Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Au nom du Bureau, et en mon nom, j'appelle chacun de nos collègues, dans des échanges qui doivent être directs et sincères, à conserver une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres. (Applaudissements)

Je vous informe que la mission d'information qui s'intéresse à l'accueil des réfugiés se trouve aujourd'hui, à titre exceptionnel, en déplacement au hotspot de l'île de Lesbos.

Réunion des pays fondateurs de l'Union européenne

M. François Fortassin .  - Nous aimerions connaître la teneur des discussions qui se sont tenues à Rome ce mardi entre les ministres des affaires étrangères des six pays fondateurs de l'Union européenne. Ils se disent préoccupés par l'état du projet européen et ont lancé une réflexion commune sur les moyens de renforcer l'Union, qui est à leurs yeux la meilleure réponse aux défis que doit relever le continent ; ils sont résolus de continuer le processus de création d'une union toujours plus étroite entre les peuples. En même temps, ils ont reconnus que les chemins de l'intégration étaient divers.

Les sénateurs du groupe RDSE, attachés à l'idée européenne, estiment que le moment est venu de débattre du fonctionnement de l'Union européenne. Agissons pour plus d'Europe, et mieux d'Europe, car le repli national n'offrirait rien de bon. À la veille du soixantième anniversaire du traité de Rome, comment la France peut-elle oeuvrer à la relance du processus d'intégration ? Les pistes d'une Union à géométrie variable ont-elles été évoquées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Alors que nous connaissons une accumulation de crises sans précédent, nous ne pouvons laisser l'Europe se déconstruire : voilà ce qu'ont affirmé à Rome les ministres des affaires étrangères des six pays fondateurs.

Parce que nous avons été, ensemble, à l'origine de l'Union européenne, nous avons une responsabilité particulière. Je pense comme vous qu'il n'y a pas de solution nationale. Les crises révèlent que l'Union demeure inachevée : une union monétaire sans réelle union économique, un marché intérieur sans harmonisation fiscale et sociale, un espace de libre circulation sans contrôle suffisant des frontières extérieures, une politique étrangère et de défense commune qui doit se renforcer alors que le continent est cerné par les crises.

L'Europe doit être renforcée en son coeur, la zone euro, ce qui n'exclut pas une ambition pour l'Europe à 28. C'est la responsabilité des pays fondateurs et de tous ceux qui veulent aller de l'avant, quel que soit le résultat du référendum britannique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. François Fortassin.  - Je souhaite à Laurent Fabius plein succès dans ses nouvelles fonctions. Il a démontré sa stature d'homme d'État, et que la France pouvait être respectée dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

Politique française en Syrie

Mme Leila Aïchi .  - A l'heure où nous parlons, un million de syriens subissent un état de siège à Alep, victimes des bombardements, de la pénurie et de la guerre. C'est la preuve éclatante et douloureuse de l'impuissance de la communauté internationale. Nous avons perdu trop de temps. M. Fabius a évoqué la complicité de la Russie et de l'Iran. Mais quid de Daech ? Des pays du Golfe ? De Jabhat Al-Nosra ? D'Israël ?

Le résultat est que le régime syrien est en position de force. Cette stratégie n'a-t-elle pas réduit à néant la perspective d'une solution politique, alors que les États-Unis se désengagent et que circule la rumeur d'un accord tacite et secret entre eux et la Russie ?

La France semble dépassée, décalée, hors-jeu Son aveuglement, son obsession anti-Assad, monsieur le ministre, a fait perdre des mois et décrédibilisé notre politique. Résultat : un pays détruit, une région embrasée, une Europe déstabilisée. Tout ça pour ça... Nous sommes revenus au point de départ. Votre politique étrangère en Syrie, monsieur le ministre, n'est-elle pas un échec ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains)

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Fabius, actuellement à Munich pour une réunion sur la Syrie. L'offensive du régime soutenue par la Russie a miné le processus de Genève. Alep est sous la menace d'un siège atroce, situation sur laquelle nous avons alerté la communauté internationale. Plus de 51 000 civils ont été déplacés, 300 000 sont assiégés, des dizaines ont été tués depuis le début de l'offensive.

On ne peut à la fois discuter à Genève et assiéger Alep. Le double langage de Damas et de Moscou est patent. Le régime viole toutes ses obligations, y compris la résolution 2254 qu'a signée la Russie. L'arrêt des bombardements et le libre accès à l'aide humanitaire est un préalable à toute négociation. La lutte contre Daech ne doit pas servir de prétexte au massacre de la population. C'est Daech l'ennemi et non la population civile. Telle est la position de la France qui maintient son soutien à l'opposition syrienne, sans laquelle il n'y a pas de solution possible au conflit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Mme Leila Aïchi.  - Votre réponse est à l'image de la politique française dans la région... (Marques d'approbation à droite ; protestations sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Prime d'activité

M. Éric Bocquet .  - Depuis le 1er janvier, la prime d'activité s'est substituée à la prime pour l'emploi et au RSA. L'idée est de soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs modestes ; elle révèle en creux le faible niveau des salaires dans notre pays, pourtant l'un des plus riches du monde, où les inégalités ne cessent de progresser. Selon une étude de l'Observatoire des inégalités de décembre 2015, le nombre de personnes vivant avec moins de 60 % du revenu médian, soit 1 772 euros mensuels, atteint 8,5 millions ; 10 % des Français détiennent 50 % de la richesse. On dit que les 62 personnes les plus riches du monde possèdent autant que le reste de l'humanité...

La prime d'activité semble davantage sollicitée que le RSA activité. Or la Cour des comptes en pointe le sous-financement. La réalité de la précarité vous rattrape... Que comptez-vous faire ? N'est-il pas urgent de s'attaquer résolument à la pauvreté et aux inégalités, et de donner aux salariés les moyens d'une vie décente ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen)

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Je vous prie d'excuser Mme Touraine, qui assiste à la grande conférence de santé. Merci de souligner le succès de la prime d'activité, qui concerne déjà deux millions de personnes un mois seulement après son entrée en vigueur. Le taux de recours élevé prouve son accessibilité. La lutte contre le non-recours est une priorité du plan contre l'exclusion. Des progrès restent à faire, et si le taux de recours devait dépasser nos prévisions, tant mieux ! Nous ne modifierons pas la règle du jeu en cours d'année ; si l'enveloppe de 4 milliards, fondée sur un taux de recours de 66 %, s'avérait insuffisante, nous l'augmenterons. À 75 %, le dépassement ne serait que de 300 millions. Le risque, nous l'assumerons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Éric Bocquet.  - Ce « succès », comme vous dites, est avant tout le témoignage de l'échec cinglant des politiques d'austérité menées par les uns comme par les autres. Puisque vous allez changer de casting, changez aussi de scénario ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste républicain et citoyen, au centre et à droite)

Conditionnalité du RSA dans le Haut-Rhin

Mme Patricia Schillinger .  - Le transfert de la gestion du RSA aux départements représente pour eux une charge de plus en plus importante. Les initiatives se multiplient pour en durcir les conditions d'accès, au mépris de la solidarité nationale.

Dans le Haut-Rhin, son bénéfice serait désormais conditionné à la réalisation de 7 heures de bénévolat par semaine (Bravos et applaudissements à droite) Cette décision révèle une profonde méconnaissance tant de la situation et des besoins des allocataires que du fonctionnement des associations. Sous prétexte de favoriser l'insertion, certains départements engagent ainsi un bras de fer dangereux avec l'État pour renationaliser le RSA : ce comportement est déloyal et irresponsable (mouvements divers à droite), qui de plus stigmatise les allocataires du RSA, opposent les Français les uns aux autres et met à mal le principe d'égalité.

Madame la ministre, comment entendez-vous réagir ? Comment garantir l'effectivité, sur tout le territoire, du droit de tous à disposer de ressources suffisantes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Que dit la loi ? Que le bénéficiaire du RSA conclut avec le département un contrat librement débattu. Il n'est donc pas possible de conditionner l'attribution du RSA.

De plus, qu'est-ce que le bénévolat ? Il n'est pas défini dans notre droit, mais une définition en a été donnée en 1993 par le CESE, c'est le fait pour une personne de s'engager librement dans une action non salarié en dehors de son temps professionnel et familial. Le bénévolat obligatoire, ce n'est plus le bénévolat, c'est une sorte de travail obligatoire non rémunéré. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain) Nombre de bénéficiaires du RSA font déjà du bénévolat, au véritable sens du terme. (Exclamations à droite)

M. le président.  - Veuillez conclure...

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Je qualifierai donc cette initiative d'inefficace, d'illégitime, d'illégale. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Crise agricole (I)

M. Michel Canevet .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-UC) En 2015, les responsables agricoles n'ont cessé d'alerter le Gouvernement sur les écarts dévastateurs entre les coûts de revient et les prix de vente. Les agriculteurs ne réclament pas des subventions mais simplement vivre de leur travail.

En Bretagne, la région n'a pas pris la mesure du problème - son président, il est vrai, est trop occupé ailleurs... (Murmures de protestations sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Les mesures prises par le Gouvernement n'ont satisfait personne, à tel point que le Premier ministre a dû reprendre le dossier en main. Quelles seront ses propositions ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Le Foll, en réunion avec les organisations professionnelles agricoles.

Le Gouvernement a pris des mesures d'urgence, avec un plan de soutien annoncé le 22 juillet, complété les 3 septembre 2015 et 26 janvier 2016. Il a pris ses responsabilités, au-delà de qui a été fait précédemment...(Mouvements divers à droite)

Cette crise n'est pas franco-française mais résulte d'un déséquilibre mondial de l'offre et de la demande solvable, en particulier sur le lait et le porc. Le Gouvernement fera des propositions de régulation à Bruxelles. Dans le cadre du plan de soutien à l'élevage, une enveloppe d'aide en trésorerie de 230 millions a été débloquée et une rallonge de 50 millions, décidée le 26 janvier dernier, a déjà été répartie dans les régions - les éleveurs bretons bénéficieront de 30 millions. Le dispositif « année blanche » a été prolongé et étendu. En 2009, le plan d'aide était arrivé un an après la crise... Aujourd'hui, il faut que tous les acteurs de la filière se mobilisent, grande distribution et producteurs comme coopératives. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Michel Canevet.  - Cette réponse montre que le Gouvernement n'a pas pris la mesure du problème. Ce que nous attendons, ce sont des mesures structurelles, des baisses de charges, des mesures de simplification ! (Applaudissements au centre et à droite)

Crise agricole (II)

M. Michel Vaspart .  - M. Le Foll est malheureusement absent... Hier encore, un agriculteur de 29 ans des Côtes-d'Armor s'est donné la mort, parce qu'il ne voyait pas comment s'en sortir. Le Premier ministre impute la crise à l'Europe, mais c'est se défausser : qui est en charge de défendre les intérêts des agriculteurs français à Bruxelles, sinon le président de la République et le chef du Gouvernement ? Quand nous aurons perdu 30 % de nos producteurs, ce sera le problème de qui ? La proposition de loi votée par le Sénat à une large majorité a le soutien de la profession, pourquoi l'avoir traitée avec mépris et désinvolture ? (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - C'est votre majorité qui a supprimé les quotas, et qui n'a offert aux agriculteurs qu'une aide trois fois inférieure à celle que nous engageons aujourd'hui ! (La voix de l'orateur est couverte par les protestations à droite) Vous avez désorganisé la filière ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain ; protestations à droite)

La France plaidera à Bruxelles pour une hausse des prix d'intervention et la mise en place de mécanismes de régulation. Il faudra aussi obtenir de la Russie la levée de l'embargo (Exclamations à droite), prolonger les mesures de stockage, mettre la grande distribution et tous les acteurs de la filière face à leurs responsabilités.

Un décret en Conseil d'État imposera bientôt l'étiquetage de l'origine des viandes et du lait dans les produits transformés, dispositif qui sera notifié à la Commission européenne. Le ministre de l'agriculture associe l'ensemble des professionnels à sa démarche. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Michel Vaspart.  - Politique politicienne ! Une fois de plus, nous sommes affligés de voir l'incapacité du président de la République et du Gouvernement de résoudre les problèmes de notre pays. (Applaudissements à droite)

Caisse des dépôts et consignations

M. Maurice Vincent .  - Alors que la croissance repart (on ironise à droite), il importe de la consolider.

Le 12 janvier, le président de la République a annoncé un ensemble de mesures renforçant le rôle de la Caisse des dépôts et consignations dans la rénovation du bâtiment et la construction de logements sociaux.

Elle devra mobiliser 3 milliards d'euros d'ici 2014 sous forme de prêts à taux zéro, afin de consolider les fonds propres des organismes de logement social et de financer la rénovation thermique des bâtiments des collectivités territoriales, des universités et des hôpitaux. La création d'une société foncière publique et d'un opérateur national pour la rénovation thermique des bâtiments a également été annoncée.

Pour financer ces actions, le président de la République a annoncé une augmentation des cessions d'actifs de la Caisse et la diminution de son versement.

Ces mesures sont très attendues. Où en est leur mise en oeuvre concrète ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget .  - Le président de la République a lancé, à l'occasion du Bicentenaire de la Caisse des dépôts et consignations, un programme de travail exigeant qui concentre les actions de la Caisse sur les deux priorités que vous avez citées.

Le ministre des finances adressera dans les jours à venir un courrier à la commission de surveillance de la Caisse à propos de la baisse du prélèvement. Les sommes dégagées doivent être utilisées le plus vite possible. M. Sapin a autorisé hier les fonds d'épargne à mettre en place pour les premiers prêts en matière de rénovation thermique des bâtiments.

Les ressources de la Caisse seront mobilisées le plus vite possible pour lancer la transition énergétique et tous nos objectifs communs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Formation des imams étrangers

Mme Nathalie Goulet .  - L'état d'urgence a été renouvelé et nous vivons dans un état de menace permanente. Au moment du Ramadan, des dizaines d'imams d'Algérie, de Tunisie, du Maroc ou de Turquie, viennent en France. Cette année, ce sera début juin, dont le ministère de l'Intérieur possède la liste. Vous êtes-vous assuré de leur identité, de leur fonction, de leur connaissance du français et de nos principes républicains ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - La loi de 1905 définit la laïcité comme la liberté de croire ou non, d'exercer un culte ou non. La liberté de conscience et la liberté de culte ne sont pas négociables.

Pendant le ramadan, il y a dans les mosquées des récitations du Coran, sur un mode psalmodique. Cela peut durer toute la nuit. Ces récitations s'appellent le tajwid. (Marques d'admiration). Chaque année, nous faisons ainsi venir 299 psalmodieurs conformément aux accords bilatéraux qui nous lient avec le Maroc et l'Algérie, où ils sont fonctionnaires. Leur liste nous est communiquée un mois auparavant. Leur visa de court séjour a pour terme la fin du ramadan. Les imams des autres pays sont soumis à un régime similaire et font l'objet de la plus grande attention de nos services. (Applaudissements sur les bancs socialistes et centristes)

Mme Nathalie Goulet.  - Le prêche pourrait se faire en français...

Artisans

M. André Reichardt .  - L'époque est faite de paradoxes : le Gouvernement dit vouloir renforcer l'apprentissage et il envisage de supprimer certaines des qualifications professionnelles requises et de raccourcir les stages préparatoires à l'installation. Pourtant, les métiers de l'artisanat ne s'improvisent pas ! Les brader, c'est constituer un secteur infernal, peuplé de tâcherons dont le consommateur pâtira. Malgré toute l'énergie qu'un artisan peut mettre à la création de son entreprise, il a besoin de conseils.

Confirmez-vous cette intention, madame Pinville ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire .  - Je ne peux vous laisser dire que les qualifications des artisans seraient remises en cause. Reste que les règles existantes sont excessivement complexes et ne contribuent pas à la protection du consommateur. Un restaurateur n'a pas besoin de qualifications pour créer son entreprise, même s'il en a besoin pour exercer son métier...

Beaucoup se heurtent au délai et au coût des stages à l'installation. Nous poursuivons nos discussions avec les organisations professionnelles.

M. André Reichardt.  - Tant mieux si vous ne remettez pas en cause les qualifications. Nous ne voulons pas d'un artisanat au rabais, mais de vraies entreprises, ayant à leur tête des artisans formés. (Applaudissements à droite)

Vallourec

M. Gaëtan Gorce .  - Catherine Génisson, François Patriat et moi-même nous inquiétons des suppressions d'emplois annoncées par Vallourec. Les ouvriers, depuis 2008, sont les principales victimes de la crise, souvent oubliées. Je salue les efforts de l'État actionnaire, mais je crains qu'ils ne suffisent pas.

A Cosne-sur-Loire, 80 salariés sur 204 perdraient leur emploi, dans un bassin qui en a déjà perdu un millier.

Monsieur le ministre de l'économie, vous qui vantez l'innovation économique, faites aussi progresser l'innovation sociale ! Faisons plus et mieux en matière de reconversion industrielle ; trouvons des solutions avant que les plans de licenciement ne soient annoncés. Bref, imposons à Vallourec une obligation de résultat.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique .  - Vous avez raison de rappeler la situation des ouvriers et la dignité dont ils font preuve.

Le groupe Vallourec traverse une grave crise en raison de la situation du secteur pétrolier - il a perdu 66 % de son chiffre d'affaires en 18 mois -, de la baisse brutale des cours de l'acier due au dumping chinois contre lequel j'irai plaider lundi à Bruxelles.

Le Gouvernement a recapitalisé le groupe et demandé qu'aucun site productif ne soit fermé - ils sont occupés à 50 % d'occupation depuis six mois...

Vallourec doit se concentrer sur la hausse de sa valeur ajoutée. Un investisseur japonais s'est engagé, d'autres devront suivre pour soutenir la recherche et développement du groupe.

Des appels à projets seront lancés avant la moindre restructuration pour une nouvelle recapitalisation de l'entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Services publics

M. Hugues Portelli .  - L'État s'est lancé dans une politique de modernisation des services publics via la baisse des effectifs et la dématérialisation. Cela a des conséquences sur le terrain. Les caisses d'allocations familiales perdent leurs antennes et demandent aux communes de prendre le relais. De même pour les CPAM. Pôle Emploi n'ouvrira plus qu'une demi-journée par jour et les rendez-vous seront pris par Internet. Les services fiscaux mettent en place aussi la dématérialisation et il devient difficile de déposer une plainte dans un commissariat.

Conséquences ? Les usagers les plus fragiles, les moins mobiles, les plus âgés sont les victimes de cette politique et c'est aux communes d'assurer l'accueil des usagers. Est-ce cela la modernisation du service public ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification .  - Les services publics sont une priorité du Gouvernement. Le département, échelon de proximité, a été choisi comme échelon prioritaire des services publics de l'État : 1 000 maisons des services publics ont été créées en partenariat avec La Poste. Le service public doit s'adapter aux usagers. À l'heure du numérique, nous construisons un service public ensemble 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, partout sur le territoire. Ne soyons pas nostalgiques d'un passé qui n'a jamais existé car jamais les services publics n'ont été accessibles en tout point du territoire. C'est ce que nous réalisons et c'est inédit. Personne ne sera laissé sur le bord du chemin ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain)

Sécurité

M. Philippe Dominati .  - En appelant un numéro d'urgence deux jours après les attentats du 13 novembre, une jeune femme a probablement évité des dizaines de morts et rendu possible l'opération de Saint-Denis contre un des auteurs des massacres. Elle attendait la reconnaissance de l'État. Aujourd'hui, elle doit saisir les médias et la Ligue des droits de l'homme ! Comment l'État peut-il se défausser dans une situation pareille ? (Applaudissements à droite)

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - Polémiquer sur un sujet aussi grave, au moyen d'informations totalement fausses, n'est pas à la hauteur des attentes des Français.

Deux jours après les attentats, un commissaire de police a interrogé cette personne à la demande du procureur de la République, sous le régime de la garde à vue : elle ne pouvait pas déposer sous X car il n'était pas certain qu'elle n'avait pas de lien avec l'affaire.

Nous avons pris depuis des mesures pour garantir sa sécurité. J'y ai veillé personnellement. Des journalistes l'ont interrogée, nous les avons mis en garde sur le risque qu'ils lui faisaient ainsi courir, l'interview a malgré tout été publiée. Des poursuites ont été engagées pour mise en danger de la vie d'autrui.

J'ai écrit au procureur une lettre très précise rappelant tout ce qu'il convenait de faire pour assurer la sécurité de cette jeune femme. Toute polémique est donc inutile.

M. Philippe Dominati.  - il s'agit d'honneur et de respect de la parole donnée à une citoyenne. Les bons policiers comme les bons ministres de l'Intérieur protègent les citoyens qui permettent l'arrestation de criminels. Cela doit continuer. (Exclamations à gauche)

Je souhaite bonheur et sérénité aux membres du Gouvernement en sursis ! (Exclamations à gauche)

Régime des cultes en Alsace-Moselle

M. Jean Louis Masson .  - Les habitants d'Alsace-Moselle sont très attachés au régime local des cultes. Or il est menacé : nationalement par les promoteurs de la laïcité qui veulent étendre à l'Alsace-Moselle la loi de 1905 ; localement, par la surenchère des élus qui font du communautarisme musulman leur fonds de commerce. Un maire de Moselle propose, après s'être ainsi vanté d'avoir construit une grande mosquée financée à 100 % sur fonds publics, d'élargir à l'islam l'enseignement religieux dispensé à l'école. C'est très dangereux, car cela remet en cause un régime fondé sur des réalités historiques. Pourquoi, sans justification historique, favoriser une religion au détriment des autres ? Les bouddhistes et les orthodoxes ne posent, eux, aucun problème de communautarisme ou de trouble à l'ordre public.

Mais si le champ du régime local était élargi, ne faudrait-il pas l'étendre à toutes les religions, et non, par électoralisme, à une seule ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur .  - Un mot encore à M. Dominati : pour moi, le sens de l'honneur impose le respect de la vérité. Je la connais, pas vous. Je n'ai aucune leçon à recevoir de vous, qui abaissez la vie politique par vos propos minables. (Exclamations sur plusieurs bancs à droite)

Il n'y a aucun projet de remise en cause du régime concordataire, très profondément implanté en Alsace-Moselle, dont la constitutionnalité a été réaffirmée par le Conseil constitutionnel en 2011 et en 2013. Si des réflexions sont en cours au sein de l'institut local du droit d'Alsace-Moselle et de l'observatoire de la laïcité, elles ne portent que sur la pénalisation du blasphème et l'enseignement religieux obligatoire.

Il demeure possible d'étendre l'enseignement du fait religieux à l'islam sans méconnaître le droit. La République a besoin d'apaisement, de rassemblement et d'élévation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et républicain et du groupe RDSE)

M. Jean Louis Masson.  - Élargir l'enseignement religieux à la seule religion musulmane ne se justifie nullement, alors que d'autres religions existent en Alsace-Moselle, dont les fidèles ne posent aucun problème.

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 17 heures.