Enseignement supérieur et recherche (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la discussion générale du projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Discussion générale (Suite)

M. le président.  - Je salue le premier orateur masculin de ce débat. (Sourires)

M. Philippe Adnot .  - Eh oui, la parité n'est pas intégrale ni hégémonique, je m'en félicite. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite ; exclamations à gauche) Je connais votre parcours, madame la ministre, qui mérite respect et sympathie. Pourtant, je reconnais, dans cette discussion, un malaise. Pas pour les cours en anglais, qui existent déjà et qui sont nécessaires, sachant qu'une parfaite connaissance du français doit rester exigée pour l'obtention de diplôme. (Applaudissements à droite)

Je ne vous accuserai pas de vouloir détruire la réforme précédente : dans certains domaines, vous reprenez et améliorez le rythme de ce qui a été engagé. Vous rêvez, comme Mme Pécresse, de faire des PRES des mastodontes. Je ne crois pas que la masse fasse la qualité. Les SATT, ces usines à gaz régionales, porteront-ils les fruits attendus ?

Je proposerai des amendements sur l'orientation, la gouvernance, leurs moyens. Orienter les bacs professionnels vers les IUT ne doit pas conduire à exclure les lauréats du bac général. Il faudra bien, un jour, pratiquer la sélection à l'entrée à l'université. (Applaudissements à droite)

Nous souscrivons aux dispositions relatives à la gouvernance mais il faudra clarifier le partage des moyens. Le système Sympa doit être enfin mis en oeuvre sur un périmètre élargi.

Un milliard de dotation sera nécessaire pour assurer le rattrapage des universités sous dotées. Il n'est pas normal que les frais d'inscription à l'université soient si bas, au regard de ce qui prévaut en Europe. Moins cher qu'un abonnement de téléphone !

Autre nécessité, faire évaluer notre recherche de manière indépendante, et non par auto-évaluation.

Puisse la discussion qui va suivre nous donner l'occasion de travailler sereinement à une université de qualité. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Sophie Primas .  - La LRU, adoptée il y a cinq ans, fut une réforme capitale. Le principe d'autonomie, affirmé par les lois de 1968 et 1984, était jusque là resté virtuel, les gouvernements successifs hésitant à affronter les corporatismes. La LRU s'y est attachée, en réformant la gouvernance. Les universités disposent de la maîtrise de leur budget, de leurs ressources humaines et peuvent choisir de gérer leur patrimoine. L'objectif a été tenu et a rapproché nos universités des standards internationaux. Des avancées spectaculaires que l'on ne peut nier. Pas plus que l'augmentation des moyens, sans précédent au cours d'un quinquennat traversé par une crise sans précédent. (Exclamations à gauche) Le président Sarkozy, M. Fillon, Mme Pécresse ont fait le choix de la jeunesse, de la recherche et de l'innovation comme ferment d'une dynamique pour notre pays. (Applaudissements à droite) Et que l'on ne vienne pas dire que les étudiants auraient été sacrifiés : bourses, plan Réussite en licence. (Les protestations fusent à gauche tandis qu'on le confirme à droite) Les chiffres sont les chiffres !

Si toutes les universités n'ont pas atteint leur rythme de croisière, la LRU a ouvert une ère de progrès. Je salue le rapport de Mme Gillot et M. Ambroise Dupont, qui ont relevé les points perfectibles. Les liens avec les lycées, avec les entreprises se sont améliorés. Cinq ans plus tard, on nous appelle à légiférer de nouveau. Mais ce texte, qui multiplie les verbiages et les déclarations d'intention, est fort décevant...

M. Jacques Legendre.  - Eh oui !

Mme Sophie Primas.  - Certes, il propose quelques avancées et aurait pu en apporter d'autres si nos amendements avaient été adoptés en commission. A contrario, il remet en cause des principes forts, notamment en matière de gouvernance. A quoi bon une concertation si, in fine, on n'écoute pas les acteurs ?

Une avancée historique qui lierait pour la première fois enseignement supérieur et recherche ? A la différence de la LRU, ce texte n'est pas une loi de programmation.

M. David Assouline.  - La loi Pécresse n'était pas une loi de programmation !

Mme Sophie Primas.  - Le groupe UMP est donc très réservé. Sur quatre points, nous proposerons des amendements.

La suppression des PRES au profit des communautés est malvenue : pourquoi repartir à zéro sans laisser aux établissements le choix, conformément au principe de l'autonomie ?

Ce texte fait cohabiter deux instances, au risque de susciter une dyarchie au sommet. Quelle plus-value apportera le conseil académique ? Le président du conseil d'administration devrait, au moins, être président du conseil académique.

Vous imposez des quotas aux IUT pour accueillir plus d'étudiants venus des voies technologique et professionnelle. Je comprends votre souci d'éviter l'échec dans l'orientation, alors que les IUT sont un formidable outil d'ascension sociale, mais ce n'est pas en les affaiblissant que l'on améliorera le système. Donnons aux universités les moyens budgétaires de se rapprocher du système qui prévaut dans les IUT.

La suppression de l'Aeres est toute politique. Cette institution a gagné sa renommée internationale, après une mise en place difficile. Elle a su évoluer et est désormais bien acceptée. Sa suppression serait une sanction injuste, qui ferait de surcroît perdre un temps précieux à l'évaluation. Nous voulons, enfin, ouvrir davantage l'université au monde de l'entreprise.

Améliorer le taux de réussite des jeunes passe par la sélection. Une sélection non punitive mais orientante. Plus de souplesse dans les parcours de formation serait également bienvenue.

Autant de sujets sur lesquels il faut avancer ensemble. Hélas, cette loi nous fait perdre du temps. Elle perturbe la gouvernance, éloigne les universités des réalités locales, met en danger les IUT, alors que la croissance et l'emploi passent par une université forte et attractive. Aussi présenterons-nous une motion de procédure. « Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité » disait Victor Hugo. Donnons aux universités la liberté. (Applaudissements à droite)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - La recherche et l'enseignement supérieur sont des enjeux de civilisation. Il faut plus que jamais, face aux nouveaux défis d'un monde de plus en plus complexe, un enseignement supérieur et une recherche de qualité, qui donnent à notre pays les moyens de ne pas subir mais de comprendre et de maîtriser les évolutions. Ce qui impose de placer au premier plan de toute réforme le savoir et la connaissance.

La LRU de 2007 et le pacte de 2006 ont profondément déstructuré l'enseignement supérieur et la recherche, qui ont aujourd'hui besoin d'une véritable rupture. Les Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche ont révélé les immenses attentes des enseignants-chercheurs après dix ans de mépris et de méfiance, d'asservissement à des objectifs de compétitivité économique. Aujourd'hui, cependant, la déception prévaut. Ce projet de loi ne marque pas la rupture attendue, et pourtant indispensable. Les lois votées par la droite témoignaient d'une vision utilitariste, fondée sur les critères définis à Lisbonne, de l'université et de la recherche, qui devraient viser l'employabilité et la croissance avant toute chose. L'obsession économique privilégie la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale, hiérarchise les savoirs, asservit la recherche publique aux intérêts privés. Nous ne l'acceptons pas.

La montée en puissance du CIR -5 milliards d'euros en 2012-, attribué principalement à de grandes entreprises, n'empêche pas Sanofi de fermer son centre de recherche en France. Quelle est son efficacité ?

Le grand emprunt a attribué des financements supplémentaires aux grands pôles et créé une dichotomie entre ceux-ci et les établissements de proximité, désormais délaissés alors qu'ils accueillent la majorité des étudiants. La LRU n'a pas fait émerger les espaces de coopération nécessaires sur les territoires, se bornant à empiler les dispositifs bureaucratiques ; l'autonomie a été réduite à l'autonomie budgétaire et de gestion des ressources humaines : elle a favorisé l'expansion de la précarité et la suppression de postes. Dix-neuf universités étaient en déficit fin 2012 et la moitié pourrait l'être l'an prochain. La LRU a confié aux établissements, en guise d'autonomie, le soin de mener la RGPP en leur sein. La LRU a aussi miné la démocratie universitaire, renforcé les pouvoirs du président au détriment des étudiants et du personnel non enseignant.

Comment ne pas conclure à un besoin urgent de rupture ?

Hélas, ce projet de loi s'inscrit dans la logique de la LRU et du pacte pour la recherche ; et il n'est pas une loi de programmation de moyens. La précarité doit pourtant être enrayée, ce qui exige une analyse de ses causes et des moyens supplémentaires. L'ANR, très contestée par la communauté scientifique, n'est même pas évoquée ; son intégration au sein de la Mires aurait été un signe fort. L'argument du manque de moyens pour lutter contre la précarité ne tient pas face aux 5 milliards d'euros du CIR, autant d'argent soustrait aux laboratoires publics au profit d'entreprises telles que Aventis, IBM, ou Sanofi qui n'en demandaient pas tant -et licencient.

La vision utilitariste perdure. Le texte fixe une nouvelle mission aux laboratoires et au personnel de l'université et de la recherche : le développement du transfert économique. Quels que soient les changements de rédaction adoptés en commission, le fond demeure : l'accent est mis sur l'amélioration de la compétitivité. Or la recherche doit avant tout poursuivre l'élévation du niveau des connaissances. La subordination à l'impératif économique conduit à privilégier la recherche appliquée et à marginaliser les sciences humaines et sociales.

Ce projet de loi s'accompagne d'une volonté de spécialisation régionale, voulue par Bruxelles. La coopération territoriale est rendue obligatoire. On s'éloigne ainsi d'un développement équilibré du territoire, avec des établissements de haut niveau au service de la population, au profit d'une concurrence entre établissements et entre régions. L'Aeres, dénoncée par la communauté scientifique, semble épargnée. L'évaluation est indispensable et doit être le fait des pairs, donc élus ; ce n'est pas le cas. Elle devrait viser l'amélioration du travail collectif de nos laboratoires et de nos chercheurs et non se résumer à un contrôle sur critères quantitatifs non représentatifs. Ce projet de loi substitue à la procédure d'habilitation des diplômes l'accréditation des établissements, qui semble porter davantage sur la capacité de mise en oeuvre que sur le contenu des formations. Est-ce la fin du monopole de délivrance des diplômes reconnu à l'État ?

L'enseignement supérieur et la recherche ont besoin d'une rupture claire -ce que porteront nos amendements. Nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs CRC ainsi que sur plusieurs bancs à droite, M. Jean-Jacques Mirassou s'exclame)

M. Jean-Pierre Chevènement .  - Pour la première fois, un projet de loi définit une stratégie d'ensemble pour l'enseignement supérieur et la recherche. Je salue cette ambition qui répond aux défis lancés par les pays avancés, mais aussi par les pays émergents. Les vieux pays industrialisés n'ont plus le monopole de la science et de la technologie. C'est une situation radicalement nouvelle à laquelle la réponse ne peut être que budgétaire, même si je salue la sanctuarisation de ce budget. Cet effort accru doit être celui de tous, et d'abord celui de nos chercheurs et universitaires.

J'avais déjà constaté, en 1981-1982, le taux d'échec des étudiants et la trop faible valorisation des résultats de notre recherche. La recherche technologique -10 % des dépenses de recherche seulement- et le transfert sont nos points faibles. Ce sont des faits, et les faits sont têtus... Le Gouvernement exprime sa confiance à l'égard de la communauté universitaire et scientifique, salue l'excellence de notre recherche fondamentale. C'est bien, mais cela ne suffit pas.

Vous proposez un « livre de transfert » et la création de nouvelles plateformes de transfert technologique ; vous voulez que le titre de docteur soit reconnu dans les conventions collectives et les grilles de la fonction publique. C'est bien. A défaut d'y parvenir, le déséquilibre entre une recherche publique bien dotée et une recherche industrielle privée trop faible se perpétuera.

Il serait aussi souhaitable d'encourager des relations plus étroites entre la formation et la recherche. Dans la région de Belfort-Montbéliard, de grandes entreprises mondialisées sont implantées et un tissu industriel dense s'est développé. Une véritable stratégie nationale devrait comporter un contrat de site propre à la communauté d'universités et d'établissements de Bourgogne et de Franche-Comté, pour viser la création d'un pôle ingénierie dans le nord-est de la Franche-Comté.

Vous évoquez à juste titre l'État stratège, qui doit appliquer son effort non seulement aux métropoles mais aussi aux pôles industriels. Il devrait figurer dans le contrat de site comme dans le contrat de plan 2014-2020.

Vous avez parlé de démocratie et de collégialité. Mais les hommes sont les hommes ; ils ne sont pas à l'abri du corporatisme...

M. Jacques Mézard.  - Certes !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Nous avons déposé un amendement pour dire que le président du conseil d'administration peut présider le conseil académique ou déléguer sa présidence. Je sais qu'il est de bon ton de fustiger l'autorité et le centralisme mais une diarchie n'est pas possible au sein des universités.

La présidence ne se partage pas, nous n'avons pas la tradition des universités anglo-saxonnes.

J'approuve l'objectif de 50 % d'une classe d'âge au niveau de la licence. Les bacs professionnels, que j'ai créés en 1985, n'ont pas pour objet principal de conduire à l'enseignement supérieur mais à former une main-d'oeuvre particulièrement qualifiée pour les entreprises.

M. Jacques Legendre.  - Tout à fait !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Sans doute faudra-t-il multiplier les STS. Des quotas en IUT pour les bacheliers technologiques, pourquoi pas... Il faudra surtout renforcer la formation générale dans ces filières afin qu'un plus grand d'entre eux puissent poursuivre des études universitaires. Comment atteindre 50 % d'une classe d'âge à bac + 3 avec seulement 30 % de bacheliers généraux ? Il faut revoir cela avec M. Peillon.

Instaurer une plus grande continuité entre enseignement secondaire et enseignement supérieur va dans le bon sens ; vous avez raison aussi de parler de spécialisation progressive -nous avions autre fois les Ipes... La baisse du niveau scolaire nous incite à tout reprendre à la base. Il faut commencer par l'école, comme le propose le ministre de l'éducation nationale. L'alternance doit être développée, oui.

Si l'on veut refonder l'école de la République, il faut que nos futurs enseignants reçoivent des cours obligatoires de philosophie et d'histoire, pour transmettre à notre jeunesse l'histoire de notre République.

Sur l'enseignement en anglais, je relève une contradiction avec notre Constitution. Ne vous inscrivez pas dans la continuité du précédent gouvernement ! Il faut distinguer attractivité des universités et souci de défendre et de promouvoir notre langue. Comme le dit Fernand Braudel, l'identité de la France, c'est à 80 % sa langue.

La politique des visas est trop restrictive. Nous n'accueillons par exemple que 4 000 étudiants russes, sur 800 000 apprenant de français et un total de 7 millions d'étudiants -16 000 en Allemagne.

Accueillons davantage d'étudiants indiens, pakistanais ou bangladais ; les cours en anglais inverseront-ils les flux actuels ? J'en doute. Nous manquons de confiance en nous et en l'avenir de notre langue.

M. Jacques Legendre.  - Très bien !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Le sabir qu'est l'anglais international favorise l'imprécision des concepts. Les scientifiques britanniques réclament souvent la traduction simultanée dans les colloques parce qu'ils ne comprennent pas l'anglais que parlent nos chercheurs... (Sourires) Accueillons plus d'étudiants étrangers, relevons leur niveau de français, programmons des épreuves en français qui contribuent à l'obtention du diplôme. Ne donnons pas le signe frileux que nous ne croyons pas en l'avenir de notre langue. Ne polluons pas un débat essentiel avec cette affaire. Il y a un juste équilibre à trouver pour mobiliser toutes les forces de la France. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. David Assouline .  - Je salue Mme la ministre, sa disponibilité, son travail, son courage. Il en faut pour mener pareille réforme, qui était très attendue, tant le rôle de l'enseignement supérieur et de la recherche est important pour la place de la France dans le monde, tant le malaise perdure dans nos universités, malgré la LRU, à cause de la LRU.

Le moment est donc venu de mettre en oeuvre une grande ambition qui se traduise de façon lisible pour la communauté universitaire et au-delà. L'école et la jeunesse étaient au coeur des engagements de François Hollande. Cette réforme, comme toutes celles portées par le Gouvernement, mais celle-ci en particulier, est destinée à redonner espoir aux jeunes, à redresser notre pays en valorisant tous ses atouts. La France doit retrouver son rang.

D'où venons-nous ? Où en sommes-nous ? Je disais ici, en 2007, à Mme Pécresse que les enseignants-chercheurs vivaient de plus en plus mal la lourdeurs des tâches administratives, les contrôles incessants, des conditions de travail dignes de pays en voie de développement ; que le personnel administratif et technique vivait de plus en plus mal de devoir gérer la pénurie ; que les étudiants vivaient de plus en plus mal la précarisation et l'échec ; que les présidents vivaient de plus en plus mal leur rôle d'animateurs sans pouvoir ; que la communauté universitaire vivait de plus en plus mal la stigmatisation des universités et les propos des déclinoloques...

Aujourd'hui, six ans après la loi LRU, sept après la loi Recherche, je ferai à peu de choses près le même diagnostic. Hélas, car le temps perdu ne se rattrape pas facilement. On n'a traité alors que la gouvernance alors que d'autres réformes étaient nécessaires pour lutter contre l'échec en premier cycle ou encore améliorer les conditions de vie des étudiants, valoriser les jeunes chercheurs, définir une stratégie globale de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Nous voulons en finir avec dix ans de renoncements, réaffirmer la collégialité, le service public de la recherche. Oui à l'autonomie, que nous, socialistes, avons toujours défendue, dès lors qu'elle se traduit par un renforcement de l'efficacité et de la démocratie. Tandis que la droite y a vu la concurrence libérale de tous contre tous, la sélection et la privatisation.

La commission sénatoriale que je préside a dressé le bilan critique de la LRU. Le mécanisme de pilotage et de gestion prospective, avec cinq ans de recul, est loin d'avoir produit les résultats escomptés. Seules dix universités ont mis en place une comptabilité analytique. Mais la LRU a enclenché une dynamique qu'il ne faut pas casser. Le changement ne passe pas par son abrogation mais par la correction de ses défauts, par l'engagement de tous ceux qu'elle a oubliés, par la concertation avec tous les acteurs de la grande communauté de l'enseignement supérieur et de la recherche. Avec les Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, la concertation a eu lieu, ce qui tranche singulièrement avec la méthode du gouvernement précédent.

La réussite des étudiants, la qualification des jeunes, le soutien à la recherche fondamentale sont les objectifs de ce texte ambitieux. Sans savoir, pas d'application, pas de progrès économique ou environnemental, pas de redressement durable.

Il faut traiter ce qui a été négligé mais aussi fixer une stratégie claire, et d'abord pour la réussite des étudiants avec l'objectif de faire accéder 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur. Mille postes sur cinq ans dédiés à la réussite éducative, le plus gros effort réalisé depuis dix ans ; la simplification des licences et masters, la priorité aux bacheliers professionnels et technologiques, le développement de l'alternance : je salue ces progrès, ainsi que le travail accompli par l'Assemblée nationale. Je pourrais énumérer d'autres avancées concrètes qui aideront à lutter contre l'échec, comme la programmation de 13 000 logements étudiants ou la budgétisation du dixième mois de bourse...

Mme Françoise Cartron.  - Très bien !

M. David Assouline.  - En matière de gouvernance -efficacité doublée de démocratie et de collégialité- comme d'aménagement du territoire, le texte rétablit des équilibres. Il propose une ambition et une stratégie globale de l'enseignement supérieur et de la recherche. La commission a bien travaillé, le groupe socialiste est fier que nombre de ses amendements aient été intégrés au texte.

Ce projet de loi nous donne les moyens de réformer dans la durée et dans la confiance. Notre jeunesse, nos universités sont une chance pour la France. Inscrivons notre travail dans une stratégie globale de redressement national ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Léonce Dupont .  - Le Parlement apprécie de débattre de l'enseignement supérieur et de la recherche vers la fin de l'année universitaire. La LRU a été examinée en juillet 2007 -son intitulé a été modifié au Sénat par référence à la première loi de décentralisation de 1982, relative à « la liberté et à la responsabilité des communes, des départements et des régions ». Et voici ce projet de loi, dont l'intitulé neutre n'exprime pas d'ambition particulière... Il est vrai qu'une partie de votre majorité réclame à corps et à cris l'abrogation de la LRU et tient des discours de contestation d'un autre temps. C'est désolant.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Et un peu exagéré !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Vous avez tenté de résister, madame la ministre, je vous en donne acte... Mais votre projet de loi est décevant, d'orientation et non de programmation, lesté d'intentions qui marquent un retour en arrière alors que les établissements n'ont pas eu le temps nécessaire pour acculturer une autonomie qu'ils ne pratiquent vraiment que depuis trois ou quatre ans.

Nous abordons ce texte dans un esprit pragmatique. L'exercice de l'autonomie implique un pilotage fort. D'où le conseil d'administration resserré créé par la LRU. Nous saluons la participation des personnalités extérieures à l'élection du président mais l'augmentation du nombre des membres des conseils d'administration nous inquiète. La réflexion stratégique ne peut se pratiquer qu'en petit comité. Veillons à l'ouverture sur le monde des entreprises...

M. Jacques Legendre.  - Très bien !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Je regrette que la parité des disciplines n'ait pas la même force que la parité des sexes...

La création d'un conseil académique est une idée intéressante, mais quel cap peut tenir un bateau avec deux gouvernails ? Il est impératif que les deux conseils, académique et d'administration, aient le même président. Quant aux communautés d'établissements, elles auront d'ailleurs les mêmes structures de gouvernance ; est-ce bien raisonnable ? Le Gouvernement fait preuve d'une créativité normative remarquable. On l'a vu sur la décentralisation ou les élections territoriales. Vous ajoutez ici une nouvelle couche au millefeuille institutionnel. On peut se demander si l'État ne renforce pas son contrôle à travers cette multiplication de structures complexes... La nouvelle politique contractuelle va dans le même sens ; nous restons dubitatifs sur la lourdeur administrative qui en résultera. Que restera-t-il de l'autonomie ? Un État stratège n'est pas incompatible avec la pratique de l'autonomie. Il ne le sait pas, ou plutôt ne le veut pas encore.

Pour vous, l'essentiel est d'améliorer la réussite étudiante. Comment ne pas partager cet objectif ? Nous prenons acte de l'échec du plan Licence. Combien de générations seront-elles ainsi malmenées avant que le tabou de la sélection soit levé ? Ne vous étonnez pas si les bonnes intentions affichées ne produisent pas les effets escomptés, la « boîte à outils » est là aussi bien vide...

Comment contrôlerez-vous le respect des quotas en IUT et STS négociés localement ? Que ferez-vous des bacheliers technologiques et professionnels qui ne seront pas retenus ? Vous voulez construire des passerelles longues ? Mais en quoi modifieront-elles le parcours des étudiants qui n'ont pas les pré-requis ? Quels moyens mettez-vous à disposition des établissements pour les stages ?

Comment éviterez-vous les ruptures d'égalité entre étudiants ?

Ces questions, la loi n'y apporte pas de réponse claire : sans une orientation contraignante, assortie d'accompagnement, il est illusoire de croire que l'université fera réussir chaque étudiant.

Sur la recherche, notre inquiétude est double. Pourquoi remplacer l'Aeres par une nouvelle autorité exerçant la même mission, alors qu'elle a su construire sa méthodologie et prendre sa place au-delà de nos frontières ? Notre rapporteure, dont j'ai apprécié le travail, a été bien malmenée par sa propre majorité. (« C'est vrai ! » à droite)

Le transfert est inséparable de la recherche publique. Il ne saurait être relégué au second plan. Il serait irresponsable de penser autrement.

« L'université n'est pas seulement l'affaire des universitaires mais de la Nation tout entière », disait Edgar Faure.

M. Jacques Legendre.  - Très bien !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Mais vous avez entendu donner des gages politiques à ceux qui veulent la fin de la loi LRU.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Pas du tout !

M. Jean-Léonce Dupont.  - Vous n'avez pas le droit de laisser les portes de l'université se refermer sur le monde qui les entoure. Il en va de l'avenir de notre pays. (« Très bien ! » au centre ; applaudissements à droite)

M. André Gattolin .  - Nous entendons la volonté du Gouvernement de répondre à l'urgence et rendre à notre économie son dynamisme. La France, en ce domaine, souffre de réels handicaps. Pour la Cour des comptes, la stagnation de l'effort de recherche vient de l'insuffisant investissement du secteur privé, quand l'Allemagne est deux fois plus performante en la matière. S'appuyer sur la puissance de la recherche publique pour stimuler l'effort privé et aider ainsi nos entreprises est un objectif louable, conforme au programme engagé en Europe en faveur de la recherche et de l'innovation.

Nous entendons réaffirmer la place des missions ici un peu oubliées de l'université. Transfert et innovation jalonnent l'ensemble du texte. Le mot transfert est ambigu. Si le savoir et la connaissance sont un bien commun, il n'est pas aberrant que notre économie bénéficie de transfert, pour autant qu'il n'y ait pas privatisation et qu'existe un retour vers la société dans son ensemble.

D'autres acteurs doivent bénéficier des transferts de la recherche publique. Et il ne s'agit pas, non plus, que les crédits destinés au public soient purement transférés vers l'économie sans contrepartie. La recherche fondamentale sans finalité marchande a été à la source de nombreuses découvertes pratiques -je pense, en biologie moléculaire, aux ARN afférents par exemple.

Quelle orientation générale a cette loi, au service de quelle conception de notre enseignement supérieur et notre recherche publique ? Gardons-nous d'une vision instrumentaliste. Je veux ici dire, avec Michel Rocard, ministre du plan en 1982, que le volontarisme est parfois le pire ennemi de la volonté. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Jacques Legendre .  - C'était en 2007 et pourtant, le débat reste vivant dans nos mémoires. Je rends hommage à Valérie Pécresse, qui a fait bouger les lignes en donnant aux universités l'autonomie, avec son corollaire, la responsabilité. (« Très bien ! » à droite)

Les réticences, les résistances furent vives. Mais peu à peu, les universitaires se sont appropriés ce texte, qui s'accompagnait d'un substantiel effort financier de l'État, trop longtemps insuffisant au regard de celui que consentaient nos voisins.

Pour autant, la loi Pécresse n'a pas tout résolu. Ainsi des droits accordés aux personnalités extérieures dans le conseil d'administration. Dans leur rapport, Mme Gillot et M. Ambroise Dupont ont jeté un regard approfondi sur l'application de cette loi. « Le big bang à l'heure du bilan » : le titre est éloquent. Il y a donc eu un big bang : une loi de refondation, en somme.

Votre objectif, madame la ministre, est plus modeste. Il faut vous en remercier. Ce texte continue et améliore quand cela est possible et nécessaire. Le syndrome de Shanghai avait frappé : « Big is beautiful » en quelque sorte (on s'étonne, à gauche, de l'emploi de l'anglais), puisque l'anglais est désormais de mise.

La gouvernance, nous pensons qu'elle ne peut être bonne si elle est bicéphale.

Sur l'évaluation, on ne peut admettre ni auto-évaluation, ni évaluation par les amis. L'Aeres avait su s'adapter. La réussite en licence ? Les mesures prises n'y ont pas remédié. Mais il faut reconnaître que tous les bacs ne se valent pas. Ils n'ouvrent pas tous à l'enseignement supérieur. Même nos bacs généraux sont inégaux : le bac S est moins un bac scientifique que le bac des meilleurs. Pourtant les filières littéraires doivent aussi être des filières d'excellence. Le bac technologique peine à se frayer un chemin vers l'enseignement supérieur. Quant au bac professionnel, remarquable invention de M. Chevènement, il n'a pas pour fin de conduire vers l'enseignement supérieur mais vise à donner une qualification professionnelle attestée.

Le bac ne se suffit plus à lui-même. Il vaut mieux l'avoir avec mention : on constate une inflation, ce qui pose le problème des options. Le bac est aussi le premier grade de l'enseignement supérieur ; l'université, qui ne participe guère au jury, l'oublie. Le ministre de l'éducation nationale ne s'est pas intéressé au bac dans sa grande loi.

Je n'oublie pas la nécessité de garantir à chaque bachelier la possibilité de trouver du travail et, après une première expérience professionnelle, celle de reprendre, s'il le souhaite, ses études ou de compléter sa formation.

L'orientation est essentielle. Mais attention à ne pas vous en remettre aux quotas, qui améliorent peut être les statistiques mais font aussi des victimes.

La démocratisation a progressé mais des inégalités géographiques demeurent. Plusieurs départements sont dépourvus de toute classe préparatoire, ai-je constaté à l'occasion d'un rapport sénatorial et cette situation perdure. Les universités sont mieux réparties, grâce à leurs antennes. J'ai pu, dans ma ville, mesurer les bienfaits qu'a procurés aux jeunes celle que j'ai créée. Mais certaines universités sont tentées de fermer leurs antennes pour se reconcentrer. Il faut se battre, madame la ministre, pour l'égalité des chances : ne laissez pas disparaître les antennes.

Une mise en garde, enfin, sur l'abandon consenti de notre rayonnement linguistique. L'article 2 de votre projet a provoqué des débats bruyants mais en menant parfois sur de fausses pistes. Certes, il faut progresser dans l'apprentissage précoce des langues étrangères -deux plutôt qu'une, l'anglais étant inévitable-, ce que prévoit la loi Toubon dans son article 11. Certes, il faut savoir accueillir les étudiants étrangers -c'est le travail de Campus France. Mais ces étudiants doivent profiter de leur séjour en France pour apprendre la langue et la culture françaises. La loi Toubon n'interdit pas un enseignement en anglais mais ce qui pose problème, c'est la tentation de faire suivre des études en anglais à des francophones, qui est celle de nos grandes écoles et de certaines universités qui ont développé ces formations au mépris de la loi actuelle, et entendent bien poursuivre. Il faut donc dire clairement que nous acceptons la souplesse mais pas les dérives dangereuses. Je proposerai un amendement à cette fin car la diversité linguistique est en jeu et, au-delà la diversité culturelle, pour laquelle nous avons tous combattu. La langue unique conduit à la pensée unique. Si nous reculons sur notre langue, disait Georges Pompidou, nous serons emportés. La diversité des langues et des pensées est une ardente exigence. (Vifs applaudissements à droite et sur quelques bancs à gauche)

M. David Assouline.  - C'est Georges Pompidou que nous applaudissons, pas vous !

M. Jacques Chiron .  - Je salue la tenue des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche parce que le monde de l'université et de la recherche avait été bien bousculé pendant les cinq dernières années. La communauté universitaire aura apprécié. Les Assises ont mobilisé et restauré, partout sur notre territoire, une relation de confiance qui faisait défaut. Ce projet répond aux aspirations qui se sont exprimées. Il réunit pour la première fois enseignement supérieur et recherche. L'augmentation de 2,2 % du budget de votre ministère, assortie de 5 000 postes supplémentaires en cinq ans, mérite d'être saluée.

Lors du dernier quinquennat, la France a perdu son rang sur la scène internationale en matière de recherche et reculé en Europe, au risque de rendre notre stratégie nationale illisible.

Votre texte marque le retour de l'État stratège, pour un système qui marche au bénéfice de tous. L'État régule, loin de la dictature de l'instant, et sécurise les acteurs. Simplifier la gouvernance, donner une direction concrète à nos priorités, tels sont les objectifs de ce texte. C'est une exigence pour la transition énergétique, la santé, la mobilité. De 2007 à 2012, les moyens des organismes de recherche ont été mis à mal, au profit de la recherche sur projet qui a fragilisé la recherche fondamentale. Vous avez engagé, dès votre arrivée, un recentrage de l'ANR, qui a dégagé des moyens pour la recherche publique. C'est une décision majeure pour les organismes de recherche publique.

Dans un contexte de crise, il faut aussi repositionner la recherche au regard de l'activité économique. Or, la recherche technologique peine à émerger alors que notre économie doit monter en gamme, parce que c'est le gage de la relance et de l'emploi.

L'inscription du transfert dans le texte, complémentaire au pacte de compétitivité, est une réponse prometteuse. Le transfert technologique existe déjà. A Grenoble, nous le savons, alors que le territoire puise son dynamisme de tels partenariats -je pense à Eccami, à Minatec ou à la collaboration avec les collectivités territoriales dans le nord Isère pour la construction durable. Ce texte favorisera encore les coopérations. Lors de votre venue, en novembre, vous annonciez la création de trois CEA Tech en région pour diffuser l'expérience grenobloise ailleurs en France. C'est une mesure concrète dont on peut se réjouir.

Il faut plus que jamais fédérer nos efforts en faveur du développement économique et pour l'avenir de nos jeunes. Ce projet de loi constitue, dans cette perspective, une réponse concrète, courageuse et ambitieuse. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Gérard Roche .  - Je me pencherai sur l'expérimentation mise en place par l'article 22, relatif au cursus médical. Les expérimentations d'admission directe en deuxième ou troisième année ne doivent pas pénaliser les étudiants entrés initialement dans le cursus. Des garanties s'imposent : le concours d'entrée en deuxième ou troisième année doit être aussi exigeant que celui d'entrée en première année. A cette condition, la mesure est bienvenue et élargit le numerus clausus. Elle met fin à une sélection par l'argent, via les écoles privées de préparation au concours.

Au-delà, il faudrait avoir le courage de réformer le numerus clausus, délétère, qui est pour beaucoup dans la désertification médicale. D'autant que les spécialités à hauts risques peinent à recruter. Nous présenterons quatre amendements sur le sujet. Il faut désormais penser en termes médicaux et s'interroger -sujet tabou- sur le caractère libéral d'une profession assise sur la sécurité sociale. (Applaudissements à droite)

Mme Esther Benbassa .  - Ce texte comporte certes des avancées mais il est loin de répondre aux attentes des étudiants, des enseignants, des chercheurs. Il ne s'attaque pas à la précarité, ni aux conditions d'études. Il ne remet pas en question le principe de la LRU mais nous fait simplement revenir à l'ère de l'État stratège.

L'université se meurt, et on débat de sa gouvernance ; la recherche en sciences humaines et sociales et la recherche fondamentale s'essoufflent, et on veut les mettre au service de la compétitivité. Comment former des têtes bien faites, plutôt que bien pleines, plus adaptées au monde du travail pour ceux qui le souhaitent et susceptibles de reconversion tandis que la recherche fondamentale travaillerait à l'émancipation de la société et à la transmission du savoir ? C'est la question que nous esquivons. Améliorons la condition des étudiants, créons des pôles d'orientation dans les campus, combattons le clientélisme dans le recrutement, cessons de remplacer les enseignants chercheurs par des professeurs venus du secondaire, créons des agences pour aider les chercheurs à répondre aux appels d'offres européens afin de leur éviter d'y consacrer toute leur énergie, revoyons les modalités d'évaluation qui infantilisent les chercheurs et les financements sur projet de l'ANR, qui gèlent tout. L'université est un outil irremplaçable pour la formation et la recherche ; faisons-en un élément clé de la fameuse exception culturelle française, au lieu de la laisser à l'agonie. (Applaudissements sur les bancs écologistes et CRC ainsi que sur quelques bancs socialistes)

M. Ambroise Dupont .  - La semaine dernière, je vous ai présenté, avec Mme Gillot que je salue pour son travail libre et approfondi, notre rapport d'évaluation de la loi LRU.

Nous concluions qu'il fallait laisser le temps à une réforme qui a rencontré de fortes résistances de produire ses effets. Or, cinq ans seulement après la LRU, voilà un nouveau texte. Est-il bien opportun ? Certes, il ne remet pas en cause l'autonomie. Après la loi Goulard, qui créa les PRES et l'Aeres, la loi LRU fut le big bang, donnant aux universités les moyens d'un vrai pilotage -conseil d'administration resserré, rôle renforcé du président- et la possibilité de gérer leurs moyens humains ainsi que leur patrimoine immobilier. Les universités s'y sont mises : elles réclament un renforcement de leurs moyens pour réaliser l'autonomie.

Or, cette loi ne leur donne aucune visibilité financière. Certes, le contexte budgétaire est contraint mais l'éducation n'est-elle pas, pour ce gouvernement, une priorité ?

Je crains des freins à l'autonomie car la gouvernance, avec la dyarchie des deux conseils, va être mise à mal. La communauté universitaire est inquiète.

Pourquoi ne pas donner plus de poids aux personnalités extérieures ? Pourquoi remplacer les PRES par de complexes communautés d'universités qui réduisent le libre choix d'association à une appartenance géographique ?

La suppression de l'Aeres, remplacée par le Haut conseil, laisse songeur. Où est l'avancée ? L'Aeres a su évoluer, et peut évoluer encore. La supprimer serait obliger la nouvelle autorité à repartir à zéro alors que l'Aeres a acquis sa notoriété internationale.

Je souhaite que le débat apporte des modifications sensibles, grâce aux amendements de notre groupe. (Applaudissements à droite)

M. Jacques-Bernard Magner .  - Vos réponses, madame la ministre, sont dans l'intérêt des étudiants, de l'université et de la recherche. Elles sont le fruit de la consultation qu'avec les Assises, vous aviez organisée et se situe dans la continuité de la loi sur la refondation de l'école, faisant de la jeunesse et de l'éducation une priorité pour la réussite de tous. Ce texte innove en abordant pour la première fois enseignement supérieur et recherche de concert. Il faut se recentrer sur les premiers cycles, où les taux d'échec sont trop importants : lien entre le lycée et les facultés, cadre national de formation, rapprochement des différents types de bac... La pluridisciplinarité des premiers cycles doit aussi améliorer l'orientation.

L'État s'est remis au coeur de la politique universitaire et de recherche, à l'inverse de ce que voulait la précédente majorité -un effacement de l'État. Ce lien devait être rétabli.

Le texte réforme la gouvernance pour concilier pouvoir présidentiel et collégialité. Il rétablit le lien avec les collectivités territoriales, en particulier les régions. La loi LRU reposait sur une carte de France insatisfaisante, autour des pôles d'excellence.

Nous voulons tous lutter contre l'échec. Les quotas, les licences pluridisciplinaires sont là pour y pourvoir.

Les bacheliers professionnels et technologiques seront mieux intégrés. L'article 15 doit renforcer les liens avec les milieux professionnels pour une meilleure intégration des jeunes. Le stage est intégré dans le parcours de formation. Certaines universités ont déjà des taux d'alternance élevé mais celle-ci doit être intégrée dans un parcours de formation. L'article 15 assure la cohérence. Les conseils de perfectionnement, interface entre l'académique et le monde professionnel, seront développés. Il ne s'agit pas que les entreprises fassent des stages une utilisation abusive : l'encadrement est garanti.

Les ESPE sont des composantes à part entière de l'université. Elles feront l'objet, dès la rentrée, d'une double tutelle, de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, et déploient progressivement leur offre. Les formations seront ainsi en cohérence nationalement.

Enseignement supérieur et recherche sont au coeur du modèle de société que nous voulons, pour l'émancipation de chacun, en faisant le pari de l'intelligence. Le texte s'attache à reconstruire les universités mises à mal par le précédent gouvernement ; il prépare le redressement du pays et l'avenir des jeunes : le groupe socialiste le votera. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. René-Paul Savary .  - L'article 22, relatif aux études médicales, sera mon sujet car je m'inquiète des effets du numerus clausus. Plusieurs doyens de facultés affirment que le cursus médical dans certains pays ne vaut pas celui de la France. Cela interpelle, à l'heure de la reconnaissance européenne des diplômes. Dans le même temps, dans un grand mercato, nos médecins s'expatrient dans le monde entier. Il est paradoxal que nos enfants soient contraints, en vertu du numerus clausus, de poursuivre leurs études dans d'autres pays.

M. Jacques Legendre.  - Eh oui !

M. René-Paul Savary.  - Il faut en finir avec l'idée reçue selon laquelle plus de médecins, c'est plus de dépenses pour la sécurité sociale. Les missions des médecins, qui ont considérablement évolué, la féminisation du métier, la volonté de concilier vie privée et vie professionnelle auraient justifié au moins le doublement du numerus clausus.

Tous ces facteurs auraient dû inciter à doubler le numerus clausus. La qualité de notre formation est internationalement reconnue, profitons-en !

Nous ne pouvons accepter de recruter des médecins étrangers moins bien formés alors que nos étudiants sont refusés. Il faut que le numerus clausus soit revu.

Mme Sophie Primas.  - Très bien !

M. René-Paul Savary.  - Il est absurde, en outre, que le concours porte uniquement sur des matières comme les mathématiques ou la physique. Les étudiants en médecine doivent être prêts moralement, psychiquement. Leur vocation, si elle existe, doit pouvoir s'exprimer en cours de cursus, en fonction de l'expérience acquise. Il faudrait aussi ouvrir dès la première année vers des formations paramédicales.

Je vous invite à soutenir les amendements présenté par Mme Primas. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Jacques Mirassou .  - Membre de la commission de l'économie, je me contenterai d'évoquer la recherche, qui doit constituer le fer de lance d'une stratégie économique et industrielle de redressement de notre pays. La concurrence internationale est vive et sans pitié. Garantissons une recherche novatrice, essentielle pour l'avenir. Notre pays se situe au sixième rang mondial pour les publications scientifiques, au quatrième rang européen pour le dépôt de brevets. Mais seulement, selon certains indicateurs, au quinzième rang mondial en matière d'innovation. Notre pays sait marquer des essais mais peine à les transformer.

M. Jacques Chiron.  - Belle image.

Mme Françoise Cartron.  - Il a des lettres !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Nous revendiquons l'héritage des Lumières et des Encyclopédistes. (« Bravo ! » sur les bancs socialistes)

Il serait contreproductif d'opposer recherches appliquée et fondamentale. Pas moins de sept textes ont été adoptés en cinquante ans sur ce sujet. Il y a parfois des contre-performances. L'État acquitte l'essentiel des 2,4 % du PIB investis dans la recherche. Le secteur privé se contente de faire des bordures, pour emprunter une autre image au monde du rugby. Un pilotage de la recherche est nécessaire, au service de choix stratégiques dictés par l'intérêt national.

J'insiste sur l'installation du conseil stratégique de la recherche. Le schéma régional de la recherche est ambitieux : il assure la complémentarité et la continuité entre niveaux national et régional. L'article 55 contribue à cette cohérence. Ce texte va dans le bon sens, celui de l'efficacité. L'enjeu est d'importance pour l'avenir. Les amendements amélioreront le projet de loi. Tel est notre objectif, madame la ministre, à vos côtés. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Colette Mélot .  - L'enseignement supérieur et la recherche concernent la jeunesse et l'avenir de notre pays. Nous déplorons la procédure accélérée, qui traduit la précipitation du Gouvernement. L'adoption du projet de loi par l'Assemblée nationale relevait plus de la discipline de groupe que d'une véritable adhésion.

Loi d'orientation et non de programmation, donc les financements sont évacués du débat. Là est pourtant l'essentiel. L'université de demain doit s'adapter à la modernité tout en préservant notre socle culturel. L'article 2 remet en cause l'esprit même de la loi Toubon sur la langue française. L'Assemblée nationale a limité la portée de cette exception. Encore faut-il que ces cours en anglais s'adressent seulement à des non-francophones. L'amendement Legendre, que j'ai cosigné, précise les choses. Les non-francophones doivent certes pouvoir suivre des cours en anglais mais aussi apprendre notre langue et notre culture.

Nos universités doivent être compétitives. Dégageons-nous de la vision hexagonale que vous nous proposez, tous les pays d'Europe sont concernés. Il ne faut pas que tous les établissements d'enseignement supérieur et universitaire se ressemblent. C'est pourtant ce que vous proposez, en instaurant de nouvelles lourdeurs administratives, en nourrissant de potentiels conflits entre présidents du Conseil académique et du Conseil d'administration des universités. La LRU procédait par incitation, afin de stimuler des stratégies originales. Vous remplacez les PRES par des communautés d'établissements qui obéreront leur rayonnement.

Madame la ministre, que prévoyez-vous pour que l'enseignement supérieur et la recherche prennent toute leur part de la compétitivité de notre pays ? Votre projet de loi n'apporte pas de réponse.

J'ai déposé un amendement afin d'intégrer la reconnaissance des établissements d'enseignement supérieur agricole. Vous refusez de poursuivre la dynamique engagée en 2007, vous ne faites rien pour la réussite étudiante. (Vives protestations sur les bancs socialistes, applaudissements sur les bancs UMP) Ce projet de loi multiplie les bonnes intentions. (Ironie à gauche ; applaudissements sur les bancs UMP) Le groupe UMP réserve son vote. (« Très bien ! » et applaudissements à droite)

M. Jean-Étienne Antoinette .  - Depuis un an, le Gouvernement soumet au Parlement des textes visant le coeur du projet présidentiel : l'enseignement et les jeunes. Ce projet de loi en fait partie.

Le projet France université numérique trouve ici un cadre juridique nouveau. Aux États-Unis, l'enjeu est d'une autre ampleur. Les cours en ligne ouvrent les perspectives d'un enseignement de masse, à rebours de l'élitisme des établissements sélectifs, aux sirènes duquel l'université française a la chance d'avoir résisté. L'offre numérique rencontrera un écho particulier outre-mer, elle accompagnera l'action des pôles universitaires, dont l'Aeres a dénoncé, à juste titre, le coût excessif vu la faiblesse des effectifs.

Je regrette le débat sur l'anglais. L'université Antilles-Guyane rayonne sur sa région, avec l'anglais pour la Caraïbe, l'espagnol pour l'Amérique centrale, le portugais pour l'Amazonie.

Le Gouvernement veut renforcer l'accompagnement des étudiants et les moyens des universités. Le renforcement pédagogique est aussi nécessaire. Nous souffrons d'un déficit de professeurs. Plus de 5 % des postes d'enseignants sont vacants à l'université des Antilles-Guyane. Le pôle Guyane est particulièrement sous-doté. Le taux de réussite en licence est la moitié de la moyenne nationale.

Il paraît difficile de faire l'économie d'une réflexion sur l'adaptation de l'enseignement supérieur et de l'université tout spécialement à l'emploi dans le commerce et l'industrie. L'Assemblée nationale apporte de timides réponses. Il est rassurant de ne pas quitter l'alma mater. Un mandarinat local se complaît dans l'accumulation de titres, mais la qualité de l'université est celle de ses membres.

Les avancées réelles de ce projet de loi nous invitent à l'approuver. Mais que les acteurs eux-mêmes prennent en main leur outil ! (Applaudissements à gauche)

M. Michel Berson .  - Le souci de la recherche technologique et le processus de transfert sont l'une des grandes avancées de ce projet de loi. On invente beaucoup dans nos laboratoires mais on n'innove pas assez dans nos entreprises. (On approuve sur les bancs socialistes)

Il est essentiel de développer la recherche technologique, deux fois plus importante en Allemagne qu'en France. Avec ce texte, le transfert est explicitement reconnu comme une mission du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche. C'est un progrès. Recherche fondamentale, technologie et innovation ont chacune leur champ : concilions nos ambitions dans ces domaines pour répondre aux défis économiques, sociétaux et environnementaux de notre temps.

L'État stratège doit placer la recherche au service de l'innovation et l'innovation au service de l'emploi. Nous avons créé le crédit d'impôt innovation pour les PME. Il faudra l'intensifier.

D'autres initiatives doivent favoriser l'embauche par le secteur privé de jeunes docteurs et la collaboration entre secteurs public et privé de la recherche. J'ai déposé des amendements en ce sens.

Quel financement pérenne pour l'enseignement supérieur et la recherche dans les années à venir ? Rapporteur spécial de ce budget, je suis conscient des difficultés, quand bien même ce secteur est prioritaire. Mais l'efficacité relève moins du niveau des crédits que de leur juste répartition. L'an dernier, j'ai publié un rapport d'information sur le crédit impôt recherche. De 1,8 milliard en 2007, il s'est élevé en 2012 à 5,5 milliards, à 5,7 en 2013 et doit se stabiliser à 6 milliards à partir de 2014. Il n'est pas question de le remettre en cause. Néanmoins, on pourrait le plafonner à 5 milliards, en réduisant l'effet d'aubaine.

M. André Gattolin.  - Bravo !

M. Michel Berson.  - Ce qui rendra des moyens à allouer aux universités et à l'enseignement supérieur.

Les crédits consacrés à la formation professionnelle sont d'un montant comparable à ceux dédiés à l'enseignement supérieur. Seulement 2 % de ces dépenses de formation professionnelle vont à l'enseignement supérieur. Il y a, dans ce secteur, des marges appréciables qui pourraient être utilement dégagées pour l'université, l'enseignement supérieur et la recherche.

Notre pays, grâce à ce projet de loi, bénéficie d'une stratégie forte et lisible. Qu'il soit également doté d'une stratégie de financement pérenne. Ouvrons ce débat auquel nous ne pourrons pas échapper. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

M. le président.  - Je suspendrai la séance à 19 h 30. Nous débattrons de la question préalable demain matin.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Nous serons là !

Mme Geneviève Fioraso, ministre .  - Merci de ce débat de bonne facture, empreint de sérénité mais aussi de passion sur certains articles sensibles. J'ai entendu M. Legendre. Qualité ne signifie pas unanimité. Les divergences, voire les contradictions, ne manquent pas.

Cette loi, dont certains ont reconnu, à droite, qu'elle corrigeait des erreurs, serait pourtant inacceptable car elle reviendrait sur ce qui fut fait, première contradiction. Elle se désintéresserait de la réussite étudiante ? Ce souci est au coeur de ce projet de loi, la moitié de ses articles y sont consacrés.

Mme Françoise Cartron.  - Très bien !

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - Pas d'ambition parce que pas de titre ronflant ? Mettons que c'est affaire de culture personnelle. Jamais je n'ai constaté, dans ma vie professionnelle, de correspondance entre l'ampleur du titre et celle de l'action. (« Très bien ! » sur les bancs socialistes)

Faut-il vraiment réformer ? Quand l'Allemagne affiche sur des filières non sélectives un taux de réussite de 60 % à bac + 3 tandis que le nôtre plafonne à 30 %, il y a un problème.

C'est une loi d'orientation et non de programmation ? De fait, telle est la décision gouvernementale. Ce n'est pas pour autant une loi dépourvue de moyens. La LRU n'était pas non plus une loi de programmation. La précipitation ? Je venais d'être élue députée quand la LRU a été votée, en août, après un débat démarré en juin. Belle concertation !

Ne recréez pas de communautés autocentrées, dites-vous. Mais quoi de plus autocentré qu'une loi uniquement dédiée à la gouvernance ?

Alors que le plan Réussite en licence, qui a coûté 730 millions d'euros, n'a tout au plus que colmaté des brèches, 1 100 postes seront affectés à la réussite en licence, qui ne fondront pas comme neige au soleil.

Quand 25 % des jeunes sont au chômage, l'employabilité n'est pas un gros mot.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Tout à fait d'accord.

M. Ambroise Dupont.  - Bravo !

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - Quelle indépendance sans emploi ? (Applaudissements)

Cette loi ne doit pas être si creuse que cela, à en juger par la multiplicité des sujets que vous avez abordés.

La réussite étudiante est notre priorité, je l'ai dit. Comment se satisfaire du massacre social actuel ? Il faut reconnaître qu'un titulaire d'un bac professionnel n'a que neuf chances sur cent d'obtenir une licence. Les étudiants doivent être mieux orientés pour que les enseignants ne se retrouvent pas face à des jeunes de niveaux hétéroclites. Allez dans les unités de production, vous y verrez que dans nombre de secteurs, la chimie et d'autres, on demande des bac+2 ou +3. Soyons pragmatiques, formons les jeunes et tout au long de la vie afin qu'une reconversion soit possible.

Prémunissons-nous contre les concurrences déloyales. Ayons un temps d'avance, celui de l'innovation, de l'université ; il n'y a pas de contradiction entre l'intelligence et la production. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Valérie Létard, rapporteure pour avis.  - Bravo.

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - L'autonomie, c'est Edgar Faure en 1968 (exclamations à droite), Alain Savary sous François Mitterrand, Claude Allègre avec Lionel Jospin. (Mêmes mouvements) Non, l'autonomie n'est pas née en 2007.

M. Jean-Claude Lenoir.  - On vous rappelle ce que vous avez dit à l'époque !

M. David Assouline.  - A vous aussi !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - On en reparlera !

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - A l'époque, comme députée, avec Jean-Yves Le Déaut, j'avais le même discours qu'aujourd'hui.

La réussite des étudiants tient à une orientation, aux passerelles, ensuite, pour poursuivre des études. Mettons un terme aux filières d'évitement des bacheliers S avec mention bien, qui passent par les IUT pour revenir ensuite à l'université, faute d'être rassurés sur les conditions de l'accompagnement dans les premières années universitaires. Ce que demandent les lycéens, pour l'orientation, c'est que des enseignants du supérieur viennent leur expliquer ce que l'on attendra d'eux comme manière de travailler. Il n'y pas là de « secondarisation » à redouter.

Je n'aime guère le terme d'antenne, que j'ai entendu ici. Chaque université, quelle que soit sa taille, a sa vocation. L'université de Chambéry, qui n'est pas une grande université, est celle qui réussit le mieux en matière d'insertion professionnelle.

Mme Sophie Primas.  - Eh oui !

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - On peut s'organiser. Les quotas seront négociés au cas par cas, discipline par discipline. A Montluçon, on manque de bacheliers technologiques ; en région parisienne, des bacheliers S avec mention bien veulent aller en IUT.

La pédagogie joue bien sûr un rôle fondamental dans la réussite des élèves et étudiants, à quelque niveau qu'ils soient. On n'en parlait pas dans la LRU. (Mme Sophie Primas proteste)

Il ya des différences de un à cinq dans les dotations entre les sciences humaines et sociales et les sciences dures. Un écart peut se justifier par le coût de certains équipements, mais pas à ce point. Aujourd'hui, les employeurs sont prêts à valoriser différemment les formations universitaires. Nous ne sacrifierons pas les études transversales, comme les études de genre, je rassure Françoise Laborde.

Mmes Maryvonne Blondin et Corinne Bouchoux.  - Très bien !

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - J'ai passé quinze ans dans des conseils d'administration divers, dont des conseils d'université. La LRU aurait donné une autonomie totale, dites-vous ? Mais chaque fois que l'on sollicitait des dérogations, la réponse était négative : il fallait absolument que tous les pieds entrent dans la même chaussure. C'était agaçant. Les collectivités territoriales étaient immanquablement rappelées à l'ordre. Elles n'étaient là que pour signer des chèques. Nous faisons ce que vous n'avez pas fait.

L'autonomie est un beau mot, encore faut-il que la réalité y soit conforme ; ce n'était pas le cas. En déléguant l'accréditation, nous faisons confiance aux acteurs.

Je remercie Gérard Roche de son soutien à la diversification de la formation des médecins. La physique, la chimie, les mathématiques ne sont pas valorisées dans leur beauté quand on en fait de simples vecteurs de sélection. On ne tombe pas amoureux d'un vecteur de sélection ! Il fallait ouvrir le mode de sélection des futurs médecins. Le maintien à domicile changera les métiers de la santé. Ce que font des médecins généralistes pourra être accompli par des infirmières. De nouveaux métiers de santé verront le jour. Cela aura un effet sur le numerus clausus. Nous lançons une expérimentation ouverte.

M. Jean-Claude Lenoir.  - Il faut des financements.

Mme Geneviève Fioraso, ministre.  - Bien sûr !

La recherche fondamentale est un bien précieux. La recherche technologique doit favoriser les convergences afin que les entreprises contribuent davantage à son financement. Ce n'est pas transformer les chercheurs en marchands que faire en sorte qu'ils puissent créer des start up et des emplois. Nous pouvons regagner des points dans le domaine industriel.

Tout n'est pas dans la loi, comme la résorption de la précarité qui fera l'objet d'un plan spécifique. Nous reviendrons sur la gouvernance. Ce projet de loi donne davantage de pouvoir aux personnalités extérieures, qui sont plus nombreuses que dans la LRU. Nous avons intérêt à tous nous mobiliser pour la réussite des étudiants et notre rayonnement international, l'avenir de notre pays en dépend. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

La séance est suspendue à 19 h 30.

présidence de M. Charles Guené,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.