Débat sur la situation des maternités

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle un débat sur la situation des maternités en France.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - À l'initiative de la présidente Annie David, la commission des affaires sociales avait demandé il y a deux ans à la Cour des comptes une enquête sur les maternités en France. Ses conclusions ont été présentées à la commission le 21 janvier dernier lors d'une table ronde. L'étude de la Cour a impliquée plusieurs chambres régionales des comptes. C'est un travail d'ampleur. Il nous a donc paru important de pouvoir échanger avec le gouvernement sur ce sujet essentiel.

Ce rapport ne saurait se réduire à la seule question du maintien ou non de certaines maternités, sur laquelle se focalisent les médias. La Cour ne cite aucun site à fermer ; elle apporte des éclairages approfondis sur les difficultés de recrutement, le niveau des équipements techniques, ou le suivi médical des femmes enceintes. Elle n'a pas voulu dresser un tableau alarmiste, et constate que la restructuration opérée ces dernières années s'est effectuée sans compromettre la qualité des soins. Les normes de sécurité fixées par les décrets de 1998 sont toutefois insuffisamment respectées. La commission invite les pouvoirs publics à anticiper les évolutions nécessaires, plutôt que de réagir dans l'urgence à la suite d'accidents dramatiques, comme récemment à la maternité d'Orthez.

Face aux départs en retraite massifs qui s'annoncent, le flux de formation en anesthésie en obstétrique ou en pédiatrie a été insuffisamment relevé. La commission souligne des disparités géographiques inquiétantes. C'est un obstacle majeur à l'application uniforme sur le territoire du principe de permanence des soins. Quelles solutions, madame le ministre ? La question de l'attractivité des postes en maternité doit tenir compte de l'aspiration des jeunes médecins à exercer en équipe.

Le gouvernement considère-t-il souhaitable de prévoir une planification des équipements, une articulation ville-hôpital plus poussée, une orientation plus directive des patientes ?

La grossesse n'est pas une pathologie ; dans l'immense majorité des cas, elle se déroule bien. L'issue peut toutefois être dramatique en cas de problème. Le critère de la sécurité est privilégié par nos concitoyens, d'où l'attractivité des maternités de niveau 2 ou 3, et le taux de fuite des maternités de niveau 1 - sauf en cas d'isolement tel qu'il n'y a pas d'autre choix.

Le sujet est sensible. L'enquête de la Cour des comptes comporte des informations utiles et des réflexions stimulantes. Nous attendons d'entendre les réactions du gouvernement. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - La natalité est l'une des forces de la France, un signe de confiance dans l'avenir. Un réseau efficace de maternités doit assurer la sécurité des mères et des enfants et une prise en charge de proximité.

Classée dix-septième en Europe en matière de sécurité, la France peut mieux faire en termes de périnatalité. Que prévoit le gouvernement ?

La Cour ne préconise pas la fermeture des maternités mal classées, mais préconise un contrôle renforcé. Il n'y a pas lieu d'en faire une analyse exagérément alarmiste. Le cas de la Guyane est particulier. M. Antiste y reviendra. Quelles mesures de contrôle le gouvernement prévoit-il pour les maternités qui effectuent moins de 300 accouchements par an ?

En quarante ans, les deux tiers des maternités ont disparu. Les contraintes normatives se sont considérablement accrues depuis les décrets de 1998 et le classement des maternités en trois niveaux.

Les textes imposant la présence de spécialistes dont le recrutement est de plus en plus difficile, ne sont pas uniformément appliqués. Ce phénomène va s'accentuer, en particulier pour les obstétriciens et les anesthésistes. Ne faut-il pas, madame la ministre, pourvoir davantage de postes en internat ?

Le projet de loi Santé comporte certaines dispositions sur l'intérim médical ; mais même l'affectation d'internes dans les zones sous-denses ne permet pas de répondre aux besoins des maternités les plus en difficulté. Qu'envisagez-vous, madame la ministre ?

Vous avez confié un rapport sur l'attractivité de la profession de praticien hospitalier à notre ancien collègue Jacky Le Menn. Nul doute qu'il proposera de favoriser les recrutements. Ne faut-il pas aussi prévoir la présence d'équipes venant de structures plus importantes ou transformer les maternités qui ne peuvent recruter en centre de suivi de grossesse ?

Interrogeons-nous aussi sur la répartition des rôles entre médecins et sages-femmes, question abordée dans la loi HPST mais non encore résolue dans les maternités. Que proposez-vous ?

Nous avons besoin d'améliorer nos connaissances ; il n'existe pas d'étude épidémiologique sur les relations entre l'éloignement des parturientes de la maternité et la mortalité néonatale. Si le temps médian de 17 minutes parait satisfaisant, il cache des écarts importants, jusqu'à 50 minutes de route. Si l'éloignement est trop grand, des solutions alternatives, hôtelières notamment, sont suggérées par la Cour des comptes. Qu'en pensez-vous, madame la ministre ?

La Cour des comptes propose de doter les maternités de niveau 3 d'un service de réanimation adulte.

Une évaluation médico-économique des maternités et des maisons de naissance est nécessaire si nous voulons sortir d'une gestion au fil de l'eau.

La Cour relève que la structuration en trois niveaux n'est pas toujours cohérente sur le territoire. Les niveaux sont-ils pertinents ? Ne faut-il pas raisonner en fonction des besoins des territoires plutôt que des structures existantes ? La Cour souligne aussi le sous-financement des maternités qui ne peuvent atteindre un équilibre qu'à partir de 1 100-1 200 accouchements par an et la déconnection entre les tarifs et les coûts. Il convient ainsi de s'interroger sur la tarification à l'activité (T2A) et sur le poids économique des normes, qu'il faudrait compenser. Que propose le gouvernement ?

Une majorité d'entre nous pourrait accepter la réduction de la durée de séjour à condition qu'elle s'accompagne d'une prise en charge à domicile.

Reste enfin pendante la question du réseau de périnatalité en lien avec la PMI ; elle sera abordée dans le projet de loi Santé. La cour recommande enfin une attention particulière aux populations précaires, au sein desquelles le suivi des grossesses est insuffisant.

Il est de notre devoir d'agir. Tous les jours, des professionnels de santé accompagnent au mieux de leurs capacités les mères et leurs bébés. À nous de leur garantir les meilleures conditions d'exercice possible dans les maternités. C'est un défi qui doit nous réunir. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Laurence Cohen .  - Ce débat devrait nous offrir une vision exhaustive et détaillée de la situation de nos territoires. L'étude de la Cour des comptes apparaît comme un bilan comptable à charge, traquant la dépense, pour tout dire partiale. Pourquoi vouloir orienter vers des structures très techniques assurant une prise en charge hautement médicalisée - alors que des luttes ont sauvé des établissements de niveau 1, dont 150 ont disparu entre 2002 et 2012 ? La Cour des comptes suggère de relever le seuil de 300 accouchements et de fermer ceux qui ne peuvent se mettre aux normes, faute de moyens. Comment pourraient-ils y arriver ?

Nous avons été plusieurs en commission à réagir aux données avancées par le rapport qui ne dit mot des femmes, si nombreuses à accoucher sur les routes, dans les camions de pompiers ou aux urgences. La France est dix-septième en termes de mortalité néonatale, alors qu'elle occupait précédemment la sixième place. Comment n'y voir point de lien avec la fermeture d'établissements ? Le rapport de la Cour ne détaille pas le nombre d'incidents en fonction de la taille des établissements. Il est donc difficile d'en tirer des conclusions.

Je ne nie pas les problèmes dans certaines petites maternités, mais faut-il s'entêter dans une politique de fermeture et de regroupement aux résultats catastrophiques ? Ne faut-il pas recruter ? Anticiper les départs à la retraite ? Comment remédier au sous-financement chronique des maternités ? La T2A est inadéquate pour les maternités. Nous sommes très critiques depuis sa création à ce mode de financement incompatible avec toute activité de soins. Monsieur le président Milon, vous étiez corapporteur en 2012 avec Jacky Le Menn de la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) et plaidiez pour un financement mixte, comme le fait la Cour. Madame la ministre, nous attendons des précisions à ce sujet.

Nous déplorons qu'un moratoire ne soit même pas évoqué. Chaque sénatrice et sénateur défend sa maternité, sur son territoire, mais se conforme ailleurs à la logique de réduction des dépenses, qui entraîne des cas dramatiques. On prévoit de fermer la maternité de Bégin, pendant que les patientes et les élus des Lilas attendent une solution pérenne après quatre ans de lutte. Il faut être un homme pour proposer de réduire la durée de séjour...

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales.  - Oh !

Mme Laurence Cohen.  - On ne réduit pas impunément les dépenses de santé. Il faut trouver de nouvelles recettes, ce que nous nous employons à proposer PLFSS après PLFSS. Les choix politiques de ces dernières années ont été mauvais. Il faut en changer sans attendre. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. François Commeinhes applaudit aussi)

Mme Françoise Laborde .  - L'accouchement devient un acte médical au XIXe siècle. La mortalité maternelle et infantile a fortement diminué grâce au suivi de la grossesse, de l'accouchement et de l'après-naissance.

Les sages de la rue Cambon recommanderaient la fermeture de certains établissements dangereux ou trop coûteux - ils seraient quatre en Midi-Pyrénées. J'emploie à dessein le conditionnel car ils n'ont pas ce pouvoir... Malgré la réorganisation profonde de l'offre de soins et la fermeture de nombreux établissements, notre pays, champion de la natalité, continue à connaître des résultats médiocres, avec un des taux les plus élevés de mortalité néonatale en Europe.

Si la sécurité doit être améliorée, je ne partage pas la vision comptable de le Cour des comptes. La fermeture des maternités inquiète fortement le monde rural et peut décourager les familles de s'y installer, aggravant ainsi la désertification. Une maternité, ce n'est pas seulement un lieu de naissance, c'est un partenaire au coeur du réseau de soins, un lieu de suivi, de prévention, d'accompagnement.

Aucune étude épidémiologique n'a été menée sur le lien entre périnatalité et éloignement des parturientes de la maternité. Je me félicite que la Cour des comptes recommande une telle étude. Elle rappelle à juste titre que le risque de naissances en dehors de l'hôpital est deux fois plus élevé pour les femmes vivant à trente kilomètres ou plus de la maternité la plus proche que pour celles vivant à moins de cinq kilomètres. Cela paraît tautologique, mais il est bon de le souligner...

Le président de la République s'était engagé à ce qu'aucun Français ne soit à moins de trente minutes des soins d'urgence.

Mme Catherine Procaccia.  - Il a tant promis !

Mme Françoise Laborde.  - Pour le Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France, le vrai problème concerne la pénurie de personnel qualifié. Peut-être faudrait-il envisager, madame la ministre, d'augmenter le numerus clausus, améliorer la formation, inciter les professionnels à intégrer ces structures.

Madame la ministre, nous attendons vos réponses. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. Stéphane Ravier .  - L'importance du service public est rappelée par le directeur général d'une ARS, M. Lannelongue, pour lequel le rapport « témoigne de la capacité de la puissance publique à promouvoir des améliorations significatives dans l'organisation des soins, contrairement à l'idée qui veut que seules les actions de marché, par les prix, soient efficaces. » L'accueil de la vie relève du service public - et service public ne veut pas dire service mal géré. S'il faut rationaliser, le rapport pointe aussi les limites de la règle abstraite qui lie le bon fonctionnement d'un établissement au nombre d'accouchements. D'autant que des dérogations sont nécessaires, donc possibles, pour assurer un maillage équitable de nos territoires. La rentabilité ne saurait être l'alpha et l'oméga de l'accueil de la vie ; d'ailleurs, si on suit la règle à la lettre, les territoires déjà délaissés en feront les frais.

Selon la directrice générale de l'ARS du Languedoc-Roussillon, « la particulière fragilité des populations précaires sont à l'origine de ces résultats décevants ». On voit derrière ce mot de précarité les conséquences de l'immigration massive de populations extra-européennes - nous avons un absurde droit du sol... (Protestations) Quand il a constaté ce qui se passait à Mayotte, même François Baroin avait parlé de revenir sur ce droit ; mais il est vite revenu sur cet accès de bon sens passager...

M. Durrleman, président de chambre à la Cour des comptes, note que « si la démographie des professions médicales de santé du secteur est élevée, c'est parce que s'y concentre, plus que dans d'autres spécialités, l'apport de médecins à diplôme étranger ». Dans ce domaine, nous devons réexaminer les choses sans dogmatisme. Nous payons cher pour assurer aux étudiants des cursus de qualité ; ils doivent être suffisamment nombreux à exercer en France pour satisfaire les besoins des populations. Sur quels leviers agir ? Obligations, avantages ? Une réflexion est indispensable.

Je souhaite enfin que soit encouragé l'accompagnement associatif des grossesses. Trop de femmes enceintes se retrouvent en situation d'isolement ou de conflit du fait de leur grossesse, notamment parmi les couches les plus pauvres. L'État doit soutenir les associations qui les aident. Plutôt que de sacraliser l'avortement, il faut agir sur ses causes, souvent l'abandon des femmes enceintes par notre société individualiste.

Si nous votions un droit fondamental pour les femmes à être bien accompagnées durant leur grossesse, nous aurions un parlement humaniste, fidèle à sa mission qui est de protéger les plus faibles. (M. David Rachline applaudit)

M. Philippe Bonnecarrère.  - Et l'homme n'est pas une femme comme les autres !

Mme Catherine Génisson .  - Ce débat est bienvenu, d'autant que la quasi-totalité des 820 000 naissances de 2014 ont eu lieu en maternité. Le rapport de la Cour des comptes est très intéressant. J'entends les appels à la rationalisation, mais l'exigence qualitative doit toujours primer en la matière, c'est elle qui doit définir le juste niveau des dépenses sociales et sanitaires ; il ne saurait être question de raisonner uniquement en termes d'économies à réaliser. Quand j'entends parler de 3 milliards d'économies à l'hôpital public, je m'interroge... La Cour devrait aussi évoquer le secteur hospitalier privé.

L'offre de soins en maternité a été profondément restructurée depuis 2002, les fermetures affectant en priorité les plus petites maternités. Nous entrons là dans le coeur du débat. Par expérience professionnelle, je sais qu'en dessous d'un certain seuil, une maternité ne peut assurer des soins de qualité. Le plus souvent, une naissance est un évènement heureux. Mais il faut se plier à une logique sécuritaire, car un accouchement peut très vite mettre en danger deux vies humaines. Accoucher dans un camion de pompiers n'offre pas des garanties suffisantes à cet égard. La sécurité est d'autant plus importante que les résultats de la France en la matière sont insuffisants. Il convient de réformer sans dogmatisme. Les maternités de proximité peuvent se transformer en centres avancés de consultation, de suivi ou d'accompagnement.

Je suis très favorable à la première des deux recommandations de la Cour des comptes ; réaliser une étude épidémiologique sur l'éloignement des parturientes. Ainsi, nous y verrons plus clair, ce qui ne veut absolument pas dire qu'il ne faut pas réformer.

Il est souhaitable de s'appuyer sur les réseaux de périnatalité en s'appuyant sur le secteur libéral. Des sages-femmes peuvent se reconvertir de la pratique hospitalière à la pratique libérale. Si je partage globalement les observations de la Cour, certaines recommandations me laissent dubitative. Est-il concevable, en créant des services de réanimation pour adultes, de faire coexister des jeunes femmes venant accoucher avec des adultes porteurs de pathologies infectieuses ?

Je partage la recommandation de la Cour sur le suivi des populations précaires. La région Nord-Pas-de-Calais a des indicateurs de mortalité périnatale infantile nettement inférieurs à la moyenne métropolitaine grâce à la structuration en réseau et la place du secteur public. Il n'y a plus dans notre région de petites maternités. La Cour a noté que l'offre de soins y correspond aux besoins de la population. C'est le résultat d'un travail en commun entre responsables politiques et professionnels, certains libéraux inclus.

Il ne saurait être question de privilégier une vision purement comptable. Je sais pouvoir compter, madame la ministre, sur votre engagement et votre détermination. (Applaudissements sur les bancs socialistes et RDSE)

M. Didier Guillaume.  - Très bien !

Mme Aline Archimbaud .  - Le débat est ancien entre proximité et sécurité. L'équilibre entre les deux n'a rien d'évident. Il exige une vigilance permanente. Si le décret de 1998 est assez largement accepté aujourd'hui, il faut continuer à trouver des solutions d'accueil, y compris temporaires, les plus sécurisées possibles. Il convient de coordonner des réseaux variés.

La Cour affirme que le suivi des populations précaires est mal assuré. En Ile-de-France, la précarité des femmes enceintes, notamment en Seine-Saint-Denis, entraîne une surmortalité, qu'elle explique aux deux tiers.

Dans les départements d'outre-mer, que je suis de près en tant que membre de la délégation sénatoriale à l'outre-mer, la situation est très préoccupante, à Mayotte en particulier. En Guyane, aussi. La maternité de Saint-Laurent du Maroni est très vétuste, et la mortalité infantile atteint 4,1 à 9,1 ? alors qu'elle est de 3,3 ? en métropole.

La Cour des comptes demande ainsi de renforcer le suivi des femmes précaires.

Il faut aussi se préoccuper de la santé environnementale. Certains hôpitaux sont en train de réévaluer la place des PVC, des phtalates, dans les maternités. Le DEHP, classé cancérogène, entre dans plus de 50 % des plastiques à usage médical. Les nouveau-nés reçoivent des doses pouvant atteindre jusqu'à vingt fois la norme journalière. Ce sont des points à suivre attentivement. (Applaudissements sur les bancs écologistes et CRC ; M. Didier Guillaume applaudit aussi)

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président

Mme Élisabeth Doineau .  - La France est l'un des pays les plus natalistes de l'Union européenne, grâce à sa politique familiale. L'objectif nataliste répond aujourd'hui à un enjeu économique, ne serait-ce que pour équilibrer notre système de retraites par répartition. Les maternités ont la lourde tâche de répondre aux attentes toujours plus fortes de notre société, de nos territoires et de leurs habitants.

Je salue le travail de la commission des affaires sociales et de Jean-Marie Vanlerenberghe, ainsi que celui de la Cour des comptes. Pris pour lutter contre la mortalité périnatale, le décret du 9 octobre 1998 n'a pas donné de résultats à la hauteur des attentes. La France est au dix-septième rang en Europe pour la mortalité néonatale. Le secteur s'est profondément restructuré. Le nombre de maternités a chuté de 20 % entre 2002 et 2012. En quarante ans, les deux tiers des maternités ont disparu - les premières touchées ont été les plus petites.

Il faut éviter une recomposition erratique. Si le temps de trajet médian est resté stable, je n'ignore pas les disparités qui subsistent ; il dépasse parfois trente minutes, la sécurité des femmes et des enfants est en jeu. Nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'une étude épidémiologique.

Rappelons aussi les problèmes de recrutement des gynécologues. Leur nombre a chuté de 30 % entre 2004 et 2013 et leur moyenne d'âge est de 60 ans. La spécialité de gynécologie obstétrique est de moins en moins choisie, en raison de la pénibilité du métier, mais aussi du risque médico-légal qu'il fait peser sur ceux qui l'exerce.

La Commission nationale de la défense de la santé de l'enfant créée en 2009 pourrait apporter son expertise pour développer le suivi des établissements.

La situation financière de la plupart des maternités est difficile. Il faut rationaliser tout en améliorant la sécurité, faire émerger un nouveau modèle économique. La Fédération hospitalière de France (FHF) peut appuyer le mouvement, comme le préconise la Cour des comptes.

Réfléchissons au développement de la coopération entre PMI et maternités. Il est temps de mettre tous les acteurs autour d'une table, pour dessiner un système cohérent. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC et sur quelques bancs socialistes)

Mme Catherine Procaccia .  - Je l'ai dit lorsque la Cour a déposé son rapport : on ne parle des maternités qu'en cas d'accident tragique, alors que l'immense majorité des accouchements se déroule heureusement.

On nous annonce la fermeture très prochaine, fin juin, du service maternité de Bégin. C'est du déjà-vu ! La raison : la restructuration du service de santé des armées, qui doit se recentrer sur le soutien aux forces militaires. Mais 80 % des parturientes qui y sont accueillies sont civiles. C'est une maternité flambant neuve, le seul hôpital militaire disposant d'un pôle mère-enfant. Un mauvais sort est aussi fait aux femmes militaires. Madame la ministre, à quelques jours du 8 mars, il faut alerter votre collègue de la défense. La fermeture de la seule maternité des armées contredit la volonté de féminisation affichée...

Mme Laurence Cohen.  - Très bien !

Mme Catherine Procaccia.  - L'ARS d'Île-de-France a-t-elle été informée en amont ? Comment réorientera-t-elle les futures mères qui ne veulent pas accoucher dans une usine à bébés hyper-médicalisée ? Bégin était une maternité de niveau 1. J'entends parler d'une réorientation vers l'hôpital Tenon à Paris, loin d'être à trente minutes à toute heure. L'autre maternité accessible est à Saint-Maurice. J'estime que patients et personnels méritent plus d'attention.

J'aimerais savoir si une procédure existe pour veiller à l'accompagnement des patientes quand une maternité ferme aussi rapidement, sans oublier le personnel médical. (M. Maurice Antiste applaudit)

Mme Anne-Catherine Loisier .  - Je me réjouis de la tenue de ce débat et de la qualité du travail de la commission des affaires sociales et de la Cour. La nouvelle sénatrice que je suis appréhendait une approche purement comptable. Heureusement, il n'en est rien. Les Françaises sont encore nombreuses à vouloir enfanter et il faut s'en féliciter. Fort heureusement, l'immense majorité des accouchements se passent bien.

La France a la grande chance d'avoir enregistré 811 000 naissances en 2013, soit plus de deux enfants par femme. Il est primordial d'accompagner les femmes enceintes. Le décret de 1998 s'imposait : mettons à présent l'accent sur la sécurité des parturientes.

Le rapport de la Cour des comptes met en évidence l'intérêt des centres périnataux et des réseaux de proximité. La Bourgogne affiche à présent des résultats exemplaires en termes de mortalité infantile. Le réseau périnatal s'est déployé depuis 2012 ; il organise des échanges de bonnes pratiques. La prise en charge des parturientes est organisée dans les plus brefs délais. Ces réseaux sont souples, adaptés aux besoins, économes. J'invite Mme la ministre à les déployer davantage.

La présence des professionnels de santé sur le terrain est un autre problème. Ils désertent nos campagnes. Les médecins et sages-femmes sont nombreux, mais mal répartis sur le territoire. Les premiers sont difficiles à recruter dans les maternités, ce qui risque d'entraîner la fermeture de certaines d'entre elles.

Administration, professionnels et élus doivent travailler ensemble pour mutualiser les services, recruter en fonction des besoins, accompagner au mieux les patients. Il faut éviter les fermetures mal anticipées qui entraîneraient une recomposition hâtive et subie de l'offre de soins, ce qui ne ferait qu'aggraver les dysfonctionnements.

Les réseaux de proximité, les dynamiques locales de partenariats public-privé, sont de nature à réduire la durée du séjour en maternité et à répondre aux attentes de nos concitoyennes.

Je veux saluer pour finir le sens du service et le dévouement, l'abnégation même, du personnel des maternités de notre pays. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Corinne Imbert .  - Je remercie le président Milon et la commission des affaires sociales pour cette initiative. Il s'agit d'un sujet important en matière de santé et d'aménagement du territoire. Le rapporteur Vanlerenberghe a pointé les problèmes de répartition des maternités en France ; la Cour des comptes souligne que nous ne sommes qu'au 17e rang européen en termes de mortalité néonatale : nous ne pouvons nous en satisfaire.

Le décret de 1998 a fixé les règles qui ont conduit à la fermeture d'un certain nombre d'établissements, avec un seuil de 300 accouchements par an. La maternité de Saint-Jean-d'Angély, qui en effectue un nombre légèrement supérieur, serait menacée. Le service de chirurgie de nuit devait fermer... Nous avons besoin d'une réflexion globale sur l'offre de soins. La situation en région Poitou-Charentes est détaillée dans le rapport de M. Vanlerenberghe, avec un CHU excentré à Poitiers. L'équation de la juste répartition territoriale est plus difficile à résoudre dans un contexte financier contraint. La part des accouchements dans le privé est passée de 37 % à 24 %, car l'accouchement est peu rémunérateur au regard de la T2A. La Cour des comptes pointe le sous-financement de l'acte d'accouchement.

Les politiques de rationalisation des budgets des hôpitaux sont légitimes, mais ne doivent pas se faire au détriment des maternités. Abaisser la durée du séjour en maternité risque d'avoir un impact sur les services de PMI - c'est un nouveau glissement du sanitaire vers le social, qui sera à la charge des départements. Des états généraux sur cette question s'imposent afin d'approfondir la réflexion. (Applaudissements à droite)

M. Didier Guillaume .  - Nous avons la chance d'avoir un des premiers taux de fécondité en Europe : plus de 800 000 naissances chaque année assurent l'avenir de notre pays et notre stabilité sociale. C'est le résultat d'une politique familiale ambitieuse, et d'un bon maillage territorial des services publics.

Notre réseau de maternités est au coeur de l'avenir de notre pays. Il doit avoir comme double objectif sécurité et proximité. C'est la politique que vous menez depuis 2012, madame la ministre ; avec votre pacte, vous avez pris des engagements forts. La proximité est préservée ; la sécurité a été renforcée depuis vingt ans, et particulièrement ces dernières années. Mais nous ne pouvons pas nous satisfaire de notre dix-septième rang européen en termes de mortalité néonatale.

Je regrette que la Cour des comptes ne commente pas votre politique de lutte contre les déserts médicaux. Le choix de l'incitation des médecins a été fait, il est assumé, c'est la bonne solution. Les déserts médicaux ne peuvent toutefois se résorber sans modification des conditions de travail : c'est l'objet des mille maisons de santé que vous avez lancées. Pour toutes ces actions, nous vous soutenons.

Les soins et la prévention sont des variables d'ajustement privilégiées du budget des plus modestes. La généralisation du tiers payant, contenue dans votre projet de loi Santé, est une mesure forte et indispensable.

La proximité n'est pas un slogan. Depuis plus de dix ans, les services publics ont fui les territoires ruraux. Les écoles, tribunaux, bureaux de poste, gendarmeries sont partis ; si les maternités disparaissent aussi, le sentiment d'abandon deviendra insoutenable.

Un mot sur la maternité de Die dans la Drôme, que vous connaissez bien, madame la ministre. Elle est située en zone de montagne, à 70 kilomètres du centre hospitalier de Valence, soit environ 1 h 15 de route, à quoi il faut ajouter 45 minutes si l'on vient du Haut Diois. On ne peut pas laisser les 12 000 habitants de ce bassin à une ou deux heures de la première maternité ! Le sursis que vous avez accordé à cette maternité a été accueilli avec soulagement par la population. Pérennisons les maternités des territoires isolés, même si elles réalisent moins de 300 accouchements par an.

Dépassons les appréciations purement comptables de la Cour des comptes. Cette logique comptable doit s'accompagner d'une logique de sécurité sanitaire. Il y va de la survie des petites maternités, des territoires, et des préoccupations de nos concitoyens, trop nombreux à ne pouvoir se soigner, surtout en zone de montagne. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Daniel Chasseing .  - Les maternités nous concernent tous, à commencer par les élus de territoires ruraux et hyper-ruraux. J'ai conscience de la réalité budgétaire, et du sous-financement des maternités, dont certaines ne peuvent assurer 1 200 accouchements par an. Médecin, je sais la nécessité pour la sécurité des maternités de disposer d'équipes pluridisciplinaires. Les maternités sont un service public essentiel car y naissent ceux qui auront la responsabilité d'animer les territoires.

La maternité d'Ussel, en Corrèze, travaille en étroite relation avec celles de Tulle et de Limoges, dont relèvent déjà les grossesses pathologiques. Si elle devait disparaître, on mettrait les parturientes en danger car elles seraient à près d'une heure des établissements les plus proches. Je m'en suis entretenu avec le directeur de l'ARS, qui en est convenu.

La Cour des comptes elle-même indique que les maternités des zones isolées doivent recevoir les moyens de fonctionner de manière mutualisée avec les plus grands établissements.

Madame la ministre, je vous ai déjà interrogée à ce sujet, sans entendre une réponse claire ; pouvez-vous m'apporter une réponse précise : la maternité d'Ussel est-elle condamnée à plus ou moins brève échéance ?

M. Maurice Antiste .  - Madame la ministre, je connais votre engagement pour la santé des femmes. Je remercie la commission des affaires sociales pour son initiative.

La recomposition de l'offre de soins est indispensable, au regard du constat de la situation financière des établissements. C'est d'autant plus vrai des maternités. Une des trois de la Martinique, celle du Lamentin, a dû être fermée en 2010. Heureusement, nous avons encore une offre de soins hospitalière graduée et assez complète avec aussi un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal et un centre agréé pour l'aide médicale à la procréation.

Le taux de mortalité infantile reste toutefois, à 8,7 ?, le plus élevé de France - après la Guyane, et deux fois supérieur à la moyenne nationale. Tous les indicateurs de mortalité autour de la naissance sont élevés et en augmentation sans qu'on puisse en déterminer l'origine, ni la fiabilité statistique. En 2010, dans le service de néonatologie du Centre hospitalier universitaire de Martinique, 13 décès sur 23 concernaient des prématurés de moins de 32 semaines, et 8 de moins de 28 semaines. Les complications infectieuses jouent un rôle important dans ces décès, infections nosocomiales ou infections qui ont déclenché l'accouchement.

Un précédent ministre de l'outre-mer avait fixé comme objectif la réduction de moitié de l'écart de décès avant un an entre la Martinique et la métropole. Cet objectif, reconduit à ce jour, n'est toujours pas atteint. Le taux de naissances prématurées est deux à quatre fois plus élevé qu'en métropole ; nous manquons de gynécologues-obstétriciens et les maternités privées ne prennent pas en charge les grossesses à risque.

En 2015, les urgences pédiatriques de nuit devront fermer, de même que le service de néonatalogie. Résultat : la maternité passera de type 2 au type 1, évinçant les patientes présentant des grossesses à risque, qui ne seront plus prises en charge que par la maison de la femme et de l'enfant.

Grossesses de mineures, bébés prématurés ou de faible poids, mortalité néonatale, dans tous ces domaines, la Martinique est mal classée. Promouvoir l'éducation à la sexualité à l'école et en dehors, renforcer la prévention, l'action de l'Agence régionale de santé de Martinique est forte. Il faut la soutenir. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Vasselle .  - Nous pourrions conclure à ce stade que les interventions liminaires du président Milon et du rapporteur général auraient suffi : ils ont dit l'essentiel, en quinze minutes. (Protestations sur les bancs CRC) Mais cela aurait privé nos collègues de la possibilité d'interpeller chacun le gouvernement sur telle ou telle maternité de leur département...

Celles réalisant moins de 300 accouchements par an pourront-elles être maintenues, sans que cela présente un risque sanitaire ? À la condition, dit la Cour des comptes, que des moyens humains et techniques soient mobilisés pour assurer la sécurité sanitaire. Quelle est l'intention du gouvernement ?

Quel est le bon volume d'activité pour assurer viabilité économique et sécurité sanitaire ? Le seuil de 300 accouchements est-il le bon ? Dans le secteur privé, on ne trouve pas de maternité viable à moins de 1 000 accouchements... De quel réseau de proximité devons-nous nous doter ?

La sécurité sanitaire ne dépend-elle pas aussi de l'adossement des maternités à des services hospitaliers disposant de plateaux techniques ? Les règles de tarification des actes sont-elles adaptées ? Les tarifs permettent-ils le maintien d'un réseau ? La Haute Autorité de santé ne pourrait-elle être saisie pour évaluer les conditions humaines, médicales, techniques de fermeture des maternités ?

La Haute Autorité de santé ne devrait-elle pas être saisie afin de définir des critères objectifs à partir desquels on déciderait du maintien ou de la fermeture d'une maternité en tenant compte de ce que le rapporteur général appelle le « médico-économique ».

La France dispose-t-elle des ressources humaines suffisantes, en qualité et en quantité, pour assurer un réseau de proximité de qualité incontestable ?

M. Didier Guillaume.  - Autant tout fermer !

M. Alain Vasselle.  - Où en sommes-nous de l'évaluation de l'action des ARS en matière de mutualisation des moyens et des ressources ?

En conclusion, j'invite le gouvernement, comme le fait le rapporteur, à élaborer une stratégie à moyen terme de répartition des maternités. Nous attendons avec intérêt ses réponses. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Nicole Duranton .  - Je veux d'abord saluer l'initiative de la présidente Annie David, qui avait sollicité la Cour des comptes, et celle du président Milon de demander notre débat d'aujourd'hui.

Le secteur dont nous parlons n'a cessé d'évoluer ces quinze dernières années. Nous attendons d'abord un vrai bilan. La Cour des comptes a mené un travail de qualité. Premier constat : la France occupe le dix-septième rang européen pour la mortalité néonatale, résultat médiocre pour un pays qui dépense autant pour la santé.

La démographie médicale en Haute-Normandie, dans l'Eure en particulier, est problématique : de sept maternités en 2000, nous sommes passés à quatre. La Haute-Normandie est la vingtième région en termes de démographie médicale : on y compte 15 gynécologues médicaux pour 100 000 femmes, quand la moyenne nationale est de 21.

En 2013, le rapport Maurey-Fichet avait déjà alerté le gouvernement sur la situation dramatique de notre département. La situation ne s'est pas améliorée, elle a même empiré, ce qui est inacceptable. Le pacte santé territoire que vous avez lancé en 2012 n'a pas suffi. Il est temps de mettre en place des mesures volontaristes. Personne ne souhaite que les maternités de Haute-Normandie restent dans cette inquiétante situation. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes .  - La question des maternités est un sujet qui passionne l'opinion, car elle renvoie à des questions d'une grande sensibilité. Vos interventions l'ont montré, soucieux que vous avez été, tous, de défendre vos territoires.

Chaque année, 800 000 bébés naissent en France. C'est considérable. Ce sont d'abord 800 000 aventures humaines, et des décennies d'histoires familiales se jouent dans nos maternités. Ces dernières suscitent un attachement réel : une maternité, ce n'est pas que le nom d'une ville sur une pièce d'identité passeport, mais un établissement, une équipe soignante. Comme on se rappelle la maîtresse que l'on a connue écolier, on se souvient de l'endroit où l'on a accouché, où sont nés ses enfants. Les maternités forgent des souvenirs.

La carte des maternités n'a plus rien à voir avec celles des années 1960. On ne saurait en conclure que la prise en charge s'est dégradée. La définition d'un seuil minimum et la division des maternités en trois catégories a été un progrès, compatible avec le maintien d'un principe de proximité.

La sécurité n'a pas non plus été oubliée. C'est elle qui fonde la confiance nécessaire dans notre système de soins. Les Françaises et les Français, en grande majorité, ont confiance en nos maternités. Cette confiance ne se décrète pas. Il faut l'étayer. Annie David a eu l'heureuse initiative de commander un rapport à la Cour des comptes, rapport beaucoup plus subtil que ce que certains en ont dit.

La France a, certes, beaucoup de progrès à réaliser. Les indicateurs sont contestables sur leur méthode, mais il reste que nous devons agir. Les médias se sont emparés de quelques cas, très localisés ; ces situations méritent une attention toute particulière, mais ne sont pas à l'origine de la médiocrité de certains résultats. Le temps de trajet et l'insuffisante prévention sont nos principaux axes de travail.

L'inégalité sociale est flagrante : la part des femmes ayant eu moins de sept visites médicales durant leur grossesse est inversement proportionnelle au niveau de diplôme.

La prévention, c'est aussi la lutte contre le tabagisme ; or 17 % de nos concitoyennes enceintes continuent de fumer alors qu'elles approchent du terme. C'est l'un des niveaux les plus élevés en Europe. J'ai annoncé la création d'un nouveau pictogramme sur les paquets de cigarettes.

L'obésité et le surpoids constituent un autre facteur de risque majeur. L'étiquetage des aliments doit évoluer pour tenir compte des impératifs de prévention sur les risques pesant sur les enfants. Le futur projet de loi sur la santé abordera cette question.

Certains ont mentionné le pacte santé territoire. Médecine libérale et hôpitaux de proximité vont de pair. C'est la politique que je mène. D'aucuns à droite semblent favorables à une coercition des médecins libéraux ; ce n'est pas ma position.

Les réseaux régionaux de périnatalité sont en effet des acteurs incontournables. Je donnerai bientôt aux directeurs généraux des ARS la consigne de les consolider. Les objectifs fixés aux ARS seront suivis au plus près.

La mise en place des réseaux de soins répond à un enjeu social. Les femmes en situation de précarité sont les plus exposées aux risques de complications. Toutes doivent être accompagnées au cours de leur grossesse. Nous devons favoriser les consultations avant même le début de la grossesse pour dépister les facteurs de risque, ainsi que pendant la grossesse. Dans certains départements, on devine lesquels, il y a des Françaises qui arrivent pour accoucher sans avoir vu au préalable un seul professionnel ! Quelle sera la santé de leur enfant, la leur ?

Nous devons mieux organiser l'accompagnement des Françaises après leur retour à domicile, diversifier l'offre de prise en charge des naissances. Les maisons de naissance seront prochainement expérimentées.

Treize maternités - sur 544 - ne dépasseraient pas le seuil des 300 accouchements ; elles sont suivies attentivement, et pourront poursuivre leur activité dès lors qu'elles respectent les règles de sécurité.

Proximité et sécurité sont deux exigences essentielles. On ne peut les opposer. C'est à l'aune de ces deux critères que les ARS ont pris les décisions qui s'imposaient.

En 2016, nous disposerons des données nécessaires pour évaluer l'impact de l'éloignement des maternités sur les résultats en termes de néonatalité. Mais, à nouveau, compte tenu des facteurs environnementaux, je ne crois pas que ce soit un facteur déterminant.

La Cour des comptes fait des préconisations sur la présence de personnels qualifiés : sages-femmes, anesthésistes, obstétriciens, pédiatres sont bien évidemment indispensables. Or leur recrutement est parfois difficile. Je serai très attentive aux conclusions du rapport de M. Le Menn.

La solution n'est pas dans le maintien à tout prix d'une maternité mais dans de nouvelles réponses, comme les centres périnataux de proximité qui s'inscrivent efficacement dans les réseaux de santé périnataux.

La création d'un statut médical de sage-femme des hôpitaux a été une grande avancée, je le rappelle.

Parfois, la distance elle-même peut faire peser un risque sur les accouchements - même si peu de Françaises accouchent sur la route. 17 minutes, c'est une moyenne et pour cette raison certains établissements sont maintenus. Dès lors que la sécurité est assurée et qu'il y a une exigence territoriale, le gouvernement soutient les établissements de proximité. La présence d'établissements de santé dans nos territoires est un facteur d'égalité et de sécurité - je le sais en tant qu'élue locale d'un territoire à la fois urbain et rural. Les groupements hospitaliers de territoire renforceront les coopérations entre établissements.

J'ai mis en place un soutien financier aux établissements isolés pour compléter la tarification à l'activité : 34 maternités en ont bénéficié en 2014.

Notre système de santé est envié dans le monde entier. Ayons confiance. En matière de naissance, nous pouvons et devons encore progresser. C'est l'ambition que je porte, et qui sera inscrite dans le futur projet de loi sur la santé : qualité de l'offre de soins, accessibilité, proximité et sécurité. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Didier Guillaume.  - Très bien !

présidence de M. Claude Bérit-Débat, vice-président