SÉANCE

du vendredi 3 décembre 2010

43e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

Secrétaires : M. Philippe Nachbar, M. Daniel Raoul.

La séance est ouverte à 10 heures 5.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Loi de finances pour 2011 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l'Assemblée nationale.

Économie

M. le président.  - Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Économie » et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien ».

M. André Ferrand, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Monsieur le ministre, je vous adresse tous mes voeux de succès dans votre nouvelle charge.

Pour 2011, les crédits de la mission augmentent de 6,7 %. Je présenterai d'abord le programme 134, qui représente 51 % des crédits de la mission. Les dépenses d'intervention sont particulièrement sont touchées, ce qui inquiète les élus locaux. La dotation du Fisac a été très fortement réduite. De même, le soutien aux pôles de compétitivité et aux centres techniques industriels a été réduit. Monsieur le ministre, vous avez demandé une deuxième délibération à l'Assemblée nationale pour revenir sur l'amendement qui abondait le Fisac de 21 millions supplémentaires.

Les crédits d'Ubifrance ont été préservés. Pouvez-vous faire le bilan de sa réorganisation et évoquer ses perspectives ? Ubifrance ne pourra être présent partout ; comment seront réparties les compétences avec les chambres de commerce à l'étranger, et pour quelles synergies ?

J'en viens aux activités régaliennes. Le programme affiche le volontarisme économique du Gouvernement, mais ses moyens semblent modestes. L'essentiel des dépenses passe par 74 dépenses fiscales pour un coût évalué à 8 milliards. En période de crise, il faut plus que jamais évaluer leur efficacité.

Nous étions réservés, il y a un an, face à la baisse de la TVA dans la restauration ; il nous faudra rester vigilant sur l'application des accords, même si les résultats semblent meilleurs que prévu. Il semble qu'un avenant au contrat d'avenir soit prévu au premier trimestre 2011 ; pouvez-vous nous donner des précisions ?

J'en viens au programme 123, dont les crédits baissent de 10 %. Seuls les crédits d'Atout France sont maintenus -à comparer toutefois avec ceux de nos principaux concurrents. La France est la première destination touristique mondiale mais reste le troisième pays en matière de recettes tirées du tourisme, avec 48,7 milliards contre 53,2 pour l'Espagne et 94,2 aux États-Unis. Un document de politique transversale est nécessaire car 1 200 milliards sont consacrés au tourisme par l'ensemble des opérateurs.

Dès sa première année, Atout France a su obtenir des concours financiers d'acteurs extérieurs -collectivités locales et opérateurs touristiques- qui lui procurent 58 % de son budget.

J'en viens au compte spécial créé en 2009 pour gérer les ressources tirées du spectre hertzien. Il n'a toujours pas enregistré de recettes puisque les fréquences hertziennes dégagées par la TNT n'ont pas encore été mises en vente. Les opérations de cessions de fréquences ont été reconduites pour 2011 sur la base d'une nouvelle estimation de recettes de 850 millions d'euros pour 2011 au lieu de 600 millions d'euros en 2010. Il convenait d'ajouter au produit des ventes potentielles des fréquences issues des systèmes Félin et Rubis la cession future de tout ou partie des systèmes de communication militaire par satellite Syracuse. Pourquoi, monsieur le ministre, aucune mise en vente n'a-t-elle été engagée ?

Je propose d'adopter les crédits de la mission et du compte spécial. (Applaudissements à droite)

M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis, en remplacement de M. Hérisson, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Comme M. Ferrand, je souhaite la bienvenue au nouveau ministre, M. Lefebvre.

M. Hérisson souhaite évoquer la situation de La Poste, dont la loi du 9 février 2010 a modifié le statut. L'activité courrier se rétrécit vivement, au moment où l'offre augmente avec l'ouverture à la concurrence européenne. Notre réseau de 17 000 points de poste est dense mais coûteux ; il faut encore le rationnaliser. L'endettement de La Poste atteint 5,5 milliards d'euros, ce qui handicape ses capacités d'investissement. Le financement des missions de service public reste incertain. Le fonds de compensation du service universel paraît très hypothétique. Plus inquiétante encore est la mission d'aménagement du territoire, financée par un abattement sur les bases d'imposition locales ; l'Arcep doit déterminer le coût de cette mission et fixer le taux de l'abattement. Où en est le décret ? Quand l'Arcep commencera-t-elle à travailler ?

La Poste a pourtant les moyens de passer ce cap difficile. Ses résultats 2009 sont très encourageants malgré la conjoncture. Elle sera recapitalisée à hauteur de 1,5 milliard par la Caisse des dépôts et consignations et de 1,2 milliard par l'État, dont 300 millions inscrits au budget pour 2011. Où en sommes-nous sur ce dossier ? Nous ferons le point lors du rendez-vous de 2013.

Le compte spécial relatif au spectre hertzien, destiné au désendettement de l'État, n'a enregistré aucune recette depuis sa création. Pouvez-vous nous donner des informations complémentaires ?

Pour conclure, la commission est favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à droite)

M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - L'effort de réduction des crédits d'intervention et de fonctionnement sur le programme de soutien aux entreprises est difficile mais nécessaire car la France a besoin d'assainir ses comptes publics. Pour autant, cet effort doit être dosé. Je vous proposerai donc un amendement pour abonder le Fisac.

Dans mon rapport, je me suis particulièrement intéressé à la DGCCRF, exemplaire dans bien des domaines. Elle est le maillon fort de la régulation des marchés et de la protection des consommateurs. La LME a opéré une nouvelle répartition des compétences entre la DGCCRF et la nouvelle Autorité de la concurrence, tandis que la loi de juillet 2010 réformant le crédit à la consommation a donné un rôle important à un INC rénové.

Les moyens humains de la DHCCRF ont été réduits mais son personnel, très qualifié, a fait montre d'une grande adaptabilité et réactivité. Enfin, la Direction a réorganisé son maillage régional avec les Direccte, ainsi qu'au niveau départemental.

La commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements à droite)

Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission de l'économie.  - Je concentrerai mon propos sur le tourisme. Celui-ci représente plus de 6 % du PIB et constitue le premier poste excédentaire de notre balance des paiements, avec 7,8 milliards d'euros. La France reste la première destination touristique mondiale.

L'importance du tourisme contraste avec la modestie de ses crédits. C'est le deuxième plus petit de tous les programmes ; ses crédits baissent de 9,6 %, une tendance qui se poursuit dans la programmation triennale -une baisse de 18,9 % est prévue sur quatre ans.

Lors de son audition, Mme Lagarde a dit sa volonté de concentrer les moyens sur Atout France, issu de la fusion entre Audit France et Maison de la France. Le nouvel opérateur, qui intervient sur un marché international très dynamique et très concurrentiel, fait largement appel aux partenariats, avec une efficacité appréciable, qui ne doit cependant justifier le désengagement de l'État.

Tandis que la loi de juillet 2009 a étendu ses missions, aucun crédit supplémentaire n'a été accordé à Atout France pour les assumer, malgré les douze emplois nécessaires.

L'ANCV se finance par un prélèvement de 1 % sur les chèques vacances vendus ; ses excédents de gestion lui permettent de financer la rénovation du patrimoine du tourisme social et d'accompagner les actions de solidarité des associations.

Je me suis abstenue sur ces crédits, que la commission a approuvés. (Applaudissements)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Nous sommes confrontés à une dilatation des débats, en raison de la multiplication des articles rattachés. Pour respecter les délais constitutionnels, à la demande du Gouvernement et avec l'accord de la commission des finances, il a été décidé que les articles rattachés seraient examinés après l'ensemble des missions, dans l'ordre suivant : santé, travail et emploi, économie, médias, agriculture, aide publique au développement, gestion du patrimoine immobilier de l'État, direction de l'action du Gouvernement, ville et logement.

M. le président.  - Je serai vigilant quant au respect des temps de parole.

M. Daniel Marsin.  - Les crédits de la mission augmentent de 6,7 %, alors que notre économie est encore en berne. Pour autant, des signes avant-coureurs de la reprise sont apparus. Nous demeurons entre crise et reprise...

Cette mission doit favoriser une croissance durable. Je m'étonne de la réduction des crédits à la protection des consommateurs -qui passent de 140 millions d'euros à 118- car la confiance est indispensable à la croissance. Autre sujet d'étonnement : la baisse de 11 % des crédits du tourisme au long de la programmation triennale. Les professionnels de ce secteur ont pourtant besoin d'orientations stratégiques.

Des choix timorés ou circonstanciels : telle est la caractéristique de votre action dans ce secteur essentiel. Enfin, quid de l'efficacité économique de la TVA à 5,5 % dans la restauration ?

Forte de ses observations, la majorité du groupe RDSE votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements au centre)

M. Jean-Claude Danglot.  - Lors des Assises de l'industrie, M. Estrosi, alors ministre, déclarait qu'il avait engagé une révolution industrielle ; désormais, les mots « usine », « technicien » ou « ingénieur » n'étaient plus des gros mots. Aujourd'hui, M. Lefebvre tiendrait sans doute un langage tout aussi angélique.

Le remaniement ministériel n'y change rien : le capitalisme financier est toujours à l'honneur, le Gouvernement continue la casse des entreprises publiques, abandonne des territoires entiers, laisse dépérir des secteurs industriels -1 000 emplois industriels ont été détruits à Calais. Chaque année, on nous lance des chiffres pour montrer que le Gouvernement lutte contre la désindustrialisation, mais la situation ne cesse de se dégrader.

Les crédits de ce programme, modestes, ne sont pas à la hauteur d'une politique économique digne de ce nom ; la dépense fiscale venant en aide aux entreprises, 65 milliards, est à rapprocher des 146 milliards de trésorerie dont disposent les entreprises du CAC 40. Les dotations du Fisac, si utiles aux élus locaux (Mme Nathalie Goulet approuve), se réduisent comme peau de chagrin.

On laisse l'économie au jeu de la concurrence libre et non faussée. Où est le capitalisme responsable dont on nous rebat les oreilles ? A quand le remboursement des aides en cas de délocalisation ? A quand l'interdiction des licenciements boursiers ? Combien de Molex faudra-t-il avant que le Gouvernement ne réagisse ? Il a fait le choix du mépris : faire taire les opposants en réquisitionnant les grévistes et en interdisant les blocages de raffineries.

Nous voterons contre. (Applaudissements à gauche)

M. Michel Bécot.  - La crise impose la vertu budgétaire. La croissance est revenue à compter du deuxième semestre 2009 grâce à l'action du Gouvernement, mais les grèves d'octobre ont pesé sur le tourisme : l'hôtellerie a perdu 50 millions d'euros ; les pertes atteignant au total 200 millions pour l'ensemble du tourisme.

L'image de la France en a été ternie, à la joie de nos concurrents. A maintes reprises, j'ai souligné que la France restait le troisième pays en termes de recettes touristiques, malgré sa place de première destination touristique.

Monsieur le ministre, votre prédécesseur avait engagé une vaste réforme avec la loi du 22 juillet 2009 ; la LME a acté la baisse de la TVA dans la restauration, qui a permis d'augmenter l'emploi salarié tout en diminuant de 20 % les défaillances d'entreprises. La baisse de la TVA dans la restauration sert notre industrie touristique ; la gastronomie française attire les visiteurs étrangers. (Mme Nathalie Goulet approuve) Faisons mieux connaître le label « Maître restaurateur » remis par l'État depuis 2007.

En outre, il faut réhabiliter l'immobilier touristique sur le littoral et en montagne et aussi mettre les équipements hôteliers aux nouvelles normes. Ces modifications très coûteuses risquent de se solder par des fermetures d'établissements. Je veux donc tirer la sonnette d'alarme !

Ce budget affiche des priorités que nous approuvons. La modicité des crédits de la mission doit être relativisée : le soutien de l'État passe par d'autres missions et la part des collectivités est considérable.

Enfin, dispose-t-on d'un indicateur fiable sur les dépenses des touristes étrangers en France ?

Le groupe UMP soutient le Gouvernement dans sa politique volontariste pour ce secteur essentiel. (Applaudissements à droite)

M. François Rebsamen, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Je présenterai le programme 220, puis le 305.

Le premier concerne l'Insee. Dans un rapport d'étape, je vous faisais part des inquiétudes de la direction générale sur la réduction de sa dotation -69,1 millions en 2008 contre 55 millions en 2009- et de ses effectifs, de 5,75 %. Cette situation nuit à la qualité et à l'indépendance de la statistique publique.

Cette mise en garde était justifiée, vu les défis lancés à l'Insee qui doit réorganiser les antennes régionales, gérer le déménagement de l'École nationale à Saclay et créer le pôle statistique de Metz.

Je me réjouis donc de la hausse de 4 % de sa dotation. Les crédits de fonctionnement et d'investissement font un bond de 19 %, tandis que les dépenses de personnel augmentent de 1,6 % sous l'effet du GVT.

Des milliers de factures impayées étaient en souffrance à l'Insee au printemps. J'ajoute que la moitié des enquêtes de l'Insee ont alimenté Eurostat.

Avec un plafond d'emplois de 5 221 ETPT, l'Insee poursuit la diminution de ses effectifs, dénoncée l'an dernier avec une réduction de 126 postes ETPT. Une application stricte de la règle de non-remplacement d'un départ en retraite sur deux ne doit pas compromettre la qualité de la statistique publique !

Dommage que les crédits de l'action régionale diminuent de 10 % car elle est utile aux décideurs locaux.

Nous prenons acte de la réévaluation à la hausse du budget pour 2011, confortée dans le triennat 2011-2013 avec 442 millions en fin de programmation. Mais nous ne faisons que revenir à l'étiage financier de 2006 et 2007...

Le coût de l'opération immobilière à Metz avoisine 50 millions d'euros, pris en charge par le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». A ce propos, je regrette l'étalement excessif du réaménagement des locaux de la SNCF à Metz et les déménagements croisés ; on sait d'expérience que ces circonstances sont source de dérives financières. Le bâtiment de l'Insee n'est pas classé mais il se situe dans un périmètre protégé.

J'en viens au programme 305, dont les crédits augmentent de 46,6 %, principalement pour rémunérer la Banque de France pour ses prestations effectuées pour le compte de l'État -notamment les commissions de surendettement, notoirement sous-évaluées lors des derniers exercices. L'augmentation 2011 répond aux exigences du système européen des banques centrales et est plus conforme au principe de sincérité budgétaire.

Bien que ne souscrivant pas aux objectifs de la politique budgétaire du Gouvernement, je vous propose d'adopter les crédits. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Nathalie Goulet.  - Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour préserver : je vous parlerai donc de la construction navale, dont le devenir m'inquiète.

Sénateurs du littoral, nous avons souhaité unir les talents de la DCN et des Chantiers de l'Atlantique. En 2003 et 2004, l'État a soutenu Alstom, qui a cédé les Chantiers de l'Atlantique en 2006 à un groupe norvégien, lequel a vendu une partie du capital à une entreprise coréenne, avant que l'État ne rachète 34 % du capital par le biais du FSI... En cinq ans, nous avons versé des milliards d'euros et paupérisé tout un territoire. N'est-il pas temps de définir une véritable stratégie plutôt que de se livrer à ce jeu de Monopoly ?

Avec le savoir-faire de Total, de Technip et des Chantiers de l'Atlantique, pourquoi devons-nous passer des commandes de plates-formes off shore à Singapour ?

Je vous propose une victoire de l'optimisme sur l'expérience ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Michel Teston.  - Je parlerai du programme 134, plus précisément de l'action relative à la poste et aux télécommunications, dont les crédits sont inférieurs à ceux, déjà insuffisants, inscrits pour 2010.

La première mission du service public de La Poste concerne le transport et la distribution de la presse ; les 242 millions d'aide de l'État sont ventilés en deux missions, ce qui nuit à la lisibilité. Mais il reste encore 170 millions à la charge de La Poste. L'accord de 2008 passé avec l'État et les éditeurs n'incite pas à l'optimisme.

Pas plus que la première mission, la mission de présence territoriale n'est soutenue par l'État, qui se défausse sur les collectivités et sur l'entreprise. Le 3 novembre dernier, les ministres Mercier et Estrosi se sont engagés à ce que le fonds postal de péréquation territoriale soit porté de 135 à 170 millions d'euros par an. Le décret, qui confie à l'Arcep le soin de fixer le niveau d'abattement des bases d'imposition locale, est en souffrance.

Troisième mission de service public, le service universel postal ne sera plus financé par les recettes du secteur réservé. La compensation sous forme d'une aide de l'État -pourtant permise par la dernière directive postale- a été écartée par le Gouvernement au profit d'un fonds de compensation alimenté par les opérateurs bénéficiant d'une autorisation de l'Arcep. La Cour des comptes a mis en évidence les risques de défaillance de ce mécanisme de compensation.

La quatrième mission de service public est le service bancaire. La Poste subit un important manque à gagner. C'est pourquoi la Cour des comptes exhorte l'État à couvrir les charges de service public concernant le transport de la presse, l'aménagement du territoire et l'accessibilité bancaire.

Ce projet montre que l'État ne compense pas le surcoût des missions de service public confiées à La Poste.

Face à l'opposition déterminée des sénateurs de gauche au changement de statut de La Poste, le Gouvernement expliquait qu'il s'agissait de rendre possible une recapitalisation par la Caisse des dépôts et par l'État. La CDC ne se presse pas ; les intentions du Gouvernement restent floues. Faut-il en déduire que la recapitalisation n'est pas urgente ? Dans ce cas, pourquoi avoir modifié le statut ?

Dans la part du budget relative aux télécommunications et à la société de l'information, l'Arcep est bénéficiaire de crédits mais rien n'est prévu pour la téléphonie mobile, ni pour le haut et le très haut débit. Quand le Gouvernement va-t-il enfin s'engager dans ces domaines ?

Le groupe socialiste ne votera pas les crédits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - M. Lefebvre ayant un impératif très contraignant, Mme Khiari a eu l'obligeance de reporter son intervention après la sienne.

M. Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.  - Je remercie vivement Mme Khiari. Je sais qu'elle voulait m'interroger sur le chèque vacances. Celui-ci, je le reconnais volontiers, n'a pas atteint ses objectifs. Toutefois, maintenons-les ; il est temps de s'atteler à la tâche.

Je salue les travaux de vos commissions, dont les rapporteurs ont éclairé la Haute assemblée. Ils inspireront le Gouvernement.

Vous avez souligné la réduction des crédits du Fisac et rappelé que l'abondement voté par l'Assemblée nationale a été supprimé en seconde délibération. La baisse n'est pas opérée de gaieté de coeur mais il faut bien réaliser des économies pour réévaluer l'AAH ou conforter Oséo ! Nul ne conteste l'utilité du Fisac ; pour autant, celui-ci devra réduire certaines dotations locales. Bien que je comprenne vos interrogations, la situation des finances publiques ne permet pas d'accepter une hausse des dotations.

Rassurez-vous : la DGCCRF reste une priorité pour le Gouvernement. Lors de ma conférence de presse, j'ai rendu hommage à son action en faveur des consommateurs. Je proposerai une modification législative pour renforcer ses pouvoirs. Sa nouvelle organisation territoriale permet d'importantes économies. Les dépenses de personnel dans les régions sont transférées sur un autre budget.

La quatrième licence de téléphonie mobile a été décalée dans le temps. D'où les 870 millions d'euros inscrits en recettes pour 2011.

L'État soutien vigoureusement La Poste et sa modernisation afin qu'elle puisse affronter la concurrence. Elle rend un service apprécié.

Mme Nathalie Goulet.  - Et utile !

M. Frédéric Lefèbvre, ministre.  - L'État et la Caisse des dépôts se sont accordés pour apporter 2,7 milliards d'euros au capital de La Poste. Ne doutez pas de notre volonté !

Pour l'aménagement du territoire, un accord est en préparation avec l'AMF.

Concernant les crédits de la Banque de France, merci, monsieur Rebsamen, de vos compliments sur la facturation à coût complet. L'évolution des crédits attribués à la direction du Trésor tient à l'évolution du réseau international : 834 emplois ont été transférés à UbiFrance, qui aura, dès 2012, une compétence internationale pour accompagner nos entreprises à l'étranger.

J'en viens au centre statistique de Metz. Merci, monsieur Rebsamen, pour votre soutien au personnel de l'Insee, dont le travail n'est guère contesté. Les mesures d'accompagnement de transfert permettent une bonne acceptation de l'opération par le personnel, qui était d'abord réticent.

Nous privilégions le volontariat ou la réaffectation sans détérioration statutaire.

Le Gouvernement recherchait un endroit bien desservi par les transports publics ; il a donc opté pour le bâtiment où siégeait la direction régionale de la SNCF. Le maire de Metz avait proposé une autre solution impliquant la dispersion des services entre trois bâtiments distincts et un surcoût de 75 % du mètre carré, sachant qu'il en manquait 4 000.

Les crédits d'Atout France augmentent, contrairement à ceux des autres opérateurs. Le rapport sénatorial de M. Houel sur la TVA à 5,5 % dans la restauration fait apparaître que celle-ci a abouti à la création de 29 000 emplois, alors qu'on en détruisait 7 500 au cours des années précédentes. Un nouvel avenant va être signé.

Oui, monsieur Danglot, le Gouvernement défend l'industrie ! Il a sauvé des emplois dans l'automobile, chez Heuliez, et même chez Molex. Au total, 69 entreprises ont été sauvées et 100 000 emplois. Je ne voudrais pas vous rappeler Vilvorde et l'État passif...

Nous sommes attentifs à la question des normes de sécurité et d'incendie, monsieur Bécot.

Madame Goulet, nul ne peut mettre en doute l'intérêt du Gouvernement pour les chantiers navals. Deux commandes ont occasionné 5 millions d'heures de travail. Total est une entreprise privée, mais je relaierai vos inquiétudes auprès des ministres de l'industrie et du commerce extérieur.

Je remercie le Sénat pour le travail qu'il fournit et pour la pertinence de ses questions. Le Gouvernement privilégie l'action sur le terrain pour répondre aux attentes de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. le président. - Je remercie Mme Khiari de sa compréhension.

Mme Bariza Khiari.  - Vous veniez de faire preuve de courtoisie à l'endroit de M. Rebsamen.

L'Unesco vient d'inscrire le repas gastronomique français au patrimoine international de l'Humanité, au moment même où le ministère de l'identité nationale disparaissait.

Mme Nathalie Goulet.  - Ce qui est une excellente chose.

Mme Bariza Khiari.  - De fait, l'identité nationale n'est pas question de couleur mais de savoir-vivre ! (Applaudissements au centre et à gauche) Riche de saveurs diverses, la gastronomie française n'exclut aucun plat, elle associe ceux du monde entier et les rend ainsi meilleurs.

Le cadre juridique du tourisme a été largement modifié. La France est la première destination touristique au monde, pourquoi n'est-elle pas aussi au premier rang pour les recettes du tourisme ? Pourquoi n'est-elle qu'un lieu de transit pour un touriste étranger sur sept ?

Le budget du tourisme baisse encore, puisque vous ne cherchez qu'à satisfaire les agences de notation. La baisse de la TVA dans la restauration demeure, avec le bouclier fiscal, un péché capital de la majorité : les 2,4 milliards d'euros dépensés n'ont pas vraiment profité à l'emploi ni suscité une baisse des prix.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est vrai.

Mme Bariza Khiari.  - Tout au plus les salaires auront-ils été légèrement augmentés. M. Houel évoque les emplois créés, certes, mais au prix de 130 000 euros chaque. C'est énorme !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur.  - C'est vrai.

Mme Bariza Khiari.  - Je préférerais un taux intermédiaire.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Ce débat a eu lieu.

Mme Bariza Khiari.  - Je remercie M. Dumont d'avoir fait adopter à l'Assemblée le principe d'un document de politique transversale budgétaire permettant d'identifier le concours de chaque ministère à la politique du tourisme. En compilant les crédits des ministères et des institutionnels du tourisme, on voit ainsi que l'on atteint un budget global de près de 1,2 milliard d'euros, auquel les collectivités participent largement.

Je déplore l'insuffisante dotation d'Atout France au regard de ses missions.

Votre budget n'exploite pas le potentiel du pays. C'est son défaut majeur, alors que la dépense touristique est un investissement d'avenir et non délocalisable. L'économie touristique est le seul secteur créateur d'emplois.

Malgré la crise, ou à cause d'elle, la vente de chèques vacances s'accroît. Où en est leur vente aux salariés de PME ? L'objectif de 500 000 chèques est peut-être optimiste...

Nous voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Article 48

M. le président.  - Amendement n°II-236, présenté par M. Badré et les membres du groupe UC.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Développement des entreprises et de l'emploi Dont Titre 2

27 000 000

27 000 000

Tourisme

Statistiques et études économiquesDont Titre 2

Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2

27 000 000

27 000 000

TOTAL

27 000 000

27 000 000

27 000 000

27 000 000

SOLDE

0

0

M. Denis Badré.  - M. le ministre a déjà présenté cet amendement, qu'il repousse...

Mme Nathalie Goulet.  - Il est parti !

M. Denis Badré.  - Membre de la commission des finances et fervent européen, je suis très attaché au rétablissement des finances publiques mais le Fisac n'est pas le bon instrument pour y parvenir. Ses crédits ont un effet starter, a rappelé M. Lefèbvre ; ils permettent de revitaliser les centres-villes, et bien des banlieues. En outre, le Fisac rassemble les acteurs locaux. Amputer ses crédits aurait un effet dévastateur et découragerait artisans et commerçants.

L'Assemblée nationale s'est prononcée pour la reconduction des crédits attribués en 2010 mais le Gouvernement a supprimé son amendement en deuxième délibération. Si nous votons largement dans ce sens, nous parviendrons peut-être à faire entendre la voix des élus.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°II-143, présenté par M. Cornu, au nom de la commission de l'économie.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Développement des entreprises et de l'emploi Dont Titre 2

21 000 000

21 000 000

Tourisme

Statistiques et études économiquesDont Titre 2

Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2

21 000 000

21 000 000

TOTAL

21 000 000

21 000 000

21 000 000

21 000 000

SOLDE

0

0

M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis.  - Je souscris aux propos de M. Badré, mais pourquoi faut-il défendre le Fisac chaque année. Qui, à Bercy, à une dent contre ce fonds, indispensable à nos zones rurales ?

Les 10 000 euros donnés à un commerçant pour s'installer ont un considérable effet multiplicateur dont bénéficient les finances publiques. On nous parle de rigueur budgétaire mais celle-ci doit-elle aller jusqu'à ce qu'on nous retire 45 % en autorisations d'engagement et 33 % en crédits de paiement ?

À la différence toutefois de nos collègues centristes, je propose que le Fisac fournisse un effort budgétaire ; c'est pourquoi je m'en tiens à 21 millions, ce qui reviendrait à reconduire les crédits de paiement tout en réduisant de 18 % les autorisations d'engagement. M. Badré pourrait se rallier à cette formule que la commission de l'économie a adoptée à l'unanimité

Craignons certes la deuxième délibération, mais aussi la commission des finances et la commission mixte paritaire ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. André Ferrand, rapporteur spécial.  - La commission des finances est attachée à l'assainissement des finances publiques, mais elle tient au Fisac. Plutôt que de proposer la reconduction pure et simple des crédits, la sagesse serait peut-être de voter l'amendement présenté par la commission de l'économie. Si le Gouvernement s'engageait à ne pas supprimer cet amendement en deuxième délibération, on pourrait même descendre un peu le chiffre...

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État.  - Ce serait formidable ! (Sourires)

M. Denis Badré.  - Toute réduction des crédits du Fisac aurait un effet psychologique dévastateur. Par principe, je combats toute diminution de ses moyens. Je suis d'autant plus réservé que la sincérité budgétaire est en cause. Si le Gouvernement s'engageait à ne pas demander une seconde délibération, la situation serait différente.

Incité par le président de la commission des finances, je m'incline.

L'amendement n°II-236 est retiré.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est défavorable. Nous connaissons l'importance du Fisac mais la situation de nos finances publiques impose de faire des économies. De surcroît, le gage proposé n'est pas raisonnable : les crédits de la banque de France doivent être conformes à nos engagements. Élu local, j'ai conscience de l'effet relais de ce fonds. Mais chacun doit faire un effort !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Ah, l'art de vivre à la française ! Une de ses composantes est de nous mener à 1 650 milliards de dette publique, ce qui nous expose au risque d'une hausse des taux d'intérêt, laquelle pénaliserait artisans et commerçants. J'ai entendu vos plaidoyers vibrants, mais prenons la mesure de la situation !

Ce budget affiche la rigueur, mais nous sommes loin du compte. Tout le monde est pour les économies générales, tout en soutenant les dépenses particulières, disait un ancien Premier ministre britannique. Mettons-nous à l'abri d'une seconde délibération qui apparaîtrait comme une violence envers les parlementaires. Une contraction supplémentaire est peut être nécessaire.

M. Denis Badré.  - On mégote !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Élu local, je sais que les aides faussent souvent le jeu du marché. Les artisans et commerçants ont besoin d'une hausse du pouvoir d'achat, lequel dépend moins du commerce que de la capacité à produire. Toutes ces aides faussent le marché. Nous ne sommes plus en économie fermée : compter sur la relance par la consommation, c'est créer beaucoup d'emplois en Asie !

M. le président.  - Je rappelle que la concision s'impose à tous, y compris au président de la commission. (Sourires)

M. Jean-Claude Danglot.  - Nous voterons l'amendement n°II-346, pas ceux qui suivent.

M. Michel Teston.  - Le déficit abyssal de l'État n'est pas la conséquence de l'art de vivre à la française ; il procède des choix politiques contestables faits ces dernières années.

Le groupe socialiste votera l'amendement n°II-143, car rien ne justifie la réduction des crédits du Fisac, si utile en zones rurales. (Applaudissements à gauche)

Mme Nathalie Goulet.  - M. le président de la commission des finances, je ne veux pas sembler rancunière... Dans l'indifférence générale, on nous a fait acquérir la salle Pleyel pour 60 millions d'euros dans le cadre du plan de relance -avec le soutien, d'ailleurs, du groupe CRC. J'aimerais bien qu'il n'y ait pas deux poids et deux mesures pour la rigueur budgétaire.

M. Bruno Sido.  - Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes !

M. André Ferrand, rapporteur spécial.  - Je maintiens l'avis de sagesse à l'amendement n°II-143.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Je propose à M. Cornu de rectifier son amendement pour éviter une seconde délibération.

M. Denis Badré.  - Malgré les encouragements du vénéré président de la commission des finances, j'invite le Sénat à voter l'amendement présenté au nom de la commission de l'économie. Une nouvelle réduction constituerait un très mauvais signal.

M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis.  - L'amendement a été adopté à l'unanimité par la commission. Il est raisonnable. Je le maintiens.

L'amendement n°II-143 est adopté.

M. le président. - Amendement n°II-391, présenté par M. Sido.

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Développement des entreprises et de l'emploi Dont Titre 2

2 000 000

2 000 000

Tourisme

Statistiques et études économiquesDont Titre 2

2 000 000

2 000 000

Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2

TOTAL

2 000 000

2 000 000

2 000 000

2 000 000

SOLDE

0

0

M. Bruno Sido.  - Nous abordons un domaine moins sensible. L'objet de cet amendement est de revaloriser les crédits des centres techniques industriels qui remplissent d'utiles missions d'intérêt général.

La réduction de leurs crédits est incompréhensible après les efforts déjà consentis. Depuis 2000, leurs dotations ont baissé de plus de 20 % ; il faudrait encore fournir un effort supplémentaire de 12 % ! D'où mon amendement qui gage l'abondement sur les crédits de l'action 2 et de l'action 5. Les CTI doivent continuer de soutenir les PME, conformément à un objectif déclaré du Gouvernement.

M. le président.  - Amendement identique n°II-393 rectifié, présenté par M. Badré, Mme Dini, MM. Dubois et J.L. Dupont, Mmes N. Goulet et Payet et M. Pozzo di Borgo.

M. Denis Badré.  - Il est défendu.

M. François Rebsamen, rapporteur spécial.  - Je suis sensible à vos arguments mais on ne peut ponctionner les crédits de l'Insee. En outre, la réduction des crédits des CTI doit être relativisée : ils pourraient faire appel davantage au concours des entreprises.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - ...et au crédit impôt recherche !

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État.  - M. Rebsamen a tout dit : la RGPP s'impose ; on ne peut pas remettre en cause l'installation de l'Insee à Metz.

M. Bruno Sido.  - Voté à l'Assemblée nationale, cet amendement a été supprimé en seconde délibération.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - Nous devons réduire les dépenses de l'État pour revenir à l'équilibre budgétaire. Avant de défendre des amendements, examinons les budgets de ces organismes qui prolifèrent. De plus, avec le CIR, le compte y est. A titre personnel, je vote contre.

Les amendements identiques nosII-391 et II-393 rectifié ne sont pas adopté.

Les crédits de la mission sont adoptés.

Les crédits du compte spécial sont adoptés.

Aide publique au développement

M. le président.  - Nous allons examiner les crédits de la mission « Aide publique au développement » et les comptes spéciaux « Engagement en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique », « Accords monétaires internationaux » et « Prêts à des États étrangers ».

M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Cette mission recouvre des crédits gérés par les ministères des affaires étrangères, de l'intérieur et de l'économie. Ses crédits enregistrent une hausse de 59 % en autorisations d'engagement qui s'explique par les hasards du calendrier de la constitution des fonds multilatéraux. Cette mission représente 35 % des crédits du total de l'aide publique au développement comptabilisée. Elle réunit la part la plus visible de notre aide.

Avec 9 milliards d'euros accordés en 2009, la France est le deuxième donneur en volume après les États-Unis ; mais le onzième au regard de son PIB, les États-Unis étant dix-neuvièmes. L'année 2010 devrait voir une nouvelle progression de l'aide qui sera suivie d'une contraction en 2011. Cette année encore, la France n'honorera pas son engagement de 0,7 % du RNB, contrairement aux États-Unis.

Après la quantité, j'en viens à la qualité de notre aide. La part de notre aide bilatérale -la plus visible- progressera, alors que notre contribution au FED se réduira. Je prends acte de ce rééquilibrage.

J'observe que la comptabilisation de notre aide continue de poser problème. Je vise d'abord les crédits transférés à Wallis-et-Futuna. L'aide à Mayotte ne sera plus prise en compte pour des raisons statutaires. Les frais d'écolage d'étudiants étrangers ou l'aide aux réfugiés relèvent-ils de l'aide au développement ? Notre aide bilatérale est concentrée à 49 % sur l'Afrique subsaharienne, puis sur la Chine et la Turquie. Pour ces deux derniers pays, s'agit-il vraiment d'aide au développement ?

Notre coopération a fait l'objet d'une révision stratégique avec un nouveau document cadre, dont je regrette qu'il n'aborde pas la question financière et que son statut reste indéterminé. Quid de son adoption formelle et de sa publicité ?

Je propose l'adoption des crédits ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Edmond Hervé, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Le compte « Accords monétaires internationaux » ne comporte pas de ressources, vu les réserves des États de la zone franc. Cela ne doit pas nous faire oublier la situation difficile de certains.

Les crédits du compte « Prêts à des États étrangers » sont largement destinés à la Grèce ; les autres bénéficiaires sont principalement des pays d'Afrique, comme la Côte-d'Ivoire. N'oublions pas, à propos de celle-ci, que la démocratie et le respect des droits de l'homme sont indispensables au développement économique ! (Applaudissements sur tous les bancs)

Des puissances extérieures à l'Afrique y achètent 15 à 20 millions d'hectares... Félicitons-nous de nos contrats de désendettement et de prêts, dont les remboursements tiennent compte des circonstances économiques ; la France est le seul pays à avoir ce type de contrats.

Le compte « Prêts à des États étrangers » retrace en particulier les 6,143 milliards que la France est susceptible de prêter à la Grèce.

Je relève enfin la création du compte « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique ». Lors de la Conférence de Copenhague, les pays développés ont décidé de financer des actions de lutte contre la déforestation en faveur des pays en développement à hauteur de 30 milliards de dollars -dont 1,26 pour la France. Le respect de nos engagements se traduit par la création de ce compte, alimenté par la vente de quotas carbone économisés grâce à nos bonnes performances énergétiques. La France émet en moyenne six tonnes par habitant contre quinze aux États-Unis et dix en Allemagne. Ce financement est innovant et vertueux.

Il revient à chaque État de répartir entre les différentes installations industrielles une quantité globale de quotas, tout dépassement étant pénalisé, sachant qu'il faut aussi compter avec les nouveaux entrants -dont les quotas, estimés initialement à 2,7 millions de tonnes, sont plus proches aujourd'hui des 9 millions. La commission des finances propose un montage financier pour y faire face. A titre personnel, je trouve la dualité des régimes entre quotas souverains et quotas industriels peu compréhensible. Le CAS a vocation à vendre ; je crains qu'il ne soit contraint d'acheter...

Comme les années précédentes, je souhaite un document de politique transversale retraçant l'intégralité de notre aide au développement, y compris la coopération décentralisée dont nous avons quelque raison d'être fiers. (Applaudissements)

M. Christian Cambon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.  - Je me réjouis, monsieur le ministre, de votre présence et de votre nouvelle fonction de ministre de la coopération. Puisse le pilotage de la coopération s'en trouver amélioré et nos partenaires du Nord et du Sud mieux saisir le sens de l'action de la France !

Ce budget atteste la volonté du Gouvernement de préserver l'aide au développement dont les crédits sont sanctuarisés. Il manifeste également le redressement bienvenu de notre aide bilatérale. Notre stratégie d'aide multilatérale a plutôt bien réussi ; mais nous sommes peut-être allés trop loin. La baisse de notre contribution au FED et à la banque mondiale permet d'augmenter les crédits d'aide bilatérale dans de nombreux domaines -infrastructures, eau, agriculture- à des pays en crise comme l'Afghanistan et Haïti. Les pays les moins avancés ont besoin de dons, non de prêts. L'AFD est dynamique mais intervient aujourd'hui à 87 % sous forme de prêts à des pays de plus en plus éloignés de nos priorités géographiques. Notre commission examinera le contrat d'objectif et de moyens de l'AFD en cours de négociation. Quel en est le calendrier ?

La commission préconise de développer les synergies de l'aide apportée par les pays membres de l'Union européenne et par l'Union européenne. Des expérimentations sont en cours, il faut les soutenir.

L'aide publique au développement ne saurait se passer d'évaluation. Certes, c'est complexe, mais l'aide publique au développement n'a pas le monopole de la complexité. Votre prédécesseur nous avait assurés que nous serions associés à cette évaluation. En sera-t-il bien ainsi ?

Monsieur le ministre, cette séance sera l'occasion d'entendre votre vision de l'aide au développement, le bilan que vous dressez de la coopération et vos priorités stratégiques ! (Applaudissements à droite)

La séance est suspendue à 12 heures 55.

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

La séance reprend à 15 heures.