Grenelle de l'environnement (Deuxième lecture - Suite)

M. le président.  - Nous reprenons la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi de programmation relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Discussion générale (Suite)

M. Bruno Sido, rapporteur de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.  - Monsieur le ministre d'État, je vous remercie de cette présentation qui souligne toute l'importance du Grenelle, démarche initiée par le Président de la République à laquelle la commission et moi-même avons complètement adhéré ainsi que d'avoir confié au Sénat le soin d'examiner en premier le « Grenelle II », la boîte à outils, inscrit à notre ordre du jour en septembre.

Voilà plus d'un an que ce texte a été adopté en conseil des ministres. Ce laps de temps, qui peut sembler long, a permis un examen approfondi du texte au Parlement, texte sur lequel le Gouvernement a bien voulu ne pas déclarer l'urgence. Soyez-en remercié, monsieur le ministre d'État, car il importait de ne pas brûler l'étape parlementaire de ce processus original de concertation avec la société civile.

Initialement constitué de 50 articles, le texte en comptait 61 après son examen par les députés en octobre 2008, 53 après son passage au Sénat entre fin janvier et début février. Vingt articles restent en discussion après la deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Les députés ont, notamment, décidé le rétablissement de la possibilité, que le Sénat avait supprimée en première lecture, de recourir à un contrat de performance énergétique sous la forme d'un marché global ; la substitution d'un avis simple des architectes des Bâtiments de France à l'actuel avis conforme pour les autorisations de travaux dans les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ; la réalisation des études nécessaires à la réalisation d'une liaison fluviale à grand gabarit entre les bassins du Rhône et de la Moselle, et l'organisation d'un débat public d'ici 2012 ; la suppression du rapport du Gouvernement sur les enjeux et l'impact de l'autorisation de circulation de poids lourds de 44 tonnes -nous y reviendrons ; la réintégration des petites éoliennes dans le champ des schémas régionaux des énergies renouvelables -c'est un vrai sujet dont nous reparlerons lors du Grenelle II ;...

M. Roland Courteau.  - Merci !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - ...l'obligation pour toute centrale à charbon de comporter, au stade de son projet de construction et avant son entrée en fonction, un dispositif opérationnel de captage de dioxyde de carbone ; le déplafonnement de la redevance sur les concessions hydroélectriques au-delà de 25 % du chiffre d'affaires ; l'obligation de mener des expertises exhaustives et contradictoires sur le bilan écologique et énergétique des biocarburants ; le rétablissement de la rédaction de première lecture en ce qui concerne la mise à l'étude de « l'aménagement ou l'effacement » des obstacles les plus problématiques à la migration des poissons -vaste sujet ! ; la suppression de la date butoir pour la généralisation du « carnet de santé des salariés » ; la mise en place par l'État de dispositifs de surveillance et de mesure des ondes électromagnétiques menés par des organismes indépendants accrédités ; la fixation de l'objectif national de réduction des déchets ménagers au niveau d'une diminution de 5 kg par habitant et par an pendant les cinq prochaines années ; l'adoption d'une rédaction intermédiaire concernant la consommation de papier par l'administration, qui prévoit de la réduire « de façon significative », et la suppression de l'obligation pour l'État de recourir à des emballages consignés ; l'instauration d'un représentant pour les trois réseaux de chambres consulaires au sein du comité de développement durable et de suivi du Grenelle de l'environnement -le point est important ! ; et, enfin, la limitation par décret de la durée maximale des procédures d'enquête publique et d'expropriation pour les projets de rocades structurantes.

Votre commission, dans un esprit de conciliation, vous proposera d'accepter la plupart de ces modifications, sauf en cas de divergence majeure. Elle suggère de procéder aux modifications suivantes...

Elle a rejeté la suppression de l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France ; elle a supprimé l'obligation de procéder à un audit préalable au développement des autoroutes ferroviaires et adopté un amendement de compromis sur les liaisons fluviales à grand gabarit Rhône-Saône et Rhin-Moselle. Nous réitérons aussi notre demande de rapport sur les enjeux et impacts de la circulation des 44 tonnes. Nous avons rétabli notre rédaction sur les centrales à charbon, pour imposer le captage et le stockage du dioxyde de carbone dès que la technologie le permettra. Nous persistons à vouloir subordonner la production des biocarburants à des critères de performances énergétiques et environnementales. Nous avons rétabli notre texte sur la trame bleue, pour exclure la mise à l'étude de « l'effacement » des obstacles les plus problématiques à la migration des poissons.

En ce qui concerne les continuités écologiques et les zones humides, la commission a substitué le terme « remettre en bon état » au terme « restaurer ». Elle a prévu la généralisation du « carnet de santé des salariés » avant le 1er janvier 2013 car sans date butoir on ne fera rien. Elle a rétabli un objectif en pourcentage pour la diminution des déchets ménagers : 7 % par habitant sur cinq ans. Elle a supprimé l'exonération de taxe foncière pour les immeubles professionnels raccordés à une unité de traitement des déchets pour couvrir leurs besoins en énergie thermique. S'agissant des services de restauration collective de l'État, elle a réintroduit l'utilisation d'emballages consignés et une hiérarchie des produits fonction de leur degré de respect de l'environnement. Elle a restauré les règles antérieures de transfert de compétences entre les EPCI et les syndicats mixtes ou les syndicats de commune. Elle a supprimé la disposition permettant, en cas d'annulation contentieuse du plan local d'urbanisme, la révision simplifiée de l'ancien plan d'occupation des sols pendant le délai de deux ans suivant la décision du juge devenue définitive.

Nous avons donc beaucoup travaillé en commission et adopté de nombreux amendements. J'ai tenu à énumérer les modifications apportées puisque selon la nouvelle procédure, elles sont intégrées au texte en discussion et n'apparaîtront pas dans des amendements. C'est du reste un inconvénient de la réforme constitutionnelle.

Après trois lectures, le présent projet de loi n'est plus véritablement une loi de programmation, c'est-à-dire un texte fixant des objectifs qualitatifs et quantitatifs à l'action de l'État. Le projet est tantôt trop vague, tantôt excessivement précis. Comme il est difficile de suivre la crête de la montagne, sans verser dans les généralités, ni dans des détails qui relèvent d'une loi simple... Mais il n'est plus temps de se délecter de purisme : acceptons ce texte en l'état. L'essentiel est que le consensus du Grenelle de l'environnement se soit confirmé au Parlement. Le projet de loi a été adopté en première lecture à une très large majorité à l'Assemblée nationale comme au Sénat et les députés ont confirmé en deuxième lecture leur approbation quasi unanime. Cinq voix seulement ont manqué. C'est que la question transcende les distinctions partisanes. J'espère que cet esprit perdurera durant notre deuxième lecture. (Applaudissements à droite et au centre ; MM. Fortassin et Guillaume applaudissent aussi)

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

Mme Évelyne Didier.  - A l'époque des premiers groupes de travail du Grenelle de l'Environnement, en 2007, nous étions loin de penser que le débat sur le Grenelle I tarderait tant. Nous avons déjà entamé la réflexion sur le Grenelle II ! La lenteur de l'examen parlementaire aura permis à certains de tenter d'édulcorer le texte. « Il ne faut pas entraver le développement économique », répètent certains de nos collègues, comme si jusqu'ici ce n'était pas les intérêts économiques et financiers qui avaient négligé les exigences sociales et environnementales.

M. Roland Courteau.  - Exact !

Mme Évelyne Didier.  - Pourtant nos concitoyens ont pris conscience des problèmes. Du reste, nous ne nions pas les aspects positifs du Grenelle : large concertation, recherche du consensus, évolution réelle des points de vue, mesures positives : mais tout cela n'est pas à la mesure des enjeux et surtout, nous ne changeons pas les fondements du système qui a conduit à la situation d'aujourd'hui.

Certes, monsieur le ministre d'État, vous savez être convaincant. Mais la crise économique et financière nous impose des politiques publiques fortes et des financements suffisants pour respecter les engagements. Hélas, le projet de loi de programmation est surtout une occasion pour le Gouvernement d'utiliser ses outils libéraux : (M. Roland Courteau le confirme) révision générale des politiques publiques, transfert de charges aux collectivités sans contrepartie hormis une baisse des dotations de fonctionnement, mise sous tutelle des collectivités par l'État, basculement des missions de service public vers le privé... C'est le système tout entier qui est en faillite ! L'omniprésente étiquette « développement durable » masque mal la transformation à marche forcée d'un État garant de l'intérêt général en un État garant de la concurrence libre et non faussée. Nous ne pouvons laisser le marché opérer une conversion factice à l'écologie simplement pour accroître les profits des actionnaires ; déjà, le système d'échanges de quota d'émissions de gaz à effet de serre est devenu un marché spéculatif. Voyez les textes examinés récemment dans nos assemblées. Comment pourra-t-on concilier les objectifs du Grenelle avec la libéralisation des transports ferroviaires qui isole les territoires ruraux, la disparition des services publics, la réforme annoncée des procédures d'enquêtes publiques et les mesures du plan de relance ? Les cadeaux fiscaux en loi de finances dénaturent les signaux positifs du Grenelle émis en 2007. Le recyclage du capitalisme, désormais soucieux de développement durable et converti à la croissance verte depuis le début de la crise, demeurera pur habillage si les fondements restent les mêmes. Au fond, monsieur le ministre d'État, le logiciel que vous proposez est intéressant mais c'est surtout le disque dur libéral qu'il faut remplacer ! Nous savons, à la veille du sommet de Copenhague, que nos objectifs de réduction des gaz à effet de serre doivent être révisés à la hausse. Songez aussi que les ménages les plus fragiles ne modifieront leurs modes de vie, de déplacement, de consommation que si nous tendons aussi vers une plus juste répartition des richesses.

M. Roland Courteau.  - C'est vrai.

Mme Évelyne Didier.  - A quoi bon « verdir » les mesures fiscales quand de nouvelles coupes budgétaires privent la recherche, les transports, l'habitat, la santé et la plupart des services publics de leurs moyens d'action ?

Dans le débat, nous insisterons sur les points qui nous tiennent à coeur. La lutte contre le réchauffement climatique passe d'abord par la réduction de la consommation énergétique des bâtiments existants ou à construire. L'État doit montrer l'exemple et aider les collectivités territoriales à suivre ce chemin vertueux ; or ce n'est pas en diminuant les dotations de fonctionnement, supprimant la taxe professionnelle et incitant aux partenariats public-privé que nous obtiendrons des résultats ! Concernant le logement social, nous ne pouvons nous satisfaire des objectifs et moyens que vous proposez pour la rénovation des bâtiments : les éco-prêts et les crédits « développement durable » profiteront aux institutions financières. Les crédits d'impôts sur le revenu pour les économies d'énergies et l'utilisation d'énergies renouvelables ne toucheront pas ceux qui sont frappés par le chômage et la précarité. En ce qui concerne le développement des énergies renouvelables, la défiscalisation seule ne suffira pas.

L'exploitation de la biomasse, des agro-carburants est bien entendu à promouvoir, mais pas au détriment des cultures vivrières. La réduction de la consommation d'énergie doit intervenir dès la conception des constructions ou des produits. L'exploitation des énergies thermiques est à améliorer, mais pas au détriment de la santé de nos concitoyens. Préparons bien l'après-carbone...

Nous approuvons les dispositions concernant la trame bleue et la trame verte mais souhaitons aussi un meilleur classement des rivières, car l'état de certains cours d'eau et points de captage reste préoccupant. Soucions-nous aussi de la santé des travailleurs, afin d'éviter un nouveau scandale de l'amiante et confortons le rôle des lanceurs d'alerte. Les nouveaux risques exigent une plus grande vigilance ; et ne nous en remettons pas à des instances sanitaires financées par les industriels !

Quant au traitement et au recyclage des déchets, il n'y a pas une mais des solutions selon les produits, l'endroit où l'on vit et la fiabilité des filières mises en place. Gardons-nous de privilégier telle ou telle technique.

Avec le groupe d'étude, nous avons vu en Espagne que les certitudes d'hier n'étaient plus celles d'aujourd'hui. Mais nous avons surtout constaté, comme nous le faisons dans d'autres domaines, que ce qu'on a tendance à développer ici ou là, ce n'est pas forcément la meilleure technique au meilleur coût, mais ce qui est aidé et financé par l'Europe, par l'État et les agences. Nous avons développé partout et à tout prix l'assainissement collectif pour revenir aujourd'hui à l'assainissement non collectif pour les bâtiments isolés. Attention donc à la tentation de la solution unique. L'éco-conception des produits et la réduction des déchets à la source est la première piste à encourager. Désigner toujours le consommateur comme le pollueur revient à le rendre seul responsable et à s'en remettre à lui pour être vertueux pour trier et consommer mieux, alors que l'on fabrique sans vergogne des produits producteurs de CO2, dangereux pour la santé ou coûteux, en fin de vie, pour la collectivité.

Pour conclure, je souhaite remercier tous ceux qui ont permis que les discussions et le débat aient lieu et qui ont toujours répondu à nos sollicitations, en particulier le rapporteur, M. Sido, et les collaborateurs du ministère. Nous vous donnons acte, monsieur le ministre d'État que vous acceptez la confrontation et le dialogue. J'ai eu plaisir à vous lire, monsieur le ministre d'État, dans L'Humanité Dimanche (rires), un hebdomadaire très intéressant que je conseille à tous. Vous trouverez sans doute mon intervention sévère mais les recettes du libéralisme ont fait long feu. Au nom du pragmatisme, on joue « petit bras ». Alors que c'est d'une révolution dont nous avons besoin. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - C'est vrai, monsieur le ministre d'État, vous avez, dans la forme, traité ce projet de loi de façon exemplaire, manifestant sans cesse votre volonté de concertation et votre volonté de dégager des lignes directrices. Le Sénat ne s'y est d'ailleurs pas trompé, qui l'a voté en première lecture à la quasi-unanimité. Je salue aussi le remarquable travail du rapporteur.

Au-delà de ce texte, nous avons un travail pédagogique essentiel à accomplir auprès de l'opinion publique. Ce texte est fondateur, certes, mais ce n'est pas suffisant. Il faut aussi faire passer des messages un peu difficiles. Par exemple, on doit, dit-on, diminuer la consommation d'énergie : oui, mais à condition que ce ne soit pas aux pays pauvres de payer les pots cassés ; car la corrélation est étroite entre consommation d'énergie et niveau de vie...

De même, ne perdons pas de temps en débats sémantiques, par exemple pour savoir s'il faut parler d'agrocarburants ou de biocarburants. On peut régler le problème en trois minutes en décidant de parler de carburants alternatifs.

M. Roland Courteau.  - On peut...

M. François Fortassin.  - Car il y a plus important à faire. Il y a à faire en sorte que la production alimentaire soit suffisante, de qualité et qu'elle ne nuise pas à la santé de nos concitoyens. Au-delà du texte qui sera voté, il y a des messages à diffuser.

Et lorsqu'il sera voté, faites en sorte que les décrets d'application ne tardent pas ! Nous n'avons pas envie de ressembler à une société savante...

Mon groupe a déposé des amendements. J'en ai personnellement un précisant qu'il était normal que les herbivores mangent de l'herbe : c'est si important, pour la préservation des nappes phréatiques ou des paysages, pour la qualité de la viande et du lait, que c'est le genre de porte ouverte que j'enfonce avec plaisir.

Soyez donc assurés, monsieur le ministre d'État, madame la ministre, que, si nous donnons un avis plutôt favorable à ce texte, nous serons très vigilants sur son application. Car si le Grenelle I est une très belle lettre au Père Noël, dans le Grenelle II, il faudra mettre les moyens. (Applaudissements sur les bancs RDSE et socialistes)

M. Didier Guillaume.  - Apparemment, le Père Noël est passé avec sa hotte pleine. De jouets par milliers ? Qui qu'il en soit, il doit répondre aux lettres que lui ont envoyées de nombreux citoyens et associations...

Le contexte de cette deuxième lecture est différent de celui de la première : la crise s'est approfondie et nos concitoyens la ressentent de plus en plus. Les impératifs écologiques sont maintenant reconnus par tous et les Français sont conscients que le Grenelle est un exemple pour les autres pays. Le succès de Home et les bons résultats de la liste Europe-Écologie, 48 heures après sa diffusion, ont montré que nos concitoyens français sont désormais intéressés par le développement durable.

De même, le discours du Président de la République à Versailles, faisant valoir que, contrairement à ce que l'on croit, le Grenelle ne coûte pas cher et qu'il peut au contraire être à l'origine de 600 000 emplois nouveaux, ce discours, nous le partageons. Et lorsque, monsieur le ministre d'État, vous parlez de « fol espoir », de «leadership de la France », le groupe socialiste vous soutient sans retenue.

Il y a là un rendez-vous entre le peuple et le législateur. Car le Grenelle I a fait naître un fol espoir que le Grenelle II ne doit pas décevoir. Or, quand nous travaillons à ce dernier, nous avons le sentiment qu'il n'est pas à la hauteur du Grenelle I : en commission, nos amendements sont quasi systématiquement repoussés ; le compte n'y est pas et je crains que le Père Noël n'ait pas grand-chose dans sa hotte. Il faudra pourtant pousser les feux -et donc dégager les moyens nécessaires- sur les transports, sur l'agriculture biologique, sur la recherche, sur l'énergie et le climat. Pour contrer les gaz à effet de serre, nous devrons aborder le débat sur les énergies renouvelable et sur le nucléaire, qui ne doit plus être un sujet tabou.

Si nous approuvons les bonnes intentions du Grenelle I, il nous semble que la suite est bien en retrait. Rien ne serait pire que d'avoir fait rêver sans que rien ne se passe. Quand j'entends le Président de la République vilipender l'ultralibéralisme...

M. Dominique Braye.  - Excellente référence !

M. Didier Guillaume.  - ...j'applaudis, car il n'est pas compatible avec une politique de développement durable.

Les discours doivent être suivis d'actes et nous déposerons des amendements lors de l'examen du Grenelle II car diverses mesures devront être précisées. L'immense espoir que ces textes ont suscité doit être suivi d'effets.

Comme en première lecture, nous voterons ce texte mais nous resterons vigilants. La France doit montrer le chemin et nous espérons pouvoir vous y aider. (Applaudissements socialistes et sur divers bancs à droite)

M. Daniel Soulage.  - Voilà plusieurs mois que tous les sénateurs de la commission des affaires économiques vivent au rythme du Grenelle. Avec cette deuxième lecture, nous arrivons à la fin du premier cycle. La prise de conscience de l'urgence environnementale chez tous nos concitoyens marque le succès du Grenelle. Nous devons tous agir pour protéger l'environnement, d'autant que la consommation d'énergie des ménages continue de croître, alors que le secteur industriel a entrepris sa mue énergétique depuis plusieurs années.

En revanche, des interrogations demeurent sur les technologies de substitution, comme le prouvent les récents articles sur les risques pour l'environnement des ampoules fluo-compactes.

La croissance verte est une opportunité pour notre économie, durement touchée par la crise. Selon une étude du Boston Consulting Group, les quinze grands programmes du Grenelle de l'environnement devraient générer sur douze ans 450 milliards d'activité et 600 000 emplois, tandis que le rapport Stern a établi que ne rien faire coûterait à terme beaucoup plus cher. Je suis donc tout à fait favorable à ce projet de loi.

L'Assemblée a conservé de nombreuses dispositions votées par le Sénat. Je me félicite notamment que plusieurs de mes amendements aient été maintenus. Ainsi en est-il de la modulation pour la réduction des intrants dans les filières de production qui ne disposent aujourd'hui d'aucune molécule de substitution à celles qui vont être interdites et du développement des ressources en eau grâce à de nouvelles retenues. Cette problématique n'est d'ailleurs pas uniquement agricole : le 24 janvier, à Davos, le secrétaire général de l'ONU a en effet estimé que les ressources en eau étaient en train de s'épuiser.

La commission propose plusieurs modifications à ce projet de loi, notamment sur l'article 26 relatif à la trame bleue. Elle a ainsi supprimé l'effacement des ouvrages les plus problématiques. De même, elle a remplacé la notion de restauration des continuités écologiques par celle de remise en bon état, afin de s'inscrire dans la droite ligne du projet de loi portant engagement national pour l'environnement.

On va encore demander plus aux agriculteurs, qui ont déjà fait de gros efforts pour réduire les intrants. Ils savent qu'ils doivent adapter leur activité aux impératifs environnementaux. Ils ont toutefois besoin d'un peu de temps et de se sentir accompagnés. C'est pourquoi il faudra être très prudent lors de la rédaction des décrets et faire preuve de beaucoup de pédagogie lors de leur mise en oeuvre.

J'en viens à l'élimination des déchets. L'article 41 fixe les principes qui guideront la politique des déchets dans les prochaines années. Les députés ont ajouté un nouvel alinéa pour améliorer la gestion des déchets organiques. Dans son rapport, le rapporteur souligne que « la valorisation organique est sans aucun doute l'un des enjeux majeurs des futures politiques de gestion des déchets ». Avant cette seconde lecture, le groupe de travail sur les déchets du Sénat, présidé par M. Braye et auquel j'appartiens, s'est rendu en Catalogne pour étudier les résultats des actions mises en oeuvre en matière de tri mécano-biologique de méthanisation. Ce déplacement n'a fait que renforcer mes doutes sur cette technique : (M. Jacques Muller le confirme) la méthanisation est une technique intéressante et il faut y avoir recours lorsque cela est possible, notamment pour les déchets agricoles et pour la partie organique des ordures ménagères quand elle est collectée sélectivement. En revanche, la tri-méthanisation des ordures ménagères résiduelles (OMR) que nous expérimentons en France depuis plus de vingt ans n'a toujours pas convaincu techniquement ni économiquement. L'expérience Catalane de tri-méthanisation des OMR est un échec patent. Nos interlocuteurs ont été unanimes sur ce point. Ils ont même décidé de convertir leurs installations pour les réserver aux bio-déchets collectés séparément. De plus, la méthanisation ne réduit que faiblement la quantité de déchets ultimes : l'incinération ou le stockage restent donc indispensables. On peut d'ailleurs s'interroger sur l'intérêt d'une installation de méthanisation alors que lors du stockage, de toute façon indispensable, il est possible de récupérer le biogaz à moindres frais ou grâce à un bioréacteur.

L'Ademe a réalisé une étude comparative des tris mécano biologique dans différents pays européens. Or, seule la France s'est orientée vers la production de compost à partir d'OMR. Dans les autres pays, la qualité médiocre de ces composts a conduit à l'arrêt de ces productions. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement pour interdire l'épandage de ces composts sur les terres agricoles. En France, on continue à diluer des déchets verts avec ces composts pour atteindre une norme qui ne garantit en rien leurs qualités. D'ailleurs, L'Ademe n'aide plus ces unités et encourage le compost issu des bios déchets collectés sélectivement.

Les solutions que nous retiendrons guideront les choix des responsables des collectivités. Elles auront donc des conséquences sur le plan environnemental et sur la charge financière de nos concitoyens. Avant de choisir, nous devrons répondre à diverses questions : quel avenir pour le compost réalisé à partir des ordures ménagères résiduelles ? Le tri mécano-biologique et la méthanisation peuvent-ils être une solution d'avenir ? Pouvons-nous créer en milieu urbain de nouveaux incinérateurs et, en milieu rural, poursuivre la récupération du méthane à partir d'installations simples ou de bioréacteurs ? C'est pourquoi le groupe de l'Union centriste, sur ma proposition, a demandé au Sénat de bien vouloir diligenter, dans le sillage du groupe d'études déchets que préside notre collègue Braye, une mission d'information. Le président du Sénat et la commission des affaires économiques ont émis un avis favorable et je les en remercie. D'ici la fin de l'année, je suis persuadé que nous pourrons faire oeuvre utile et nous aurons, si vous le voulez bien, monsieur le ministre d'État, des contacts avec vos services.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Bien sûr !

M. Daniel Soulage.  - Je tiens à remercier M. le ministre d'État et Mme la ministre pour leur écoute ainsi que le président et le rapporteur de la commission des affaires économiques qui ont fait un travail remarquable. Enfin, merci à l'équipe administrative de la commission qui est particulièrement dévouée, efficace et disponible. (Applaudissements au centre, à droite et sur divers bancs socialistes)

M. Jacques Blanc.  - Mon collègue Vestri devait intervenir mais il a été victime ce matin d'un léger malaise et je vais donc le remplacer. Lors de son intervention en première lecture, il avait rappelé les différentes opérations qu'il avait menées pour sauver la Méditerranée à laquelle il est particulièrement attaché. Je tiens à rendre hommage à son action.

Grace à vous, monsieur le ministre d'État, nous sommes témoins d'une véritable révolution culturelle.

Qui aurait pensé il y a dix ans que nous aboutirions à un consensus sur une autre dimension du développement ? Le Grenelle propose une méthode qui ouvre de nouvelles perspectives. Il permet de dépasser le conflit entre les tenants du développement et les défenseurs de l'environnement.

Je suis de ceux qui pensent que l'homme déconnecté de références spirituelles et de valeurs est plongé dans une angoisse existentielle. Pour en sortir, il doit se réconcilier avec lui-même en se réconciliant avec son environnement naturel. (Marques d'ironie sur les bancs socialistes)

M. Thierry Repentin.  - C'est du Rousseau !

M. Jacques Blanc.  - Cette prise de conscience, cette exigence très forte nous envahit tous. En nous projetant vers l'avenir, vous nous permettez de contribuer à apporter une réponse nouvelle à cette exigence humaine. Nous sommes au coeur de la réconciliation de l'homme et de son environnement par un développement qui respecte la biodiversité, que ce soit dans l'urbanisme, les transports, l'énergie, le traitement des déchets... Nous sommes engagés dans une réflexion forte.

Nous examinons une loi de programmation générale à laquelle on ne peut intégrer toutes les réponses normatives, financières, qui figureront dans le Grenelle II. Aujourd'hui, le Sénat peut s'impliquer à l'unanimité...

M. Daniel Raoul.  - On verra !

M. Jacques Blanc.  - ...dans la construction d'un projet de développement qui concilie les créations d'emplois et le développement durable. Il n'y a pas d'opposition, mais au contraire une convergence nouvelle entre ces deux objectifs. Nous devons trouver dans le développement durable des atouts pour sortir de la crise et créer une dynamique d'emploi qui ne sacrifie pas l'avenir. Quelles que soient nos divergences, nous pouvons tous souscrire à cette proposition.

Cette révolution culturelle nous permettra de dépasser les conflits que nous avons connus quand nous débattions de la biodiversité, de la préservation de la richesse de la faune et de la flore. Il est plus facile d'en parler à cette tribune qu'en tant que maire ou président d'une intercommunalité, quand nous devons apporter une réponse ! N'ayons pas peur d'en débattre ici.

J'ai regretté que lors de notre premier débat nous ne parlions pas de l'agriculture raisonnée, complémentaire de l'agriculture biologique. Mobilisons-nous pour valoriser ces produits. Ainsi, dans ma commune, s'est créé le premier centre de traitement du lait de brebis biologique. C'est un atout formidable. Daniel Soulage a évoqué les problèmes de la production agricole, des primeurs et même du vin : il faut intégrer ces évolutions. Complétée par l'agriculture raisonnée, l'agriculture biologique nous permettra d'aller de l'avant afin que nos agriculteurs se sentent fiers. C'est un des mérites du Grenelle que d'avoir montré qu'ils n'étaient pas des utilisateurs permanents d'engrais, mais des hommes capables de comprendre les exigences du développement durable.

Nous avons besoin de l'agriculture pour maintenir une présence humaine dans nos campagnes : un des premiers objectifs du développement durable pourrait justement être l'équilibre de l'aménagement du territoire, afin que les campagnes cessent de se vider au profit d'hyperconcentrations urbaines. Vous permettrez à l'élu de la Lozère et au responsable ici du groupe « montagne » de souhaiter que le développement durable contribue à l'objectif de cohésion des territoires que le traité de Lisbonne devrait porter demain.

Pour ce qui est du développement du transport ferroviaire, il faudrait mettre un coup d'accélérateur au projet de TGV Nîmes-Montpellier-Perpignan-Barcelone, que nous attendons avec impatience.

M. Roland Courteau.  - Nous sommes d'accord.

M. Jacques Blanc.  - Il ne faut pas non plus oublier les liaisons qui desservent le Massif central, de Clermont jusqu'à Béziers, Alès et Nîmes. Aucun collègue ne me démentira : il faut concilier développement du TGV et de dessertes qui augmentent les chances de développement.

Quant au problème des déchets, c'est un vaste sujet.

Voix socialiste.  - Il ne manque que le loup !

M. Jacques Blanc.  - Cela coûtera cher, mais leur valorisation maximale est indispensable. Nous allons nous engouffrer dans la perspective que vous nous proposez.

Je pourrais multiplier les exemples concrets

Voix socialiste.  - Non ! Nous sommes convaincus !

M. Jacques Blanc.  - Dès aujourd'hui, une étape est franchie, une révolution culturelle positive s'est accomplie. Nous y avons tous contribué, et vous plus particulièrement, monsieur le ministre d'État. C'était aussi la volonté du Président de la République, ce qui ne veut pas dire que le développement durable soit la chose d'une personne ou d'un parti. (M. Bruno Sido, rapporteur, approuve) La France est moteur dans le domaine des énergies renouvelables. Cela n'est pas évident, les projets d'éoliennes que nous menons dans nos communes en témoignent, mais nous ne devons pas avoir peur de nous engager dans ces perspectives.

Nous avons la preuve que les politiques servent à quelque chose, que nous sommes capables d'évoluer pour répondre aux attentes légitimes de nos populations. Je remercie les ministres présents de nous permettre de contribuer à préparer un avenir meilleur pour la France, l'Europe et le monde. (Rires et applaudissements)

M. Thierry Repentin.  - La rue de Grenelle a donné son nom aux accords de Grenelle, fondateurs dans notre droit social, qui ont inspiré la démarche du Grenelle de l'environnement... qui lui-même a fait fleurir une multitude d'autres « Grenelles ». Trouvant que le terme perdait ainsi de son sens et de sa portée, j'ai eu envie de revenir aux sources de ce nom. La commune de Grenelle a été annexée à la ville de Paris en 1860. Il n'en reste qu'un souvenir, attaché à la route, devenue rue, qui y conduisait.

Je crains qu'un destin similaire ne soit réservé à ce texte. Le Grenelle I n'est déjà plus que l'annexe du Grenelle II : nous en entamons la seconde lecture alors que nous travaillons en commission sur le projet de loi portant engagement national pour l'environnement. C'est ce dernier qui révèle nos divergences. Nous allons donc examiner un texte déjà obsolète, puisqu'il devait servir de base pour légiférer sur des outils. Or la concomitance des calendriers conduit au verrouillage des dispositifs avant même que les objectifs soient définitivement adoptés.

Des engagements inscrits dans le texte ou pris en séance en première lecture du Grenelle I, qui devaient être traduits dans le second texte sont récusés par la commission. Les propositions socialistes y sont presque systématiquement rejetées et l'on assiste moins à l'élaboration de la loi qu'à l'enregistrement des positions du Gouvernement et de la majorité. Ainsi, Grenelle I énonce de nouveaux objectifs pour le droit de l'urbanisme : la lutte contre la régression des surfaces naturelles et agricoles, contre l'étalement urbain, l'harmonisation de la planification à l'échelle de l'agglomération, la préservation de la biodiversité, la gestion des ressources, la création d'un lien entre densité et desserte en transports en commun et l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments.

Absorbé comme vous l'êtes par le Grenelle I, vous ignorez peut-être qu'au moins quatre de ces objectifs sont battus en brèche par le Grenelle II. Au mieux, les principes deviennent des facultés ouvertes aux collectivités ; au pire, ils sont passés par pertes et profits. N'étant pas membre de la commission des affaires économiques, Jacques Blanc l'ignore, puisqu'il est déjà parti. Nous partageons ses espoirs, qui ne trouveront malheureusement pas de traduction concrète.

Ainsi, « l'harmonisation des documents de planification à l'échelle de l'agglomération » se heurte à la confusion entretenue entre la planification -dévolue au Scot- et la réglementation, normalement réservée au plan local d'urbanisme (PLU).

Les modifications apportées par la commission à l'article 9 du Grenelle II gêneront la « lutte contre l'étalement urbain », puisque la définition de densités planchers dans certains secteurs des Scot sera soumise à un arsenal de critères supplémentaires.

Avec l'article 9 du Grenelle II, tel qu'il est rédigé par la commission, la « préservation de la biodiversité, notamment à travers la restauration des continuités écologiques » ne fait plus partie des objectifs des Scot. Pourtant, des corridors biologiques apparaissent dans les Scot les plus vertueux.

Enfin, « l'amélioration de la performance énergétique des logements » ne sera pas favorisée par les restrictions d'accès aux certificats d'économies d'énergie. En effet, alors que la loi du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique (loi Pope) autorisait toute personne morale à déposer des certificats d'énergie au registre national, le projet de loi Grenelle II restreint ce droit aux collectivités locales et aux fournisseurs d'énergie. Les bailleurs sociaux ne pourront donc plus dégager ainsi de marges de financement pour réhabiliter leurs logements. Certains grands groupes semblent avoir leurs entrées au plus haut sommet de l'État. Les obligés ne sont pas toujours où l'on croit ! Une fois n'est pas coutume, la commission a rectifié ses dispositions, contre l'avis du Gouvernement. Cela mérite un hommage, mais il reste à confirmer ce vote dans l'hémicycle.

Monsieur le ministre d'État a cité de nombreux chiffres. Je me limiterai à un seul : les éco-prêts de la Caisse des dépôts ont permis de réhabiliter 9 000 logements. Je le rappelle en regrettant les propos discriminants tenus par le ministre. Monsieur le secrétaire d'État, vous ne devrez pas forcer beaucoup votre talent pour tisser de nouveaux liens avec les collectivités territoriales, qui construiront comme jamais dans notre pays ! (Applaudissements sur les bancs socialistes. M. le président de la commission applaudit également)

J'en viens à l'article 13 du Grenelle II, autorisant le Gouvernement à réécrire par ordonnance le droit de l'urbanisme. Tant de mois de concertation avec la société civile pour refondre le code de l'urbanisme dans le secret des couloirs ministériels ! Écrire la loi est aussi le rôle du Parlement. Nous ne pouvons accepter que des ordonnances redessinent les taxes et participations d'urbanisme sans discussion avec les représentants de la Nation ! Ayant trouvé un consensus sur ce sujet, la commission a modifié le texte en conséquence. Je souhaite que cette position soit maintenue jusqu'au bout.

Tout cela explique pourquoi les sénateurs socialistes ont voté contre treize des quinze articles du titre premier du Grenelle II, consacré à l'urbanisme. Cela donne une idée des débats à venir et du vote qui se profile au cours de la session extraordinaire de septembre.

Relatif aux transports, le titre II est décevant, car il aurait fallu préciser les nouveaux objectifs de la politique nationale des transports, la compétence territoriale en matière de transports urbains, le plan des transports en Ile-de-France et le schéma national des infrastructures. Or, la commission a encore amoindri les dispositions - timides- relatives à la compétence « voirie » des intercommunalités dotées d'un plan de déplacements urbains.

J'en viens au financement, qui réserve deux déceptions.

La première concerne les agglomérations moyennes, encore une fois laissées au bord du chemin par le Grenelle II, puisque seules les grandes agglomérations percevront les financements d'État destinés aux projets de transports urbains. Les réseaux des grandes villes sont saturés, mais les villes moyennes manquent d'infrastructures malgré leur croissance démographique : c'est là que les déplacements susciteront des difficultés aiguës dans une dizaine d'années.

La seconde déception porte sur le partage de la valorisation foncière, issue d'un amendement socialiste à l'article 12 du Grenelle I. Malgré la reprise de cette proposition intéressante par le Président de la République lors de sa conférence de presse sur le Grand Paris tenue en avril à la Cité de l'architecture, malgré des discussions réitérées dans cette enceinte, la commission des affaires économiques a repoussé notre amendement d'application concrète.

Le Grenelle II forme l'enjeu principal pour l'aménagement durable de nos territoires. La commission des affaires économiques se réunit mercredi pour poursuivre l'examen du texte. Elle examinera nos propositions relatives à l'urbanisme commercial, ainsi que le titre III « énergie et climat ». Nous évaluerons à cette occasion votre volonté de maintenir ou de réduire le fossé entre les ambitions affichées dans le Grenelle I et les désengagements réels du Grenelle II.

Animés comme toujours d'un esprit constructif, nous n'accepterions pas un abus de confiance au détriment du Parlement, du monde associatif et des collectivités territoriales ! (Applaudissements sur les bancs socialistes. (M. François Fortassin applaudit également)

M. Michel Magras.  - Intervenant à ce stade de la discussion générale, il me serait sans doute difficile de ne pas répéter ce que d'autres ont déjà dit, mais je tiens à exprimer ma conviction profonde sur ce sujet fondamental, après avoir consacré 35 ans à enseigner les sciences de la vie et de la terre.

Je me limiterai donc à rappeler quelques idées majeures et principes fondamentaux, que j'aimerais vous faire partager.

La loi Grenelle a un fondement indiscutable : l'avenir de l'homme est indissociable de son environnement, si bien qu'il ne peut continuer à lui porter atteinte sans compromettre sa propre survie. Dorénavant, nul ne pourra envisager le développement économique en oubliant l'épanouissement humain, l'équilibre social et les aspects environnementaux. De ce constat est née la notion de développement durable, dont la finalité consiste à placer l'homme au centre du débat. Scientifiques et politiques ont définitivement admis que les humains -d'ici et d'ailleurs, d'aujourd'hui et surtout de demain- devaient d'abord subvenir à leurs besoins. Le développement durable repose sur trois piliers indissociables : le pilier économique, le pilier social, le pilier environnemental. La loi Grenelle est un des piliers de la politique nationale, mais aussi de la politique locale de développement durable. Au niveau planétaire, elle doit montrer l'implication de la France.

Nous débattons certes d'une loi de programmation, mais en sachant qu'un engagement national pour l'environnement fixera dès l'automne une série de normes et de contraintes applicables à la France entière, et qui ne seront pas sans conséquences pour nos collectivités, notre gestion de proximité ou notre comportement individuel. Malgré la forte tentation d'introduire dès à présent certaines dispositions tendant à mieux adapter les futures règles à la réalité locale, nous devons veiller à ne pas dénaturer le texte d'aujourd'hui.

Ma troisième conviction est que nous discutons aujourd'hui d'un sujet planétaire, faisant l'objet d'une prise de conscience mondiale. Pionnière de cette nouvelle stratégie économique, la France est aujourd'hui talonnée, notamment par les États-Unis -véritable rouleau compresseur- et par la Chine, toujours capable de produire plus, plus vite et moins cher. Or, la « croissance verte » fera émerger de nouveaux standards qui se traduiront à terme en parts de marché. Il ne faudrait pas que la France, pionnière qui se rêvait un jour leader, se fasse doubler par d'autres, dans une compétition économique particulièrement rude entre grandes puissances. Notre pays n'étant pas de taille à gagner seul, prolonger la politique nationale au niveau européen est indispensable. Je souhaite envoyer un signal à ceux qui font de la recherche ou qui dirigent notre économie : la crise économique aidant, il y a là une opportunité de placer la France en position favorable sur le marché mondial.

Enfin, le développement durable fédère les habitants de la planète autour de principes fondamentaux, mais les règles qui en découleront ne pourront être identiques sur toute la surface du globe.

Dans la prise de conscience nationale et planétaire du rôle de l'environnement pour la survie de la planète, les outre-mers offrent des atouts concrets à la France. Non seulement ils représentent 90 % de la biodiversité et placent la France au second rang mondial pour l'importance des eaux territoriales mais ils offrent bien d'autres particularités. Il faut rester vigilant à ce que ces atouts ne deviennent pas des handicaps qui s'ajouteraient aux autres. Oui, notre développement économique est indissociable des réalités environnementales et sociétales, mais non, il n'appartient pas qu'à l'État de veiller au juste équilibre mais aussi à ceux qui le piloteront. C'est pourquoi nous devrions nous demander à chaque titre, à chaque chapitre, s'il peut s'appliquer outre-mer ou s'il faut l'adapter. C'est aussi pourquoi il faut être attentif aux amendements des collègues ultramarins. Mon île, qui a choisi la voie de l'autonomie, a reçu du législateur le droit de fixer les règles dans certains domaines, dont l'environnement. Mais ce texte nous intéresse et les décisions nationales nous inspirent et nous accompagnent.

Je félicite le ministre d'État d'être l'initiateur de cette belle et grande réforme. Le vote en première lecture a permis de mesurer l'adhésion à son projet. On en a depuis mesuré l'impact : cette loi marquera un tournant, un passage obligé vers une meilleure intégration dans l'environnement et un plus grand respect envers l'homme comme envers la planète. Le Premier ministre a eu raison de le dire, seule la mise en place du Grenelle est capable de réorienter le modèle français vers la croissance. Vous pouvez compter sur notre soutien. (Applaudissements à droite)

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

M. Jacques Muller.  - Nous arrivons au terme des pérégrinations du Grenelle I. Oui, il fallait lancer cette initiative qui a mobilisé la société et donné une parole publique aux associations qui se battent pour l'environnement, notre cadre de vie, la beauté de la nature, les conditions de notre survie. Cette réussite a permis un début de révolution culturelle : l'environnement devient une composante incontournable du développement durable, ou plutôt soutenable, dont beaucoup parlent sans rien faire... La déception est à la mesure du bouillonnement culturel. Les faits sont là : le péché originel du Grenelle est la mise à l'écart du lobby industriel nucléaire, sanctuarisé sur décision du Président de la République, mis à l'abri de tout débat contradictoire. De même, le texte ne fait pas mention de la finitude de la planète et des ressources naturelles, y compris en uranium. La prise de conscience n'a pas vraiment eu lieu.

La déception des acteurs de la société civile mobilisés pour l'environnement, qui les a conduits à former avec les Verts le Rassemblement Europe Écologie dont on sait le succès, a deux origines. Premièrement, les conclusions du Grenelle ont été systématiquement rabotées par les lobbies. A cet égard, la modulation des normes d'isolation des bâtiments neufs est emblématique: sa dégradation de 60 % offre une prime au chauffage électrique. Sans aborder les vices de fond de la filière électronucléaire, cela constitue une aberration thermodynamique !

De même, autoriser la circulation des poids lourds de plus de 40 tonnes va à l'encontre du report modal et impose des charges nouvelles aux collectivités locales confrontées à la dégradation des routes. Le lobby des gros transporteurs a su se faire entendre ; tant pis pour le rail et tant pis pour les petits transporteurs qui maillent notre territoire.

La certification HVE, c'est bien, mais sans reconnaissance financière à l'appui des nouvelles pratiques agricoles, les inflexions attendues risquent de se faire attendre : la minorité des agro-managers qui dévoient les politiques agricoles conserveront leurs privilèges tandis que le label brouillera un peu plus la vision des consommateurs !

L'Assemblée nationale a supprimé l'excellente disposition introduite ici sur les agrocarburants. Qu'on les appelle biocarburants n'est d'ailleurs pas qu'une affaire de vocabulaire ; c'est mettre l'image positive du Grenelle au service de leur propre stratégie. J'espère que nous saurons rétablir la clarification requise. Maraîchers et arboriculteurs sont, avec les consommateurs, ceux qui souffrent le plus des problèmes posés par les pesticides. L'Uipp -entendez l'union de producteurs de pesticides, ou, comme ils disent, l'Union des industries de protection des plantes- a su trouver des relais pour éviter que leur chiffre d'affaires souffre trop ... mais la France conservera le titre peu envieux de champion d'Europe des pesticides. Nous ne pouvons accepter ce détricotage du Grenelle par les lobbies.

La deuxième cause de déception tient à ce que l'État s'impose une limitation de ses objectifs en matière de bâtiments à rénover, de transports et de déchets. Il sous-estime la capacité des ménages à adopter les bons gestes du tri dès que l'on met en place des dispositifs qui ont fait leurs preuves.

Quant aux transports et aux bâtiments, les choix budgétaires cassent la dynamique du Grenelle. Il faut investir ! Mais le plan de relance trahit le manque d'ambition du Gouvernement. D'ailleurs le terme de relance est impropre : on ne relance pas un véhicule dans une impasse, on se donne les moyens de changer de direction. Pourtant, seulement 700 millions, soit 2,7 % de votre plan de relance sont fléchés vers l'environnement. Comment alors convertir l'économie par l'écologie ? Mais choisir, c'est aussi réduire certaines dépenses pour en financer d'autres, par exemple faire moins pour la route et plus pour le rail, moins pour l'armement et plus pour le logement social. On ne peut pas ne pas faire le parallèle avec la timidité du Grenelle. Si le Sénat ne corrigeait pas cette dérive, nous ne pourrions voter comme en première lecture mais serions conduits à nous abstenir. Comme l'opinion, qui s'est exprimée le 7 juin, nous attendons un signal fort. (Applaudissements à gauche)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - (Applaudissements à droite) Je veux d'abord dire ma satisfaction du travail que nous avons mené ensemble suivant la nouvelle procédure pour construire un meilleur texte. Oui, monsieur Sido, la légitimité vient du Parlement et, comme l'a dit M. Jacques Blanc, l'homme doit se concilier avec la nature, ce qui implique de sortir de certaines illusions. Et, M. Guillaume l'a souligné, les Français encouragent l'action qui a été menée et marquent la volonté d'avancer. Nous avons besoin de pédagogie, a rappelé M. Fortassin. C'est pourquoi nous avons organisé un tour de France du Grenelle de l'environnement. Des efforts ont déjà été consentis pour réorienter la politique agricole commune, M. Muller peut trouver que 18 % ce n'est pas assez, mais c'est une première étape.

Nous tiendrons les engagements du Grenelle. Vous dites, madame Didier, qu'il faut aller plus loin : c'est ce que nous ferons. Le comité présidé par Joseph Stiglitz et Amartya Sen réfléchit à de nouveaux indicateurs de croissance. Le périmètre du ministère a été élargi et comprend désormais la solidarité, car il ne faut pas opposer l'écologique et le social.

Monsieur Guillaume, vous avez soulevé la question des moyens. Le Parlement a inscrit 18 milliards d'euros de crédits sur trois ans pour financer la croissance verte, et le grand emprunt y servira aussi comme le Premier ministre s'y est engagé. Il s'agit de préparer la France de demain.

En revanche, le plan de relance était destiné prioritairement à sortir la France de la crise. Près de 20 % des crédits ont malgré tout été affectés à des projets écologiques d'après les chiffres de HSCB et de BCG.

Nous avons fixé des objectifs, mais nous laissons ouvert l'éventail des moyens : cela vaut pour la gestion des déchets comme pour les économies d'énergie dans les bâtiments.

Il faut sortir, dit M. Muller, d'une France divisée en lobbies. Le moyen pour y parvenir, c'est la territorialisation et la prise en compte des réalités locales : nous avons envoyé une circulaire aux préfets afin de les engager à conclure des contrats avec les régions. Nous travaillerons en étroite collaboration avec les collectivités, notamment ultramarines.

Je tiens enfin à rassurer M. Repentin : nous continuerons lors de l'examen du Grenelle II à privilégier le dialogue et le consensus. Il faut sortit des clivages politiciens pour construire la France de demain, celle que nous lèguerons à nos enfants. (Applaudissements au centre, à droite et sur certains bancs à gauche)

Discussion des articles

M. le président.  - Je rappelle qu'aux termes de la nouvelle rédaction de l'article 48, alinéa 5, du Règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique. En conséquence sont en principe irrecevables les amendements remettant en cause les « conformes » ou ceux qui sont sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.

Article 5 (Non modifié)

L'État se fixe comme objectif de réduire les consommations d'énergie du parc des bâtiments existants d'au moins 38 % d'ici à 2020. A cette fin, l'État se fixe comme objectif la rénovation complète de 400 000 logements chaque année à compter de 2013.

I. - Tous les bâtiments de l'État et de ses établissements publics seront soumis à un audit d'ici à 2010. L'objectif est, à partir du diagnostic ainsi établi, d'engager leur rénovation d'ici à 2012 avec traitement de leurs surfaces les moins économes en énergie. Cette rénovation aura pour objectif de réduire d'au moins 40 % les consommations d'énergie et d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments dans un délai de huit ans.

L'État incitera les collectivités territoriales, dans le respect de leur libre administration, à engager un programme de rénovation de leurs bâtiments en matière d'économie d'énergie dans les mêmes conditions et au même rythme qu'indiqués à l'alinéa précédent. Les politiques engagées par les collectivités territoriales d'outre-mer feront l'objet d'un soutien spécifique afin de tenir compte des risques sismiques.

Si les conditions définies par l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat sont satisfaites, il pourra être fait appel à des contrats de partenariat pour réaliser les travaux de rénovation en matière d'économie d'énergie portant respectivement sur les 50 et 70 millions de mètres carrés de surface des bâtiments de l'État et de ses principaux établissements publics.

Le droit de la commande publique devra prendre en compte l'objectif de réduction des consommations d'énergie visé au premier alinéa, en autorisant le pouvoir adjudicateur à recourir à un contrat de performance énergétique notamment sous la forme d'un marché global regroupant les prestations de conception, de réalisation et d'exploitation ou de maintenance, dès lors que les améliorations de l'efficacité énergétique sont garanties contractuellement.

II. - L'État se fixe comme objectif la rénovation de l'ensemble du parc de logements sociaux. A cet effet, pour commencer, 800 000 logements sociaux dont la consommation d'énergie est supérieure à 230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an feront l'objet de travaux avant 2020, afin de ramener leur consommation annuelle à des valeurs inférieures à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré. Ces travaux concerneront en particulier 180 000 logements sociaux situés dans des zones définies par l'article 6 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

Seront rénovés en priorité, à l'horizon 2012, les immeubles pour lesquels le niveau des charges de chauffage payées par les locataires se situe dans le quartile le plus élevé, puis ceux dont la consommation annuelle d'énergie est supérieure à 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré.

Ce programme de rénovation est ainsi réparti :

Années

2009

2010

2011 à 2020

Logements sociaux rénovés

40 000

60 000

70 000 par an

A cet effet, une enveloppe de prêts à taux privilégiés sera accordée aux organismes bailleurs de logements sociaux. Des conventions entre l'État et ces organismes définiront les conditions de réalisation du programme et prévoiront les modalités de financement des travaux de rénovation notamment à partir des économies réalisées grâce à ces travaux de rénovation. A l'appui de ces conventions, l'État pourra attribuer des subventions qui pourront s'élever jusqu'à 20 % du coût des travaux.

Les organismes bailleurs de logements sociaux seront encouragés à recourir aux énergies renouvelables, notamment pour leur permettre des adaptations marginales à la norme fixée au premier alinéa dans le cas d'un patrimoine manifestement difficile à rénover. Un décret fixe les conditions techniques pouvant justifier de telles adaptations et les modalités de compensation applicables aux organismes concernés.

III. - Afin de permettre une rénovation accélérée du parc résidentiel et tertiaire existant en matière d'économie d'énergie, l'État mettra en place des actions spécifiques incluant un ensemble d'incitations financières destinées à encourager la réalisation des travaux. Ainsi :

a) L'État favorisera la conclusion d'accords avec le secteur des banques et des assurances, tout en mobilisant les établissements financiers publics, pour développer le financement des investissements d'économie d'énergie ; ces accords auront pour objet la mise en place de prêts aux particuliers dont les caractéristiques financières permettront le remboursement des annuités d'emprunt au moyen des économies d'énergie réalisées ; de même, l'État encouragera la simplification et l'aménagement des contrats de performance énergétique en vue de faciliter leur diffusion notamment dans les copropriétés et s'assurera de l'élaboration de modèles de contrats de performance énergétique adaptés aux différents secteurs (résidentiel, tertiaire, industriel) ; il incitera le secteur des assurances à développer une offre de produits visant à garantir le bon résultat des travaux d'efficacité énergétique à l'issue d'actions d'amélioration de la performance énergétique des bâtiments résidentiels ;

b) Les modalités d'application du crédit d'impôt sur le revenu en faveur des économies d'énergie et de l'utilisation des énergies renouvelables seront réformées, afin de favoriser la rénovation des logements donnés en location et la réalisation de travaux ou l'acquisition des équipements les plus performants ;

c) Les propriétaires de surfaces importantes affectées aux activités tertiaires, notamment les sociétés foncières, pourront être assujettis au dispositif des certificats d'économie d'énergie.

L'État incitera les bailleurs et les associations de locataires à engager une concertation pour déterminer les modalités de partage des économies d'énergie réalisées par ces investissements. Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement rendra compte au Parlement de l'état de la concertation.

En complément des mesures précitées, l'État prévoira des dispositifs d'incitations financières visant à encourager les propriétaires et les syndicats de copropriétaires à réaliser des travaux de rénovation lourde destinés à accroître la performance énergétique de logements anciens aux caractéristiques thermiques et énergétiques très dégradées. Ces dispositifs privilégieront les financements qui tirent parti des gains réalisés par les économies d'énergie. Une étude analysera par ailleurs les possibilités de mettre en oeuvre à terme des obligations de travaux de rénovation.

Le diagnostic de performance énergétique sera adapté à l'outre-mer afin de tenir compte des caractéristiques propres à ces territoires.

L'État encouragera la constitution d'un groupement de l'ensemble des acteurs du plan de rénovation des bâtiments pour suivre et adapter les chantiers de rénovation en matière d'économie d'énergie dans les secteurs résidentiel et tertiaire.

Dans un délai d'une année après la promulgation de la présente loi, l'État remettra à la représentation nationale un rapport mesurant la production en dioxyde de carbone des systèmes de climatisation et leur impact sur l'écosystème et l'environnement, singulièrement dans les collectivités d'outre-mer.

Le plan d'urgence pour l'emploi des jeunes s'orientera en priorité vers les métiers liés à l'environnement, notamment dans le domaine du bâtiment.

M. Jacques Muller.  - Cet article concerne la rénovation thermique des bâtiments existants : il s'agit d'une exigence collective puisque les bâtiments sont la première source d'émission de gaz à effets de serre. Or je constate l'inflexion regrettable de la politique du Gouvernement depuis la première lecture de ce projet de loi ; je ne reviendrai pas sur la priorité accordée au chauffage nucléaire, véritable aberration thermodynamique qui fait peser une lourde charge sur les ménages : le chauffage électrique est cher. Or le développement durable doit associer protection de l'environnement et solidarité.

Le Gouvernement et la commission ont manqué d'ambition en refusant de fixer un objectif chiffré de réduction de la consommation d'énergie dans les logements : cela risque de favoriser les rénovations a minima qu'il faudra recommencer dans quelques années, au détriment de l'environnement et de nos finances. C'est ce raisonnement qui a inspiré l'amendement n°35

Nous avions également souhaité déposer un amendement fixant une norme de 80 kilowatts-heure par mètre carré pour la consommation d'énergie dans les logements sociaux, mais la commission des finances a opposé l'article 40. M. Arthuis m'a alors suggéré de prendre la parole sur l'article. Je me contenterai de deux observations : d'une part, certains logements sociaux appartiennent au parc privé et ne relèvent donc pas de l'article 40. D'autre part, cela n'a aucun sens de dire qu'une telle mesure coûterait trop cher : tout dépend de l'argent que l'on veut y mettre ! Dans le cadre du plan de relance, présenté comme un moyen d'application du Grenelle, le Sénat a voté 200 millions d'euros de crédits pour la rénovation thermique des logements sociaux et 1,5 milliard pour l'industrie d'armement, alors que ce dernier budget avait déjà augmenté de 5 % entre 2008 et 2009 ! Si nous refusons de faire des choix, nous ne pouvons pas nous fixer d'objectifs ambitieux ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter la seconde phrase du premier alinéa de cet article par les mots :

avec pour objectif d'atteindre à l'issue des travaux une consommation moyenne d'énergie pour l'ensemble du parc de logements rénovés de 80 kilowattheures par mètre carré par an pour les cinq usages réglementés, dont 50 au maximum pour le chauffage

M. Jacques Muller.  - Il est défendu.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Si l'on veut raccourcir les débats, il serait souhaitable de se limiter à la défense des amendements effectivement déposés. Mais chacun est libre de sa parole...

L'amendement n°35 propose un objectif trop ambitieux. Il est d'ailleurs redondant avec les dispositions du texte qui fixent un objectif en termes relatifs : la consommation d'énergie dans le parc existant devra diminuer de 30 % d'ici 2020. Avis défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - Je suis désolé de devoir donner un avis défavorable lors de ma première intervention devant le Sénat. La réduction de 30 % de la consommation d'énergie des logements rénovés devrait ramener celle-ci de 240 à 150 kWh par mètre carré en moyenne. Il est louable de vouloir fixer un objectif de 80 kWh, mais celui-ci nous semble trop ambitieux dans l'état actuel des choses. (M. Jean-Jacques Mirassou ironise)

M. Jacques Muller.  - C'est au cours de mon intervention sur l'article que j'ai évoqué notre amendement qui fut déclaré irrecevable ; M. le président de la commission des finances m'y avait lui-même invité. Pour gagner du temps, je n'ai pas repris la parole sur l'amendement n°35. (Marques de soutien sur les bancs socialistes)

M. Daniel Raoul.  - Nous avions déposé le même amendement en première lecture. Si nous ne plaçons pas la barre assez haut, jamais nous ne pourrons battre des records !

A la suite d'un vote à main levée déclarée douteux, l'amendement n°35, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°44, présenté par M. Maurey et les membres du groupe UC.

I. - Après la première phrase du deuxième alinéa du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

Les collectivités territoriales qui engagent un programme de rénovation de leurs bâtiments en matière d'économie d'énergie pourront bénéficier d'une enveloppe de prêts à taux privilégiés.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Daniel Soulage.  - Afin d'inciter les collectivités territoriales à engager un programme de rénovation thermique de leur patrimoine immobilier, nous proposons qu'elles puissent bénéficier comme les bailleurs sociaux de prêts bonifiés.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les prêts à taux aidés sont pour l'instant destinés aux particuliers et non aux collectivités. Cet amendement aurait de lourdes conséquences budgétaires, et l'on peut douter de sa recevabilité au titre de l'article 40. Avis défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Daniel Soulage.  - Je retire l'amendement.

M. Daniel Raoul.  - Je le reprends, même si j'ai peu d'espoir sur son sort. Pourquoi l'article 40 n'a-t-il pas été invoqué sur cet amendement comme sur le nôtre ? La jurisprudence de la commission des affaires économiques est à géométrie variable...

M. Jean Desessard.  - Elle varie selon la couleur politique ! Il n'y a plus de démocratie !

M. Daniel Raoul.  - Il faut que cela cesse, et que nous soyons tous soumis à la même règle.

En outre, il serait aberrant de rejeter cette mesure conforme aux dispositions déjà adoptées en commission dans le cadre du Grenelle II. Un peu de cohérence ! (M. Roland Courteau approuve) Il est un peu étrange que la majorité revienne dans le Grenelle II sur les avancées du Grenelle I et réciproquement ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Dominique Braye.  - Les débats en commission varient selon les sénateurs présents... (Exclamations à gauche) Ne préjugeons pas du Grenelle II. Nous verrons bien à l'automne, lors de son examen, s'il est cohérent avec le Grenelle I. Je vérifierai alors, en fonction des amendements sur le problème des kWh, si votre raisonnement est totalement cohérent. Mais je crains que cela ne soit pas tout à fait le cas... (Exclamations à gauche)

M. Daniel Raoul.  - Passons outre cette provocation de M. Braye... Je ne comprends pas le sens de la réforme constitutionnelle : à quoi servent le travail et le vote des amendements en commission en présence du Gouvernement ? Les travaux de commission sont clairement actés...

M. Dominique Braye.  - La loi est votée dans l'hémicycle, et non en commission ! C'est écrit clairement dans la Constitution !

L'amendement n°44 rectifié est adopté. (Murmures de satisfaction à gauche)

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer le troisième alinéa du I de cet article.

Mme Évelyne Didier.  - Si la mention de « recours privilégié » aux partenariats public-privé a été supprimée du texte en première lecture, l'intention du Gouvernement est clairement de développer ces partenariats pour aller plus vite. Or le dogme de la RGPP consistant à réduire l'intervention de l'État à la portion congrue est contraire au volontarisme affiché de ce texte. Comment mettre en oeuvre le Grenelle sans moyens ? L'usager sera le premier perdant puisqu'il devra se soumettre, pour toute transaction, à des audits réalisés par des organismes privés dont l'indépendance et la qualité ne sont pas garanties. Quel sera le niveau de qualification demandé à ceux qui pratiquent l'audit ? De quel recours disposera l'usager ? Ensuite, si l'État renonce à ses capacités d'expertise dans ce domaine comme dans d'autres tels que le cadastre et les douanes, comment garantir à nos concitoyens l'équité et la probité en matière environnementale ? D'où cet amendement que nous vous soumettons de nouveau.

M. Jean Desessard.  - Très bien !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le groupe CRC est opposé aux partenariats public-privé auxquels la commission est favorable car ils permettront aux collectivités d'aller plus vite, plus loin. Je respecte cette différence de philosophie, mais l'avis de la commission ne peut qu'être défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jean Desessard.  - Pas bavard, le nouveau ministre.

M. le président.  - M. Apparu est libre de sa parole.

M. Jean Desessard.  - Libre de son silence, surtout !

Mme Évelyne Didier.  - Pour être honnête, certaines collectivités dirigées par la gauche recourent aussi aux partenariats public-privé, tout en pensant comme nous. Mais cette procédure entraîne, à terme, une augmentation considérable des dépenses de fonctionnement des collectivités. Cela ne vous pas a échappé...

M. le président.  - Je suis saisi d'une demande de scrutin public par la commission. (Murmures amusés à gauche)

M. Jean Desessard.  - Les bancs sont clairsemés à droite...Du temps de Karoutchi, les gens venaient !

M. François Marc.  - Rendez-nous Karoutchi !

L'amendement n°54 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 231
Majorité absolue des suffrages exprimés 116
Pour l'adoption 44
Contre 187

Le Sénat n'a pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la deuxième phrase du premier alinéa du II de cet article, remplacer les mots :

230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an

par les mots :

190 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an

M. Roland Courteau.  - Les immeubles classé en D, importants au regard des charges locatives, doivent bénéficier comme les immeubles de catégorie E, F et G de l'éco-prêt logement social de la Caisse des dépôts pour améliorer leurs performances énergétiques. Nous proposons donc d'abaisser de 230 kWh à 190 kWh le seuil à partir duquel les logements sont éligibles.

M. Jean Desessard.  - Bravo !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement part certainement d'une bonne intention, mais je doute de son intérêt. Mieux vaut, éventuellement via des partenariats public-privé, s'intéresser aux plus grosses passoires énergétiques plutôt qu'aux logements qui se rapprochent de l'objectif de 150 kWh. Entre 190 et 150 kWh, la marge est faible... Enfin, vous conservez l'objectif de 800 000 logements, ce qui signifie que 2,4 millions de logements en plus seraient concernés !

M. Jean Desessard.  - Ce serait plus facile !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Certes, monsieur Desessard, mais il faut toujours s'attaquer au plus dur ! Le devoir coûte ! (Exclamations à gauche) Bref, avec cet amendement, nous nous éloignerions de nos objectifs prioritaires. Donc, défavorable.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Lors du Grenelle, il a été décidé de porter l'effort en priorité sur les passoires énergétique, et donc les catégories E, F et G. La convention signée le 26 février, notamment avec le président Repentin, confirme l'affection de ce prêt à 1,9 % à 800 000 logements. Vous voulez modifier les priorités et ouvrir le dispositif à 2,4 millions de logements supplémentaires, ce chiffre est considérable !

Si 2,4 millions de logements supplémentaires deviennent éligibles, sur un total de 4 millions, nous ouvrons la mesure à 80 % du parc social et il n'y a plus de priorité ! Défavorable.

M. Dominique Braye.  - M. Repentin, président de l'Union sociale pour l'habitat, défend sa boutique...

M. Didier Guillaume.  - Thierry Repentin est sénateur !

M. Dominique Braye.  - ...et cherche des financements pour rénover : je peux le comprendre. Mais que M. Desessard applaudisse m'étonne ! Pour réduire la consommation d'énergie dans les habitations, il faut à l'évidence commencer par rénover les logements qui consomment le plus. J'aurais été plus embarrassé par un amendement visant à faire descendre les immeubles aujourd'hui à 190 kilowatts-heure à moins de 100, car une telle proposition aurait été grenello-compatible. Celle-ci ne l'est pas. Monsieur Muller, que ne proposez-vous de passer à 50 kilowatts-heure partout ? Tous les appartements seraient à énergie positive, ce serait encore plus grenello-compatible !

Soyons réalistes, les bailleurs ne pourront tout faire, ils doivent se concentrer sur le plus urgent.

M. Thierry Repentin.  - En février dernier, les ministères, la Caisse des dépôts et le monde HLM ont signé un accord pour réhabiliter les logements les moins vertueux en consommation d'énergie. Le ministre a employé le mot de « passoires énergétiques ».

Mais le parc social consomme déjà en moyenne 30 % de moins que le parc traditionnel privé. On a résolu de rénover 800 000 logements d'ici 2020, dont 100 000 en 2009 et 100 000 en 2010. Les moins vertueux, les E, F, G sont inclus dans le Grenelle I. Mais en nous limitant à ces catégories, des régions entières sont exclues des aides, je pense au Nord-Pas-de-Calais, dont 80 % du parc social est en C, B, D ou A.

L'accord signé tend à améliorer l'état du parc, à préserver le pouvoir d'achat des locataires et à relancer le bâtiment. Je rectifie l'amendement pour remplacer le chiffre de 190 kwh au mètre carré par 210. Ce serait un compromis. Des milliers de dossiers sont prêts. Ma proposition a un autre avantage : grâce à elle, le Gouvernement pourrait se vanter de donner du travail au secteur du BTP !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous visons les logements passoires ; vous voulez donner à tout le monde. Mais le plus urgent, ce sont les E, F, D !

M. Thierry Repentin.  - Permettez d'agir à ceux qui veulent le faire !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'enveloppe étant limitée, je maintiens l'avis défavorable.

M. Gérard César, vice-président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.  - Nous demandons un scrutin public.

M. Daniel Raoul.  - Quelle sera la règle du jeu cet après-midi et ce soir : un scrutin public sur chaque amendement, pour cause d'absence de la majorité ? Nous voyons quel intérêt la majorité sénatoriale porte au Grenelle ! (Applaudissements sur les bancs socialistes) Du reste le Grenelle II marque des reculs par rapport au Grenelle I. Il est étrange que les ministres qui défendent ce texte ne parviennent même pas à obtenir une majorité présente, fût-elle passive !

M. Jean Desessard.  - La priorité, c'est que tous les appartements soient économes en énergie.

M. Dominique Braye.  - Et que tout le monde soit riche.

M. Jean Desessard.  - Exactement ! Pas seulement quelques-uns, c'est cela qui nous différencie !

Là où des travaux moins lourds sont possibles, permettons qu'ils soient réalisés. Cela me semble tellement évident : je m'étonne que M. Braye ne m'applaudisse pas. (Rires à gauche)

M. Dominique Braye.  - Ce n'est pas une bonne façon de légiférer. Nous demandons à tout propos des études d'impact au Gouvernement, or ici, 210 ou 190 kilowatts, nous ne savons même pas quelle différence cela fera ! Si l'USH s'engage à réhabiliter les trois quarts des logements, très bien ; mais nous savons qu'elle n'en a pas les moyens. Donc, concentrons nos efforts sur les appartements les plus énergivores. Tel est le sens du Grenelle I.

M. Jean Desessard.  - Vous n'êtes pas l'oracle du Grenelle !

M. Dominique Braye.  - Il s'agit de réduire le nombre des passoires thermiques. Par cohérence avec le Grenelle II, qui a rejeté la mesure proposée dans l'amendement, il faut la refuser ici.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Ce sont 800 000 logements qui sont visés par le texte, à l'horizon 2020. Si l'on ouvre cette enveloppe à d'autres catégories, les cas les plus faciles seront traités, ceux de la catégorie D, et beaucoup d'autres resteront sur le carreau.

A la demande de la commission, l'amendement n°3 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 340
Majorité absolue des suffrages exprimés 171
Pour l'adoption 154
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Didier Guillaume.  - Rappel au Règlement au nom de notre groupe !

D'abord, monsieur Braye, il n'y a ici aucune confusion des genres. Il n'y a ici que des sénateurs qui légifèrent et il n'y a pas plus de lobbies d'un côté que de l'autre. C'est M. Courteau qui a déposé cet amendement, ce n'est pas M. Repentin. Et M. Repentin siège ici comme sénateur, même s'il a d'autres fonctions dans d'autres cénacles.

Notre amendement posait peut-être un problème, nous en sommes conscients, mais la question était claire. Nous sommes d'accord pour cibler les logements prioritaires mais comme certains territoires auront du mal à s'exécuter, nous proposons d'élargir le champ de la mesure. Bien sûr, l'enveloppe est bloquée, mais nous préférons qu'on la dépense à 100 % plutôt qu'à 80 %.

Nous nous sommes engagés pour la réussite de ce Grenelle et nous voulons le faire aboutir. Le ministre et le rapporteur ont dit que, sur un tel sujet, il convenait de dépasser nos clivages politiques. Et voilà que chaque amendement reçoit un avis défavorable et donne lieu à un scrutin public ! Vous nous demandez de faire sortir quelques-uns d'entre nous pour que le débat se poursuivre ! Nous préférons une suspension de séance pour que vous récupériez quelques-uns des vôtres. (M. Alain Gournac proteste)

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je suis d'accord avec vous sauf que vous ne pouvez pas m'accuser d'avoir repoussé l'amendement pour des raisons politiques. J'ai donné mes arguments. Pour le reste, il est vrai que je souhaite que, sur ce sujet, nous nous rejoignons par delà nos divergences politiques.

M. le président.  - J'appelle le Sénat à la raison. Tout le monde entre et sort, on est toujours à une voix de majorité dans un sens ou dans un autre. Trois commissions sont en train de siéger en ce moment. Je m'en remets donc à votre sagesse. Il n'est pas bon pour le Sénat de travailler à coups de scrutins publics. S'il pouvait y avoir un accord tacite pour assurer une voix de majorité, ce serait l'idéal. (Rires sur les bancs socialistes) A défaut, il faut suspendre.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Il y a une sérieuse contradiction : d'une part, les ministres et le rapporteur ont insisté sur l'audience quasi planétaire de ce texte ; d'autre part, nous sommes en train de chercher une majorité introuvable à une voix près. Le déroulement de la séance n'est pas à la hauteur des enjeux annoncés lors de la discussion générale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.  - En tant que président de la commission, j'étais à la Conférence des Présidents ; je ne pouvais donc être en séance. Je demande une brève suspension de séance pour trouver un équilibre dans l'hémicycle.

La séance, suspendue à 17 h 25, reprend à 17 h 40.