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Table des matières



Questions orales

Entretien des cours d'eau

Mme Colette Mélot

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Violences conjugales

M. Roland Courteau

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Allocation de rentrée scolaire

Mme Corinne Imbert

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Politique de l'eau

M. Philippe Bonnecarrère

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Pénurie de vaccins BCG

M. Christian Favier

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Débat sur le Massif central

M. Alain Bertrand, au nom du groupe RDSE

M. Jean-Claude Requier

M. Olivier Cigolotti

M. André Gattolin

M. Jean-Jacques Lozach

M. Daniel Chasseing

Mme Cécile Cukierman

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Dépôt d'un rapport

Débat sur l'avenir de La Poste

M. Jean-Pierre Bosino, au nom du groupe communiste républicain et citoyen

M. Joël Guerriau

M. Jean Desessard

Mme Delphine Bataille

M. Stéphane Ravier

Mme Brigitte Gonthier-Maurin

M. Jacques Mézard

M. Philippe Kaltenbach

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie

Modification à l'ordre du jour

Ordre du jour du lundi 12 décembre 2016




SÉANCE

du jeudi 8 décembre 2016

31e séance de la session ordinaire 2016-2017

présidence de M. Thierry Foucaud, vice-président

Secrétaire : M. Jackie Pierre.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle cinq questions orales.

Entretien des cours d'eau

Mme Colette Mélot .  - Au printemps dernier, la France a subi des intempéries d'une extrême violence qui ont entraîné un épisode de crues exceptionnel. En Seine-et-Marne, 232 communes ont été dévastées, soit la moitié des communes du département.

Les maires ont été exemplaires, mobilisant leurs équipes pour porter secours aux habitants, accueillir les sinistrés, prendre les mesures d'urgence et rétablir les services publics de proximité.

Aujourd'hui, des interrogations se font entendre sur les causes et la gestion de ces inondations. Les cotes des crues ont dépassé, en Seine-et-Marne, celles de 1910.

Le changement climatique est désormais une évidence et les territoires seront probablement confrontés à d'autres épisodes de ce type dans les années à venir. Depuis les années 1950, la Seine et ses affluents étaient à peu près calmes avec pour conséquence une sorte d'amnésie collective du risque d'inondation !

Les inondations constituent un risque majeur sur le territoire national. Seule une meilleure prévention réduira la facture laissée par ces événements exceptionnels. Il faut donc réduire la vulnérabilité des villes et des villages face à ces catastrophes naturelles.

Il est également important de veiller à ce que les obstacles qui pourraient obstruer le lit de la rivière soient régulièrement enlevés.

L'important est de retenir l'eau avant qu'elle n'arrive dans la rivière. Les grands équipements sont difficiles à réaliser pour des raisons à la fois d'espace et de coût. Mais la multiplication de petits barrages, de petites retenues est tout aussi efficace. L'important est de mieux gérer l'arrivée de l'eau pour éviter une montée rapide du niveau des cours d'eau.

L'inspection générale a mené une mission sur la crue du Loing. Elle devait rendre ses conclusions en novembre : qu'en est-il ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Les possibilités d'action pour réduire l'aléa sont nombreuses. Depuis plusieurs décennies, elles sont entreprises par les collectivités avec l'appui de l'État, notamment dans les Programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI).

Un nouvel appel à projets « PAPI 3 » doit être mis en oeuvre à compter de 2018, sur la base d'un cahier des charges à publier début 2017. Il s'agit de mieux articuler les PAPI avec la directive inondations, de mieux anticiper la prise en compte des enjeux environnementaux et à d'articuler le dispositif avec la compétence Gemapi.

L'entretien des cours d'eau est fondamental mais ne suffit pas quand les pluies sont exceptionnelles. C'est pourquoi le nouveau plan vise à mieux associer les acteurs de l'État et les collectivités territoriales.

Mme Colette Mélot.  - J'attends les conclusions de la mission d'inspection, même si les inondations du printemps dernier n'étaient pas prévisibles.

Violences conjugales

M. Roland Courteau .  - Le dispositif électronique anti-rapprochement « DEPAR » consiste à contrôler, par un moyen matériel, l'interdiction faite à une personne, mise en examen pour un crime ou délit commis dans un contexte conjugal, de s'approcher de sa victime : il signale instantanément et à distance que l'auteur de violences se rapproche de celle-ci. Ce dispositif devait être expérimenté depuis 2010 dans plusieurs départements mais il ne l'a pas été faute que soient remplies les strictes conditions pénales qui doivent être réunies.

Contrairement à ce qui se passe avec le TGD (Téléphone grave danger), la victime est avertie en amont, dès que l'auteur des violences franchit le périmètre de protection, ce qui lui permet de se mettre à l'abri. Le Depar a fait la preuve de son efficacité dans les pays où il est appliqué : Portugal, Slovaquie, Espagne, Suisse, Grande-Bretagne. Que compte faire le Gouvernement pour faciliter son utilisation ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le Depar est une expérimentation intéressante, novatrice, mais qui exige des conditions strictes. Appliquée dans les ressorts des TGI d'Amiens, Aix et Strasbourg, elle s'est avérée peu efficace malgré l'abaissement de sept à cinq ans du quantum de peines à partir duquel il est applicable. Un nouvel abaissement n'est guère envisageable car incompatible avec le droit européen qui exige une gravité plus grande pour le placement sous surveillance électronique.

C'est pourquoi le Gouvernement a préféré généraliser le TGD dans la loi sur l'égalité réelle, du 4 août 2014. En neuf ans d'application en Seine-Saint-Denis, aucune femme n'est décédée du fait de violences conjugales, preuve de son efficacité.

Allocation de rentrée scolaire

Mme Corinne Imbert .  - Modifiée par la loi, l'allocation de rentrée scolaire due au titre d'un enfant confié est versée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en assure la gestion jusqu'à la majorité de l'enfant ou, le cas échéant, jusqu'à son émancipation. Avant le vote de cette disposition, un travail pédagogique était effectué avec les parents, qui bénéficiaient d'un accompagnement spécifique pour l'achat de fournitures scolaires.

Désormais, ils reçoivent une simple notification de la caisse d'allocations familiales leur indiquant la nouvelle disposition. Cependant, les parents se tournent vers les services du département afin de connaître la procédure de récupération de l'allocation, ce à quoi les services départementaux répondent que l'allocation ne pourra être récupérée sous forme de pécule qu'à la majorité de l'enfant. De surcroît, alors même que sont développées des mesures d'accueil séquentiel ou de placement éducatif à domicile, le fait de ne pas verser directement l'allocation de rentrée scolaire aux parents alors que ces derniers doivent couvrir les frais inhérents à la rentrée scolaire est un non-sens. Étonnant aussi que cette mesure ait été mise en oeuvre sans attendre la publication du décret d'application. Les pupilles de l'État auraient besoin d'un tel dispositif, mais ils ne sont pas concernés ! Comment expliquer que tous les enfants d'une même fratrie n'aient pas le même régime ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Près de 40 % des jeunes de 18 à 25 ans vivant dans la rue ont eu un parcours en protection de l'enfance.

Depuis 2016, l'allocation de rentrée scolaire est versée pour les enfants confiés à l'Aide sociale à l'enfance (ASE) sur un compte bloqué à la caisse des dépôts et consignations jusqu'à sa majorité. C'est en effet à ce moment que le jeune a besoin d'un pécule pour entrer dans la vie adulte. Les parents continuent à toucher les allocations familiales si le juge en décide ainsi.

Lors d'un placement éducatif à domicile, l'enfant reste au domicile alors qu'il est juridiquement sous la responsabilité de l'ASE. Le Gouvernement va réfléchir à l'évolution de ce dispositif.

Mme Corinne Imbert.  - Vous ne dites rien sur les pupilles de l'État. Ni sur le fait que, dans une même fratrie, le traitement est inégal entre un enfant placé à l'ASE et les autres.

Politique de l'eau

M. Philippe Bonnecarrère .  - Tout d'abord, je vous adresse monsieur le ministre, toutes mes félicitations pour votre nomination.

La loi NOTRe a prévu d'ici 2020 une compétence générale en matière d'eau confiée aux intercommunalités. Cette compétence vient compléter le dispositif Gemapi qui conduit à confier cette même compétence aux intercommunalités d'ici le 1er janvier 2018.

Or la mise en oeuvre de la pratique est contraire à cette orientation et la centralisation l'emporte.

Un arrêté du 20 janvier 2016 relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) confie aux préfets ordonnateurs de bassins le soin d'élaborer des stratégies « Socle », donnant à celles-ci un tour prescriptif. Serait-il possible de renoncer à cette centralisation ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - La loi Maptam a confié la Gemapi aux EPCI à fiscalité propre, selon un schéma à trois niveaux : les EPCI à fiscalité propre, qui peuvent articuler cette compétence avec d'autres, comme l'urbanisme ; les établissements publics d'aménagement et de gestion de l'eau, par sous-bassin versant, pour la maîtrise d'ouvrage ; les établissements publics territoriaux de bassin, par grand bassin versant. La loi NOTRe a reporté le transfert de compétences à 2020. La première stratégie « Socle » sera arrêtée par le préfet, après avis du comité de gestion de bassin.

Je suis conscient que cette réponse technique n'est pas de nature à vous satisfaire. C'est un sujet auquel je suis moi-même très sensible ; je vous propose que nous en reparlions plus à fond.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Je suis inquiet du caractère prescriptif de ces nouvelles stratégies. Les intercommunalités avaient la maîtrise d'ouvrage, c'était clair et efficient. On assiste à un retour en arrière.

Je perçois que vous êtes conscient du problème ; merci de vous faire notre interprète auprès de vos collègues du Gouvernement.

Pénurie de vaccins BCG

M. Christian Favier .  - Le nouveau vaccin BCG Biomed-Lublin mis à disposition par les autorités sanitaires françaises à cause de la pénurie du vaccin contre la tuberculose impose des contraintes qui rendent très difficile son utilisation par les services de protection maternelle et infantile. Un flacon de ce vaccin doit être utilisé pour cinq injections successives, ce qui oblige les centres de PMI à prévoir des consultations dédiées au seul BCG. Situation inacceptable, car le rôle des PMI ne peut se limiter à la vaccination. D'autant plus qu'avec la pénurie d'autres vaccins (Infanrix Penta et Tétra), les médecins de ville orientent les familles vers les médecins de PMI. Ainsi, les efforts fournis par les services de PMI du Val-de-Marne sont considérables pour faire face à ces pénuries, avec 11 000 enfants vaccinés en 2015 (soit 3 000 de plus que les années précédentes).

Le rapport bénéfice-risque de ce nouveau vaccin est-il identique à celui du vaccin danois SSI ? L'État entend-il désengorger les PMI et faire face à la pénurie de vaccins ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le vaccin BCG connaît une pénurie d'échelle européenne, liée au fabricant danois, unique en Europe. L'ANSMM peut garantir la fiabilité du fournisseur polonais. Des informations techniques sont à disposition dans les centres départementaux.

La ministre de la santé a pris des mesures fortes avec des engagements concrets des industriels pour lutter contre les ruptures d'approvisionnement.

M. Christian Favier.  - Merci, mais c'est insuffisant : il faut relancer la production en France. Le vaccin polonais entraînerait des effets secondaires, et des surcoûts pour notre sécurité sociale. La vaccination est un pilier de notre santé publique, il faut régler ce problème dans les meilleurs délais.

Débat sur le Massif central

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Le Massif central, un enjeu de développement territorial ».

M. Alain Bertrand, au nom du groupe RDSE .  - Le Massif central est formé de vingt-deux départements, s'étend sur quatre régions, avec Lyon, Toulouse, Bordeaux et Dijon comme nouvelles capitales régionales - toutes périphériques - et compte 4 millions d'habitants. Les politiques de massifs définies par les élus locaux, les acteurs socioprofessionnels de l'État, animés et cofinancés dans des communautés de massif, visent à compenser certains handicaps naturels.

Il s'agit de renforcer l'attractivité du Massif central pour les entreprises, de valoriser les ressources naturelles, culturelles et patrimoniales, de s'adapter au changement climatique, de développer les capacités territoriales et favoriser la coopération. Tout cela est excellent mais oublie le coeur du sujet : les infrastructures. Le Massif central a comme point fort d'être d'échelle européenne, de disposer de l'A75 entre Paris et Béziers ; de l'A89, axe transversal entre Lyon et Bordeaux ; mais aussi un réseau d'aéroports. Des actions réussies : six itinéraires de grande randonnée, 17 pôles de pleine nature ; le tourisme vert, avec l'élevage est devenu essentiel. Parmi les réussites, je pourrais citer l'appel à candidature pour la redynamisation des centres-bourgs, si l'on n'avait pas retenu seulement 18 candidats sur 873. L'aménagement du territoire doit s'adapter aux centralités des bourgs anciens.

Parmi les points faibles : la faible couverture en téléphonie mobile, pourtant indispensable. La communauté du Massif teste la voiture autonome et le covoiturage, quel tragique cache-misère quand l'axe Lyon-Toulouse ou la route 102 qui dessert Aurillac sont dans un état digne d'un autre siècle ! Quant au transport ferroviaire, on met plus longtemps pour aller de Paris à Mende qu'au siècle dernier. La filière bois, pourtant stratégique, ne reçoit que 29 millions : elle n'est pas suffisamment accompagnée.

Il faut se concentrer sur l'essentiel : les infrastructures, les moyens, la volonté politique. Sur 2014-2020, 107 millions d'euros prévus, 40 millions d'euros seulement ont été consommés, à comparer au budget des 22 départements et aux dizaines de milliards des quatre régions. La stratégie du Massif n'a que des clopinettes, où chaque acteur grappille plutôt que de servir des projets structurants !

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Alain Bertrand.  - Nous voulons jouer dans la même cour que l'Alaska, que l'Ecosse, que l'Atlas ou le Colorado, et pourtant nous sommes invisibles de Londres, Rome et Berlin. Nous devons devenir visibles de Pékin et New Delhi : nous jouons dans la cour des grands ! (Applaudissements)

M. Jean-Claude Requier .  - Ce débat va mettre en lumière des territoires qui disparaissent de la République, alors qu'ils sont centraux. La disparition vient de loin : il a fallu un siècle pour que l'État commence à compenser les déséquilibres liés à l'aménagement ferroviaire du XIXe siècle. Il faut mesurer les dégâts des formules pourtant creuses des géographes et des statisticiens de la Datar, « le désert français » ou « la diagonale du vide », alors que ces territoires sont habités !

Il faut voir comment cet espace est utilisé ! Pour le réseau ferroviaire, on juge plus efficient de relier Toulouse à Paris en contournant le Massif central par l'ouest plutôt qu'en le traversant. Ses reliefs, moins escarpés que ceux des Alpes mais pourtant plus enclavés, n'ont quand même pas fait obstacle à la construction de l'A75, avec ce viaduc de Millau qui illustre le génie technique français.

La marginalisation du Massif central dans l'agenda du développement territorial est d'abord imputable à son morcellement administratif. Le nouveau découpage régional aggrave les difficultés des habitants à rassembler leurs forces pour obtenir les décisions nécessaires à l'accompagnement de son développement.

L'association Pôle industriel Massif central, parmi d'autres, illustre la mobilisation des habitants. Les territoires sont bigarrés, mais ses habitants résistent : leurs doléances visent le développement du territoire. Il repose encore sur l'agriculture, avec 90 000 actifs et leurs familles. La crise agricole suscite les plus vives inquiétudes. Nous en parlerons dans la loi Montagne.

Les infrastructures de réseau sont insuffisantes, y compris dans l'entretien. Les zones grises remplacent les zones blanches, ce n'est pas suffisant au développement : la fracture numérique persiste, avec la désertification médicale !

Face au mal-logement et au mal-être en métropole, le Massif central est un enjeu national. C'est le château d'eau de la France, il attend, en retour, du liquide... sonnant et trébuchant ! (Rires et applaudissements)

M. Olivier Cigolotti .  - Le Massif central a de grands atouts à faire valoir, de qualité de vie et d'innovation. La construction d'une vision partagée doit impulser un nouveau développement conciliant urbain et rural. La population atteint 3,8 millions d'habitants, pour un massif de 85 000 kilomètres carrés, le plus vaste de France, la plus grande prairie d'Europe. L'effet montagne permet une agriculture extensive et de qualité avec 73 000 exploitations. La forêt qui couvre 33 % du territoire pourrait être exploitée moitié plus, selon les experts. Le Massif central concentre un tiers des sources et la moitié des eaux minérales françaises, sans parler du thermalisme.

Quoique diffuse, et pas dans de grandes métropoles, l'industrie y est aussi présente : Michelin, Lapeyre, Sagem. Le tourisme est un autre moyen de développement économique, proche de l'économie sociale et solidaire, avec un important enjeu d'emplois.

Il faut déterminer les projets communs du territoire, qui ne se limite pas à l'Auvergne. Le redécoupage territorial n'aide pas, il faut faire plus simple pour un territoire plus lisible. Face au risque de désertification, il faut renforcer l'attractivité touristique, novatrice, identitaire, et le développement des nouveaux partenariats économiques. Le commerce est moins accessible qu'ailleurs surtout en altitude. Les bourgs centres ont un rôle important à jouer en matière d'aménagement et de développement industriel.

Il y a urgence sur le numérique, l'enjeu est d'équité, de solidarité nationale : les critères de zones blanches définis en 2001 sont obsolètes.

Quatre départements ont signé un partenariat public-privé avec Orange pour la fibre optique, et le renforcement de l'ADSL pour l'accès via le satellite. De la couverture numérique dépend l'avenir de toute la zone.

Le Massif central, montagne habitée, est un espace de qualité, donnons-lui les moyens de son développement associant croissance et développement. (Applaudissements)

M. André Gattolin .  - Merci au groupe RDSE pour son initiative. Notre pays héberge en son centre un vaste espace, 15 % du territoire, cumulant les handicaps en matière d'aménagement : relief difficile, climat rude, absence de métropole polarisante, divisions historiques. La politique d'aménagement du territoire n'a pas permis de combler ces handicaps hérités de la géographie et de l'histoire.

L'éclatement en six puis quatre régions par une réforme de seule rationalisation administrative, occulte les facteurs d'unité de ce territoire, aux identités plurielles, à la confluence des terres de langue d'oc et langue d'oïl. Le commissariat à l'aménagement du Massif central est un palliatif ne remplaçant pas une organisation régionale plus cohérente.

Le Massif central ne profite pas de la métropolisation : Limoges et Clermont-Ferrand n'ont pas le rayonnement suffisant. Le Bourbonnais et Clermont-Ferrand sont orientés vers Paris, le Forez et le Velay vers Lyon, le Limousin vers Bordeaux et la façade atlantique, le Sud-Ouest du massif vers Toulouse.

Le Massif central a besoin de cohérence et de maillage du territoire. Le tout routier doit laisser place au ferroviaire pour une meilleure organisation et le désenclavement, pour des temps de trajet raisonnable sans délaisser les arrêts intermédiaires. Les TER doivent être renouvelés. Les lignes doivent être électrifiées, la traction diesel est une aberration écologique et économique.

Les pouvoirs publics doivent développer des filières universitaires d'excellence, avec des partenariats internationaux, pour mobiliser une population par définition jeune et dynamique.

Corrigeons le déficit de notoriété dont souffre l'artisanat local comme les coutelleries de Thiers. Ces filières peuvent compter sur un enseignement professionnel synonyme d'excellence, bien implanté dans cette région. Soulignons la nécessité d'étendre l'accès du très haut débit, y compris des bourgs centres, pour favoriser le développement des PME.

On oublie parfois, au gré de la vindicte contre les dépenses publiques, qu'en assurant la présence des services publics et la continuité du service public, l'État fait oeuvre d'aménagement du territoire. La réforme de la carte judiciaire a mésestimé l'importance, pour une ville, de la présence d'un tribunal d'instance.

Pourtant les atouts sont là. Des indicateurs sociaux favorables, un taux de chômage plus faible, une nature préservée et un patrimoine touristique et culinaire mondialement reconnu.

Le Massif central mérite vraiment bien son nom, mais est loin de bénéficier d'un intérêt correspondant de nos politiques publiques ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Jacques Lozach .  - La notion de développement territorial, qui s'est substituée à celle de développement local, intègre les acteurs des territoires, ne se limitant pas aux données techniques mais intégrant toutes les innovations, y compris sociales.

Les neuf comités du Massif sont un outil essentiel créé par la loi Montagne de 1985. Je défendais une région transversale, Auvergne-Limousin Poitou-Charentes, pour coller au Massif central. La métropolisation est un phénomène structurel touchant tout le territoire. Clermont-Ferrand, Limoges, Saint-Etienne structurent seulement leur territoire proche, mais ne sont pas reconnus.

Une grande part des territoires du Massif central souffre de leur enclavement. Les axes Nord-Sud constitués par l'A20 d'une part, et l'A75 et l'A71 d'autre part, sont complétés, dans le sens Est-Ouest, par l'autoroute A89, pour l'axe Bordeaux-Lyon-Clermont-Ferrand, mais aussi par la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Lyon-Toulouse, classée parmi les trois lignes structurantes haute performance. Son matériel roulant doit être totalement renouvelé d'ici à 2020.

Le rejet de la déclaration d'intérêt publique par le Conseil d'État de la liaison à grande vitesse Poitiers-Limoges incite à accélérer la modernisation de la ligne Paris-Toulouse.

M. Delebarre a été chargé par un décret du 5 décembre d'une mission temporaire ayant pour objet « l'amélioration de l'accessibilité de Limoges, du Limousin et des territoires limitrophes ». Ce décret de nomination évoque l'accessibilité, ce qui sous-entend une étude comparée de l'ensemble des moyens ferroviaires, routiers et aériens. Je souhaite que cette mission contribue efficacement au désenclavement de toute la partie ouest du Massif Central.

La ligne TGV dite « POCL » (Paris-Orléans-Clermont-Lyon) est encore à l'étude. J'exprime ma très grande préférence pour le tracé Ouest, par rapport à celui dit « médian » ; il englobera Orléans, Vierzon, Châteauroux, Bourges, Moulins...Cette option me semble la plus favorable pour le Massif central. L'avenir de ces deux lignes (POLT et POCL) me paraît indissociable.

La ligne Bordeaux-Lyon, via Limoges-Guéret-Montluçon est la plus importante liaison ferroviaire transversale française desservant le Massif central. Ancienne et nécessitant une impérieuse modernisation, cette liaison a disparu en décembre 2012, entre Limoges et Lyon, à l'occasion des travaux sur la ligne. Son rétablissement serait étudié pour le service annuel 2017 ou 2018. Où en est-on, monsieur le ministre, car aujourd'hui, il n'existe plus de ligne intégrale Lyon-Bordeaux ? Les deux régions (Nouvelle Aquitaine et Auvergne Rhône Alpes) se retrouveront-elles seules à gérer, demain, cette liaison transversale ?

Le plan France Très haut débit devrait couvrir tout le Massif central en 2022. Il en va de l'équité territoriale, évitons une France périphérique, menacée de désenclavement.

Le solde démographique naturel est structurellement défavorable, mais supplanté par le solde migratoire grâce aux effets d'attractivité. L'agriculture du Massif central, certes concentrée sur l'élevage, compte aussi les plaines de la Limagne ou le vin de Cahors. Mais la politique des quotas laitiers peut déséquilibrer l'agriculture. Cette agriculture de qualité connaît des difficultés profondes. La situation des entreprises rassemble quelques grandes entreprises de rayonnement mondial comme Michelin, mais aussi beaucoup de PME, qui forment un écosystème industriel dynamique, dans les villes moyennes comme Rodez, Brive, Thiers, Montluçon.

Une grande entreprise internationale cotée au CAC40 peut avoir son siège hors de Paris, en témoignent Michelin ou Legrand. Mais leur situation est bien différente d'une petite entreprise de trois salariés dans le Forez, par exemple.

Nous avons plus d'entreprises d'économie sociale et solidaire que le reste du territoire. Les villes petites et moyennes structurent le Massif central, où l'équilibre ville-campagne est déterminant.

La ruralité est une chance pour la France. L'État et les services publics doivent en être les garants et donner l'impulsion pour lutter contre le changement climatique, optimiser l'usage des nouvelles technologies. Le service public est indispensable pour réduire les inégalités entre territoires, comme le soulignait France Stratégie.

Grâce à l'engagement coordonné de l'État et des collectivités territoriales, les investissements publics remodèlent en profondeur le cadre de vie de nos concitoyens et suscitent le dynamisme économique dont le Massif central a besoin. Nous devons lui donner toutes ses chances, le rôle du comité de massif reste majeur dans les grands choix lui donnant une identité plus affirmée. Celle-ci s'appuie sur nos aménités environnementales et nos ressources naturelles.

Je tiens à souligner à cet égard l'importance de la filière bois.

Le tourisme est un atout essentiel également, qui va de pair avec cette nature préservée, ce patrimoine bâti de qualité, que nous offrons à nos visiteurs. Le tourisme culturel valorise les manifestations culturelles de renommée internationale, comme celui du festival du court-métrage de Clermont-Ferrand, deuxième festival de cinéma après celui de Cannes, ou le festival de musique de La Chaise-Dieu, qui célèbre son cinquantenaire cette année, le festival international de théâtre de rue d'Aurillac, le plus grand d'Europe dans sa catégorie ou des joyaux comme la cité internationale de la tapisserie d'Aubusson, classée au titre du patrimoine immatériel de l'humanité de l'Unesco en 2009. Espérons que cet acquis sera suivi d'autres classements...

Le droit à la santé doit être exercé comme un service public. Le ministère de la santé multiplie les incitations pour faire face au risque de désertification médicale, au moyen par exemple, des contrats territoriaux d'installation.

Nous n'échapperons pas à des mesures coercitives, si nous voulons être réellement efficaces. Pour les élus de nos campagnes, c'est un enjeu vital pour fixer la population.

La fragilité de nombreux hôpitaux demeurent. La population, souvent âgée, doit bénéficier d'EHPAD rénovés.

Je salue l'action du ministre de l'aménagement du territoire, des ruralités et des collectivités territoriales, marquée par les Assises de la ruralité de 2014, et par les comités interministériels de la ruralité, en particulier ceux de Laon, Vesoul et Privas.

L'avancée de nombreux plans interministériels peut être suivie sur le site internet du Gouvernement. Ainsi, 216 millions d'euros sont consacrés aux EPCI pour les territoires volontaires aux contrats de ruralité. Des référents ruralités auprès des préfets coordonnent auprès des préfets de multiples mesures et dispositifs, dont l'articulation ne va pas toujours de soi, et dont les sigles sont également nombreux, des PETR (Pôles d'équilibre territorial et rural) aux ZRR (Zones de revitalisation rurale), en passant par les volets territoriaux des C.P.E.R, FEDER, FEADER, DETR, DSR, DSV, FNADT, FSIL... (Sourires accablés)

Le Massif central nécessite une politique ambitieuse d'aménagement du territoire.

Les futurs contrats de réciprocité intégrés par le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) aux pactes des métropoles sont judicieux, mais ne concernent qu'une infime partie des territoires ruraux.

L'égalité des chances entre les territoires doit rester un objectif clef de la cohésion nationale. Oui, l'égalité ! Jean-Jacques Rousseau écrivait, dans Du contrat social : « Cette égalité, disent-ils, est une chimère de la spéculation qui ne peut exister dans la pratique. Mais si l'abus est inévitable, s'ensuit-il qu'il ne faille pas au moins le régler ? C'est précisément parce que la force des choses tend toujours à détruire l'égalité, que la force de la législation doit toujours tendre à la maintenir. »

Le Massif central est un massif hercynien, formé il y a 500 millions d'années. La volonté des hommes et des femmes qui l'habitent aujourd'hui est d'en faire un territoire d'avenir, un espace cohérent et ouvert, économiquement dynamique et socialement solidaire, prêt à relever les défis du développement territorial. (Applaudissements)

M. Daniel Chasseing .  - Bravo pour ce débat et merci au groupe RDSE d'en avoir pris l'initiative.

Avec 3,8 millions d'habitants, 22 départements, des métropoles en dehors du Massif, malgré les atouts de celui-ci et la véritable authenticité de vie, ce territoire est défavorisé. Les autoroutes A20, A89 et A75 permettent de le traverser grâce, je le rappelle, à Jacques Chirac.

Le Massif central représente 15 % du territoire français, mais aussi 35 % et 50 %, respectivement, des cheptels bovins et ovins de notre pays. La prairie naturelle y compte pour 70 % de la surface agricole utile et le troupeau allaitant pour 35 % du cheptel national. Les filières viande et lait y pratiquent des prix de vente inférieurs à ceux des autres secteurs français, la collecte du lait est problématique.

Le Massif central risque de souffrir du changement de périmètre de zones défavorisées. La désertification et la déprise agricoles s'étendent : 90 000 actifs agricoles exploitant 3,5 millions d'hectares, combien demain ? Quant à la tendance sociétale à la baisse de la consommation de viande, les agriculteurs locaux et le président du Service Interdépartemental pour l'animation du Massif central (SIDAM) en sont bien conscients.

Valorisons les viandes produites à base d'herbe qui font la spécificité de celles que nous produisons. L'État doit les soutenir davantage.

La filière forêt et bois affronte aussi de nombreux problèmes, de productivité notamment. Nous attendons beaucoup de la nouvelle loi Montagne, mais voulons supprimer les zones de tranquillité pour les espèces animales et végétales sauvages.

Maintenons les aides spécifiques de l'État pour les ZRR et zones franches rurales, ainsi que les aides de la région pour développer PME et artisanat, avec des guichets uniques chers à M. Bertrand.

Aidons les centres bourgs à garder leurs commerces, aidons les nouveaux équipements, le tourisme.

Il y a peu de chômage mais beaucoup de retraites ! Les communes sans PLU ont du mal à obtenir un certificat d'urbanisme. Créons des maisons de service public, et développons des maisons de santé : 25 % de nouveaux praticiens ne s'installent pas. Il faudrait augmenter la durée des stages de formation des médecins en milieu rural, valorisons les centres ambulatoires universitaires, adoptons le numerus clausus et favorisons les groupements hospitaliers de territoire.

Les petites communes souffrent d'un déficit d'investissement et d'aides. Normes agricoles, environnementales et européennes pénalisent les entreprises ou les petits commerces.

La mauvaise couverture de téléphonie mobile en haut débit. Le contrôle de l'Arcep est une farce : un seul point dans la commune suffit pour l'estimer comme couverte, c'est tout à fait insuffisant !

Le numérique est, comme l'électricité, indispensable et doit être accessible partout.

Il est aussi possible de développer l'énergie hydraulique, tout aussi efficace que le nucléaire, mais beaucoup plus propre, à condition que les écologistes ne s'opposent pas systématiquement à tout projet d'investissement...

M. André Gattolin.  - Quelle vision surannée de l'écologie !

M. Daniel Chasseing.  - Le Conseil d'État a annulé l'enquête d'utilité publique sur la ligne Poitiers-Limoges. Des solutions alternatives existent, il y a urgence : le Massif central est en retard. Il fallait 2 h 50 en 1950 pour faire Limoges-Paris, contre 3 h 30 aujourd'hui !

M. Jean-Claude Requier.  - Eh oui !

M. Daniel Chasseing.  - Il faut aussi conserver nos aéroports.

Quelle sera la portée du classement du Massif central en zone vulnérable ? Les élus sont inquiets. La solidarité nationale ne doit pas être un vain mot. Le Gouvernement propose des contrats de ruralité. Mais ils seront financés par des redéploiements avec des crédits de paiement très faibles - 30 millions d'euros et le FNADT est amputé d'autant.

Quelle sera la place des PETR dans ses contrats ? Le Fisal est presque épuisé... L'enveloppe d'un milliard d'euros pour le développement local sera-t-elle renouvelée ?

Les crédits pour les ZRR ont été divisés par trois, tandis que la prime pour l'aménagement du territoire a aussi baissé, de 30 %. Nous espérons un budget en hausse pour le Massif central. Nous attendons des ZRR et des zones franches.

Elles ont été annoncées à Privas. Qu'en sera-t-il à Vesoul ? Quid des crédits pour les zones hypo-denses ? Sans soutien, le Massif central risque de se désertifier. Le Massif central ne doit pas se transformer en réserve d'Indiens ! Il a un vrai rôle à jouer dans le développement du pays. (Applaudissements)

Mme Cécile Cukierman .  - Le Massif central compte quatre mille communes, vingt-deux départements, six régions. Pendant six ans, j'ai siégé au comité de massif, au GIP des régions, pour travailler les projets structurant les déplacements, l'emploi, le numérique, mais aussi la culture, l'éducation. J'y ai découvert les forces des territoires du Massif mais aussi leurs faiblesses.

En 2011, la courbe démographique s'est inversée à la hausse, grâce, en partie, à la politique d'accueil des populations et au maillage du service public. Ce n'est pas un hasard si c'est à Guéret que s'est tenue, le 5 mars 2005, la grande manifestation qui obtint que les services publics ne soient plus supprimés sans consultation des élus locaux. Hélas, la RGPP, puis la MAP ont réduit leur présence mais la population est mobilisée pour les conserver.

La privatisation des télécoms crée des zones blanches. Les TPE-PME sont nombreuses. Il importe de faciliter l'implantation de grandes entreprises ; les pouvoirs publics doivent jouer tout leur rôle pour lutter contre les fermetures de sites décidées pour des raisons spéculatives. La forêt est devenue un outil de défiscalisation.

L'avenir du Massif central suppose un travail en réseau. Il peut s'appuyer sur une grande richesse humaine. Les fractures territoriales restent vives entre territoires dynamiques et en crise. C'est le rôle des politiques publiques de les corriger. Le Massif central s'ouvre et attire, comme le prouvent ses festivals, notamment celui des arts de la rue à Aurillac, mais aussi les initiatives des parcs nationaux, celles des parcs naturels régionaux, comme les bistrots de pays qui allient culture et dynamisme.

Le ferroviaire a reculé mais est indispensable. Heureusement, les communautés se battent pour le maintien des lignes. Le tourisme social est un atout écologique, créateur d'emplois.

Face à l'attractivité continue du bassin parisien et de la façade méditerranéenne, nous devons assurer au Massif central un avenir ! (Applaudissements)

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Au lendemain d'une réforme territoriale importante, la place du Massif central mérite mieux. Je vous prie d'excuser l'absence de M. Baylet, retenu par un colloque sur la coopération décentralisée.

J'ai participé à la mise en oeuvre de la réforme territoriale. J'ai tenu à me rendre dans les territoires ruraux à cette occasion.

Chacun a connu à l'école cette carte de France avec le Massif central en son centre. Cette région est riche en symboles et en histoire, avec, par exemple, l'évocation de Vercingétorix...

Le massif hercynien s'étend sur 15 % du territoire national et accueille 4 millions d'habitants.

Mais il est soumis à de nombreuses contraintes : la première est l'enclavement. Le relief rend difficile la construction de voies rapides. Près d'un chef d'entreprise sur trois partira en retraite prochainement. Toutefois, le chômage à 8 % est inférieur à la moyenne nationale.

Le Massif central abrite une agriculture peu intensive, de qualité, en circuits courts, même si nous devons renforcer la filière. Le patrimoine y est important. Le guide Lonely Planet classe l'Auvergne à la sixième place dans son best of, entre la Nouvelle-Zélande et Hawaï. (Marques d'appréciation sur divers bancs ; M. Alain Bertrand applaudit vivement)

Les enjeux du développement sont connus : l'accessibilité, la couverture numérique, le soutien à l'agriculture, etc. L'État agit notamment à travers le comité des massifs.

Un appel à projet de 3 millions d'euros a été lancé pour revitaliser les centres bourgs. Des actions innovantes ont été lancées pour soutenir la mobilité. La convention interrégionale au Massif central mobilise 106 millions d'euros.

La filière bois n'est pas oubliée, avec 40 millions d'euros de crédits européens.

Les contrats de ruralité ne sont pas financés par des redéploiements mais par des crédits nouveaux : 216 millions d'euros supplémentaires abonderont le Fonds de soutien à l'investissement local, lequel a été créé par le comité interministériel à la ruralité.

La DTER, elle, a augmenté de 62 % en trois ans !

La réforme des ZRR, suite au rapport des députés Calmette et Vigier, votée par le collectif budgétaire de 2015, entrera en vigueur le 1er juillet prochain. Ainsi, 14 000 communes resteront classées, il y aura quelques mouvements : quelques sorties permettront des entrées.

Le Massif central ne sera pas oublié par la loi Montagne, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, que le Sénat examine la semaine prochaine. Les comités de massifs seront renforcés. Cette loi développera le numérique, assurera le logement des saisonniers, garantira la préservation des activités pastorales, la réhabilitation de l'immobilier de loisir. C'est une étape forte dans un nouveau pacte entre l'État et les territoires de montagne.

La réforme territoriale est souvent réduite à tort aux grandes réformes mais les petites intercommunalités n'ont pas été oubliées. L'enjeu était le développement harmonieux des territoires. La nouvelle carte des régions est à adapter aux exigences du territoire. Ne vous inquiétez pas, les services publics resteront, avec des antennes départementales. Ainsi la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) restera à Poitiers, la direction régionale des affaires sanitaires et sociales (DRASS) à Limoges.

Le Massif central est exemplaire de la rationalisation de la carte intercommunale. Les schémas ont été adoptés sans friction, signe d'une bonne concertation entre les élus et l'État.

Comme le souligne le rapport de M. Bertrand, les intercommunalités doivent être suffisamment puissantes pour offrir des services à leurs habitants. L'enjeu est d'éviter qu'à l'émiettement communal succède un émiettement intercommunal.

Saint-Etienne et Clermont-Ferrand seront prochainement reconnues métropoles, dans la loi actuellement en cours d'examen, pour porter le nombre total de métropole à sept.

La filière bois est une ressource pour l'emploi, pour une agriculture de qualité. Le Massif central accueillera douze chantiers démonstrateurs pour des projets innovants. Cela n'est pas synonyme de production à perte : voyez le succès de la marque Montlait, rassemblant 571 exploitants sur 8 départements avec 2 millions de litres vendus sur 177 points de vente.

Quant aux prédateurs, 700 000 euros vont en 2016 à la lutte contre les campagnols et le ministère de l'agriculture suit de près l'évolution du nombre de loups dans l'Aveyron.

Sur le ferroviaire, des négociations sont en cours pour des reprises de ligne comme Paris-Clermont-Ferrand Paris-Limoges-Toulouse. La région Nouvelle-Aquitaine se charge des lignes Bordeaux-Ussel et Bordeaux-Limoges, tandis que des négociations sont menées sur l'Aubrac et le Cévenol dans le cadre des conventions État-région.

Le Préfet de Rhône-Alpes a été nommé coordonnateur pour le TGV Paris-Clermont-Ferrand-Lyon, avec pour mission de recueillir l'accord de toutes les régions.

Quand des entreprises doivent fermer, l'État recherche toujours des solutions ; le ministre de l'industrie Christophe Sirugue est mobilisé sur le dossier Seita à Lyon, mais aussi Riom, où le mobile de l'entreprise, hélas, semble être seulement financier.

Le Gouvernement a organisé trois comités interministériels sur la ruralité. 104 mesures y ont été prises. Nous renforçons l'accès aux services publics avec 1 000 maisons de service public d'ici 2018, dont 100 dans le Massif central. Nous renforçons l'accès aux soins : 830 maisons de santé sont ouvertes, 1 400 le seront en 2018. Nous renforçons l'accès à la téléphonie mobile, répondant à une demande très forte de nos concitoyens.

Le plan France Très haut débit vise à couvrir l'ensemble du territoire d'ici 2022, 20 milliards d'euros y seront consacrés. Les contrats de ruralité sont appelés à devenir le pendant des contrats de ville : 280 sont en cours de rédaction avec les pôles d'équilibre territoriaux et ruraux (PETR). Une centaine seront signés dans les prochaines semaines, ils bénéficieront de 216 millions d'euros de crédits du Fonds de solidarité pour l'investissement local (FSIL) ; 60 contrats concernent le Massif central, la moitié seront signés très prochainement.

Le Massif central a de nombreux atouts à faire valoir, le Gouvernement est pleinement mobilisé : il n'oublie pas le Massif central, il reconnaît le courage et l'intelligence des hommes et des femmes qui y vivent ! (Applaudissements)

La séance est suspendue à 12 h 40.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 15 heures.

Dépôt d'un rapport

Mme la présidente.  - M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la mise en oeuvre du mécanisme de résolution unique et de la directive relative au système de garantie des dépôts. Il a été transmis à la commission des finances.

Débat sur l'avenir de La Poste

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle le débat sur : « la situation et l'avenir de La Poste » (demande du groupe communiste républicain et citoyen).

M. Jean-Pierre Bosino, au nom du groupe communiste républicain et citoyen .  - Je regrette de voir les rangs de la droite si clairsemés...

M. Jean Desessard.  - Si c'était un bureau de poste, il serait déjà fermé ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Ou transféré dans une supérette !

M. Jean-Pierre Bosino.  - La dégradation du service postal touche désormais tout le territoire. Partout, les personnels, les élus, les usagers luttent. La direction prétend qu'il faut restructurer, pallier la baisse du courrier qui, selon Philippe Wahl, aura disparu d'ici quinze ans. Il y a dix ans déjà, on annonçait le passage au tout numérique... Nous ne nions pas la baisse du courrier, mais on est loin de la couverture numérique parfaite !

La couverture des zones blanches tarde à venir. Sans opérateur public, pas d'égal accès au réseau, pas de solidarité. La Poste organise les funérailles du service public, avec l'assentiment de l'État.

Tout est fait pour que les usagers ne viennent plus au bureau de poste : remplacement des agents par les machines, réduction de l'amplitude horaire, fermetures sauvages pendant l'été - même suppression des sièges ! Les gouvernements laissent faire.

Heureusement, les députés ont supprimé la dématérialisation de la propagande électorale prévue à l'article 52 du projet de loi de finances, qui aurait signifié une perte de 70 millions d'euros pour La Poste et un nouveau recul de la démocratie.

Conséquence des restructurations, les retards de courrier s'accumulent. C'est le cas dans ma ville de Montataire : rien en août, puis tout d'un coup, les premiers jours de septembre, avec jusqu'à 28 jours de retard ! Parfois, le courrier arrive au bon numéro, à la bonne rue... mais pas dans la bonne commune... Un cabinet d'huissier a même déposé plainte, car cela impactait son activité.

Le groupe propose de confier aux postiers toutes sortes de nouveaux services : faire passer le permis de conduire, livrer des pizzas, prendre soin des personnes âgées... Le PDG de La Poste se targue d'en faire la première entreprise de proximité humaine, oubliant que sa mission première est de distribuer correctement le courrier.

Un bureau de poste, dans la novlangue postale, est un « point de contact », mais le maillage territorial est remis en cause. L'aménagement du territoire est une des missions de service public confiées à La Poste depuis 2009. Or 46 % de ces « points de contact » sont des lieux autres que des bureaux de poste, généralement payés par les communes.

Comme ce fut le cas chez France Telecom, les restructurations permanentes ont des conséquences dramatiques sur les agents. Au moment où nous débattons, ils sont rassemblés devant le Sénat et trois syndicats ont appelé à la grève ce jour pour dénoncer les conditions de travail dégradées et les pressions sur les salariés.

Pas moins de huit cabinets d'expertise ont prévenu le PDG de La Poste et le Gouvernement de l'ampleur de la crise sociale et des effets délétères des réorganisations et des réductions d'effectifs. De 20 à 40 % des tournées sont intenables, les accidents se multiplient. Dans le Nord, une jeune femme victime d'un AVC sur son lieu de travail s'est vu intimer l'ordre de finir son travail avant qu'on n'appelle les secours... Sans parler des suicides de salariés.

À l'État de prendre ses responsabilités et de mettre fin à cette course à la rentabilité financière qui dégrade à la fois le service rendu aux usagers et les conditions de travail. Pensons La Poste de demain avec le personnel, les élus et les usagers, dans une vraie démarche participative. En 2009, deux millions de citoyens s'étaient prononcés dans une votation contre la loi Estrosi ; à l'époque, les socialistes étaient à nos côtés.

Il faut au préalable renégocier la directive européenne sur les services publics. François Hollande s'était engagé à faire adopter une directive sur la protection des services publics. Qu'en est-il ?

Payer pour un point de contact ou voir La Poste quitter la commune... On enferme les maires dans un choix qui n'en est pas un. Nous regrettons que l'Association des maires de France ait signé le nouveau contrat de présence postale ; seuls les maires communistes ont voté contre, fidèles à leurs principes. Partout, des élus manifestent.

La Poste parle clients, rentabilité financière. Parlons plutôt rentabilité sociale. Assez de discours, passons aux actes. Longtemps notre fierté, La Poste doit être placée sous protection citoyenne : nous appelons nos concitoyens à refuser toute nouvelle fermeture et suppression d'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard applaudit également, ainsi que Mme Delphine Bataille)

M. Joël Guerriau .  - La Poste, société anonyme depuis 2010, doit s'adapter au changement des modes de vie pour développer un service public de qualité. Pour préserver son rôle dans l'aménagement du territoire, elle doit d'abord faire évoluer ses missions en milieu rural, où les besoins de présence postale sont accrus. Le troisième contrat de présence territoriale postale s'achève ; le prochain devra garantir la mission d'aménagement du territoire de La Poste. Avec ses 17 000 points de contact, la Poste est l'un des derniers services publics sur l'ensemble du territoire. Le lien poste-mairie est essentiel. Les mutualisations de locaux et de services se multiplient, ainsi que les maisons de services au public, depuis 2010.

Le développement des ventes sur internet favorise l'activité d'acheminement des colis. L'allongement de la durée de vie, l'éclatement des familles, la tendance à l'individualisme conduisent à de nouvelles formes d'isolement et La Poste a un rôle crucial à jouer contre cela.

M. Jean Desessard.  - Absolument.

M. Joël Guerriau.  - Dans les petites communes qui perdent leurs commerces de proximité, les facteurs, qui ont un capital confiance, peuvent remplir de nouvelles missions auprès des plus fragiles par la présence humaine qu'ils apportent.

Depuis son virage numérique de 2015, La Poste offre désormais un large bouquet de services numériques. Les nouveaux services doivent s'adapter aux nouveaux usages ; ils doivent apporter une plus-value. Le facteur apporte informations et conseils. La concurrence l'a compris. La Poste peut aussi proposer des panels de services aux collectivités locales, en s'adaptant aux contextes locaux.

En Loire-Atlantique, nous avons réfléchi avec les responsables de La Poste au portage de proximité - de livres, par exemple, ou de médicaments - à la vigie, à la collecte et au recyclage d'objets, à la collecte d'informations.

Pour faire accepter ces évolutions, il faut accompagner le personnel de manière fine, éviter les changements brutaux, développer la formation professionnelle.

Les élus sont particulièrement vigilants sur les horaires d'ouverture, notamment en zone rurale. Nous sommes attachés au rôle de La Poste en matière de relations humaines. Ces évolutions sont le prix à payer pour maintenir un service de proximité, mais quel plus beau défi ?

Ce que l'avenir vous promet, La Poste s'engage à vous l'apporter, dit le slogan !

M. Jean Desessard .  - Merci à mes collègues du groupe CRC d'avoir voulu ce débat. La droite, absente, ne s'intéresse sans doute pas à La Poste...

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est un euphémisme !

M. Jean Desessard.  - Pourtant ce sujet concerne tous les territoires, de Paris au Maine-et-Loire. Le mouvement auquel nous assistons nous inquiète, pour l'avenir du service public et pour celui des agents. Les écologistes souscrivent au principe de mutabilité et d'adaptation du service postal face aux évolutions des technologies et des besoins. La baisse du courrier papier, la hausse des ventes sur internet sont indéniables.

Nous comprenons la logique des maisons de services au public. Mais nous sommes sceptiques quant à l'installation de points relais dans des commerces. Quid de la confidentialité du courrier ? De la confusion entre consommation et service public ? Dans le cadre du service « Veiller sur mes parents », les facteurs se rendent auprès des personnes âgées ; c'est bien, mais encore faut-il être libre des impératifs de rentabilité pour être véritablement au service des gens. La tendance impulsée par le conseil d'administration de La Poste est à la fermeture des bureaux non rentables - alors que La Poste bénéficie d'abattements fiscaux pour assurer sa présence sur tout le territoire... (Approbation sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

L'État, actionnaire majoritaire, doit être garant de la notion de service public.

Mme Éliane Assassi.  - Très bien.

M. Jean Desessard.  - L'évolution ne doit pas se faire dans le sens du démantèlement.

Les fermetures ont des conséquences pour les agents, avec le non-remplacement de 20 000 départs alors même que La Poste a reçu 900 millions de CICE...

Mme Éliane Assassi.  - Et voilà !

M. Jean Desessard.  - Neuf facteurs se sont suicidés ces dernières années, cinq ont tenté de le faire sur leur lieu de travail. Le taux d'absentéisme est élevé. Pour le CHS, le climat social est délétère, la situation est alarmante.

La santé et le bien-être des agents ne sauraient être des variables d'ajustement.

Le service public était au coeur du programme du Conseil national de la résistance (CNR). Dans un contexte de crise structurelle qui creuse les inégalités, de société fracturée, les services publics sont le patrimoine de ceux qui n'en ont pas ! C'est notre devoir de les préserver. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Depuis que la droite a ouvert la brèche en transformant La Poste en société anonyme, la situation a empiré. Quelle sera la prochaine étape ? La privatisation ?

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Jean Desessard.  - La situation de La Poste nous appelle à demander des états généraux du service postal pour définir, avec toutes les parties prenantes, les contours du service public de demain. (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Delphine Bataille .  - Merci au groupe CRC d'avoir initié ce débat sur une des entreprises préférées des Français. La Poste, ce sont 250 000 employés, c'est le premier réseau commercial de proximité avec 17 000 points de contact, qui en font le réseau postal le plus dense d'Europe. C'est aussi un facteur de cohésion et de lien social, et un acteur du développement territorial.

Depuis une dizaine d'années, La Poste est confrontée à la concurrence, au développement numérique, à une baisse du volume de courrier distribué. Le groupe a revu à la baisse son maillage territorial : il ne reste que 9 000 bureaux de poste. Beaucoup ont été fermés en zone rurale, remplacés par de simples relais ou entièrement automatisés, les amplitudes horaires réduites.

« Bougez avec La Poste », disait le slogan. Cela bouge tellement que les services se réduisent comme peau de chagrin à force de restructurations.

Le traitement du Hainaut-Cambrésis est symptomatique. Les fermetures de bureau, la réduction des amplitudes horaires, prises sans concertation, pénalisent les plus fragiles, qui ont besoin de l'aide du guichetier. Dans la commune où a grandi Pierre Mauroy, le bureau de poste a été vendu pour être remplacé par une agence postale communale... Les élus locaux veulent des garanties sur la pérennité de l'engagement et de l'accompagnement financier. Dans une commune voisine, le maire a exercé son droit de préemption pour racheter le bureau de poste, mais l'ouverture sera limitée au strict minimum.

En zone rurale, il est vital de renforcer le lien social. Le facteur rendait de nombreux services. Or tout est aujourd'hui payant, même le portage de médicaments. Dans des territoires déjà fragilisés, le sentiment d'abandon est terrible. Cela alimente le vote antirépublicain. On supprime des bureaux de poste comme les liaisons ferroviaires en arguant de la baisse de fréquentation... Mais les horaires sont déjà réduits au minimum, pour décourager les usagers ! (On acquiesce sur les bancs sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Réduire le service public postal, c'est faire progresser le désert.

Le contrat de présence postale 2014-2016 prévoyait des mutualisations, en concertation avec les maires. Lors du premier comité interministériel aux ruralités, le Gouvernement avait décidé d'accélérer le déploiement annoncé de mille maisons de service public. Un fonds inter-opérateurs a été ouvert ; l'objectif sera-t-il atteint en fin d'année ? Monsieur le ministre, pouvez-vous rassurer les élus, qui s'inquiètent du nouveau contrat de présence postale ?

La Poste a supprimé 7 000 emplois en 2015, près de 50 000 depuis 2008. Les conditions de travail se dégradent, plusieurs cabinets d'experts ont sonné l'alarme. Dans le Nord, une jeune femme victime d'un AVC a porté plainte, accusant les responsables de son centre de distribution de non-assistance à personne en danger. Les syndicats appellent à une grève. Le Gouvernement va-t-il demander à ce que les méthodes de management de la direction soient revues ?

Les résultats du groupe s'améliorent, mais la Cour des comptes pousse à accélérer les réformes, à revoir le service postal universel, estimant que certains facteurs sont sous-occupés. Son analyse pose problème, car elle risque d'aggraver la situation des plus fragiles dans les territoires ruraux. Comment comptez-vous préserver ce service public essentiel ? À quand l'étude d'impact sur le développement du numérique et ses effets sur le volume de courrier distribué ? La Poste va-t-elle enfin prendre en compte les revendications des agents dits reclassés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et républicain et communiste républicain et citoyen)

M. Stéphane Ravier .  - « Nous avons confié notre petit trésor aux seuls gens qui n'égarent jamais rien. Aux employés de cette administration que le monde entier nous envie, j'ai nommé les PTT ». Voilà ce que disait le « Dabe » interprété par Jean Gabin dans Le Cave se rebiffe. Oui, le monde nous enviait La Poste, avant la casse organisée par les technocrates de Bruxelles. La Poste est l'exemple parfait de la destruction organisée du service public par l'Union européenne au nom du dogme de la concurrence.

La privatisation et l'ouverture à la concurrence ont dégradé le service. Hausse des tarifs, fermeture de bureaux ont accru les inégalités d'accès au service public. Lorsque la rentabilité prend le pas sur le service, lorsque l'usager devient un client, la France des oubliés trinque.

Trinquent également les agents de La Poste qui ont du mal à remplir des objectifs chiffrés, alors qu'ils s'étaient engagés pour une politique du service ; ce qui est vrai pour les postiers l'est aussi pour les policiers

Cette privatisation larvée, qui a commencé sous Michel Rocard par la scission des PTT entre La Poste et France Télécom, a-t-elle améliorée le service aux usagers ? Non. Les agents sont-ils plus épanouis ? À l'évidence, non. Qui a gagné ? Quelques financiers peut-être, les idéologues de la concurrence sûrement. Seul le patriotisme économique garantira l'égalité et la continuité territoriales en permettant au service public d'assurer sa mission. Et voilà qu'un ancien Premier ministre devenu candidat à la présidence de la République annonce 500 000 suppressions de postes dans la fonction publique...

Il est temps de restaurer un service public hérité de siècles d'histoire, pour qu'il remplisse sa mission au bénéfice de tous les Français.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Le contrat de présence postale 2017-2019 vient d'être signé par le bureau de l'AMF ; les élus communistes ont voté contre. Dans les Hauts-de-Seine, il se traduit par la fermeture de dix bureaux de poste et des partenariats avec des supermarchés. À Bagneux, un bureau pourtant situé dans un quartier politique de la ville va fermer... On passe à un réseau dominé par les partenariats. Certes, le nombre de points de contact demeure inchangé, mais sous ce nom cohabitent huit types de lieux différents, comme maison de services au public, facteur-guichetier, agence communale ou encore espace de co-working nomade !

Le transfert de charges a un coût. Ainsi de la suppression des postes restantes, transférées aux mairies ou CCAS, sans parler des annonces de location d'une boîte aux lettres pour 200 euros par mois ! Confidentialité et confiance vont de pair. Les facteurs sont assermentés, responsables financièrement des plis et colis. Dans une supérette, plus de tiers de confiance.

Les réactions aux annonces de fermetures témoignent de l'attachement des élus et des usagers ; les pétitions se multiplient. À Tours, les comités de quartier ont réagi à la suppression annoncée de plusieurs bureaux. On ne peut appliquer aveuglément un critère purement comptable, un bureau pour 20 000 habitants, quand il s'agit d'un service public de proximité.

Que dire des relations avec les élus ? La réponse que j'ai reçue du directeur départemental de La Poste témoigne d'un mépris certain. Le contrat de présence postale 2017-2019 remplace l'accord préalable du conseil municipal à toute fermeture par un simple avis du maire, faisant ainsi sauter un verrou démocratique. C'est grave.

L'AMF a obtenu que le fonds de péréquation soit abondé de 4 millions - mais 35 % de ce fonds, soit 50 millions d'euros, sert à fermer des bureaux et alimente la grande distribution qui accueille les points de contact !

Envoyer seul depuis chez soi un colis d'1 kilo coûtera 13,50 euros, contre 7,50 euros au bureau de poste. La rentabilité de l'activité courrier va s'en trouver améliorée ! C'est d'ailleurs la branche service-courriers-colis qui offre la meilleure « performance opérationnelle ».

Alors que La Poste a perçu 900 millions de CICE en trois ans, elle a supprimé 21 000 emplois, multiplié les CDD et augmenté la sous-traitance... Cadences infernales, burn out, suicides, les conditions de travail sont effroyables.

Que deviendra l'accès universel au service postal universel quand il sera tributaire de contrats signés avec les collectivités ? Mise sous surveillance citoyenne, états généraux de La Poste, nous disons : banco ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen ; M. Jean Desessard et Mme Delphine Bataille applaudissent également)

M. Jacques Mézard .  - Ce débat met en lumière des revendications qui remontent des syndicats et du terrain. La situation de La Poste suscite l'inquiétude de nos citoyens, notamment dans les territoires ruraux. Dans mon département, de plus en plus mal desservi par le train, par la route, par son seul avion, on se demande qui nous distribuera le courrier...

Certes, il faut savoir entendre les évolutions technologiques et sociologiques, et le rôle de La Poste aujourd'hui ne peut pas être ce qu'il était il y a dix ans, ni ce qu'il sera dans dix ans. Il convient d'accompagner ces évolutions, de les anticiper, pour vivre ces mutations sans crainte du lendemain.

Il y a de moins en moins de courrier. À juste titre, le PDG de La Poste recherche des solutions positives, pour lui conserver une mission de service public.

En 2009, notre groupe s'était majoritairement opposé à la transformation de La Poste en société anonyme et avait insisté pour qu'elle continue à assumer les missions de service public que lui confie la loi du 2 juillet 1990.

Il ne s'agit pas de refuser les mutations. Mais comment faire ? L'inquiétude des agents est forte : il faut leur donner de l'espoir, les sortir de situations d'emploi précaire.

La Poste a un atout : sa présence. La Banque postale aussi, qu'il convient de développer pour conforter les autres volets et services de La Poste - d'autant plus que le Crédit agricole, lui, se retire.

Souvent, pour les personnes âgées qui vivent dans nos communes rurales, le lien avec l'extérieur, c'est le facteur. Réfléchissons aux moyens de maintenir ce lien social tout en faisant évoluer les activités de La Poste.

L'ossature de notre pays ne saurait être compromise par le règne de l'immédiateté. La décentralisation sans l'aménagement du territoire, je n'en veux pas. Il faut la concilier avec le maintien sur tout le territoire du service public garanti par l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen)

M. Philippe Kaltenbach .  - Sur tous les bancs, nous sommes inquiets, sauf peut-être sur ceux, vides, du groupe Les Républicains, dont le candidat veut supprimer 500 000 emplois de fonctionnaires.

M. Jean Desessard.  - La Poste est une société anonyme...

M. Philippe Kaltenbach.  - Il y reste beaucoup de fonctionnaires. Les agents expriment une véritable souffrance au travail. Je n'ai pas envie de revivre les suicides en cascade que nous avons connus à France Télécom. Nous sommes collectivement responsables, et je compte sur le Gouvernement pour favoriser le dialogue social, car on ne fait pas évoluer une entreprise contre ses salariés.

Même en zone urbaine dense, La Poste se désengage. Elle veut supprimer douze bureaux dans les Hauts-de-Seine, y compris dans les quartiers où l'habitat social est important. C'est se tirer une balle dans le pied. Les banlieusards ont droit à des services publics de qualité ! Ailleurs, les horaires sont réduits... La qualité du service s'en ressent fortement. Nous connaissons l'engagement du Gouvernement, et avons besoin d'une voix forte et d'une réponse précise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie .  - Merci au groupe CRC d'avoir pris l'initiative de ce débat. Nous ne pouvons ignorer les alertes lancées par le personnel de La Poste, les usagers, les élus locaux. En même temps, il faut tenir un discours de vérité. Nous sommes très attachés aux quatre missions du service public de La Poste, mais vous l'avez dit, nous sommes confrontés à des évolutions. C'est ce que j'ai dit le 30 novembre au Comité de suivi de haut niveau du contrat de présence.

Deux questions se posent : la couverture territoriale et la situation du personnel. La Poste est confrontée plus que d'autres à des chocs technologiques, de comportement, de consommation, avec la baisse considérable du volume de courrier, 6 % par an et cela s'accélère, ce qui représente 600 millions d'euros de ressources en moins. Les 250 000 postiers le savent.

M. Thierry Foucaud.  - Nous aussi !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Attention à ne pas véhiculer une image si dégradée de La Poste qu'elle ne corresponde pas à la réalité. (Protestations sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Élu local, je sais que la diminution des horaires n'explique pas la baisse du courrier. Regardez autour de vous, combien de gens ne vont plus guère au bureau de poste parce que le service est rendu par d'autres voies !

Mme Éliane Assassi.   - On nous sert les mêmes arguments à propos de la SNCF !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - La formation des postiers est indispensable : elle a concerné 80 % d'entre eux cette année. Bien sûr, des tournées se sont alourdies. Bien sûr, il y a des problèmes. Mais qu'il s'agisse d'un service public ne signifie pas que rien ne doive évoluer !

Mme Éliane Assassi.  - Personne n'a dit cela !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - C'est ce que j'ai entendu...

M. Thierry Foucaud.  - Pas de nous !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - L'État accompagne cette mutation. La Poste consacre 300 millions d'euros par an à la formation, autant que le CICE qu'elle perçoit.

Quant au dialogue social, cinq accords nationaux ont été conclus depuis le début de l'année, onze l'an passé. L'État veille à ce que les problèmes locaux soient pris en compte.

L'AMF a elle-même adopté ce matin le contrat de présence postale.

M. Jean-Pierre Bosino.  - C'est bien regrettable !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Sur les horaires d'été, La Poste a donné des réponses. La participation financière de l'État au fonds postal de péréquation passe de 510 à 520 millions d'euros.

Le précédent contrat était tourné principalement vers les zones rurales, c'est un fait, mais ce n'est pas le cas du nouveau, les quartiers de la politique de la ville y sont intégrés.

Il faut donc tenir compte des messages adressés, et faire des propositions pour maintenir les missions de service public de La Poste.

M. Jean-Pierre Bosino.  - Nous en faisons.

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État. - L'inclusion bancaire d'abord : la Banque postale est essentielle pour les plus défavorisés. L'acheminement de la presse est aussi une mission de service public. Comment tirer parti de l'atout de proximité de La Poste pour développer d'autres services ? Les services aux particuliers proposés vont dans le bon sens. (Mouvements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Le suivi assuré par l'État comprend des objectifs qualitatifs. Un critère n'est pas rempli, la vitesse d'acheminement du courrier à j+2, sur lequel il faut encore progresser.

Pour répondre à la problématique à laquelle La Poste et ses agents sont confrontés, il faut d'abord un contrat avec l'État et les communes. Nous avons apporté des réponses, notamment financières. Nous soutenons aussi l'idée que les métiers doivent évoluer.

M. Thierry Foucaud.  - Cinq fois que vous le dites !

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État.  - Parce que c'est cela la réponse ! Une concertation est en cours avec les agents, qui doit bientôt aboutir à des propositions concrètes.

Voilà la voie pour préserver le service public auquel nous sommes attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Thierry Foucaud.  - Baratin !

M. Alain Gournac.  - C'était bien mauvais...

Modification à l'ordre du jour

Mme la présidente.  - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a confirmé l'ordre du jour établi à la suite des conclusions de la Conférence des présidents du 16 novembre 2016.

En outre, il a demandé l'inscription à l'ordre du jour du mardi 13 décembre, à 15 heures, de la lecture d'une déclaration de politique générale ; à celui du mercredi 14 décembre, à 16 h 15, d'une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution ; à celui du jeudi 15 décembre, à 16 h 15, sous réserve de son dépôt et de sa transmission, du projet de loi prorogeant l'application de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence.

Pour la semaine du 19 décembre, il a demandé l'inscription à l'ordre du jour du lundi 19 décembre, après la nouvelle lecture du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté, de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2017, ou de sa nouvelle lecture, initialement prévue le mardi 20 décembre ; à celui du mardi 20 décembre d'une séance de questions orales ; l'inscription à l'ordre du jour du mardi 20 décembre après-midi de la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris Charles de Gaulle.

Acte est donné de ces demandes.

L'hommage à notre regretté collègue Paul Vergès prévu mardi 13 décembre est avancé à 14 h 15.

La commission des finances se réunira mardi 13 décembre pour examiner le rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2016. Le délai limite de dépôt des amendements sur ce texte pourrait être fixé au mercredi 14 décembre à midi.

Enfin, le président du Sénat prononcera l'éloge funèbre de notre regretté collègue Louis Pinton le mardi 20 décembre à 14 h 30.

En conséquence, l'ordre du jour des semaines gouvernementales des 12 et 19 décembre s'établit comme suit :

Lundi 12 décembre

À 15 heures et le soir

- Projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

Mardi 13 décembre

À 14 h 15

- Éloge funèbre de Paul Vergès

À 15 heures

- Lecture d'une déclaration de politique générale du Gouvernement

- Suite du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

À 18 heures

- Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 15 et 16 décembre

Le soir

- Suite du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

Mercredi 14 décembre

À 14 h 30

- Suite du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

À 16 h 15

- Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution

- Suite du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

Le soir

- Suite du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne

Jeudi 15 décembre

À 11 h 30

- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances rectificative pour 2016

À 15 heures

- Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 h 15 et le soir

- Sous réserve de son dépôt et de sa transmission, projet de loi prorogeant l'application de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence

- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2016

Vendredi 16 décembre

À 9 h 30, à 14 h 30, le soir et, éventuellement, la nuit

- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2016

Éventuellement, samedi 17 décembre

Le matin, l'après-midi et le soir

- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2016

Lundi 19 décembre

À 16 heures et le soir

- Nouvelle lecture du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2017 ou nouvelle lecture

Mardi 20 décembre

À 9 h 30

- Questions orales

À 14 h 30

- Éloge funèbre de Louis PINTON

À 15 heures

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris Charles de Gaulle

À 16 h 45

- Questions d'actualité au Gouvernement

À 17 h 45 et le soir

- Proposition de loi relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires

Mercredi 21 décembre

À 14 h 30 et le soir

- Six conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié

- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2016 ou nouvelle lecture

- Projet de loi ratifiant les ordonnances du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation et du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d'habitation

L'ordre du jour est ainsi réglé.

Prochaine séance, lundi 12 décembre 2016, à 15 heures.

La séance est levée à 16 h 30.

Jacques Fradkine

Direction des comptes rendus

Ordre du jour du lundi 12 décembre 2016

Séance publique

À 15 heures et le soir

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne (n°47 rect., 2016-2017).

Rapport de M. Cyril Pellevat, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (n°191, 2016-2017).

Texte de la commission (n° 192, 2016-2017).

Avis de M. Jean-Pierre Vial, fait au nom de la commission des lois (n°182, 2016-2017).

Avis de Mme Patricia Morhet-Richaud, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 185, 2016-2017).

Avis de M. Gérard Bailly, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 186, 2016-2017).