Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

Candidatures à une éventuelle CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, actuellement en cours d'examen.

Cette liste a été publiée conformément à l'article 12, alinéa 4, du Règlement et sera ratifiée si aucune opposition n'est faite dans le délai d'une heure.

Discussion des articles

ARTICLE LIMINAIRE

Mme Laurence Cohen .  - Cet article dit liminaire est une nouveauté, issue de la loi du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Bien qu'austère, il met en lumière la dégradation du déficit public effectif -alors que le solde conjoncturel s'améliore. Or cette amélioration se fait au détriment des salariés et des retraités, à commencer par les femmes et les plus précaires. Les mesures d'austérité mises en oeuvre depuis deux ans produisent leurs effets. Faut-il s'en réjouir ? Comme vous, nous souhaitons que les comptes sociaux reviennent à l'équilibre, ne serait-ce que pour sortir la sécurité sociale de la nasse des marchés financiers. Ce que nous contestons, c'est le choix de geler les prestations sociales et les pensions et de réduire les dépenses, quitte à asphyxier les salariés privés d'emploi par l'allongement du délai de carence. Vous faites le choix de réduire massivement les ressources de la sécurité sociale -ce qui aggravera le déficit structurel. Sans compter que vos prévisions de croissance sont bien trop optimistes. Nous voterons contre cet article qui traduit une politique d'austérité dangereuse et inefficace.

M. le président.  - Amendement n°81 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano et Vall.

Supprimer cet article.

M. Gilbert Barbier.  - Cet article liminaire, obligatoire, présente les prévisions de solde structurel et de solde effectif des administrations publiques pour l'année 2014, manifestement erronées. On sait que l'année sera difficile et qu'en toute hypothèse, il ne sera guère possible d'obtenir l'amélioration prévue à cet article.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Contre l'avis de son rapporteur général, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'amendement n°81 rectifié. Pourtant, supprimer l'article liminaire n'aurait pas d'effet sur les équilibres du projet de loi. Si les hypothèses sont insincères, mieux vaut modifier l'article que le supprimer.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.  - Cet article a été validé par le Haut conseil des finances publiques. En outre, il est obligatoire : sa suppression entraînerait potentiellement la censure de l'ensemble du texte. Ce serait mal commencer cette discussion. Avis défavorable.

À la demande du groupe RDSE, l'amendement n°81 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°225 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 204
Contre 138

Le Sénat a adopté ; l'article liminaire est supprimé.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°39 rectifié, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Avant l'article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Au chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est rétabli une section 1 dans la rédaction suivante :

« Section 1

« Taxe spéciale sur les édulcorants de synthèse

« Art. 554 B.  -  I.  -  Il est institué une taxe spéciale sur l'aspartame, codé E951 dans la classification européenne des additifs alimentaires, effectivement destiné, en l'état ou après incorporation dans tous produits, à l'alimentation humaine.

« II.  -  Le taux de la taxe additionnelle est fixé par kilogramme à 30 € en 2014. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2015. À cet effet, les taux de la taxe sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l'année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.

« III.  -  1. La contribution est due à raison de l'aspartame alimentaire ou des produits alimentaires en incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.

« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l'alimentation de leurs clients, de l'aspartame.

« IV.  -  Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d'aspartame entrant dans leur composition.

« V.  -  L'aspartame ou les produits alimentaires en incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l'objet d'une livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou d'une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l'Union européenne en application de l'article 258 A, ne sont pas soumis à la taxe spéciale.

« VI.  -  La taxe spéciale est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires.

« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d'ordre comptable notamment, nécessaires pour que la taxe spéciale ne frappe que l'aspartame effectivement destiné à l'alimentation humaine, pour qu'elle ne soit perçue qu'une seule fois, et pour qu'elle ne soit pas supportée en cas d'exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l'Union européenne en application de l'article 258  A. »

II.  -  Après le h de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le produit de la taxe mentionnée à l'article 554 B du code général des impôts est affecté à la branche mentionnée au 1° de l'article L. 200-2 du présent code. »

Mme Aline Archimbaud.  - Présent dans des milliers de produits alimentaires de consommation courante, l'aspartame est l'édulcorant intense le plus utilisé au monde. Dès son apparition, dans les années 60 aux États-Unis, des doutes sont apparus sur sa nocivité et sa mise sur le marché a été d'emblée entachée de conflits d'intérêts. En 1985, Monsanto a racheté l'entreprise possédant le brevet.

Même à faible dose, l'aspartame augmente les risques de naissance avant terme. En outre, sa consommation entraînerait un risque accru de survenue de différents cancers.

Cet amendement crée une taxe additionnelle sur l'aspartame, qu'il conviendra d'augmenter progressivement chaque année. Le premier objectif est d'inciter les industriels à substituer à l'aspartame d'autres édulcorants, naturels ou de synthèse, en supprimant son avantage concurrentiel, qui ne repose que sur l'externalisation du coût des dégâts sanitaires qu'il occasionne. Les industriels auront ainsi le temps de s'adapter. Les importations sont évidemment également taxées.

Le produit de la taxe serait de 45 millions en 2014, qui pourrait financer des politiques de prévention. Le produit de cette taxe, affecté à l'assurance maladie, pourrait notamment servir à financer des études indépendantes sur les risques sanitaires liés à la consommation d'aspartame.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - L'autorité européenne de sécurité des aliments juge l'aspartame -poudre blanche possédant un pouvoir sucrant deux cents fois supérieures à celui du sucre- sûr pour la population générale depuis décembre 2013. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de prévoir une taxation spécifique. Avis défavorable.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - J'ajoute que les boissons édulcorées sont soumises à taxation, au même titre que les boissons sucrées. Si vous poursuivez un objectif de santé publique, prenez-vous en plutôt à la consommation de produits sucrés -qu'ils contiennent de l'aspartame ou non-, c'est ce que fait le plan national Nutrition Santé. L'aspartame n'a pas d'effets plus néfastes sur la santé que le sucre.

L'amendement n°39 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°40, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Avant l'article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 575 D du code général des impôts, il est inséré un article 575 D ... ainsi rédigé :

« Art. 575 D ...  -  Les franchises applicables au transport de tabac entre États membres de l'Union européenne sont de :

« - cigarettes : 800 pièces ;

« - cigarillos (cigares d'un poids maximal de 3 grammes par pièce) : 400 pièces ;

« - cigares : 200 pièces ;

« - tabac à fumer : 1 kilogramme.

« Elles constituent des indices quantitatifs qui, appliqués en combinaison avec les critères qualitatifs retenus dans la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d'accise et abrogeant la directive 92/12/CEE, permettent de déterminer la nature commerciale ou à usage privé des transports de tabac dans l'Union européenne. Ces critères quantitatifs sont notamment :

« - le statut commercial du détenteur des produits du tabac et les motifs pour lesquels il les détient ;

« - le lieu où se trouvent les produits soumis à accise, ou, le cas échéant, le mode de transport utilisé ;

« - tout document relatif aux produits soumis à accise ;

« - la nature des produits soumis à accise. »

Mme Aline Archimbaud.  - Le trafic transfrontalier de tabac occasionne une chute vertigineuse des ventes dans le réseau des débitants ainsi qu'une consommation soutenue mettant à mal les politiques de santé publiques fondées sur des augmentations de taxe. Il nuit également aux buralistes qui perdent des parts de marché.

Les franchises applicables au transport de tabac dans les échanges entre États membres comme avec les États tiers sont prévues par la circulaire du 7 mai 2013. La directive 2008/118/CE fixe les seuils applicables aux produits acquis par les particuliers dans un État membre pour les transporter dans un autre État membre, qui permettent de déterminer les niveaux indicatifs à partir desquels le transport de produits du tabac entre États membres a une nature commercial ou non.

Si la Cour de justice de l'Union européenne a censuré les dispositions permettant le contrôle du respect de ces franchises par véhicule et non par voyageur, cette circonstance ne devrait pas faire échec à l'application des niveaux minimum de seuils indicatifs. Il convient d'appliquer les critères quantitatifs et qualitatifs pour apprécier la nature commerciale ou à titre de consommation privée prévus par la directive, tout en la transposant fidèlement sur les niveaux de franchise.

Ce marché est en outre entaché de graves soupçons sur l'entente sur les prix avalisée par les pouvoirs publics, les conflits d'intérêts entre les personnes chargées de missions de service public et les fabricants de tabac ; il est temps que la souveraineté populaire se ressaisisse de ses prérogatives de santé publique et de fiscalité.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Les seuils fixés par la circulaire du 7 mai 2013 seraient trop élevés, estimez-vous. Le différentiel de prix entre la France et les pays limitrophes crée une pression à l'importation. Tout seuil trop restrictif risque de favoriser l'importation. Reste qu'il n'y a pas lieu que la France se montre plus tolérante que ne l'exige l'Union européenne : avis favorable.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - La notion de franchise laisse supposer l'automaticité du non-paiement en dessous d'un certain seuil. Votre amendement se rapproche des articles 575 G et 575 H du code général des impôts, abrogés car ils violaient l'article 32 de la directive et ont entraîné la condamnation de la France.

Je m'engage néanmoins, au nom du Gouvernement, à réfléchir à un abaissement de ces seuils et à mettre en place une concertation à ce sujet. Retrait ?

Mme Aline Archimbaud.  - Je le maintiens, pour indiquer notre volonté.

M. Gérard Longuet.  - Je demande la parole !

M. Jean Desessard.  - Ah un frontalier !

M. Gérard Longuet.  - En effet ! À quel moment se constate la détention du tabac ? Au moment du franchissement de la frontière. Modifier ce seuil n'aura que peu de conséquences sur les travailleurs transfrontaliers qui franchissent la frontière chaque jour ! Quelle serait l'applicabilité effective de cet amendement, madame la ministre ? Spontanément, nous sommes tentés de le soutenir. Encore faut-il qu'il soit effectivement applicable.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Je suis aussi une frontalière. Tous les frontaliers ne se rendent pas en Espagne chaque jour...

M. Gérard Longuet.  - Pour la Lorraine, ce sont 80 000 passages quotidiens !

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État - J'entends bien votre remarque. C'est pourquoi j'ai proposé une concertation : poursuivons la réflexion.

L'amendement n°40 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE PREMIER

Mme Isabelle Pasquet .  - Le pacte de solidarité annoncé par le président de la République est censé contrebalancer le pacte de responsabilité. Il s'agit en réalité d'une mesure en trompe-l'oeil, une atteinte larvée aux fondements mêmes de notre système de protection sociale. À chaque fois que les financements de la sécurité sociale diminuent, le champ de la protection sociale recule. Les gestes prévus en faveur des plus modestes risquent de se retourner contre eux. Les compensations se traduisent généralement par une hausse de la CSG, injuste et non progressive... Ces réductions accordées aux salariés seraient ainsi financées par une suppression de la prime pour l'emploi... Demain, on leur supprimera l'APL, le transport gratuit, la cantine scolaire, le RSA du conjoint... De cette mesure, il ne reste déjà plus rien. Nous proposions une nouvelle rédaction, plus ambitieuse, plus solidaire -mais notre proposition a été jugée irrecevable. Nous le regrettons vivement.

M. le président.  - Amendement n°44, présenté par M. Roche et les membres du groupe UDI-UC.

I.  -  Alinéa 20

Remplacer la date :

janvier 2015

par la date :

septembre 2014

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par l'augmentation du taux de la taxe sur la valeur ajoutée.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Cet amendement accélère la baisse des charges salariales pour qu'elles entrent en vigueur dès septembre 2014. Ces baisses de charge sont à nos yeux salutaires pour que notre économie bénéficie du choc de compétitivité. Pourquoi attendre encore ? Ces allégements ont été annoncés par le président de la République dès 2013. Ce décalage s'explique-t-il par la difficulté que le Gouvernement éprouve à les financer ? Mme Touraine nous a pourtant dit le contraire. Si vous savez financer ces mesures, pourquoi ne pas les mettre en oeuvre tout de suite ?

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Cardoux et les membres du groupe UMP.

I.  -  Alinéa 20

Remplacer la date :

janvier 2015

par la date :

octobre 2014

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Noël Cardoux.  - C'est la même chose. Toutes les mesures annoncées ne seront applicables qu'en 2015 sauf le gel des pensions. Malgré quelques balbutiements d'affichage, on ne sait pas encore comment elles seront financées. Ne dites pas que les ordinateurs ne tournent pas assez vite pour accélérer le mouvement : les professionnels du chiffre savent faire. Le financement ? Nous prônons depuis longtemps la TVA anti-délocalisation -idée qui fait son chemin en Europe.

M. Alain Néri.  - C'est l'impôt le plus antisocial qui soit !

M. Jean-Noël Cardoux.  - Nous avons des solutions !

M. Gérard Longuet.  - Très bien !

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Ces deux amendements sont très proches, à un mois près.

M. Jean Desessard.  - L'UDI est très pressée !

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - N'en déplaise à M. Cardoux, une mise en oeuvre des allégements dès octobre 2014 serait prématurée. Il faut d'abord voter leur compensation !

L'adaptation des logiciels de paie des entreprises et la préparation administrative des Urssaf et de la MSA prendront également un peu de temps. Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - J'ajoute que les baisses d'impôt décidées par le Gouvernement seront effectuées dès septembre. Mais les baisses de cotisation salariale seront mises en oeuvre pour les entreprises : il leur faut le temps de s'adapter. Enfin, nous nous sommes engagés auprès des entreprises à ne faire entrer en vigueur de nouveautés qu'au 1er juillet et au 1er janvier, dans un souci de stabilisation. Avis défavorable.

M. Alain Néri.  - Ces deux amendements, d'apparence anodine, traduisent en réalité une certaine conception du financement des dépenses sociales : par la TVA ! Sur ce point-là, vous nous trouverez toujours face à vous. Nous sommes pour l'impôt progressif, qui est progressiste.

La révolution française s'est faite en particulier contre le poids insupportable des impôts indirects sur le Tiers État. Souvenez-vous du petit livre d'histoire que nous avions au cours élémentaire ou au cours moyen, à l'école publique : on y voyait un pauvre bougre, le clergé et la noblesse juchés sur ces épaules, ployant de surcroît sous une besace marquée « dîme », « taille », « gabelle », tous impôts indirects, profondément injustes.

La TVA, c'est 20 %, quel que soit le salaire, soit beaucoup plus, en proportion des revenus, pour celui qui gagne peu que pour les plus aisés. Quelle injustice ! Dans leur grande sagesse, les révolutionnaires n'ont-ils pas écrit que chacun contribue aux dépenses de la Nation en fonction de ses capacités ? C'est ça, l'impôt progressif ! Nous voterons contre ces amendements. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. René-Paul Savary.  - Ce projet est bien de l'affichage : on annonce des mesures dont le financement n'est pas encore prévu. Nous sommes pour l'allégement du coût du travail, nous l'avons souvent dit. Il est temps de passer à l'acte ! Vous avez eu un an déjà pour mettre tout cela sur pied. Donnons enfin un signe de confiance aux entreprises. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Laurence Cohen.  - Cette accélération aggraverait considérablement la situation de la sécurité sociale. La dégressivité des cotisations sociales en fonction des salaires donnerait en outre le sentiment à certains qu'ils sont les seuls à financer le système -ce qui va à l'encontre du principe de mutualisation. On nous accuse de ne faire que critiquer mais nous avons des propositions : par exemple, réduire considérablement, ou supprimer, la CSG, dont le produit, en 2013, était de 90,5 milliards d'euros, selon la Cour des comptes, en augmentant en contrepartie la part patronale des cotisations sociales et en taxant davantage les revenus financiers. D'autres choix sont possibles.

M. Jean Desessard.  - Le groupe écologiste votera contre les amendements. Jusqu'ici, je le souligne, nous avons soutenu sans faille le Gouvernement ! (Sourires)

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Pourvu que ça dure !

M. Jean Desessard.  - Là, vous faites fort, chers collègues de droite qui vous excitez sur les allégements de cotisations : croyez-vous que les 40 euros gagnés par les entreprises ne vont pas passer en adaptation des logiciels ? Leur organisation doit être stable, fiable : les entreprises veulent de la lisibilité.

Nous avons beaucoup de points communs avec nos amis socialistes. Mais la TVA ne frappe pas aveuglément, comme la taille ou la gabelle. Les produits de première nécessité sont taxés à un taux réduit.

M. Alain Néri.  - Mais le même pour tout le monde !

M. Jean Desessard.  - Il y a des taux différenciés. Surtout, la TVA frappe les importations ! (M. Jean-Noël Cardoux applaudit) Il faut taxer les produits importés, qui font concurrence à nos entreprises.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Quels sont les taux de TVA que vous augmentez ? Le taux normal ? Le taux réduit ? Ne vous êtes-vous pas, au surplus, trompé d'article ? Je comprends votre attachement à la TVA sociale. Vos amendements relèvent davantage de l'article 2.

Mme Catherine Procaccia.  - Nous les proposons à chaque article.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Il s'agit ici de diminuer les charges salariales, mesure de pouvoir d'achat, qui relève du pacte de solidarité plus que de responsabilité.

M. Éric Doligé.  - Des mots !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Bref, vous donnez d'une main, par la baisse des charges sociales, pour reprendre de l'autre, par la hausse de la TVA. Et cela d'autant plus que les salariés dont il s'agit ici, les moins bien payés, sont ceux qui seraient les plus durement touchés par une hausse de la TVA. C'est absurde !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - On est dans le coeur du sujet, qu'il ne nous a pas été possible d'aborder jusqu'alors étant donné le flou entretenu sur la compensation des allégements.

Il y aura le même amendement, monsieur Caffet, sur l'article 2. C'est pour alléger les charges des entreprises, lesquelles pénalisent autant les salariés que l'entrepreneur, que nous présentons cet amendement. Il serait trop tard pour appliquer l'allégement de charges dès cet automne ? Allons, cherchez d'autres arguments !

Nous connaissons vos arguments sur la TVA. (M. Alain Néri proteste) Ne nous faites pas la leçon ! M. Desessard a rappelé à juste titre que les taux de TVA sont différenciés, très faibles pour les produits de première nécessité, ceux qui concernent directement les plus démunis. Nous proposons de taxer les importations pour qu'une part de la TVA serve à alléger les cotisations des employeurs et des salariés.

Nous proposons un mix entre la TVA, la CSG et des économies structurelles sur le budget de l'État. Je regrette qu'il n'y ait pas d'article sur les compensations.

M. Gilbert Barbier.  - À titre personnel, je voterai ces amendements, contrairement à la majorité de mon groupe. Il est curieux de se réfugier derrière des arguments techniques pour ne pas appliquer ces baisses de charge.

M. Caffet prétend qu'il serait scandaleux de baisser les charges salariales dès septembre ou octobre. (M. Jean-Pierre Caffet le conteste) Pouvez-vous nous assurer que vous ne toucherez pas à la TVA ? Comment sera faite la compensation des allégements des charges ?

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Bonne question !

M. Gilbert Barbier.  - Monsieur le rapporteur, peut-être avez-vous des informations ? Mme Touraine ne nous a pas répondu hier.

M. Jean Desessard.  - Elle va venir...

M. Jean-Noël Cardoux.  - Je ne pensais pas que le débat prendrait une telle ampleur. (Exclamations à droite)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Pas de fausse modestie.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Monsieur Desessard, les professionnels du chiffre sont aptes à modifier rapidement leurs logiciels. Du reste, les coûts seront les mêmes en janvier qu'en septembre ou octobre. Dans ce pays, où certains essaient de faire preuve de volontarisme, je m'étonne que l'on s'arrête à de telles considérations d'ordre technique.

Monsieur Néri, le CICE a été financé par une augmentation d'un point de la TVA. Je comprends l'argument de M. Caffet mais les taux sont sélectifs. Il n'a jamais été envisagé de modifier les taux les plus bas. La consommation est un choix, et nous n'augmentons la TVA que sur les produits de luxe. Il n'y a pas si longtemps, certaines voitures subissaient un taux de 33,33 %. Cela ne me choquerait pas du tout que l'on taxe ainsi des 4x4 polluants, gros consommateurs de carburant et fabriqués à l'étranger.

Nous avons un outil à portée de main. L'on fait tant de rapports et de projets en ce moment, on pourrait très bien moduler les taux d'une TVA anti-délocalisation ; c'est une question de volonté. Le misérabilisme de M. Néri est malvenu. (Applaudissements à droite et sur quelques bancs au centre)

M. Gérard Longuet.  - Madame la ministre, nous avons enfin le débat de fond que nous réclamions. Prenons au plus vite la bonne mesure, celle que vous proposez vous-même. Pour mener une politique de l'offre responsable -qui est une politique de droite, autant le dire franchement-, il vaut mieux un ministre de droite, qui y croit et ne reste pas, comme vous, au milieu du gué. Les dépenses sociales restant identiques, nul ici n'ayant l'intention de les réduire, le choix est de les faire supporter par la production ou par la consommation. Nous vous soutenons dans votre volonté d'alléger les coûts de production. Il s'agit d'un transfert collectif. Le salarié qui a un emploi n'en bénéficiera pas ; en revanche, en diminuant les charges pesant sur les producteurs, nous nourrissons l'espoir d'une augmentation de l'emploi, donc une amélioration globale du pouvoir d'achat de l'ensemble des salariés...

M. Jean-Pierre Caffet.  - Pas du tout.

M. Gérard Longuet.  - ...ce qui neutralise l'effet apparemment pénalisant, à court terme, pour les salariés.

Mme Christiane Demontès.  - Il est réel.

M. Gérard Longuet.  - Vous auriez raison, monsieur Caffet...

M. Jean-Pierre Caffet.  - J'ai raison !

M. Gérard Longuet.  - ...si le Gouvernement se retrouvait dans la situation du sapeur Camember, puni pour avoir creusé un trou trop peu profond pour enfouir les déblais de ce trou et du précédent...

M. Jean-Pierre Caffet.  - C'est ce que vous faites !

M. Gérard Longuet.  - Quand on allège les charges pesant sur le producteur, on augmente, à moyen terme, le nombre de salariés en activité, donc leur pouvoir d'achat global. (Applaudissements à droite)

M. Charles Guené.  - Ces deux amendements suscitent un débat de fond intéressant, occasion de nous pencher sur nos approches respectives de la protection sociale et des comptes d'exploitation des entreprises, lesquels ne sont pas concernés par la TVA, qui est neutre. Voici une singularité française : un niveau de protection élevé, qui repose sur les salaires, sachant qu'existe un salaire minimum qui n'obéit pas aux lois du marché mais est fixé par la puissance publique, ce qui n'est pas sans effet sur notre compétitivité prix. Examinons l'assiette de notre protection sociale. Il me paraît difficile de la faire reposer sur les seuls salaires.

Il faut trouver d'autres voies. Nous sommes à un carrefour : notre approche fiscale et sociale doit s'adapter au temps de la mondialisation. Monsieur Néri, les thèmes révolutionnaires ont eu leur raison d'être...

M. Alain Néri.  - Modérez-vous !

M. Charles Guené.  - ...mais traitons le sujet qui est devant nous le plus rapidement possible.

M. Alain Néri.  - Je demande la parole !

M. le président.  - Vous avez déjà expliqué votre vote. Quand on est aussi convaincant que vous savez l''être, les arguments n'ont pas à être répétés. (Sourires)

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Grand bonheur du Sénat que ce type de débat, solide, sérieux, argumenté. (Marques d'approbation) Qui n'a toutefois qu'un lointain rapport avec l'article premier (sourires), lequel porte sur les allégements de cotisations salariales pour les salariés et les fonctionnaires à faibles revenus. Ces allégements n'ont pas de conséquences sur le coût du travail : le brut reste le même.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Absolument.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Il y a, en revanche, des effets pour 5,2 millions de travailleurs salariés qui vont connaître une amélioration de leur pouvoir d'achat correspondant à 520 euros pour un Smic, ce qui n'est pas négligeable. Il s'agit de rendre du pouvoir d'achat aux salariés et fonctionnaires qui ont les revenus les plus bas.

Quelles compensations ? Le code de la sécurité sociale oblige l'État à compenser ces allégements. Le Gouvernement a dit nettement qu'il n'y aurait pas d'augmentation d'impôt et que c'est la diminution de la dépense publique qui assurerait cette compensation. Elle sera constatée dans les prochaines lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Pourquoi voter maintenant une disposition qui ne s'appliquera qu'au 1er janvier 2015 ? Les arguments techniques ne peuvent être balayés d'un revers de main. Il y a aussi une cohérence recherchée entre les mesures en faveur de la compétitivité des entreprises, du pouvoir d'achat des salariés et du redressement des comptes publics.

Anticiper l'application de cet allégement, en revanche, coûterait environ 625 millions d'euros dès cette année, qui devraient être compensés dans les comptes de la sécurité sociale.

À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°44 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°226 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 166
Contre 177

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

M. Dominique Watrin.  - Revenons-en au contenu de cet article premier ! Le débat sur la TVA est un écran de fumée qui masque l'accord profond de la droite avec un article qui nous parait une fausse mesure. On veut nous faire croire que les cotisations sociales seraient la source des difficultés ou de la faible compétitivité des entreprises. Or les études sont nombreuses qui montrent que les leviers à actionner se situent du côté de la compétitivité hors coût. Sans doute est-il plus difficile de s'attaquer au capital...

Les solutions résident dans un renforcement des salaires. Nous ne sommes pas isolés pour constater que le déséquilibre dans la répartition des profits en faveur des actionnaires affaiblit la croissance. Les salaires stagnent alors que les rémunérations des dirigeants s'envolent : au sein du CAC 40 et de la SBF 120, seules treize entreprises pratiquent un écart « admissible » au sens de Henry Ford, c'est-à-dire un écart maximal de 1 à 40 entre les rémunérations des plus faibles et celle du président-directeur général. L'écart moyen, de 1 à 77, est inadmissible. Nous regrettons que notre nouvelle rédaction de l'article premier instaurant un écart maximum de 1 à 20 ait été déclaré irrecevable. C'est pourquoi nous ne voterons pas cet article premier. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Pierre Caffet.  - Que signifie cet article ? On peut débattre sans fin de l'écart entre les salaires mais cet article ne touche pas au coût du travail, ni au salaire brut, ni aux charges patronales. Il redonne du pouvoir d'achat aux salariés du privé qui gagnent entre 1 et 1,3 Smic et aux fonctionnaires entre 1 et 1,5 Smic. Augmenter le pouvoir d'achat des smicards de 520 euros par an n'est pas indifférent aux socialistes que nous sommes.

L'article premier est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano et Vall.

Après l'article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est abrogé.

II.  -  L'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi rédigé :

« I.  -  Le taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-1, L. 136-2, L. 136-6, L. 136-7 et L. 136-7-1 est ainsi fixé :

« 1° Pour les revenus bruts annuels compris entre 0 euro et 13 200 euros, le taux effectif évolue linéairement de 0 % à 1 % ;

« 2° Pour les revenus bruts annuels compris entre 13 200 euros et 26 400 euros, le taux effectif évolue linéairement de 1 % à 5 % ;

« 3° Pour les revenus bruts annuels compris entre 26 400 euros et 60 000 euros, le taux effectif évolue linéairement de 5 % à 13 % ;

« 4° Pour les revenus bruts annuels compris entre 60 000 euros et 120 000 euros, le taux effectif évolue linéairement de 13 % à 25 % ;

« 5° Pour les revenus bruts annuels compris entre 120 000 euros et 480 000 euros, le taux effectif évolue linéairement de 25 % à 40 % ;

« 6° Pour les revenus bruts annuels compris entre 480 000 euros et 1 200 000 euros, le taux effectif évolue linéairement de 40 % à 50 %. » ;

2° Les II et III sont abrogés.

III.  -  La perte de recettes résultant pour l'État des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par une hausse du taux des contributions sociales mentionnées au I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale pour les revenus annuels supérieurs à 1 200 000 euros.

IV. -  Le produit des contributions mentionnées au I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est réparti entre l'État et les organismes de sécurité sociale selon des modalités fixées par décret, sans modifier l'affectation des produits des contributions visées aux articles L. 136-1, L. 136-2, L. 136-6, L. 136-7 et L. 136-7-1 du même code.

M. Gilbert Barbier.  - Je remets sur le tapis une vieille proposition du groupe RDSE : remplacer l'impôt sur le revenu par une CSG progressive, plus simple et plus équitable, selon un principe républicain fondamental, rappelé dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

M. Alain Néri.  - Très bien !

M. Gilbert Barbier.  - La contribution commune « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

M. Alain Néri.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Après l'article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L'article L. 136-8 est ainsi modifié :

a) Les I et II sont ainsi rédigés :

« I. - Les contributions sociales sont calculées d'après la situation et les charges de famille du contribuable conformément aux articles 193, 194 et 195 du code général des impôts et en appliquant à la fraction des revenus bruts annuels définis aux articles L. 136-2 à L. 136-7-1 du présent code le taux de :

« 1° 5,0 % pour la fraction inférieure ou égale à 6 011 € ;

« 2° 5,5 % pour la fraction supérieure à 6 011 € et inférieure ou égale à 11 991 € ;

« 3° 6,5 % pour la fraction supérieure à 11 991 € et inférieure ou égale à 26 631 € ;

« 4° 7,5 % pour la fraction supérieure à 26 631 € et inférieure ou égale à 71 397 € ;

« 5° 8,0 % pour la fraction supérieure à 71 397 € et inférieure ou égale à 151 200 € ;

« 6° 8,5 % pour la fraction supérieure à 151 200 €.

« II. - Par dérogation aux deuxième à quatrième alinéas du I, le taux des contributions sociales est fixé à :

« 1° 6,0 % en 2015 pour la fraction inférieure ou égale à 6 011 € ;

« 2° 7,0 % en 2015 pour la fraction supérieure à 6 011 € et inférieure ou égale à 11 991 € ;

« 3° 7,5 % en 2015 et 2016 pour la fraction supérieure à 11 991 € et inférieure ou égale à 26 631 €. » ;

b) Au III, les mots : « et au II » sont supprimés ;

2° La section 5 du chapitre 6 du titre 3 du livre Ier est complétée par un article L. 136-8-... ainsi rédigé :

« Art. L. 136-8-... - Les contributions visées au I de l'article L. 136-8 font l'objet d'une correction sur l'avis d'imposition sur le revenu mentionné au chapitre Ier du titre Ier de la première partie du livre premier du code général des impôts sur la base des informations délivrées à l'administration fiscale. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean Desessard.  - Nous aussi allons dans le sens de M. Neri : rendre la CSG progressive. Cet amendement vise à appliquer un barème progressif à l'ensemble des revenus assujettis à la CSG, sans distinction.

Pour les téléspectateurs qui nous regardent (sourires), je précise que la taxation proportionnelle touche beaucoup plus fortement les bas revenus. Lorsque Jean-Marc Ayrault a lancé la remise à plat de la fiscalité, des groupes de travail très intéressants se sont réunis ; cela n'eut pas de suite, peut-être en reparlera-t-on. Les écologistes se sont prononcés pour une fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu selon un barème progressif et avec des taux marginaux qui ne distinguent pas entre retraités et actifs, revenus du capital et du travail.

Réduisons les inégalités en donnant du pouvoir d'achat à ceux qui en ont le plus besoin.

L'amendement n°67 n'est pas défendu.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Réforme difficilement applicable en cours d'année, qui nécessite une plus large réflexion et relève de la loi de finances plus que du présent projet de loi. Avis défavorable.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Qui sera perdant dans ce type de réforme ? Peut-être faut-il y travailler davantage. Le Gouvernement s'est engagé, en fin d'année dernière, à chiffrer les amendements présentés sur la progressivité de la CSG : ils auraient entraîné une charge supplémentaire de 7,3 milliards d'euros, soit 16 millions de foyers fiscaux perdants. Ces résultats ont été transmis au HCFPS, dont le rapport a souligné les principales difficultés, outre que juridiques, de la progressivité de la CSG.

Ces nouvelles propositions entraîneraient une perte de recettes de 13 à 14 milliards d'euros ; pour la compenser, il faudrait une très forte augmentation de la CSG sur les moyens et hauts salaires, au-delà des taux moyens fiscaux et sociaux admissibles, selon la jurisprudence de fin 2012 du Conseil constitutionnel. Ce type de réforme mérite donc une réflexion approfondie. Je vous propose de retirer ces amendements en attendant que les travaux en cours soient achevés.

L'amendement n°6 rectifié est retiré.

M. Jean Desessard.  - Merci de cette réponse chiffrée. Si les ménages paient plus, l'État devrait gagner plus... C'est compliqué. (Sourires) L'impôt sur le revenu tient compte de la situation familiale, il y a là aussi à réfléchir sur notre système fiscal.

Madame la ministre, nous avons eu un travail organisé par le Premier ministre Ayrault, qui n'a pas été désavoué par le président de la République. Les organisations syndicales étaient représentées, ainsi que l'administration, et nous en sommes toujours à dire : c'est intéressant, remettons à plus tard ! Quand s'arrêtera-t-on ?

M. Jean-Pierre Caffet.  - Jamais ! (Sourires)

M. Jean Desessard.  - Voulez-vous mener à bien le projet socialiste et écologiste pour la France ? On a fait des groupes de travail : que va-t-il en sortir ? Nous manquons d'une perspective, d'un cadre. Continuons à travailler à la petite semaine. Le socialisme, monsieur Néri, c'est une grande idée.

M. Alain Néri.  - Oh que oui !

M. Jean Desessard.  - L'écologie aussi...

M. Gilbert Barbier.  - Un peu moins.

M. Jean Desessard.  - Évidemment, il y aura des perdants : les hauts revenus, et il semble que cela gêne les socialistes. (Protestations sur les bancs socialistes) C'est du moins ce que j'ai compris.

Voix sur les bancs socialistes.  - Ce n'est pas la même chose !

M. Jean Desessard.  - Mais c'est aussi ce que les Français comprennent ! Remettons les choses à leur place. (M. Alain Néri s'exclame)

M. le président.  - Poursuivez votre démonstration... (Mouvements divers)

M. Jean Desessard.  - Je vais le retirer, cet amendement, après m'être fait de nouveaux ennemis en peu de minutes. (Sourires)

Madame la ministre, donnez-nous un plan de travail qui débouche sur une traduction politique !

M. Alain Néri.  - La grande difficulté de la majorité, c'est en effet celle du sapeur Camenber, monsieur Longuet, car il lui faut combler le déficit abyssal laissé par le gouvernement Fillon.

M. Roger Karoutchi.  - Ben voyons.

M. Alain Néri.  - MM. Desessard et Barbier ont intégré la nécessité d'une contribution progressive. Merci, monsieur Barbier, d'avoir cité l?article XIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Je vous félicite ! On avance, on avance.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Il faudrait avancer un peu plus vite...

M. Alain Néri.  - Ces amendements étaient sans doute des amendements d'appel... d'appel au secours pour M. Desessard, qui a dramatisé un peu. Nous avons eu un débat de fond, qui a soulevé des problèmes que l'on ne pourra éluder. Madame la ministre, je souhaite que nous reprenions ce débat de fond à l'occasion du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. D'ici là, les ordinateurs auront tourné. Nos concitoyens attendent une nouvelle politique fiscale, plus juste, plus équilibrée, afin que ceux qui ont moins touchent plus et que ceux qui ont plus contribuent davantage. C'est cela le socialisme, monsieur Desessard !

L'amendement n°20 est retiré.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - M. Desessard a du talent mais je ne peux laisser dire que le Gouvernement, qui est de sensibilité socialiste, veut épargner les hauts revenus. Le plan pauvreté est maintenu. Et le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale allège les cotisations des salariés les moins bien payés. En 2013, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 30 milliards d'euros, dont 15 milliards pesant sur les ménages, mais avec l'ISF, la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu ou encore le plafonnement du quotient familial, personne ne peut dire que les hauts revenus ont été épargnés aux dépens des classes moyennes et défavorisées.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Après l'article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  La section VI du chapitre premier du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un article 520 D ainsi rédigé :

« Art. 520 D.  -  I.  -  Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l'article 1609 vicies sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l'alimentation humaine, en l'état ou après incorporation dans tout produit.

« II.  -  Le taux de la taxe additionnelle est fixé à 300 € la tonne. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année, à compter du 1er janvier 2015, dans une proportion égale au taux de croissance de l'indice des prix à la consommation hors tabac de l'avant-dernière année. Les montants obtenus sont arrondis, s'il y a lieu, à la dizaine d'euros supérieure.

« III.  -  1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.

« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l'alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.

« IV.  -  Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité entrant dans leur composition.

« V.  -  Le taux de la taxe additionnelle est réduit de moitié, selon des modalités définies par décret, lorsque le redevable fait la preuve que le produit taxé répond à des critères de durabilité environnementale définis par décret.

« VI.  -  Les expéditions vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ainsi que les exportations vers un pays tiers sont exonérées de la contribution lorsqu'elles sont réalisées directement par les personnes mentionnées au 1 du III.

« Les personnes qui acquièrent auprès d'un redevable de la contribution, qui reçoivent en provenance d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou qui importent en provenance de pays tiers des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires incorporant ces huiles qu'elles destinent à une livraison vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou à une exportation vers un pays tiers acquièrent, reçoivent ou importent ces huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles en franchise de la contribution.

« Pour bénéficier du deuxième alinéa du présent V, les intéressés doivent adresser au fournisseur, lorsqu'il est situé en France, et, dans tous les cas, au service des douanes dont ils dépendent une attestation certifiant que les huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles sont destinées à faire l'objet d'une livraison ou d'une exportation mentionnées au même alinéa. Cette attestation comporte l'engagement d'acquitter la contribution au cas où l'huile ou le produit alimentaire ne recevrait pas la destination qui a motivé la franchise. Une copie de l'attestation est conservée à l'appui de la comptabilité des intéressés.

« VII.  -  La contribution mentionnée au I est acquittée auprès de l'administration des douanes. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, sanctions, garanties et privilèges applicables au droit spécifique mentionné à l'article 520 A. Le droit de reprise de l'administration s'exerce dans les mêmes délais. »

II.  -  Après le 7° de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le produit de la taxe mentionnée à l'article 520 D du code général des impôts est affecté à la branche mentionnée au 1° de l'article L. 200-2 du présent code. »

Mme Aline Archimbaud.  - L'huile de palme est l'huile végétale la plus consommée au monde. Présente dans de très nombreux produits alimentaires de consommation courante, elle est privilégiée par les industriels pour son faible coût de production. Cela pose des problèmes sanitaires et environnementaux. D'une part, la consommation des acides gras saturés contenus dans l'huile de palme accroissent le risque de maladie cardiovasculaire et d'Alzheimer. D'autre part, la culture industrielle du palmier à huile détruit les forêts, menace les écosystèmes et met à mal les moyens de subsistance des hommes et des animaux qui y vivent.

En France, l'huile de palme est une des huiles les moins taxées. Cet amendement crée une taxe additionnelle sur cette huile, qu'il conviendra d'augmenter progressivement chaque année. Les recettes générées permettraient de financer des politiques de prévention.

Cet amendement diffère légèrement de celui qui avait été adopté par le Sénat l'an dernier puisqu'il réduit de moitié la taxe si le producteur peut prouver que l'huile est obtenue selon des critères de durabilité environnementale définis par les pouvoirs publics.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Je reste convaincu que la consommation excessive d'huile de palme n'est pas bonne pour la santé et qu'il faut encourager les industriels à s'en passer quand c'est possible. Étant entendu que la consommation de cette huile n'est pas interdite et que son usage est légal. Les enjeux environnementaux sont autres. Dans notre rapport sur la fiscalité comportementale, Mme Deroche et moi-même avons recommandé d'harmoniser les taxes sur les huiles. Le projet de loi sur la santé publique sera un bon support. Sagesse.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - C'est vrai, manger des produits gras n'est pas bon pour la santé mais s'il fallait taxer tout ce qui est mauvais pour la santé... Votre amendement poursuit à la fois un objectif de santé publique et de développement durable. La modulation de la taxe en fonction du mode de culture serait très difficile à contrôler par les pouvoirs publics français. Appréhendons plutôt globalement les taxes sur les huiles, avec des objectifs clairs. J'ajoute que votre amendement alourdirait la charge pesant sur les consommateurs. Retrait.

Mme Catherine Deroche.  - Le débat revient chaque année... Je n'ai jamais été favorable à une taxation spécifique de l'huile de palme, qui n'est pas un produit toxique même si sa consommation en excès est mauvaise pour la santé. Le rapporteur a raison de dire que les enjeux sanitaires et environnementaux ne doivent pas être mélangés. Les industriels français utilisent de plus en plus une huile produite dans des conditions dites durables. L'important est d'avoir une alimentation variée, de consommer plusieurs sortes d'huile. Nous avons abouti, dans notre rapport, à une proposition équilibrée consistant à harmoniser les taux de taxation des différentes huiles -et pas nécessairement vers le haut.

Mme Catherine Procaccia.  - Si chacun préparait soi-même ses aliments au lieu de les acheter tout prêts, on n'aurait pas ce genre de problème... Mais la France et l'Europe importent peu d'huile de palme par rapport aux Chinois et aux Indiens, qui en font une grande consommation.

Penchons-nous plutôt sur les huiles hydrogénées, qui sont bien plus dangereuses. Enfin, je rappelle que le beurre contient autant d'acides gras saturés que l'huile de palme.

Mme Aline Archimbaud.  - Élue de Seine-Saint-Denis, je suis sensible au fait que les ménages modestes puissent consommer des produits moins dangereux. Or, l'huile de palme est l'une des moins chères car c'est l'une des moins taxées. En outre, la culture à très grande échelle de l'huile de palme met en danger, dans certains pays, les cultures traditionnelles et d'autosubsistance.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

ARTICLE 2

Mme Muguette Dini .  - Un mot sur la réduction des charges sur l'emploi à domicile. Le sujet est important et c'est un de mes chevaux de bataille. Les incitations à l'embauche d'un salarié par un particulier employeur ne sont pas des niches : personne n'embauche un salarié à domicile pour le seul plaisir de réduire ses impôts mais pour s'occuper d'un enfant ou d'un parent âgé. Ne parle-t-on pas de l'adaptation de la société au vieillissement ? Les besoins croissent avec l'âge : 110 heures pour un employeur de 90 à 94 ans, 160 heures entre 95 et 99 ans -mais 50 s'il a moins de 40 ans. Inutile de préciser que ces emplois sont non délocalisables.

Contrairement aux entreprises, les particuliers employeurs ne bénéficient d'aucune autre aide fiscale et sociale que le crédit d'impôt et la réduction de cotisations. Ils sont exclus du pacte de responsabilité. En outre, le même revenu se retrouve taxé deux fois : du côté de l'employeur et du côté du salarié qui paie l'impôt sur le revenu -alors qu'une entreprise déduit les salaires et charges de son résultat.

En 2010, le dispositif, dont la Cour des comptes et le Gouvernement critiquent le coût pour l'État, a rapporté 6 milliards de cotisations sociales. Son efficacité économique n'est plus à prouver : 700 000 emplois ont été créés entre 1995 et 2010. C'est dire si le modèle est vertueux. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Laurence Cohen .  - Cet article réduit considérablement les cotisations patronales, y compris celles de la branche famille -vieille revendication des libéraux et du patronat, pour preuve, la récente proposition de résolution signée Serge Dassault...

Contrairement à ce qu'ils prétendent, il n'existe aucun lien avéré entre coût du travail et nombre d'emplois. Pierre Gattaz n'ose plus promettre un million d'emplois, le président de la République ne parle plus d'en créer mais d'en préserver... On appréciera la nuance !

On ne compte plus les allégements de cotisations patronales depuis 1992, au gré des gouvernements de droite. Le résultat ? Une hausse continue du chômage. Même au centre et à droite, le dispositif est contesté ; M. Borloo, en 2005, jugeait que le système d'allégements avait atteint ses limites en termes de création d'emplois...

Les aides publiques ne doivent pas servir à créer des emplois précaires mais de qualité et rémunérateurs, permettant aux salariés de vivre dignement. Or, les allégements de cotisations sociales constituent une trappe à bas salaire.

Le dispositif paupérise les salariés, appauvrit la sécurité sociale, favorise l'accaparement des richesses par la finance et les actionnaires. Nous voterons contre cet article.

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

I.  -  Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéa 13

Supprimer les mots :

ainsi que, dans les conditions mentionnées au VIII du présent article, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles

III.  -  Alinéas 28 à 30

Supprimer ces alinéas.

Mme Annie David.  - La branche Accident du travail-Maladie professionnelle (AT-MP) est financée principalement, dans une logique assurantielle, par des cotisations patronales proportionnelles à la sinistralité.

Pour la première fois, ce projet de loi, en allégeant ces cotisations, dédouane les employeurs de leur responsabilité, au moment même où le Gouvernement reporte l'application du compte pénibilité. Les salariés doivent-ils être considérés comme responsables de leurs accidents du travail ou maladies professionnelles ? Ce serait bien le cas si la compensation à la branche de ces allégements passait par la fiscalité... Déjà, la Mecss proposait de socialiser la dette de la branche en la confiant à la Cades. Nous nous opposons à ce recul historique.

M. le président.  - Amendement n°36, présenté par M. Godefroy.

I. - Alinéa 2, 3 et 30

Supprimer ces alinéas.

II. - Alinéa 13

Supprimer les mots :

ainsi que, dans les conditions mentionnées au VIII du présent article, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles

M. Jean-Pierre Godefroy.  - C'est en tant que rapporteur pour la branche AT-MP que j'ai déposé cet amendement d'appel. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a supprimé la possibilité d'imputer des allégements généraux sur les bas salaires sur les cotisations AT-MP. Cet article revient en partie sur cette interdiction. Les allégements proposés porteraient sur la part mutualisée de la cotisation -c'est celle qui couvre les accidents de trajet, les dépenses de prévention, le reversement au titre de la sous-déclaration AT-MP et les contributions aux fonds dédiés à l'amiante. Cela va dans le mauvais sens. Les branches les plus accidentogènes sont celles qui rémunèrent le moins leurs salariés, la découpe ou le bâtiment. On remet ici en cause un principe qui remonte à 1898. Je vous renvoie au rapport que j'ai cosigné avec Mme Deroche sur le sujet. Si la branche est aujourd'hui équilibrée, elle a toujours une dette de 2 milliards d'euros auprès de l'Acoss.

Quant à la compensation, nous n'avons guère d'assurances... La Cour des comptes, contrairement aux années précédentes, a accepté cette année de certifier les comptes de la branche, même avec cinq réserves. N'inversons pas la tendance.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 13

Supprimer les mots :

ainsi que, dans les conditions mentionnées au VIII au présent article, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles

II.  -  En conséquence, alinéa 30

Supprimer cet alinéa.

M. Jean Desessard.  - Selon l'INRS, les principales branches d'activités présentant des risques de santé et de maladies professionnelles sont le bâtiment et travaux publics, la métallurgie, la chimie, le caoutchouc, la plasturgie et les travailleurs agricoles. Exonérer les entreprises de toute contribution constitue un mauvais signal pour la prévention et grèverait les ressources disponibles pour la prise en charge des accidents, des soins et des réparations.

Avec la suppression progressive des cotisations, le Gouvernement opère un changement politique important. Il est pourtant normal que chaque entreprise contribue à mesure des risques qu'elle fait peser sur ses salariés. Nous voulons préserver la logique assurantielle qui est le fondement de la branche.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Alinéa 30

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette réduction ne peut être imputée aux cotisations définies au deuxième alinéa de l'article L. 241-5 du présent code.

M. Jean Desessard.  - Amendement de repli pour que la part issue des cotisations liées aux risques reconnus ne puisse être réduite.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable à tous les amendements. La cotisation minimale AT-MP finance le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), l'indemnisation des accidents de trajet et la compensation à la branche familiale de la sous-déclaration. Elle n'est donc nullement liée à la sinistralité au sein de l'entreprise et ne réduit en rien l'indemnisation des victimes.

La commission des affaires sociales a réaffirmé son attachement au principe du financement de la branche par les cotisations ; elle attend cependant des précisions de la part du Gouvernement sur le financement du Fiva.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État.  - Nous préservons la logique assurantielle puisque l'allégement ne s'appliquera pas à la part représentative de la sinistralité mais seulement à la part mutualisée. L'allégement s'imputera en priorité sur les autres cotisations de sécurité sociale -qui sont déjà nulles au niveau du Smic. Dès 1,02 Smic, la branche AT-MP ne sera plus concernée. Les règles spécifiques de détermination des taux de cotisation sont conservées.

Le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à ces amendements qui empêcheraient l'application du principe : « zéro charge au niveau du Smic ».

M. Jean Desessard.  - Mme la ministre nous oppose des arguments techniques intéressants mais nous attendons une vision globale. Outre que l'effet des allégements de cotisations est discutable, le problème principal vient de ce que les mesures s'additionnent sans que l'on voie le plan général. Je maintiens l'amendement car la branche AT-MP doit obéir à une logique assurantielle.

M. Ayrault avait fait du bon travail et nous nous étions investis dans la réflexion sur la grande remise à plat fiscale. Dommage que nous ne percevions pas les lignes directrices de la réforme.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Pourquoi des exonérations sur la part mutualisée ? Elle est, elle aussi, assurantielle. La mise sous perfusion m'inquiète toujours, on voit le tuyau mais pas toujours si on le remplit... Nous avons été échaudés par ce qui advient du Fiva. Les 100 millions d'euros promis en compensation seront-ils pérennes ? Nous n'avons aucune garantie...

La part mutualisée couvre notamment la sous-déclaration, qui est un véritable drame puisqu'elle consiste pour les entreprises à faire payer par la branche maladie ce qui relève normalement de leurs cotisations. Je maintiens l'amendement.

Mme Annie David.  - Je n'ai pas été convaincue non plus par la ministre. Même à supposer que seule la part mutualisée soit concernée, ce qui n'est pas explicite dans le texte, ces allégements me paraissent malvenus car les employeurs doivent être responsabilisés. L'argument du « zéro charge au niveau du Smic » ne tient pas puisque la part en sinistralité est maintenue -du moins pour l'instant. M. Godefroy a bien fait de parler du Fiva, qu'on ponctionne à chaque PLFSS...

Quant à l'amendement de repli n°25, nous aurions pu être tentés de le voter mais nous refusons toute exonération pour la branche AT-MP.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je suis entièrement favorable à ces amendements. L'allégement massif de cotisations sociales n'a aucun impact scientifiquement prouvé sur l'emploi. Les auditions de la mission sénatoriale sur le sujet l'ont bien montré. En revanche, il conduit à la baisse de la dépense et de l'investissement publics, fragilise le financement de la protection sociale. Cette politique est dangereuse. Nous avons besoin de relancer l'économie par le pouvoir d'achat. Il nous faut réfléchir aux bases des prélèvements sociaux, à la légitimité de la fiscalité, à une grande réforme de notre système de prélèvements, conformément à l'engagement n°14 du président de la République. Ce serait plus efficace à la fois pour la croissance et pour la justice sociale. (M. Jean Desessard applaudit)

M. Jean-Pierre Caffet.  - Les craintes pour le financement de la branche AT-MP sont infondées. Le Gouvernement supprime les effets de seuil entre entreprises de plus et de moins de 20 salariés et bâtit un système dans lequel, au niveau du Smic, l'employeur ne verse plus aucune cotisation à l'Urssaf. Dans cet ensemble, il y a une part de cotisation AT-MP mais une part seulement : le 1 % que paient même les entreprises dont la sinistralité est nulle. En outre, la compensation sera intégrale. Cela devrait vous rassurer !

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - L'amendement n°25 me semble comporter une erreur : il vise un article qui concerne les détenus, les jeunes en service civique et les étudiants...

Madame David, il s'agit bien, dans cet article, de la cotisation minimale : voyez l'alinéa 3.

Mme Catherine Deroche.  - Je partage les craintes de M. Godefroy sur le financement de la branche AT-MP et les assurances du Gouvernement me laissent dubitative... Je m'abstiendrai.

L'amendement n°54 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos36 et 22.

L'amendement n°25 est retiré.

présidence de M. Charles Guené,vice-président

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

Alinéas 9 et 10

Supprimer ces alinéas.

M. Jean Desessard.  - Cet amendement supprime la réduction du taux de cotisation sur la branche famille d'1,8 point, qui est prévue jusqu'à 1,6 Smic en 2015 et jusqu'à 3,5 Smic à partir de 2016.

Selon la Cour des comptes, ce taux a en réalité sensiblement diminué avec le dispositif d'allégements... Le Gouvernement poursuit cette politique de réduction des ressources de la branche famille. Les entreprises en bénéficient pourtant car une grande partie du budget total de la branche finance la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle.

Le financement de la branche famille mérite un vrai débat, faute de quoi nous proposons de maintenir ses ressources.

M. le président.  - Amendement identique n°55, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC.

Mme Isabelle Pasquet.  - Ces alinéas réduisent la part patronale de cotisations sociales destinées à alimenter la branche famille. Ce faisant, le Gouvernement fragilise cette branche pour, à terme, organiser une fiscalisation de son financement et exclure la politique familiale de la sécurité sociale. Une fiscalisation injuste puisque reposant pour l'essentiel sur les ménages. François Mitterrand y avait d'ailleurs renoncé. Les allocations familiales ont un lien direct avec l'emploi et l'entreprise : 14 milliards sur les 55 milliards d'euros de prestations versées par la caisse nationale des allocations familiales favorisent la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle. Ces cotisations patronales familiales ne représentent que 34 milliards d'euros sur un total de 170 milliards. N'oublions pas que le coût du travail n'est qu'une partie des coûts de production : à cette aune, les cotisations familiales sont une goutte d'eau, 1 % à peine des coûts de production. Sans doute l'objectif réel est-il de faire exploser la sécurité sociale en supprimant une branche...

M. le président.  - Amendement identique n°68, présenté par Mme Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La politique familiale doit-elle être financée par une part de fiscalité ? C'est un vrai débat de société. La branche famille est un des socles du paritarisme . La moindre des choses serait d'exiger une négociation sociale sur son éventuelle suppression ! J'ai toujours plaidé pour que les cotisations sociales soient assises sur la valeur ajoutée de l'entreprise. La mesure proposée ne va pas dans le bon sens. La France est encore, grâce à sa politique familiale, un pays où l'on fait des bébés -pourvu que ça dure !

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par M. Cardoux et les membres du groupe UMP.

I.  -  Alinéa 10

Remplacer les mots :

1,6 fois

par les mots :

3,5 fois

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Mon amendement est aux antipodes... (M. Jean Desessard s'exclame) Nous voulons aller plus vite et proposons que les exonérations concernent les salaires jusqu'à 3,5 Smic. Sinon, on avantage certaines entreprises, non délocalisables : la grande distribution, La Poste... pas les entreprises innovantes, confrontées à la concurrence des pays émergents. Les start up rémunèrent leurs salariés à un niveau plus élevé. Augmentons tout de suite le niveau. Quant au financement, je ne développe pas à nouveau nos propositions : elles n'ont pas changé.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable aux amendements nos21, 55 et 68. C'est parce que les prestations familiales sont universelles, allouées sur le critère de la résidence, qu'elles font l'objet d'allégements. La Cour des comptes a évalué à 1,4 la part concernant la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. Avis défavorable également à l'amendement n°10, pour les mêmes raisons que tout à l'heure.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.  - Le débat sur le caractère universel ou assurantiel des cotisations sociales est légitime mais je ne peux rejoindre Mme Lienemann. Je ne vois pas en quoi la gestion paritaire de la branche famille est remise en cause par un allégement de cotisations, qui plus est compensé. La logique contributive n'est pas davantage modifiée.

Dès lors, avis défavorable aux amendements. Défavorable également à l'amendement n°10. Le Premier ministre a pris des engagements clairs, que traduira la loi de programmation des finances publiques. Le calendrier a été fixé jusqu'en 2017.

Mme Annie David.  - S'il n'y a plus de cotisations sociales patronales, comment le paritarisme ne serait-il pas remis en cause ? Nous voterons bien sûr notre amendement mais pas l'amendement n°10, qui est en effet aux antipodes des nôtres.

M. René-Paul Savary.  - Si l'on veut miser sur l'innovation pour créer des emplois à forte valeur ajoutée, il faut aider ces entreprises d'avenir. La proposition du Gouvernement va dans le bon sens mais manque cruellement de lisibilité. C'est la clé de la confiance. Quitte à franchir le pas, autant agir vite. À 3,5 Smic, on tire vers le haut ! Notre amendement a un coût, nous avons fait des propositions pour le financer -TVA sociale ou proposition de loi de Serge Dassault.

Les amendements identiques nos21, 55 et 68 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis À la fin de la première phrase du I bis de l'article L. 241-10, les mots : « par décret » sont remplacés par les mots : « à 1,5 euro » ;

II. - En conséquence, compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

C. - Le 3° bis du I s'applique aux cotisations sociales dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er septembre 2014.

III. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... . - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Le régime de cotisations applicable aux particuliers employeurs a été réformé à plusieurs reprises. Après la suppression de l'abattement de quinze points sur les cotisations patronales, le 1er janvier 2012, le régime du forfait a été supprimé le 1erjanvier 2013, ce qui représentait une hausse de cotisations de 12 % pour les ménages. Une réduction de cotisations de 75 centimes par heure déclarée a alors été mise en place. Le nombre d'heures déclarées a néanmoins baissé de 7 % en 2013, soit une perte de 16 000 équivalents temps plein (ETP), après une première baisse de 12 000 ETP en 2012.

Cet amendement porte le montant de la réduction à 1,5 euro au 1er septembre 2014 afin de permettre de reconquérir de l'emploi déclaré -et donc des cotisations- pour un coût estimé à 120 millions d'euros en année pleine et à 40 millions d'euros en 2014. Il a été adopté à l'unanimité par les membres de la commission des affaires sociales.

M. le président.  - Sous-amendement n°18 à l'amendement n°1 de M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, présenté par M. Cardoux et les membres du groupe UMP.

I. Amendement n° 1, alinéa 3

Remplacer le montant :

1,5 euro

par le montant :

2 euros

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Je confirme les propos du rapporteur général, dont l'amendement fait suite à un rapport consensuel. 1,5 euro, c'est le tarif minimum. Nous proposons 2 euros. Le système est désorganisé, entre agrément et autorisation, avec une multiplicité d'acteurs -dont les particuliers employeurs, les collectivités, etc. La Cour des comptes dénonce le manque de transversalité entre les différents prestataires. Il est urgent d'intervenir. Ce serait une bouffée d'oxygène pour les associations comme pour le secteur marchand -et ferait rentrer dans la légalité ceux qui se sont réfugiés dans le travail clandestin.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°35 à l'amendement n°1 de M. Daudigny , au nom de la commission des affaires sociales, présenté par M. Godefroy, Mme Meunier, M. Poher, Mmes Printz, Schillinger et Emery-Dumas, M. Kerdraon, Mmes Claireaux, Alquier et Bordas et M. Labazée.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - J'avais alerté le Sénat sur la suppression du forfait. Je regrette de n'avoir été écouté. Aujourd'hui, chacun reconnaît qu'il y a un problème.

Le secteur de l'emploi à domicile concerne 3,6 millions de particuliers employeurs et 1,6 million de salariés ; c'est 12 milliards de salaire net.

Ce secteur connaît une dégradation inédite ainsi qu'une recrudescence du travail non déclaré. Ce sont 29,5 millions d'heures qui ont été déclarées en moins en 2013 par rapport à 2012, soit près de 16 500 emplois en équivalent temps plein détruits. Pour la première fois, la masse salariale nette du secteur recule de 2,2%.

Il faut distinguer entre ce que l'on qualifie parfois hâtivement de niches. En l'occurrence, cette prétendue niche a un impact social important : les personnes qui travaillent à domicile sont pénalisées car elles perdent des employeurs. Le Cesu avait le mérite de clarifier les choses. Le développement du travail au gris -déclaré en partie seulement- est très fâcheux. Comme je l'avais annoncé en commission, je retire ce sous-amendement et soutiens celui du rapporteur général.

Le sous-amendement n°35 est retiré.

M. le président.  - Sous-amendement identique n°46 à l'amendement n°1 de M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, présenté par Mme Dini et les membres du groupe UDI-UC.

Mme Muguette Dini.  - L'amendement du rapporteur général vise à revenir sur les réformes intervenues depuis 2011.Comme les particuliers employeurs ne sont pas concernés par le pacte de responsabilité, pour une stricte équivalence, il faudrait en réalité aller jusqu'à 3 euros... En un an, le nombre de particuliers employeurs a reculé de 3,2 %, le nombre d'heures déclarées a chuté de 6,1 %. Même les assistantes maternelles sont touchées, leur activité régresse de 2,6 %. Surtout, pour la première fois, le salaire horaire net dévisse. C'est un énorme plan social qui touche 40 000 personnes, auxquelles les syndicats auraient pu s'intéresser ! Porter la déduction à 2 euros, c'est retrouver de l'emploi déclaré et des recettes pour la sécurité sociale.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Nous sommes d'accord sur le diagnostic. Pour les particuliers employeurs, les déductions sur les cotisations sociales viennent s'ajouter aux déductions fiscales, qui sont sensibles. Le choix de 1,5 euro est un choix de raison et d'efficacité, avec une application dès le 1er septembre. Avec 2 euros, ce serait une situation plus favorable qu'en 2011. La dépense supplémentaire serait de 25 millions d'euros. Avis défavorable aux sous-amendements.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Le secteur de l'emploi à domicile est bien concerné par le pacte de responsabilité. La baisse du taux de cotisation de 1,8 % s'applique à toutes les associations et entreprises qui proposent des services, ce qui n'est pas négligeable.

Le volet solidarité s'appliquera aussi à ce secteur, donc aux particuliers employeurs. Cet effort est sans précédent. Il s'ajoute aux dépenses fiscales et sociales existantes, soit un total de 5,4 milliards d'euros, qui bénéficient déjà aux emplois à domicile.

Notre majorité a donné des droits qui n'existaient pas auparavant et a compensé le surcoût, à hauteur de 75 centimes. La suppression de quinze points d'abattement, en revanche, se contentait d'aligner le particulier employeur sur l'entreprise -sans la déduction Fillon.

Le rapport de la Cour des comptes rappelle combien le contexte économique a pesé sur le secteur. On observe également un déplacement -qui n'est pas généralisé, mais existe- vers le régime des auto-entrepreneurs.

J'avais porté moi-même cette mesure de 75 centimes en tant que rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale. En tant que secrétaire d'État, je suis sensible au coût de ce que vous proposez... Il y aura une mesure -dont je ne peux préciser l'ampleur- en faveur du secteur qui s'ajoutera à la mise en oeuvre du pacte. Dans cette attente, le Gouvernement propose d'en rester à la version actuelle, qui renvoie au décret le soin de déterminer le montant. Avis défavorable.

M. Dominique Watrin.  - Le groupe CRC votera l'amendement du rapporteur général -mais attention aux sous-amendements. Hors de question pour nous de revenir au régime du forfait, qui pénalise les salariés dans leurs droits sociaux. Dans un régime déclaratif, le durcissement des conditions de calcul a entraîné une sous-déclaration, et donc une moindre recette. D'accord pour 1,5 euro ; on verra ensuite s'il faut aller plus loin. Les personnes fragiles, handicapées ou âgées, sont nombreuses parmi les particuliers employeurs. L'emploi direct a des avantages, les personnes âgées notamment aiment bien avoir le même intervenant.

M. Jean Desessard.  - Exactement.

M. Dominique Watrin.  - En même temps, il y a des inconvénients au système, avec l'exercice isolé de la profession. Je sais que la Fédération des particuliers employeurs milite pour les 2 euros. Commençons par 1,5 euro en voyant si elle tient ses engagements en matière de formation et d'information sur les droits des salariés qui ont droit à des indemnités, par exemple en cas de rupture du contrat de travail...

Mme Isabelle Debré.  - Nous voterons l'amendement du rapporteur général, même s'il est a minima par rapport au nôtre. 16 000 emplois détruits en 2013, c'est beaucoup trop. Votons cet amendement pragmatique, en espérant que l'Assemblée nationale nous suivra.

M. René-Paul Savary.  - Les personnes âgées seront directement touchées par la non-valorisation des retraites : c'est une double peine, après celle infligée au titre de la Casa. Sans parler des 645 millions d'euros pour la dépendance... Cette mesure leur envoie un signe. Mieux vaut des personnes formées, donc déclarées. Notre sous-amendement -à 2 euros- coûterait 40 millions d'euros de plus, certes, mais il faut tenir compte des emplois déclarés supplémentaires que cela entraînerait, et donc les recettes afférentes. La Cour des comptes propose d'unifier le cadre réglementaire -il faut simplifier. Le Cesu était une amélioration considérable ; il faut poursuivre, aller vers la dématérialisation.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Je suis un peu étonné de l'attitude du groupe CRC qui, après avoir refusé toute réduction des cotisations, prend une position orthogonale sur cet amendement...

M. Dominique Watrin.  - Nous ne sommes pas dogmatiques !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Les publics fragiles sont définis par l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale : les personnes âgées de plus de 70 ans, dépendantes ou non, les personnes dépendantes bénéficiaires de l'APA, les personnes handicapées, les parents d'un enfant handicapé, les personnes de plus de 60 ans obligées de faire appel à une tierce personne pour les actes de la vie quotidienne, les bénéficiaires de certaines prestations d'aide sociale. Pour toutes ces personnes, il y a déjà une exonération totale: les 75 centimes ne les concernent pas.

M. Gilbert Barbier.  - Et les familles ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Je parle des personnes fragiles -elles sont déjà exonérées.

Le rapport de la Cour des comptes pointe aussi un certain nombre d'abus, d'interrogations : certains installateurs de téléphone facturaient des heures de service à la personne. Idem pour des cours de coaching à domicile, de claquettes...

Mme Isabelle Debré.  - Cela ne changera rien !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Réfléchissons tout de même collectivement, au moment où l'on cherche à réduire les dépenses, à ce qui relève du contraint, comme les gardes d'enfants, et ce qui relève du confort. Le Gouvernement maintient son opposition.

M. Éric Doligé.  - M. le ministre déclarait récemment que le montant de la déduction sera calibré en fonction de l'évolution du texte, en envisageant de passer à 1,5, 1,75 ou 2 euros. Comment avez-vous fait pour aboutir à ces chiffres ? Il est facile de pointer quelques abus...

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Ils existent !

M. Éric Doligé.  - Regardons plutôt la situation générale.

Enfin, le Gouvernement a décidé d'augmenter de 2 % le RSA -sans concertation d'ailleurs avec les conseils généraux. C'est 200 à 300 millions d'euros de plus, pendant cinq ans. Là, nous portons la dépense de 120 à 160 millions d'euros : le Gouvernement a des moyens bien supérieurs à ceux des départements.... C'est peu, étant donné le nombre de personnes concernées, mais c'est le minimum.

Les sous-amendements identiques nos18 et 46 ne sont pas adoptés.

À la demande du groupe socialiste, l'amendement n°1 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°227 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l'adoption 343
Contre 0

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements)

M. le président.  - Amendement n°56, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe CRC.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

pour les contrats dont la durée de travail est égale à la durée définie à l'article L. 3121-10 du code du travail

Mme Laurence Cohen.  - De manière constante, la Cour des comptes, chaque fois qu'elle remet un rapport sur les exonérations de cotisations sociales, fait remarquer que ces dernières ont un effet négatif sur l'emploi. Les exonérations ou allégements reposant principalement sur les bas salaires, les employeurs sont en effet incités indirectement à maintenir la rémunération de leurs salariés dans la fourchette ouvrant droit aux exonérations, aux alentours du Smic.

Cela contribue à une paupérisation des travailleurs et favorise le développement du temps partiel, devenu une forme d'organisation du travail, insuffisamment rémunéré, ce qui n'est pas sans conséquence sur le niveau des retraites des travailleurs concernés, qui sont, le plus souvent, des femmes.

Nous refusons de voir le temps partiel devenir un outil de gestion au service du patronat, autant qu'un moyen d'optimisation sociale.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable. Comme les suivants, cet amendement ne va pas dans le sens du pacte de responsabilité et de solidarité, qui entend instaurer la confiance.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Le recours au temps partiel est très variable selon les entreprises et les secteurs. Votre amendement ne trie pas entre le temps partiel subi et le temps partiel choisi, lequel représenterait, selon les études, 70 % du total. (On le conteste sur les bancs CRC) Quand bien même il ne représenterait que 50 % ou même 30 %, je ne puis être favorable à votre amendement, qui ne fait pas la différence. Retrait ou rejet.

Mme Laurence Cohen.  - Nous le maintenons. Le temps partiel subi est un fléau qui touche principalement les femmes. Et l'on ne ferait rien sous prétexte de ne pas pénaliser celles et ceux qui l'ont choisi ?

L'amendement n°56 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 16, première phrase

Après le mot :

travail

insérer les mots :

dont la durée est conforme au premier alinéa de l'article L. 1221-2 du code du travail

II.  -  En conséquence, alinéa 17, dernière phrase

Supprimer les mots :

ou qui ne sont pas employés sur toute l'année

M. Jean Desessard.  - Le code du travail dispose que « Le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail ». Malheureusement, c'est de plus en plus théorique : on constate un recours accru aux contrats à durée déterminée. On en est à 83 % des embauches en 2013.

L'exonération de cotisations patronales proposée ici sans distinctions ni conditions suscite de nombreuses inquiétudes quant à l'effet d'aubaine pour les employeurs. Nous proposons de conditionner l'avantage donné à l'employeur au recours à des CDI.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Même débat que précédemment : certains CDD correspondent à une nécessité économique. Ils ne sont pas abusifs, d'autant qu'ils sont encadrés par le code du travail. Ne pénalisons pas de façon excessive le recours à des CDD dont l'utilité serait démontrée.

Mme Annie David.  - Sous couvert de volontariat, on laisserait perdurer les abus, au lieu de donner un signe de notre volonté d'y mettre fin ! Nous voterons cet amendement afin d'infléchir ces exonérations ; leur rejet nous confirmerait dans la volonté de voter contre l'article 2.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Le parti socialiste a toujours défendu la modulation des cotisations sociales afin de favoriser le recours au CDI. Il y a beaucoup d'incitations pour les entreprises. Je voterai l'amendement.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Je ne puis laisser croire que le Gouvernement ne souhaiterait pas privilégier les CDI et être rigoureux sur l'usage des CDD. Les cotisations sociales sont-elles un bon outil alors que le droit du travail en vigueur encadre précisément le recours au CDD, ce dont la droite s'émeut d'ailleurs volontiers ?

MM. Éric Doligé et Jean-Noël Cardoux.  - Oh oui !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - L'exonération de cotisations sociales non plus que la fiscalité des revenus ne sont de bons outils à cet effet.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.

I.  -  Alinéa 16, première phrase

Après le mot :

travail

insérer les mots :

dont la durée est conforme au premier alinéa de l'article L. 3121-10 du code du travail

II.  -  En conséquence, alinéa 17, dernière phrase

Supprimer les mots :

ou qui ne sont pas employés sur toute l'année

M. Jean Desessard.  - Cet amendement ressemble beaucoup à celui qui a été défendu par nos collègues CRC. J'ai une question, monsieur le ministre... (Exclamations) Me répondrez-vous ? Les téléspectateurs attendent, je le répète, des réponses politiques. (Sourires)

L'outil pour réduire la précarité ne serait pas fiscal ? Les cotisations sociales ne seraient pas non plus efficaces ? Alors, quelles mesures prendrez-vous, monsieur le ministre, à cette fin ?

Quant à mon amendement, il est défendu !

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean Desessard.  - Et ma question ? (Mouvements divers) Monsieur le ministre, vous avez fait appel à notre intelligence, à celle des membres du groupe CRC, du groupe écologiste et de quelques socialistes, qui ont insisté sur la montée de la précarité. Quelles mesures, monsieur le ministre, proposez-vous ?

Mme Christiane Demontès.  - Elles ont déjà été votées !

M. Jean Desessard.  - La proportion de contrats à temps partiel a atteint, en 2012, 18 % des contrats d'embauche. La concurrence le veut, dit-on d'un côté de l'hémicycle. Si l'on s'en accommode, comment fera-t-on pour que les gens vivent mieux ? Si l'on veut lutter contre, comment ? Les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes. Combattre l'abus du temps partiel, c'est aussi une façon d'obtenir l'égalité salariale. (Approbations sur les bancs CRC) Quelles mesures, monsieur le ministre, pour que le CDI à temps plein soit la norme ?

M. Éric Doligé.  - C'est la quatrième fois que vous posez la question !

L'amendement n°24 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°57, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

I.  -  Alinéa 16, seconde phrase

Remplacer les mots :

et d'un coefficient

par les mots :

, d'un coefficient et du taux d'évolution des effectifs de l'entreprise sur un an

II.  -  Après l'alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux d'évolution des effectifs de l'entreprise sur un an est égal au rapport entre les effectifs de l'entreprise tels que définis à l'article L. 1111-2 du code du travail en début d'année et ces effectifs en fin d'année.

III.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Dominique Watrin.  - Aucune étude ne démontre l'effet des exonérations de cotisations sociales sur l'emploi. Bien au contraire. Certains parlent même d'une « énigme non résolue ». L'État ne doit pas renoncer au levier fiscal. Chaque réduction de cotisations patronales a des conséquences sur les salariés. Nous ne nous interdisons pas de contrôler les exonérations, afin de s'assurer au moins qu'elles ne subventionnent pas des suppressions d'emplois et que les employeurs « jouent le jeu ». Tel est l'objet de cet amendement.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Avis défavorable : cet amendement pourrait aggraver la situation des entreprises en difficulté.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - J'en profite pour répondre à M. Desessard. Ma réponse est claire sur le temps partiel : l'outil adapté est un gros livre rouge, voire pour certains un pavé rouge, qui s'appelle le code du travail. Le Gouvernement est attaché au respect de ses règles.

L'amendement n°57 est difficile à mettre en oeuvre. Il entraînerait des effets pervers. Avis défavorable.

M. Dominique Watrin.  - Vous avez fait allusion à la loi sur la sécurisation de l'emploi pour lutter contre le temps partiel subi. Elle a permis des dérogations et des négociations de branche qui n'aboutissent pas. Cette loi n'est donc pas appliquée. Ainsi, de l'aide à domicile en faveur des personnes âgées : le salaire moyen y est de 830 euros par mois. Cela n'évoluera guère, d'après ce que l'on sait de la négociation de branche : les employeurs proposeraient un minimum de 16 heures alors que cette loi exige un minimum de 24 heures.

Monsieur le ministre, vous refusez les exonérations conditionnées. Je reprends la question de M. Desessard : quelles est votre solution ?

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je n'ai pas voté l'amendement sur le temps partiel pour ne pas pénaliser les salariés qui voudraient travailler à temps partiel, même s'il est, il est vrai, souvent subi.

En revanche, François Hollande s'est engagé à favoriser le passage au CDI, en renchérissant le coût du CDD. La modulation des cotisations sociales en est l'un des moyens. On pourrait aussi faire des quotas par entreprise, par branche. Trop rigide, nous a-t-on rétorqué. La modulation est simple et efficace pour orienter vers les CDI. Si les CDD sont jugés indispensables, c'est qu'ils sont profitables pour les employeurs, les salaires n'étant pas notablement supérieurs à ceux des CDI.

L'amendement n°57 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano et Vall.

Alinéa 23

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

« 1° Aux salariés percevant une rémunération au titre des temps de pause, d'habillage et de déshabillage ne constituant pas du temps de travail, versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 ;

M. Gilbert Barbier.  - Dans certains secteurs d'activité, une partie de la rémunération des salariés est affectée à des temps de pause d'habillage et de déshabillage. Les tribunaux ont considéré que ces temps ne peuvent être assimilés à du temps de travail. Pour ne pas léser ces entreprises tenues de rémunérer ces temps d'inactivité, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a introduit la possibilité de neutraliser cette part de la rémunération versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er octobre 2007, dans le calcul des exonérations.

En première lecture, l'Assemblée Nationale a adopté un amendement supprimant cette disposition, ce qui risquerait de priver les entreprises concernées d'une grande partie des effets du pacte de solidarité dont l'ambition est pourtant de réduire les charges patronales pour les salaires les moins élevés. Notre amendement rétablit les allégements de charge sur ces temps de pause rémunérés.

M. le président.  - Amendement identique n°11, présenté par M. Cardoux et les membres du groupe UMP.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Même objet. Selon l'instigateur de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale, qui est revenu sur le calcul des exonérations Fillon, le manque à gagner pour les entreprises serait compensé par les mesures prises par le Gouvernement en faveur de l'abaissement du coût du travail. Encore heureux ! Si chaque fois donne quelque chose d'une main, l'Assemblée nationale le retire, on ne parviendra pas à maintenir un climat de confiance vers les entreprises. Comment pourraient-elles entendre ce message si l'on revient sur de telles mesures ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - Cet amendement rendrait éligibles aux allégements des salariés dont la rémunération excède 1,6 Smic. Il est vrai que, selon le secteur automobile, le vote de l'Assemblée nationale neutraliserait l'effet des allégements. La commission ne s'est pas prononcée ce matin, désirant entendre le Gouvernement.

Il s'agit d'une niche de 170 millions d'euros, dont 140 pour le commerce de détail, la grande distribution et les entreprises de sécurité. L'industrie n'est pas concernée. La suppression de cette niche est très loin de neutraliser les efforts du PRS, lequel représente plus d'1,5 milliard d'euros du coût du travail pour le secteur du commerce, quand la niche ne représente que 140 millions d'euros. Nous avons été interpellés par un groupe automobile français ; je ne suis pas sûr que cette mesure lui porte véritablement atteinte.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Vous avez bien précisé les bénéficiaires de cette niche, qui ne sont pas, en majorité, dans l'industrie, sauf peut-être exceptions locales, limitées. Le Gouvernement a approuvé l'amendement des députés à l'Assemblée nationale. S'il se confirmait qu'il y a un problème ponctuel, nous pourrions y revenir prochainement dans le cadre des travaux parlementaires. Avis défavorable.

Mme Isabelle Debré.  - De quoi ont besoin les entreprises et les entrepreneurs ? De confiance, donc de clarification et de stabilité. Et d'un coup, par un amendement à l'Assemblée nationale, on change les règles du jeu, sans étude d'impact. Monsieur le ministre, « il semblerait que », « on pense que », l'industrie n'en bénéficie pas. De telles précautions de langage ne devraient pas avoir cours. Avant de voter des amendements, on fait une étude d'impact.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Je suis trop respectueux des droits des parlementaires pour imposer à chaque amendement une étude d'impact de grande qualité. Cette disposition a été introduite en 2008 par amendement parlementaire de M. Dominique Tian, sans étude d'impact, à ma connaissance.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Eh oui !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Stabilité, certes, mais ce texte accorde 4,5 milliards d'euros d'exonérations aux employeurs, et cette instabilité-là ne vous heurte pas.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - En effet.

Mme Isabelle Debré.  - Ce n'est pas pareil !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Le rapporteur général a cité des éléments communiqués par le ministère des finances sur les bénéficiaires de la niche, je pourrais en rajouter. À l'Assemblée nationale, le Gouvernement a donné un avis favorable après avoir étudié la question. D'après notre analyse, l'entreprise qui vous a interpellé n'y a pas droit. Est-ce qu'une pratique, une doctrine le lui a ouvert ? Cela mérite expertise. Cette mesure de simplification concerne essentiellement la grande distribution, ce qui est très bien de compenser pour elle l'avantage dû au CICE, le rapport étant de 1 à 10, voire 1 à 15. Et j'entends que la grande distribution bénéficierait de façon injustifiée du CICE... Votre argumentation, madame Debré, ne tient pas. Je réitère l'avis défavorable du Gouvernement à cet amendement.

Mme Isabelle Pasquet.  - De très nombreux postes de travail impliquent l'obligation pour le salarié du port d'un uniforme ou d'une tenue de sécurité. Le temps d'habillage et de déshabillage entraîne des contreparties, sous forme de temps de repos ou de compensation financée, par accord d'entreprise ou convention de branche. Ces amendements étendent le champ des exonérations que nous contestons : nous voterons contre.

M. Yves Daudigny, rapporteur général.  - À titre personnel, je voterai contre l'amendement. Le système en cause dans l'argumentaire distribué aux membres de la commission est bien dérogatoire : en règle générale, tous les éléments de rémunération, même s'ils ne sont pas liés à un temps de travail, sont pris en compte dans le calcul des allégements généraux. Cette neutralisation n'a aucun rapport avec le fait, pour un salarié, de bénéficier d'un temps de pause rémunéré. L'amendement voté à l'Assemblée nationale est pertinent.

M. Gilbert Barbier.  - Cette note anonyme venait apparemment de Bercy.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État.  - Je plaide coupable.

M. Gilbert Barbier.  - Pourquoi certains grands groupes de la métallurgie s'insurgeraient contre cette mesure si elle ne les concerne pas ? Vous avez cité les grandes surfaces, il y a aussi le secteur agro-alimentaire, comme les abattoirs. On aimerait avoir plus de précisions.

Mme Isabelle Debré.  - Très bien !

À la demande du groupe UMP, les amendements identiques nos5 rectifié et 11 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°228 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 183
Contre 159

Le Sénat a adopté.

Nominations à une éventuelle CMP

M. le président.  - Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été publiée ; je n'ai reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du Règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants titulaires du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire : Mme Annie David, MM. Yves Daudigny, Jean-Pierre Caffet, Mme Christiane Demontès, M. Jean Noël Cardoux, Mme Isabelle Debré et M. Gérard Roche ; membres suppléants : Mmes Jacqueline Alquier, Aline Archimbaud, M. Gilbert Barbier, Mme Catherine Deroche, MM. Georges Labazée, Jacky Le Menn et René-Paul Savary.

Leur nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.