SÉANCE

du jeudi 6 décembre 2018

37e séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente

Secrétaires : Mme Mireille Jouve, M. Guy-Dominique Kennel.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l'Assemblée nationale. Au regard de notre ordre du jour, j'appelle chacun à la concision et au respect du temps de parole.

Seconde partie (Suite)

SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial de la commission des finances .  - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l'État en faveur des personnes les plus fragiles, est dotée de 21,1 milliards d'euros de crédits de paiement en 2019, en hausse de 7,5 % par rapport à 2018.

Cette augmentation est principalement due au dynamisme des dépenses d'intervention, qui représentent 93 % des crédits de la mission, mais s'explique également par les revalorisations dites exceptionnelles de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

L'effet d'ensemble est relativisé par des mesures de paramètre qui minorent, voire neutralisent les revalorisations. Le Gouvernement donne d'une main pour reprendre de l'autre !

Ainsi, pour la prime d'activité, l'abattement sur les revenus d'activité pris en compte est passé de 62 à 61 %. Sur les 20 euros de revalorisation annoncés, une personne au Smic sans enfant n'en gagnerait que 8 euros ! Autre réforme paramétrique : l'exclusion des bénéficiaires de rentes AT-MP et de pensions d'invalidité de la prime d'activité. Enfin, est supprimée la revalorisation annuelle pour 2019 et 2020 de la prime et de son bonus, indexés jusque-là sur l'inflation.

En ce qui concerne l'AAH, le rapprochement des règles de prise en compte des revenus d'un couple dont un membre perçoit l'AAH sur celles d'un couple au RSA conduit à abaisser le plafond de ressources à 1,89. Ce plafond sera abaissé à 1,81 en 2019. Le complément de ressources, qui atteint 179 euros par mois, est supprimé par l'article 83 - que nous vous proposerons de supprimer. Enfin, la revalorisation annuelle de l'AAH sera nulle en 2019 et limitée à 0,3 % en 2020.

Le Gouvernement a su communiquer abondamment sur les coups de pouce, en oubliant les coups de ciseaux qui seront autant de mauvaises surprises pour les plus vulnérables ! Nous souhaiterions, madame la ministre, que vous nous transmettiez des simulations chiffrées pour mesurer précisément l'impact réel de ces mesures de restriction.

Malgré ces insuffisances, la commission des finances a décidé d'adopter ces crédits et de déposer un amendement sur le complément de ressources. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Éric Bocquet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Au-delà des revalorisations et des mesures paramétriques, la mise en oeuvre du budget 2019 de la mission est entourée d'un certain nombre d'incertitudes.

En ce qui concerne le financement des mineurs non accompagnés, l'aide exceptionnelle aux départements pour la prise en charge partielle des dépenses d'aide sociale à l'enfance est reconduite, mais le niveau des dépenses prises en charge par l'État diminuerait de 30 à 15 %... Sur ce sujet qui relève de la politique nationale d'immigration, à l'État de prendre ses responsabilités en assumant les dépenses d'évaluation et de mise à l'abri et en augmentant l'aide aux départements.

Si nous saluons les objectifs du plan Pauvreté et le travail mené par le délégué interministériel, que nous avons auditionné, il demeure que la majorité des crédits repose sur une contractualisation avec les départements. La mise en oeuvre de ce plan semble ainsi compromise, au vu de la situation financière de ces derniers.

Incertitudes toujours sur la suppression de la prise en compte des rentes AT-MP et pensions d'invalidité dans le calcul du droit à la prime d'activité. Cette mesure avait été adoptée en loi de finances pour 2018, contre l'avis du Sénat, pour une application au 1er janvier 2018. Elle n'a finalement été appliquée qu'au 1er juin 2018, avant que le Gouvernement ne fasse machine arrière au vu des conséquences sur les bénéficiaires, qui perdaient entre 60 et 200 euros par mois. On ne peut que regretter la mise en oeuvre chaotique de cette mesure et l'absence de publicité auprès des bénéficiaires.

Les crédits du programme 137 relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes sont stables à l'euro près, ce qui masque des situations contrastées. Ainsi, les crédits liés à la lutte contre la prostitution diminuent. Or le maintien de financements aux associations est essentiel : d'elles dépend la mise en oeuvre de la loi du 13 avril 2016 et des parcours d'accompagnement de sortie de la prostitution.

Enfin, le programme 124 voit ses crédits diminuer de près de 2,5 %. Les ministères sociaux, non prioritaires, sont touchés significativement depuis plusieurs années par des mesures d'économie budgétaire. Le processus de rationalisation semble avoir atteint ses limites et nous serons attentifs au maintien d'un niveau de crédits satisfaisants. Malgré mon avis défavorable à titre personnel, la commission des finances a adopté les crédits de cette mission.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - Je suis rapporteur pour avis de ces crédits depuis quatre ans. Malgré leur augmentation régulière, je constate une évolution moins solidariste des politiques financées.

L'objectif de la prime d'activité est ambigu : minimum social ou incitation financière au retour à l'emploi ? Elle repose sur deux composantes, l'une familialisée, l'autre individuelle. Le Gouvernement privilégie la seconde, c'est-à-dire l'incitation financière au retour à l'emploi, au détriment de la première, c'est-à-dire l'augmentation du niveau de vie des plus modestes.

Le plan Pauvreté sera orienté vers l'insertion dans l'activité : les efforts porteront sur les moins pauvres des plus pauvres. On réserve aux autres des prestations en nature : crèches à vocation sociale et petit-déjeuner pour tous, dénoncés par les associations comme inopérants. Curieuse répartition...

La revalorisation de l'AAH, qui passera à 900 euros fin 2019, est une excellente nouvelle. Attention toutefois à ne pas calquer cette prestation très spécifique sur les critères des minima sociaux conçus pour inciter à la reprise d'une activité. Le rapprochement initié de l'AAH et du RSA, avec la fusion des compléments de ressources, menace cette spécificité.

Enfin, la commission des affaires sociales a adopté un amendement créant un nouveau programme budgétaire spécifique à l'évaluation et à l'hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés, afin de consacrer la compétence exclusive de l'État en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - Cette mission est loin d'épuiser les moyens que la Nation consacre à la solidarité et à la réduction des inégalités.

Le PLFSS pour 2019 consacre 500 milliards d'euros au financement de la protection sociale qui est au coeur de notre système solidaire ; la mission « Travail et emploi », essentiellement consacré à l'insertion dans l'emploi, le budget de l'Éducation nationale et l'Enseignement supérieur sont autant de vecteurs de l'égalité des chances.

Le système socio-fiscal français est un puissant moteur de réduction des inégalités, qui concrétise le troisième terme de notre devise républicaine. Il y a bien un État social, auquel est consacré un tiers de la richesse nationale. Le modèle social français divise par quatre les écarts de revenu entre les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres.

Cet effort ne s'est pas démenti durant la crise, notre pays ayant fait le choix d'augmenter les impôts et le déficit, même s'il écornait le soutien aux familles.

Les Français semblaient s'accommoder d'un haut niveau de prélèvements pour garantir cette spécificité. Comment se fait-il alors que ce modèle semble craquer de toutes parts depuis quelques semaines, déchiré entre des injonctions contradictoires de plus de solidarité et de moins d'impôts ?

D'abord, nous ne sommes pas sortis de la panne de croissance. Crise économique, crise des finances publiques, crise sociale, elle est devenue une crise de confiance en l'avenir et dans les institutions.

Les gouvernements successifs n'ont pas su résister à deux écueils : le piège du pouvoir d'achat, porté en étendard alors qu'il dépend avant tout de la situation de l'emploi, et la tentation du meccano fiscal qui entretient l'illusion de l'action mais dont la complexité et les résultats limités sèment le doute quant à ses finalités.

Était-il nécessaire de chambouler à la fois la fiscalité du patrimoine, la CSG, la taxe d'habitation et les cotisations sociales ? Résultat : incompréhension, brouillage et méfiance accrue...

M. René-Paul Savary.  - Tout à fait !

M. Alain Milon, président de la commission.  - Derrière le débat sur l'affectation de telle taxe à telle dépense se profile la question du consentement à l'impôt.

Les cotisations sociales ont un sens : la contrepartie sous forme de prestation. Voilà tout le sens du rétablissement par le Sénat de la contribution salariale d'assurance chômage, qui n'est pas équivalente à une CSG indifférenciée et sans doute trop élevée.

Nous avons besoin de clarté, sur les objectifs d'abord. À quoi sert la prime d'activité ? Comme le disait François Chérèque, le débat entre soutien à la reprise d'activité et soutien au niveau de vie des familles n'est pas tranché, d'où un manque de lisibilité. Manque de clarté aussi sur les bénéficiaires, avec le retour en arrière sur la prise en compte des rentes ATMP et des pensions d'invalidité en tant que revenus professionnels. Manque de clarté sur les résultats attendus enfin. Les revenus de transfert doivent assurer une certaine dignité à ceux qui ne peuvent subvenir à leurs besoins. À tous les autres, la solidarité nationale doit garantir les moyens d'accéder à l'autonomie et à l'émancipation par la santé, l'éducation et le travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Mme Patricia Schillinger .  - Je serai un peu plus positive et vous apporte mon soutien, mesdames les ministres, dans ces moments difficiles.

Cette mission traduit la volonté du Gouvernement de faire plus pour ceux qui ont moins, avec 21,1 milliards d'euros de CP, en hausse de 7,5 %.

Dès avril et pour la deuxième fois depuis octobre, la prime d'activité sera revalorisée de 30 euros grâce à un bonus pour les personnes entre 0,5 et 1,2 Smic ; cela augmentera le pouvoir d'achat des travailleurs et renforcera l'incitation à l'activité.

La réorganisation des prestations complémentaires à l'AAH rationalise le soutien aux personnes en situation de handicap.

L'article 83 ter, introduit à l'Assemblée nationale, expérimente la délivrance du RSA via un titre de paiement type carte prépayée en Guyane, à Mayotte et à Saint-Martin.

Notre groupe a déposé un amendement qui prévoit l'expérimentation de la distribution de protections périodiques dans les lieux accueillant les femmes les plus vulnérables. La précarité liée aux règles est trop méconnue. Lorsqu'on vit à la rue, les règles représentent des moments difficiles, humiliants pour les femmes qui doivent parfois utiliser des morceaux de vêtements pour se protéger. Cette situation critique sur le plan sanitaire ne peut durer. Testons les solutions qui s'offrent à nous !

M. Jean-Louis Tourenne .  - En cette période troublée que la violence sauvage utilise, j'aurais aimé approuver la mission « Solidarité ». Hélas, le Gouvernement fait de la mystification auprès des plus vulnérables sa méthode. Ce cynisme intolérable nourrit le ressentiment de la population et la défiance envers les élus. Christine Lagarde, que l'on ne peut taxer de gauchisme, accuse les élites d'être inconscientes. (Mme Nathalie Goulet s'exclame.)

Les crédits de l'AAH augmentent de 5,1 %, certes, mais la garantie de ressources vole en éclat par la fusion, injustifiable, du complément de ressources et de la majoration pour vie autonome. À la clé, une perte de 75 à 179 euros pour les personnes concernées.

À cela s'ajoute la baisse de 10 % de l'AAH pour les couples de bénéficiaires, la suppression de la prime d'activité aux travailleurs invalides, la hausse des frais de tutelle et la désindexation de l'AAH.

Sur la prime d'activité, la supercherie atteint des sommets : le Gouvernement annonce une revalorisation de 20 euros mais on lit dans le bleu budgétaire, page 38, qu'en parallèle le coefficient de prise en charge des revenus est abaissé d'un point, de 62 à 61 %. En réalité, pour un salarié au Smic, l'augmentation sera de 8 euros sur les 20 promis ! En-dessous d'un demi Smic, pas de prime d'activité. Ce sont toujours les plus fragiles qui sont les plus touchés...

Comment peut-on ainsi tromper, accabler des citoyens qui le sont déjà, pour quelques économies minimes au regard des cadeaux distribués aux plus riches ?

L'égalité homme-femme, grande cause du quinquennat ? Là encore, de la poudre de perlimpinpin ! Les crédits pour l'accompagnement et l'insertion des personnes en situation de prostitution baissent de 20 %, au risque de fragiliser les associations qui font un travail remarquable en la matière.

Vous baissez de 363 000 euros les crédits de l'aide alimentaire, alors que le nombre de demandes atteint quatre millions et que l'Union européenne peine à reconduire ses aides.

Le Gouvernement divise par cinquante le montant de l'aide à la réinsertion des anciens migrants dans leur pays d'origine, passant de 10 millions d'euros à 200 000 euros.

La lutte contre la pauvreté - encore une « grande priorité » de votre Gouvernement - est un alibi pour tenter de redorer votre image de Gouvernement des riches. Seulement 135 millions d'euros, pour sortir de la misère huit millions de pauvres, trois millions d'enfants ! Il est vrai que l'ambition est de faire participer les collectivités territoriales... Comment croire encore à la parole du Gouvernement ?

Après 287 suppressions de postes en 2018, les ministères sociaux en perdent 460 en 2019. Curieuse façon de prétendre mener une politique sociale ambitieuse !

Un tel acharnement contre la cohésion sociale, c'est la négation de nos valeurs de solidarité, fondement, selon Edgar Morin, d'une société civilisée.

Il est grand temps de changer d'orientation, de lutter contre les inégalités plutôt que de les accroître, de favoriser l'épanouissement de tous, de rassembler la Nation autour d'un projet pour une société plus juste, plus douce, plus harmonieuse et plus solidaire. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Marc Gabouty .  - Les crédits de la mission s'élèvent à plus de 21 milliards d'euros en 2019, en hausse de 7,5 %. C'est l'une des évolutions les plus favorables de ce budget.

La prime d'activité et l'AAH représentent 90 % des crédits. Nous sommes attachés à ces mécanismes de solidarité destinés aux plus vulnérables et aux plus précaires.

Le budget traduit en partie le plan Pauvreté annoncé par le président de la République en octobre dernier.

La prime d'activité, qui bénéficie à 2,8 millions de nos concitoyens, traduit une politique d'incitation à la reprise de l'activité et un soutien au pouvoir d'achat. Avec l'amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale, le Smic augmentera ainsi de 30 euros en 2019, puis de 20 euros les deux années suivantes. D'ici 2021, la hausse sera de 80 euros.

Les crédits du programme 157 sont en hausse de 5,1 %, pour porter l'AAH à 900 euros fin 2019. C'est une mesure de justice et de solidarité, même si l'on reste sous le seuil de pauvreté.

Les crédits consacrés aux mineurs non accompagnés sont passés de 15,7 millions en 2017 à 132 millions en 2018 et 141 millions en 2019. Le Gouvernement s'est engagé à avancer vers une nouvelle contractualisation avec les conseils départementaux. Philippe Mouiller juge toutefois ces crédits insuffisants et propose de créer un programme budgétaire distinct, pour inciter l'État à assumer une mission qui relève de sa compétence exclusive.

Citons aussi l'aide alimentaire, pour 51,9 millions d'euros, la protection juridique des majeurs, pour 160 millions, et l'égalité homme-femme, avec des crédits stables à 30 millions d'euros.

Une progression en masse financière de 7,5 % est remarquable, même si elle est sans doute peu audible dans le contexte actuel, et certaines critiques me semblent un peu caricaturales.

Le groupe RDSE se félicite de cet effort et votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Doineau .  - Le 13 septembre, le président de la République dévoilait son plan Pauvreté, contre les inégalités de destin et pour une égalité des chances réelles. Cette priorité se traduit par une hausse des crédits de cette mission de 7 %.

Dans le même temps, le PLFSS entérine le quasi-gel des prestations sociales pour les deux années à venir. Si le Gouvernement concentre ses efforts sur les plus fragiles, il risque de placer un certain nombre de foyers aux portes de la pauvreté. Le sentiment de déclassement grandit au sein de la population qui travaille - en témoigne le mouvement des gilets jaunes.

Le programme 157 retrace les crédits de l'AAH, en hausse de 5,1 %, portant l'enveloppe à 11,9 milliards d'euros. L'aide à taux plein passera à 900 euros fin 2019, ce qui est à saluer. Mais l'alignement des ressources prises en compte sur celles d'un couple touchant le RSA conduit à réduire le plafond - or AAH et RSA n'ont pas le même objectif.

Le programme 304 mobilise 7,7 milliards d'euros, soit 1 milliard de plus qu'en 2018. La revalorisation de la prime d'activité, de 20 euros, s'élèvera à terme à 80 euros par personne au niveau du Smic. Comme le soulignait Philippe Mouiller, la prime d'activité incite les personnes peu insérées dans l'emploi à s'y insérer davantage mais le Gouvernement semble oublier ceux qui en sont très éloignés.

Avec Jean-Pierre Godefroy, nous avions demandé, dans notre rapport d'information, une vraie prise en charge par l'État des mineurs non accompagnés. Depuis 2014, leur nombre n'a cessé d'augmenter, ce qui met les départements dans une situation inextricable. Le problème ne réside pas dans les moyens alloués mais dans leur capacité d'accueil. Les mineurs sont de plus en plus souvent logés à l'hôtel.

M. Michel Savin.  - À la rue !

Mme Élisabeth Doineau.  - Je soutiens donc l'amendement de M. Mouiller. Pourquoi ne pas créer une plateforme interdépartementale pour plus d'équité dans l'évaluation des jeunes ?

Surtout, il faut lutter contre les filières de passeurs et dissuader les candidats à la migration en travaillant avec les pays de départ.

Un mot enfin sur la grande cause du quinquennat : l'égalité femmes-hommes. Les crédits ne sont pas augmentés. Je m'interroge...

Le groupe UC votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE)

M. Daniel Chasseing .  - Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s'élève à 21 milliards d'euros, en hausse de 7,5 % par rapport à 2018. Nous saluons cette évolution, signe de l'attention que porte l'État aux plus vulnérables.

Le programme « Inclusion sociale et protection des personnes » augmente de 14 % avec la revalorisation de la prime d'activité dont le Gouvernement souhaite faire un instrument de retour à l'emploi.

Le programme 157 augmente de 5,13 % grâce à la revalorisation de l'AAH, que notre groupe approuve. Le doublement du nombre d'entreprises adaptées est à saluer, car la sortie de la précarité pour les personnes handicapées se fera par la création d'emplois adaptés.

Certaines réformes de paramètre minorent toutefois ces revalorisations.

Notre groupe souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les mineurs non accompagnés, passés de 20 000 en 2017 à 30 000 en 2019, et qui font peser une charge de plus de plus lourde - et à terme intenable - sur nos départements. Certes, le budget a décuplé ces dernières années mais cela reste insuffisant ! L'État doit prendre sa part de responsabilité.

S'agissant de la mise en oeuvre de la stratégie Pauvreté, la contractualisation avec les départements est pertinente mais certains d'entre eux sont dans une situation financière très difficile.

Nous saluons les crédits consacrés à la grande cause nationale qu'est l'égalité femmes-hommes mais ils pourraient être plus élevés, notamment pour soutenir les associations qui luttent contre la prostitution et les violences sexistes.

Cette mission, sixième poste budgétaire de l'État, est au coeur de l'action publique. Le groupe Les Indépendants se félicite des efforts consentis et votera ces crédits.

Mme Laurence Cohen .  - Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit une hausse des crédits de cette mission de 19,44 à 20,93 milliards d'euros entre 2018 et 2019. Par les temps qui courent, c'est plutôt une bonne surprise.

La revalorisation de l'AAH est à saluer, même si nous déplorons les modifications de paramètres qui réduiront le nombre de bénéficiaires. Elle ne fait pas oublier la suppression du complément de ressources de l'AAH et le rejet de notre proposition de loi pour supprimer la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l'AAH.

La revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité est nuancée par la baisse de l'abattement, le gel des revalorisations et l'exclusion des bénéficiaires de pension d'invalidité et de rente AT-MP.

Des augmentations de crédits en trompe-l'oeil, qui masquent en réalité des mesures d'économies, le Gouvernement prenant aux uns pour donner aux autres...

Le financement du programme 304 consacré aux mineurs non accompagnés augmente certes mais est contrebalancé par la hausse du nombre de bénéficiaires. La mise en oeuvre dépend des départements, dont on sait les difficultés, or les aides de l'État sont insuffisantes. Au Gouvernement d'assurer la protection de ces mineurs en situation de grande précarité.

Le groupement d'intérêt public Enfance en danger qui gère le 119 voit ses crédits revenir à leur niveau de 2017. Nous serons vigilants pour 2020, car les professionnels doivent pouvoir exercer leurs missions dans de bonnes conditions.

Le budget de l'égalité femmes-hommes est trop faible pour être vraiment ambitieux : 30 millions d'euros, soit 0,007 % du budget de la France. Nous regrettons que la grande cause du quinquennat ne bénéficie pas de davantage de crédits.

Je regrette que l'intitulé des actions 21,22 et 23 ne mentionne pas la lutte contre la prostitution et les violences sexuelles et sexistes. Le soutien aux associations travaillant à la sortie de la prostitution diminue à nouveau. N'en déplaise au Gouvernement, nous pensons que ce dispositif peut monter en puissance à condition d'être soutenu.

Alors que la France traverse une crise profonde, vous continuez à appliquer de vieilles recettes, sans écouter ceux qui souffrent de vos choix politiques injustes. Le groupe CRCE votera contre ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - J'ai l'honneur de vous présenter, avec Sophie Cluzel, le budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». En cohérence avec le PLFSS, il met en oeuvre nos priorités : priorité aux plus fragiles, priorité aux salariés modestes, pour que le travail paie davantage.

Les crédits augmentent de plus de 7 %, soit 1,4 milliard d'euros supplémentaires. C'est considérable.

Ce budget est d'abord celui d'une solidarité renforcée au bénéfice de nos concitoyens les plus fragiles. La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, présentée le 13 septembre par le Président de la République, vise à éviter que les enfants pauvres d'aujourd'hui ne deviennent les adultes pauvres de demain.

La contractualisation avec les territoires est dotée de 171 millions d'euros pour l'accompagnement des sortants de l'aide sociale à l'enfance (ASE), l'accompagnement des bénéficiaires du RSA, la formation des travailleurs sociaux, l'accueil social de proximité.

La hausse de 5,1 % des crédits du programme 157 « Handicap et dépendance » traduit la promesse d'une société plus inclusive, donnant à tous leur juste place dans le projet national. La progression prévue de l'AAH représente 41 euros par mois. Le montant total sera porté à 900 euros par mois fin 2019, soit un effort de 2,5 milliards d'euros sur le quinquennat.

Parce que le travail conduit à l'émancipation sociale, le soutien à l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés est également renforcé.

L'effort d'accompagnement médico-social et professionnel vers le milieu ordinaire est aussi important, en hausse de 40 % par rapport à 2018. Cette augmentation s'inscrit dans le cadre du Comité interministériel du handicap du 25 octobre qui a mobilisé tous les ministères autour du Premier ministre pour simplifier les droits des personnes et lutter contre les ruptures de parcours des personnes handicapées.

L'État reprend à sa charge le financement du RSA en Guyane et à Mayotte, pour 170 millions d'euros. Il s'agit de soulager les collectivités sans remettre en cause leurs compétences en la matière.

L'État a entendu les difficultés des départements s'agissant des mineurs non accompagnés. À compter de 2019, la compensation des dépenses des départements sera plus juste, sur la base d'un forfait par jeune évalué. Une partie sera en outre prise en charge au titre de l'ASE, le dispositif exceptionnel étant reconduit en 2019. Le Gouvernement a même souhaité aller plus loin en relevant son aide financière. L'aide forfaitaire atteindra 6 000 euros et prendra en charge le financement de 75 % des mineurs non accompagnés supplémentaires admis à l'ASE, contre 50 % auparavant. En tout, 175 millions d'euros seront consacrés à l'aide aux départements.

Nous oeuvrons à l'avènement d'une nouvelle contractualisation avec les départements dans la déclinaison des aides sociales, avec Jacqueline Gourault.

L'effort du Gouvernement vise aussi les salariés modestes. La prime d'activité, qui bénéficie à 2,8 millions de nos concitoyens, sera revalorisée de 80 euros pour un salarié au Smic à la fin du quinquennat. Cet engagement sera tenu : le gain de pouvoir d'achat sera de trente euros en 2019, puis vingt euros en 2020 et vingt euros à nouveau en 2021, qui s'ajouteront aux vingt euros par mois de gain de pouvoir d'achat du fait de la suppression des cotisations salariales. D'ici 2022, le gain pour un salarié au Smic sera donc de cent euros mensuels.

En LFI pour 2017, les crédits pour la prime d'activité n'étaient que de 4,3 milliards d'euros : ils dépassent à présent 6 milliards d'euros.

L'égalité homme-femme a été érigée par le président de la République en grande cause nationale du quinquennat. C'est l'objet du programme 137, qui n'augmente pas, mais son taux d'exécution se rapproche de 100 %.

C'est donc un budget porteur d'une ambition sociale et sanitaire exceptionnelle que nous vous présentons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mme Élisabeth Doineau et M. Jacques Mézard applaudissent également.)

Examen des crédits des missions, des articles rattachés et de l'amendement portant article additionnel

Article 39

Mme la présidente.  - Amendement n°II-435, présenté par le Gouvernement.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

 

 

 

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

 

341 362

341 362

 

 

341 362

341 362

TOTAL

 

341 362

 

341 362

SOLDE

- 341 362

- 341 362

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - La loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, promulguée le 19 novembre 2016, prévoit à son article 12 le transfert du ministère des solidarités et de la santé (MSS) au ministère de la justice (MJ) au 1er janvier 2019, du contentieux des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), des tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI), et d'une partie des commissions départementales d'aide sociale (CDAS) vers les futurs pôles sociaux des tribunaux de grande instance.

Cette réforme prendra effet le 1er janvier 2019, grâce à la mise à disposition de personnels et de moyens de fonctionnement du ministère de la santé vers celui de la justice.

Le projet de loi de finances prévoit déjà un transfert de 52 ETPT du programme 124 vers le programme 166.

Cet amendement se justifie par l'actualisation du besoin d'agents qui n'était pas stabilisé à la date de dépôt du PLF : le nombre d'emplois transférés et réalloués doit augmenter pour permettre les recrutements au sein du ministère de la justice.

Ainsi, un transfert supplémentaire d'emplois du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » vers le programme 166 « Justice judiciaire » est nécessaire à hauteur de 5 ETPT représentant un coût chargé de 341 362 euros.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Le programme 124 a déjà subi des économies budgétaires depuis plusieurs années. Vous êtes les garants de l'adéquation des emplois aux besoins. Avis favorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Le Gouvernement a déjà diminué ces crédits. En retirer de nouveaux serait indécent. Nous nous y opposerons.

L'amendement n°II-435 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-297, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales.

I.  -  Créer le programme :

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

141 200 000

141 200 000

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

Évaluation et hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés

141 200 000

141 200 000

TOTAL

141 200 000

141 200 000

141 200 000

141 200 000

SOLDE

0

0

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Cet amendement crée un nouveau programme budgétaire exclusivement dédié à l'évaluation et à l'hébergement d'urgence des mineurs non accompagnés au sein de la mission « Solidarités ». Il s'agit de consacrer par la loi ce qui n'existe pour l'heure qu'au sein des programmes annuels de performance et donc sans valeur contraignante.

Il s'agit surtout d'envoyer un signal fort à l'État en l'incitant à assumer une mission dont les conseils départementaux ont toujours estimé qu'elle relevait de sa compétence exclusive, au titre de la politique migratoire. L'évaluation et l'hébergement d'urgence de jeunes migrants doivent être pleinement conduits par l'État.

Cet amendement se contente de créer le véhicule ; le montant transféré reste égal au montant annoncé au PLF pour 2019.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis favorable à ce signal fort envoyé à l'État, qui l'incite à assumer cette compétence régalienne. Cela permettra de distinguer crédits d'aide à l'évaluation de la minorité des crédits d'accueil.

Madame la ministre, nous avons visité il y a quelques jours un établissement d'accueil pour les jeunes de l'aide sociale à l'enfance : vous avez vu le travail important des départements, qui ont de grandes difficultés à faire face à l'afflux de ces mineurs. Dans mon département, nous avons multiplié les crédits par douze entre 2011 et 2018 ! Venez au soutien des départements.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Nous avons entendu ces difficultés et avons augmenté les crédits de prise en charge des mineurs non accompagnés.

Le programme 304 fusionnait l'ancien programme 304 et le programme 106, dont relevait le dispositif d'évaluation de la mise à l'abri des mineurs non accompagnés. Le cadre budgétaire est donc plus lisible pour les politiques de la mission. Il s'inscrit en outre dans la ligne de la décision du comité interministériel de modernisation de l'action publique (CMAP) plaidant pour une réduction du nombre de programmes. Ne portons pas atteinte à la cohérence de l'action 17 qui regroupe les dispositifs pour la protection des jeunes, relevant ou non de l'ASE. Retrait ou avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Les explications de Mme la ministre sont surprenantes. Elle défendait un amendement pour abonder le budget de la justice, et là, cet amendement essaye de prendre en compte l'accompagnement des mineurs et ce n'est pas possible ! Les budgets sont insuffisants pour aider les plus fragiles. Encore ce jeu de vases communicants : vous retirez à des personnes fragiles au profit des encore plus fragiles ! Le Gouvernement devrait abonder ce budget. Nous nous abstiendrons.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Les départements sont submergés par l'arrivée de mineurs non accompagnés. J'ai présidé, au nom de l'ADF, une commission de répartition des dépenses et des jeunes. L'État est responsable de la politique d'immigration et a signé la Convention internationale des droits de l'enfant. C'est à lui que revient cette responsabilité !

L'effort de l'État a certes augmenté mais sur une somme de départ très réduite. L'ancien Gouvernement avait reconnu la responsabilité de l'État, même s'il avait participé de façon très insuffisante. Certains départements ne peuvent répondre concrètement à des décisions de justice en cas de maltraitance d'enfants dans leurs propres familles.

C'est un problème majeur. Le groupe socialiste votera l'amendement.

M. René-Paul Savary.  - Vous faites un pas, mais c'est insuffisant. Vous allez davantage vers une politique d'immigration que vers l'ASE.

Mon but, c'est d'éviter l'évaluation. Mettre en cause la parole des mineurs est grave. Si l'on n'évalue pas, cela peut coûter cher ; de plus, on mettra des mineurs avec des majeurs, mais il faut aussi s'en charger ! Si l'on supprime le seuil de l'âge, il n'y a plus de problème d'évaluation. Le département hébergera les migrants et l'État paiera la facture... Travaillons sur ces voies nouvelles, cette porte de sortie peut rendre service à toutes les parties prenantes, notamment les mineurs.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Ce sujet est éminemment sensible, au carrefour de l'immigration et de la protection de l'enfance.

Monsieur Tourenne, je suis troublée : les mineurs non accompagnés, une fois évalués, sont traités comme tous les autres mineurs. Ne les traitons pas différemment des autres mineurs. Je ne ferai pas ce choix. C'est donc un problème purement budgétaire : comment mieux aider les départements devant le flux de mineurs non accompagnés ?

Le PLF 2017 prévoyait 15,26 millions d'euros pour accompagner les départements dans l'accueil des mineurs non accompagnés. Deux ans après, c'est 175 millions d'euros.

Au-delà, tout n'est pas budgétaire. Nous travaillons avec l'Association des départements de France pour raccourcir les délais, notamment pour les tests osseux, très contestés. Nous travaillons avec Mme Belloubet et les départements. L'État ne veut pas dissocier cette politique de celle des mineurs en général. Il ne peut donc que faire un geste budgétaire en faveur des départements. Il ne veut pas créer une protection de l'enfance à double vitesse.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Je maintiens cet amendement qui ne touche pas l'ensemble de la protection des mineurs non accompagnés. La transparence est nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin.  - Ce sont vos propos, madame la ministre, qui me troublent. La gravité du sujet ne mérite pas cette bataille mesquine. Le nombre de mineurs non accompagnés n'a plus rien à voir avec la situation d'il y a deux ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE) Je vois la situation dans les Landes : elle est dramatique. Cette politique devrait entièrement revenir à l'État.

M. Daniel Chasseing.  - Ne dissocions pas les mineurs dans un même département.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Personne ne le fait !

M. Daniel Chasseing.  - En 2017, dans mon département éloigné des frontières, je comptais déjà beaucoup de mineurs non accompagnés. Dans une maison de l'enfance de mon canton, sur 70 mineurs pris en charge, 50 venaient d'Afrique. En 2017, à 15 millions d'euros, le budget était sous-évalué. Celui de 2019, à 141 millions d'euros, bien qu'insuffisant, est dix fois supérieur. Je voterai l'amendement.

L'amendement n°II-297 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-752 rectifié, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

25 121 620

25 121 620

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

25 121 620

25 121 620

TOTAL

25 121 620

25 121 620

25 121 620

25 121 620

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Nous regrettons que les ministères sociaux faisant partie des ministères non prioritaires soient ainsi touchés significativement depuis plusieurs années par des mesures d'économie budgétaire. Il est donc très difficile de mettre en oeuvre une politique sociale stable et ambitieuse lorsque les effectifs qui la mettent en oeuvre ne cessent de diminuer à ce niveau.

Les politiques sociales et pour les droits des femmes voient leurs crédits et donc leur personnel diminuer.

Madame la ministre, je n'accepte pas votre mauvais procès. Je n'ai pas de leçons à recevoir ! Les mineurs non accompagnés dans le département que j'ai présidé étaient très bien pris en charge.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Vous mesurez à quel point la question des mineurs non accompagnés est douloureuse pour les départements. Tout craque de partout.

Nous partageons la préoccupation des auteurs, mais cet amendement n'est pas réaliste. Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable. Nous nous inscrivons dans une réforme de l'État pour réduire la dépense publique, mais ne souhaitons pas obérer les missions des ARS. Une revue des missions des ministères sociaux a été réalisée, pour rationaliser les actions des agences, avec les partenaires sociaux, a été réalisée.

L'amendement n°II-752 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-755, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

2 400 000

 

2 400 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

2 400 000

 

2 400 000

TOTAL

2 400 000

2 400 000

2 400 000

2 400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Si les crédits pour le programme « Égalité entre les femmes et les hommes » sont les mêmes qu'en 2018, la répartition n'est pas la même, au détriment des associations qui accompagnent les personnes prostituées qui s'engagent dans un parcours de sortie. Il faut revenir sur cette diminution de crédits.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Éric Bocquet et moi-même avons rencontré les représentants des associations oeuvrant dans ce domaine et considérons que les crédits doivent être maintenus.

Toutefois, ils ne diminuent que de 416 000 euros, et non de 2,4 millions, et les crédits aux associations sont relativement préservés. Madame la ministre, quelle est la montée en charge prévue pour le dispositif de sortie de la prostitution et quelle est l'évolution prévue de la consommation de ces crédits ? Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Le budget est sincère, il correspond aux besoins. Il y a parfois eu, dans le passé, une volonté d'affichage et une sous-exécution massive ensuite. Cette année, nous avons un objectif inverse, celui d'aller vers un taux d'exécution de 100 % et nous avons d'ailleurs dégelé les crédits de précaution. Près de 2,1 millions d'euros sont ainsi consacrés aux associations qui viennent en aide aux personnes en situation de prostitution et 2 millions à l'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle. Avis défavorable.

Mme Michelle Meunier.  - Le hasard du calendrier fait qu'une table ronde se tient en ce moment même sur les femmes porteuses de handicap et victimes de violences sexuelles et sexistes, et je remercie Mme Cluzel pour sa présence.

Toutes les associations nous disent la même chose : les moyens n'y sont pas ! Celles qui oeuvrent dans les comités départementaux d'aide à la sortie de la prostitution ne disent pas autre chose. Je voterai l'amendement.

Mme Laurence Cohen.  - Le Gouvernement a fait de l'égalité femmes-hommes une grande cause nationale, mais les budgets qui lui sont alloués sont très insuffisants ! Heureusement que c'est une grande cause nationale !

Les associations nous appellent au secours ! L'application de la loi est remise en cause. Et le Gouvernement, qui en est responsable, dit qu'il ne comprend pas car tout va bien... Dans nos permanences, on voit tout le contraire. Nous nous abstiendrons.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Si on affiche un budget important mais sans avoir les moyens de l'exécuter, cela s'appelle un effet d'annonce, cela s'est déjà vu dans le passé. Notre objectif est l'exécution de ce budget, dont le taux a progressé de trente points !

Nous privilégions la sincérité et l'accompagnement réel des personnes engagées dans la sortie de la prostitution : au 31 août, il y avait 68 bénéficiaires et 85 personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution. 35 commissions étaient installées et 59 sont prévues d'ici la fin 2018. 81 associations sont agréées pour la mise en oeuvre du parcours de sortie de la prostitution sur 62 départements.

L'amendement n°II-755 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-756, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

 

 

 

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

900 000

 

900 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

900 000

 

900 000

TOTAL

900 000

900 000

900 000

900 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Madame la ministre, avec toute la courtoisie que je vous dois, les discours revendiquant si fortement la sincérité me laissent circonspect. La loi date de 2016, sa montée en charge ne peut être que progressive. Si réduction il y a, c'est que les actions menées régressent, ce qui pénalise les personnes qui veulent sortir de la prostitution. Abolissons la prostitution : le corps des femmes n'est pas à vendre. Cet amendement le réaffirme en réinjectant les 900 000 euros qui manquent.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-756 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-753, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

 

500 000

 

500 000

Handicap et dépendance

 

 

 

 

Égalité entre les femmes et les hommes

500 000

 

500 000

 

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

500 000

500 000

500 000

500 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Je vais faire mon one-man-show durant quelque temps... Nous nous inquiétons des moyens affectés aux têtes de réseau qui font un travail remarquable pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles et pour accompagner les personnes qui en sont victimes. Sans moyens, ils mettront la clé sous la porte ! Vous invoquez un principe de réalité, mais le nombre de parcours réalisés dépend au contraire des crédits qui leur sont alloués.

Nous réinjectons les 500 000 euros manquants.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - La répétition est mère de la pédagogie.... Les moyens nécessaires sont là : avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Même avis.

Mme Nathalie Goulet.  - Déshabiller Pierre pour habiller Paul, c'est le principe de la LOLF. J'en profite cependant pour demander à madame la ministre de nous aider à évaluer les politiques menées. Nous manquons de culture de l'évaluation. Nous comprenons l'argument de la sincérité, mais il faudrait mieux communiquer sur les actions menées pour susciter la demande ; les besoins sont extrêmement importants. Lors de la prochaine loi de finances, grâce à l'évaluation, nous saurons précisément à quoi nous en tenir.

L'amendement n°II-753 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-754, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

400 000

400 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

400 000

400 000

TOTAL

400 000

400 000

400 000

400 000

SOLDE

0

0

M. Jean-Louis Tourenne.  - Transvaser des crédits, j'en conçois les limites puisque toutes les actions sont indispensables...

Nous ne pouvons tolérer la baisse de 400 000 euros pour le financement de l'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment. Nathalie Goulet a raison : si courant 2019, nous pouvions converger dans l'évaluation du dispositif, nous éviterions de réitérer ces débats l'an prochain.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Aujourd'hui, nous avons une vision assez parcellaire de cette politique car la loi est d'application récente et la montée en charge a été très lente. Je m'engage à revenir vers vous en 2019 avec des éléments d'évaluation plus précis. Avis défavorable pour l'heure.

Mme Michelle Meunier.  - Merci de l'intérêt que vous affichez pour cette loi, attaquée au moyen d'une QPC qui a été récemment déposée. Nous avons besoin du soutien du Gouvernement.

Pour les associations de terrain, le compte n'y est pas, hélas.

L'amendement n°II-754 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-694 rectifié, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Inclusion sociale et protection des personnes

dont titre 2

Handicap et dépendance

Égalité entre les femmes et les hommes

150 000

150 000

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

dont titre 2

150 000

150 000

TOTAL

150 000

150 000

150 000

150 000

SOLDE

0

0

Mme Patricia Schillinger.  - La précarité liée aux règles est un sujet assez peu connu et peu abordé en France. Il n'est pas normal de ne pas avoir les moyens de se procurer des protections hygiéniques. En France, ces dernières représentent un budget annuel allant selon les sources de 25 euros à plus de 50 euros par femme. Une femme utilise en moyenne 22 tampons ou serviettes par cycle, ce qui représente un coût estimé entre 1 500 et 2 000 euros au cours de sa vie...

Certaines mutuelles, notamment étudiantes, se sont emparées de ce problème sanitaire et social : elles proposent ainsi un forfait de 20 à 25 euros par an pour le remboursement de ces protections, sur présentation du ticket de caisse ou d'une facture. 

Néanmoins, ces dépenses sont d'autant plus importantes pour les femmes en situation de pauvreté et de précarité, dont le faible niveau de vie les contraint tout particulièrement dans leur quotidien et parfois même jusqu'au renoncement à satisfaire ce besoin de protection des plus élémentaires.

À la rue ou en centre d'hébergement, les règles restent souvent un moment difficile, humiliant, et très difficile à gérer pour beaucoup, contraintes parfois d'utiliser des morceaux de vêtements pour se protéger.

Le sujet touche aussi nos adolescentes : certaines jeunes filles manquent l'école car elles n'ont pas accès aux protections hygiéniques.

Je veux rendre hommage à l'association Règles élémentaires fondée par Tara Heuzé-Sarmini en 2015 et qui a distribué gratuitement plus de 200 000 protections hygiéniques depuis trois ans.

Par cet amendement, nous souhaitons que soient organisées en France des expérimentations, au sein de deux régions volontaires, de libre distribution de protections périodiques dans différents lieux accueillant du public, notamment les plus vulnérables. (Mme Michelle Meunier applaudit.)

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Le rapport sur l'aide alimentaire qu'Éric Bocquet et moi-même avons réalisé montre que de nombreuses associations d'aide alimentaire, système efficace et qui démultiplie l'action publique, distribuent de plus en plus des protections hygiéniques. Investissons plutôt dans le soutien à ces associations. Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Madame la sénatrice, vous soulevez un problème majeur. Le programme 124 ne peut être le support d'une telle proposition. Je m'engage à trouver un vecteur pour améliorer l'accompagnement des femmes partout sur le territoire. Retrait ?

Mme Patricia Schillinger.  - Je vous fais confiance, madame la ministre. Mais il faut élargir les lieux de distribution, monsieur Bazin. Ne nous bornons pas aux seuls lieux de distribution d'aide alimentaire. Je suis disponible pour travailler avec Mme Schiappa sur le sujet.

L'amendement n°II-694 rectifié est retiré.

Les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », modifiés, sont adoptés.

L'article 82 est adopté.

ARTICLE 83

M. Maurice Antiste .  - Cet article remet en cause le dispositif de garantie de ressources, adopté en 2005, pour les personnes les plus sévèrement handicapées. Le Gouvernement entend rationaliser les prestations complémentaires de l'AAH puisque la coexistence du complément de ressources - 179,31 euros par mois - et de la Majoration pour la vie autonome - 104,77 euros par mois - nuirait à la lisibilité de l'AAH. Il estime que la fusion de ces deux compléments de ressources répond à une nécessaire simplification du dispositif et qu'elle permettra d'alléger les démarches des bénéficiaires de l'AAH.

Mais cette fusion lui permettra également de les aligner sur la prestation la moins coûteuse, la majoration pour la vie autonome qui est elle-même soumise à la condition de percevoir une aide au logement. Le Gouvernement fera ainsi des économies de l'ordre de 75 à 179 euros par mois par personne concernée.

En décembre 2016, on comptait 152 883 bénéficiaires de la majoration pour la vie autonome et 68 118 bénéficiaires du complément de ressources. Le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH) refuse cette mesure, rappelant que les deux compléments à l'AAH, s'ils ont effectivement des caractéristiques communes, ont également des motifs distincts.

Ainsi, le complétement de ressources a pour objectif de compenser l'absence durable de revenus d'activité des personnes qui sont dans l'incapacité de travailler, alors que la majoration pour la vie autonome favorise l'accès des personnes en situation de handicap à un logement autonome, sur la base d'un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 %.

Je voterai donc pour la suppression de cet article.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-82, présenté par M. Bazin, au nom de la commission des finances.

Supprimer cet article.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Sans revenir sur l'exposé complet de notre collègue, le complément de ressources de 179 euros par mois bénéficie à 67 000 personnes et la majoration pour la vie autonome à 150 000 personnes. Selon le Gouvernement, le manque de simplicité et de lisibilité justifie la fusion.

Or le complément de ressources, permis par la loi de 2015, constituait une avancée. Le complément de ressources compense l'absence durable de revenu, tandis que la majoration pour la vie autonome favorise l'accès à un logement autonome.

Le nombre de bénéficiaires ne constitue pas un surcroît de travail pour les MDPH qui gèrent plus de quatre millions de demandes par an et traitent automatiquement les demandes de complément de ressources et d'AAH.

Cette suppression priverait les bénéficiaires de 75 à 179 euros par mois. Enfin, les gens qui bénéficiaient de ces allocations continueraient à les percevoir tandis que les nouveaux bénéficiaires ne le pourraient pas. C'est une illustration d'un manque de cohérence de la démarche. Supprimons l'article 83.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-750, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

M. Jean-Louis Tourenne.  - C'est le même objet. La garantie de ressources disparaîtrait avec cette fusion. Elle donnait à chaque personne handicapée un revenu au moins égal à 998 euros.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°II-770 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Artano et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall.

M. Éric Gold.  - L'article 83 remet en cause le dispositif du complément de ressources AAH adopté en 2005.

Ce dispositif garantit les ressources des personnes les plus sévèrement handicapées qui ont une incapacité de travail inférieure à 5 %. Sous prétexte de simplifier les compléments de l'AAH, le Gouvernement supprime le complément de ressources au profit de la majoration vie autonome.

Cela entraînera une perte de 75 à 179 euros par mois pour les personnes concernées.

Certes, une mesure transitoire est prévue pour une durée de dix ans pour les bénéficiaires actuels. Mais cela aggrave leur insécurité financière à moyen terme et crée ainsi une disparité de ressources entre les personnes en situation de handicap.

La pauvreté des personnes en situation de handicap est une grave réalité que l'on ne peut ignorer.

Nous proposons donc de supprimer l'article 83.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.  - La coexistence des deux mesures soutenant un même objectif est source de complexité. Nous proposons une simplification importante, afin d'éviter une double appréciation de la preuve du handicap. Le Premier ministre a rendu possible le 25 octobre dernier la possibilité de reconnaissance à vie du handicap.

Le complément de ressources, à vrai dire, est une survivance du passé, et aurait dû disparaître en 2015, lors de la création de la prestation compensatoire du handicap (PCH).

Les bénéficiaires conserveront leurs droits actuels. Le Gouvernement soutient l'autonomie dans le logement des personnes en situation de handicap, grâce à l'habitat inclusif auquel la loi ELAN vient de donner une définition législative, et qui bénéficiera de 15 millions d'euros financés par la CNSA dès 2019.

Nous remettrons à plat la PCH dans le cadre de la Conférence nationale du handicap 2018-2019, lancée ce lundi 3 décembre, journée internationale des personnes handicapées. J'ai confié le pilotage de ce chantier à Marie-Pierre Martin, première vice-présidente du Conseil départemental de Maine-et-Loire. Avis défavorable à ces amendements.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Nous en avons assez de la communication gouvernementale privilégiant les raccourcis et les petits arrangements avec la vérité. « On va augmenter l'AAH ! », mais l'on découvre qu'en fait il y a fusion de deux allocations ! On nous annonce une augmentation du dispositif zéro chômeur, mais les crédits n'y sont pas.

Idem pour la prime d'activité, le Smic qui augmente supposément de 3 %, alors qu'en réalité, l'augmentation n'est de 1,8 % et obligatoirement indexée sur l'inflation... Ça suffit à la fin ! C'est comme cela qu'on brise le lien de confiance car, constatant ces flous, les gens qui ne croient pas se renseignent sur Facebook, et en viennent à accepter les thèses conspirationnistes.

Arrêtez cette mauvaise foi : elle est à l'origine de la situation que nous connaissons. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

M. Alain Joyandet.  - Ce n'est pas faux....

Mme Monique Lubin.  - Madame la ministre, il faut aménager plus de logements pour les personnes handicapées. Si ce n'est pas obligatoire, il n'y en aura pas.

Les amendements identiques nosII-82, II-750 et II-770 rectifié ter sont adoptés et l'article 83 est ainsi supprimé.

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°II-758, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Après l'article 83

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'avant-dernier alinéa du I de l'article 128 de la loi n°2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...  -  à l'amende prévue à l'article 621-1 du code pénal. »

M. Jean-Louis Tourenne.  - En application de l'article 4 de la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, l'article 621-1 du code pénal dispose que l'outrage sexiste est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe et précise les circonstances aggravantes pour lesquelles il est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe.

Ce dispositif a vocation à réprimer le harcèlement dans l'espace public - à savoir un comportement qui contrevient à l'égalité entre les femmes et les hommes et à la liberté de circulation des femmes - et a donc in fine vocation à changer ces comportements.

Cet amendement propose d'assurer un suivi de ce dispositif dans le cadre du document de politique transversale relatif à la politique d'égalité femmes-hommes.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - avis favorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Votre proposition est déjà satisfaite. Les contributions des ministères de l'Intérieur et de la Justice au document de politique transversale traiteront de cet aspect.

La loi du 3 août 2018 a prévu qu'un rapport récapitule par ministère l'ensemble des articles, évalue la pertinence de la prévention et de la répression, présente les actions, dépenses et emplois, avec une justification au premier euro et des indicateurs de performance. Cela intègre donc le DPT. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Une fois n'est pas coutume, je vous fais confiance, madame la ministre.

L'amendement n°II-758 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°II-87 rectifié, présenté par MM. Brisson, Bas et Dallier, Mmes Bonfanti-Dossat et Noël, MM. Frassa et Cardoux, Mme Gruny, M. Courtial, Mmes Bruguière et Di Folco, M. Savary, Mmes Boulay-Espéronnier et Lanfranchi Dorgal, MM. Bonne, Cuypers et Schmitz, Mmes Imbert, L. Darcos et Deromedi, MM. Pellevat, Karoutchi, Pierre, Vogel, Gremillet, Genest, Darnaud, D. Laurent, Mandelli et Rapin, Mme Keller et MM. Le Gleut, Bonhomme, Laménie et de Nicolaÿ.

Après l'article 83

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les groupements d'intérêt public maison départementale des personnes handicapées, issus de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, sont exonérés de la taxe sur les salaires.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par une majoration des taux des prélèvements sur les jeux et paris mentionnés aux articles 302 bis ZH, 302 bis ZI et 302 bis ZK du code général des impôts.

M. Max Brisson.  - Peu de temps après leurs créations, nombre de MDPH ont été déstabilisées du fait du choix laissé aux agents de l'État de ne pas rejoindre leur nouvelle affectation en MDPH ou de regagner rapidement leur administration d'origine. L'État n'a pas toujours remplacé physiquement les intéressés, les MDPH ont ainsi recruté des agents contractuels.

Afin de ne pas augmenter le nombre d'agents, certains départements ont confié les ressources financières aux GIP-MDPH pour qu'ils puissent recruter des agents supplémentaires ou remplaçants qui leur étaient nécessaires.

Ainsi, de 2014 à 2016, les dépenses de personnel réglées directement par les MDPH ont cru de 12,4 %, tandis qu'elles baissaient de 4,9 % pour les départements et 11,7 % pour l'État.

Or, contrairement aux collectivités locales et à leurs régies, le GIP-MDPH employeur n'est pas exonéré de taxes sur les salaires. Il est soumis au même régime que les entreprises privées.

Cet amendement les exonère de cette taxe afin de préserver leur situation financière fragile.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Nous partageons les inquiétudes exprimées face aux difficultés des MDPH. Cependant, une exonération pour les GIP-MDPH n'est pas justifiée car ils ont la personnalité morale et sont donc redevables de la taxe sur les salaires.

De plus, nous devons limiter le déficit. Pour autant, il convient de soutenir certaines MDPH, en difficulté financière. Avis défavorable.

M. Éric Bocquet.  - À titre personnel, je suis favorable à cet amendement dont je partage la philosophie. Généralisons l'exonération de la taxe sur les salaires à tous les établissements de santé. Certes, cela aurait un coût, mais derrière le coût, il y a des choix, et c'est l'heure des choix. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Ce serait contraire au principe d'égalité devant la loi et susciterait d'autres demandes, toutes aussi légitimes. La taxe sur les salaires ne s'applique pas aux établissements de l'État. Le coût de cette mesure serait en outre très important.

Il faut simplifier la vie des MDPH, grâce aux droits à vie. Nous ouvrons aussi le chantier de la gouvernance des MDPH. Ces groupements d'intérêt public (GIP) datent de 2005 et leur fonctionnement et leur gouvernance ne correspondant plus aux besoins actuels. Vous serez régulièrement informés de l'avancée de ce sujet. Retrait ou avis défavorable.

M. Jean-Louis Tourenne.  - Je tremble quand je vous entends parler de simplification ! (Sourires) Souvent, cela se traduit par des amputations. De même, d'exonération en exonération, on ne change rien, et l'on consolide des droits acquis, comme en matière de niches fiscales, auxquelles l'on prétend s'attaquer pour finalement les laisser perdurer.

Les MDPH ont des difficultés qui ne sont pas tant liées à la taxe sur les salaires qu'au fait que l'État n'a pas revalorisé sa participation.

Je tremble encore lorsque je vous entends dire que vous voulez aussi réorienter les objectifs des départements alors que vous ne payez quasiment plus rien. Plutôt qu'une exonération, il faudrait que l'État apporte une juste participation au fonctionnement de ces établissements.

Mme la présidente.  - Veuillez être brefs dans vos prises de parole.

M. René-Paul Savary.  - Le personnel de l'État n'est plus transféré ; les MDPH doivent recruter d'elles-mêmes. C'est ceux-là qu'il faut exonérer de taxes sociales ! Sinon c'est la double peine. Car qui paie le déséquilibre ? Les départements ! La part de la CNSA atteint moins de 50 %. Faites davantage confiance aux départements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Laurence Cohen.  - Oui à condition de leur en donner les moyens ! Or ce n'est pas le chemin emprunté par le Gouvernement. Les collectivités territoriales ont été particulièrement étranglées. La suppression de la taxe sur les salaires est une idée intéressante. Nous en avons débattu pour les hôpitaux publics lors du PLFSS. Madame la ministre de la santé, vous aviez annoncé une réflexion. J'avais retiré alors mon amendement.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis.  - Remettez à plat le fonctionnement des MDPH, au regard de leurs financements et de leurs missions. L'Éducation nationale est parfois absente pour trouver des solutions pratiques.

La traduction juridique de la simplification n'est pas toujours au rendez-vous. Les MDPH connaissent parfaitement les besoins du territoire. Allons jusqu'au bout vis-à-vis des départements.

M. Max Brisson.  - Je suis plus convaincu par MM. Mouiller, Bazin et Savary que par le Gouvernement. Je retire mon amendement d'appel. Distinguons le statut des MDPH employeurs du statut du personnel. Ouvrons une réflexion globale.

L'amendement n°II-87 rectifié est retiré.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Je suis consciente des difficultés des MDPH ; Corinne Segrétain, du département de la Mayenne, pilotera ce chantier.

J'ai accéléré la fusion des systèmes d'information des MDPH en faisant dialoguer les trois opérateurs. Les départements sont autonomes dans le choix informatique ; nous avons perdu douze ans ! (M. René-Paul Savary proteste.)

Le CNSA est aussi mobilisé. Je compte sur votre appui. 30 % des MDPH sont des maisons de l'autonomie, de proximité. (Mme Patricia Schillinger applaudit.)

L'article 83 bis est adopté.

Article 83 ter

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial .  - J'ai interrogé M. Dussopt sur le changement de modalités d'attribution du RSA en Guyane et à Mayotte.

Quelle est la période de référence : la dernière année ou les trois dernières ?

Le Gouvernement prévoit une période plus longue de domiciliation pour attribuer le RSA. Est-elle prise en compte dans le transfert ?

Mme Agnès Buzyn, ministre .  - Sur la recentralisation du RSA en Guyane et à Mayotte, nous travaillons sur le contenu de cette reprise. Nous expérimentons la carte dématérialisée, mais qui ne peut se faire en Guyane.

L'augmentation de la durée de domiciliation était demandée par les départements. Cette expérimentation est en train d'être conduite. Nous y travaillons et vous répondrons d'ici la fin du mois.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Cela a des répercussions financières. Je vous invite donc à la plus grande transparence sur les conditions de cette reprise.

L'article 83 ter est adopté.

Article 83 quater

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial .  - Cet article rétablit la prise en compte des rentes AT-MP dans le calcul de la prime d'activité jusque fin 2024 pour les seules personnes ayant bénéficié du dispositif entre le 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2018.

Nous y sommes favorables mais avons des réserves sur la mise en oeuvre du mécanisme en 2018. Vous traitez différemment des personnes dans la même situation : c'est un droit à deux vitesses.

Vous créez une situation complexe en matière de droits, paradoxale, lorsque vous invoquez un objectif de simplification. C'est d'autant plus regrettable que ce public est particulièrement fragile.

L'article 40 de la Constitution nous interdit de déposer un amendement, mais vous nous demandez de revenir sur ce dispositif !

M. Jean-Louis Tourenne .  - Ce n'est pas juste et ce sont vraiment des économies de bouts de chandelle. C'est une double peine que l'on fait subir à ces personnes accidentées. Je vote contre cet article.

L'article 83 quater n'est pas adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°II-407 rectifié, présenté par M. Mouiller.

Après l'article 83 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 5135-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pendant cette durée, les modalités de tarification ou de financement de l'organisme employant ou accueillant le bénéficiaire de la période de mise en situation en milieu professionnel restent inchangées. »

II.  -  L'article L. 344-2 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils signent avec les organismes mentionnés au 1° bis de l'article L. 5311-4 du code du travail une convention leur ouvrant la possibilité de prescrire les périodes mentionnées à l'article L. 5135-1 du même code. »

M. Philippe Mouiller.  - Cet amendement favorise l'emploi des personnes en situation de handicap.

En l'état actuel du droit, les périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP) sont théoriquement accessibles aux travailleurs d'ESAT intéressés par le milieu adapté, et aux travailleurs d'entreprises adaptées intéressés par le milieu ordinaire.

Néanmoins, en application du code du travail, elles peuvent entraîner, pour l'entité qui accompagne le bénéficiaire, une perte financière non compensée sur la période où ce dernier est accueilli par une autre structure.

C'est pourquoi cet amendement sécurise les financements des organismes qui accompagnent le bénéficiaire de la PMSMP, pour la durée de cette dernière, qui ne peut de toute façon excéder deux mois sur une durée d'un an.

M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial.  - Avis favorable. C'est une excellente initiative.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État.  - Vous connaissez ma détermination à renforcer l'accompagnement vers le milieu ordinaire, mais cet amendement est satisfait par des conventions passées par les ESAT et les entreprises. Sagesse.

L'amendement n°II-407 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

SANTÉ

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances .  - Les crédits de la mission augmentent de 3,5 %, après la hausse inédite de 10 % en 2018, pour atteindre 1,423 milliard d'euros. La mission comporte deux programmes : le programme 204 est la variable d'ajustement et le programme 183, qui correspond à l'aide médicale d'État (AME), ne connaît aucune limite...

Les crédits du programme 204 diminuent de 25 % depuis 2013, tandis que le programme 183 augmente de 27 %, ce qui remet en cause la capacité des opérateurs à assumer leurs missions ; ils n'atteindront pas les objectifs de prévention.

Les crédits de l'aide médicale d'État augmentent de 38 % alors que le nombre de bénéficiaires augmente de 47 %.

En 2019, les dépenses d'assurance maladie atteindront 943,9 millions d'euros, en hausse de 53 millions d'euros, alors que vous réduisez les crédits des opérateurs. C'était 600 millions d'euros lorsque nous étions au gouvernement... Et cela ne suffit pas puisque vous avez encore viré 9,7 millions d'euros vers ce programme il y a quelques jours !

Une réforme de ce programme est urgente, pour le recentrer sur les soins gratuits urgents. Et encore faudrait-il limiter l'immigration.

Nous défendons des amendements réinstaurant un timbre fiscal, supprimé en 2012, en enlevant 300 millions d'euros à ce programme. Responsable, la commission des finances dit ainsi sa volonté de réformer en profondeur l'AME, et vous recommande, s'ils sont adoptés, de voter ces crédits. (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) La prévention s'impose désormais comme le maître mot des annonces gouvernementales dans le domaine de la santé. Or, en termes de moyens, les intentions peinent encore à se matérialiser. Car, si les crédits de la mission « Santé » progressent globalement de 3,4 %, c'est exclusivement le fait de l'augmentation des moyens dévolus à l'aide médicale d'État.

Les crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » diminuent, eux, de 1 %. En leur sein, les moyens des agences sanitaires sont, au mieux, stabilisés. Le pilotage des opérateurs progresse mais les moyens de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) sont insuffisants.

Ces opérateurs ont fait l'objet d'une profonde réorganisation et s'engagent désormais dans un mouvement de mutualisation dans le souci d'une plus grande cohérence de nos interventions en matière sanitaire.

En matière de prévention, je souhaiterais également souligner la fragilité du financement du volet « Recherche » des plans pluriannuels de santé. L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) participe ainsi à de nombreux plans de santé publique : le plan Maladies neuro-dégénératives, le plan France Médecine génomique, le plan Autisme ou encore le plan Maladie de Lyme

J'en viens aux crédits du programme 183 « Protection maladie » qui sont composés à 99 % des moyens alloués au dispositif de l'AME. Pour 2019, il est prévu de consacrer 935 millions d'euros au financement de l'AME, une progression de plus de 5 % par rapport à 2018. Sur le plan de la sincérité budgétaire, il faut reconnaître que, si les crédits prévus en loi de finances au titre de l'AME de droit commun ont été systématiquement sous-estimés depuis sa création par rapport à la dépense exécutée, l'écart s'est réduit en 2017.

C'est pourquoi l'amendement adopté par la commission des finances qui tend à minorer le programme 183 de 300 millions ne me semble pas aller dans le bon sens. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

Sous réserve de ces observations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé ».

M. Martin Lévrier .  - Le Gouvernement mène une politique de santé dont les objectifs sont clairs : prévention, adaptation aux besoins des territoires. La stratégie nationale de santé consiste à mobiliser les acteurs pour réduire les inégalités et coordonner tous les acteurs.

Les crédits de la mission ne forment qu'une partie des crédits de cette politique. Le PLFSS 2019, dont le Sénat s'est hélas épargné une deuxième lecture, porte plus de 200 milliards d'euros de crédits...

Cette mission porte deux programmes, le 204 et le 183. Le premier est stable, après une hausse de 10 % en 2018. En 2019, la réflexion sera poursuivie avec chacun des opérateurs pour mieux mutualiser et rationaliser, mieux servir en dépensant moins.

Les crédits destinés aux victimes de l'amiante progressent. Ceux de l'AME aussi, de 45 millions d'euros, pour répondre au problème récurrent de sous-budgetisation, mais aussi à des considérations humanitaires - le serment d'Hippocrate n'est pas négociable  - et sanitaires car la gale, la tuberculose et d'autres virus typiques des maladies infectieuses et de la précarité, peuvent se répandre. Si vous ne le faites pas par dessein humanitaire, faites-le pour vous-même et vos proches, pour éviter une contamination. Les maladies contagieuses ne choisissent ni leur pays ni leurs victimes...

Mais décider de protéger ces femmes et ces hommes n'empêche pas de lutter contre la fraude. D'où la centralisation de l'AME à Paris, Bobigny et Marseille. L'AME est un acte humanitaire de base ; comme de prévention nationale.

Depuis deux ans, le nombre de demandes d'indemnisation des victimes de l'amiante diminue, d'autres types de demandes émergent, telles celles des victimes du valproate de sodium.

Le groupe LaREM votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Laurence Cohen .  - À 1,8 milliard d'euros, cette mission complète les politiques d'aide aux plus démunis. Elle augmente mais le PLFSS 2019 prévoit une diminution et la non-compensation de la baisse des charges.

Nous dénonçons ce double discours. Vous diminuez les crédits alors que des millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Dans le même temps, vous faites des cadeaux aux plus riches et vous supprimez les contrats aidés.

Alors que se tient la COP24 qui rappelle les engagements de Paris contre le réchauffement climatique, la santé environnementale doit être une priorité. Ce n'est hélas par le cas ; vous réduisez les crédits de 3,5 millions d'euros à 2,78 millions d'euros. Alors que ce devrait être une priorité, c'est une hérésie !

L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) connaîtra une diminution de 20 millions d'euros depuis 2012, soit 13 % de ses crédits et vous lui retirez encore 23 postes en 2019 et autant en 2020. Après le scandale du Lévothyrox, de l'Androcur, de la pénurie de médicaments et des implants files, est-ce raisonnable ? Sans parler des victimes potentielles de la Dépakine, entre 16 000 et 30 000 personnes. Il faut revoir l'ensemble du système d'indemnisation et se donner les moyens financiers d'y parvenir.

Les crédits du budget de l'État et de la branche AT-MP destinés au FIVA diminuent aussi ; ce n'est pas acceptable.

Notre position reste cohérente sur l'AME : les bénéficiaires doivent être intégrés au régime général : 21 % sont des mineurs ! Cela s'inscrit dans notre combat humaniste, solidaire et universaliste.

Le groupe CRCE a beaucoup de raisons de ne pas voter ces crédits.

M. Bernard Jomier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Une mise en perspective préalable : la hausse globale de 3,4 % masque la baisse de 1 % de son programme 204.

Nous constatons l'affaiblissement du pilotage et des outils de notre politique de santé publique par le ministère au profit d'une concentration croissante par l'Assurance Maladie. L'illustrent les transferts à l'assurance maladie des financements de I'HAS, de l'ATIH, des FIR, de l'Agence de Biomédecine et, désormais acté dans la LFSS pour 2019, de I'EHESP. L'illustre en outre le fait que le reste des crédits non réservés aux agences, qui voient leurs moyens au mieux stabilisés, est en fait principalement consacré aux frais de justice notamment pour l'indemnisation des accidents médicamenteux.

Affaiblissement des outils de pilotage ou étatisation de l'assurance maladie - dont le paritarisme est devenu virtuel ? Il est difficile d'y voir clair.

Les ambitions du plan Priorité prévention ne se retrouvent guère dans ce budget. Les baisses sont à relier à la transformation du fonds sur le tabac en fonds sur les addictions, insuffisamment doté lui aussi, au regard du coût global des ravages de l'alcoolisme.

S'agissant du VIH, le dépistage des populations clés est essentiel pour vaincre un virus sans vaccin, ce qui serait une première.

Avec des crédits en baisse de 20 %, l'ambition de trouver une vraie politique de santé environnementale n'est pas crédible.

L'affaire des malformations congénitales dans l'Ain, en Bretagne et les pays de Loire a aussi nui à la crédibilité de nos institutions sanitaires.

L'enjeu à court terme est de mettre en oeuvre les moyens d'une réduction efficace des facteurs de risque mais aussi de consolider notre système de veille sanitaire. Cela passe par un renforcement budgétaire et par une réévaluation des méthodologies d'expertise épidémiologiques, peu adaptées aux enjeux environnementaux.

L'État doit assumer le pilotage opérationnel d'une vraie politique de santé environnementale, en lien avec les collectivités territoriales.

Le programme 183 sur l'AME fait l'objet d'une estimation sincère. Entre 80 et 140 millions d'euros vont être économisés grâce à l'alignement de la tarification des séjours hospitaliers ; les efforts de rationalisation, préconisés par l'IGF dans son rapport de 2010, plaident pour une mutualisation avec les services de l'assurance maladie. La rationalité économique converge avec la rationalité médicale. L'IGAS recommande depuis des années l'intégration de l'AME dans l'assurance maladie, l'Académie de médecine aussi. Seuls ceux qui regardent l'AME avec les lunettes de la politique migratoire rêvent de la liquider...

La mission « Santé » ne porte certes pas toute la politique du Gouvernement, mais il est difficile de détecter un cap clair, une vision. La politique de prévention, notamment, doit être améliorée.

Sous réserve du maintien des crédits de l'AME, nous adopterons les crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Stéphane Artano .  - Le 19 septembre, le président de la République rappelait que le système de santé était un pilier de notre République sociale, meilleure concrétisation de la solidarité nationale. La mission « Santé » y concourt.

Je regrette la baisse des crédits de prévention de 6 millions d'euros. C'est peu, mais comme le disait le Premier ministre, « on meurt trop souvent trop jeune en France ». Nous regrettons la baisse de 13 % des dépenses dédiées à la prévention des addictions. La France est l'un des pays européens où les adolescents consomment le plus de stupéfiants.

Je salue en revanche la hausse des crédits destinés à la lutte contre le VIH et les hépatites. Selon Santé publique France, 28 % des personnes diagnostiquées pour une infection au VIH l'ont découvert tardivement ; 49 % n'avaient jamais été testées.

S'agissant de l'ANSM, je ne peux que souscrire aux propos du rapporteur pour avis. Le maintien de la dotation de l'État ne suffira pas alors que les missions de l'agence augmentent pour couvrir l'accès aux innovations thérapeutiques ou la gestion des ruptures d'approvisionnement des médicaments.

L'AME concentre 99 % des moyens du programme « Protection maladie » avec 935 millions d'euros. Comme l'an dernier, la commission des finances propose de réduire ces crédits de 300 millions d'euros. Cela ne nous convient pas : il faudra de toute façon prendre en charge cette dépense. L'accès de tous à la santé est conforme à notre démarche humaniste, au coeur du pacte républicain. Il n'est pas envisageable de refuser de soigner. C'est enfin une nécessité de santé publique.

La commission des finances nous propose aussi une franchise, mais l'IGAS et l'IGF avaient déjà estimé cette mesure inadaptée, complexe et porteuse de risques sanitaires. La centralisation de l'attribution des droits dans trois caisses primaires d'assurance maladie - Paris, Bobigny et Marseille - permettra un traitement plus homogène et un meilleur contrôle des demandes.

Nous voterons ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Doineau .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le 18 septembre, le Gouvernement a présenté le plan Ma Santé 2022, qui vise à prévenir les situations à risque et à accompagner. Je salue le cap choisi.

Le modèle du tout curatif n'est pas adapté aux enjeux du vieillissement. La France peut être fière de son système, qui nous permet de jouir de l'une des meilleures espérances de vie : 79,5 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les femmes, mais l'espérance de vie en bonne santé n'est que de 62,6 ans pour les hommes et 64,1 ans pour les femmes. On vit plus longtemps, mais en mauvaise santé, notamment après le départ en retraite. La prévention est plus que jamais une nécessité.

La mission « Santé », c'est 1,4 milliard d'euros, répartis entre deux programmes, dont un tiers pour le programme 204. La hausse de 3,4 % est uniquement due à l'augmentation de l'AME ; il y aura même 5,5 millions de moins pour la prévention. Une telle évolution est regrettable. Nous saluons toutefois l'augmentation de 2 millions d'euros des crédits de l'ANSP, mais malheureusement ceux de l'ANSM stagnent, alors qu'elle doit gérer plusieurs crises sanitaires majeures - Lévothyrox, Dépakine, pénuries - qui alimentent la défiance des Français.

L'AME fait chaque année l'objet d'un débat animé. Je serai tentée de reprendre mon discours de l'année dernière...

Je félicite notre rapporteur pour avis, Corinne Imbert, pour sa prise de position digne et responsable, à laquelle je me rallie. L'AME est une nécessité sanitaire, humanitaire et économique. Nous pouvons regretter la difficulté que l'État a à contenir ces dépenses et leur sous-budgétisation régulière mais ne nous enfermons pas dans le déni. Les amendements de la commission des finances ne me paraissent pas opportuns. Sur ce point, les analyses diffèrent au sein du groupe centriste. Je salue la gestion de l'AME par les trois caisses primaires d'assurance maladie de Paris, Bobigny et Marseille. La mutualisation dégagera des économies de gestion et permettra un renforcement du pilotage et du contrôle des dossiers.

Si la priorité est donnée à la prévention, les moyens budgétaires restent limités. Malgré cette déception, le groupe UC votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Daniel Chasseing .  - Les crédits de la mission « Santé » s'élèvent à 1,422 milliard d'euros. Les ressources sont modestes mais les objectifs poursuivis sont déterminants. Cette hausse est principalement due à celle de l'AME.

Après une hausse de 10 % en 2018, les crédits du programme 204 sont stables, malgré une multiplication des plans de prévention ; ainsi, le fonds de lutte contre le tabac sera élargi à l'ensemble des addictions.

Nous nous félicitons de la réorganisation du paysage sanitaire et de la mise en place du comité d'animation du système d'agence : c'est un effort de cohérence louable pour mieux piloter les opérateurs sanitaires.

L'ANSM se voit contrainte de repenser son fonctionnement pour faire face à l'accroissement de ses missions. Il lui faut être réactive face à la multiplication des crises sanitaires, gérer les ruptures d'approvisionnement de médicaments mais aussi les conséquences sanitaires du Brexit. Ses crédits sont stabilisés en 2019 à 118 millions d'euros. Il faudrait renforcer son pouvoir de sanction, comme le préconise le rapport de la mission présidée par Jean-Pierre Decool.

Santé publique France et l'Anses vont se pencher sur l'impact de l'usage des produits phytosanitaires sur les agriculteurs, mais aussi sur les malformations congénitales observées dernièrement. Renforçons les moyens des agences de veilles sanitaires pour rétablir la confiance.

L'Inserm participe à de nombreux plans de santé publique : maladies neurodégénératives, médecine génomique, autisme, maladie de Lyme. Trop de programmes ont hélas des plans de financement incomplets. Seulement 4,5 millions d'euros sont inscrits, quand 15 millions sont nécessaires.

Le programme 183 est essentiellement consacré à l'AME, dotée de 935 millions d'euros, en hausse de 45 millions d'euros sur un an. Ces crédits sont sous-budgétisés au regard de la dette envers l'assurance maladie, de 50 millions d'euros. Ils ne tiennent pas compte des frais engagés par les hôpitaux pour soigner en urgence les étrangers en situation irrégulière. Pas moins de 475 millions d'euros restent à charge des hôpitaux depuis 2005.

Je soutiendrai la rapporteure pour avis sur le maintien des crédits ; rétablir un timbre fiscal freinerait l'accès aux soins. Je me réjouis que la lutte contre la fraude progresse, c'est le seul moyen de prévenir les abus.

Le groupe Les Indépendants votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants ; M. Yvon Collin applaudit également.)

M. Bernard Bonne .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Les rapporteurs ont parfaitement souligné le déséquilibre entre les deux programmes et les difficultés que rencontrent les opérateurs. Rappelons que ces crédits ne représentent qu'une toute petite partie des moyens de notre politique de santé.

Administrateur de Santé publique France, je mesure le champ toujours plus vaste de cet opérateur et de l'Anses sur la veille sanitaire. Après le dossier de l'amiante, ils se penchent aujourd'hui sur les conséquences des produits phytosanitaires et investiguent les récents cas de malformations congénitales.

Actuellement, ses agents sont en Haute-Savoie pour des cas de toxi-infection alimentaire à la salmonellose. On ne peut à la fois augmenter les missions de ces opérateurs et diminuer de 2,5 % leur plafond d'emplois...

L'implication des professionnels de santé dans la veille sanitaire est un maillon essentiel de la politique de prévention.

Les médecins généralistes sont témoins des inégalités de santé. C'est dans la proximité que la prévention sera efficace. Or les généralistes sont débordés, il faut des mois pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste. Lutter contre les déserts médicaux est une priorité, en zone rurale mais aussi en ville où le coût d'installation est rédhibitoire pour les jeunes médecins. Le lien est clair entre approvisionnement pharmaceutique et présence de professionnels de santé sur un territoire. Vous avez proposé de nombreuses mesures comme l'aide à l'installation dans les zones sous-dotées, l'encouragement à l'exercice mixte, le remboursement de la télémédecine ou le recours aux médecins retraités. Mais ces dispositifs ne sont pas évalués. Qu'en est-il ?

Ces crédits s'inscrivent dans le cadre de la stratégie nationale de santé et du plan Santé 2022. Nous serons vigilants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Nicole Duranton .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Nous avons la chance d'avoir un système de solidarité qui protège les plus vulnérables. L'État assure une mission de service public auprès des citoyens les plus fragiles.

L'AME a pour but de soigner les étrangers dans un souci d'action sociale et humanitaire. Son principe n'est pas en cause, mais la répartition de son budget est à revoir : 95 % vont aux étrangers en situation irrégulière, dont 85 % sont réservés à l'aide médicale de droit commun et aux soins de confort, non urgents. Celle-ci a augmenté de 11 % depuis 2015, avec un nombre de bénéficiaires toujours en hausse.

Dans mon département rural, l'accès aux soins - dentaires ou optiques notamment - est un luxe. Les crédits de l'AME ne cessent d'augmenter, alors que vous réduisez ceux de la prévention. La dynamique des dépenses n'est pas maîtrisée, le mécanisme n'est pas piloté. La commission des affaires sociales appelle à établir un référentiel d'évaluation et de projection solide de la dépense de l'AME. Point positif, sa dette diminue à 49 millions d'euros, et la lutte contre la fraude progresse.

Soulignons aussi que ces crédits sont inférieurs au plafond inscrit en loi de programmation. C'est heureux, après les dépassements de 2015 et 2017.

Sous réserve de l'adoption des amendements, je voterai ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur plusieurs bancs du groupe UC)

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 30.