Mariages dans des annexes de la mairie

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi relative à la célébration des mariages dans des annexes de la mairie.

Discussion générale

M. Roland Courteau, auteur de la proposition de loi .  - Cette proposition de loi vise à donner un fondement législatif à une pratique résultant d'une instruction générale de l'exécutif, pour conférer aux pratiques actuelles la souplesse que réclame le pragmatisme.

Le premier alinéa de l'article 75 du code civil impose la célébration des mariages « à la mairie ». Le deuxième alinéa permet de déroger à cette règle dans deux situations seulement, en permettant la célébration au domicile ou à la résidence de l'une des parties : « en cas d'empêchement grave », ou « en cas de péril imminent de mort de l'un des futurs époux ». Le mariage ne peut ainsi être célébré dans une annexe de la mairie, ce qui pose problème lorsque la salle dévolue aux mariages est exiguë ou difficilement accessible aux personnes handicapées.

L'instruction générale relative à l'état civil autorise cependant le conseil municipal à affecter temporairement une annexe de la mairie à la célébration des mariages en cas de travaux sur les bâtiments de la mairie ou pour toute autre cause, si aucune salle de la maison commune n'est disponible, pendant une certaine période et sous le contrôle du procureur de la République.

Aucune disposition législative expresse n'autorise cependant la célébration des mariages dans une annexe. Le conseil municipal qui voudrait user de cette faculté, par exemple au vu de l'exiguïté de la salle des mariages, peut-il le faire pour « des » mariages, et non pour tous les mariages ? En outre cette faculté n'est que temporaire : elle ne résout pas le problème des mairies manifestement trop petites pour célébrer les mariages, sauf à ce que le conseil municipal réitère régulièrement sa décision de délocalisation. Or de plus en plus de jeunes couples s'installent dans des petites communes qui jouxtent les grandes agglomérations ; les mariages sont plus nombreux, comme le public qui y assiste.

Or le public doit être admis librement à la célébration du mariage, qui doit être publique. Les locaux étant parfois exigus, il sera de plus en plus souvent demandé que les célébrations aient lieu dans une annexe. Renouveler ce type d'autorisation est contraignant quand le besoin est permanent. Il s'agit donc par cette proposition de loi de rendre pérenne une pratique désormais courante, de faciliter la gestion municipale et d'alléger la charge de travail du parquet.

Le rapporteur de la commission des lois, M. Sutour, a fait adopter un amendement qui insère ces dispositions dans le code général des collectivités territoriales plutôt que dans le code civil. Personnellement, je n'y vois que des avantages.

S'agissant du rôle du procureur, j'ai de même été convaincu : la vigilance du procureur s'impose pour que le lieu retenu soit adapté à la solennité de la célébration. Les délais de réponse du procureur risquant d'être longs, j'avais proposé que le conseil municipal se contente de transmettre sa décision au procureur. L'amendement de MM. Reichardt et Danesi va dans le bon sens : « Le conseil municipal peut, sauf opposition du procureur, affecter tout local adapté à la célébration du mariage ». Cette rédaction me paraît pertinente.

Merci à M. Sutour, merci à la commission des lois d'avoir adopté, ainsi amendée, cette proposition de loi qui répond aux préoccupations des maires et des élus municipaux en leur donnant plus de souplesse. Me croirez-vous ? Ce texte est très attendu par les maires. (Applaudissements)

M. Claude Bérit-Débat.  - C'est vrai !

M. Jean-Claude Lenoir.  - Exact !

M. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois .  - Cette proposition de loi répond à une forte attente des élus locaux. Nombre de communes souhaiteraient, pour des raisons pratiques, pouvoir célébrer des mariages en-dehors de la mairie. Deux propositions de loi ayant le même objet ont été déposées récemment par MM. Nachbar et Gournac, et plusieurs questions écrites adressées au gouvernement.

Actuellement, les dérogations au principe de la célébration du mariage à la mairie sont très encadrées : « empêchement grave », « péril imminent de mort d'un des époux », ou en cas de travaux sur le bâtiment de la mairie, pour une « certaine période ». L'interdiction de principe se justifiait par le souci de ne pas déplacer les registres, au risque de les perdre ou de les voir détruits. Mais avec la dématérialisation de ceux-ci et l'utilisation de feuilles mobiles, l'argument ne tient plus.

La commission des lois, qui avait déjà donné un avis favorable à un amendement sur ce sujet lors de l'examen de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités territoriales - amendement retiré avant la séance - a adopté le présent texte, après lui avoir apporté plusieurs modifications. Elle a ainsi souhaité inscrire ces dispositions dans le code général des collectivités territoriales plutôt que dans le code civil, dont l'article 75 doit garder son caractère symbolique : tout mariage sera célébré, quel que soit le lieu choisi, dans la maison commune, lors d'une cérémonie républicaine, en présence d'un officier d'état civil. La commission des lois a en outre remplacé le terme d'« annexe » par celui de « local adapté », pour viser les nombreuses communes dont les mairies n'ont pas d'annexe au sens strict que le code général des collectivités territoriales donne à ce terme.

La commission des lois a enfin prévu une autorisation du procureur de la République au lieu d'une simple transmission de la délibération. Un contrôle préalable nous paraît en effet nécessaire, au regard du caractère solennel de la cérémonie.

Au bénéfice de ces explications, la commission des lois vous propose d'adopter cette proposition de loi ainsi amendée. (Applaudissements)

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports .  - Je vous prie d'excuser Mme Lebranchu. L'objectif de cette proposition de loi est que l'ensemble des communes disposent d'une salle des mariages de dimension suffisante et accessible à tous ; que tous les citoyens puissent se marier dans de bonnes conditions, quelle que soit sa commune de résidence. De nombreuses salles des mariages sont exiguës ou difficilement accessibles aux personnes à mobilité réduite. Or le droit existant n'est pas assez sécurisant pour les maires.

M. Roland Courteau.  - Absolument.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État.  - Les exceptions au droit commun prévues par le code civil sont en effet très restreintes. En cas de travaux de rénovation, le conseil municipal peut décider, à titre temporaire, l'utilisation d'une autre salle.

Cette proposition de loi répond au problème en rendant possible, de façon permanente, la célébration de mariages dans un bâtiment extérieur à la mairie. Une telle disposition sera utile dans les communes nouvelles, en permettant le mariage dans la mairie déléguée. En outre, à l'heure d'internet, il n'y a plus lieu d'imposer des règles aussi contraignantes.

Le gouvernement partage donc l'objectif de cette proposition de loi. La commission des lois a approuvé l'assouplissement proposé et apporté des précisions bienvenues.

M. Roland Courteau.  - C'est vrai.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État.  - L'inscription dans le CGCT est une bonne chose. L'article 75 du code civil restant inchangé, tout mariage sera célébré dans la maison commune, quel que soit le lieu choisi, celui-ci relevant du conseil municipal. Les aspects matériels de la célébration sont détachables de la procédure.

Deuxièmement, votre commission a renforcé la sécurité juridique du dispositif en prévoyant l'autorisation préalable du procureur. Le gouvernement souscrit à l'ajout de cette garantie essentielle. Enfin, le terme de « local » est en effet préférable à celui d'« annexe ».

Reste que cette modification, en élargissant les possibilités pour les maires, exige des précisions supplémentaires : il faut mieux définir le type de salle et veiller à éviter toute stigmatisation... Pour le dire autrement, il ne faudrait pas que, pour certains mariages, on ne propose que l'annexe et non le bâtiment principal. (Mme Cécile Cukierman renchérit) Le gouvernement estime que le texte, en l'état actuel, n'apporte pas toutes les garanties nécessaires aux futurs époux. D'où son avis de sagesse bienveillante. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes)

Mme Cécile Cukierman .  - Sans ironie ni insolence, j'avoue que nous avons été assez surpris de voir l'inscription de ce texte à l'ordre du jour du 1er avril... (Sourires) Au lendemain des départementales, cela s'imposait-il ? Et puis, nous nous sommes dit que nous avions tous assisté à des mariages célébrés dans des salles exiguës, peu commodes. Fallait-il une loi pour régler ce problème ? L'hyper-judiciarisation de la société impose certes de protéger les maires. L'augmentation des cérémonies à la mairie qui ne sont pas suivies de cérémonies religieuses entraîne l'augmentation du nombre d'invités à la mairie. L'exiguïté des salles des mariages imposait des choix terribles aux familles : peut-on exclure le grand-oncle, qui participe au financement du voyage de noces, de la cérémonie ? (Sourires) Certes, la qualité de la cérémonie ne garantit pas la réussite ni la longévité du mariage... (Sourires)

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État.  - Mais que fait le Sénat ?

Mme Cécile Cukierman.  - Mais c'est une autre question... Cette proposition de loi ne doit pas être un alibi pour surseoir à la mise en conformité des bâtiments publics. À l'heure où les dotations fondent, soyons vigilants... (M. le ministre s'exclame) Ne comptez pas sur nous, non plus, pour soutenir les communes nouvelles, nous avons voté contre leur création.

Pas question non plus pour nous d'accepter que certains mariages soient déportés dans l'annexe : tous les jeunes mariés - on peut l'être à tout âge ! - doivent se voir proposer le choix.

Parce que ce texte est attendu par de nombreux élus, nous le voterons (Applaudissements sur les bancs CRC, « Ah ! » sur plusieurs bancs)

M. Pierre-Yves Collombat .  - Les idées de bon sens se passent de longues explications. Toutes ont été données, et dans le détail. Le groupe RDSE et moi-même voterons ce texte, par raison, et même avec enthousiasme si l'amendement de simplification de nos collègues était adopté.

Les réserves émises par le ministre ne nous étonnent pas, la méfiance du gouvernement envers les élus locaux est connue... Je pense à l'adoption récente d'une charte de l'élu local, en lieu et place de statut - un élu qui devra se livrer à un exercice de mortification au début de son mandat... Faisons confiance aux élus locaux. Je ne pense pas qu'il y ait de dérives à craindre de cette proposition de loi. (Applaudissements)

M. Yves Détraigne .  - Le mariage, dans notre société, est de moins en moins fréquenté mais reste une cérémonie importante : c'est la création officielle de la cellule de base de la société qu'est la famille...

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Yves Détraigne.  - ... où se transmettent les valeurs qui permettent de vivre et de travailler ensemble. La Marne compte 620 communes, dont 46 % ont moins de 200 habitants : je sais ce que c'est que d'avoir une salle trop petite pour accueillir dignement une cérémonie de mariage...

Dans les faits, il arrive déjà que les mariages soient célébrés dans une salle communale, salle des fêtes ou autre, plus adaptée, par sa taille et son accessibilité, que la salle des mariages de la mairie.

Cette proposition de loi est bienvenue. La commission a enrichi le texte en renforçant la sécurité du dispositif : l'inscription dans le code général des collectivités territoriales est une bonne option, puisqu'il ne s'agit pas du déroulement de la cérémonie à proprement parler. Le terme de « local adapté » lèvera des difficultés, notamment dans les plus petites communes. Enfin, l'autorisation préalable du procureur de la République est importante pour éviter que soient dévalorisées la portée symbolique et la solennité du mariage. Se marier sous le préau de l'école, par exemple, serait peut-être « sympa », mais peu solennel...

En 2013, le nombre de mariages a été le plus faible depuis de très nombreuses années. Proposer un local plus adapté contribuera peut-être à séduire certains jeunes couples... Enfin, je rêve un peu... Pour le groupe UDI-UC, tout ce qui peut faciliter la célébration de mariages dans de bonnes conditions va dans le bon sens. Nous voterons ce texte sans hésitation. (Applaudissements)

Mme Nicole Duranton .  - Selon l'article 75 du code civil, le mariage doit être célébré en mairie. Des dérogations existent néanmoins, notamment en cas de travaux. Cette proposition de loi bienvenue répond à des besoins qui se posent dans les communes rurales, où les salles des mariages sont souvent très exiguës - on ne peut y faire entrer qu'une dizaine de personnes.

Le conseil municipal doit impérativement se prononcer, et le local être adapté, car la cérémonie du mariage civil est solennelle : on se marie devant la République. Ce n'est pas une simple formalité qu'on pourrait accomplir dans un gymnase. À l'heure où les symboles de la République sont trop souvent bafoués, j'estime que la notion de « local adapté » devrait être mieux définie. Il ne peut s'agir, bien sûr, que de locaux appartenant au patrimoine communal.

M. Roland Courteau.  - Évidemment.

Mme Nicole Duranton.  - Le procureur doit être saisi du local choisi ; mais faut-il l'obliger à donner son autorisation ? Que se passera-t-il s'il refuse l'affectation du local ? Mieux vaut laisser le conseil municipal trancher. Avec ce texte, il aura toute sa place et tout son poids. (Applaudissements)

Mme Nicole Bonnefoy .  - Cette proposition de loi donne un fondement législatif à une pratique résultant d'une instruction générale de l'exécutif. Actuellement, les dérogations au principe du mariage à la mairie sont strictement encadrées et ponctuelles. Or nombreuses sont les communes qui souhaiteraient célébrer des mariages hors de l'hôtel de ville. S'il n'est pas question de déroger au caractère solennel et républicain de la cérémonie, il peut être plus commode de tenir celle-ci ailleurs que dans une salle des mariages exigüe ou posant des problèmes d'accessibilité.

La possibilité de célébrer des mariages dans un local adapté, sur décision du conseil municipal, répond à une attente forte des élus. Le Sénat est là pleinement dans son rôle. En permettant d'accueillir un public plus large, de ne pas exclure les personnes âgées ou handicapées, ce texte renforce la solennité républicaine de la cérémonie, dans l'intérêt de tous.

En imposant l'autorisation du procureur de la République, le texte sécurise le dispositif et garantit une certaine pérennité de l'affectation du local.

Ce texte vise donc à une meilleure application pratique de l'esprit même de la loi. J'espère donc qu'il fera ici consensus. (Applaudissements à gauche et sur les bancs de la commission)

M. René Vandierendonck .  - À ce stade, l'exposé des motifs du texte est peut-être moins nécessaire...

Son premier objectif, c'est l'accessibilité de la cérémonie à tous, car certaines salles sont exiguës. Autre objectif : permettre aux maires de valoriser la cérémonie de mariage en le célébrant, par exemple, dans une salle patrimoniale.

Je tiens à rappeler que la révolte contre les 400 000 normes est partie d'ici, il y a trois ans.

M. Roland Courteau.  - C'est bien de le dire !

M. René Vandierendonck.  - Cette proposition de loi est d'abord un signe de considération pour les attentes des maires de France. Elle a fait l'unanimité à la commission des lois, cela n'arrive pas tous les jours...

Les principes généraux du droit, celui de non-discrimination, s'imposent évidemment à l'officier d'état civil qu'est le maire. Le décret du 3 août 1962 autorise déjà l'utilisation, sous le contrôle du procureur de la République, de feuilles mobiles à insérer dans le registre d'état civil. Y a-t-il un risque de discrimination ? Je n'y crois pas une seconde. Il faut évidemment que tout le monde soit traité de la même manière. Cela entendu, les élus ont besoin d'une liberté d'appréciation.

Je soutiens ce texte sans réserve, puisse-t-il nous réunir tous. (Applaudissements)

M. René Danesi .  - Cette proposition de loi vient à point nommé pour les communes rurales : nombreuses sont celles qui ne peuvent mettre leurs petites mairies aux normes d'accessibilité et de sécurité, pour y accueillir un groupe de personnes, à l'occasion des élections, des séances du conseil municipal et, surtout, d'un mariage.

Utiliser une salle de classe pour les mariages ne nécessite qu'un peu d'huile de coude, pour déplacer les meubles, plus facile à trouver dans nos collectivités territoriales que des crédits d'investissement...

Mme Françoise Férat.  - C'est bien vrai !

M. Yves Détraigne.  - Eh oui !

M. René Danesi.  - Depuis la loi du 20 décembre 2007, le conseil municipal peut déjà se réunir et délibérer à titre définitif hors de la mairie, à condition que le lieu choisi soit accessible et garantisse la publicité des débats. Même chose pour les opérations électorales. Restait donc le mariage.

Ce texte résoudra bien des problèmes et fera faire des économies dans des communes rurales mises à la diète.

Une remarque sur la tutelle du procureur de la République, selon le texte de la commission des lois. On aurait pu prévoir, comme le prévoit l'instruction générale du 11 mai 1999 relative à l'état civil, une simple information du procureur.

Autre observation : une interprétation restrictive de l'article L. 212-15 du code de l'éducation permet de contester l'organisation des réunions du conseil municipal ou d'élections dans une salle de classe. Il faudrait le mettre à jour, ce serait la suite logique de ce texte et je fais toute confiance à la commission des lois pour enclencher un processus législatif qui la compléterait utilement ainsi (Applaudissements).

M. Jacques Genest .  - Cette proposition de loi répond à un problème concret, bien connu des maires ruraux. L'exiguïté des salles de mariage limite le nombre de convives, quand les mariés voudraient être entourés de tous leurs proches. En outre, les dotations baissant, les communes ont du mal à réaliser les travaux nécessaires pour rendre les salles accessibles, aux personnes handicapées en particulier.

M. Roland Courteau.  - C'est exact.

M. Jacques Genest.  - J'observe que la notification de ces dotations vient seulement d'avoir lieu, au lendemain des élections départementales... (Exclamations sur divers bancs)

Autoriser le conseil municipal à affecter un autre local aux mariages est bienvenu. Sur le rôle du procureur, l'amendement de M. Reichardt va dans le bon sens.

Ce texte témoigne d'une confiance envers les élus locaux, dans une logique de liberté et de responsabilité...

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Jacques Genest.  - ... qui devrait inspirer plus souvent nos lois - je pense à certains textes encore en navette... Nous voterons bien sûr cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs UMP et les bancs de la commission)

M. Jean-Paul Fournier .  - Merci à l'auteur et au rapporteur - Gardois - de cette proposition de loi, qui me satisfait, en tant que maire de Nîmes, où ont été célébrés 548 mariages en 2014. La cérémonie du mariage est un moment fort, où les symboles de la République sont présents, le drapeau tricolore et le buste de Marianne. Cependant, elle n'a pas toujours lieu dans la mairie : à Nîmes, par exemple, certains mariages sont organisés dans deux mairies annexes et un centre administratif municipal. Cette tolérance est accordée par le procureur, en-dehors des autorisations administratives des mairies annexes prévues par l'article L. 2144-1 du code général des collectivités territoriales.

Cette spécificité est liée au rattachement, dans les années cinquante, des communes de Saint-Césaire et de Courbessac. Ainsi, depuis plus de soixante ans, les Nîmoises et les Nîmois peuvent se marier dans quatre lieux différents, dont la mairie dite centrale.

Cela permet de désengorger l'hôtel de ville en période estivale en particulier, et de préserver un héritage que les habitants des deux anciens villages que j'ai cités souhaitent cultiver.

En outre, la salle des mariages, située souvent à l'étage, est aussi fréquemment celle où se réunit le conseil municipal. Il peut être plus opportun de célébrer les mariages ailleurs, à condition qu'il ne s'agisse pas d'un lieu au rabais - le contrôle du procureur de la République s'exercera - et que les symboles de la République soient présents.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Jean-Paul Fournier.  - À Nîmes, où 429 mariages ont été célébrés l'an dernier à l'hôtel de ville, nous réfléchissons dans cet esprit à l'affectation d'une salle spécifique pour éviter l'affluence estivale, pendant les férias et en période d'affluence commerciale par exemple.

Je voterai ce texte bienvenu. (Applaudissements)

M. Simon Sutour, rapporteur .  - Je souhaite que ce texte acquière bientôt force de loi. Or les délais peuvent être longs, nous l'avons vu à propos de la proposition de loi relative au statut de l'élu local - statut assorti d'une charte un peu mortifère, M. Collombat a eu raison de le dire...

En cas de discrimination, ce n'est pas l'affectation de la salle qui serait en cause mais son usage. Une action en justice pourrait être introduite contre l'État. Le maire, en la matière, est en effet un officier d'état civil qui agit sous le contrôle de l'autorité judiciaire, la responsabilité de l'État est donc engagée, même si le maire est responsable de l'organisation et du fonctionnement du service de l'état civil. Le maire encourrait donc aussi des sanctions disciplinaires en cas de faute personnelle.

M. Roland Courteau.  - Très utile rappel.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État .  - Le Sénat, qui plaide pour le bicamérisme, ne peut préjuger de la position de l'Assemblée nationale...

On vante la simplification. Et il faudrait saisir le juge lorsqu'on veut se marier ? Mes remarques n'étaient pas juridiques mais politiques, et j'attends une réponse du même ordre.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Les observations que je viens de faire avaient pour objet d'inciter le gouvernement à passer d'un avis de sagesse bienveillant à un avis favorable. (Applaudissements)

M. Jean-Claude Lenoir.  - Très bien !

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE UNIQUE

M. Jean-Claude Lenoir.  - Je félicite l'auteur et le rapporteur de ce texte, qui répond parfaitement aux préoccupations des petites communes. Je tiens néanmoins à soulever un problème qui concerne davantage les villes. À Mortagne-au-Perche, nous disposons, outre la salle des mariages de l'hôtel de ville, adaptée à la plupart des cérémonies, d'une salle des fêtes adéquate pour organiser celles qui accueillent, de plus en plus souvent, un grand nombre de convives.

J'entends dire qu'il ne saurait être question de décider au cas par cas, mais parfois, la salle de fêtes est bien trop grande. En outre, le texte adopté par la commission parle bien de la célébration « de » mariages, non « du » mariage, comme l'article 75 du code civil auquel faisait référence la proposition initiale. Restons-en là.

M. Yves Détraigne.  - L'idée n'est tout de même pas que l'on puisse changer de salle au gré des mariés. Il faudrait le préciser.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Nous avons vu cela en commission.

M. Yves Détraigne.  - Il faudrait aussi changer l'intitulé de la proposition de loi.

M. le président.  - Un amendement y pourvoit.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Reichardt, Danesi et Pillet et Mme Deromedi.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

après autorisation du procureur de la République

par les mots :

sauf opposition du procureur de la République

M. André Reichardt.  - Cet amendement est une marque de confiance envers les élus qui font face à l'inflation normative. Que le préfet soit chargé de veiller à la légalité de la délibération, nous ne le remettons pas en cause. Mais une information suivie d'une possibilité d'opposition du procureur de la République est largement suffisante, pour une affaire aussi simple. Les demandes d'autorisation risquent d'emboliser les services du procureur, qui a bien autre chose à faire...

M. Simon Sutour, rapporteur.  - L'amendement maintenant le contrôle du procureur, avis favorable. (M. André Reichardt applaudit)

M. Charles Revet.  - Très bien.

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État.  - Je vous transmettrai, monsieur Reichardt, un article qui fait état de la démultiplication des normes applicables aux collectivités territoriales depuis dix ans, et notamment entre 2005 et 2010. (Protestations au centre et à droite) Il faut les simplifier, c'est ce que fait chaque jour Thierry Mandon, chargé de cette mission au sein du gouvernement.

Mais il s'agit ici du mariage, qui ne saurait être banalisé. Dans les salles annexes, la neutralité républicaine n'est pas forcément garantie, ni les symboles républicains présents. D'où la nécessité d'une autorisation préalable. Avis défavorable.

M. Jean-Pierre Grand.  - Une observation sur le mariage prae mortem. En trente-quatre ans de vie municipale, j'ai constaté que si la situation de la personne concernée change, entre le jour où l'autorisation de célébrer le mariage à l'hôpital a été demandée au procureur et celui où elle accordée, c'est bien le maire qui décide, in fine. Il faudrait l'inscrire dans la loi. (Applaudissements au centre à droite)

M. Claude Bérit-Débat.  - Avançons, pour que cette proposition de loi soit votée. Cet amendement simplifiera les choses.

Que M. Courteau soit assuré de notre soutien. (Applaudissements)

M. Roland Courteau, auteur de la proposition de loi.  - Cet amendement est en effet très pertinent, car les demandes d'autorisation risquent d'être nombreuses. Il ne met pas en cause la solennité des locaux. (Applaudissements)

M. Jean-François Longeot.  - Que le gouvernement, pour une fois, fasse confiance aux élus locaux ! (Applaudissements)

M. Claude Kern.  - M. Longeot m'a ôté les mots de la bouche. Cet amendement est de bon sens. (Applaudissements)

M. François Fortassin.  - Le groupe RDSE votera cet amendement et cette proposition de loi bienvenue. (Applaudissements)

M. Simon Sutour, rapporteur.  - C'est moi qui, en commission des lois, ai demandé que le rôle du procureur soit précisé, afin de sécuriser le dispositif sur le plan juridique.

M. André Reichardt.  - Je regrette que le ministre place ce débat sur le plan politique. Quelles que soient les responsabilités des uns et des autres dans l'accumulation des normes, cet amendement est purement technique. Tout gouvernement s'honorerait à l'accepter.

L'amendement n°1 rectifié est adopté.

(Applaudissements et bravos au centre, à droite et sur plusieurs bancs à gauche)

Mme Cécile Cukierman.  - Nous voterons le texte, même s'il provoquera des contentieux s'il n'est pas modifié, car il n'interdit pas que tous les mariages ne soient pas célébrés dans le même lieu. On le sait, certains élus rechignent à célébrer des mariages entre personnes de même sexe, par exemple ! (Protestations sur les bancs UDI-UC) Quant on fait la loi, on doit tout prévoir. C'est l'intérêt des élus locaux et des familles. (Applaudissements sur les bancs CRC)

L'article unique, modifié, est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Sutour, au nom de la commission.

Après l'article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1er est applicable en Polynésie française.

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Amendement de coordination pour que la loi s'applique en Polynésie française.

L'amendement n°2, accepté par le gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

Intitulé de la proposition de loi

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Sutour, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet intitulé :

Proposition de loi tendant à permettre au conseil municipal d'affecter tout local adapté à la célébration de mariages

M. Simon Sutour, rapporteur.  - Amendement qui tire les conséquences de nos votes sur le titre de la proposition de loi.

L'amendement n°3, accepté par le gouvernement, est adopté et l'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.

M. Roland Courteau, auteur de la proposition de loi.  - Je crois deviner l'issue de votre vote... Avec cette proposition de loi, nous avons voulu répondre à une attente des élus, et leur donner de la souplesse. J'espère qu'il nous reviendra bientôt de l'Assemblée nationale. (Applaudissements)

M. Daniel Gremillet.  - Je n'étais initialement pas très favorable à ce texte, mais les amendements adoptés lui ont redonné sens, en affirmant la responsabilité du conseil municipal. Je le voterai.

La proposition de loi est adoptée à l'unanimité.

(Applaudissements)