Trésorerie des associations

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer la trésorerie des associations.

Discussion générale

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Nous nous retrouvons après la proposition de loi sur l'engagement associatif qui nous a donné l'occasion de travailler sur l'action, l'utilité sociale et les capacités d'évolution des associations. Le présent texte aborde le sujet majeur de leur trésorerie. L'adage selon lequel l'argent est le nerf de la guerre, trouve toute sa vérité, dès lors qu'on l'applique aux structures associatives dont les ressources sont limitées et complexes à obtenir. J'en suis convaincu, en tant que secrétaire d'État et élu local.

Le Gouvernement a lancé plusieurs chantiers pour développer et diversifier les ressources des associations, dans le cadre de la feuille de route que j'ai présentée le 29 novembre dernier, notamment sur les groupements d'employeurs associatifs, ou encore le soutien au mécénat des TPE et PME par le plancher de don à 10 000 euros.

Ce texte lève les freins à la constitution de fonds propres grâce auxquels les associations peuvent investir et se projeter dans l'avenir ; il leur permet de recevoir leurs subventions dans des délais compatibles avec leurs obligations de gestion ; enfin, il s'empare de la question des fonds bancaires inactifs.

Cette proposition de loi est issue d'un rapport remis au Premier ministre il y a plus d'un an, rédigé par le mouvement associatif et qui a alimenté la feuille de route que j'ai présentée le 29 novembre dernier. L'Assemblée nationale a voté ce texte à l'unanimité, car il répond aux attentes locales : développement d'actions culturelles, gestion d'Ehpad, mise en place d'activités périscolaires, mais aussi rôle d'éclaireur pour alerter les politiques.

Les deux dernières années ont vu s'exprimer des inquiétudes, des critiques, parfois, dans le monde associatif, liées à la fin des emplois aidés. Nous l'assumons car c'était une forme de subventionnement déguisé. Dans un contexte où les ressources ne sont pas stables, mieux vaut favoriser la diversité des ressources et des modèles de gouvernance pour une structuration plus robuste. D'où la transformation du CICE en baisse des charges, qui rend 1,4 milliard d'euros au secteur associatif, auquel s'ajoutent en 2019 les 500 millions d'euros de crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires - qui ne concerne certes pas toutes les associations, mais dont l'effet est loin d'être négligeable. Nous avons également multiplié les postes du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) et facilité la prévisibilité des ressources des associations, satisfaisant ainsi une demande récurrente du secteur.

L'article premier, supprimé en commission, ce que je regrette, permet aux associations de conserver les excédents raisonnables issus de financements publics. Il renforce les outils de performance sans rogner sur leurs missions d'intérêt général. En renforçant leurs fonds propres, elles bénéficieront de davantage de visibilité et de prospective. Je demanderai le rétablissement de cet article.

L'article premier bis prévoyait un délai maximal de 60 jours pour le versement des subventions publiques ; il a été négocié avec les associations d'élus pour donner de la visibilité aux structures tout en préservant des conditions de paiement réalistes pour l'État comme pour les collectivités.

L'article 2, en revanche, n'a pas été modifié ; il facilite notamment les prêts à taux zéro entre associations membres d'une même fédération. Il incite à la mutualisation des compétences et des ressources. Il facilitera le premier recrutement dans une structure associative.

L'article 3 rend possible la récupération des fonds bancaires inactifs qui passent dans le budget de l'État après 30 ans. Pas moins de 1,9 milliard d'euros a ainsi été rendu à l'État, l'an dernier, en provenance de comptes en déshérence, sans qu'on sache évaluer le montant issu des associations. Il serait juste que ces fonds bénéficient au développement de la vie associative.

L'article 3 bis prévoit la présence des parlementaires dans des commissions départementales du fonds départemental de la vie associative (FDVA) sur le format des commissions pour la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). La diversité des regards et des expériences est indispensable pour réaliser les choix les plus pertinents pour les territoires.

L'article 4 réserve aux associations d'intérêt général et aux fondations reconnues d'utilité publique la mise à disposition des biens immobiliers dits « mal acquis » ; la commission des lois a élargi le périmètre à certaines sociétés immobilières, ce qui éloigne la mesure de son objet. Je vous proposerai de rétablir la rédaction de l'Assemblée nationale.

L'article 4 bis préservait certains biens des associations des préemptions communales, leur assurant ainsi une sécurité juridique forte. Je vous proposerai de le réintégrer.

L'article 5 a été préservé en l'état, ainsi que les suivants qui relevaient de dispositions techniques.

Les amendements déposés traitent de sujets d'actualité, comme par exemple les délais d'abattement sur les dons et legs dans le cadre d'une succession. Une mission est en cours sur ce sujet, qui aboutira à la rentrée.

Il convient que ce texte soit adopté rapidement car les travaux dont il est issu ont commencé en 2017. Il faudrait que les parlementaires puissent siéger dans les commissions qui attribuent les subventions, dès 2020. Enfin, d'autres textes, comme la proposition de loi sur l'engagement associatif déjà discutée ici, mais aussi le projet de loi de finances, seront adoptés bientôt. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Les Indépendants et RDSE)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur de la commission des lois .  - Ce texte, adopté à l'Assemblée nationale le 26 mars, est issu d'une proposition de loi de Mme Sarah El Haïry, nommée par la suite rapporteure de la commission des lois de l'Assemblée nationale. Il a été très étoffé au Palais Bourbon, passant de six à dix articles avant son examen au Sénat.

Simplifier la gestion des associations et alléger la tâche de ceux qui s'y consacrent est un objectif partagé. La commune est le premier partenaire des quelque 1,5 million d'associations actives en France. La commission des lois a cherché à préserver le lien de confiance entre ces structures et les collectivités territoriales, en refusant de faire peser sur ces dernières des contraintes trop lourdes. Leurs relations ont évolué au cours des dix dernières années, car les subventions ont baissé tout comme les dotations des collectivités. Cependant associations et communes travaillent ensemble, généralement en bonne intelligence.

La commission des lois a supprimé l'article premier qui confère aux collectivités territoriales l'obligation d'accorder à un organisme à but non lucratif la possibilité de conserver un « excédent raisonnable » sur les ressources non utilisées. Cette faculté est déjà ouverte dans le droit européen, pour le régime des subventions que celui-ci ne considère pas comme des aides d'État, mais ce texte va plus loin en reconnaissant implicitement aux associations un droit à la conservation des excédents de subventions publiques, sans tenir compte de la réalité des collectivités territoriales. La commission l'a supprimé.

La commission a également supprimé l'article premier bis, issu d'un amendement du Gouvernement en séance publique, prévoyant un délai de versement des subventions de 60 jours à compter de la notification de décision d'attribution. C'est méconnaître la manière dont les collectivités territoriales fonctionnent. Aucune d'entre elles ne peut verser en une seule fois une subvention de plusieurs dizaines voire centaines de milliers d'euros. Les collectivités doivent pouvoir étaler le versement des subventions dans le temps, car elles reçoivent leurs dotations de manière de plus en plus fragmentée et tardive. Évitons de mettre inutilement en cause leur responsabilité en inscrivant dans la loi une obligation qu'elles ne pourront pas honorer.

La commission des lois a adopté sans modification les articles 2 et 3, même si à titre personnel je m'interroge sur leur portée et leur intérêt.

L'article 3 bis est un bien maigre palliatif à la suppression de la réserve parlementaire dont pouvaient bénéficier certaines associations : il donne aux parlementaires une place dans les commissions départementales du FDVA.

L'article 4 est intéressant, qui confie à des associations d'intérêt général ou reconnues d'utilité publique la gestion d'immeubles saisis lors d'une procédure pénale. Cette disposition correspond à une demande ancienne du monde associatif. La commission des lois a élargi le périmètre aux foncières intervenant dans le logement social.

L'article 4 bis exclut du droit de préemption les aliénations à titre gratuit au profit des organisations non lucratives. Cette disposition a connu un passé législatif tortueux et je salue le travail de Mme Deromedi, rapporteur de l'ordonnance de 2015 sur la simplification du régime des associations et des fondations, ordonnance dont le Gouvernement n'a jamais proposé la ratification. La commission des lois a supprimé cet article, car il convient que les collectivités territoriales aient priorité sur les associations de l'exercice de ce droit.

La commission des lois a donc conservé plusieurs mesures utiles dans ce texte. D'autres ne semblaient pas judicieuses. Malgré l'importance et l'engagement des associations dans la vie de notre pays, la loi ne saurait les placer au même niveau que les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)

Mme Maryse Carrère .  - « Vive la République ! » : c'est le cri qui a marqué l'adoption définitive de la loi de 1901 sur le contrat d'association. Quoi de plus républicain qu'une loi combinant l'objectif de laïcisation cher à l'époque et la liberté d'association, dans un contexte de peur des congrégations ? Quoi de plus républicain qu'une loi mettant fin à un interdit de 110 ans, celui de constituer des groupements professionnels et de se syndiquer ? Ce cadre établi grâce à l'habileté de Pierre Waldeck-Rousseau a résisté à l'épreuve du temps.

Nos associations sont le creuset de notre modèle social, le rempart face à l'individualisme croissant. Je rends hommage aux 16 millions de bénévoles qui les animent sans compter leurs heures ni rien exiger en retour.

Je salue le travail de la commission des lois sur ce texte. Ainsi, la conservation de l'excédent de subvention était difficile à appliquer faute de définition précise du mot « raisonnable ».

Conservé, l'article 2, qui facilite les prêts entre associations, est utile. Il offre un outil de solidarité aux associations qui pourront être aidées par leur maison-mère en cas de coup dur.

Quant aux comptes bancaires en déshérence, il est bienvenu qu'ils soient réaffectés aux associations actives par la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Toutes les associations ne roulent pas sur l'or et il faut encourager toutes les initiatives qui élargissent leurs moyens d'action.

L'ouverture aux parlementaires de la participation aux collèges départementaux du FDVA montre bien que la vocation de la réserve parlementaire n'était pas le clientélisme... (M. Olivier Paccaud renchérit.)

En s'appliquant à toutes les associations sans distinction aucune, le texte dévoie l'équilibre trouvé par Waldeck Rousseau. Le financement public de certaines associations cultuelles est problématique voire inacceptable, surtout lorsque les exemptions fiscales dépassent le montant des subventions. Il faudrait de la cohérence. (Mme Nathalie Goulet approuve.)

Le groupe RDSE déposera un amendement en ce sens, en imposant aux associations cultuelles de s'enregistrer comme telles sous le régime de la loi du 9 décembre 1905. Attachés au principe de séparation de l'Église et de l'État, nous souhaitons envoyer un signal avant les débats sur la laïcité.

Le groupe RDSE votera dans sa grande majorité cette proposition de loi, en étant vigilant sur le sort de ses amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; Mmes Nathalie Goulet et Nadia Sollogoub applaudissent également.)

Mme Nathalie Goulet .  - Faciliter le financement des associations est un objectif louable, mais il ne doit pas aller sans transparence. Évitons d'être naïfs. C'est le sens des recommandations d'un récent rapport de Tracfin, qui relève des carences dans le fonctionnement du secteur, et reprend au demeurant les conclusions de plusieurs rapports du Sénat sur le financement de l'islam et des lieux de culte mais aussi un rapport récent de l'Assemblée nationale sur la lutte contre les réseaux d'extrême droite.

Je proposerai sans beaucoup d'espoir quelques amendements de bon sens, ayant le même objet. Il conviendrait que la majorité du Sénat renonce à ses hésitations.

M. Roger Karoutchi.  - Allons donc !

Mme Nathalie Goulet.  - Il serait curieux qu'elle demande plus de transparence aux associations cultuelles, notamment en ce qui concerne les financements étrangers, mais refuse de voter ici des amendements en ce sens.

Il en est ainsi de l'alignement des statuts des associations gérant un lieu de culte sur ceux des associations cultuelles. Le Sénat a d'ailleurs déjà voté un tel alignement dans la loi Égalité et citoyenneté, contre l'avis de Mme Gatel, alors rapporteure... Pourquoi ne pas envisager la création d'un fichier indiquant les noms des trésoriers et des présidents de ces associations ?

Nous pêchons par naïveté, et pourtant l'excellent président Larcher a suggéré, dans un fascicule récemment publié, (L'oratrice montre un exemplaire de la Loi de 1905, Laïcité, Religions et République.) que nous pourrions inciter toutes les associations à se ranger sous le statut de la loi de 1905, y compris les associations cultuelles musulmanes, ce qui n'irait pas sans déranger les associations des cultes installés. Le problème est d'égalité devant la loi.

Autre niveau d'intervention, on pourrait comme le demande Tracfin abaisser le seuil de contrôle des comptes, actuellement à 153 000 euros. Cela aurait toutefois pour conséquence le contrôle par un commissaire aux comptes.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Nathalie Goulet.  - Bref, il y a des marges de progression ; d'où mes amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Joël Guerriau .  - Constitué de plus de 1,5 million d'entités, le monde associatif est indispensable à la vie de nos villes et de nos campagnes. Il compte 2 millions de salariés, 16 millions de bénévoles, et représente un volume financier de 110 milliards d'euros.

Les associations sportives, les associations d'insertion et les réseaux d'aide favorisent le lien social dans nos territoires. L'activité des bénévoles qui y consacrent leur temps représente 19 milliards d'euros si l'on prend comme valeur le Smic horaire ou 40 milliards d'euros si l'on considère le salaire moyen. Cette proposition de loi vise à les soutenir. Je salue ici leur travail et leur admirable dévouement. Les subventions sont la juste reconnaissance de la contribution des associations à la mise en oeuvre des politiques publiques.

La disparition de la réserve parlementaire a toutefois fragilisé la situation financière des associations qui ne disposent plus de fonds propres suffisants pour investir et se développer.

Dans ce contexte, l'article premier est une avancée nécessaire. Il autorise les associations à conserver les « excédents raisonnables » résultant des subventions perçues, pour autant que les objectifs aient été atteints. J'ai déposé un amendement visant à le rétablir.

L'article premier bis répond aux besoins de trésorerie des associations les plus modestes, en encadrant les délais de versement des subventions, à l'instar des délais de paiement de la commande publique. J'ai déposé un amendement visant à le rétablir, mais en fixant le délai à 90 jours pour laisser plus de souplesse aux collectivités.

Je défendrai enfin le rétablissement de l'article 4 bis sur le droit de préemption. Entre 2013 et 2015, quelque 35 % des fondations reconnues d'utilité publique ont reçu entre 500 000 euros et 17 millions d'euros à ce titre.

L'ordonnance du 23 juillet 2015 avait exclu les biens des associations du champ de la préemption urbaine, mais les évolutions liées à l'adoption de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques les y avaient soumises à nouveau, involontairement. Je proposerai de rétablir cet article qui corrige cette malfaçon.

Les associations contribuent au maillage de notre cohésion sociale. Il est heureux que des hommes et des femmes agissent avec l'élan du coeur pour montrer que vivre en société, c'est aussi se prendre en charge sans systématiquement compter sur la puissance publique. Les représentants associatifs constituent un vivier d'interlocuteurs indispensable pour les élus locaux. Les associations font vivre le tissu économique local. Elles ont besoin de souplesse et pas de contraintes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - En France, le Mouvement associatif est exceptionnellement vivant : 1,3 million d'associations, où sont engagés 16 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés. Chaque année, 70 000 associations se créent. À Mayotte, l'engagement citoyen est très actif.

Le travail des associations est remarquable : lien social, relais entre État et collectivités territoriales dont elles pallient même parfois les défaillances. Je leur dois même mon engagement en politique, après avoir co-créé en 2003 l'association dite Tama, qui signifie « Espoir » en shimaoré, destinée à lutter contre l'exclusion des jeunes et la délinquance qui en est la première cause. Cette association, que j'ai présidée pendant quinze ans, compte à présent 200 salariés. Le 28 janvier 2015, j'ai inauguré le Dago Tama, maison de l'espoir, premier centre de placement éducatif de l'île, qui aide les jeunes placés sous-main de justice selon l'ordonnance de 1945.

Aussi cette proposition de loi est-elle particulièrement importante. Elle procède en partie du rapport du mouvement associatif de 2017, lui-même inspiré du rapport du Haut Conseil de la vie associative (HCVA) de 2014.

Je regrette que le Sénat compromette le consensus, en étant revenu sur les articles premier et premier bis.

L'argument selon lequel ces dispositions troubleraient les relations entre associations et collectivités territoriales ne nous convainc pas, les associations d'élus n'ayant manifesté aucun désaccord depuis leur consultation en mars.

Le groupe LaREM déposera cinq amendements de rétablissement du texte de l'Assemblée nationale et votera en fonction du sort qui leur sera fait. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants ; Mme Élisabeth Doineau applaudit aussi.)

Mme Céline Brulin .  - Les associations assurent des missions sportives, culturelles, mettent en oeuvre les politiques de l'État, véhiculent les valeurs au coeur du pacte républicain, rassemblent deux millions de salariés et composent pour près de 3 % du PIB, avec un budget de 113 milliards d'euros.

Cette proposition de loi leur apporte un soutien mérité en améliorant leur trésorerie, ce qui revient à accroître leurs ressources. C'est indispensable, tant la diminution des emplois aidés les a touchés. Certaines n'y ont pas résisté. Monsieur le ministre, s'ils n'ont jamais constitué une solution miracle, les emplois aidés ont mis le pied à l'étrier à de nombreuses personnes et fait vivre de multiples associations.

La suppression de la réserve parlementaire n'a pas été compensée par un abondement du FDVA, ce qui a eu des conséquences sur les associations les plus modestes. La suppression de l'impôt sur la fortune, a entraîné une baisse des dons aux associations. La diminution des budgets publics et des dotations aux collectivités territoriales ont été d'autres coups durs portés aux associations.

La commission des lois a fait le choix regrettable de supprimer des dispositions favorables aux associations, au motif qu'elles faisaient peser des contraintes sur les collectivités territoriales. Certains articles méritent sans doute d'être améliorés. D'où nos amendements de rétablissement.

Les questions du trop-perçu et des délais de versement des subventions sont essentielles pour les structures associatives, sans pour autant placer les collectivités territoriales devant des difficultés insurmontables. Veillons à ne pas opposer associations et collectivités, dans une logique de pénurie relevant de choix politiques austéritaires.

La suppression des articles premier, premier bis et 4 rend cette proposition de loi modeste. Elle demeure néanmoins pertinente. L'article 3 permettra de récupérer les fonds dormants des comptes inactifs des associations : ne négligez pas cette occasion d'avancer. Elle suffirait pour voter ce texte, mais nous pouvons encore l'améliorer. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

M. Patrick Kanner .  - J'ai salué cette proposition de loi en commission. Malheureusement, les amendements de la rapporteure, tardivement déposés, ont fait exploser le consensus.

C'est dommage, vraiment dommage ! Ancien ministre chargé de la vie associative, je souscris à l'objectif poursuivi par cette proposition de loi. L'engagement des 16 millions de bénévoles et des 2 millions de salariés nous oblige.

L'esprit de consensus que j'évoquais ne doit pas se traduire par un blanc-seing donné au Gouvernement. Cependant, nous pouvons faire un petit pas dans le bon sens en votant ce texte, qui reprend des mesures engagées sous le précédent quinquennat. N'oublions toutefois pas le contexte, fait de restrictions budgétaires et de baisses de dotations. En supprimant 250 000 emplois aidés en deux ans, le Gouvernement a asséné un coup terrible au monde associatif. Combien de structures sont désormais en péril ? Combien de personnes sont ainsi privées d'une possibilité de réinsertion ?

Le secteur associatif doit être soutenu pour irriguer l'ensemble du territoire et apporter un cadre et des repères aux plus jeunes. C'est dès le plus jeune âge que l'engagement citoyen doit être encouragé. La République a besoin de contenu et de réalité. Il faut dire plus clairement quelle République nous voulons.

Le service civique au sein duquel l'engagement est passé de quelques milliers de volontaires en 2012 à 125 000 à la fin du quinquennat précédent, dont le budget est stabilisé voire conforté, monsieur le ministre, devra accueillir 150 000 jeunes par an. Notons d'ailleurs que le budget du service national universel est, à 1,6 milliard d'euros, bien plus élevé que celui du service civique.

Les associations devaient 51 % de leurs ressources aux financements publics en 2005. Hélas, cette part ne cesse de se réduire, n'étant plus qu'à 49 % en 2011. Les associations sont soumises à une concurrence, celle d'autres acteurs du secteur public, mais aussi d'acteurs privés. Ce changement pourrait mettre à mal notre modèle français.

Les associations créent un lien social précieux sur nos territoires. Le risque d'une baisse de leur activité en raison d'une diminution des financements alourdirait les missions de l'État. Les mesures fiscales des récents budgets ont encouragé l'épargne. Ce n'est pas critiquable en soi, mais c'est dangereux pour nos associations. Le prélèvement à la source a déstabilisé le système des dons des particuliers. Le remplacement de l'impôt sur la fortune (ISF) par l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) a diminué le nombre des foyers assujettis des deux tiers, de 358 000 à 120 000, et supprimé ainsi l'incitation à la générosité à l'adresse des plus fortunés. De plus, l'augmentation du taux de CSG touche les retraités, donateurs traditionnels.

La position de la commission des lois sur ce texte est pour le moins déconcertante. Nous faisons du sur place ; nous reculons même avec la suppression de l'article premier, qui traduisait dans la loi une proposition du mouvement associatif faite depuis 2014. Loin de créer une contrainte pour les collectivités, le dispositif ne fait qu'ouvrir une simple faculté ! Où sont les risques de tension ?

Même chose sur l'article premier bis. Les collectivités territoriales pourront toujours gérer leurs finances puisque le délai de 60 jours court à partir de la notification de la subvention. Elles ne sont pas non plus tenues de tout payer en un seul coup.

La suppression de l'article 4 bis nous surprend également et les motivations de la commission, à savoir les intérêts des collectivités territoriales, sont inappropriées. Évitons d'opposer le droit des collectivités territoriales à l'intérêt du monde associatif, alors que ce texte vise surtout à résoudre des incohérences législatives. Le Sénat avait adopté cette mesure sans modification dans la loi Égalité et citoyenneté !

Heureusement, vous n'avez pas touché - petite consolation - aux fonds en déshérence gérés par la CDC.

Nous aurions préféré une grande loi sur le monde associatif, mais nous pouvons toujours avancer step by step... voire vers un vote conforme pour raccourcir la navette. Ces mesures sont urgentes. Notre vote dépendra de la position de la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Anne-Marie Bertrand .  - L'État ne peut pas tout, et les 1,3 million d'associations que compte notre territoire en sont la preuve. Nos concitoyens s'investissent avec ferveur : un Français sur quatre est bénévole, un foyer sur deux fait un don à une association. Nous pouvons être fiers d'eux, comme de nos élus municipaux, dont 370 000 sont bénévoles. Ils sont les artisans de la citoyenneté. On pense aux associations caritatives, sportives, culturelles, mais le tissu associatif est très varié ; pour avoir été maire, je peux témoigner de la richesse qu'il représente pour une commune.

Je profite de cette tribune pour évoquer l'Association d'aide pénale (AAPé) qui participe depuis 1978 au traitement de la délinquance et à l'insertion sociale ; elle a progressivement élargi ses missions à la médiation pénale, à la réparation pénale, à des stages de sensibilisation à la violence, puis au soutien à la parentalité. Pouvons-nous véritablement parler d'association au sens commun du terme, quand elle joue un rôle d'auxiliaire de justice ?

Les associations pallient trop souvent les manquements de l'État. Celui-ci ne doit pas s'en satisfaire.

Avec la menace terroriste, les associations assurent de plus en plus elles-mêmes la sécurité de leurs événements. Au-delà du coût, où est l'État ? La liberté d'association ne vaut que si elle trouve à s'exercer.

Ce texte vise à encourager la philanthropie à la française. Très bien, mais cela ne doit pas faire oublier la nécessaire réforme de l'État. On ne peut encourager les Français à davantage financer les associations sans en même temps réduire les prélèvements obligatoires quand ces associations prennent le relais de l'État ! Attention à ne pas entretenir des doublons. Je souhaite un État délesté et fort là où il doit l'être. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le monde associatif est devenu un acteur incontournable dont les compétences se sont multipliées. Bons petits soldats, elles rendent de quasi-services publics.

Ce texte est donc une bonne nouvelle. Si le monde associatif renonçait devant la complexité administrative, qui ferait vivre la pratique sportive et artistique, l'humanitaire, le social, les associations environnementales, la défense des consommateurs, l'enseignement privé, les Ehpad associatifs, les services d'aide à domicile qui sont parfois les plus gros employeurs du territoire ?

L'article 3 bis prévoit la présence de parlementaires dans les commissions départementales du FDVA : nous participerons concrètement au maillage territorial.

L'article 3 est intéressant. Il porte sur les associations en déshérence qui telle Blanche-Neige attendent le baiser qui les réveillera. (Sourires)

M. Loïc Hervé.  - C'est beau !

Mme Nathalie Goulet.  - C'est un peu sexiste !

Mme Nadia Sollogoub.  - Leurs fonds dormants pourraient profiter à d'autres causes - du moment qu'ils ne viennent pas se substituer aux fonds publics !

Le groupe UC soutiendra ce texte de souplesse, d'ouverture à la mutualisation et au secteur privé, avec pour seule limite de ne pas imposer de contraintes supplémentaires aux collectivités.

Mme Nathalie Goulet.  - Absolument.

Mme Nadia Sollogoub.  - Les manifestations organisées par les associations sans but lucratif assurent la vitalité locale mais leur imposent de multiples déclarations aux Urssaf, pour quelques heures de travail, par exemple de gardiennage... Nous proposons qu'elles puissent déroger, dans la limite de six fois par an, à ces obligations déclaratives ; ce serait un simple alignement de la réglementation sociale sur la réglementation fiscale.

Tous les acteurs ont le même visage, celui de l'engagement, de la passion pour une cause, le visage de mon voisin.

M. le président.  - Il faut conclure.

Mme Nadia Sollogoub.  - Aidons-les, car personne n'a les moyens, humains et financiers, de remplacer cette armée de bénévoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC ; M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

M. Guillaume Chevrollier .  - La France compte 1,3 million d'associations, 13 millions de bénévoles. C'est une richesse extraordinaire, que je mesure quotidiennement dans mon département. Il faut encourager le mouvement associatif dans une société tentée par l'individualisme, que Tocqueville définissait comme « le désintérêt pour les affaires publiques et l'amour des jouissances matérielles ». L'engagement associatif permet de bâtir une société solidaire, active, concrète, au plus près de nos réalités.

Avec cette proposition de loi, le Gouvernement se lance dans une opération de séduction. Pourtant, ses choix fiscaux et budgétaires ne sont pas étrangers aux difficultés des associations. Le nombre de contrats aidés est passé de 80 000 à 30 000 entre 2017 et 2018. Pas moins de 12 500 employeurs associatifs ont disparu en 2017, année de la suppression de la réserve parlementaire qui permettait de soutenir les petites associations. (M. André Reichardt renchérit.)

Pour pallier l'absence de réel plan d'action du Gouvernement, cette proposition de loi reprend certaines préconisations du rapport du Mouvement associatif remis en mai au Premier ministre.

La commission des lois a supprimé les articles soumettant les collectivités territoriales à des délais de versement de subventions aux associations ou supprimant leurs possibilités de préemption. N'imposons pas de contraintes supplémentaires à des collectivités déjà soumises à une insécurité financière et veillons à ne pas altérer la relation de confiance entre associations et collectivités territoriales.

Le groupe Les Républicains votera le texte tel qu'issu de la commission des lois et rappelle son soutien au monde associatif, dont les membres engagés seront les élus de demain. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Alain Dufaut .  - Un texte législatif sur les associations est toujours une bonne chose.

La situation financière des associations a toujours été une préoccupation, mais depuis quelques mois elle s'est aggravée.

Transformation de l'ISF, augmentation de la CSG, prélèvement à la source et mouvements sociaux ont eu des incidences sur la collecte de dons. À la fin des contrats aidés s'ajoutent la baisse des subventions publiques, la suppression de la réserve parlementaire et l'inadéquation du FDVA. Les associations sont à l'os.

Le FDVA, mis en place par pur dogmatisme, devait recevoir 120 millions d'euros ; il n'en a que 25. Le Gouvernement fait des économies sur le dos des associations. En 2019, le FDVA du Vaucluse a reçu des demandes de 191 associations pour un montant cumulé de 1 105 376 euros. Le delta avec les montants versés est abyssal.

Monsieur le ministre, vous ne prenez pas conscience des effets désastreux de vos décisions. Je pense au désarroi de ces bénévoles qui ne peuvent acheter de nouveaux maillots pour leurs jeunes sportifs...

C'est grâce aux 16 millions de bénévoles que nos communes ont une vie culturelle, sportive et sociale. Leur altruisme mérite reconnaissance et considération ; ils sont souvent les premiers de cordée aux côtés des maires dans nos villages et nos quartiers.

Cette proposition de loi est une façon de leur exprimer notre reconnaissance. Elle va dans le bon sens et inclut des demandes de la vie associative, même si elle ne corrigera pas les effets désastreux de la politique du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié ter, présenté par MM. Guerriau, Wattebled, Mizzon, Henno, Fouché et Bonnecarrère, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Canevet, Mmes Garriaud-Maylam, Noël et Kauffmann et MM. Chasseing, Paccaud, Chatillon, Nougein, Grand, Decool, Gabouty, Daubresse et Laménie.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le mot : « versement », la fin de la première phrase du quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi rédigée : « , les conditions d'utilisation et les modalités de contrôle et d'évaluation de la subvention attribuée ainsi que les conditions dans lesquelles l'organisme, s'il est à but non lucratif, peut conserver un excédent raisonnable sur les ressources non consommées affectées à une dépense déterminée. »

M. Joël Guerriau.  - Les associations ont des difficultés financières, chacun le sait. L'article premier leur permet de conserver un éventuel excédent trop-versé au-delà d'un bénéfice raisonnable. En effet, l'absence de fonds propres peut faire obstacle à leur développement.

La possibilité de conserver un excédent, c'est aussi éviter l'incitation à dépenser pour dépenser !

M. le président.  - Amendement identique n°18, présenté par le Gouvernement.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Cet amendement rétablit l'article premier qui inscrit dans la loi la notion de bénéfice raisonnable et précise les modalités de contrôle des subventions.

Il s'agit d'inciter les associations à davantage d'efficience plutôt qu'à consommer au plus vite leurs subventions pour ne pas perdre les excédents.

Cela reste une simple faculté, non une contrainte. Les associations seront ainsi incitées à se constituer des fonds propres pour investir et jouir d'une plus grande prévisibilité.

M. le président.  - Amendement identique n°24 rectifié, présenté par M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Patrick Kanner.  - J'ai évoqué l'insécurisation du secteur associatif à la suite des mesures qui ont affecté son fonctionnement - et qui auraient mérité une étude d'impact préalable.

Nous avons ici la possibilité de leur adresser un signal fort, par une mesure simple qui leur permettra de se développer et de remplir leur mission d'intérêt général.

Nous regrettons que la commission des lois ait supprimé cet article qui n'offre qu'une possibilité, comme l'a rappelé le ministre. Seuls les organismes à but non lucratif seraient concernés. Il n'est pas sérieux de susciter de fausses peurs sur le dos du secteur associatif, qui serait trop dépensier... Ce n'est pas à la hauteur du respect que nous lui portons.

La commission des lois a évoqué un risque de tensions entre collectivités territoriales et associations, mais celles-ci savent travailler ensemble, dans le dialogue et la confiance.

M. le président.  - Amendement identique n°46, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe La République En Marche.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Nous ne comprenons pas pourquoi la commission a supprimé cet article, vidant la proposition de loi d'une grande partie de sa substance. Cet article renforce la trésorerie des associations qui ont peu de fonds propres. Son champ d'application est limité aux seuls organismes à but non lucratif.

C'est une mesure que le HCVA propose depuis 2014, et qui est très attendue par tous les acteurs du monde associatif.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le mot : « versement », la fin de la première phrase du quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi rédigée : « , les conditions d'utilisation et les modalités de contrôle et d'évaluation de la subvention attribuée ainsi que les conditions dans lesquelles l'organisme, s'il est à but non lucratif, conserve un excédent raisonnable sur les ressources non consommées affectées à une dépense déterminée. Un décret pris en Conseil d'État définit ce que représente un excédent raisonnable. »

Mme Céline Brulin.  - Nous désapprouvons la suppression de l'article premier. Je rappelle que nous parlons ici d'organismes à but non lucratif : les associations ne font pas de bénéfices sur le dos des collectivités territoriales !

Le texte de l'Assemblée nationale était trop imprécis, dit le rapporteur. Nous précisons donc les choses et faisons de la possibilité prévue une réalité. Une fois n'est pas coutume, nous renvoyons à un décret en Conseil d'État le soin de préciser la notion d'excédent raisonnable.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur.  - Qu'est-ce que cet article, sinon une opération de séduction à destination des associations ? Il ne prévoit qu'une faculté - qui existe déjà. En effet, les collectivités territoriales et les associations se mettent déjà d'accord sur les excédents. Ne mettons pas sur le même plan des associations dont la taille peut être très variée, de la petite association de boulistes à celle qui gère des fonds considérables...

Aucune collectivité territoriale ne met en péril une association en lui reprenant des fonds dont elle aurait besoin. Avis défavorable à tous ces amendements.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - N'opposons pas collectivités territoriales et associations. Je suis moi-même élu local, je sais qu'une commune qui va bien est une commune où les associations vont bien, et inversement.

Cet article n'oblige personne à rien mais offre une faculté. C'est déjà possible, dites-vous ? S'il n'y avait pas de problème, ce ne serait pas l'une des principales revendications du monde associatif !

Actuellement, il peut y avoir report : la somme n'entre pas dans les fonds propres de l'association mais est considérée comme une nouvelle subvention.

Avis défavorable à l'amendement n°12 au profit des précédents. Plutôt que renvoyer à un décret en Conseil d'État, nous préférons que la définition de l'excédent raisonnable se fasse au plus près du terrain, dans la fluidité.

M. Alain Marc.  - On ne légifère pas pour donner des signaux, mais pour faire la loi. La notion d'excédent raisonnable doit être mieux définie. Si la somme est reportée, la collectivité peut alors ne pas accorder de subvention l'année suivante !

Je viens du monde associatif, et je n'ai jamais rencontré d'association qui formule une telle demande. Je ne voterai pas ces amendements.

Mme Muriel Jourda.  - Chaque association négocie une subvention auprès de la mairie, qui évalue ses projets, ses besoins de trésorerie, entre adultes consentants, si j'ose dire... Pourquoi modifier la loi, au-delà de l'affichage ? En France, nous prenons trop souvent les espaces de liberté pour des vides juridiques. Conservons des espaces de liberté ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. François-Noël Buffet, vice-président de la commission des lois.  - On ne légifère pas pour faire plaisir aux uns ou aux autres, mais pour établir des règles simples et claires. Les collectivités territoriales ont des rapports libres avec les associations. Comment caractériser juridiquement la notion d'excédent raisonnable ? Les critères d'appréciation seront toujours subjectifs, selon l'association. En inscrivant cette référence dans la loi, on risque de créer des nids à contentieux. Laissons faire les collectivités territoriales, dans une relation de confiance avec le monde associatif.

M. François Bonhomme.  - Le paysage associatif est très divers. Le Haut Conseil de la vie associative est assez peu représentatif ; il ne convient pas de s'en réclamer. La notion d'excédent raisonnable, outre son caractère juridiquement incertain, alimenterait une confusion préjudiciable. Quand les choses ne fonctionnent pas, c'est souvent que les collectivités territoriales n'exercent pas leur droit de contrôle.

Monsieur Kanner, il est hors de propos de parler d'insécurisation. Les difficultés des associations ont commencé quand les collectivités territoriales ont subi une baisse de dotations de 11 milliards d'euros, qu'elles ont dû répercuter sur les subventions qu'elles accordaient !

Laissons les collectivités territoriales exercer leurs prérogatives. Tout le reste n'est que littérature. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Rachid Temal.  - Assez d'hypocrisie. Nous le savons, localement, les associations pallient les défaillances des collectivités territoriales. Il n'est pas question de déséquilibrer le système existant mais de permettre aux associations de conserver le reliquat pour se développer, au bénéfice des habitants.

La possibilité existe déjà, c'est vrai. Nous l'inscrivons dans la loi, sans défavoriser les collectivités territoriales et sans affichage.

Quant au débat sur la légitimité du HCVA, il vaut pour bien des instances et pourrait nous mener loin...

Les amendements identiques nos15 rectifié ter, 18, 24 rectifié et 46 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°12.

L'article premier demeure supprimé.

ARTICLE PREMIER BIS

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le délai de paiement de la subvention ou de son premier acompte est fixé à soixante jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention ou, le cas échéant, à compter de la date à laquelle les modalités de versement prévues dans la convention mentionnée à la première phrase du présent alinéa sont remplies. » ;

2° Au début de la seconde phrase, les mots : « Cette disposition ne s'applique » sont remplacés par les mots : « Ces dispositions ne s'appliquent ».

M. Pascal Savoldelli.  - Les collectivités territoriales n'ont pas toujours la trésorerie pour verser la subvention dans les 60 jours.

Plutôt que de supprimer l'article, nous proposons d'imposer le versement du premier acompte dans les 60 jours. La collectivité pourra ainsi échelonner ses subventionnements et les associations construire leurs projets au fil de l'eau. Cela facilitera le contrôle des flux financiers.

Enfin, les associations font plusieurs demandes de subvention, à différents échelons, pour un même projet. Souvent, une réponse positive en appelle d'autres, et des retards dans le premier versement bloquent le processus.

M. le président.  - Sous-amendement n°49 rectifié à l'amendement n°13 de Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, présenté par MM. Gabouty et Requier et Mme Costes.

Amendement n°13, alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le délai maximal de notification de la subvention ou de son premier acompte est fixé à deux mois à compter de la décision portant attribution de la subvention. » ;

M. Jean-Marc Gabouty.  - La collectivité territoriale peut toujours différer la notification. Le délai de notification est presque plus important que le délai de versement car il conditionne les prêts bancaires ou la signature de contrats. D'où cet amendement qui sécurise les associations, leurs fournisseurs et leurs contractants.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le délai de paiement de la subvention est fixé à soixante jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention ou, le cas échéant, à compter de la date à laquelle les modalités de versement prévues dans la convention mentionnée à la première phrase du présent alinéa sont remplies. » ;

2° Au début de la seconde phrase, les mots : « Cette disposition ne s'applique » sont remplacés par les mots : « Ces dispositions ne s'appliquent ».

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Le sous-amendement n°49 ne correspond pas au choix du Gouvernement. Le délai - 30, 60 ou 90 jours - a été longuement discuté à l'Assemblée nationale, ainsi qu'avec les associations d'élus, ADF, ARF et AMF. Il y a un consensus autour de 60 jours.

Je vous demande de rétablir cet article dans sa version votée par l'Assemblée nationale. C'est un gage de sécurité pour les associations.

M. le président.  - Amendement identique n°25 rectifié, présenté par M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Rachid Temal.  - Il ne s'agit pas de pénaliser les collectivités territoriales, mais de trouver un point d'équilibre. Une fois que la subvention a été décidée, il est difficile pour l'association de devoir attendre cinq ou six mois...

M. le président.  - Amendement identique n°47, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe La République En Marche.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Le versement tardif des subventions peut mettre en difficulté les associations, notamment les plus petites. Les difficultés de trésorerie sont aggravées par les frais bancaires qui en découlent.

Le délai de 60 jours retenu par l'Assemblée nationale est analogue aux délais qui s'appliquent dans la commande publique. C'est une mesure symbolique, puisqu'elle ne prévoit pas de sanctions. Les collectivités ne seront pas mises en difficulté puisqu'elles pourront toujours retarder la notification si nécessaire.

M. le président.  - Amendement n°16 rectifié bis, présenté par MM. Guerriau, Wattebled, Mizzon, Henno et Fouché, Mme Mélot, M. Bonnecarrère, Mme Noël, MM. Canevet et Lagourgue, Mmes Garriaud-Maylam et Kauffmann et MM. Chasseing, Nougein, Paccaud, Chatillon, Patriat, Mohamed Soilihi, Requier, Grand, Decool, Delcros, Daubresse et Laménie.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le quatrième alinéa de l'article 10 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le délai de paiement de la subvention est fixé à quatre-vingt dix jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention ou, le cas échéant, à compter de la date à laquelle les modalités de versement prévues dans la convention mentionnée à la première phrase du présent alinéa sont remplies. » ;

2° Au début de la seconde phrase, les mots : « Cette disposition ne s'applique » sont remplacés par les mots : « Ces dispositions ne s'appliquent ».

M. Joël Guerriau.  - Cet amendement fixe un délai de 90 jours. Il faut un délai, parce que le calendrier des associations n'est pas celui des collectivités territoriales. Certaines demandes arrivent tardivement au conseil municipal. En fixant un délai limite, on évite les difficultés de trésorerie aux associations.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteur.  - Cet article procède du même esprit que le précédent. En général, les collectivités et les associations se mettent d'accord pour fractionner les versements, souvent selon un rythme trimestriel ou semestriel. De plus, les collectivités, on le sait, perçoivent elles-mêmes des dotations versées de façon fragmentée, et de plus en plus tardivement...

Monsieur le ministre, je n'ai pas connaissance d'associations d'élus auditionnées par la commission de l'Assemblée nationale. Les élus demandent plutôt que les montants soient fractionnés.

Les banques ont elles aussi une contribution à apporter, par exemple en évitant d'imposer des frais bancaires aux associations en cas de versement tardif. (Exclamations sur les bancs du groupe SOCR)

Avis défavorable à ces amendements. Aucune collectivité ne souhaite mettre en péril une association !

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Cet article n'est pas une contrainte pour les collectivités territoriales, c'est une garantie pour les associations.

M. François Bonhomme.  - C'est subtil !

M. André Reichardt.  - Il faudra nous expliquer...

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État.  - Une association ayant reçu la notification pourra rassurer ses prestataires sur ses capacités de paiement. La collectivité territoriale notifiera la subvention quand elle le souhaitera.

Madame le rapporteur, cette mesure est issue d'un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale, c'est pourquoi les associations d'élus n'ont pas été auditionnées par les députés, mais nous avions échangé avec l'AMF, l'ARF et l'ADF, qui toutes sont favorables au délai de 60 jours.

Avis défavorable à l'amendement n°13 et au sous-amendement, ainsi qu'aux amendements nos25 rectifié et 47. Retrait de l'amendement n°16 rectifié bis.

M. François Grosdidier.  - Chers collègues de la majorité présidentielle et de gauche, je paraphraserai le président Pompidou : cessez d'emmerder les maires ! Je n'en connais aucun qui décide de verser des subventions avec retard. Le dialogue est permanent entre les collectivités territoriales et les associations et tient compte de la trésorerie des unes comme des autres.

Monsieur le ministre, si vous aviez été maire, vous sauriez que les droits de l'association courent dès le vote de la délibération, et non dès la notification ! Quel besoin de garanties législatives supplémentaires ?

En matière de délai de paiement des subventions, parlons plutôt de ceux de l'État et de l'Union européenne, qui se comptent en mois ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. Rachid Temal.  - Ce n'est pas l'un ou l'autre !

M. François Bonhomme.  - Je ne vois pas ce que ce délai va apporter. Quand une collectivité vote une subvention à une association, c'est bien qu'elle a la volonté de l'aider ; son but n'est pas de la mettre en difficulté !

Ce ne serait pas une contrainte pour les collectivités territoriales mais une garantie pour les associations, dites-vous ? Monsieur le ministre, votre raisonnement est trop subtil, trop intelligent pour moi...

Cet article ressemble à une opération de rachat, d'expiation, après les mesures prises au début du quinquennat qui ont affaibli les associations : suppression de la réserve parlementaire, transformation de l'ISF...

M. Patrick Kanner.  - Rétablissez-le !

M. François Bonhomme.  - Au moins, que cette opération de câlinothérapie ne se fasse pas au détriment des communes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. François Grosdidier.  - Bravo !

M. Alain Marc.  - Faisons confiance aux relations qui existent depuis toujours entre les maires et les associations. Les maires sont élus ; ils ne sauraient retarder le versement de subventions sans que les associations et la presse locale fassent pression.

La secrétaire de mairie de ma commune me confirmait tout à l'heure que l'on peut prendre des délibérations attribuant des subventions dès janvier, et les intégrer au budget qui ne sera voté qu'en mars. Tout est histoire de volonté et de bonne entente entre collectivités et associations ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Catherine Conconne.  - J'ai l'impression d'entendre les mêmes arguments que sur la parité : faire confiance au naturel, ne pas imposer de contraintes... Mais sans contraintes, les choses ne marchent pas ! (Protestations sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

J'ai été élue municipale pendant dix-sept ans.

M. Ladislas Poniatowski.  - Cela ne se voit pas !

Mme Catherine Conconne.  - Imposer des contraintes est nécessaire et légitime car obtenir le paiement d'une subvention est un parcours du combattant ! (Vives protestations sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

M. François Grosdidier.  - Il faut changer les élus, alors !

Mme Catherine Conconne.  - C'est à peine si, un an après la notification, on touche la moitié de la somme due ! (Mêmes mouvements)

J'ai été élue d'une commune qui tirait le diable par la queue, puis du conseil général et du conseil régional pendant de nombreuses années. Certaines collectivités richissimes trouvent naturel de prendre tout leur temps pour verser les subventions. Ce sont ainsi des dizaines de milliers d'associations qui sont dans la souffrance. (Mêmes mouvements) Je voterai ces amendements, pour leur rendre justice.

La séance est suspendue à 16 h 33.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.