Projet de loi de finances pour 2019 (Suite)

Seconde partie (Suite)

TRAVAIL ET EMPLOI

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial de la commission des finances .  - En 2019, les crédits de la mission « Travail et emploi » s'élèveront à 13,4 milliards d'euros en AE et 12,4 milliards d'euros en CP.

Par rapport à 2018, la baisse prévue dans ce budget est assez importante, de l'ordre de 500 millions d'euros en AE et de près de 3 milliards d'euros en CP. Cette évolution était annoncée et elle s'inscrit dans un double contexte.

D'une part, la situation de l'emploi s'améliore notablement. Dans une note d'août 2018, l'Insee rappelle que le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s'élevait à 9,1 % au deuxième trimestre 2018, contre 10,5 % en 2015. Le taux d'emploi approche les 66 %, son plus haut niveau depuis les années 80. D'autre part, il est nécessaire de maîtriser la dépense publique. À cet égard, la contribution de la mission « Travail et emploi » et de ses opérateurs à cet effort est significative. Les effectifs de la mission diminueront ainsi de 233 ETP, permettant une économie, hors pensions, de plus de 5 millions d'euros. Le montant des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs sera également en baisse, de plus de 86 millions d'euros, et leurs plafonds d'emplois connaîtront une diminution sensible, de 458 ETPT.

L'essentiel de l'effort demandé aux opérateurs sera porté par Pôle Emploi. S'agissant des crédits, cette diminution sera plus que compensée par une hausse de la contribution de l'assurance chômage. Les ressources de Pôle Emploi augmenteront de 18 millions d'euros par rapport à 2018. La baisse des effectifs sera, quant à elle, compensée par des gains de productivité. Néanmoins, si le nombre de demandeurs d'emploi devait progresser, il conviendrait alors de réexaminer la pertinence de la poursuite de la baisse des effectifs envisagée par le Gouvernement.

La diminution des crédits de la mission « Travail et emploi » poursuit une logique de recentrage des moyens sur les publics les plus éloignés de l'emploi. Moins nombreux, les contrats aidés ont vocation à devenir de véritables outils d'insertion des demandeurs d'emploi. La transformation des contrats d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE) en parcours emploi compétences (PEC), intervenue en début d'année, participe de cette logique. Les conditions pour y avoir recours sont plus restrictives, elles sont la contrepartie d'exigences plus grandes, en termes d'accompagnement et de formation du bénéficiaire. La diminution du nombre de contrats aidés en tant qu'instruments à la main des gouvernements, pour diminuer artificiellement les chiffres du chômage, était appelée par la commission des finances du Sénat. La baisse des contrats aidés sera, en outre, en partie compensée par un effort en faveur du secteur de l'insertion par l'activité économique, qui bénéficiera de moyens en hausse de 51 millions d'euros par rapport en 2018, permettant le financement de 5 000 ETP supplémentaires.

Le présent projet de loi de finances a pour ambition de favoriser une « société de compétences ». Sur la durée du quinquennat, un effort inédit sera consenti, dans le cadre du Plan d'investissement dans les compétences (PIC), en faveur de la formation et de l'accompagnement des jeunes et des demandeurs d'emploi les plus éloignés du marché du travail. Au total, le PIC sera ainsi doté de 15 milliards d'euros, dont 13,8 milliards d'euros portés par la mission « Travail et emploi ». En 2019, les crédits du PIC s'élèveront à 1,4 milliard d'euros en AE et 979 millions d'euros en CP. Ils permettront le financement de la généralisation effective de la Garantie jeunes ainsi que la montée en puissance du volet « formation » du PIC 2019, constituant la première année de mise en oeuvre des pactes pluriannuels d'investissement dans les compétences, qui seront conclus, pour une durée de quatre ans (2019-2022), avec les conseils régionaux. Ces crédits budgétaires seront complétés par un fonds de concours de 1,5 milliard d'euros, versé par France compétences.

Ce budget m'apparaît responsable, ses orientations sont claires : mieux accompagner les personnes les plus en difficulté et investir dans l'avenir.

Aussi, je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Travail et emploi », sous réserve d'un amendement, cosigné avec ma collègue co-rapporteure Sophie Taillé-Polian, visant à renforcer les crédits consacrés aux maisons de l'emploi.

M. Antoine Lefèvre.  - Très bien !

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - Je vous propose, en outre, l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » sans modification.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale de la commission des finances .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Pour la deuxième année consécutive, les crédits consacrés à la politique de l'emploi sont en très forte baisse. Les chiffres ont été rappelés par mon collègue Emmanuel Capus, mais 500 millions d'euros en AE et 3 milliards d'euros en CP.

Certes, le taux de chômage diminue, mais la situation de l'emploi ne s'est globalement pas améliorée, au cours des derniers mois.

Le nombre de demandeurs d'emploi en fin de mois (DEFM) en catégorie A a certes diminué entre le premier trimestre 2015 et le troisième trimestre 2018, mais cette baisse a été plus que compensée, par une progression du nombre de DEFM en catégories B et C, c'est-à-dire, les demandeurs d'emploi ayant une activité réduite. Par exemple, le chômage des plus de 50 ans a progressé de 3 % sur un an toutes catégories confondues, et de près de 9 % pour les seules catégories B et C.

Dès lors, la logique baissière, poursuivie par le Gouvernement, se fera au détriment des personnes les plus éloignées de l'emploi, comme en témoigne la diminution drastique de l'enveloppe de contrats aidés. Je ne nie pas qu'il eût fallu avoir davantage d'exigences pour les contrats aidés en matière d'accompagnement et de formation des bénéficiaires, mais cela ne justifie pas une deuxième réduction, le taux d'insertion de ces derniers sera toujours insatisfaisant, puisque précisément les contrats aidés s'adressent aux personnes les plus éloignées de l'emploi.

Les contrats aidés aidaient les publics les plus fragiles et étaient utiles aux collectivités et à la collectivité dans son ensemble.

Certes, les moyens consacrés à l'insertion par l'activité économique (IAE), augmentent, pour contrebalancer la réduction du nombre de contrats aidés, mais c'est tout à fait insuffisant. En outre, il ne faut pas opposer l'IAE aux contrats aidés car ils s'appliqueraient dans des secteurs plus diversifiés. À mon sens, ils sont plutôt complémentaires.

S'agissant du Plan d'investissement dans les compétences (PIC), présenté comme l'innovation majeure du Gouvernement, une part importante des crédits qui lui seront dévolus en 2019 était déjà inscrite dans le budget de la mission « Travail et emploi ». Cela était notamment le cas des moyens consacrés à la Garantie jeunes ou au plan « 500 000 formations », auquel a succédé le volet « formation » du PIC.

Le dispositif Garantie jeunes gagnerait à être assoupli, afin de toucher un public plus nombreux, et d'en simplifier la gestion pour les missions locales.

Outre une diminution drastique des dépenses d'intervention de la mission, le Gouvernement a également choisi d'affaiblir les acteurs de la politique du travail et de l'emploi. À cet égard, la baisse des effectifs du ministère du travail, et notamment de ceux de l'inspection du travail, envoie un très mauvais signal, alors que le travail illégal et la fraude au détachement constituent des enjeux de plus en plus prégnants et que le droit du travail a fait l'objet de modifications substantielles au cours des années passées ; cela nécessite des contrôles et de l'accompagnement.

Face à ce paradoxe, le ministère répond que le ratio « salariés par agent de contrôle » de la France est conforme au standard fixé par l'Organisation internationale du travail (OIT). Néanmoins, les missions confiées à l'inspection du travail sont différentes de celles dévolues à d'autres inspections à l'étranger ; cette comparaison a donc peu de sens.

Plus généralement, l'affaiblissement des opérateurs du travail et de l'emploi est symptomatique de la politique de l'offre, mise en oeuvre par le Gouvernement actuel et rentre en contradiction avec la nécessité d'accompagner davantage les publics les plus éloignés de l'emploi, dont le nombre augmente et dont la situation est de plus en plus précaire. Les allers-retours entre chômage et emplois sont de plus en plus nombreux, insérant de plus en plus de personnes dans un cercle vicieux.

S'agissant de Pôle Emploi, je ne suis pas sûre que les gains de productivité, qui reposent sur le tout numérique, et dont on nous parle depuis des années, soient réels. Ils reposent sur la logique du tout numérique. En outre, si la dématérialisation simplifie certaines procédures, elle peut aussi s'avérer dissuasive pour divers publics. Pôle Emploi avait recours à des contrats aidés pour accompagner les demandeurs d'emploi lors de leur inscription : aujourd'hui, tel n'est plus le cas. Il faut prendre rendez-vous.

S'agissant de l'Afpa, le projet de transformation lancé par la direction générale le 16 octobre dernier, avec, à la clé, des réductions d'emplois, conduira à affaiblir l'opérateur, d'où une baisse du nombre et de la qualité des services rendus et du nombre de bénéficiaires.

Ce budget nie la situation de millions de Français, pour qui trouver un emploi ne se résume pas au fait de traverser la rue. Aussi, bien que je vous invite à adopter l'amendement que j'ai co-signé avec Emmanuel Capus sur les moyens consacrés aux maisons de l'emploi, je vous propose à titre personnel de rejeter les crédits de la mission « Travail et emploi ».

Je vous suggère en revanche d'adopter sans modification les crédits du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; Mme Céline Brulin applaudit également.)

M. Michel Forissier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales .  - Alors que la baisse du chômage est conjoncturelle, la baisse des crédits à périmètre constant s'élève à 2,4 milliards d'euros, en raison du changement de périmètre. Le renforcement des crédits de l'IAE doit être salué. Je soutiens le recentrage de cet outil sur les publics les plus éloignés de l'emploi. Un service public de l'emploi fort apparaît nécessaire.

Madame la ministre, vous avez relancé l'expérimentation des emplois francs, malgré le manque d'évaluation du dispositif. Les résultats ne sont pas au rendez-vous. Les actions en faveur des entreprises adaptées sont louables. La formation des demandeurs d'emploi est une nécessité. Saluons la première année pleine du PIC, cependant gonflé artificiellement.

Le fonds de concours de France Compétences est également gonflé par des crédits de l'Afpa. Les crédits pour l'apprentissage ne sont pas encore au rendez-vous. La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ». (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Je remercie M. Forissier pour la qualité de ses travaux. Ces échanges fructueux nous ont permis d'enrichir le texte issu de l'Assemblée nationale.

Le groupe UC votera en faveur du texte, en raison des avancées réelles sur les compétences et malgré une baisse des crédits de 500 millions d'euros en AE et 2 millions d'euros en CP.

Mais on ne peut prôner une réduction de la dépense publique sans faire des efforts.

M. Michel Canevet.  - C'est vrai !

M. Olivier Henno.  - La baisse du chômage est lente et encore fragile, et les créations d'emploi se font dans certaines régions seulement : façades atlantique et méditerranéenne, métropoles.

L'efficacité du service public de l'emploi reste posée.

Laissons du temps aux politiques publiques pour l'insertion par l'activité économique (IAE) : les dispositifs prennent du temps. Nous serons vigilants quant au déploiement des crédits à l'IAE. Le PIC, annoncé comme un véritable big bang, se situe dans la continuité budgétaire des précédents programmes. Les modalités de collecte au profit de la formation professionnelle permettent d'annoncer 1,5 milliard d'euros pour la future agence France Compétences, mais cela rassemble les précédents crédits des OPCA et de la commission paritaire.

Pour l'ancien vice-président du département du Nord en charge de l'insertion et du RSA que je suis, permettez-moi de partager mon analyse : les mécontents actuels portent des revendications de hausse du pouvoir d'achat, ancrées dans les habitudes de vie. Le mal de pouvoir d'achat s'est transformé en rage du pouvoir d'achat avec l'augmentation des taxes. Ayons un réel débat avec les gilets jaunes, canal historique - et non les casseurs - exaspérés par les inégalités sociales, exaspérés de gagner à peine plus - 100 ou 150 euros - avec un Smic que le voisin inactif bénéficiant d'aides sociales. Le travail doit mieux rémunérer que l'inactivité. Telles sont nos valeurs. (MM. Vincent Segouin et Laurent Duplomb applaudissent.)

Le groupe UC adoptera les crédits de la mission « Travail et emploi », les articles 84 et 84 bis en faveur de l'insertion professionnelle et en faveur du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ».

Nous sommes heureux de constater un regain en faveur de l'apprentissage, et saluons ces recettes dynamiques en raison d'un élargissement de l'assiette des cotisants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. Martin Lévrier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Le développement de l'activité et de l'emploi est encourageant depuis un an, montrant la réussite du Gouvernement avec une baisse de 1,2 % du taux de chômage. La baisse des crédits de la mission « Travail et emploi » résulte de cette amélioration. Dans un contexte de dette, il faut faire des choix. Le chômage baisse, la dépense aussi. La stabilisation des compétences est importante.

Le programme 102 est porté par la délégation à l'emploi. L'action n°1 améliore la situation publique de l'emploi. L'État participe pour 1,6 milliard d'euros à Pôle Emploi et 2,1 milliards d'euros à l'ASS.

L'action 2 améliore les dispositifs d'accès à l'emploi, notamment via les dispositifs IAE pour recentrer les contrats aidés sur les personnes les plus éloignées de l'emploi.

Le programme 102 finance la Garantie jeunes, les écoles de la deuxième chance, l'expérimentation zéro chômeur de longue durée.

Le programme 103 accompagne les mutations économiques et mobilise 14,6 milliards d'euros, pour améliorer les qualifications et l'emploi durable. Il s'inscrit dans la rénovation du modèle social. Le CPF met les personnes au coeur du système. Ce programme expérimente jusqu'en 2020 les dispositifs d'emploi franc.

La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté mobilisera 14 millions d'euros.

Le programme 111, sur l'amélioration de la qualité de l'emploi voit ses crédits augmenter, afin de former les défenseurs syndicaux, la santé et la sécurité au travail.

Les AE sont en forte diminution.

Le programme 155 voit ses crédits augmenter de 7 millions d'euros. C'est un programme d'appui et de soutien pour les 9 500 postes du ministère.

Le compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage », dont les crédits augmentent de 77 millions d'euros, disparaîtra l'an prochain avec la création de France Compétences.

Nous voulons mieux dépenser en étant plus efficaces. (M. Laurent Duplomb ironise.)

Le groupe LaREM votera les crédits de la mission et du compte spécial. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Le montant de la mission passe de 15,2 milliards d'euros à 12,23 milliards d'euros, soit une baisse de 19,4 %. L'aide à l'embauche dans les PME et les contrats aidés sont abandonnés.

Il n'y a que le Gouvernement pour y croire...

Vous sabordez les moyens de la politique. Pas moins de 1 518 postes sont supprimés à l'AFPA, au ministère, à Pôle Emploi, transférés vers les missions locales.

Vous attaquez la formation alors que c'est le manque de compétences qui pèse sur l'emploi.

Les salariés de Pôle Emploi ont déploré l'augmentation de leur charge de travail au détriment de l'accompagnement des demandeurs d'emploi.

Le nombre d'inspecteurs du travail va baisser. Madame la ministre, vous avez promis une multiplication par quatre des contrôles mais ce sera impossible à réaliser.

Quelque 100 000 emplois aidés seront supprimés. Nous sommes opposés à cette atteinte aux services publics, au détriment des collectivités locales, des services à la personne, au monde associatif et culturel.

Or 67 % des emplois aidés du secteur marchand aboutissent à un emploi. Je note cependant une bonne mesure : l'élargissement de la Garantie jeunes.

Le Gouvernement porte atteinte au pouvoir d'achat et aux conditions d'existence des personnes en situation de handicap. Nous nous opposons à cette pratique, qui consiste à prendre d'une main pour donner de l'autre.

Avec un taux de chômage à 9 %, il est inadmissible de réduire le service public de l'emploi, quand on débourse 20 milliards d'euros par an pour le CICE, qui, ajoutés aux allègements de cotisations patronales, offrent au total 40 milliards d'euros aux entreprises. Votre politique consiste à faire des cadeaux aux plus riches et en imposant l'austérité aux autres. Vous méprisez le peuple, écoutez ce qui se passe dans la rue. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Mme Nathalie Delattre .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Cette mission est une grande sacrifiée du budget. Nous déplorons la baisse de 500 millions d'euros en AE et 3 milliards d'euros en CP alors qu'il n'y a pas d'embellie majeure sur le front de l'emploi.

Certes, le chômage des chômeurs de catégorie A s'est réduit, atteignant 8,9 %, mais les demandeurs d'emploi en catégories B et C ont augmenté.

Pôle Emploi supporte l'essentiel de la diminution des subventions. Le risque de dégradation des conditions de travail des agents est probable. La diminution brutale du nombre de contrats aidés, de 200 000 à 100 000, est dure pour nos collectivités territoriales, notamment.

Les missions locales, chargées de la Garantie jeunes, verront leurs moyens diminuer : c'est incompréhensible. Le PIC ne saurait atteindre ses objectifs sans actions locales. Je pense notamment aux plans locaux d'insertion dans l'emploi et les maisons de l'emploi.

Le groupe RDSE défend l'amendement en faveur du maintien des maisons de l'emploi, qui ont démontré toute leur pertinence, pour analyser les besoins des entreprises et une gestion territorialisée des compétences. Lieux reconnus d'ingénierie territoriale, les 106 maisons de l'emploi sont soutenues par 15 000 communes où oeuvrent 1,5  million d'entreprises. Ainsi, 72 % des personnes les plus éloignées de l'emploi sont en CDI après 15 mois de contrat. Qui dit mieux ?

De 15 millions d'euros en 2010, nous passons à 5 millions d'euros en 2019 pour les maisons de l'emploi, laissant les collectivités territoriales quasi seules à les financer. Ce n'est pas acceptable.

Je remercie le Sénat d'avoir proposé de créer un programme ad hoc, au sein de la mission, et pour l'inscription de 10 millions d'euros pour les maisons de l'emploi en AE et en CP.

La grande majorité du groupe RDSE votera les crédits de la mission, sous réserve de l'adoption de son amendement pour les maisons de l'emploi.

M. Alain Fouché .  - Le taux de chômage de la zone euro est de 8,1 % contre 9,1 % en France. Malgré la reprise de l'activité, nous sommes loin de la moyenne européenne. Des coupes importantes auront lieu sur les crédits de la mission : une baisse record de 500 millions d'euros en AE et 3 milliards d'euros en CP.

Je salue les efforts de pédagogie d'Emmanuel Capus qui a démontré le recentrage des crédits. Seuls 100 000 contrats aidés seront signés contre 200 000 en 2018. Néanmoins, ils ne constituent qu'une réponse de court terme. Il est temps de recentrer les moyens sur ceux qui en ont le plus besoin avec l'IAE.

L'augmentation des crédits du PIC accompagnera la généralisation effective de la Garantie jeunes, alors que le chômage des jeunes atteint 20 %.

Je veux insister sur la nécessaire territorialisation de la politique de l'emploi. Pourquoi, dès lors, réduire les moyens des maisons de l'emploi ? La suppression de leurs crédits est regrettable. Nous soutiendrons l'amendement des rapporteurs de la commission des finances sur le sujet.

Votre politique favorise la montée en compétences des travailleurs. Nous la saluons.

Le groupe Les Indépendants votera ces crédits en l'état. Le changement de logique est bienvenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Investir dans les politiques publiques de l'emploi est capital. Les crédits de la mission vont malheureusement à rebours de cette ambition, avec 3 milliards d'euros en moins, malgré l'échec du Gouvernement à lutter contre le chômage.

Les écoles de la deuxième chance offrent une qualification ou un emploi à des décrocheurs. Pourquoi ne pas accélérer leur implantation ? Le sort réservé aux missions locales suscite l'inquiétude dans les territoires. Leurs moyens diminuent de 4 %. Ne cassons pas ce dispositif. L'avenir des maisons de l'emploi est préoccupant. Pourtant, elles interviennent dans des secteurs parfois non traités par le service public de l'emploi.

L'Assemblée nationale n'est pas restée sourde à leur sort, heureusement, en adoptant un amendement portant leurs crédits à 5 millions d'euros, complété par les 10 millions d'euros de l'amendement des rapporteurs de la commission des finances du Sénat.

Moins d'un an après leur mise en place, les parcours Emploi compétences (PEC) remplaçant les contrats aidés, brutalement arrêtés en 2017, ont un bilan plus que mitigé, en partie à cause de leur complexité et de la baisse de la part financée par l'État, ramenée de 73 % à 50 %. Nous dénonçons la brutalité de la réforme, sans aucune alternative pour les petites communes et associations, dans un contexte marqué par la suppression de la réserve parlementaire et la réduction des dotations de l'État aux collectivités.

Je ne comprends pas non plus la baisse des moyens de Pôle Emploi : une baisse de 85 millions d'euros après une autre de 50 millions d'euros dans le budget pour 2018. La charge des conseillers s'accroît avec 70 dossiers supplémentaires pour chacun d'entre eux avec le plan Pauvreté. C'est une aberration quand beaucoup de demandeurs d'emploi ont besoin d'être pris par la main.

Trop peu est fait pour l'emploi des personnes handicapées, malgré des crédits atteignant 400 millions d'euros ; la prestation de compensation du handicap reste insuffisante pour financer l'achat d'un véhicule adapté ou d'un fauteuil. On constate aussi de nombreux retards dans le paiement des aides et l'expérimentation en cours visant à faire prendre en charge la PCH par les fonds départementaux de compensation du handicap s'avère complexe, en raison des finances exsangues des départements.

Malgré les nombreux points négatifs de cette mission, malgré la déception, nous voterons ces crédits, pour les quelques avancées qu'ils comportent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ; Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)

Mme Corinne Féret .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) La France compte plus de 5,6 millions demandeurs d'emploi, un chiffre tristement en hausse sur trois mois, comme sur un an. Or le budget de la mission baisse pour la deuxième année consécutive ; cette fois, à périmètre constant, l'amputation est de 3 milliards d'euros.

Pôle Emploi est particulièrement touché, avec une baisse de 85 millions d'euros, après une baisse de 50 millions d'euros en 2018. Ce sont 800 ETP en moins en 2019 ; et ce, sans tenir compte du redéploiement des conseillers du conseil vers le contrôle. On évoque, comme explication, des gains de productivité. Mais la dématérialisation peut faciliter les choses pour certains publics, être un repoussoir pour d'autres.

Les missions locales, elles aussi, seront fragilisées avec la diminution de plus de 8 millions d'euros des crédits consacrés aux conventions d'objectifs. Quelque 250 emplois de conseillers seront supprimés, faute de financement ; quel paradoxe quand de nouvelles responsabilités viennent d'être confiées à ces structures dans la lutte contre la pauvreté des jeunes. Quant aux expérimentations des fusions des missions locales dans Pôle Emploi, nous y sommes opposés. Elles mettront en cause l'ancrage territorial de ces structures et l'engagement politique et financier fort des élus représentant leurs collectivités.

L'an dernier, nous avons dénoncé la baisse drastique des contrats aidés. Les nouveaux « parcours emplois compétences » sont un échec : à peine plus de la moitié des parcours ont été prescrits en 2018, 100 000 contrats supplémentaires seulement sont prévus en 2019 quand vous évoquiez, il y a un an, le chiffre de 200 000. Le taux de prise en charge est trop faible ; vous avez perdu la confiance des employeurs qui redoutent de nouveaux revirements du Gouvernement. Vous justifiez la baisse des crédits cette année par la sous-consommation de ceux de l'an passé, un comble ! Nous n'avons ni le qualitatif, que vous prôniez, ni le quantitatif. Les emplois aidés manquent dans les services scolaires et périscolaires, dans l'aide aux personnes dépendantes, les Ehpad et tout aussi cruellement dans le milieu associatif.

Nous avions déposé un amendement, qui a été déclaré irrecevable, pour porter le nombre de contrats aidés à 200 000 avec une hausse du taux de prise en charge à 70 % du Smic. Cela paraît indispensable pour relancer ces contrats dans le secteur non marchand et le monde rural où le sentiment d'abandon par l'État est le plus fort.

Et que dire de la disparition de la contribution de l'État au budget de fonctionnement des maisons de l'emploi ? Elle mettra inexorablement en difficulté ces structures. Si l'amendement de l'Assemblée nationale va dans le bon sens en leur attribuant 5 millions d'euros, le groupe socialiste défendra un amendement visant à porter leurs crédits à 10 millions d'euros.

La baisse des effectifs du ministère, notamment de l'inspection du travail, constitue un très mauvais signal à une époque où le code du travail est bouleversé et la lutte contre le travail au noir nécessaire.

Les sénateurs du groupe socialise prendront leurs responsabilités en ne votant pas les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) L'emploi des personnes handicapées, notamment pour 5 000 ETP supplémentaires, est louable. Cependant, la loi Égalité avenir professionnel a modifié les modalités de calcul de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) afin de favoriser l'emploi direct. La sous-traitance et les prestations ne pourront plus être autant mobilisées par les employeurs. Augmenter si fortement la création de postes est paradoxal quand pèse le risque d'une diminution des carnets de commandes des entreprises adaptées.

Entreprises protégées, adaptées et ordinaires, il est impossible de modifier l'équilibre d'un milieu sans briser l'autre. Complétons la réglementation pour passer plus facilement d'une place dans un établissement médico-social à un emploi au sein d'une entreprise.

La hausse des crédits de l'insertion par l'activité économique va permettre de créer 5 000 emplois mais ne compense que partiellement la suppression des contrats aidés.

Je veux, en tant que membre de son conseil d'administration du fonds d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, dresser un premier bilan. Après la loi du 29 février 2016, dix territoires, dont celui de Mauléon dans les Deux-Sèvres, ont été sélectionnés. Près de 1 000 personnes ont trouvé un emploi pérenne. Les entreprises à but d'emploi ont créé des emplois utiles. Le président de la République a annoncé l'extension de l'expérimentation à 40 territoires ; dans quelles conditions ?

PEC, ateliers et chantiers d'insertion, entreprises d'insertion, entreprises à but d'emploi, entreprises adaptées, il serait utile de renforcer la lisibilité de ces dispositifs tout aussi utiles les uns que les autres. Est-ce la future mission du service public de l'insertion ?

Madame la ministre, votre Gouvernement se veut actif dans la lutte contre le chômage mais trop de mesures sont prises dans la précipitation. Vous gagnerez à associer davantage les acteurs territoriaux ; vous le faites trop peu ou trop brièvement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains ; Mme Nathalie Delattre applaudit également.)

Mme Sabine Van Heghe .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) L'AFPA va connaître la fermeture de 38 sites sur 206 et la suppression de 1 541 postes. Onze départements n'auront plus de sites et, cela devient une habitude, ce sont les plus fragiles et les plus ruraux. Il y a là une nouvelle illustration du double langage du Gouvernement : vous annoncez des objectifs qui paraissent, parfois, louables, mais vous mettez concrètement en place des politiques qui ne correspondent pas aux effets d'annonce ; d'où le sentiment, chez une large majorité de nos concitoyens, d'être trompés.

Une aide unique est prévue par l'apprentissage, mise en place par la loi Liberté de choisir son avenir professionnel. Son montant sera fixé par décret, nous sommes donc vigilants.

Plus de 5 000 ETP sont prévus pour l'insertion par l'activité économique mais en deçà des attentes du secteur et des recommandations du rapport de Jean-Marc Borello de janvier 2018.

Avec la suppression des contrats aidés, vous provoquez une catastrophe sociale dans le département du Pas-de-Calais. Les emplois aidés manquent dans les Ehpad pour nos ainés, manquent aux associations qui se voient affaiblies. Notre tissu social est fragilisé, les solidarités entamées ; l'on voit comment le sentiment d'abandon de nos concitoyens se traduit dans les protestations actuelles. Vous avez organisé un vaste plan de licenciements en agissant par idéologie. Le Gouvernement n'écoute pas, le Gouvernement reste sourd, campé dans ses certitudes alors que sa politique de l'emploi ne marche pas et que le chômage augmente.

Les sénateurs du groupe SOCR voteront contre les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et sur quelques bancs du groupe CRCE)

M. Vincent Segouin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) En ces temps troublés, la mission « Travail et emploi » est capitale. De nombreux maux de notre société pourraient être résolus par le travail. Les ordonnances et la loi « Liberté de choisir son avenir professionnel » vont dans le bon sens mais le taux de chômage stagne, il est de 9,1 % au troisième trimestre 2018. La baisse des demandeurs d'emploi de catégorie A a été plus que compensée par la hausse de ceux des catégories B et C.

Pourtant, les budgets alloués à la formation et au travail sont importants, même si une baisse de 2,9 milliards d'euros est prévue cette année pour une meilleure maîtrise de la dépense publique. Depuis des années, nous dénonçons le manque de retours sur les résultats des outils de lutte contre la précarité.

Je suis favorable à l'augmentation des crédits pour la Garantie jeunes, les écoles de la deuxième chance, le plan d'investissement dans les compétences et l'insertion par l'activité économique.... En revanche, je regrette la baisse de 4 % des crédits aux missions locales qui accueillent 1,4 million de jeunes. Un jeune sur deux s'est vu proposer un emploi à l'issue d'une formation. Pôle Emploi va connaître une baisse de ses effectifs prétendument compensée par une hausse de sa productivité ; j'en doute, alors que ses missions s'élargissent. (M. Jean-Marc Boyer applaudit.) Pendant ce temps, des emplois ne sont pas pourvus. La politique de l'emploi est insuffisamment efficace. On peut même faire avec moins.

Je regrette la baisse des contrats aidés ; cela coûte cher à l'État mais un chômeur encore plus.

Le groupe Les Républicains votera ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - C'est un plaisir de vous retrouver ce soir, une semaine après mon audition en commission. Vos interventions témoignent d'une volonté commune : permettre à tous nos concitoyens d'accéder à un emploi durable et de qualité. Telle est la volonté du président de la République : émanciper par le travail.

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a réformé la gouvernance des politiques de formation professionnelle et d'apprentissage afin que l'individu soit au centre du jeu, acteur et décideur de son propre parcours. Développement massif de l'apprentissage, efficacité de la formation professionnelle continue, inclusion dans l'emploi des personnes en situation de handicap, égalité professionnelle entre femmes et hommes, élargissement de l'assurance chômage pour faciliter les transitions professionnelles, lutte contre la précarité et retour à l'emploi durable, tous ces objectifs sont au coeur du document de cadrage remis aux partenaires sociaux en septembre dernier. Les derniers décrets, beaucoup sont déjà parus, seront publiés au plus tard début janvier 2019.

Le plan d'investissement dans les compétences, doté de 1,5 milliard d'euros en 2018, a permis le lancement de 20 programmes pour accompagner et former des personnes peu qualifiées. TPE et PME n'ont plus peur d'embaucher, elles le disent ; elles ne trouvent pas les compétences qu'elles cherchent. Le chômage est passé de 9,7 % à 9,1 % en un an, nous devons faire mieux.

En 2018, nous avons transformé les contrats aidés en PEC. Ils reposent sur le triptyque : mise en emploi, accompagnement et formation. Le fonds d'inclusion dans l'emploi renforce leur pilotage territorial, la fongibilité des crédits facilite l'adaptation aux besoins locaux.

Le modèle inclusif des entreprises adaptées est mis en avant avec Cap vers l'inclusion, signé le 12 juillet 2018 : 40 000 personnes en situation de handicap supplémentaires auront accès à l'emploi d'ici 2022. Les emplois Tremplin favoriseront l'accès à des entreprises non adaptées.

Un plan de transformation de l'AFPA a été annoncé il y a quelques semaines mais nous y reviendrons.

Toutes ces opérations ont été menées dans le respect des crédits que le Parlement m'avait alloués.

Cette année, les crédits de la mission s'élèvent à 12,4 milliards d'euros. La baisse de 2 milliards d'euros par rapport à 2018 s'explique par l'extinction des mesures décidée sous le précédent quinquennat, dont l'aide à l'embauche ponctuelle dans les PME-TPE, et la suppression en volume des contrats aidés que j'assume - il fallait faire le partage des eaux entre les vrais contrats aidés et la précarité subventionnée.

La colonne vertébrale de ce budget, ce sont l'investissement dans les compétences et l'inclusion dans l'emploi des plus vulnérables. Ces derniers doivent être au coeur de notre politique d'inclusion ; ils sont au centre du plan Pauvreté annoncé par le président de la République en septembre.

Nous poursuivons la montée en puissance des crédits du plan avec un doublement des engagements en faveur des compétences à 3 milliards d'euros dont 1,5 milliard n'est pas dans ce budget puisqu'il provient de la contribution à la formation professionnelle des entreprises. Quel est le gain ? On investit plus, les publics en difficulté seront plus ciblés et vous aurez plus de visibilité sur ces crédits.

Premier objectif : l'insertion des parcours Formation dans les pactes régionaux pluriannuels d'investissement dans les compétences. Ces pactes sont en cours de négociation entre l'Etat et les régions. Les engagements seront pris pour quatre ans avec une clause annuelle, la montée en puissance sera progressive. Car, nous avons tiré les leçons du plan « 500 000 » : lorsqu'on va trop vite, trop fort pour la formation, on crée un appel d'air et ce n'est pas forcément bon.

En 2019, 1,6 milliard d'euros sont provisionnés pour les pactes régionaux.

Deuxième objectif, 60 millions d'euros sont consacrés à la formation dans l'insertion par l'activité économique. Les personnes handicapées sont également une priorité.

Troisième objectif, consolider la Garantie jeunes et les autres dispositifs avec 550 millions d'euros en 2019.

Quatrième objectif, promouvoir les expérimentations sur des publics cibles et des secteurs cibles : 10 000 formations sur le numérique, 10 000 formations sur les emplois verts ou encore la préparation à l'apprentissage - 60 CFA ont postulé pour monter des formations en apprentissage. Un délégué interministériel a été nommé au développement de l'apprentissage.

L'évaluation des « Territoires zéro chômeur de longue durée » sera réalisée prochainement. Les effectifs seront doublés à 1 270 personnes et le budget augmente de 4 millions d'euros.

Les réformes de la loi Liberté de choisir son avenir professionnel prévoient 100 000 emplois en faveur des personnes en situation de handicap, sachant que 500 000 émargent à Pôle Emploi, soit deux fois plus que dans le reste de la population.

Le budget porte un engagement important en faveur des plus vulnérables. Dès 2019, 10 000 personnes de plus bénéficieront de l'insertion par l'activité économique. Pour la réforme des entreprises adaptées, 400 millions d'euros sont prévus. L'Agefiph complétera le financement de l'État.

Nous compléterons ces efforts par 100 000 parcours emploi compétences. 30 000 contrats aidés seront transférés au ministère de l'Éducation nationale pour l'accompagnement des élèves handicapés pour 124 millions d'euros.

L'expérimentation des emplois francs se poursuit depuis avril.

La baisse de 85 millions d'euros de subventions à Pôle Emploi est plus que compensée par la dynamique de la contribution Unedic - 100 millions d'euros supplémentaires.

L'aide aux missions locales passe de 360 à 356 millions d'euros : la baisse est faible. En revanche, nous voulons une contractualisation avec plus de dynamisme, pour aller chercher les jeunes dans les zones rurales et au pied des tours. J'ai d'ailleurs créé un conseil de l'inclusion dans l'emploi, présidé par Thibaut Guilluy.

Le paysage des aides à l'apprentissage sera simplifié au 1er janvier 2019, grâce à la création du nouvel opérateur, France Compétences.

Pour réduire le coût du travail, nous basculons certains allégements vers le droit commun, plus favorable.

Un effort budgétaire de près de 4 milliards d'euros est consacré aux services d'aide à la personne et de création d'entreprises.

Je poursuivrai le retrait de l'État de la subvention de fonctionnement des maisons de l'emploi ; en revanche, les craintes ont été entendues et une enveloppe de 5 millions a été votée à l'Assemblée nationale pour accompagner la transition. Nous ne voulons pas de fusion mais une coopération renforcée.

La baisse des effectifs du ministère sera de 233 emplois - un taux d'effort stable par rapport à 2018 - grâce au numérique.

Ce budget a une grande cohérence : il intensifie l'inclusion et stimule la création d'emplois grâce aux compétences, à l'apprentissage et à la réduction du coût du travail.

Examen des crédits de la mission et des articles rattachés

Article 39

M. le président.  - Amendement n°II-541 rectifié bis, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

 

20 000 000 

 

20 000 000 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

 

 

 

 

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

20 000 000

 

20 000 000

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

 

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

Mme Corinne Féret.  - Il y a une injonction contradictoire : le Gouvernement multiplie les missions de l'inspection du travail mais réduit ses effectifs. Vous voulez, madame la ministre, mettre l'accent sur la prévention des chutes de hauteur ; Mme Schiappa, sur l'égalité hommes-femmes. Et la santé au travail ? Et la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement ? Il faut renforcer les moyens de l'inspection du travail.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - Sur le fond, je suis favorable à la lutte contre le travail illégal, mais l'action visée n'est pas la bonne. En outre, il faudrait prélever des crédits sur la Garantie jeunes, alors que nous en ponctionnons déjà avec un amendement suivant. Avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Aujourd'hui, il y a 2 130 agents affectés au contrôle, soit plus que la recommandation de l'OIT d'un agent pour 10 000 salariés. Nous avons décidé de prioriser : lutte contre fraude au détachement et travail illégal, égalité homme/femme et sécurité et santé au travail.

L'objectif est de 300 000 interventions en favorisant les échanges permanents entre la direction générale du travail et les Direccte, les opérations conjointes avec les douanes, la police, la gendarmerie et les Urssaf pour démanteler les filières. Avis défavorable.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - À titre personnel, je soutiens cet amendement même s'il n'est pas techniquement parfait. Quand on regarde ce que réalisent les inspecteurs du travail, vos priorités sont déjà suivies. Les méthodes de travail doivent peut-être être revues mais rien ne justifie de réduire le nombre d'inspecteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR ; Mme Michèle Vullien applaudit également.)

M. Alain Fouché.  - Un travail extraordinaire est mené par les inspecteurs du travail. Le Gouvernement devrait en nommer davantage.

L'amendement n°II-541 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-545 rectifié bis, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

18 000 000

18 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

18 000 000

18 000 000

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

18 000 000

18 000 000

18 000 000

18 000 000

SOLDE

0

0

Mme Sabine Van Heghe.  - On assiste à un plan de licenciements à l'AFPA. Nous nous inquiétons de la fin de son maillage territorial. Dans les Hauts-de-France, trois sites sont menacés : Berck, Boulogne et Beauvais. Les salariés de l'AFPA ne comprennent pas pourquoi des formations affichant complet ou portant sur des secteurs en tension sont fermées.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - L'AFPA est le seul opérateur de la mission dont les crédits sont stables : un ajout de 18 millions d'euros serait énorme. En outre, il serait prélevé sur la Garantie jeunes.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Avis défavorable. Chaque année, l'AFPA ne peut pas boucler seule son budget. Elle a 720 millions d'euros de déficit. Cette année, nous avons encore dû combler 70 millions d'euros. La décentralisation a conduit les régions à émettre des appels d'offres que l'AFPA ne remporte pas. D'où une baisse de 20 à 40 % du chiffre d'affaires selon les régions. Dans certains centres, il y a plus de formateurs que de stagiaires. Nous avons décidé de sauver l'AFPA et de lui éviter la faillite. Nous lui avons confié les programmes HOPE et les prépa-compétences à l'AFPA. Mais il faut préparer l'avenir. Mon cabinet recevra jeudi les organisations syndicales de l'AFPA. Un programme AFPA Mobile apportera une offre de formation itinérante là où on ne peut conserver un site.

M. Patrice Joly.  - Je soutiens cet amendement. Dans le Nivernais, l'AFPA joue un rôle essentiel auprès des personnes éloignées du travail. L'annonce de la fermeture de l'AFPA de Nevers a été un choc, incompréhensible : des milliers d'heures de formation. C'est un coup dur pour la Nièvre, le Cher et l'Allier où les services publics ferment. Dire aux habitants qu'ils doivent faire des kilomètres pour trouver un nouveau centre de formation alors que celui de Nevers fonctionne et que de nombreux investissements ont été réalisés sur ses plateaux techniques n'est pas envoyer un bon signal. L'État détenteur de la moitié des sièges du conseil d'administration de l'AFPA doit prendre ses responsabilités.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - Le modèle met en concurrence un service public à part entière avec des organismes privés où les formateurs sont des vacataires dont les intermissions ne sont pas prises en charge et où la qualité de formation est moindre.

Le projet de redynamisation de l'AFPA doit être puissant pour qu'elle reparte de l'avant. (Mme Gisèle Jourda applaudit.)

L'amendement n°II-545 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-540 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

14 070 000

14 070 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

14 070 000

14 070 000

TOTAL

14 070 000

14 070 000

14 070 000

14 070 000

SOLDE

0

0

Mme Corinne Féret.  - Lors de la présentation du plan Pauvreté en septembre dernier, le président de la République a annoncé le doublement du nombre de chômeurs de longue durée concernés par l'expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée » lancée sous le quinquennat de François Hollande.

Il s'agit d'une excellente mesure pour réinsérer professionnellement des personnes durablement éloignées de l'emploi. Au 30 juin, 936 chômeurs ont retrouvé un emploi. À Mauléon, l'objectif sera bientôt atteint. À Colombelles dans le Calvados, l'expérimentation est concluante.

Pourquoi attendre 2020, voire plus, pour étendre ce qui marche afin de remettre le pied à l'étrier des plus fragiles d'entre nous et lutter contre le chômage ? Louis Gallois estime lui-même que l'expérimentation est suffisamment concluante.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - Je partage évidemment l'intention des auteurs de l'amendement d'une montée en charge du dispositif. La difficulté, c'est que 4 millions d'euros seulement ont été consommés l'an dernier, sur une prévision de 15 millions d'euros. À 22,4 millions d'euros, les crédits prévus cette année me semblent suffisants. Retrait ou avis défavorable.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Sur le plan financier, même avis. Les opérations menées sur le territoire sont très encourageantes. Une évaluation est prévue fin 2019, elle sera transmise à la représentation nationale. C'est indispensable, car le coût s'élève à 17 000 euros par bénéficiaire. Le but est que les externalités couvrent ces frais, et que les emplois créés ne fassent pas concurrence aux PME. Nous avons les moyens de doubler l'opération l'année prochaine.

M. Patrice Joly.  - Le projet territoire zéro chômeur propose aux demandeurs d'emploi de longue durée présents sur le territoire depuis plus de six mois un emploi à durée indéterminée, adapté à leur savoir-faire. Dans la Nièvre, cette expérience est menée depuis un an et demi sur un territoire de 4 000 habitants. Les salariés sont embauchés en CDI. Quelque 90 personnes sont embauchées par une entreprise à but d'emploi (EBE), 60 sont en attente.

Cette expérience offre des prestations en agriculture, sur des emplois saisonniers, ou des services aux personnes âgées, la demande étant peu solvable. Les salariés bénéficient de nouvelles perspectives ; ils peuvent alors se projeter, par exemple pour acheter un véhicule. Des emplois se développent dans l'artisanat, le commerce.

Une dynamique vertueuse s'est engagée sur le plan humain. Des hommes et des femmes relèvent la tête, participent à la vie de la cité, aux associations, aux évènements. Cette expérimentation, véritable succès, doit perdurer et pouvoir être déclinée sur d'autres territoires. Quarante sont annoncés, mais il manque des moyens.

M. Philippe Mouiller.  - Je suis favorable à cette expérimentation, dont j'espère la pérennisation. Je siège au conseil d'administration de la gestion du fonds. Nous avons besoin de temps pour la mise en place du dispositif. Ce n'est pas en dix-huit mois qu'une entreprise peut confirmer sa capacité à conserver ces emplois. Agrandissons déjà le champ de l'expérimentation avant de la généraliser.

Il faut de la souplesse administrative dans la gestion du fonds, qui souffre avant tout de problèmes de trésorerie. L'administration doit gérer en souplesse.

Enfin, une question de forme. Madame la rapporteure de la commission des finances, êtes-vous aussi rapporteure du groupe socialiste ?

Mme Frédérique Puissat.  - Très juste !

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - Nous nous sommes réparti les tâches, avec mon co-rapporteur. Je vous donnerai l'avis de la commission des finances lorsqu'il est favorable - c'est rare. En tant que rapporteur, nous pouvons aussi donner notre position personnelle. Vous en auriez fait autant à ma place.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - Il est important de prendre en compte dans l'évaluation l'impact sur l'ensemble du territoire, car ces projets bénéficient non seulement aux personnes embauchées mais aussi à la redynamisation du tissu économique.

L'amendement n°II-540 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-69, présenté par M. Capus, au nom de la commission des finances.

I.  -  Créer le programme :

Maisons de l'emploi

II.  -  En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

 

10 000 000

 

10 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

 

 

 

 

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

 

 

 

 

Maisons de l'emploi

10 000 000

 

10 000 000

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

0

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - Nous avons eu l'an dernier le débat sur les crédits des maisons de l'emploi, qui avaient baissé à 12 millions d'euros. Il ressort de notre mission de contrôle budgétaire que les maisons de l'emploi ont un bilan globalement positif ; elles ont trouvé leur place. Parmi leurs spécificités, les clauses sociales et une action reconnue en matière de GPEC.

L'Assemblée nationale a voté la réouverture d'un crédit de 5 millions d'euros. La commission des finances souhaite monter à 10 millions d'euros en AE et CP, car les crédits de la Garantie emploi ne seront probablement pas intégralement consommés. Il y a donc une réserve pour créer une action ad hoc.

M. le président.  - Amendement identique n°II-408 rectifié, présenté par MM. Lefèvre et Husson.

M. Antoine Lefèvre.  - L'utilité des maisons de l'emploi dans le maillage territorial est reconnue. En les abandonnant, l'État laisse les collectivités territoriales se dérouiller seules en matière d'insertion professionnelle des jeunes. C'est incompréhensible, alors que le président de la République s'est engagé à multiplier par cinq l'accompagnement des jeunes dans le plan Pauvreté. Les maisons de l'emploi sont un objet social unique, nullement redondant, pour accompagner les personnes très éloignées de l'emploi, notamment en zone rurale.

M. le président.  - Amendement identique n°II-430 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Collin, Corbisez et Gabouty, Mme Jouve et M. Requier.

Mme Nathalie Delattre.  - Madame la ministre, depuis un an, je vous demande audience, comme présidente des maisons de l'emploi, cet outil né de la volonté des territoires. On en compte aujourd'hui 106, avec 1 200 collaborateurs. Toutes ont leurs spécificités. Bordeaux sur la création d'entreprises et le bâtiment, Strasbourg sur la formation transfrontalière, Roubaix sur les outils numériques. Elles sont soutenues par 15 000 communes, 1,5 million d'entreprises.

Elles sont support de clauses d'insertion ; 72% des personnes restent en CDI après 18 mois de contrat. Le dispositif a toujours été évalué positivement. Or l'État ne remplit plus sa part du contrat : sa participation est passée de 80 millions d'euros en 2005 à 5 millions en 2019 ! Ce désengagement, ce mépris des collectivités territoriales sont incompréhensibles. C'est pourquoi le Sénat se mobilise. Merci de l'entendre. (MM. Michel Forissier, rapporteur pour avis, Antoine Lefèvre et Philippe Mouiller applaudissent.)

M. Philippe Mouiller.  - Bravo !

M. le président.  - Amendement identique n°II-489, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Les maisons de l'emploi font le lien entre partenaires publics et privés, élaborent des stratégies locales. Le retrait de l'État est dommageable car les collectivités territoriales ne peuvent les financer seules. Pour ces territoires, c'est la double peine !

La France a un taux de 9 % de chômage, 11,7 % dans les Hauts-de-France. Le taux de pauvreté est de 18 %, 20% dans le Pas-de-Calais. Or les acteurs de la formation professionnelle voient leurs crédits baisser : Pôle Emploi, AFPA, alors que la liste de leurs missions s'allonge. Nous nous opposons à ce désengagement de l'État. Maintenons un service public de l'emploi de proximité, accessible à tous, sur tout le territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Victoire Jasmin applaudit également.)

M. le président.  - Amendement identique n°II-494, présenté par Mme Schillinger.

Mme Patricia Schillinger.  - J'ai déposé cet amendement pour défendre les maisons de l'emploi. Dans mon département, la maison de l'emploi de Mulhouse-Sud Alsace est particulièrement dynamique dans l'anticipation des mutations économiques, le développement de l'emploi local, l'orientation, la mise en oeuvre du plan local pour l'insertion et l'emploi. Elle a contribué au succès des clauses sociales d'insertion dans les marchés publics, à l'apprentissage transfrontalier et s'implique dans la promotion de la mobilité des actifs, dans l'esprit de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Ce réseau mérite tout votre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. le président.  - Amendement identique n°II-526 rectifié, présenté par M. Henno, Mme Létard, M. Delcros, Mme Vullien, MM. Kern, Vanlerenberghe et Janssens, Mme Sollogoub et M. Moga.

M. Olivier Henno.  - Lorsque Jean-Louis Borloo a créé les maisons de l'emploi, il voulait introduire des complémentarités dans le service public de l'emploi ainsi qu'une gouvernance territoriale. Commencez donc par introduire plus de gouvernance territoriale dans le service public de l'emploi avant de supprimer les maisons de l'emploi, qui sont un dispositif disparate mais très utile sur de nombreux territoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes UC et RDSE)

M. le président.  - Amendement identique n°II-543 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Mme Corinne Féret.  - Entre la fermeture des sites AFPA et la fusion des maisons de l'emploi avec Pôle Emploi, c'est tout le service public de l'emploi dans les territoires qui est rogné. Cela inquiète fortement les élus locaux. Pour la maison de l'emploi de l'agglomération de Caen, le changement d'échelle ne peut se faire sans les plateformes locales d'animation et d'ingénierie que sont les PLIE et les maisons de l'emploi. Le rapport de la mission d'information du Sénat a conclu à un risque de bilan négatif en cas de retrait total de l'État. L'abondement de 5 millions d'euros prévu par l'Assemblée nationale est totalement insuffisant.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Lorsque les maisons de l'emploi ont été créées, le service public de l'emploi n'existait pas sous sa forme actuelle. C'est pourquoi chaque Gouvernement, quelle que soit son orientation politique, a baissé leurs crédits : moins 75 % entre 2009 à 2017. Beaucoup d'élus locaux ont rapproché les maisons de l'emploi des PLIE, des missions locales ou des maisons de services au public. Je le redis, aucune fusion n'est prévue entre les missions locales et Pôle Emploi. Multiplier les structures locales n'est pas forcément efficace, il faut mieux assurer la coopération entre les organismes.

Nous avions annoncé l'année dernière que l'État ne financerait plus les maisons de l'emploi qui ont des politiques différentes.

Mme Nathalie Delattre.  - C'est 15 000 communes !

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Elles sont toutefois éligibles au FSE pour des opérations en matière de GPEC, à l'échelle du bassin d'emploi. Nous n'avions pas prévu de budget, c'est vrai, mais j'ai approuvé l'amendement de 5 millions d'euros à l'Assemblée nationale. Avis défavorable aux vôtres.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - Certes, les réductions ont été progressives ; au fur et à mesure, il y a eu des réorganisations, des fusions et des disparitions de maisons de l'emploi qui n'avaient pas trouvé leur place. Les structures restantes ont démontré leur capacité à engager des dynamiques. Elles sont pilotées par les élus locaux. Difficile d'imaginer que Pôle Emploi pourrait prendre le relais, vu son mode de gouvernance. S'en tenir à des financements aux projets fragilise les structures et reporte la charge sur les collectivités. Conservons un financement suffisant pour assurer la pérennité des maisons de l'emploi restantes.

M. Alain Fouché.  - Lorsque je présidais le département de la Vienne, la maison de l'emploi disposait, sous Sarkozy, de crédits énormes. J'ai proposé de les répartir sur tout le territoire. Sous la présidence Hollande, les financements ont cessé. Nous avons tapé du poing sur la table, comme les élus savent le faire. La maison de l'emploi est devenue la maison des services au public, avec des subventions du département et de la région, dans le cadre du contrat de territoire. Désormais, le département est seul et met à disposition du personnel.

Beaucoup de départements n'ont pas pu bénéficier de cette structure en raison de son arrêt brutal. C'était un bon système, préservons-le.

Les amendements identiques nosII-69, II-408 rectifié, II-430 rectifié, II-489, II-494, II-526 rectifié et II- 543 rectifié sont adoptés.

M. le président.  - Amendement n°II-544 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

8 250 000

8 250 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

8 250 000

8 250 000

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

TOTAL

8 250 000

8 250 000

8 250 000

8 250 000

SOLDE

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Mme Corinne Féret.  - Le budget des missions locales baisse de 8,25 millions d'euros par rapport à 2018, en contradiction avec les annonces du président de la République. Le plan Pauvreté vise un quintuplement du nombre des Garanties jeunes ; or le PLF ne prévoit que 100 000 entrants pour 2019. Nous renforçons la capacité d'accompagnement des jeunes en difficultés par les missions locales, car la Garantie jeunes ne se limite pas à une simple allocation. Or rien n'est prévu en matière d'accompagnement des jeunes par les missions locales. Pire, pas moins de 250 ETP sont supprimés. Le Gouvernement se prive des outils pour lutter contre le chômage des jeunes non diplômés, qui sont 20 % à être sous le taux de pauvreté.

Madame la ministre, soyez cohérente et sortez des effets d'annonce. Maintenez le financement des missions locales au niveau de 2018.

Mme Sophie Taillé-Polian, rapporteure spéciale.  - La commission des finances a émis un avis défavorable car cet amendement prend des crédits sur le volet Formation du PIC.

À titre personnel, difficile de considérer que la Garantie jeunes contrebalance la baisse de financement des missions locales. La subvention n'est accordée à 100 % que si le jeune mène à terme son projet. Or il est impossible d'obtenir 100 % de sorties positives, vu le public concerné, qui est très éloigné de l'emploi.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - L'État finance 52 % du budget des missions locales.

Il finance le structurel, la Garantie jeunes et le parrainage. Le financement global des missions locales par l'État est en légère baisse, de 1,1 %. L'objectif est avant tout de simplifier les circuits financiers. Nous souhaitons une globalisation des crédits pour tirer les conséquences de l'intégration de la Garantie jeunes. Il faudra en débattre avec les collectivités territoriales. J'espère qu'elles ne se désengageront pas.

Mme Gisèle Jourda.  - Je soutiens avec force cet amendement car la pseudo-constance des crédits des missions locales est un tour de passe-passe. Elles vont perdre 8,2 millions d'euros de crédits, alors qu'elles assument la montée en puissance de la Garantie jeunes.

L'annonce du plan Pauvreté, la volonté d'en faire bénéficier 100 000 jeunes n'étaient qu'écran de fumée.

Département pilote, l'Aude avait un très bon taux de sortie mais celui-ci est en baisse car les missions locales n'ont plus les moyens de bien accompagner les jeunes. Résultat, elles ne perçoivent que 85 % de la subvention. Il faut mettre fin à une bureaucratie excessive, non supprimer des crédits.

Pourquoi affaiblir des opérateurs reconnus ? Le but du Gouvernement serait-il de favoriser in fine leur fusion avec Pôle emploi ? Ce serait une terrible erreur ! L'annonce brutale du Premier ministre a d'ailleurs suscité une levée de boucliers de la part des élus locaux. Méfions-nous de l'expérimentation. Les missions locales ne font pas la même chose que Pôle Emploi.

M. Alain Fouché.  - J'ai bien connu ce dossier pour avoir mis en place une mission locale à l'échelle du pays, avec le soutien du département et de l'intercommunalité. Cela fonctionnait, puis les régions ont mis la main dessus. Apportent-elles des financements ? En Aquitaine, la tendance est plutôt à supprimer toutes sortes de subventions...

L'amendement n°II-544 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°II-546 rectifié, présenté par Mme Féret et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l'emploi

 

 

 

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi

5 000 000

 

5 000 000

 

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail

dont titre 2

 

5 000 000

 

5 000 000

TOTAL

5 000 000

5 000 000

5 000 000

5 000 000

SOLDE

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Mme Sabine Van Heghe.  - Les crédits du CPA et du CPF sont passés de 8 millions d'euros à 3 millions en 2018. Or l'application internet doit être opérationnelle à l'automne ; la Caisse des dépôts et consignations travaille à sa configuration. Si les professionnels ont été consultés, quid de la concertation en direction des futurs usagers ? Il faut s'assurer que la Garantie répondra bien aux besoins.

Madame la ministre, rassurez-nous. Un financement en baisse est un mauvais signal.

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial.  - Avis défavorable. Au total, avec le Grand plan d'investissement, pas moins de 23 millions d'euros seront dépensés en 2019, en incluant les 3 millions du CPA.

Mme Muriel Pénicaud, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°II-546 rectifié n'est pas adopté.

L'article 84 est adopté, de même que l'article 84 bis.

Les crédits de la mission « Travail et emploi », modifiés, sont adoptés.

Les crédits du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » sont adoptés.

Prochaine séance, aujourd'hui, mercredi 5 décembre 2018, à 11 heures.

La séance est levée à 1 h 15.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus