (FACT) représentant notamment les grandes foncières commerciales ;

- des foncières cotées.

Les organisations représentant les commerçants accueillent favorablement ces deux mesures. Celles représentant les bailleurs n'y sont pas opposées sur le principe dès lors que des contreparties sont mises en place, afin de maintenir un équilibre entre les parties. Le gouvernement poursuit un travail de concertation avec les parties prenantes à cette fin.

5.1.2. Mesures relatives à l'aménagement commercial

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, qui a émis un avis favorable tacite, le 11 avril 2024.

5.1.3. Mesure relative à la déclaration de travaux

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le présent article a été soumis à l'examen du Conseil national d'évaluation des normes, qui a émis un avis favorable tacite, le 11 avril 2024.

En application de l'article L.146-1 du code de l'action sociale et des familles, le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) a été saisi du présent article et a émis un avis défavorable le 19 avril 2024.

En application de l'article D. 121-12 du CCH, le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE) a été saisi du présent article et a émis un avis favorable le 17 avril 2024.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

La mesure relative au paiement mensuel du loyer est d'application immédiate. Elle s'appliquera aux baux commerciaux conclus ou renouvelés postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi (le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française), mais également aux contrats en cours conclus avant cette date.

S'agissant de la limitation du dépôt de garantie, cette mesure ne s'appliquera baux conclus à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi (le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française).

La mesure relative au transfert de l'obligation de restitution du dépôt de garantie au nouveau bailleur ne s'appliquera qu'aux mutations intervenant à l'expiration d'un délai de trois mois après la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le lendemain de sa publication au Journal officiel de la République française.

B - Mesures relatives à l'aménagement commercial

Ces dispositions s'appliqueront au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

Cette disposition entre en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Les dispositions envisagées s'appliquent de plein droit dans les départements et régions d'Outre-Mer (Guadeloupe, Martinique, Réunion, Guyane, Mayotte) ainsi qu'à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre et Miquelon.

Concernant l'application des mesures envisagées aux îles Wallis et Futuna, cette collectivité étant régie par le principe dit de « spécialité législative », en vertu duquel les lois et règlements n'y sont applicables que sur mention expresse du texte en cause ou s'ils y ont été rendus applicables par un texte spécial. Le IV du présent article prévoit d'appliquer ces dispositions dans les îles Wallis et Futuna.

Concernant leur application à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie, ces collectivités étant compétentes en matière de droit commercial, l'Etat ne peut pas intervenir dans ce domaine.

B - Mesure relative à l'aménagement commercial

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception de la Polynésie française, de la Nouvelle Calédonie, de Wallis et Futuna et des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

Départements d'Outre-Mer

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion

Application de plein droit

Mayotte

Application de plein droit

Collectivités d'Outre-Mer

Saint-Martin et Saint-Barthélemy

Application de plein droit

Saint-Pierre-et-Miquelon

Application de plein droit

Autres (Polynésie française, Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, TAAF)

Dispositions non applicables

5.2.3. Textes d'application

A - Mesures relatives au régime des baux commerciaux

Les mesures envisagées n'appellent aucun texte réglementaire d'application.

B - Mesure relative à l'aménagement commercial

Ø Mesure relative à la limitation de l'intérêt à agir

La présente mesure n'appelle aucun texte réglementaire d'application.

Ø Mesure relative aux ensembles commerciaux

La présente mesure n'appelle aucun texte réglementaire d'application.

C - Mesure relative à la déclaration de travaux

La présente mesure nécessite un décret en Conseil d'Etat.

TITRE XI - ASSURER UNE SIMPLIFICATION DURABLE

Article 27 - Instaurer un test petites et moyennes entreprises

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Si le coût macro-économique de la réglementation pesant sur les entreprises ne fait pas l'objet d'un consensus et peut varier du simple au double selon la méthode retenue252(*), il a toutefois été évalué de façon très globale par l'Union européenne en 2006 à 3,7% du PIB253(*), cette mesure n'ayant pas été actualisée depuis. L'enjeu particulier qui s'attache à la charge administrative pesant sur les TPE-PME est notamment lié à la difficulté à mesurer l'impact spécifique des nouvelles normes sur les TPE-PME en tenant compte de la différence de moyens inhérente à leur taille.

L'évaluation de cette charge est prévue dans l'obligation d'étude d'impact des projets de loi en application de l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution qui inclut «  l'évaluation des conséquences économiques, financières, sociales et environnementales, ainsi que des coûts et bénéfices financiers attendus des dispositions envisagées pour chaque catégorie d'administrations publiques et de personnes physiques et morales intéressées, en indiquant la méthode de calcul retenue ». Les projets de texte réglementaires ayant un impact sur les entreprises, particulièrement les PME, sont également soumis à une évaluation préalable obligatoire qui se traduit par la production d'une fiche d'impact, en application de la circulaire du 17 février 2011 relative à la simplification des normes concernant les entreprises et les collectivités territoriales. Néanmoins, compte tenu de la difficulté qui s'attache à mesurer, pour l'ensemble des politiques publiques concernées relevant de différents ministères, l'effet spécifique des nouvelles normes législatives sur la catégorie des TPE-PME, il est proposé de mettre en place un dispositif d'évaluation dédié qui permettra de professionnaliser et d'objectiver cette mesure, à travers la réalisation ex-ante d'un « test PME », intégré dans le processus d'évaluation préalable des projets de lois.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'obligation d'évaluation préalable de l'impact des projets de loi est prévue par l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Sans objet.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

L'instauration d'un test PME ou un équivalent existe déjà dans plusieurs pays européens254(*), notamment :

- Aux Pays-Bas où le dispositif de « test PME » tel que déployé en mai 2019 permet de garantir pour les nouvelles lois et réglementations que les petites entreprises sont impliquées à un stade précoce dans les travaux législatifs et réglementaires. Dans la pratique, ce « test PME » permet une discussion avec des entrepreneurs de PME, pour s'assurer que les nouvelles lois et réglementations sont réalisables et praticables / applicables pour les PME et qu'elles impliquent la charge réglementaire la plus faible possible. Le « test PME » peut aussi s'appliquer aux réglementations existantes. L'objectif est de réaliser un contrôle un an après l'entrée en vigueur de règles, pour procéder à des ajustements rapides de la mise en oeuvre ou de la supervision sur la base des plaintes des entrepreneurs ;

- En Allemagne où le test PME est obligatoire depuis le 1er janvier 2016. Ce dernier permet de contrôler à un stade précoce d'éventuelles alternatives de réglementation dans le processus législatif et de décrire les impacts financiers d'un projet législatif sur les PME afin « d'éviter là où cela est possible des charges bureaucratiques pour les PME » ;

- En Suisse où depuis 1999, dans la procédure législative, il doit être tenu compte des conséquences économiques et administratives de toute nouvelle loi sur les PME. Le « test PME » doit fournir des informations « pour s'assurer que les entreprises ne soient pas surchargées par des surcroîts de tâches administratives, pour leur épargner des investissements supplémentaires ou des entraves à la gestion et pour réduire aussi peu que possible leur liberté de manoeuvre ». Dans ce but, l'administration doit consulter une douzaine de PME, le panel devant être « proche de la structure des PME qui seront concernées par la règlementation ». Depuis 2013, les tests PME sont réalisés par les offices fédéraux dans le cadre de l'analyse d'impact de la réglementation (AIR). Le test de compatibilité PME est obligatoire pour tous les projets de loi touchant au minimum 10 000 entreprises. Il est recommandé lorsque plus de 1 000 entreprises, ou qu'une branche ou une région, sont touchées. Il est qualitatif et non quantitatif. En Grande-Bretagne, où le Comité de politique réglementaire (RPC) fournit une évaluation indépendante du coût de la nouvelle réglementation sur les entreprises et examine les évaluations ministérielles d'impact pour s'assurer qu'elles sont adaptées à l'objectif. Les administrations sont assistées par le Better Regulation Executive (BRE), organe de contrôle indépendant qui fournit un contrôle externe, transparent et en temps réel sur la qualité de l'argumentation et des analyses prônant les changements réglementaires qui affectent les entreprises et la société civile. Il n'est obligatoirement saisi que si le projet de norme a un coût direct net annuel sur les entreprises supérieur à cinq millions de livres sterling. En deçà, son avis est facultatif. La méthode d'évaluation de l'impact de la réglementation (AIR) est utilisée pour toutes les propositions réglementaires importantes (sous réserve d'un seuil) afin de s'assurer que les décisions politiques sont prises sur la base de preuves solides, que les alternatives (y compris les possibilités non réglementaires) ont été examinées, que les impacts sociaux, environnement, commerce, risques, impacts spécifiques sur les petites et micro-entreprise, ont été étudiées. L'impact sur les PME est particulièrement pris en considération. L'étape du « small and micro business assessment » (SaMBA) pour les entreprises de moins de 10 salariés, obligatoire depuis 2015, encourage les départements et les régulateurs à réfléchir à l'impact que la mise en oeuvre d'une réglementation donnée aura sur les petites ou micro-entreprises. Si l'impact est disproportionné, les PME sont exemptées ou la norme leur est appliquée de façon différenciée. Enfin, cinq ans après l'édiction de la norme, celle-ci est, depuis 2015, systématiquement passée en revue afin de déterminer son prolongement, son amendement, son retrait, ou son remplacement.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'instauration d'un dispositif d'évaluation préalable spécifiquement dédié à l'évaluation des impacts sur les petites et moyennes entreprises est rendue nécessaire par la difficulté pour les ministères à l'origine de propositions de normes législatives de mesurer efficacement cet impact. A l'image de la loi n° 2013-921 du 17 octobre 2013 portant création d'un Conseil national d'évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, l'exigence législative d'une évaluation préalable par l'administration des projets de lois qui concernent les TPE-PME permet d'assurer l'adaptation des normes envisagées à cette catégorie d'entreprises particulièrement affectée le cas échéant par le poids de l'inadaptation des normes.

Les études d'impact et les fiches d'impact doivent s'attacher à fournir une évaluation préalable de la réforme envisagée, aussi complète, objective et factuelle que possible. Elles ne doivent être ni un exercice formel de justification a posteriori d'une solution prédéterminée, ni une appréciation technocratique de l'opportunité d'une réforme qui viendrait se substituer à la décision politique. Il s'agit au contraire d'une méthode destinée à éclairer les choix possibles, en apportant au Gouvernement et au Parlement les éléments d'appréciation pertinents : nature des difficultés à résoudre, avantages et inconvénients des options possibles en fonction de l'objectif poursuivi, évaluation détaillée des conséquences qui peuvent être raisonnablement attendues de la réforme pour chacune des catégories de personnes concernées comme pour les administrations elles-mêmes. Cette approche doit permettre d'apporter une démonstration rigoureuse de la nécessité d'un nouveau texte et de la proportionnalité de la réponse juridique envisagée, en vue d'assurer un bon équilibre entre les objectifs d'intérêt général qui inspirent la réforme et la prise en compte des différents intérêts particuliers en présence.

Pour permettre à l'évaluation préalable des projets de loi applicables aux TPE-PME de jouer pleinement son rôle, il convient de renforcer le contenu de l'obligation qui pèse sur le Gouvernement en incluant dans la procédure d'évaluation existante la réalisation d'un « test PME » pour les normes législatives qui les concernent. Trop souvent, la circonstance qu'une réforme a été annoncée ou simplement que la matière se trouve déjà abondamment couverte par des textes conduit à ne plus envisager d'autre voie que l'introduction de prescriptions normatives plus détaillées encore pour répondre à la question posée. Or, dans de nombreux cas, la solution la mieux adaptée reposerait sur une combinaison de quelques dispositions, mais aussi sur d'autres modes d'intervention : chartes de bonnes pratiques ou normes volontaires par exemple. Il y a lieu, à tout le moins, d'envisager l'ensemble de la gamme des instruments possibles avant de figer la forme juridique que la réforme considérée pourra revêtir.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'évaluation préalable permet d'apprécier dans quelle mesure le recours à un nouveau texte juridique constitue la réponse adéquate au regard de l'objectif poursuivi, de mesurer les marges de manoeuvre dans un jeu de contraintes multiples ou antagonistes, et d'apprécier les avantages et inconvénients qui s'attacheraient aux principales options envisageables.

A cet égard, la prise en compte ex ante de l'impact sur les petites et moyennes entreprises des normes envisagées par des mises en situation réelle, via l'instauration d'un « test PME », apparaît à même de rendre plus effective l'évaluation préalable des normes qui leur sont applicables.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La mise en place du « test PME » par voie de circulaire a été envisagée mais écartée car elle ne permettait pas de garantir l'effectivité de l'obligation de réalisation du test pour les nouveaux projets de loi applicables aux TPE-PME.

3.2. OPTION RETENUE

L'instauration d'un « test PME » obligatoire dans le processus d'évaluation préalable des projets de loi applicables aux TPE-PME permettra de mesurer effectivement l'impact de ces normes sur les TPE-PME et si nécessaire de les adapter avant le dépôt du projet au Parlement.

Le dispositif législatif sera complété par des méthodes d'évaluation de l'impact financier et extra-financier de la norme envisagée. Si un guide méthodologique pour calculer l'impact financier de la réglementation nouvelle a été rédigé par le Secrétariat général du gouvernement, l'évaluation quantitative de la norme envisagée doit être adaptée pour mieux correspondre à la situation des TPE-PME, et doit être complétée par une évaluation qualitative de la norme en termes d'impact extra-financier.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

L'article impose au Gouvernement la réalisation d'un test PME dans le cadre de l'évaluation préalable obligatoire de l'impact des projets de lois sur les entreprises prévue par l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La réalisation obligatoire par le Gouvernement d'un test PME pour les projets de loi applicables aux entreprises correspond à ce que recommandait le Parlement européen dès 2011255(*), et plus récemment l'OCDE en 2022256(*).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Sans impact macro-économique direct, la disposition a pour objectif de permettre de mesurer plus efficacement l'impact des projets de lois sur les TPE-PME et de les modifier, le cas échéant, si cet impact est disproportionné par rapport à l'objectif poursuivi.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

L'institution d'un « test PME » dans l'évaluation des projets de loi applicables aux entreprises permettra de vérifier que la norme est adaptée aux spécificités des petites et moyennes entreprises et, le cas échéant, de la modifier en conséquence. Il s'agit précisément d'évaluer si les dispositions envisagées prennent en considération les particularités des petites et moyennes entreprises dans les obligations qui leur sont imposées, et ce afin que la charge qui en découle ne soit pas disproportionnée eu égard à leur taille et donc à leur surface financière.

Cette adaptation de la disposition envisagée aux caractéristiques des petites et moyennes entreprises permet de s'assurer que les nouvelles obligations qui leur sont imposées n'empièteront pas sur leur compétitivité.

4.2.3. Impacts budgétaires

Cet article implique la mise en place d'un « test PME » dans la procédure d'évaluation préalable des projets de lois, dont l'organisation sera prise en charge par le budget de l'Etat.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Néant.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Cet article implique la mise en place par le Gouvernement d'un « test PME » dans la procédure d'évaluation préalable des projets de loi applicables aux petites et moyennes entreprises.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur la société

Néant.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aucune consultation n'est requise et aucune consultation facultative n'est prévue.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions entreront en vigueur le lendemain de la publication du décret en Conseil d'Etat pris en application de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Départements d'Outre-mer

Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion

Application de plein droit.

Mayotte

Application de plein droit

Collectivités d'Outre-mer

Saint Martin et Saint Barthélémy

Application de plein droit

Saint Pierre et Miquelon

Application de plein droit

Autres (Polynésie française, Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, TAAF)

Application de plein droit

5.2.3. Textes d'application

Les modalités d'application du présent article seront précisées par décret en Conseil d'Etat.

TITRE XII - DISPOSITIONS DIVERSES

Article 28 - Clarifier le droit des procédures civiles d'exécution

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les procédures de saisie, qui font partie des voies d'exécution pour obtenir le paiement d'une créance, peuvent prendre différentes formes : saisie-vente, saisie conservatoire, saisie-attribution, etc.

La procédure de saisie des droits incorporels est prévue par les articles L. 231-1 et L. 233-1 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) et réglementée par les articles R. 231-1 à R. 233-9 du même code.

En particulier, l'article L. 231-1 du CPCE dispose : « Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie et à la vente des droits incorporels, autres que les créances de sommes d'argent, dont son débiteur est titulaire ».

L'article L. 233-1 du CPCE précise les conditions de cette saisie: « Seuls sont admis à faire valoir leurs droits sur le prix de la vente les créanciers saisissants ou opposants qui se sont manifestés avant la vente. »

L'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire (COJ) définit les compétences d'attribution du juge de l'exécution. Son alinéa premier énonce : « Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ».

Par sa décision n° 2023-1068 QPC du 17 novembre 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les mots « des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée » figurant au premier alinéa de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire.

Le Conseil a reporté au 1er décembre 2024 la date d'abrogation de ces dispositions en jugeant que « jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi ou, au plus tard, au 1er décembre 2024, le débiteur est recevable à contester le montant de la mise à prix pour l'adjudication des droits incorporels saisis devant le juge de l'exécution dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire » (cf. § 17 et 18 de la décision).

Le Conseil constitutionnel a considéré que l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, combiné avec l'article L. 231-1 du code des procédures civiles d'exécution, était entaché d'incompétence négative dans des conditions affectant le droit à un recours juridictionnel effectif, droit résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dans la mesure où, en cas de vente par adjudication de droits incorporels, aucune disposition ne permet au débiteur saisi de contester devant le juge de l'exécution le montant de la mise à prix fixé unilatéralement par le créancier poursuivant.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le cadre constitutionnel est notamment présenté supra, avec la décision n° 2023-1068 QPC du 17 novembre 2023. Plusieurs principes interviennent cependant dans la décision du Conseil constitutionnel précitée et qu'il convient que la disposition proposée respecte.

Il résulte d'abord de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, suivant une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, « qu'il ne doit pas être porté d'atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. » (§8). Cela s'applique aussi bien en matière civile et administrative qu'en matière pénale. Si le droit à un recours juridictionnel effectif peut être limité au nom de la bonne administration de la justice (décision n° 2018-705 QPC du 18 mai 2018, §11), de la sécurité juridique des relations contractuelles (décision n° 2020-857 QPC du 2 octobre 2020, §21) ou bien pour éviter les recours abusifs et dilatoires (décision n° 2022-986 QPC du 1er avril 2022, §8), ces limitations ne peuvent pas priver le justiciable de toute garantie en la matière.

Le Conseil constitutionnel s'était d'ailleurs déjà prononcé sur une exécution forcée (concernant une mesure administrative), notamment au regard du droit à un recours juridictionnel effectif. Par sa décision n°99-416 DC du 23 juillet 1999, il a ainsi considéré que : « si le législateur peut conférer un effet exécutoire à certains titres délivrés par des personnes morales de droit public et, le cas échéant, par des personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public, et permettre ainsi la mise en oeuvre de mesures d'exécution forcée, il doit garantir au débiteur le droit à un recours effectif en ce qui concerne tant le bien-fondé desdits titres et l'obligation de payer que le déroulement de la procédure d'exécution forcée ; que, lorsqu'un tiers peut être mis en cause, un recours effectif doit également lui être assuré » (§29).

Par ailleurs, depuis sa décision n°67-31 DC du 26 janvier 1967, le Conseil constitutionnel contrôle l'incompétence négative du législateur. Dans le cadre de son contrôle en QPC et, le Conseil constitutionnel juge depuis la décision n° 2010-5 QPC du 18 juin 2010, SNC Kimberly Clark, que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit. La Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur l'incompétence négative du législateur affectant le recours juridictionnel effectif en matière de contentieux fiscal (décision n° 2012-298 QPC du 28 mars 2013) et de légalité des actes étrangers (décision n° 2021-972 QPC du 18 février 2022).

Dans sa décision n° 2023-1068 QPC du 17 novembre 2023 précitée, le Conseil souligne ainsi que : « Il appartient au législateur, compétent en application de l'article 34 de la Constitution pour déterminer les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales, de définir les modalités selon lesquelles, pour permettre le paiement des obligations civiles et commerciales, les droits patrimoniaux des créanciers et des débiteurs doivent être conciliés. L'exécution forcée sur les biens du débiteur est au nombre des mesures qui tendent à assurer cette conciliation. » (§7)

Rejoignant le constat de la Cour de Cassation dans son arrêt de renvoi (deuxième chambre civile, arrêt n° 999 du 12 septembre 2023), le Conseil constitutionnel a ainsi souligné qu' « aucune autre disposition ne permet au débiteur de contester devant le juge judiciaire le montant de la mise à prix fixé par le créancier » (§12) et que cela est susceptible d'entrainer « des conséquences significatives » pour le débiteur (§13).

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Sans objet.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Sans objet.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'abrogation par le Conseil constitutionnel des termes « des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée » à l'article L. 231-6 du CPCE a pour conséquence qu'à compter du 1er décembre 2024, le juge de l'exécution n'aura plus compétence pour statuer sur les contestations portées à l'encontre des mesures d'exécution forcée. Les conséquences de cette censure ne sont pas limitées à la saisie de droits incorporels mais de manière générale. Il s'agit pourtant en pratique de l'essentiel de l'activité du juge de l'exécution.

Il convient de donc de tirer les conséquences de cette décision en modifiant la partie législative du CPCE et du COJ.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les modifications législatives visent à une mise en conformité du régime de la saisie de droits incorporels avec la décision du Conseil constitutionnel en même temps qu'elle le sécurise juridiquement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il convient de tirer les conséquences de la décision n° 2023-1068 QPC du 17 novembre 2023, tout en maintenant l'office du juge de l'exécution. Aucune autre option n'a donc été envisagée.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de maintenir la compétence du juge de l'exécution pour statuer sur les contestations portées à l'encontre des mesures d'exécution forcée, le I du présent article rétablit au premier alinéa de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire le segment de phrase censuré par le Conseil constitutionnel.

Pour se conformer à la décision du Conseil constitutionnel, de nouvelles dispositions sont également prévues dans le code des procédures civiles d'exécution, pour répondre aux griefs concernant la procédure de saisie des droits incorporels. Le II du présent article insère à l'article L. 233-1 de nouvelles dispositions (i) prévoyant que le créancier poursuivant fixe le montant de la mise à prix en cas de vente par adjudication de droits incorporels (alors qu'il s'agissait jusqu'alors d'une pratique non expressément prévue par les textes), (ii) permettant au débiteur de contester devant le juge de l'exécution le montant de la mise à prix.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article porte modification de l'article L233-1 du code des procédures civiles d'exécution et crée un article L233-2 au sein de ce code. Il modifie également l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire pour rétablir les termes « des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée ».

Le régime de la saisie des droits incorporels sera ainsi en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel, car il assurera un droit à un recours juridictionnel effectif pour les débiteurs contre la mise à prix fixée par le créancier poursuivant

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Aucun impact sur l'articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne n'est attendu des modifications législatives envisagées.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Aucun impact macroéconomique n'est attendu de la modification législative envisagée.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Aucun impact négatif sur les entreprises n'est attendu par la modification législative envisagées. A l'inverse, la mesure est favorable aux entreprises qui pourront contester devant le juge de l'exécution, selon une procédure rapide et efficace, les mesures d'exécution forcée dont elles font l'objet ou y défendre lorsqu'elles seront attraites par leurs débiteurs.

4.2.3. Impacts budgétaires

Aucun impact budgétaire n'est attendu de la modification législative envisagée.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Aucun impact sur les collectivités territoriales n'est attendu de la modification législative envisagée.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Néant.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

Néant.

4.5.1. Impacts sur la société

Néant.

4.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Néant.

4.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes

Néant.

4.5.4. Impacts sur la jeunesse

Néant.

4.5.5. Impacts sur les professions réglementées

Néant.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Néant.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Néant.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Aucune consultation n'est requise.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'article entre en vigueur le lendemain de la publication de la loi, conformément au droit commun, afin de remédier le plus rapidement possible aux effets de la déclaration d'inconstitutionnalité du Conseil constitutionnel qui prendra effet le 1er décembre 2024.

5.2.2. Application dans l'espace

Le II du présent article concerne les voies d'exécution, qui sont rattachées à la matière du droit civil.

1° En application du principe d'identité législative, les dispositions sont de plein droit applicables à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion. Elles sont pareillement applicables à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

2° Elles sont de plein droit applicables à Mayotte en application de l'article L. 612-1 du code des procédures civiles d'exécution.

3° Les procédures civiles d'exécution ne relèvent pas de la compétence de l'Etat en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française (article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française).

4° Dans les Terres australes et antarctiques françaises, depuis l'entrée en vigueur de l'article 1er-1 de la loi n° 55-1052 du 6 août 1955, dans sa version modifiée par l'article 8 de la loi n° 2007-224 du 21 février 2007 et la loi n° 2011-334 du 29 mars 2011, sont applicables de plein droit les dispositions relatives : au droit civil (4°), au droit pénal et à la procédure pénale (5°), à la monnaie, au crédit (6°), au droit commercial (7°).

Toutefois, dérogeant au principe ci-dessus exposé, l'article L. 651-1 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) exclut expressément l'application de ce code aux Terres australes et antarctiques. Aucune disposition spécifique n'est donc nécessaire pour exclure l'application de la réforme à ce territoire.

Dérogeant au principe ci-dessus exposé, l'article L. 651-1 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE) exclut expressément l'application de ce code aux Terres australes et antarctiques. Aucune disposition spécifique n'est donc nécessaire pour exclure l'application de la réforme à ce territoire.

5° Les procédures civiles d'exécution relèvent à Wallis et Futuna du principe de spécialité législative et ne sont pas applicables de plein droit : des dispositions expresses sont donc nécessaires pour prévoir l'extension du régime nouveau à ce territoire. Toutefois, en raison de l'absence de commissaires de justice titulaires dans ce territoire, les nouvelles dispositions n'y seront pas étendues au risque que la procédure de saisie des droits incorporels ne puisse pas être mise en oeuvre.

Le III du présent article concerne l'organisation judiciaire.

Il modifie l'article L. 532-6-1 du code de l'organisation judiciaire afin de rendre ces nouvelles dispositions applicables dans les îles Wallis et Futuna.

5.2.3. Textes d'application

Cette mesure ne nécessite aucun texte d'application.


* 1 https://www.economie/gouv.fr/consultation-simplification-entreprise

* 2 En particulier, l'article L. 114-8 du CRPA dispose que « Les administrations échangent entre elles toutes les informations ou les données strictement nécessaires pour traiter une demande présentée par le public ou une déclaration transmise par celui-ci en application d'une disposition législative ou d'un acte réglementaire. [...] Les administrations peuvent échanger entre elles les informations ou les données strictement nécessaires pour informer les personnes sur leur droit au bénéfice éventuel d'une prestation ou d'un avantage prévus par des dispositions législatives ou des actes réglementaires et pour leur attribuer éventuellement lesdits prestations ou avantages. ». L'article L. 114-9 du CRPA dispose que « Les échanges d'informations ou de données entre administrations prévues à l'article L. 114-8 s'effectuent selon des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »

* 3 Cf. communiqué de presse du 29 décembre 2023 : https://presse.economie.gouv.fr/la-consultation-publique-pour-le-projet-de-loi-simplification-pacte-ii-sacheve-sur-un-tres-large-succes/.

* 4 Rapport d'information du Sénat n°743, au nom de la délégation aux entreprises, relatif à la simplification des règles et normes applicables aux entreprises, par MM. Gilbert-Luc Devinaz, Jean-Pierre Moga et Olivier Rietmann,

* 5 Voir l' étude du 14 novembre 2013, intitulée « Le rescrit : sécuriser les initiatives et les projets », p. 20.

* 6 Idem, p. 57.

* 7 Idem, p. 55.

* 8 Codifié actuellement aux articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales.

* 9 Article L. 243-6-3 du code de la sécurité sociale.

* 10 Voir le II de l'article 345 bis du code des douanes créé par l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005.

* 11 Rapport de M. Joël Giraud au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2018. Voir les propositions de l' étude du 14 novembre 2013, p. 141 et 142.

* 12 Article L. 213-10 du code de l'environnement.

* 13 Article L. 441-6-2 du code de commerce (en application de l' ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 portant refonte du titre IV du livre IV du code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées).

* 14 Voir le pt 2.1.1.2 de son étude, « Le rescrit ne porte pas en soi atteinte à des principes constitutionnels », pp. 53 et s.

* 15 Idem. p. 54.

* 16 Idem, p. 56.

* 17 Voir la « proposition 9 » en pp. 22 et 23 du rapport.

* 18 Pour rappel, l' article 9 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises avait en effet habilité le Gouvernement à instaurer des rescrits sectoriels par ordonnances.

* 19 Voir rapport n° 2145 de l'Assemblée nationale du 16 juillet 2014 : « Ce délai se justifie par la nécessité d'un temps relativement long pour mettre en oeuvre des dispositifs dont la nouveauté est grande et dont les impacts juridiques et organisationnels sont lourds. L'élaboration des mesures pour lesquelles une habilitation est sollicitée au présent article nécessitera un important travail de coordination interministérielle ».

* 20 Le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 précise les critères permettant de déterminer l'appartenance à une catégorie d'entreprises :

- une microentreprise est une entreprise dont l'effectif est inférieur à dix personnes et dont le chiffre d'affaires ou le total du bilan annuel n'excède pas deux millions d'euros ;

- une PME est une entreprise dont l'effectif est inférieur à 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total de bilan n'excède pas 43 millions d'euros. Il fait référence dans ses visas à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises, à laquelle renvoie l'article R.2351-12 du code de la commande publique.

* 21 Cf. Observatoire Economique de la Commande Publique, recensement économique de la commande publique - chiffres 2022, mis à jour le 15 novembre 2023.).

* 22 Aucune étude permettant une estimation du coût de gestion n'est disponible. Il dépend, pour chaque entreprise, du nombre de profils acheteurs qu'elle doit utiliser pour répondre aux consultations de marchés des entités achat concernées par l'extension et qui ne sont pas encore utilisatrices de PLACE, ainsi que du nombre d'employés que cette entreprise mobilise pour l'utilisation de ses profils d'acheteur.

* 23 Cons. const., décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006 ; v. également Cons. const., décision n° 2009-584 DC du 16 juillet 2009.

* 24 H. Hoepffner, Droit des contrats administratifs : Dalloz 2016, p. 19-20.

* 25 Cons. const., décision n° 2012-242 QPC du 14 mai 2012.

* 26 P. Delvolvé, Les nouvelles dispositions du code civil et le droit administratif : RFDA 2016, p. 613.

* 27 Cons. const., décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 ; v. également Cons. const., décision n° 2004-506 DC du 2 décembre 2004.

* 28 Cons. const., décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998.

* 29 Cons. const., décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000.

* 30 CE, 20 avril 1956, Époux Bertin, n° 98637, au recueil.

* 31 Clause qui « notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l'exécution du contrat, implique, dans l'intérêt général, qu'il relève du régime exorbitant des contrats administratifs » ( TC, 13 octobre 2014, Société Axa France IARD, n° C3963, au recueil).

* 32 Certains contrats et conventions en matière domaniale sont également administratifs par la loi mais ne relèvent pas du code de la commande publique (CCP), comme le rappelle expressément le 3° de l'article L. 1100-1. Entrent notamment dans cette catégorie et relèvent en conséquence de la compétence de la juridiction administrative les contrats portant occupation du domaine public conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires (uniquement les concessionnaires de service public aux termes de la décision du TC, 14 mai 2012, Mme Gilles, n° C3836, au recueil), et les baux emphytéotiques administratifs (BEA) passés par l'État, ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics ainsi que les établissements publics de santé, conformément à l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 33 Définis à l'article L. 2 du CCP comme des contrats conclus à titre onéreux par un acheteur ou une autorité concédante, pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, avec un ou plusieurs opérateurs économiques, les contrats de la commande publique se divisent en deux catégories - les marchés publics (marchés, marchés de partenariat et marchés de défense ou de sécurité) et les contrats de concession (concession de travaux ou de services et de défense ou de sécurité) - régies par le CCP et, le cas échéant, par des dispositions particulières. Les acheteurs et les autorités concédantes soumis au CCP sont les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices ( article L. 1210-1), tels qu'ils sont définis respectivement aux articles L. 1211-1 et L. 1212-1.

* 34 Les personnes de droit public dotées de la personnalité morale sont notamment l'État et ses établissements publics à caractère administratif (EPA) comme à caractère industriel et commercial (EPIC), les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, qu'ils revêtent un caractère administratif ou industriel et commercial, ainsi que les groupements d'intérêt public (GIP).

* 35 L'article 2 précisait que le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relevaient de sa compétence avant la date d'entrée en vigueur de la loi.

* 36 Après avoir rappelé cet objectif poursuivi par le législateur, le Conseil d'État avait en conséquence estimé qu'il n'avait « pas entendu opérer une distinction entre les marchés conclus en application du code des marchés publics dans la rédaction que lui a donnée le décret n° 2001-210 du 7 mars 2001 et ceux qui ont été conclus en application de ce code dans sa rédaction antérieure et que seuls les litiges qui relevaient de la compétence du juge judiciaire avant la date d'entrée en vigueur de ces dispositions et ont été portés devant lui avant cette date demeurent de sa compétence ».

* 37 Article 3 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et article 3 de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.

* 38 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE ; Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE ; Directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession.

* 39 Il en résulte que les contrats soumis au CCP conclus par certaines personnes publiques, auparavant soumises à l'ordonnance précitée de 2005, telles que les EPIC de l'État et les GIP, sont désormais administratifs.

* 40 Ces contrats dits « exclus » sont mentionnés respectivement au livre V de la deuxième partie (« autres marchés publics ») et au livre II de la troisième partie (« autres contrats de concession ») du CCP et soumis au titre de ces dispositions à un régime particulier. Il s'agit d'une catégorie de marchés publics et de contrats de concession spécifiques et extrêmement divers qui regroupe, par exemple, les cas de relations internes au secteur public (quasi-régie, coopération entre pouvoirs adjudicateurs, marchés attribués par une entité adjudicatrice avec une entreprise liée ou une coentreprise), les contrats conclus en application de règles internationales, liés à la sécurité ou à la protection d'intérêts essentiels de l'État ou encore ceux relatifs à certains services en matière immobilière, de recherche et développement, juridique ou financière.

* 41 Cf. en ce sens CE, 5 février 2018, Société Peyrani et autres, n° 414846, mentionné aux tables.

* 42 Aux termes de l'article L. 2111-9-4 du code des transports, les contrats conclus en application du CCP par la société de droit privé SNCF réseau pour l'exécution de ses missions prévues à l'article L. 2111-9 du même code sont administratifs. C'est également le cas pour les contrats d'achat obligatoire d'électricité conclus par Électricité de France (EDF) et les entreprises locales de distribution avec des producteurs autonomes, en vertu de l'article L. 314-7 du code de l'énergie.

* 43 Est une entreprise publique, au sens de l'article L. 1212 du CCP, qui assure la transposition de l'article 4, §2 de la directive 2014/25/UE précitée, « tout organisme doté de la personnalité juridique qui exerce des activités de production ou de commercialisation de biens ou de services marchands et sur lequel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs exercent, directement ou indirectement, une influence dominante en raison de la propriété de l'entreprise, de la participation financière ou des règles qui la régissent. (...) ». Plusieurs organismes qui étaient auparavant des établissements publics industriels et commerciaux sont désormais des sociétés anonymes, à la suite d'un récent mouvement de transformation dans le domaine des transports, de l'énergie et des services postaux. On peut citer à titre non exhaustif la Société nationale des chemins de fer (SNCF), Aéroports de Paris (ADP), La Poste, Gaz de France (GDF), EDF et Réseau de transport d'électricité (RTE).

* 44 Cette notion qui recoupe celle plus fonctionnelle d'entreprises locales désigne les sociétés d'économie mixte locales (SEML), les sociétés publiques locales (SPL) et sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA), ainsi que les sociétés d'économie mixte à opération unique (SEMOP) et les sociétés d'économie mixte d'aménagement à opération unique (SEMAOU). Sur le régime juridique de ces sociétés, cf. Conseil d'État, Guide des outils d'action économique, Famille « entreprises et participations publiques », Fiche n°16 Sociétés locales à statut spécifique, version 2023-2024.

* 45 Sont visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation. Sur la qualification privée des travaux exécutés par une société anonyme d'HLM, bien qu'ils soient soumis aux principes de publicité, de mise en concurrence et d'exécution prévus par l'ancien code des marchés publics, cf. TC, 14 décembre 2009, Société d'HLM pour Paris et sa région, n° C3716, au recueil.

* 46 Peuvent être ici visées les hypothèses que le Tribunal des conflits semble désigner comme des « conditions particulières » ( TC, 9 mars 2015, Mme Rispal c. Société des autoroutes du Sud de la France, n° 15-03.984, au bulletin) dans lesquelles la personne agit comme mandataire d'une personne publique soumise au code ou « pour son compte et sous son autorité » ( CE, 3 juin 2009, Société aéroports de Paris, n° 323594, au recueil) ou encore le cas d'une association dite « transparente » car « créée à l'initiative d'une personne publique qui en contrôle l'organisation et le fonctionnement et qui lui procure l'essentiel de ses ressources » ( CE, 21 mars 2007, Commune de Boulogne-Billancourt, n° 281796, au recueil). Sur ces hypothèses, cf. la fiche DAJ, Les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices - 4. Les autres personnes privées, avril 2019.

* 47 Celui-ci prévoit que les procédures de référés précontractuels et contractuels prévues par les dispositions de l'ordonnance du 7 mai 2009 précitée sont formées, instruites et jugées selon la « procédure accélérée au fond », laquelle est venue remplacer la procédure « en la forme des référés » le 1er janvier 2020 ( article 1441-1 du CPC).

* 48 Cf. notamment TC, 13 septembre 2021, SAS Cadres en mission, n° C4224, mentionné aux tables ; TC, 10 janvier 2022, Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP), n° C4230, mentionné aux tables.

* 49 Que ce soit au regard de la théorie de l'imprévision en droit administratif (3° de l'article L. 6 précité) qui est différente de celle en droit civil ( article 1195 du code civil) ou par rapport au caractère inadapté des cahiers des clauses administratives générales (CCAG) aux marchés publics de droit privé dès lors que ces documents contractuels sont spécialement conçus pour les marchés publics relevant de la catégorie des contrats administratifs et contiennent à ce titre des clauses exorbitantes du droit commun et prennent en compte les règles propres à la comptabilité publique.

* 50 Tribunal des conflits, Rapport annuel d'activité pour l'année 2022, p. 6

* 51 Article L. 211-14 du code de l'organisation judiciaire (COJ) ; article D. 211-10-2 du même code et tableau VIII-II annexé.

* 52 En pratique, si le référé précontractuel doit être jugé dans un délai de 20 jours ( article R. 551-5 du CJA et article 1441-2 du CPC), délai globalement respecté par le juge administratif, les règles et pratiques spécifiques à la procédure civile y font clairement obstacle.

* 53 CE, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n° 358994, au recueil.

* 54 Cons. const., décision n° 2020-857 QPC du 2 octobre 2020, Société Bâtiment mayennais, §26.

* 55 Il a ajouté par la suite qu'une telle unification pouvait être opérée « tant en fonction de l'autorité dont les décisions sont contestées, qu'au regard de la matière concernée » ( Cons. Const., décision n° 96-738 DC du 23 juillet 1996).

* 56 Cf. par exemple Cons. Const., décision n° 89-261 DC du 28 juillet 1989 ; décision n° 2019-794 DC du 20 décembre 2019.

* 57 Cons. Const., décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010.

* 58 Cons. Const., décision n° 2009-595 DC du 3 décembre 2009 ; décision n° 2011-631 DC du 9 juin 2011.

* 59 Cons. Const., décision n° 89-261 DC du 28 juillet 1989, s'agissant des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière au profit du juge judiciaire ; Cons. Const., décision n° 2001-451 DC du 27 novembre 2001, concernant le régime assurantiel contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles au profit des juridictions de la sécurité sociale.

* 60 Aux termes de cette disposition, il s'agit de « tout organisme présentant toutes les caractéristiques suivantes : a) il a été créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel et commercial ; / b) il est doté de la personnalité juridique ; / c) soit il est financé majoritairement par l'État, les autorités régionales ou locales ou par d'autres organismes de droit public, soit sa gestion est soumise à un contrôle de ces autorités ou organismes, soit son organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par l'État, les autorités régionales ou locales ou d'autres organismes de droit public ; ». Ce caractère cumulatif a été affirmé à plusieurs reprises par la CJCE, 15 janvier 1998, Mannesmann Anlagenbau Austria AG e.a., Aff. C-44/96, pt. 21 et 39 ; CJCE, 10 novembre 1998, BFI Holding BV, Aff. C-360/96, pt. 29 ; CJCE, 10 mai 2001, Agorà SRL, Aff. C-223/99 et C-260/99, pt. 26.

* 61 La notion « d'entité adjudicatrice », telle qu'elle est définie à l'article 4, §2 de la directive 2014/25/UE précitée dite « secteurs spéciaux » englobe, quant à elle, celle de « pouvoirs adjudicateurs » ou « d'entreprises publiques » qui exercent une activité d'opérateur de réseaux dans les secteurs de l'énergie (gaz, chaleur, électricité, etc.), de l'eau, des transports et des services postaux ou, à défaut, celle « d'organismes de droit privé qui bénéficient, en vertu d'une disposition légalement prise, de droits spéciaux ou exclusifs ayant pour effet de leur réserver l'exercice de ces activités et d'affecter substantiellement la capacité des autres opérateurs économiques à exercer celle-ci » ( article L.1212-1 du CCP).

* 62 CJCE, 15 mai 2003, Commission contre royaume d'Espagne, Aff. C-214/00, pts. 55 à 57. Cf. également en ce sens CJCE, 13 janvier 2005, Commission contre royaume d'Espagne, Aff. C-84/03, pts. 27 et 28.

* 63 CE, 4 août 1905, Martin, n° 14220, au recueil.

* 64 Cf. en ce sens TC, 17 décembre 2001, Société Rue Impériale de Lyon, n° 01-03.262, au bulletin ; CE, 1er juillet 2010, Société Bioenerg, n° 333275, mentionné aux tables ; TC, 9 mars 2015, Mme Rispal c. Société des autoroutes du Sud de la France, op. cit ; TC, 4 juillet 2022, Sociétés Allianz global corporate et specialty et Aéroport Toulouse Blagnac, n° C4247, au recueil.

* 65 CE, 28 juin 1963, Sieur Narcy, n° 43834, au recueil.

* 66 CE, 31 juillet 1942, Monpeurt, n° 71398, au recueil ; CE, 13 janvier 1961, Magnier, n° 43.548, au recueil.

* 67 TC, 15 janvier 1968, Époux Barbier, n° 01908, au recueil.

* 68 Cf. par exemple CE, 25 octobre 2017, Société « Les Compagnons Paveurs », n° 404481, inédit.

* 69 Cour de cassation, 3ème chambre civile, 11 mai 2022, n°21-12-291, au bulletin.

* 70 Cette qualification sera remise en cause sous l'effet de l'ordonnance précitée de 2016 relative aux contrats de concession, aujourd'hui codifiée dans le CCP.

* 71 Le Conseil d'État a ainsi rappelé « la nécessité d'appeler l'attention des acteurs de la commande publique sur le fait que, conformément à la jurisprudence, les principes fondamentaux peuvent trouver à s'appliquer, selon des modalités qu'il leur appartient de définir, à la passation de certains de ces contrats » (Fiche DAJ, Présentation du code de la commande publique, janvier 2019, point 2.5). Cf. également dans le même sens CE, 5 février 2018, Société Peyrani et autres, op. cit.

* 72 Article L. 211-14 du COJ précité.

* 73 CJUE, 14 juillet 2022, EPIC Financial Consulting Ges.m.b.H. contre République d'Autriche, Aff. C-274/21 et C-275/21, point 72. Cf. également CJCE, 18 juillet 2007, Commission des Communautés européennes c/ République fédérale d'Allemagne, Aff. C-503/04, point 35.

* 74 En application de l'article 1171 du code civil prévoyant que « Dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite. (...) ».

* 75 Articles L. 2131-2, L. 3131-2 et L. 4141-2 du CGCT.

* 76 Idem.

* 77 Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nanterre, Nancy, Paris, Rennes, Fort-de-France, Saint-Denis et Saint-Pierre-et-Miquelon.

* 78 Selon les chiffres du ministère de la justice, le nombre de recours portés devant ces juridictions sur le fondement de l'ordonnance de 2009 précitée - référés précontractuel et contractuel - apparaît extrêmement réduit : le tribunal judiciaire de Paris connaît l'activité la plus importante avec 28 affaires enregistrées en 2022 et 23 en 2023 tandis que les autres tribunaux n'en ont pas traité depuis 2021 (c'est le cas du tribunal judiciaire de Bordeaux) ou en nombre extrêmement limité (le tribunal judiciaire de Rennes a, par exemple, enregistré 2 affaires en 2021 et 5 respectivement en 2022 et 2023). Il n'a en revanche pas été possible, après des échanges avec le ministère de la justice, d'extraire des chiffres sur le contentieux de l'exécution de ces contrats, lui-même mêlé à un contentieux plus large en matière civile.

* 79 Selon le Rapport public du Conseil d'État de l'activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2022, le contentieux en matière contractuelle (marchés et contrats) représente 1,8 % (4393 requêtes) des entrées devant les tribunaux administratifs et 2,3 % (702 requêtes) devant les cours administratives d'appel.

* 80 Le contentieux contractuel a diminué, pour les tribunaux administratifs, de plus de 12 % par rapport à 2021 et de 15 % par rapport à 2019, tandis qu'il a diminué, pour les cours administratives d'appel, de 4 % par rapport à 2021 et de 24 % par rapport à 2019 (Rapport public annuel du Conseil d'État, 2023, p. 35, p. 44 et p. 48).

* 81 Lequel considère en particulier que le Conseil est « consulté sur toute question relative à la compétence, à l'organisation et au fonctionnement des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel (...) ».

* 82 CE, Assemblée générale, avis sur un projet de loi portant suppression des surtranspositions des directives européennes en droit français, 27 septembre 2018, n° 395785, point 4.

* 83 CE, 26 octobre 2018, Association Regards Citoyens, n° 403916, mentionné aux tables ; CE, 7 avril 2021, Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles et autres, n° 432692, inédit ; CE, 30 janvier 2024, Société Systèmes et Télécommunications, n° 456967, inédit.

* 84 Ces estimations s'appuient sur le vieillissement des dirigeants actuels des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI), dont 25 % sont âgés de 60 ans (11,3 % âgés de plus de 66 ans, soit un doublement entre 2005 et 2020).

* 85 CCI Ile-de-France, Panorama de la cession-reprise d'entreprises en Ile-de-France, novembre 2023

* 86 Source : BPCE L'Observatoire sur la base des données Bodacc 2019

* 87 Reprendre pour mieux entreprendre dans nos territoires - Sénat (senat.fr)

* 88 Altares, Ventes et cessions de fonds de commerce, bilan 2022.

* 89 Articles L. 141-23 à L. 141-32 du code de commerce.

* 90 Articles L. 23-10-1 à L. 23-10-12 du code de commerce.

* 91 Articles L. 2322-1 du code du travail abrogé par l'ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017.

* 92 Article L. 2312-5 du code du travail.

* 93 Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales.

* 94 Ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives.

* 95 Article L. 628-1 du Code de commerce.

* 96 Ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant modification du livre VI du code de commerce.

* 97 S'agissant des TPE (entreprises de moins de 10 salariés), les données 2022 soulignent que plus de 90% des rachats de fonds de commerce ont été réalisés par des entrepreneurs déjà à la tête d'une TPE. Le Rapport de Synthèse CCI France 2023 estime, s'agissant des transmissions d'entreprise à venir, qu'entre 10% et 15% des entreprises potentiellement à reprendre seront transmises en interne soit dans le cadre d'une transmission familiale, soit dans le cadre d'une transmission aux salariés.

* 98 En 2023, le nombre d'entreprises à reprendre dans les 10 prochaines années est estimé à 350 000 par CCI France. Ces estimations s'appuient sur le vieillissement des dirigeants actuels des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI), dont 25 % sont âgés de 60 ans (11,3 % âgés de plus de 66 ans, soit un doublement entre 2005 et 2020).

* 99 Etude d'impact du projet de loi relative à l'économie sociale et solidaire du 24 juillet 2013 (NOR : ERNX1315311L).

* 100 CCI Ile-de-France, Panorama de la cession-reprise d'entreprises en Ile-de-France, novembre 2023.

* 101 Jean-Christophe Sciberras, Pour une clarification du bulletin de paie, 27 juillet 2015.

* 102 Décision n° 81-132 DC, 16 janvier 1982, cons. 16, Journal officiel du 17 janvier 1982, page 299.

* 103 Décision n° 2012-285 QPC du 30 novembre 2012.

* 104 Décision n° 2010-55 QPC, 18 octobre 2010, cons. 4, Journal officiel du 19 octobre 2010, page 18695, texte n° 82.

* 105 Statistiques recueillies par l'ADLC auprès des différentes autorités nationales de concurrence mentionnées dans le cadre du groupe de travail sur le contrôle des concentrations du Réseau européen de concurrence.

* 106 Source : INSEE.

* 107 Source : OCDE.

* 108 Devenu Défenseur des droits par la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011. Le Défenseur des droits a été institué en autorité administrative indépendante. En application de l'article 71-1 de la Constitution, le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés. A ce titre, il peut être saisi toute personne physique ou morale qui s'estime lésée dans ses droits et libertés par le fonctionnement d'une administration de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public ou d'un organisme investi d'une mission de service public.

* 109 « Régler autrement les conflits, conciliation, transaction, arbitrage en matière administrative », étude adoptée par l'assemblée générale du Conseil d'Etat le 4 février 1993.

* 110 Circulaire du 6 février 1995 relative au développement du recours à la transaction pour régler amiablement les conflits.

* 111 Le droit à l'erreur introduit une présomption générale de bonne foi dans les relations du public avec l'administration ( Loi ESSOC | Direction interministérielle de la transformation publique (modernisation.gouv.fr)). Il s'applique pour les déclarations fiscales et sociales.

* 112 Le Médiateur des entreprises est nommé par décret du Président de la République et placé auprès du MEFSIN.

* 113 Le code de la commande publique entré en vigueur le 1er avril 2019 confirme la compétence du médiateur des entreprises pour les différends relatifs aux contrats de la commande publique. Les articles L. 2197-1 et L. 2197-2 prévoient la possibilité pour les parties au contrat de recourir à un conciliateur ou un médiateur, dont le médiateur des entreprises, dans l'exécution d'un marché public. Il intervient sans pouvoir décisionnel pour aider les parties à construire une solution à leur différend. L'ouverture de la médiation suspend le cours des prescriptions, avec un renvoi à l'article L. 213-6 du code de justice administrative et au code civil. Quant aux délais de recours contentieux, ils sont interrompus pour les contrats administratifs, comme le prévoit déjà l'article L. 213-6 du code de justice administrative de manière générale. Les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) mis à disposition des acheteurs publics le 1er avril 2021 détaillent également ces dispositions.

* 114 Décret n° 2002-612 du 26 avril 2002 instituant un médiateur du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

* 115 La médiation régie par le présent chapitre s'entend de tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige.

* 116 Est défini comme « médiateur », à l'article 3 de la directive, tout tiers sollicité pour mener une médiation avec efficacité, impartialité et compétence, quelle que soit l'appellation ou la profession de ce tiers dans l'État membre concerné et quelle que soit la façon dont il a été nommé pour mener ladite médiation ou dont il a été chargé de la mener.

* 117 Article L. 1112-24 du Code général des collectivités territoriales.

* 118 Décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019.

* 119 Par exemple, les principes édictés par la charte éthique des médiateurs dans les litiges administratifs élaborée par le Conseil d'État, les principes partagés par les médiateurs des services au public ou encore la référence que constitue le code européen des médiateurs.

* 120 Article 45 de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire.

* 121 Médiations : les ateliers silencieux de la démocratie, Jacques Faget. Editions Érès.

* 122 Idem.

* 123 Contribution à une définition de l'Ombudsman, Rhita Bousta, Revue française d'administration publique 2007/3 (n° 123), pages 387 à 397.

* 124 Défendre les droits des usagers des services publics | Défenseur des Droits (defenseurdesdroits.fr).

* 125 Cas du Médiateur des ministères économiques et financiers.

* 126 Messages clefs de la consultation numérique : « Renforcer la disponibilité et la présence humaine dans les modalités de contact avec l'administration » constitue l'une des 5 premières idées plébiscitées à date ; « pouvoir parler à un agent en face à face quand le problème est plus compliqué » figure parmi les 20 mesures les plus plébiscitées.

* 127 Fiche thématique Médiation n°1 « Médiation et urbanisme », 5 juillet 2023.

* 128 Adoption de l' amendement visant à unifier les modes de règlement amiable des litiges relevant de la compétence du juge administratif sous la terminologie unique de « médiation » dans le code de justice administrative

* 129 Cet article prévoit actuellement que : « Des décrets en Conseil d'Etat peuvent déterminer dans quelles conditions les litiges contractuels concernant l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, ainsi que les actions mettant en jeu leur responsabilité extracontractuelle sont soumis, avant une instance juridictionnelle, à une procédure de conciliation ».

* 130 L'article L. 421-2 codifie dans la partie législative du CRPA l'habilitation donnée par l'article 13 de la loi no 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, en tant qu'elle porte sur les procédures préalables de conciliation.

* 131 Rapport d'information du 20 février 2020 du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale sur l'évaluation de la médiation entre les usagers et l'administration.

* 132 Rapport pour l'Assemblée nationale de France Stratégie : Médiation accomplie ? Discours et pratiques de la médiation entre citoyens et administrations (2019).

https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-rapport-mediation-accomplie_02072019_finalweb.pdf

* 133 Les administrations territoriales ne sont pas concernées : la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique encadre en effet déjà l'institution de médiateurs dans les collectivités territoriales.

* 134 Voir la typologie des différents médiateurs sur ce point dans le rapport de France Stratégie : Médiation accomplie ? Discours et pratiques de la médiation entre citoyens et administrations (2019), pages 102 et suivantes.

* 135 Article L. 1112-24 du code général des collectivités territoriales, issu de l'article 81 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

* 136 Le médiateur peut exercer sa mission à temps partiel, avec des quotités horaires variables en fonction de l'activité générée par les demandes reçues.

* 137 Article L. 1112-24 du code général des collectivités territoriales.

* 138 Décret n° 2022-433 du 25 mars 2022 relatif à la procédure de médiation préalable obligatoire applicable à certains litiges de la fonction publique et à certains litiges sociaux.

* 139 Article 3 de la directive 2005/60/CE.

* 140 Article L. 561-2-2 du code monétaire et financier.

* 141 Article 30 de la directive (UE) 2015/849.

* 142 Article L. 561-2-2 du code monétaire et financier et précisions à l'article R. 561-1 du code monétaire et financier.

* 143 Directive n° 2022/2464 du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises, dite « CSRD » pour Corporate Sustainability Reporting.

* 144 European Sustainability Reporting Standards.

* 145 V. les articles 30 de la directive 2006/43/CE et 51 de la directive 2013/34/UE, telles que modifiées par la directive CSRD.

* 146 Ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d'informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d'entreprise des sociétés commerciales.

* 147 V. Cass. crim., 11 mai 1981 : « Le délit d'entrave peut être constitué par tout fait, positif ou négatif, notamment par le refus de communiquer au commissaire aux comptes, en original ou en copie, toutes pièces nécessaires à l'exercice de ses fonctions. »

* 148 Décision n° 80-127 DC du 20 janvier 1981, Loi renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes.

* 149 Décision n° 2019-795 DC du 20 décembre 2019, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.

* 150 Rapport intitulé « Rendre des heures aux Français. 14 mesures pour simplifier la vie des entreprises », 15 février 2024. Lien : https://www.economie.gouv.fr/files/files/2024/Rapport-projet-de-loi-sur-la-simplification.pdf

* 151 Rapport intitulé « Rendre des heures aux Français. 14 mesures pour simplifier la vie des entreprises », 15 février 2024. Lien : https://www.economie.gouv.fr/files/files/2024/Rapport-projet-de-loi-sur-la-simplification.pdf.

* 152 F. Collart Dutilleul, P. Delebecque et C.-É. Bucher, Contrats civils et commerciaux, Précis, Dalloz, 2024, 12e éd., n° 2.

* 153 Article 1105, alinéa 2, du code civil.

* 154 La fiducie se définit comme « l'opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires » (article 2011 du code civil).

* 155 Loi n° 2007-211 du 19 février 2007 instituant la fiducie.

* 156 Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.

* 157 Loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.

* 158 Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

* 159 Décret n° 2006-1708 du 23 décembre 2006 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative.

* 160 Décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019.

* 161 Décision n° 96-373 du 9 avril 1996.

* 162 Décision n° 2014-387 QPC du 4 avril 2014.

* 163 Décision n° 89-26 DC du 28 juillet 1989.

* 164 Décision n° 2014-455 QPC du 6 mars 2015.

* 165 CEDH, 27 juin 2000, Ihlan c/ Turquie, §97.

* 166 CEDH, 26 octobre 2000, Kudla c/ Pologne.

* 167 CJCE, 15 mai 1986, Marguerite Johnston.

* 168 Décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019.

* 169 CE, 29 décembre 1993, n° 67922.

* 170 Cons. const. DC n° 91-165L du 12 mars 1991.

* 171 Une TPE ou microentreprise est une entreprise dont l'effectif est inférieur à 10 personnes et dont le chiffre d'affaires ou le total du bilan annuel n'excède pas 2 millions d'euros Une PME est une entreprise dont l'effectif est inférieur à 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total de bilan n'excède pas 43 millions d'euros. Le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 précise ces critères.

* 172 Décision n° 2023-1072 QPC du 1er décembre 2023, paragraphe 7

* 173 Les entreprises en France, Édition 2020, INSEE.

* 174 Loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer.

* 175 Chiffre du rapport de France Assureurs « L'assurance de dommages aux biens des professionnels en 2022 », hors collectivités territoriales et contrats cyber pur.

* 176 La souveraineté, ici appliquée à l'économique numérique, est définie comme la capacité à identifier les dépendances, et lorsque ces dernières sont jugées inacceptables à prendre des mesures pour les réduire. Dans ce cas par exemple la disponibilité de centres de calcul sur le territoire national facilitera la localisation des données sur le sol français.

* 177 France Datacenter en recensait environ 200 en 2020.

* 178 L'article 4 de la loi industrie verte vise d'une part à paralléliser la procédure d'examen et de consultation à compter du dépôt du dossier complet et régulier et, d'autre part, de moderniser la consultation du public en introduisant une nouvelle procédure de consultation du public dite « consultation parallélisée ».

* 179 Articles L. 143-29 et s. du code de l'urbanisme pour le SCoT, articles L. 153-31 et suivants du code de l'urbanisme pour le PLU, article L. 163-8 du code de l'urbanisme pour la carte communale.

* 180 Article L. 300-6 du code de l'urbanisme pour la déclaration de projet, articles L. 143-44 et suivants du code de l'urbanisme pour la mise en compatibilité du SCoT, articles L. 153-54 et suivants du code de l'urbanisme pour la mise en compatibilité du PLU.

* 181 Article L. 102-1 du code de l'urbanisme.

* 182 Les documents d'urbanisme dont l'élaboration ou la révision est engagée à compter du 1er avril 2021.

* 183 Article L. 300-6-1 du code de l'urbanisme.

* 184 Le service « voix » est un service de téléphonie mobile permettant aux utilisateurs de passer des appels téléphoniques depuis leur téléphone portable.

* 185 Le très haut débit mobile est un service de téléphonie mobile permettant aux utilisateurs de disposer d'un accès Internet très rapide (au moins 30 mbps en débit descendant), depuis leur téléphone portable.

* 186 Par exemple, si l'opérateur d'infrastructure a déjà commencé les travaux, il devra remettre le terrain concerné en l'état. Par ailleurs, il sera éventuellement fondé à poursuivre en justice la commune concernée, dans la mesure où l'illégalité de la décision résulterait d'une faute de cette dernière.

* 187 Pour davantage de développements sur ce dispositif, v. infra.

* 188 Livre blanc « Comment maîtriser les besoins en infrastructures numériques de l'Europe ? », 21 février 2024.

* 189 L. Waverman, M. Meschi et M. Fuss, « The Impact of Telecoms on Economic Growth in Developing Countries », Vodafone Policy Paper Series, n° 2, 2005 ; Banque mondiale, « Information and Communications for Development - Extending Reach and Increasing Impact », 2009.

* 190  Rapport n° 68 (2021-2022) de MM. Guillaume CHEVROLLIER et Jean-Michel HOULLEGATTE, déposé le 20 octobre 2021.

* 191 La directive 85/337/CEE (modifiée en 2011), établit une procédure d'évaluation environnementale pour les projets ayant une incidence sur l'environnement15. La directive 2001/42/CE prévoit une procédure similaire pour les plans et les programmes ayant des incidences environnementales. Cette directive a été révisée en 2014, offrant une définition plus précise de l'évaluation environnementale et renforçant la coordination entre les procédures

* 192 La directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite « directive habitats-faune-flore », constitue le socle de la protection de la biodiversité au niveau européen

* 193 Rapport de la commission d'enquête du Sénat sur la réalité des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité engagées sur des grands projets d'infrastructures, intégrant les mesures d'anticipation, les études préalables, les conditions de réalisation et leur suivi.

* 194 CE, 27 mars 2023, Sortir du nucléaire, n° 463186 B : AJDA 2023. 593 ; JCP Adm. 2023. Actu. 231, obs. L. E. ; EEI 2023. Alerte 74, obs. L. E. ; BDEI mai 2023, no 3012, chron. Clément, Bouillié et Dufour.

* 195 C(2021) 7301 Communication de la Commission : Document d'orientation sur la protection stricte des espèces animales d'intérêt communautaire en vertu de la directive «Habitats», https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/a17dbc76-2b51-11ec-bd8e-01aa75ed71a1/language-en/format-PDF/source-search.

* 196 Il est par exemple possible de compenser un impact sur des milieux ouverts par des actions en milieu forestier, voire même de compenser un impact habitat par une restauration de sol.

* 197 La compensation mutualisée en Allemagne : quelles implications écologiques et territoriales ? Léa Dieckhoff, Inès Imbert, Adeline Bas, Marianne Darbi Dans Sciences Eaux & Territoires 2021.

* 198 Au sens des métaux nécessaires pour les productions liées à la Défense ou à l'énergie nucléaire.

* 199 Un gisement déplété est un ancien gisement de gaz naturel dont l'exploitation a été arrêtée et qui a été équipé afin d'y stocker du gaz naturel comprimé.

* 200 https://www.ecologie.gouv.fr/fit-55-nouveau-cycle-politiques-europeennes-climat.

* 201 La définition de l'exemplarité énergétique est plus globale que l'installation d'énergie renouvelable sur bâtiment (R.171-4 du CCH).

* 202 https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/23242_Strategie-energie-climat.pdf.

* 203 Notamment les directions départementales des territoires, qui pourront être concernées par ces dispositions.

* 204 Article L. 1121-1 code santé : [...] La personne physique ou la personne morale qui est responsable d'une recherche impliquant la personne humaine, en assure la gestion et vérifie que son financement est prévu, est dénommée le promoteur. Celui-ci ou son représentant légal doit être établi dans l'Union européenne. Lorsque plusieurs personnes prennent l'initiative d'une même recherche impliquant la personne humaine, elles désignent une personne physique ou morale qui aura la qualité de promoteur et assumera les obligations correspondantes en application du présent livre. [...]

* 205 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).

* 206 Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

* 207 Loi n° 94-548 du 1er juillet 1994 relative au traitement de données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

* 208 Les autorisations sont délivrées en cas d'écart avec les référentiels (lorsque le traitement envisagé est conforme à un référentiel, une simple déclaration suffit). En 2022, la CNIL a reçu 455 demandes d'autorisation en santé (rapport annuel 2022 : https://www.cnil.fr/sites/cnil/files/2023-05/cnil_-_43e_rapport_annuel_-_2022.pdf, p. 50).

* 209 Cf. deuxième alinéa desdites dispositions : « Lorsque la Commission nationale de l'informatique et des libertés ne s'est pas prononcée dans ces délais, la demande d'autorisation est réputée acceptée. Cette disposition n'est toutefois pas applicable si l'autorisation fait l'objet d'un avis préalable en application de la sous-section 2 de la présente section et que l'avis ou les avis rendus ne sont pas expressément favorables. ».

* 210 « Fédérer les acteurs de l'écosystème pour libérer l'utilisation secondaire des données de santé », rapport remis le 5 décembre 2023 aux ministres chargés de l'économie et du numérique, de l'enseignement supérieur et de la recherche et de la santé, https://sante.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/2-ans-de-france-2030-des-resultats-concrets-et-des-perspectives-pour-la-sante.

* 211 « IA : notre ambition pour la France », mars 2024. https://www.economie.gouv.fr/cge/commission-ia.

* 212 CC, 23 juillet 1999, décision n° 99-416 DC.

* 213 CC, Décision n° 2012-652 DC, 22 mars 2012.

* 214 CC, décision n° 2020-800 DC, 11 mai 2020.

* 215 CC, décision n° 2004-504 DC, 12 août 2004.

* 216 CC, décision n° 2021-819 DC du 31 mai 2021.

* 217 CEDH, 4 décembre 2008, S. et Marper c. Royaume-Uni, n° 30562/04 et 30566/04.

* 218 CJUE, 9 novembre 2010, Volker une Markus Schecke GbR et Harmut Eifert contre Land Hessen, n° C-92/09 et C-93/09, point 53.

* 219 Règlement (UE) n° 536/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relatif aux essais cliniques de médicaments à usage humain et abrogeant la directive 2001/20/CE.

* 220 Règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017.

* 221 Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017.

* 222 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD).

* 223 Schema_procedure_import-export.pdf (application DGRI)

* 224 Qui se distingue de la reconnaissance biométrique en temps réel dans l'espace public.

* 225 Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, art. 7

* 226 Dans le cadre de questions/réponses réalisées par les services du ministère de l'économie, les fédérations de commerçants (Alliance du Commerce ; Procos, Epiciers de France) et de foncières commerciales (la Fédération des Acteurs du Commerce dans les Territoires (FACT) ont indiqué que le dépôt de garantie correspond à un trimestre de loyer.

* 227 Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, art. 22

* 228 Loi précitée, art. 25-6

* 229 L'ensemble des projets soumis à autorisation d'exploitation commerciale est listé à l'article L.752-1 du code de commerce.

* 230 Lorsque la demande d'AEC est couplée à une demande de Permis de construire (PC) la CDAC, et la CNAC en cas de recours, rend un avis, pour une AEC simple - non assortie de PC, la CDAC, et la CNAC en cas de recours, rend une décision.

* 231 Avis n°356190 du Conseil d'État, Section des finances, 8 novembre 1994

* 232 Décision n° 81-132 DC, 16 janvier 1982, « Loi de nationalisation ».

* 233 Décision n° 2019-830 QPC, 12 mars 2020, « Conseil national des centres commerciaux », §5.

* 234 Ibid., §13.

* 235 Ibid., §5.

* 236 Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.

* 237 CJUE, 30 janvier 2018, « Amersfoort et Appingedam », C-360/15 et C-31/16.

* 238 Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.

* 239 Le niveau de loyer d'un local commercial est déterminé par une multitude de facteurs et notamment le chiffre d'affaires prévisionnels du commerçant, la localisation géographique, le flux de visite, l'exposition du local, la facilité d'accès.

* 240 Soit octobre, novembre, décembre.

* 241 Insee, Fêtes de fin d'année, soldes, « Black Friday » : un impact marqué sur les ventes du commerce de détail, 2019

* 242 https://www.lsa-conso.fr/le-marche-du-jouet-a-72-millions-d-euros-de-ventes-a-rattraper-avant-la-fin-de-l-annee,449836

* 243 Dans l'hypothèse où son loyer représenterait 15 % de son CA annuel

* 244 Une étude de l'observatoire du financement des entreprises

* 245 https://www.lsa-conso.fr/commerces-la-mensualisation-des-loyers-incluse-dans-le-projet-de-loi-simplification-exclusif-lsa,455195. « Actuellement, les dépôts de garantie peuvent être beaucoup plus importants. La semaine dernière encore, un commerçant rouennais nous disait que son dépôt de garantie était de douze mois ».

* 246 https://www.courdecassation.fr/publications/rapport-annuel/rapport-annuel-2018-de-la-cour-de-cassation.

* 247 Sur les autres recours devant la CNAC au titre de 2022 : 15 recours émanaient des porteurs de projet et 8 des préfets.

* 248 Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur

* 249 CJUE, 30 janvier 2018 « Amersfoort et Appingedam », C-360/15 et C-31/16

* 250 Le taux de vacance commerciale moyen est passé de 13% à 15 % dans les centres commerciaux entre 2019 et 2023 (source : Codata « état des lieux de l'immobilier commercial et du retail en France au 1er janvier 2024).

* 251 Recensement de mai 2021 du Conseil national des centres commerciaux.

* 252 Certains calculs portent ce coût à 6 ou 8% du PIB : « La sobriété normative pour renforcer la compétitivité des entreprises », rapport du Sénat du 15 juin 2023, pp. 60 et s. : r22-7431.pdf (senat.fr).

* 253 Dans un « mémo » du 14 novembre 2006 : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/MEMO_06_425.

* 254 Sénat, Rapport d'information fait au nom de la délégation aux entreprises relatif à la simplification des règles et normes applicables aux entreprises, 15 juin 2023, p. 151 et s.

* 255 Résolution du Parlement européen du 12 mai 2011 sur le réexamen du Small Business Act (2012/C 377 E/14.

* 256The SME Test: Taking SMEs and entrepreneurs into account when regulating, 7 novembre 2022 : pdf (oecd.org).

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